Avis n° 646 (2018-2019) de Mme Pascale BORIES , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 9 juillet 2019

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N° 646

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 juillet 2019

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE après engagement de la procédure accélérée, relatif à l' énergie et au climat ,

Par Mme Pascale BORIES,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; M. Claude Bérit-Débat, Mme Pascale Bories, MM. Patrick Chaize, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart , vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, MM. Guillaume Chevrollier, Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Jordi Ginesta, Éric Gold, Mme Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mme Christine Lanfranchi Dorgal, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Philippe Madrelle, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean-Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Mme Évelyne Perrot, M. Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM. Jean-Paul Prince, Christophe Priou, Mme Françoise Ramond, M. Charles Revet, Mmes Esther Sittler, Nadia Sollogoub, Michèle Vullien .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

1908 , 2032 , 2031 , 2063 et T.A. 301

Sénat :

622 , 657 et 658 (2018-2019)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

I - Une « petite loi énergie » aux ambitions limitées

A - Le projet de loi initial visait essentiellement à prendre en compte la révision de la programmation pluriannuelle de l'énergie

Transmis le 1 er juillet au Sénat, le projet de loi relatif à l'énergie et au climat comptait initialement 8 articles . Il visait principalement à prendre en compte la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui est actuellement en cours de révision.

Aux termes de l'article L. 141-1 du code de l'énergie, « la programmation pluriannuelle de l'énergie, fixée par décret , établit les priorités d'action des pouvoirs publics pour la gestion de l'ensemble des formes d'énergie sur le territoire métropolitain continental ». Elle constitue donc un outil de pilotage visant à atteindre les objectifs de politique énergétique fixés aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 du code de l'énergie.

En l'état actuel du droit, l'article L. 100-4 prévoit la réduction de la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50 % à l'horizon 2025. Or, le projet de PPE publié en janvier 2019 indique que cet objectif apparaît impossible à atteindre 1 ( * ) , « sauf à risquer des ruptures dans l'approvisionnement électrique de la France ou à relancer la construction de centrales thermiques à flamme, qui serait contraire à nos objectifs de lutte contre le changement climatique ». Le Gouvernement propose donc de décaler cet objectif à 2035.

Or, comme indiqué précédemment, la PPE est un acte règlementaire , qui ne saurait entrer en contradiction avec les objectifs fixés par la loi. Le projet de loi relatif à l'énergie et au climat vise donc à modifier la loi en ce sens. Il devait donc initialement être une « petite loi » modifiant certains objectifs de la politique énergétique.

Il s'est toutefois progressivement enrichi , d'abord par une lettre rectificative 2 ( * ) lui ajoutant 4 articles relatifs aux tarifs réglementés de vente de gaz et d'électricité, puis au cours de son examen à l'Assemblée nationale, qui a notamment adopté plusieurs dispositions relatives à la rénovation énergétique des bâtiments. Le projet de loi compte désormais 55 articles .

B - Le champ de saisine de la commission

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a reçu une délégation au fond de la commission des affaires économiques sur 9 articles , notamment les articles 2 sur le Haut Conseil pour le climat et 4 sur la réforme de l'autorité environnementale.

La commission s'est par ailleurs saisie pour avis de plusieurs articles, parmi lesquels notamment :

- l'article 1 er relatif à la révision de certains objectifs de politique énergétique ;

- l'article 1 er bis A , qui crée une loi de programmation fixant les priorités d'actions et la marche à suivre pour répondre à l'urgence écologique et climatique ;

- l'article 1 er quater relatif au plan stratégique d'EDF ;

- l'article 3 , qui vise à permettre la fermeture des centrales au charbon d'ici 2022 par le plafonnement de la durée de fonctionnement des centrales les plus polluantes.

II - Un projet de loi insuffisant au regard de l'urgence climatique

A - Des délais contraints qui desservent l'intention de ce projet de loi

Malgré la multiplication par sept du nombre d'articles, la commission n'a disposé que d'une semaine pour étudier le texte tel qu'adopté à l'Assemblée nationale.

La rapporteure regrette que des délais si courts soient imposés au Sénat. Ces délais contraints traduisent un important - et inquiétant
- manque de considération à l'égard du travail parlementaire et desservent l'ambition de ce projet de loi de répondre à l'urgence écologique et climatique.

B - Des ambitions modestes face aux attentes des citoyens

Le projet de loi relatif à l'énergie et au climat entend répondre à l'urgence climatique et écologique. Pourtant, force est de constater que les mesures proposées ne sont pas à la hauteur des ambitions auxquelles il prétend répondre .

1. De nouveaux objectifs ambitieux qui peinent à trouver une réalité concrète

En premier lieu, la fixation de nouveaux objectifs ambitieux et a fortiori l'inscription de l'objectif d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 relèvent évidemment d'une intention louable, mais elles poussent à s'interroger quant à la portée concrète de ces engagements . En effet, le premier rapport du Haut Conseil pour le climat 3 ( * ) met en évidence l'insuffisance de l'action de la France pour contenir le réchauffement climatique planétaire à 1,5 ou 2°C . Il souligne par ailleurs le caractère isolé et peu opérationnel de la stratégie nationale bas carbone 4 ( * ) (SNBC). Ainsi, d'après le rapport « la première SNBC n'a pas permis de respecter le premier budget carbone que la France s'était fixé ».

À cet égard, la rapporteure regrette que la définition de tels objectifs ambitieux peine à trouver une déclinaison dans nos territoires . En effet, il est frappant de voir à quel point ces grands objectifs sont pensés sans y intégrer une dimension territoriale. Pourtant, et comme le souligne le projet de stratégie nationale bas-carbone, « plusieurs études s'accordent à dire que 70 % des actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont liées à une décision de niveau local ». Le rapport du Haut Conseil pour le climat souligne en effet que « la coordination, l'harmonisation et la mise en regard des différents plans pourraient être encouragées dans la durée pour assurer la cohérence des actions conduites à toutes les échelles ».

2. La création du Haut Conseil pour le climat, instance déjà installée depuis novembre 2018

S'agissant du Haut Conseil pour le climat que l'article 2 du projet de loi prévoit de créer, la rapporteure rappelle que cette instance existe d'ores et déjà puisqu'il a été installé par le Président de la République le 27 novembre 2018 et que ses missions sont définies par un décret de mai 2019 5 ( * ) . Une simple inscription dans la loi d'un organisme consultatif déjà existant est une manifestation concrète de l'insuffisance de ce projet de loi, qui prétend pourtant répondre à l'urgence climatique actuelle .

La rapporteure approuve néanmoins les amendements adoptés à l'Assemblée nationale visant à encadrer la nomination des experts membres du Haut Conseil pour le climat.

3. Un important manque d'anticipation

En outre, la rapporteure déplore le manque d'anticipation des conséquences de la politique énergétique menée . À cet égard, ce projet de loi ne prévoit pas d'accompagnement spécifique pour les salariés concernés par la fermeture des 14 réacteurs nucléaires - conséquence directe de la réduction de la part du nucléaire dans le mix électrique tel qu'il est actuellement décliné dans la PPE - ni de feuille de route pour permettre à la filière du démantèlement de répondre à la demande et d'attirer des étudiants dans ce domaine.

Si l'article 3 du projet de loi renvoie quant à lui à une ordonnance le soin de définir des mesures d'accompagnement des centrales à charbon, force est de constater que, à un an et demi de leur fermeture, une grande incertitude subsiste quant à l'avenir des salariés et des sites en question.

4. Une solution peu satisfaisante concernant l'autorité environnementale

L'article 4 vise à permettre la désignation de deux autorités distinctes pour exercer respectivement les missions d'examen au cas par cas de la nécessité de soumettre un projet à une évaluation environnementale, qui seraient confiées aux préfets, et d'évaluation de la qualité de l'évaluation environnementale, qui seraient confiées aux missions régionales d'autorité environnementale (MRAe). La solution proposée par le projet de loi ne règle toutefois pas toutes les difficultés qui pourraient se poser en termes de conflits d'intérêts lorsque le préfet chargé du cas par cas est également l'autorité compétente pour autoriser le projet.

III - La position de la commission

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a adopté 17 amendements sur les articles délégués au fond et 5 amendements sur les articles dont elle s'est saisie pour avis visant à améliorer ce texte selon 3 axes.

A - Anticiper les conséquences de la fermeture des réacteurs nucléaires et favoriser le développement des énergies renouvelables

En premier lieu, la commission a adopté un amendement COM-218 visant à ajouter à la politique énergétique l'objectif d' assurer la production d'une électricité décarbonée . En effet, la priorité doit être donnée à la production d'une telle électricité décarbonée pour respecter nos engagements dans le cadre de l'Accord de Paris. S'il est prévu de fermer 14 réacteurs nucléaires d'ici 2035, ces fermetures ne sauraient conduire, paradoxalement, à augmenter les émissions de gaz à effet de serre lors des pointes de consommation.

La commission a également cherché à pallier le manque d'anticipation du Gouvernement vis-à-vis de la fermeture des réacteurs nucléaires. Elle a ainsi adopté un amendement COM-219. Cet amendement prévoit la publication, en annexe de chaque PPE, d'une feuille de route relative à la stratégie de démantèlement des réacteurs concernés, afin d'anticiper les conséquences de ces fermetures.

Elle a également adopté un amendement COM-221, qui modifie l'article 1 er quater et qui prévoit que le plan stratégique d'EDF détaille les dispositifs d'accompagnement mis en place pour les salariés concernés par la fermeture des réacteurs nucléaires. La réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique doit en effet aller de pair avec un véritable accompagnement des salariés concernés .

En outre ; l'amendement COM-238 vise à favoriser le développement des installations photovoltaïques dans les zones littorales dégradées définies par décret . Cette mesure s'inscrit dans la continuité des travaux du Sénat sur la proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux de Michel Vaspart 6 ( * ) .

