B. L'ACCROISSEMENT DU DÉLAI D'EXAMEN DES DEMANDES D'ASILE

Le coût global de la prise en charge des demandeurs d'asile résulte non seulement du volume de la demande, mais également du délai de traitement de ces demandes. A cet égard, la situation s'est récemment détériorée.

1. Un délai de traitement des demandes par l'OFPRA qui a recommencé à augmenter progressivement.

Les missions de l'OFPRA figurent désormais dans le contrat d'objectifs et de moyens qui a été conclu entre l'OFPRA et l'Etat le 9 décembre 2008 conformément à la décision du conseil de modernisation des politiques publiques. Le contrat prévoit également le renseignement trimestriel d'un certain nombre d'indicateurs de suivi, qui permettront à un comité de suivi du contrat, qui se réunira à mi-parcours de son exécution, d'évaluer le respect des objectifs fixés. Il fixe enfin les moyens affectés à l'Office sur la période, en termes d'effectifs (les effectifs demeureront stables de 2009 à 2011) et de crédits alloués par l'État dans le cadre de sa subvention annuelle pour charges de service public (32M€ en 2010 contre 30,5M€ en 2009).

Entre 2006 et 2008, les délais moyens « toutes décisions » (comprenant les réexamens) et « premières demandes » étaient en constante diminution, pour atteindre respectivement 127,1 jours et 100,5 jours en 2008. En 2009, ce délai est cependant en augmentation par rapport à 2008. Pour le 1 er semestre 2009, les délais moyens de traitement sont respectivement de 140,1 jours et de 116,8 jours.

Cette nouvelle évolution des délais est liée à l'accroissement du nombre de dossiers en instance. Face à l'augmentation des premières demandes depuis le mois de septembre 2008, l'activité de l'Office, malgré une multiplication du nombre de décisions (+9,5% pour le 1er semestre 2009), n'est pas en mesure de résorber le flux . Parallèlement à cette augmentation, l'âge médian du stock est passé de 74 jours en septembre 2008 à 92 jours en juin 2009. Ce vieillissement du stock a donc des conséquences inévitables sur le calcul du délai moyen de traitement.

Année

Délai moyen sur 1ères demandes

Délai moyen toutes décisions

Délai médian

2002

324.0

Non disponible

Non disponible

2003

258.0

2004

130.0

91

2005

108.0

83

2006

140.8

110.0

106

2007

130.2

105.1

97

2008

127.1

100.5

108

2009 (*)

140.1

116.8

130

2009 (*) Données provisoires 6 mois

Source : MIIINDS

Le projet annuel de performance (2009) du programme « Immigration et asile » a fixé, comme valeur cible pour le délai moyen de traitement des demandes d'asile, 95 jours en 2009, 93 jours en 2010 et 90 jours en 2011. En tenant compte de l'évolution de la demande au cours du premier semestre 2009, il est peu probable que l'objectif de 95 jours puisse être atteint en 2009 . En effet, la productivité de l'office a déjà beaucoup progressé depuis 2008 et, avec un nombre d'agents instructeurs qui reste fixé à 110, qui rendent chacun près de deux décisions par jour, il est peu probable que le rythme de traitement des demandes puisse encore être augmenté.

Cependant, l'augmentation du délai de traitement devant l'OFPRA reste relativement contrôlée est s'avère finalement moins préoccupante que la persistance de délais beaucoup plus longs de traitement des demandes par la Cour nationale du droit d'asile.

2. Une réforme de la Cour nationale du droit d'asile qui n'a pas encore porté ses fruits

L'article 29 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile a modifié la dénomination de la Commission des recours des réfugiés devenue la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) .

Depuis le 1er janvier 2009, la CNDA est administrativement et financièrement indépendante de l'OFPRA 9 ( * ) . Le budget et les personnels de la Cour nationale du droit d'asile sont rattachés au budget et au personnel du Conseil d'Etat. Avec son rattachement au programme "Conseil d'Etat et autres juridictions administratives" la Cour nationale du droit d'asile s'est engagée dans une démarche de diminution de ses délais de jugement qui s'appuie, notamment, sur une réorganisation de son fonctionnement et une amélioration des procédures d'instruction et du déroulement des audiences.

Ainsi, la CNDA a réorganisé son fonctionnement avec l'arrivée de dix nouveaux magistrats 10 ( * ) , dont 7 issus des corps des tribunaux administratifs et 3 de l'ordre judiciaire, qui sont affectés à temps plein à la Cour et qui assurent, depuis le 1er septembre 2009, la présidence des formations de jugement. Cette fonction était jusqu'alors remplie par environ quatre-vingts présidents vacataires, qui par ailleurs exerçaient une profession ou étaient à la retraite. Chacun des nouveaux magistrats assure la présidence de deux à trois audiences par semaine, alors que les présidents non professionnels conduisent au mieux quatre à cinq audiences par mois. Grâce à cette intensification des audiences ayant le même président, les affaires qui sont l'objet d'un renvoi pourront être examinées à l'issue d'un délai supplémentaire de seulement quelques semaines, contre trois à quatre mois auparavant. Les dix présidents permanents peuvent ainsi conduire entre 35 et 40 % des audiences.

