Art. 465 du code civil : Sanction de l'irrégularité des actes accomplis,
au cours de la mesure de protection, par le majeur protégé ou par la personne chargée de sa protection

Cet article lie la sanction de l'irrégularité des actes accomplis, pendant la durée de la mesure, par le majeur protégé ou par la personne chargée de sa protection, au degré d'incapacité de celui-ci.

1. Le droit en vigueur

Dans sa rédaction actuelle, l'article 502 prévoit, conformément au principe de l'incapacité générale du majeur en tutelle, que les actes passés par le tutélaire postérieurement au jugement d'ouverture de la tutelle sont nuls de droit . Ainsi, les actes faits par le majeur après le jugement consacrant son incapacité sont présumés avoir été accomplis sous l'empire d'un trouble mental. L'ouverture de la tutelle dispense donc d'examiner l'état réel du majeur au moment de l'acte considéré. Lorsqu'elle est demandée, la nullité de droit doit être prononcée au vu de l'expédition de la décision plaçant le majeur en tutelle, le juge ne disposant d'aucun pouvoir d'appréciation.

Toutefois , en application des articles 450 et 495, le majeur en tutelle peut valablement accomplir certains actes de la vie courante 95 ( * ) , comme par exemple l'engagement de petites dépenses.

La nullité prévue par l'article 502 est édictée dans le seul intérêt du majeur protégé. Elle présente donc un caractère relatif , et seuls le tuteur, le majeur qui a recouvré sa capacité ou ses héritiers ont qualité pour la demander 96 ( * ) . La confirmation de l'acte nul demeure possible .

L'action en nullité se prescrit dans les conditions prévues par l'article 1304 : elle peut être engagée dans les cinq ans qui suivent le jour où le majeur a eu connaissance de l'acte. Pour les héritiers, le délai court à compter du décès, à moins qu'il n'ait commencé à courir à une date antérieure contre le majeur protégé.

2. Le dispositif proposé

Cet article fait dépendre le régime de sanction du degré d'incapacité du majeur, qu'il soit placé en curatelle ou en tutelle .

Pour les actes pouvant être faits par le curatélaire ou par le tutélaire seul , soit en application d'une disposition expresse du code civil, soit du fait d'un aménagement de la mesure par jugement spécial, le régime des actions en rescision ou en réduction , prévues par l'article 435 en cas de sauvegarde de justice, s'appliquera . Pour ces actes, le majeur reste capable en effet et se trouve donc dans la même situation que celui qui est placé sous sauvegarde de justice. Ce régime ne trouvera cependant pas à s'appliquer lorsque l'acte aura été accompli sur autorisation du conseil de famille ou du juge . Le fait que l'acte ait été préalablement autorisé exclut en effet qu'il soit inutile ou disproportionné ou qu'il puisse léser le majeur.

Pour les actes soumis à l'obligation d'assistance, l'irrégularité pourra être sanctionnée par une annulation . Le majeur n'étant pas dans une incapacité complète, l'annulation sera cependant subordonnée à l'établissement d'un préjudice pour l'intéressé.

Pour les actes soumis à un régime de représentation - c'est-à-dire en cas d'incapacité complète du majeur -, le projet de loi prévoit une nullité de plein droit, sans obligation d'établir que le majeur a subi un préjudice . Ainsi, le juge devra annuler les actes que le majeur protégé a accomplis seul alors qu'il aurait dû être représenté par son curateur ou son tuteur.

En outre, le projet de loi fixe les sanctions applicables dans le cas où le curateur ou le tuteur a outrepassé le mandat qui lui a été donné par le juge . Deux hypothèses sont prévues : d'une part, la représentation du majeur pour un acte qui ne requiert qu'une simple assistance, d'autre part, le non respect de l'obligation de requérir préalablement l'autorisation du conseil de famille ou du juge. Pour ces deux hypothèses, il est prévu une nullité de plein droit, même sans préjudice pour le majeur protégé .

En revanche, dans la rédaction initiale du projet de loi, aucune sanction n'était prévue dans l'hypothèse de l'accomplissement par curateur ou le tuteur d'un acte que le majeur pouvait faire seul. Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a réparé cette omission et prévu la nullité de plein droit des actes du curateur ou du tuteur empiétant sur le domaine dans lequel le majeur peut agir sans représentation ou assistance .

Comme dans le droit en vigueur, ces actions en rescision, réduction ou nullité se prescriront par cinq ans dans les conditions de l'article 1304. Pour les actes accomplis par le curateur ou le tuteur, il est prévu que ce délai courre à compter du jour où l'acte est passé, et pour les actes faits par le majeur protégé à compter du jour où il en a eu connaissance.

Le curateur ou le tuteur, le majeur qui a recouvré sa capacité ou ses héritiers auront la qualité pour demander la nullité ainsi que , comme l'a précisé l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, la rescision ou la réduction . Pour les actions concernant des actes faits par le majeur, la possibilité pour le curateur ou le tuteur de représenter le majeur sera cependant subordonnée à une autorisation préalable du conseil de famille ou, à défaut, du juge des tutelles.

En outre, la confirmation d'un acte irrégulier fait par le curateur ou le tuteur est subordonnée au respect de trois conditions : elle devra être autorisée par le conseil de famille ou, à défaut, par le juge des tutelles ; elle ne pourra être demandée que tant que la mesure n'aura pas cessé ; et elle devra intervenir avant l'extinction du délai de prescription de cinq ans.

Il n'y a en revanche pas lieu de prévoir une possibilité de confirmation dans les autres cas d'irrégularité :

- dans l'hypothèse d'un empiétement de la personne protégée sur les pouvoirs du curateur ou du tuteur, il suffira que ceux-ci ne demandent pas la nullité pour que l'acte soit maintenu ;

- en cas d'irrégularité d'un acte laissé à la capacité de la personne protégée, il serait paradoxal de prévoir une confirmation dans la mesure où la nullité ou la réductibilité de l'acte est conditionnée à un préjudice ou une lésion.

* 95 Cass 1 ère civ, 3 juin 1980.

* 96 Cass 1 ère civ, 31 janvier 1995.

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