B - Clarifier les modalités d'action du Haut Conseil pour le climat

10 amendements adoptés par la commission visent en outre à clarifier les modalités d'action du Haut Conseil pour le climat . Les amendements COM-224 et COM-228 visent notamment à supprimer l'audition par les commissions permanentes du Parlement, avant sa nomination, du président du Haut Conseil pour le climat, disposition contraire à la Constitution. L'amendement COM-226 vise à intégrer dans le rapport du Haut Conseil pour le climat un volet relatif à la formation et à l'emploi. Les amendements COM-230 et COM-229 visent respectivement à donner plus de souplesse au travail du Haut Conseil, en lui permettant de rendre des avis et non uniquement des rapports, et à clarifier les suites données par le Gouvernement au rapport du Haut Conseil pour le climat.

C - Sécuriser la réforme de l'autorité environnementale

S'agissant de l'article relatif à la réforme de l'autorité environnementale , l'amendement COM-234 vise à sécuriser la solution juridique retenue par le Gouvernement, en précisant que l'autorité chargé de l'examen au cas par cas doit bénéficier d'une autonomie fonctionnelle par rapport à l'autorité compétente pour autoriser le projet .

Enfin, un amendement adopté à l'article 1 er octies prévoit que le rapport que le Gouvernement remettra au Parlement lors de la présentation du projet de loi de finances devra mesurer les incidences de ce projet sur l'atteinte des objectifs de développement durable (ODD) définis par les Nations Unies et que la France s'est engagée à atteindre d'ici 2030.

EXAMEN DES ARTICLES DÉLÉGUÉS AU FOND

CHAPITRE IER

Objectifs de la politique énergétique
Article 1er quinquies
(article L. 131-3 du code de l'environnement)

Inscription de la lutte contre le changement climatique dans les missions de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie

Objet : cet article inscrit la lutte contre le changement climatique dans les missions de l'ADEME.

I. Une définition des missions de l'ADEME devenue obsolète

Aux termes de l'article L. 131-3 du code de l'environnement, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) « exerce des actions, notamment d'orientation et d'animation de la recherche, de prestation de services, d'information et d'incitation dans chacun des domaines suivants :

1° La prévention et la lutte contre la pollution de l'air ;

2° La prévention de la production de déchets, dont la lutte contre le gaspillage alimentaire ; la gestion des déchets ; la transition vers l'économie circulaire ; la protection des sols et la remise en état des sites pollués ;

3° Le réaménagement et la surveillance d'une installation de stockage de déchets ultimes autorisée après le 14 juillet 1992, lorsque ces opérations sont rendues nécessaires du fait d'une défaillance ou d'une insuffisance des garanties de l'exploitant ;

4° La réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale ;

5° Le développement des technologies propres et économes ;

6° La lutte contre les nuisances sonores. »

Si le 2° a notamment été modifié par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte 7 ( * ) , qui y a ajouté les notions de lutte contre le gaspillage alimentaire et de transition vers l'économie circulaire, les points 1°, 4°, 5° et 6° n'ont pas été modifiés depuis la loi du 19 décembre 1990 8 ( * ) .

II. La position de la commission : actualiser les domaines de l'action de l'ADEME pour mieux refléter la réalité de ses missions

Inséré à l'Assemblée nationale en commission par un amendement du rapporteur 9 ( * ) , l'article 1 er quinquies ajoute parmi la liste des domaines d'actions de l'Ademe la lutte contre le réchauffement climatique .

La commission est favorable à l'adoption de cet article, qui permet utilement de faire correspondre les domaines d'action de l'agence à la réalité de ses travaux. Elle a adopté l'amendement COM-222 pour ajouter, par cohérence, l'adaptation au changement climatique .

La commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 1er octies

Rapport remis par le Gouvernement sur les incidences positives et négatives du projet de loi de finances sur le réchauffement climatique

Objet : cet article prévoit que le Gouvernement remet un rapport sur les incidences positives et négatives du projet de loi de finances sur le réchauffement climatique.

I. Un rapport complémentaire au rapport prévu à l'article 206 de la loi de finances pour 2019

L'article L. 206 de la loi de finances pour 2019 10 ( * ) prévoit, à son II, que le Gouvernement présente au Parlement, en annexe du projet de loi de finances de l'année, un rapport intitulé « Financement de la transition écologique : les instruments économiques, fiscaux et budgétaires au service de l'environnement et du climat », qui doit comporter trois volets présentant notamment :

- l'ensemble des financements publics en faveur de l'écologie, de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique inscrits dans la loi de finances de l'année en cours et dans le projet de loi de finances ;

- l'état évaluatif des moyens financiers publics et privés mis en oeuvre pour financer la transition écologique et énergétique ;

- la stratégie en matière de fiscalité écologique et énergétique.

L'article 1 er octies , inséré en commission du développement durable à l'Assemblée nationale à l'initiative de sa rapporteure 11 ( * ) , puis modifié en séance 12 ( * ) , prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, en complément de ce rapport mentionné, un rapport sur les incidences positives et négatives du projet de loi de finances sur le réchauffement climatique.

L'alinéa 2 précise que cette évaluation est notamment conduite « au regard des engagements de la France en matière d'émissions de gaz à effet de serre et des autres objectifs environnementaux fixés au niveau national ».

La remise de ce rapport n'est prévue qu'au titre de l'année 2019. Toutefois, un amendement du rapporteur 13 ( * ) adopté en séance publique a ajouté à l'article 1 er octies : « Le rapport précise les limites de l'analyse conduite, de manière à ce que le Parlement puisse étudier l'opportunité de reconduire annuellement l'exercice ».

Enfin, l'article prévoit que le Haut Conseil pour le climat rend un avis sur ce rapport.

II. La position de la commission : élargir l'objet du rapport à l'atteinte des objectifs de développement durable

La commission est favorable à la remise d'un tel rapport , qui permettra d'analyser le projet de loi de finances pour 2020 au regard des objectifs de réduction des émissions des gaz à effet de serre. Il devrait également permettre d'identifier précisément les mesures fiscales et financières à fort impact sur le réchauffement climatique.

La commission l'a complété sur deux points.

D'une part, l'amendement COM-239 élargit le champ du rapport aux incidences du projet de loi de finances sur l'atteinte des objectifs de développement durable (ODD).

Les objectifs de développement durable constituent un ensemble de 17 objectifs adoptés par les Nations Unis en 2015 dans le cadre de « l'Agenda du développement durable », qui concernent des enjeux environnementaux, économiques et sociaux, et qui se déclinent en 169 cibles souvent dotées d'indicateurs de suivi et d'objectifs chiffrés.

La France, comme les autres pays, s'est engagée à atteindre ces objectifs d'ici 2030, et à les traduire dans une feuille de route nationale présentée à l'occasion du Forum politique de haut niveau pour le développement durable de juillet 2019.

Parmi les leviers d'actions mentionnés, le projet de feuille de route prévoit de faire des ODD le « référentiel de base du développement durable en France », notamment en les intégrant dans l'évaluation des projets de loi et des documents de planification territoriale . Elle indique également que l'État doit assurer un portage politique et « renforcer la prise en compte du développement durable lors de la définition du budget ».

Il est en effet essentiel que les ODD puissent irriguer l'action publique , et soient pris en compte en amont, lors de l'élaboration du budget, et en aval, lors de l'évaluation des politiques publiques.

Telle est également la recommandation que fait le Haut Conseil pour le climat dans le rapport qu'il a publié en juin 2019, qui indique qu'il convient « d'assurer la compatibilité' des lois et grands projets nationaux avec la stratégie nationale bas-carbone » et « d'évaluer systématiquement l'impact en émissions de gaz a` effet de serre des politiques et mesures ».

Afin de mieux intégrer les ODD dans les processus budgétaires en France, il est donc utile que le rapport prévu par l'article 1 er octies indique dans quelle mesure le projet de loi finances permet de concourir à l'atteinte de ces objectifs.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019, la commission s'était déjà prêté à l'exercice en comparant les indicateurs de performance présentés dans les projets annuels de performance (PAP) annexés au projet de loi de finance aux cibles retenues dans le cadre des ODD.

D'autre part, l'amendement COM-223 précise que l'avis du Haut Conseil sur ce rapport porte notamment sur la méthodologie employée . L'évaluation des incidences du projet de loi de finances sur le réchauffement climatique dépend en effet en grande partie de la méthode utilisée pour les mesurer. Le Haut Conseil pour le climat, composé de douze experts, sera en capacité d'apporter un éclairage indépendant sur ce travail.

La commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article ainsi modifié.

CHAPITRE II

Dispositions en faveur du climat
Article 2

(Chapitre II du titre III du livre Ier du code de l'environnement, articles L. 222-1 D du code de l'environnement et titre IV du livre Ier du code de l'énergie)

Inscription dans la loi de la création du Haut Conseil pour le climat

Objet : cet article inscrit dans la loi la création du Haut Conseil pour le climat.

I. L'inscription dans la loi d'un organisme déjà créé

L'article L. 145-1 du code de l'énergie prévoit l'existence d'un comité d'experts pour la transition énergétique (CETE) , composé d'un nombre de membres inférieur à dix, nommés en raison de leurs compétences et exerçant leurs fonction à titre gratuit. Ce comité doit être consulté dans le cadre de l'élaboration du budget carbone, de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Toutefois, l'étude d'impact du projet de loi souligne les difficultés du CETE, qui « peine à construire sa visibilité et sa légitimité ».

L'article 2 du projet de loi substitue à ce comité une nouvelle instance nommée « Haut Conseil pour le climat », avec un champ d'action élargi. Ce Haut Conseil a d'ores et déjà été installé par le président de la République , le 27 novembre 2018, ses membres désignés 14 ( * ) et il a remis son Le son premier rapport 15 ( * ) en juin 2019. Ses missions et les modalités de son organisation ont été définies par un décret de mai 2019 16 ( * ) . À cet égard, le Conseil d'État 17 ( * ) a souligné dans son avis sur le projet de loi que « la création d'un tel organe, dont les attributions sont purement consultatives et dont l'intervention ne peut être regardée comme garantissant le respect d'un principe de valeur supra-réglementaire, ne relève pas, en vertu de la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, de la loi mais du pouvoir réglementaire ». Le Conseil d'État met également en évidence le fait que le Haut Conseil pour le climat s'ajoute « à plusieurs organismes consultatifs ayant une vocation voisine dans le secteur de la transition écologique ».

