Article 55
(art. L. 1424-1 du code de la santé publique)
Programmes régionaux de santé publique

Cet article a pour objet de réécrire l'article L. 1424-1 du code de la santé publique afin de reconnaître au conseil régional la faculté de définir des objectifs particuliers à la région en matière de santé, d'élaborer et de mettre en oeuvre les actions régionales correspondantes, sous réserve d'en tenir informé le représentant de l'Etat dans la région.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 1424-1 énumère les compétences des régions en reproduisant les dispositions de l'article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales.

Aux termes de cet article, le conseil régional dispose d'une compétence générale pour régler, par ses délibérations, les affaires de la région.

Il a plus particulièrement compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région et l'aménagement de son territoire et pour assurer la préservation de son identité, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des départements et des communes.

Les dispositions proposées figurent déjà à l'article 2 du projet de loi relatif à la politique de santé publique , adopté le 14 octobre 2003 par l'Assemblée nationale.

Aussi votre commission des Lois vous soumet-elle un amendement de suppression de l'article 55.

Article 56
(art. L. 1423-1 à L. 1423-3, L. 2112-1, L. 2311-5, L. 3111-11, L. 3111-12 nouveau, intitulé du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la troisième partie, art. L. 3112-2 à L. 3112-5, intitulé du titre II du livre Ier de la troisième partie, art. L. 3121-1, L. 3121-3 nouveau du code de la santé publique)
Transfert à l'Etat de la responsabilité des campagnes
de prévention et de lutte contre les grandes maladies

Cet article a pour objet de confier à l'Etat l'entière responsabilité des campagnes de prévention et de lutte contre les grandes maladies.

1. Le droit en vigueur

La loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 a attribué au département la responsabilité de la protection sanitaire de la famille et de l'enfance de la famille, de la lutte contre les « fléaux sociaux » que sont la tuberculose et les maladies vénériennes, du dépistage précoce des affections cancéreuses et de la surveillance après traitement des anciens malades ainsi que des actions de lutte contre la lèpre. Les dispensaires antituberculeux antivénériens sont ainsi devenus des services départementaux.

Avant le 1 er janvier 1984, toutes les communes de plus de 20.000 habitants avaient l'obligation de créer un bureau municipal d'hygiène. Cette obligation n'avait cependant guère été respectée. Depuis cette date, la création de services communaux d'hygiène et de santé est devenue facultative et deux types de structures coexistent :

- les services créés avant 1984, au nombre de 208, continuent, sous l'autorité du maire, d'exercer sur le territoire de la commune des attributions en matière de vaccination, de désinfection et de contrôle des règles d'hygiène ; ils bénéficient à ce titre de la dotation générale de décentralisation ;

- les services créés volontairement par les communes depuis le 1 er janvier 1984, peu nombreux, ne bénéficient d'aucune prérogative particulière ni d'aucun concours financier de l'Etat.

Le partage des compétences instauré par la loi du 22 juillet 1983 ne favorise pas la cohérence des politiques de santé :

- s'agissant des « fléaux sociaux », la lutte contre le tabagisme, l'alcool et les toxicomanies demeure de la responsabilité de l'Etat alors que la lutte contre la tuberculose et les maladies vénériennes incombe au département ;

- si les centres de vaccination contre la tuberculose, la lutte contre la lèpre et les maladies vénériennes relèvent de la responsabilité du département, l'Etat en assure la surveillance épidémiologique et conduit la lutte contre les autres maladies transmissibles ;

- enfin, si le dépistage précoce du cancer et la surveillance des anciens malades incombent au département, le traitement de la maladie relève du système de soin de droit commun et la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a confié à l'Etat la mission de décider des programmes de dépistage organisé des maladies aux conséquences mortelles.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les départements et les communes exerceraient inégalement leur compétence . Sept départements n'auraient pas de lieu fixe de consultation antituberculeuse, douze disposeraient d'un nombre de lieux de consultation supérieur à 1 pour 100.000 habitants, alors que ce ratio serait inférieur à 0,5 dans 42 départements. Treize départements n'auraient créé aucun lieu de consultation en matière de lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et vingt-cinq en seraient dépourvus s'agissant de la lutte contre le cancer.

