c) La nécessité d'un renversement de tendance
La
situation actuelle fragilise nos régimes de retraites,
déjà confrontés à d'importants besoins de
financement compte tenu des évolutions démographiques. Sans
évolution des politiques de l'emploi, notamment en faveur des
salariés âgés, l'équilibre à venir restera
particulièrement difficile à atteindre.
On estime ainsi
généralement qu'une hausse de un point du taux d'emploi ferait
diminuer la part des besoins de financement des retraites exprimés par
rapport au PIB de 0,2 à 0,4 point d'ici 2040
.
En outre, le vieillissement de la population active va se traduire par une
augmentation de la fraction des plus de quarante-cinq ans dans les actifs.
Or les entreprises qui ont souvent recouru aux mesures d'âge restent mal
préparées au défi du vieillissement de la main-d'oeuvre,
comme l'observe une étude de la DARES :
« Si le
thème du vieillissement est de plus en plus présent dans le
débat public, il ne semble pas inquiéter outre mesure les
entreprises, dont la réflexion sur le sujet reste limitée. Moins
d'un établissement sur cinq gère aujourd'hui sa pyramide des
âges de façon anticipée, et cette pratique est surtout
répandue parmi les plus grands établissements. Même ceux
qui sont les plus confrontés au vieillissement de leurs effectifs se
préoccupent peu de la question et lorsqu'ils prennent des mesures, c'est
rarement à titre préventif »
10(
*
)
.
Certes, on assiste aujourd'hui à l'amorce d'un changement d'état
d'esprit. Ainsi, les pouvoirs publics, au niveau européen, ont souscrit
des engagements particulièrement explicites en faveur du
relèvement du taux d'emploi, notamment des plus âgés.
Les conclusions des sommets européens sur
l'emploi des
seniors
Le
sommet de Lisbonne
(mars 2000) avait proposé aux États
membres de conduire une politique active pour l'emploi se donnant un objectif
global consistant
« à porter le taux d'emploi des personnes
âgées de 15 à 64 ans (actuellement de 61 % en
moyenne) à un niveau aussi proche que possible de 70 % en 2010 et
à faire en sorte que la proportion des femmes actives (actuellement de
51 % en moyenne) dépasse 60 % d'ici 2010 »
.
Le
sommet de Stockholm
(mars 2001) avait affirmé la
résolution des États d'atteindre l'objectif du plein emploi comme
moyen de répondre au
« défi du vieillissement de la
population »
. Il proposait des objectifs intermédiaires
pour 2005, soit un taux d'emploi de 67 % pour les hommes de 15 à
64 ans et de 57 % pour les femmes. Mais surtout il fixait un objectif
spécifique de 50 % pour le taux d'emploi moyen des hommes et des
femmes âgés de 55 à 64 ans. Il demandait en outre un
rapport sur les moyens d'atteindre ces objectifs.
Le
sommet de Barcelone
(mars 2002) annonçait une
évaluation à mi-parcours, en 2006, des résultats des
politiques actives de l'emploi au regard de l'objectif
d'élévation des taux d'emploi. Il affirmait que la
stratégie européenne pour l'emploi devait
« mettre
l'accent sur le relèvement du taux d'emploi en encourageant l'aptitude
à l'emploi et en supprimant les obstacles ou les freins à
l'acceptation d'un emploi et au maintien dans cet emploi, tout en maintenant
des normes de protection élevées, propres au modèle social
européen »
. Il proposait encore de réduire les
incitations individuelles à la retraite anticipée, d'offrir aux
travailleurs âgés davantage de possibilités de demeurer sur
le marché du travail (par exemple par la retraite progressive). Il
précisait enfin :
« il faudrait chercher d'ici 2010
à augmenter progressivement d'environ cinq ans l'âge moyen auquel
cesse, dans l'Union européenne, l'activité
professionnelle »
.
Source : Rapport « cumul emploi-retraite », Jean-Marc Boulanger, mars 2003.
De
même, les entreprises commencent à réfléchir sur la
gestion de l'emploi des salariés âgés et reconnaissent
qu'une augmentation de la part des salariés de plus de
cinquante ans pourrait avoir des effets positifs sur le plan collectif.
La loi du 21 août 2003 a fait le choix de recentrer les mesures
d'âge autour de deux dispositifs : un dispositif visant à
prendre en compte la pénibilité du travail, dans le cadre des
cessations anticipées d'activité des travailleurs salariés
(CATS), et un dispositif « plans sociaux ». A cet
effet :
- une partie des préretraites d'entreprise a été
assujettie à une contribution spécifique afin de dissuader les
employeurs d'avoir recours à cette mesure d'âge ;
- les CATS ont été recentrés vers les seuls
salariés ayant réalisé des travaux pénibles ;
- le dispositif de la préretraite progressive a été
supprimé.