L'article 2 du projet de loi initial prévoyait que « Le Haut Conseil pour le climat, organisme indépendant, est placé auprès du Premier ministre » et instituait une obligation de transmission par ses membres à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique d'une déclaration d'intérêts dans les conditions prévue au III de l'article 4 de la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique 18 ( * ) .

Il prévoyait d'avancer la remise par le comité d'experts, devenu Haut Conseil pour le climat, de son rapport sur la stratégie nationale bas-carbone de 6 mois à un an avant la publication des nouveaux budgets carbone et de l'actualisation de la stratégie bas-carbone.

Il abrogeait le II de l'article L. 141-4 du code de l'énergie, qui précise que le projet de PPE est soumis pour avis au Conseil national de la transition écologique (CNTE) et au CETE.

L'article 2 a été substantiellement modifié à l'Assemblée nationale, en particulier pour inscrire dans la loi un certain nombre de dispositions prévues dans le décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat.

En ce qui concerne les membres du Haut Conseil , l'article 2 prévoit désormais qu'ils seront douze au maximum, nommés par décret en raison de leur expertise pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois et qu'ils ne pourront être sollicités ni recevoir aucune instruction du Gouvernement ou de toute autre personne publique ou privée. Il est également prévu que le président soit auditionné par les commissions permanentes du Parlement chargées de l'environnement avant sa nomination.

L'article 2 prévoit que le Haut Conseil rend un rapport annuel comportant trois volets et portant notamment sur le respect de la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre et sur la mise en oeuvre, l'efficacité et les impacts des politiques de réduction des émissions. Ce rapport, qui mettrait en perspective les actions de la France par rapport à celles des autres pays, serait remis au Premier ministre et transmis au Parlement et au Conseil économique, social et environnement. La remise de ce rapport donnerait lieu à une audition du président du Haut Conseil par certaines commissions permanentes du Parlement. Le Gouvernement présenterait dans les six mois les suites données à ce rapport au Parlement et au CESE.

S'agissant enfin de la saisine du Haut Conseil pour le climat , l'article 2 prévoit qu'il pourrait être saisi par le Gouvernement, le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat ou le président du CESE ou se saisir pour rendre un rapport « sur un projet ou une proposition de loi ou des questions sectorielles ou transversales, en particulier relatifs au financement des mesures de mise en oeuvre de la stratégie bas-carbone ou à la mise en oeuvre territoriale des politiques climatiques ».

II. La position de la commission : une nécessaire clarification des modalités d'action du Haut Conseil pour le climat

La commission a adopté 10 amendements afin de clarifier les modalités d'action et de saisine du Haut Conseil .

Outre quatre amendements rédactionnels 19 ( * ) , deux amendements visent à supprimer les auditions des membres du Haut Conseil pour le climat par les commissions permanentes du Parlement prévues à l'article 2.

D'une part, l'amendement COM-224 supprime la disposition selon laquelle le président du Haut Conseil est auditionné par les commissions permanentes chargées de l'environnement avant sa nomination. Il s'agit en effet d'une disposition contraire à la Constitution 20 ( * ) .

D'autre part, l'amendement COM-228 supprime la présentation par le président du Haut Conseil du rapport annuel aux commissions permanentes du Parlement . Une telle disposition porte atteinte à l'autonomie du travail parlementaire, alors même que les commissions sont libres d'auditionner les membres du Haut Conseil pour le climat quand elles le souhaitent.

L'amendement COM-226 vise à ce que le rapport annuel du Haut Conseil pour le climat précise, dans son volet sur l'impact socio-économique et environnemental des politiques de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, leurs incidences sur l'emploi et la formation . Les choix effectués aujourd'hui en matière de politique énergétique ne sont en effet pas neutres sur l'emploi et la formation. Il convient donc que cet aspect soit détaillé dans le rapport du Haut Conseil pour le climat.

En outre, l'amendement COM-233 prévoit que le Haut Conseil pour le climat donne un avis sur les projets de programmation annuelle de l'énergie . Le comité d'experts prévu à l'article L. 145-1 du code de l'énergie, et auquel se substitue le Haut Conseil pour le climat, rendait en effet un avis sur la PPE.

L'amendement COM-232 adopté par la commission prévoit par ailleurs d'avancer la date de remise du rapport du Gouvernement sur la stratégie nationale bas carbone de 6 mois à 4 mois avant la publication des nouveaux budgets carbone et de l'actualisation de la SNBC. Une telle disposition permettra de disposer plus en amont des orientations de la future SNBC.

La commission a enfin adopté un amendement COM-230 pour donner au Haut Conseil pour le climat une plus grande latitude dans ses modalités d'action en prévoyant qu'il peut rendre des avis , et non uniquement des rapports lorsqu'il est saisi ou lorsqu'il s'auto-saisit.

La commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 2 bis
(article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales)

Prise en compte des avis du Haut Conseil pour le climat par les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet)

Objet : cet article prévoit la prise en compte des avis du Haut Conseil pour le climat pour la définition des objectifs énergétiques et environnementaux dans les Sraddet.

L'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales précise que la région 21 ( * ) élabore un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) . Ce schéma fixe, entre autres, les objectifs de moyen et long termes sur le territoire de la région en matière notamment « de maîtrise et de valorisation de l'énergie, de lutte contre le changement climatique, de pollution de l'air, de protection et de restauration de la biodiversité, de prévention et de gestion des déchets » 22 ( * ) .

L'article 2 bis , introduit par la rapporteure de la commission du développement durable 23 ( * ) , prévoit que « La définition des objectifs énergétiques et environnementaux prend en compte les avis du Haut Conseil pour le climat ».

La commission est favorable à cet article, qui permettra une meilleure articulation entre la définition des objectifs à l'échelle nationale et leur traduction au niveau local . Le projet de stratégie nationale bas carbone souligne en effet que « plusieurs études s'accordent à dire que 70 % des actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont liées à une décision de niveau local ». La prise en compte par les Sraddet des avis du Haut Conseil pour le climat facilitera cette articulation.

Votre commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article sans modification.

CHAPITRE III

Mesures relatives à l'évaluation environnementale
Article 4
(articles L. 122-1 et L. 122-3-4 du code de l'environnement)

Réforme de l'autorité environnementale

Objet : Cet article vise à distinguer l'autorité chargée d'examiner au cas par cas si un projet doit ou non faire l'objet d'une évaluation environnementale de l'autorité compétente pour émettre un avis sur cette évaluation, afin de confier ces missions à deux entités différentes.

I. Une réforme de l'autorité environnementale rendue nécessaire par la décision du Conseil d'État du 6 décembre 2017 d'annuler la compétence du préfet de région en matière d'évaluation environnementale

1. La double mission de l'autorité environnementale : l'examen au cas par cas et l'avis sur l'évaluation environnementale des projets

Les projets de travaux, d'ouvrages, et d'aménagements 24 ( * ) qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences sur l'environnement ou la santé humaine, doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale 25 ( * ) .

La liste des projets soumis à évaluation environnementale est fixée par décret 26 ( * ) . En fonction de certains critères et de seuils définis par voie réglementaire, l'évaluation environnementale est soit systématique, soit effectuée au cas par cas .

À titre d'exemple, s'agissant des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), certaines d'entre elles doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale systématique - il s'agit, par exemple, des installations couverte par la directive relative aux émissions industrielles, des élevages bovins ou des parcs éoliens soumis à autorisation -, les autres installations étant par défaut soumises au régime du cas par cas.

Lorsqu'un projet relève d'un examen au cas par cas , la décision de le soumettre ou non à évaluation environnementale relève de l'autorité environnementale compétente . Celle-ci est alors saisie par le maître d'ouvrage d'un dossier présentant son projet afin de déterminer si ce dernier doit être soumis à évaluation environnementale.

L'autorité environnementale compétente pour procéder à cet examen est déterminée selon les critères fixés à l'article R. 122-6 du code de l'environnement - il peut s'agir :

- du ministre chargé de l'environnement, lorsque le projet donne lieu à une autorisation prise par un autre ministre ou par une autorité administrative indépendante. Le ministre chargé de l'environnement peut également se saisir de sa propre initiative de toute étude d'impact relevant du préfet de région ;

- de la formation d'autorité environnementale du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), notamment pour les projets qui donnent lieu à une décision du ministre chargé de l'environnement ou sont réalisés sous maîtrise d'ouvrage du ministère chargé de l'environnement ou d'un organisme placé sous sa tutelle ;

- des missions régionales d'autorité environnementale (MRAe) du CGEDD pour les projets qui doivent être réalisés sur le territoire de la région concernée et qui font l'objet d'une saisine obligatoire de la Commission nationale du débat public. Toutefois, lorsque le projet est situé sur plusieurs régions, l'autorité compétente est la formation d'autorité environnementale du CGEDD ;

- du préfet de région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé, dans tous les autres cas.

Dans le cadre d'une évaluation environnementale, les maîtres d'ouvrages doivent élaborer une étude d'impact évaluant les incidences de leur projet sur l'environnement .

Cette étude d'impact et leur demande d'autorisation doivent ensuite être soumises pour avis à l'autorité environnementale , ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet.

Dans son avis, l'autorité environnementale évalue la qualité de l'étude d'impact et permet d'éclairer la décision d'autorisation du projet au regard des enjeux environnementaux. Cet avis est joint au dossier d'enquête publique du projet. Il doit faire l'objet d'une réponse écrite de la part du maître d'ouvrage.

2. L'annulation par le Conseil d'État de la compétence d'autorité environnementale du préfet de région s'agissant des avis portés sur les évaluations environnementales

Dans une décision du 6 décembre 2017, le Conseil d'État a annulé les dispositions de l'article R. 122-6 du code de l'environnement en ce qu'elles permettent au préfet de région d'être à la fois l'autorité environnementale chargée d'émettre un avis sur l'évaluation environnementale du projet et l'autorité qui instruit la demande d'autorisation administrative dudit projet.

Le Conseil d'État a en effet estimé que ces dispositions méconnaissaient les exigences découlant de l'article 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 27 ( * ) qui, « si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d'ouvrage soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité , de manière à ce qu'une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné ».