Enfin, il est à noter que le transfert de compétences effectué en 1983 aurait mérité, parallèlement, une actualisation des dispositions du code de la santé publique encadrant leur exercice. En particulier, la conception cloisonnée du système de santé, organisé autour de certaines pathologies (tuberculose, maladies sexuellement transmissibles, cancer) avait déjà perdu, en 1983, sa pertinence. L'Etat a d'ailleurs été dans l'obligation, ultérieurement, de créer des dispositifs spécifiques pour faire face à l'émergence de nouvelles maladies comme le virus de l'immunodéficience humaine ou les hépatites.

Aussi le rapport de notre collègue Michel Mercier au nom de la mission commune d'information du Sénat chargée de dresser le bilan de la décentralisation, présidée par notre ancien collègue Jean-Paul Delevoye, proposait-il de « rétablir une unité d'action en matière de politique de santé en transférant à l'Etat les actions départementales de prévention sanitaire », ajoutant qu'« une telle mesure de recentralisation apportée sera[it] en réalité une opération de clarification et de simplification car la prévention sanitaire constitue un élément essentiel de la politique de santé qui ne saurait relever d'approches cloisonnées en fonction de compétences. »

2. Le dispositif proposé par le projet de loi

Le présent article tend donc à modifier de nombreux articles du code de la santé publique afin de transférer à l'Etat les compétences confiées au département dans les domaines :

- de la lutte contre la lèpre ;

- du dépistage précoce des affections cancéreuses et de la surveillance après traitement des anciens malades ;

- de la prophylaxie de la tuberculose et des maladies vénériennes (lutte contre les « fléaux sociaux »).

Le premier paragraphe (I) tend à réécrire les articles L. 1423-1 et L. 1423-2 afin, respectivement :

- de retirer ces compétences au département, à l'exception de la responsabilité de la protection sanitaire de la famille et de l'enfance.

- de lui donner la possibilité de participer à la mise en oeuvre des programmes de santé publique, notamment des programmes de dépistage des cancers, dans le cadre de conventions avec l'Etat.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 1423-2 prévoit que les dispensaires antivénériens, destinés à assurer la prophylaxie et le traitement ambulatoire des maladies vénériennes dans le cadre du département, sont ouverts gratuitement à tous les consultants, ou spécialisés à certaines catégories de consultants.

En conséquence, le deuxième paragraphe (II) tend à abroger l'article L. 1423-3, aux termes duquel les dispensaires antivénériens sont des services du département.

Le troisième paragraphe (III) a pour objet de modifier l'article L. 2112-1, relatif au service départemental de protection maternelle et infantile, afin d'effectuer une coordination avec la réécriture de l'article L 1423-1 proposée par le I.

Le quatrième paragraphe (IV) tend à modifier l'article L. 2311-5 afin de préciser que les centres de planification ou d'éducation familiale peuvent, dans le cadre de leurs activités de prescription contraceptive et sous la responsabilité d'un médecin, assurer le dépistage et le traitement ambulatoire des infections sexuellement transmissibles, dont l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine, alors qu'il est actuellement indiqué qu'ils peuvent assurer le dépistage et le traitement des maladies transmises par la voie sexuelle.

Le cinquième paragraphe (V) tend à réécrire l'article L. 3111-11, afin de mettre un terme à la compétence du conseil général à l'égard des services départementaux de vaccination, tout en ouvrant à l'ensemble des collectivités territoriales la possibilité d'exercer des activités en matière de prévention vaccinale, à la condition de signer une convention avec l'Etat.

Ces conventions devraient définir des objectifs, distinguer des catégories de bénéficiaires, énumérer les moyens mis en oeuvre, prévoir la transmission de données, mettre en place une évaluation des actions et assurer la coordination des différents intervenants.

Le sixième paragraphe (VI) tend à insérer un article L. 3111-12 dans le code de la santé publique visant à :

- confier au pouvoir réglementaire le soin de définir les conditions de mise en oeuvre des dispositions du code de la santé publique relatives à la vaccination ;

- imposer la gratuité des vaccinations réalisées par les établissements et organismes habilités par l'Etat ou chargés de la mise en oeuvre des conventions entre l'Etat et les collectivités locales.

? Le septième paragraphe (VII) tend à modifier l'intitulé du chapitre II du titre premier (« Lutte contre les épidémies et certaines maladies transmissibles ») du livre premier (« Lutte contre les maladies transmissibles ») de la troisième partie (« Lutte contre les maladies et dépendances ») du code de la santé publique afin de viser non seulement la lutte contre la tuberculose mais également la lutte contre la lèpre.