Par ailleurs, la CNDA a procédé à une réforme du déroulement des audiences , en supprimant notamment le nombre minimum d'affaires enrôlées par audience, afin de diminuer le taux élevé de renvois (36 % constaté en 2009) qui est un facteur d'allongement du délai de traitement. En effet, la disposition de l'arrêté interministériel du 20 juin 2008 fixant un nombre minimum de 15 affaires inscrites par audience conduisait, du fait de la présence quasi systématique d'un avocat et de la complexité croissante des dossiers, au renvoi de nombreuses affaires à une audience ultérieure. Le président de la juridiction peut désormais fixer le nombre d'affaires qui peuvent être raisonnablement traitées au cours d'une audience en fonction de leur plus ou moins grande complexité. En contrepartie, la juridiction organisera un plus grand nombre d'audiences.

Malgré ces réformes, les délais de jugement de la CNDA sont encore très longs . Cependant, une diminution a été amorcée. Le délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock, calculé en divisant le nombre de dossiers en stock en fin d'année par la capacité annuelle de jugement, était de 10 mois et 17 jours en 2007, de 9 mois et 25 jours en 2008 et devrait atteindre 9 mois en 2009 , quand l'objectif de 8 mois et 15 jours figurait dans le projet annuel de performances pour 2009. Selon le projet annuel de performances pour 2010, cet accroissement par rapport aux prévisions initiales s'explique, d'une part, par l'augmentation du nombre de recours (en progression de 14 % sur les sept premiers mois de 2009 par rapport à la même période de 2008), d'autre part par la hausse du taux de renvoi des affaires enrôlées (c'est-à-dire dont la date de l'audience a été fixée) qui dépasse 36 %, quand elle était de 29,4 % un an plus tôt, hausse due à l'augmentation du nombre des affaires plaidées, conséquence de l'élargissement de l'aide juridictionnelle.

La proportion des affaires en stock enregistrées depuis plus d'un an devant la Cour est aussi en diminution : supérieure au tiers du stock fin 2007, elle s'est établie au-dessus du quart en 2008 et devrait rester à ce niveau en 2009.

Il paraît indispensable que la CNDA poursuive dans cette voie afin de continuer à faire baisser le délai de traitement plus rapide des demandes. Il convient à cet égard de souligner que l'embauche des dix nouveaux magistrats professionnels est encore récente, et que les progrès attendus de ce nouvel apport ne se manifesteront pleinement que dans le courant de l'année 2010.

3. La hausse du taux d'annulation des décisions de l'OFPRA par la CNDA

Le taux d'annulation des décisions de l'OFPRA par la CNDA a sans doute une influence sur le taux d'appel devant cette juridiction et in fine sur le délai de traitement des demandes. Or, ce taux ne cesse d'augmenter :

Année

Taux d'annulation

2006

15,6%

2007

19,9%

2008

25,6%

1 er semestre 2009

26%

Source : MIIINDS

Il parait certes naturel que la CNDA, juridiction de plein contentieux qui se prononce sur l'ensemble des éléments de fond et de fait versés aux dossiers, puisse avoir connaissance d'éléments dont l'OFPRA ne disposait pas en prenant sa décision et qui sont de nature à justifier une annulation.

De même, l'assistance d'un avocat lors de la procédure devant la CNDA joue sans doute un rôle important . Il est notable à cet égard de constater que la progression du taux d'annulation est proportionnelle à l'augmentation du taux de constitution des avocats devant la juridiction : 80 % des requérants bénéficient aujourd'hui du concours d'un avocat durant la procédure d'instruction de leur recours et lors de l'audience et 96 % des décisions d'annulation rendues au cours des cinq premiers mois de 2009 concernent des requérants assistés d'un avocat.

Il paraît cependant indispensable de progresser dans le sens d'une approche commune de l'OFPRA et de la CNDA, notamment sur l'évaluation de la situation dans les pays d'origine, pour faire baisser le taux d'annulation des décisions de l'OFPRA.

* 9 En application de la loi de finances pour 2009 d'un point de vue financier et du décret n°2008-1481 du 30 décembre 2008 relatif à la Cour nationale du droit d'asile du point de vue administratif et de sa gestion.

* 10 En vertu de l'article 15 de la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures.

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