Le Conseil d'État a jugé en l'espèce qu'aucun texte législatif ou réglementaire ne prévoyait de mesures permettant de garantir que, lorsque le préfet de région assure la maîtrise d'ouvrage d'un projet ou est compétent pour autoriser un projet, la compétence d'autorité environnementale est exercée par une entité interne disposant d'une autonomie réelle à son égard .

En revanche, le Conseil d'État a considéré que les MRAe satisfaisaient ce critère de séparation fonctionnelle 28 ( * ) .

II. La réforme de l'autorité environnementale prévue par le Gouvernement

Suite à la décision du Conseil d'État, le Gouvernement a préparé un projet de décret pour réformer l'autorité environnementale . Ce projet, soumis à consultation en juillet 2018, prévoit que :

- les avis de l'autorité environnementale sur l'évaluation environnementale des projets, autrefois rendus par les préfets de région, soient désormais confiés aux MRAe ;

- les décisions de soumettre au cas par cas les projets à évaluation environnementale soient de la compétence du préfet de région.

Ce projet n'a toutefois pas pu être publié, le Conseil d'État considérant que le cadre législatif en vigueur ne permet pas au pouvoir réglementaire de distinguer deux autorités distinctes pour exercer les missions d'examen au cas par cas et d'évaluation de l'étude d'impact du porteur de projet, ces deux missions étant aujourd'hui confiées à une seule et même « autorité environnementale ».

L'article 4 du présent projet de loi entend par conséquent distinguer, au sein de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, les fonctions d'autorité chargée de l'examen au cas par cas des projets de celles d'autorité environnementale chargée d'émettre un avis sur l'évaluation environnementale des projets , pour pouvoir confier ces missions à des autorités distinctes - respectivement aux préfets de région et aux missions régionales d'autorité environnementale.

Cet article dispose que l'autorité chargée de l'examen au cas par cas, qui sera désignée en Conseil d'État, ne pourra être une autorité dont les services ou les établissements publics relevant de sa tutelle sont chargés de l'élaboration du projet ou assurent sa maîtrise d'ouvrage .

L'Assemblée nationale a conservé ces dispositions sans les modifier. Elle a par ailleurs adopté un amendement du député Yves Blein visant à compléter cet article pour procéder à une validation législative des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) faisant l'objet d'une procédure contentieuse tenant au fait que le préfet de département était, en application du décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 29 ( * ) , désigné comme l'autorité environnementale compétente pour émettre un avis sur l'évaluation environnementale des plans et programmes en même temps qu'il était en charge d'approuver ces documents 30 ( * ) .

III. La position de la commission : mieux sécuriser le dispositif retenu au regard des exigences du droit européen

Dans son avis relatif au projet de loi , le Conseil d'État indique qu'il est possible de confier les missions d'examen du cas par cas et d'évaluation environnementale des projets à des autorités différentes.

Le Conseil d'État indique, en effet, que si la directive précitée du 13 décembre 2011 « impose que l'évaluation environnementale soit réalisée par une autorité chargée de responsabilités spécifiques en matière d'environnement, elle n'impose pas aux États membres, en revanche, de confier à une telle autorité l'examen au cas par cas des projets relevant de cette procédure, et leur laisse au contraire la libre détermination de l'autorité chargée de cet examen, sous réserve de son autonomie fonctionnelle par rapport à l'autorité compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d'ouvrage ».

Le respect des exigences de la directive 2011/92/UE impose que l'autorité chargée du cas par cas ne se trouve pas en situation de conflit d'intérêts 31 ( * ) .

L''article 4 du projet de loi mentionne déjà que l'autorité chargé de l'examen au cas par cas ne pourra être une autorité dont les services ou les établissements publics relevant de sa tutelle sont chargés de l'élaboration du projet ou assurent sa maîtrise d'ouvrage .

Afin de sécuriser davantage la solution juridique retenue vis-à-vis du droit européen, la commission a adopté un amendement COM-234 de la rapporteure prévoyant que l'autorité qui sera désignée pour assurer l'examen au cas par cas des projets devra également disposer d'une autonomie fonctionnelle par rapport à l'autorité compétente pour autoriser le projet .

La commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 4 bis
(article L. 512-7-2 du code de l'environnement)

Modalités de soumission des projets d'installation classée pour la protection de l'environnement à une procédure d'autorisation environnementale

Objet : Cet article prévoit que l'examen par le préfet de la nécessité de soumettre un projet d'installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) à une procédure d'autorisation environnementale prend en compte l'ensemble des critères définis par la directive 2011/92/UE.

Les installations qui présentent des dangers ou des inconvénients pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques ou encore la protection de la nature, de l'environnement et des paysages - dites installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) - sont soumises à une procédure d'autorisation environnementale définie au titre VIII du livre I er du code de l'environnement.

L'article L. 512-7 de ce code prévoit que les ICPE peuvent être soumises à une procédure d'autorisation simplifiée - dite procédure d'enregistrement - « lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées ».

Ces prescriptions générales peuvent notamment porter sur « les conditions d'intégration du projet dans son environnement local » ainsi que sur « l'éloignement des installations des habitations, des immeubles habituellement occupés par des tiers, des établissements recevant du public, des cours d'eau, des voies de communication, des captages d'eau ou des zones destinées à l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers ».

Le préfet, saisi de la demande d'enregistrement par le porteur de projet, peut décider de soumettre ce projet à une procédure d'autorisation environnementale à trois conditions non cumulatives :

- si, au regard de la localisation du projet, la sensibilité environnementale du milieu le justifie (en prenant en compte les critères mentionnés au point 2 32 ( * ) de l'annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 33 ( * ) ) ;

- si le cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ;

- si l'aménagement des prescriptions générales applicables à l'installation, sollicité par l'exploitant, le justifie.

L'article 4 bis du projet de loi, inséré à l'Assemblée nationale à l'initiative de la rapporteure pour avis Nathalie Sarles, prévoit que la décision du préfet de soumettre une demande d'enregistrement à une procédure d'autorisation environnementale doit prendre en compte l'ensemble des critères mentionnés à l'annexe III de la directive 2011/91/UE et non uniquement son point 2, c'est-à-dire également les caractéristiques du projet (notamment sa dimension, l'utilisation de ressources naturelles, la production de déchets et de nuisances, les risques pour la santé humaine) et ses impacts potentiels (notamment l'ampleur, l'étendue spatiale, l'intensité, la durée et la probabilité de ces impacts).

La commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article sans modification.

Article 4 ter
(article L. 515-16-1 du code de l'environnement)

Implantation d'installations de production d'énergie renouvelable dans le périmètre des plans de prévention des risques technologiques

Objet : Cet article permet aux préfets d'accorder des dérogations aux interdictions et prescriptions fixées par les plans de prévention des risques technologiques pour la réalisation d'installations de production d'énergie renouvelable.

L'article L. 515-15 du code de l'environnement prévoit que l'État élabore et met en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) afin de délimiter le périmètre exposé aux effets des accidents susceptibles de survenir dans des installations présentant des dangers particulièrement importants pour la sécurité et la santé des populations voisines et pour l'environnement.

À l'intérieur de ce périmètre d'exposition aux risques, peuvent être définies des zones de maîtrise de l'urbanisation future dans lesquelles la réalisation d'aménagements et d'ouvrages, ainsi que les constructions nouvelles et l'extension de constructions existantes peuvent être interdites ou subordonnées au respect de prescriptions particulières (article L. 515-16-1 du code de l'environnement).

Afin de favoriser l'implantation d'énergies renouvelables dans de telles zones, l'Assemblée nationale a introduit un nouvel article 4 bis permettant aux préfets d'accorder des dérogations aux interdictions et prescriptions fixées par les PPRT pour permettre la réalisation d'installations de production d'énergie renouvelable.

L'implantation de telles installations dans une zone dans laquelle la présence humaine est limitée, sous réserve qu'elle se fasse dans des conditions de sécurité suffisantes, peut être une solution intéressante pour favoriser le développement des énergies renouvelables.

Afin que cette décision fasse l'objet d'une concertation avec les élus locaux , la commission a adopté un amendement COM-235 de la rapporteure prévoyant qu'elle soit précédée d'un avis de la commune et de l'établissement public de coopération intercommunale sur le territoire desquels l'installation de production serait autorisée. La commission a également adopté un amendement COM-236 rédactionnel.

La commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 4 quater
(article L. 311-13 [nouveau] du code de justice administrative)

Contentieux des énergies renouvelables en mer

Objet : Cet article vise à confier au Conseil d'État la compétence pour connaître en premier et en dernier ressort des recours formés contre les décisions relatives aux installations de production d'énergie renouvelable en mer et à leurs ouvrages connexes.

Depuis un décret du 8 janvier 2016 34 ( * ) , la cour administrative de Nantes est compétente pour connaître, en premier et dernier ressort, des litiges portant sur les décisions relatives aux installations de production d'énergie renouvelable en mer et leurs ouvrages connexes , de même que les litiges portant sur les décisions relatives aux ouvrages des réseaux publics d'électricité dont au moins une partie est située en mer et aux ouvrages de raccordement des installations.

La liste des décisions concernées est précisée à l'article R. 311-4 du code de justice administrative, et comprend notamment les autorisations d'exploiter, les autorisations environnementales, les permis de construire ou encore les autorisations d'occupation du domaine public.

La cour administrative d'appel de Nantes est tenue de statuer dans un délai de douze mois à compter du dépôt du recours .

Les arrêts rendus par la cour administrative peuvent faire l'objet d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'État . Si celui-ci annule la décision de la cour, il peut « soit renvoyer l'affaire devant la même juridiction statuant, sauf impossibilité tenant à la nature de la juridiction, dans une autre formation, soit renvoyer l'affaire devant une autre juridiction de même nature, soit régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » 35 ( * ) .

L'article 4 quater , inséré à l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur Anthony Cellier, confie au Conseil d'État la compétence pour connaître en premier et en dernier ressort des recours formés contre les décisions relatives aux installations de production d'énergie renouvelable en mer et à leurs ouvrages connexes, avec pour objectif affiché d'accélérer les procédures.

Actuellement, la compétence du Conseil d'État en premier et dernier ressort concerne les recours dirigés contre les décrets et les actes réglementaires des ministres, le contentieux relatif au recrutement et à la discipline des fonctionnaires nommés par décret du président de la République ou encore le contentieux des élections régionales européennes.