? Le huitième paragraphe (VIII) tend à réécrire l'article L. 3112-2 afin de poser le principe selon lequel la lutte contre la tuberculose et la lèpre relève de l'Etat, tout en ouvrant aux collectivités territoriales la faculté d'y concourir dans le cadre d'une convention avec l'Etat.

Cette convention devrait préciser les objectifs poursuivis, les catégories de bénéficiaires, les moyens mis en oeuvre, les données dont la transmission à l'Etat serait obligatoire, les modalités d'évaluation des actions entreprises ainsi que, le cas échéant, les relations avec les autres organismes intervenant dans le même domaine.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 3112-2 dispose que la vaccination dispensée dans les services de vaccination de la population civile par le vaccin antituberculeux BCG est gratuite, tout en laissant aux personnes soumises à la vaccination obligatoire la faculté de se faire vacciner dans des conditions tarifaires de droit commun en dehors de ces services.

? En conséquence, le neuvième paragraphe (IX) tend à réécrire l'article L. 3112-3, aux termes duquel les dispensaires antituberculeux et les services de vaccination de la population civile par le vaccin antituberculeux BCG sont des services du département, afin :

- de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de définir les conditions de mise en oeuvre de la lutte contre la tuberculose et la lèpre ;

- de prévoir la gratuité de la vaccination, du suivi médical et de la délivrance des médicaments lorsqu'ils sont assurés par un établissement ou un organisme habilité par l'Etat ou chargé de la mise en oeuvre des conventions entre l'Etat et les collectivités locales, étant précisé que la pris en charge des dépenses afférentes relèverait soit de l'assurance-maladie soit des départements au titre de l'aide médicale.

Par coordination avec la suppression de la compétence du département, le dixième paragraphe (X) tend à abroger les articles L. 3112-4 et L. 3112-5 du code de la santé publique, relatifs au fonctionnement des dispensaires antituberculeux et des services de vaccination de la population civile par le vaccin antituberculeux BCG.

? Le onzième paragraphe (XI) a pour objet de réécrire l'intitulé du titre II du livre premier (« Lutte contre les maladies transmissibles ») de la troisième partie (« Lutte contre les maladies et dépendances ») du code de la santé publique afin de faire référence non seulement à l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine mais également aux infections sexuellement transmissibles.

? Il s'agit d'une mesure de coordination avec le douzième paragraphe (XII) qui tend à réécrire l'article L. 3121-1 du code de la santé publique, afin de poser le principe de la compétence de l'Etat pour définir les politiques de lutte non seulement contre le virus de l'immunodéficience humaine mais également contre les infections sexuellement transmissibles, tout en ouvrant aux collectivités territoriales la possibilité d'y concourir dans le cadre d'une convention signée avec l'Etat qui devrait comprendre les mêmes mentions que les conventions visées aux articles L. 3111-11 et L. 3112-2.

? Le treizième paragraphe (XIII) tend à insérer un article L. 3121-3 dans le même code ayant pour objet :

- de confier à un arrêté du ministre chargé de la santé le soin d'encadrer l'activité des structures chargées de la prévention, du dépistage, du diagnostic et du traitement ambulatoire des infections sexuellement transmissibles ;

- de garantir la gratuité des prestations fournies par ces structures et l'anonymat des personnes y ayant recours.

3. La position de la commission des Lois

Votre commission des Lois approuve le transfert à l'Etat les compétences confiées au département dans les domaines de la lutte contre la lèpre, du dépistage précoce des affections cancéreuses et de la surveillance après traitement des anciens malades et de la prophylaxie de la tuberculose et des maladies vénériennes.

Elle considère en revanche qu'il n'est pas souhaitable de permettre aux collectivités territoriales de continuer à exercer des activités dans ces domaines. La responsabilité de l'Etat étant clairement affirmée, il doit l'assumer pleinement. Les vingt dernières années sont riches d'exemples attestant de la tentation permanente de l'Etat de faire financer l'exercice de ses compétences par les collectivités territoriales.

En conséquence elle vous soumet six amendements tendant à supprimer toutes les dispositions du présent article ouvrant aux collectivités territoriales la faculté de participer aux missions de l'Etat par voie de convention.

Elle vous propose également un amendement de suppression du quatrième paragraphe du présent article dans la mesure où ses dispositions trouveraient davantage leur place dans le projet de loi relatif à la politique de santé publique que dans un texte consacré à la décentralisation.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 56 ainsi modifié .

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