Confier au Conseil d'État en premier et dernier ressort le contentieux relatif aux éoliennes en mer ne paraît pas pertinent, alors qu'il existe déjà une procédure dérogatoire au droit commun censée accélérer les délais, puisque ce contentieux est confié à la cour administrative d'appel de Nantes, qui dispose au demeurant d'une expertise particulière sur ces litiges.

Cela conduirait par ailleurs à affaiblir le droit au recours contre ces projets qui peuvent pourtant présenter des enjeux environnementaux importants.

La commission a par conséquent adopté un amendement COM-237 de la rapporteure visant à supprimer cet article .

La commission propose à la commission des affaires économiques de supprimer cet article.

CHAPITRE VII

Tarifs réglementés de gaz et d'électricité
Article 13

Rapport du Gouvernement sur la contribution des plans climat-air-énergie et des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires aux politiques de transition écologique et énergétique

Objet : cet article prévoit que le Gouvernement remet un rapport sur la contribution des plans climat-air-énergie (PCAET) et des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) aux politiques de transition écologique et énergétique.

L'article 13, introduit en séance publique à l'Assemblée nationale 36 ( * ) , prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, dans les deux ans suivant la publication de la loi, un rapport relatif à la contribution des PCAET et des Sraddet aux politiques de transition écologique et énergétique . L'article prévoit que ce rapport « compare notamment cette contribution aux objectifs nationaux et aux orientations nationales inscrits dans la programmation pluriannuelle de l'énergie et la stratégie nationale bas-carbone ».

Aux termes de l'article L. 229-26 du code de l'environnement, la métropole de Lyon et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre existant au 1 er janvier 2015 et regroupant plus de 50 000 habitants adoptent un PCAET . Conformément à l'article 4 du décret relatif au plan climat-air-énergie territorial 37 ( * ) , « le plan climat-air-énergie territorial prévu à l'article L. 229-26 est l' outil opérationnel de coordination de la transition énergétique sur le territoire ». D'après l'observatoire territoires et climat 38 ( * ) , 29 PCAET auraient été signés.

Le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) est quant à lui élaboré par la région et fixe des objectifs de moyen et long termes sur le territoire de la région en matière notamment « de maîtrise et de valorisation de l'énergie, de lutte contre le changement climatique, de pollution de l'air, de protection et de restauration de la biodiversité, de prévention et de gestion des déchets ». La plupart des Sraddet sont actuellement en phase d'enquête publique.

Or, comme le souligne le premier rapport du Haut Conseil pour le climat 39 ( * ) , « la coordination, l'harmonisation et la mise en regard des différents plans pourraient être encouragés dans la durée pour assurer la cohérence des actions conduites à toutes les échelles ».

Ainsi, le rapport prévu à l'article 13 permettra d'identifier la contribution de ces documents de planification à l'atteinte des objectifs nationaux.

Votre commission propose à la commission des affaires économiques d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 9 juillet 2019, la commission a examiné le rapport pour avis sur le projet de loi n° 622 (2018-2019) relatif à l'énergie et au climat.

M. Patrick Chaize , président. - Le projet de loi relatif à l'énergie et au climat a dû être examiné dans des délais beaucoup trop courts : il n'a été adopté par l'Assemblée nationale et transmis au Sénat qu'il y a dix jours, et le nombre d'articles qu'il contient a été multiplié par sept depuis son dépôt. La commission des affaires économiques nous a délégué au fond l'examen de neuf articles - 1 er quinquies , 1 er octies , 2, 2 bis , 4, 4 bis , 4 ter , 4 quater et 13 - et nous nous sommes saisis pour avis des articles 1 er , 1 er bis A, 1 er bis B, 1 er bis , 1 er ter , 1 er quater, 1 er sexies , 3, 6 bis A, 6 bis B, 6 bis , 6 ter , 6 quater A, 6 quater et 6 quinquies .

Mme Pascale Bories , rapporteure pour avis . - Ce texte comportait initialement huit articles et avait peu d'ambitions, puisque son but principal était de modifier les objectifs de politique énergétique fixés par la loi relative à la transition énergétique de 2015 pour tenir compte de la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) en cours de finalisation, et qui acte notamment le report à 2035 de la réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique. La PPE étant un acte réglementaire, qui ne peut pas être en contradiction avec les objectifs fixés par la loi, il convenait de modifier la loi.

Ce projet de loi devait donc être une « petite loi » sur l'énergie et le climat. Il s'est progressivement enrichi au fil des dernières semaines, d'abord par une lettre rectificative qui a ajouté quatre nouveaux articles, puis au cours de son examen à l'Assemblée nationale, les députés ayant notamment adopté plusieurs dispositions relatives à la rénovation énergétique des bâtiments. Il compte désormais 55 articles.

Malgré cette multiplication par sept du nombre d'articles, nous n'avons eu qu'une semaine pour étudier le texte adopté par l'Assemblée nationale. J'ai d'ailleurs pu constater, au cours de la dizaine d'auditions que j'ai menées, que, pour certaines dispositions importantes introduites à l'Assemblée, les principaux acteurs concernés n'avaient même pas été consultés. Je ne peux que regretter ces délais si courts, qui traduisent un important manque de considération à l'égard du travail parlementaire. Nous avons eu l'occasion de le rappeler à M. de Rugy lors de son audition la semaine dernière.

Notre commission a reçu une délégation au fond de la commission des affaires économiques sur neuf articles, et en particulier sur les articles 2, portant sur le Haut Conseil pour le climat (HCC), et 4, sur l'autorité environnementale. Elle s'est également saisie pour avis de plusieurs articles, notamment l'article 1 er , sur les objectifs de la politique énergétique, et l'article 3, qui prévoit la fermeture des centrales à charbon en 2022.

Force est de constater que l'inflation du texte n'a pas permis de pallier ses insuffisances au regard des attentes de nos concitoyens. Il est en effet difficile d'identifier dans ce projet de loi un ensemble de réponses efficaces et cohérentes pour lutter contre le réchauffement climatique.

Ainsi, l'article 1 er prévoit de réviser plusieurs objectifs de la politique énergétique afin, notamment, de renforcer l'objectif de réduction de la consommation d'énergies fossiles de 30 % à 40 % en 2030 et d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050, en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à 6. Si l'intention est évidemment louable, je ne peux que m'interroger quant à la portée concrète de cet engagement. Le titre du premier rapport du Haut Conseil pour le climat, remis en juin dernier, est pourtant clair : « Agir en cohérence avec les ambitions ». La fixation d'objectifs ambitieux, la définition de programmations pluriannuelles ou encore de budgets carbone ne sauraient avoir du sens que si elles sont suivies par des faits. Or la stratégie nationale bas-carbone publiée en novembre 2015 et les plafonds d'émission qu'elle fixe n'ont pas été respectés ces dernières années.

Outre le manque d'engagements concrets, je déplore le manque d'anticipation du Gouvernement s'agissant des conséquences de la politique énergétique qu'il mène.

L'article 3 prévoit la fermeture des centrales à charbon en 2022 en fixant un plafond d'émissions de gaz à effet de serre pour les installations de production d'électricité. Cette fermeture concernera quatre centrales encore en activité, dont deux sont gérées par EDF - au Havre et à Cordemais - et deux par Uniper, à Saint-Avold et à Gardanne. Certaines centrales sont lancées dans des projets de conversion biomasse, dont la faisabilité technique sur le long terme n'est pas garantie. La fermeture de la centrale de Cordemais, couplée avec les incertitudes sur la date de mise en service de l'EPR de Flamanville et de la centrale à gaz de Landivisiau, pose la question de la sécurité de l'approvisionnement électrique de l'Ouest français, notamment lors des pointes de consommation hivernales. L'article 3 renvoie par ailleurs à une ordonnance le soin de définir des mesures d'accompagnement des salariés de ces centrales. À un an et demi de leur fermeture, nous sommes donc dans l'incertitude totale quant au devenir des salariés et des sites concernés, ce qui traduit un manque criant d'anticipation de la part du Gouvernement.

Toutefois, les députés ont introduit un nouvel article 1 er bis A, qui prévoit qu'à partir de 2023, et tous les cinq ans, une loi de programmation devra fixer les objectifs de politique énergétique pour les années à venir, ce qui permettra au Parlement de débattre de la définition de la PPE en amont
- et non pas en aval comme nous le faisons aujourd'hui.

J'en viens aux principaux articles sur lesquels notre commission est saisie au fond.

L'article 2 prévoit la mise en place du HCC. La création d'une instance composée d'experts pouvant apporter un éclairage indépendant sur la politique du Gouvernement en matière de climat est bienvenue. Toutefois, cet article ne fait qu'inscrire dans la loi un organe qui existe déjà, puisqu'il a été créé en novembre 2018 et que ses missions ont été définies par un décret en date du 14 mai 2019. Ce Haut Conseil rendra un rapport annuel sur la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre et l'efficacité des politiques de lutte contre ces émissions, et fera des propositions. Il pourra également être saisi par le Parlement pour donner un avis sur un projet ou une proposition de loi. L'Assemblée nationale a par ailleurs prévu à l'article 2 bis que les avis du HCC devront être pris en compte par les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).

L'article 4 revoit le fonctionnement de l'autorité environnementale. Il s'agit d'un sujet relativement complexe. Actuellement, les projets de travaux et d'ouvrages susceptibles d'avoir des incidences sur l'environnement doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale pouvant être, en fonction de seuils, soit systématique, soit effectuée, au cas par cas, sur décision de l'autorité environnementale. L'autorité environnementale est également compétente pour émettre un avis sur l'évaluation environnementale réalisée par le porteur de projet. Jusqu'à présent, cette autorité environnementale pouvait être, en fonction des projets, le ministre chargé de l'environnement, le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), les missions régionales d'autorité environnementale (MRAe) ou le préfet de région. Mais, dans une décision du 6 décembre du 2017, le Conseil d'État a annulé les dispositions permettant aux préfets d'être à la fois l'autorité en charge de donner un avis sur l'évaluation environnementale d'un projet et l'autorité compétente pour autoriser ce projet, considérant qu'elles plaçaient les préfets en situation de conflit d'intérêt.

L'article 4 du projet de loi entend par conséquent séparer les fonctions d'autorité chargée de l'examen au cas par cas des projets, qui pourraient être laissées aux préfets, de celles d'autorité chargée d'émettre un avis sur l'évaluation environnementale des projets, qui seraient confiées aux missions régionales du CGEDD, qui bénéficient d'une autonomie par rapport au préfet. Toutefois, cette solution ne règle pas toutes les difficultés qui pourraient se poser en termes de conflits d'intérêts, et je vous proposerai un amendement pour y remédier.

Enfin, l'article 4 quater confie le contentieux relatif aux éoliennes en mer au Conseil d'État en premier et dernier ressort, une solution qui ne me paraît pas pertinente alors qu'il existe déjà une juridiction spécialisée pour traiter ce contentieux : la Cour administrative d'appel de Nantes.

Au fil des auditions que j'ai menées, une idée saillante s'est dégagée : la définition de grands objectifs ambitieux peine à trouver une déclinaison dans nos territoires. Il est frappant de voir à quel point ces grands objectifs sont pensés sans y intégrer une perspective territoriale. Pourtant, comme le souligne le projet de stratégie nationale bas carbone, « 70 % des actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont liées à une décision de niveau local. » Les élus locaux ont donc un rôle central à jouer pour transformer ces objectifs ambitieux en réalité tangible.

Un autre manque concerne l'anticipation des conséquences de la politique énergétique. Le principal enjeu d'anticipation pour les années à venir concerne la fermeture des réacteurs nucléaires. L'objectif de réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique doit s'accompagner d'une feuille de route définissant la future stratégie de démantèlement des réacteurs. Et le plan stratégique d'EDF, réalisé après la publication de la PPE, doit comporter un volet relatif à l'accompagnement des salariés qui seront concernés par ces fermetures.

Je vous proposerai également un certain nombre d'amendements pour clarifier les missions et les modalités de saisine du HCC.

Enfin, reprenant une des dispositions qui avait été votée au Sénat au cours de l'examen de la proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux déposée par M. Vaspart, un amendement permet la mise en place d'installations photovoltaïques dans certaines zones littorales dégradées qui seraient définies par décret.

Même avec ces amendements, ce texte est loin d'être à la hauteur des ambitions auxquelles il prétend répondre.

Mme Angèle Préville . - Nous déplorons les délais trop courts pour travailler sur un texte de cette importance, sur lequel le Sénat a beaucoup à dire. La fermeture des centrales à charbon répond à une logique d'affichage : elles ne sont que quatre et ne fonctionnent pas à plein temps mais en soutien pendant les périodes de pointe. En France, l'électricité est très largement dé-carbonée : il n'y avait pas urgence à les fermer. Pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre, mieux vaudrait agir sur les transports. Ces annonces sont sans lien avec les réalités ; les dates sont fictives et devront être revues, ce qui est dommage vis-à-vis de nos concitoyens. Le retard de l'EPR de Flamanville pose des problèmes d'approvisionnement dans l'Ouest du pays. Ils ne sont pas résolus. Et nous déposerons un amendement sur la prise en charge des salariés dont la centrale sera fermée.

M. Ronan Dantec . - En effet, ce ne sont pas des conditions de travail correctes. Nombre d'acteurs, intéressés par ce texte, nous font des propositions d'amendement que nous n'avons pas le temps d'analyser. La question de fond est de savoir si la PPE est sincère, ou non, car il y a d'importants écarts entre les objectifs et les résultats. Les émissions de gaz à effet de serre n'ont pas baissé ces dernières années, et seuls quelques dizaines de milliers de logements ont été réhabilités, alors qu'on parlait de centaines de milliers. Et on n'a jamais vendu autant de SUV... Or ce texte ne permet en rien de dépasser ces contradictions. Il faut le rendre plus ambitieux sur les réhabilitations de logements. Et, alors que la dimension territoriale est très présente dans la loi de transition énergétique - nous y avions veillé - le Gouvernement refuse obstinément d'animer ce texte dans son volet territorial. Il faut lui envoyer un message : il ne peut pas continuer à ignorer les territoires.

M. Alain Fouché . - J'ai interrogé M. de Rugy, sans obtenir de réponse satisfaisante. Le nucléaire est l'énergie la plus propre aujourd'hui. Fermer les réacteurs sera impossible dans le délai prévu, et les mesures proposées ne compenseront pas leur fourniture d'électricité. Il faut un vrai débat.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Sur les transports, il y a le projet de loi d'orientation des mobilités. Certains amendements évoqués pourraient tomber sous le coup de l'article 45. Le logement est une question traitée au fond par la commission des affaires économiques.

EXAMEN DES AMENDEMENTS SUR LES ARTICLES DÉLÉGUÉS AU FOND

Article 1 er quinquies

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) dispose d'une capacité d'expertise importante mais la définition de ses domaines d'action remonte à 1991. Il semble donc judicieux, et alors même que l'Assemblée y a ajouté « la lutte contre le réchauffement climatique », de compléter leur liste par « l'adaptation au changement climatique ». C'est l'objet de mon amendement DEVDUR.5 .

L'amendement DEVDUR.5 est adopté.

La commission proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 1 er quinquies ainsi modifié.

Article 1 er octies

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Évaluer les incidences positives et négatives du projet de loi de finances est un exercice relativement complexe. Mon amendement DEVDUR.6 précise que l'avis du HCC sur le rapport prévu à l'article 1 er octies portera également sur la méthodologie employée pour évaluer ces incidences.

L'amendement DEVDUR.6 est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'article 1 er octies prévoit la remise d'un rapport au Parlement sur les impacts du projet de loi de finances (PLF) sur le réchauffement climatique. Mon amendement DEVDUR.22 propose que cette évaluation porte également sur les incidences du PLF sur l'atteinte des objectifs de développement durable définis dans le cadre des Nations unies.

L'amendement DEVDUR.22  est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'amendement COM-53 poursuit le même objectif que celui que je viens de vous présenter, dont la rédaction me paraît toutefois meilleure. Retrait, donc.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-53.

Elle proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 1 er octies ainsi modifié.

Article 2

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.7 supprime la disposition prévoyant l'audition du président du HCC, avant sa nomination, devant les commissions permanentes du Parlement. Une telle disposition méconnaît en effet les exigences résultant de la séparation des pouvoirs. Une décision du Conseil constitutionnel de 2015 avait d'ailleurs considéré qu'une disposition analogue était contraire à la Constitution.

L'amendement DEVDUR.7 est adopté, ainsi que l'amendement DEVDUR.8 , rédactionnel.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Les choix en termes de politique énergétique que nous faisons aujourd'hui ne sont pas neutres sur l'emploi et la formation. À cet égard, il serait pertinent que le HCC mentionne ces aspects dans son volet portant sur l'impact socio-économique des politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre. C'est l'objet de mon amendement DEVDUR.9 .

L'amendement DEVDUR.9  est adopté, ainsi que l'amendement DEVDUR.10 , rédactionnel.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.11 supprime la mention selon laquelle le HCC présente son rapport annuel devant plusieurs commissions permanentes du Parlement. Le Parlement doit être libre de fixer son calendrier.

L'amendement DEVDUR.11  est adopté.

M. Ronan Dantec . - Cela ne doit pas nous empêcher d'organiser une telle audition : la présidente du HCC, Corinne Le Quéré m'a déjà signalé son intérêt pour venir nous présenter son rapport.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.12 clarifie les suites données par le Gouvernement au Parlement en réponse aux recommandations et aux propositions du rapport annuel du HCC.

L'amendement DEVDUR.12 est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'article 2 prévoit que le HCC peut être saisi ou s'autosaisir en vue de rendre un rapport. Or, comme nous l'avons évoqué au cours de l'audition de sa présidente, cette saisine, qui consiste en une demande de rapport, gagnerait à être assouplie. Mon amendement DEVDUR.13 propose donc que le HCC puisse rendre un avis, qui pourrait bien évidemment prendre la forme d'un rapport. Une telle modification lui donnerait plus de marge de manoeuvre dans ses modalités d'action.

L'amendement DEVDUR.13 est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.14 clarifie les possibilités de saisine du HCC, dont l'avis doit se concentrer sur son domaine d'expertise. Il pourra ainsi se prononcer sur un projet de loi, une proposition de loi ou une question relevant de son domaine d'action.

L'amendement DEVDUR.14 est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'article 2 prévoit que le HCC est tenu de rendre un rapport un an avant la publication des budgets carbone et de l'actualisation de la stratégie nationale bas carbone. Mon amendement DEVDUR.15 avance de quatre à six mois, préalablement à cette même publication, la remise du rapport du Gouvernement sur la nouvelle stratégie à venir. Un tel décalage permettra de disposer de plus de temps pour prendre connaissance des principales orientations de ces documents.

L'amendement DEVDUR.15 est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.16 vise à ce que le HCC, qui se substitue au comité d'experts pour la transition écologique, rende un avis sur la PPE.

L'amendement DEVDUR.16 est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'amendement COM-7 rectifié bis vise à transformer le HCC en Haut Conseil pour le climat et la qualité de l'air. Le HCC a vocation à rendre des avis sur les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il ne me semble pas opportun d'élargir son champ de compétence à la qualité de l'air. Avis défavorable.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-7 rectifié bis .

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'amendement COM-54 ouvre la possibilité pour un dixième des députés ou des sénateurs de saisir le HCC. Celui-ci peut d'ores et déjà, au titre de l'article 2, être saisi par le Gouvernement, le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat ou le président du Conseil économique social et environnemental - ou il peut s'autosaisir. Élargir encore les possibilités de saisine risque de conduire à un trop grand nombre de demandes, auxquelles le Haut Conseil, composé de douze experts, ne sera pas en capacité de répondre. Avis défavorable.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-54.

Elle proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis

La commission proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 2 bis .

Article 4

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.17 sécurise la solution juridique retenue par le Gouvernement, visant à confier la décision de soumettre ou non un projet à évaluation environnementale
- qu'on appelle examen au cas par cas - à une autorité qui n'est pas une autorité environnementale. Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a considéré qu'une telle solution est possible sous réserve de l'autonomie fonctionnelle de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas par rapport à l'autorité compétente pour autoriser le projet ou en assurer la maîtrise d'ouvrage. En effet, il convient d'éviter les situations de conflit d'intérêt dans lesquelles se retrouverait un préfet qui serait à la fois compétent pour décider si un projet doit faire l'objet d'une évaluation environnementale et compétent pour autoriser ce même projet. Ainsi, d'un préfet de région qui aurait à juger d'un projet dans le département dont il est le préfet de département. Mon amendement inscrit donc dans la loi ce que rappelle le Conseil d'État dans son avis, à savoir que l'autorité chargée de l'examen au cas par cas ne pourra pas être la même que l'autorité compétente pour autoriser le projet. Cela sécurise l'article 4 par rapport au droit européen, qui impose de prévenir les conflits d'intérêt en matière d'évaluation environnementale.

L'amendement DEVDUR.17  est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'amendement COM-55 supprime l'article 4, qui sépare la fonction d'autorité compétente pour se prononcer au cas par cas sur la nécessité ou non de soumettre à projet à évaluation environnementale de la fonction d'autorité compétente pour donner un avis sur la qualité de cette évaluation. L'objectif est que la décision du cas par cas puisse être confiée aux préfets, tandis que l'avis sur la qualité des évaluations environnementales serait confié aux MRAe, qui bénéficient d'une autonomie par rapport aux préfets. Je partage la préoccupation des auteurs de cet amendement, qui est d'éviter les cas de conflits d'intérêts dans lesquels se trouverait un préfet qui serait à la fois compétent pour décider si un projet doit faire ou non l'objet d'une évaluation environnementale et compétent pour autoriser le projet. Mais mon amendement DEVDUR.17 constitue une meilleure solution.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-55.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - En re-rédigeant une partie de l'article 4, l'amendement COM-114 rectifié supprime la possibilité de distinguer l'autorité chargée du cas par cas de l'autorité chargée d'émettre un avis sur l'évaluation environnementale du porteur de projet. Cela obligerait le pouvoir réglementaire à confier l'examen au cas par cas à l'autorité environnementale, donc aux MRAe s'agissant des projets locaux. Or, compte tenu de leurs moyens limités, les MRAe ne seraient pas en mesure de traiter l'afflux de nouveaux dossiers d'examen au cas par cas, ce qui risquerait d'allonger fortement les délais pour les porteurs de projet. Il convient plutôt, comme le propose mon amendement DEVDUR.17, de permettre que le cas par cas puisse être réalisé par une autorité autre que l'autorité environnementale tout en renforçant les garanties d'indépendance de celle-ci vis-à-vis de l'autorité compétente pour autoriser le projet. Avis défavorable.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-114 rectifié.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Le code de l'environnement prévoit que les projets qui sont susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement ou la santé humaine doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale soit systématique soit au cas par cas, en fonction de critères et de seuils définis à l'article R. 122-2 du code de l'environnement.

L'amendement COM-115 rectifié prévoit la possibilité pour l'autorité environnementale de statuer sur le besoin de soumettre un projet à évaluation environnementale, même si celui-ci est en-deçà des seuils fixés. Cela reviendrait à ôter toute portée aux seuils définis, et conduirait à ce que tout projet d'ouvrage ou d'aménagement, même de petite taille, puisse faire l'objet d'une évaluation environnementale, une procédure lourde pour les porteurs de projets. Avis défavorable.

M. Ronan Dantec . - Il est bien écrit que c'est l'autorité compétente qui transmet les informations relatives au projet. C'est elle qui juge que le projet, même s'il est en-deçà des seuils, doit être soumis à avis. Cela reprend la proposition du groupe de travail présidé par Jacques Vernier, et correspond à la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne. Il ne s'agit pas de supprimer les seuils, mais de boucher un trou dans la raquette... Votre réponse ne me satisfait pas.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - C'est l'autorité compétente qui décide s'il y a lieu de procéder, ou non, à une évaluation environnementale. Ce que vous proposez risque de surcharger cette autorité et de remettre en question la validité des seuils.

M. Ronan Dantec . - J'aimerais avoir l'avis du Gouvernement.

M. Hervé Maurey , président . - Vous l'aurez en séance.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-115 rectifié.

Elle proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

Article 4 bis

La commission proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 4 bis .

Article 4 ter

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'article 4 ter permet au préfet de déroger aux interdictions et prescriptions contenues dans un plan de prévention des risques technologiques (PPRT) afin d'autoriser la création d'installations de production d'énergie renouvelable. Mon amendement DEVDUR.18 prévoit d'associer la commune et l'EPCI concernés à la décision prise par le préfet. Il paraît en effet important que cette décision associe les élus locaux sur le territoire desquels ces projets sont envisagés

L'amendement DEVDUR.18  est adopté, ainsi que l'amendement DEVDUR.19 , rédactionnel.

La commission proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 4 ter ainsi modifié.

Article 4 quater

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.20 supprime l'article 4 quater , introduit à l'Assemblée nationale, qui confie au Conseil d'État la compétence pour connaître en premier et dernier ressort des contentieux relatifs aux éoliennes en mer. Le contentieux des éoliennes en mer est confié depuis 2016 à une juridiction spécialisée : la Cour administrative d'appel de Nantes. Il y a donc déjà un régime dérogatoire puisque les recours ne sont pas présentés devant les tribunaux administratifs, mais directement devant la Cour d'appel. Il ne paraît donc pas pertinent de faire remonter ce contentieux au Conseil d'État, alors que la Cour de Nantes dispose d'une expertise sur ces litiges.

M. Ronan Dantec . - Après la cour administrative, il reste le Conseil d'État. La loi prévoit de gagner deux ans de procédure en allant directement au Conseil d'État. Je ne suis pas favorable à la suppression de cette disposition, qui nous évitera de voir notre pays décrocher encore davantage sur l'éolien offshore.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Dans ce cas, pourquoi ne pas aller au Conseil d'État directement pour tous les projets ?

M. Ronan Dantec . - Là où il y a de lourds enjeux stratégiques, les lenteurs de notre système de recours contentieux sont dommageables. Il ne s'agit pas d'engorger le Conseil d'État avec tous les contentieux spécialisés...

M. Jean-Michel Houllegatte . - En droit, on doit toujours pouvoir faire appel. Je sais que le mieux est l'ennemi du bien, et que nos juridictions ont tendance à être embolisées... J'ai signé une pétition reprochant à l'État espagnol d'avoir des juridictions, en Catalogne, qui ne prévoient pas d'appel.

L'amendement DEVDUR.20 est adopté. L'amendement COM-24 devient sans objet. La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'article 4 quater.

Article 13

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'amendement COM-51 complète la demande de rapport prévue à l'article 13, portant sur la contribution des plans climat air-énergie territorial (PCAET) et des Sraddet aux objectifs nationaux de politique énergétique, par un volet relatif aux conséquences liées à l'importation de biomasse forestière. Cet ajout, qui concerne un objet très spécifique, n'a pas de lien avec la demande de rapport initiale et il ne me paraît donc pas pertinent de l'intégrer. Avis défavorable.

La commission proposera à la commission des affaires économiques de ne pas adopter l'amendement COM-51.

Elle proposera à la commission des affaires économiques d'adopter l'article 13.

EXAMEN DES AMENDEMENTS SUR LES ARTICLES POUR AVIS

Article 1 er

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.1 précise que la dé-carbonation de la production d'électricité est l'un des objectifs de la politique énergétique. Nous pouvons tous nous accorder sur le fait que la priorité doit être de produire une électricité dé-carbonnée pour respecter nos engagements dans le cadre de l'accord de Paris.

L'amendement DEVDUR.1  est adopté.

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.2 vise à remédier au manque d'anticipation du Gouvernement en matière de politique énergétique. En effet, l'objectif de réduire la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50 % à l'horizon 2035 nécessitera la fermeture de quatorze réacteurs. Un tel choix nécessite d'anticiper les conséquences de ces fermetures et du démantèlement des centrales. C'est pourquoi je propose qu'une feuille de route relative à la stratégie de démantèlement des réacteurs concernés soit établie en annexe de chaque programmation pluriannuelle de l'énergie.

L'amendement DEVDUR.2  est adopté.

Article 1 er bis A

Mme Pascale Bories , rapporteure . - L'article 1 er bis A créé une loi de programmation de l'énergie, qui détaillera notamment les objectifs de développement des énergies renouvelables pour l'électricité, la chaleur et le gaz. Or le carburant ne fait pas partie de cette liste. Pourtant, en 2016, le secteur des transports a représenté 30 % des émissions de gaz à effet de serre nationales, ce qui en fait le premier secteur émetteur, avec la transformation d'énergie. De plus, comme le souligne le projet de stratégie nationale bas carbone, ces émissions ont augmenté de 12 % entre 1990 et 2016. Il est donc indispensable que la future loi de programmation définisse des objectifs de développement des énergies renouvelables pour le carburant. C'est l'objet de mon amendement DEVDUR.3 .

L'amendement DEVDUR.3 est adopté.

Article 1 er quater

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Mon amendement DEVDUR.4 fait en sorte que le plan stratégique d'EDF détaille les dispositifs d'accompagnement mis en place pour les salariés concernés par la fermeture des réacteurs nucléaires. Il est en effet primordial que la réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique aille de pair avec un véritable accompagnement des salariés impactés.

M. Ronan Dantec . - Les salariés des installations sont les mieux protégés. J'ajouterais : « et leurs sous-traitants ».

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Oui, mais cet article concerne le plan stratégique d'EDF.

L'amendement DEVDUR.4 est adopté.

Article additionnel après l'article 5 quinquies

Mme Pascale Bories , rapporteure . - Dans la continuité de la proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux déposée par M. Vaspart, mon amendement DEVDUR.21 permet la mise en place d'installations photovoltaïques dans des zones littorales dégradées définies par décret. L'emprise maximale de ces installations serait elle aussi définie par décret.

L'amendement DEVDUR.21 est adopté.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION DANS LE CHAMP DE SA SAISINE POUR AVIS SIMPLE

ARTICLE 1 ER

Amendement n° COM-218

Au début de cet article

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'article L. 100-1 du code de l'énergie est complété par un alinéa ainsi rédigé:

« 8° Assurer la production d'une électricité décarbonée. »

ARTICLE 1 ER

Amendement n° COM-219

Après l'alinéa 17

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Une feuille de route relative au démantèlement des réacteurs nucléaires est publiée en annexe à chaque programmation pluriannuelle de l'énergie. »

ARTICLE 1 ER BIS A (NOUVEAU)

Amendement n° COM-220

Alinéa 5

Après le mot :

chaleur

insérer les mots :

, le carburant

ARTICLE 1 ER QUATER (NOUVEAU)

Amendement n° COM-221

I. - Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

2° La première phrase du deuxième alinéa est ainsi modifiée :

a) Les mots : « d'origine nucléaire » sont remplacés par les mots : « d'origines nucléaire et thermique à flamme » et les mots : « de la première période » sont supprimés ;

b) Sont ajoutés les mots : « et présente, le cas échéant, les dispositifs d'accompagnement mis en place pour les salariés des installations de production d'électricité dont l'emploi serait supprimé du fait de la fermeture de ces installations résultant du 5° du I de l'article L. 100-4 ou du II de l'article L. 311-5-3 »

II. - Alinéa 5

En conséquence, après les mots :

d'électricité

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

dont l'emploi serait supprimé du fait de la fermeture de ces installations résultant du 5° du I de l'article L. 100-4 ou du II de l'article L. 311-5-3

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 6 QUINQUIES (NOUVEAU)

Amendement n° COM-238

Après l'article 6 quinquies (nouveau)

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 121-12 et le premier alinéa de l'article L. 121-39 du code de l'urbanisme sont ainsi modifiés :

1° Après le mot : « vent » sont insérés les mots : « , ou à la production d'électricité à partir de l'énergie radiative du soleil lorsqu'ils se situent sur des sites dégradés définis par décret, » ;

2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « L'emprise au sol maximale des ouvrages nécessaires à la production d'électricité à partir de l'énergie radiative du soleil est fixée par décret ».

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mardi 25 juin 2019

- UNIPER France : M. Luc POYER , président, Mme Sivane SOUMAGNAC , responsable des affaires publiques.

- Syndicat des énergies renouvelables : M. Jean-Louis BAL , Président, Alexandre ROESCH , délégué général, Mme Delphine LEQUATRE , responsable du service juridique, M. Alexandre DE MONTESQUIOU , directeur associé.

- Agence de l'environnement et de la maitrise de l'énergie : M. Fabrice BOISSIER , directeur général délégué.

Mercredi 26 juin 2019

- Réseau Action Climat France : Mmes Anne BRINGAULT , responsable transition énergétique, Alix MAZOUNIE , chargée de campagne Énergie, Coline PEYRE , chargée de mission politiques publiques, Marie KAZERONI , chargée de programme Énergie et durabilité.

- Haut conseil pour le climat : Mme Corinne LE QUÉRÉ , présidente, M. Olivier FONTAN , directeur exécutif.

- SHIFT : M. Matthieu AUZANNEAU , directeur.

- Le Havre Seine Métropole : M. Hubert DEJEAN DE LA BATIE , vice-président Le Havre Seine Métropole et maire de la commune de Sainte-Adresse.

Mercredi 3 juillet 2019

- Commissariat général au développement durable : MM. Thomas LESUEUR , commissaire général et délégué interministériel au développement durable, Loïc AGNES , sous-directeur de l'intégration des démarches de développement durable dans les politiques publiques, David CATOT , chef du bureau de l'évaluation environnementale.

- Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie - Direction générale de l'énergie et du climat : M. Laurent MICHEL , directeur général de l'énergie et du climat.

- Green Law Avocat : M. David DEHARBE , avocat associé au Barreau de Lille, spécialiste en droit de l'environnement, spécialiste en droit public, Mme Stéphanie GANDET , Associée.

- Formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) : M. Philippe LEDENVIC , président, Mme Marie-Françoise FACON , secrétaire générale.


* 1 Sur la base notamment du Bilan prévisionnel de l'équilibre offre-demande d'électricité en France établi par le Réseau de transport d'électricité, édition 2017.

* 2 Lettre rectificative n° 2032 de M. Édouard PHILIPPE, Premier ministre, déposée à l'Assemblée nationale le 12 juin 2019.

* 3 Haut Conseil pour le climat, Agir en cohérence avec les ambitions, juin 2019.

* 4 Aux termes de l'article L. 222-1 B, la stratégie nationale bas-carbone, fixée par décret, « définit la marche à suivre pour conduire la politique d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre dans des conditions soutenables sur le plan économique à moyen et long termes ».

* 5 Décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat.

* 6 Proposition de loi n° 176(2016-2017) portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique adoptée par le Sénat le 30 janvier 2018.

* 7 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

* 8 Loi n° 90-1130 du 19 décembre 1990 portant création de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

* 9 Amendement CE649 de M. Cellier, rapporteur et amendement identique CE561 de Mme Tiegna.

* 10 Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 11 Amendement CE44 de Mme Sarles et sous-amendement CE699 de M. Cellier.

* 12 Amendements n° 693 de M. Cellier, 811 de Mme Peyrol, 694 de M. Cellier, 700 de M. Cellier 701 de M. Cellier, 702 de M. Cellier, 704 de M. Cellier et 705 de M. Cellier.

* 13 Amendement n° 702 de M. Cellier.

* 14 Le Haut Conseil pour le climat est présidé par Mme Corinne Le Quéré, climatologue, et composé de M. Michel Colombier, directeur scientifique de l'IDDRI, M. Alain Grandjean, co-fondateur et associé de Carbone 4, Mme Marion Guillou, présidente du Conseil d'AGREENIUM, Mme Céline Guivarch, directrice de recherche à l'École des Ponts et économiste au CIRED, M. Jean-Marc Jancovici, associé fondateur de Carbone 4 et président fondateur de The Shift Project, M. Benoît Leguet, directeur général d'I4CE; Mme Valérie Masson-Delmotte, chercheuse en sciences du climat, Mme Katheline Schubert, professeur d'économie, M. Jean-François Soussana, directeur de recherche et vice-président de l'INRA en charge de la politique internationale et Mme. Laurence Tubiana, présidente et directrice exécutive de la Fondation européenne pour le climat.

* 15 Haut Conseil pour le climat, Agir en cohérence avec les ambitions, juin 2019.

* 16 Décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 relatif au Haut Conseil pour le climat.

* 17 Conseil d'État, avis n° 397668 sur un projet de loi relatif à l'énergie, au climat et à l'environnement, 25 avril 2019.

* 18 Loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.

* 19 COM-225, COM-227, COM-229 et COM-231.

* 20 Conseil constitutionnel, décision n° 2015-718 du 13 août 2015, Loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, considérant 65 : « Considérant que le principe de la séparation des pouvoirs fait obstacle à ce que, en l'absence de disposition constitutionnelle le permettant, le pouvoir de nomination par une autorité administrative ou juridictionnelle soit subordonné à l'audition par les assemblées parlementaires des personnes dont la nomination est envisagée »

* 21 À l'exception de la région d'Ile-de-France, des régions d'outre-mer et des collectivités territoriales à statut particulier exerçant les compétences d'une région.

* 22 Article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales.

* 23 Amendement CE20 de Mme Sarles.

* 24 L'article L. 122-1 du code de l'environnement définit les projets comme « la réalisation de travaux de construction, d'installations ou d'ouvrages, ou d'autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris celles destinées à l'exploitation des ressources du sol ».

* 25 Article L. 122-1 du code de l'environnement.

* 26 Article R. 122-2 du code de l'environnement. Il s'agit, entre autres, des installations classées pour la protection de l'environnement, des installations nucléaires de base, de certaines infrastructures de transport ou encore des projets ayant une incidence sur les milieux aquatiques, littoraux et maritimes.

* 27 Directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement.

* 28 Dans son 12 e considérant, le Conseil d'État souligne « que la mission régionale d'autorité environnementale doit être regardée [...] comme disposant d'une autonomie réelle, la mettant en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur les projets, plans et programmes qui lui sont soumis ».

* 29 Décret n° 2012-616 du 2 mai 2012 relatif à l'évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l'environnement.

* 30 Dans une décision n°360212 du 26 juin 2015, le Conseil d'État a jugé que ces dispositions réglementaires étaient illégales.

* 31 L'article 9 bis de la directive 2011/92/UE dispose que « les États membres veillent à ce que l'autorité ou les autorités compétentes accomplissent les missions résultant de la présente directive de façon objective et ne se trouvent pas dans une position donnant lieu à un conflit d'intérêts. Lorsque l'autorité compétente est aussi le maître d'ouvrage, les États membres appliquent au minimum, dans leur organisation des compétences administratives, une séparation appropriée entre les fonctions en conflit lors de l'accomplissement des missions résultant de la présente directive. »

* 32 Le point 2 de l'annexe III prévoit que la sensibilité environnementale des zones géographiques susceptibles d'être affectées par un projet prend notamment en compte l'utilisation existante et approuvée des terres, la richesse, la disponibilité, la qualité et la capacité de régénération des ressources naturelles de la zone et de son sous-sol, ainsi que la capacité de charge de l'environnement naturel.

* 33 Directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement.

* 34 Décret n° 2016-9 du 8 janvier 2016 concernant les ouvrages de production et de transport d'énergie renouvelable en mer.

* 35 Article L. 821-2 du code de justice administrative.

* 36 Amendement n° 388 de M. Alauzet et sous-amendement n° 931 du Gouvernement.

* 37 Décret n° 2016-849 du 28 juin 2016 relatif au plan climat-air-énergie territorial. Ce plan définit notamment les objectifs stratégiques de la collectivité concernée pour atténuer le changement climatique, le combattre efficacement et le programme d'actions à réaliser pour, entre autres, augmenter la production d'énergies renouvelables, adapter le territoire au changement climatique et limiter les émissions de gaz à effet de serre.

* 38 https://www.territoires-climat.ademe.fr/observatoire

* 39 Haut Conseil pour le climat, Agir en cohérence avec les ambitions , juin 2019.

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