b) La part minoritaire de l'aide « de terrain »
(1) L'importance de l'aide multilatérale

L'APD nette réalisée par la France en 2008 se décompose à hauteur de 59 % en aide bilatérale (4,5 milliards d'euros) et pour 41 % en aide multilatérale et européenne (3,1 milliards d'euros).

On peut observer une tendance à la hausse de la part de l'aide française passant par les canaux communautaires et multilatéraux : la part de l'aide multilatérale (y compris communautaire) dans l'APD française ne représentait que 28 % en 2005. Cette progression s'explique notamment par les contributions de la France :

- au budget de l'Union européenne au titre du développement (progression de 15 % entre 2005 et 2008, soit alors 975 millions d'euros) ;

- au Fonds européen de développement (FED : progression de 17 % entre 2005 et 2008, soit alors 777 millions d'euros) ;

- à la Banque mondiale ( via l'Association internationale de développement [AID] : progression de 36 % entre 2005 et 2008, soit alors 373,5 millions d'euros) ;

- enfin, au Fonds mondial Sida (auquel la contribution entre 2005 a plus que doublé, passant de 140 millions d'euros à 300 millions d'euros).

Evolution des contributions internationales de la France

(CP, en millions d'euros)

Organisations

2005

Part du total

2006

Part du total

2007

Part du total

2008

Part du total

Union européenne

Dont FED

Dont budget communautaire (quote-part de l'APD)

1.457

632

825

65 %

1.544

663

881

72 %

1.575

698

877

59 %

1.753

777

975

57 %

Institutions financières internationales

Dont Banque Mondiale

(+ FMI)

Dont Banques régionales de développement

439

273

166

20 %

121

363

(+ 407)

165

6 %

554

395

159

21 %

576

407

169

19 %

Fonds mondiaux et autres agences multilatérales

197

9 %

308

14 %

389

15 %

558

18 %

Système des Nations Unies

150

6 %

163

8 %

172

5 %

190

6 %

Total de l'aide multilatérale

2.243

100 %

2.136

100 %

2.648

100 %

3.085

100 %

Source : ministère des affaires étrangères et européennes

Ce niveau élevé de l'aide multilatérale et, par ailleurs, celui des annulations et allègements de dette (666 millions d'euros en 2008, soit près de 9 % de l'aide totale) se réalise au détriment de l'aide bilatérale « de terrain » , qui constitue la part visible et donc la plus « politique » de l'aide française.

(2) L'importance de dépenses dont la comptabilisation en APD est discutable

Si on considère, dans l'aide bilatérale, la seule partie programmable, la part dédiée au multilatéral représente environ 55 % en 2008, soit un rapport de proportion inverse à celui que permet d'établir la prise en compte de la partie non programmable.

En effet, l'aide bilatérale comporte une partie programmable (1,7 milliard d'euros en 2008, soit 22 % de l'APD française) et une partie non programmable (2,9 milliards d'euros, soit 38 % de l'APD). Cette seconde part comprend les annulations de dette et la recherche au développement dans les pays donateurs, mais aussi des dépenses dont la comptabilisation en APD est critiquable : l'aide aux collectivités d'outre-mer éligibles (Mayotte et Wallis et Futuna), les frais d'écolage des étudiants étrangers en France (mais votre rapporteur spécial constate un progrès sur ce plan : cf. l'encadré ci-après), ainsi que la prise en charge des réfugiés originaires des pays en développement.

La nécessité de mieux cerner l'ensemble des dépenses françaises en faveur de l'aide au développement

Chaque année, votre rapporteur spécial souligne le poids de certaines dépenses dont la comptabilisation en APD est contestable , d'ailleurs contestée par certains de nos partenaires de l'OCDE, par leur nature où leur destination géographique. Il s'agit en particulier de trois catégories de dépenses constatées a posteriori :

- l' aide à Mayotte et à Wallis-et-Futuna , qui ne correspond pas à l'acception commune de l'aide au développement, visant normalement les Etats étrangers ;

- l' écolage des étudiants étrangers en France, retracé par le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » de la mission « Recherche et enseignement supérieur » ;

- l' aide aux réfugiés originaires des pays en développement (soit 91,5 % des réfugiés en 2007), dont rend compte le programme 303 « Immigration et asile » de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Néanmoins, deux progrès doivent être signalés en ce domaine :

- d'une part, l'aide en direction de Mayotte ne devrait plus être comptabilisée, à l'horizon 2011 , dans la mesure où l'île deviendra un département . En 2008, cette aide, cumulée à celle dont a bénéficié Wallis et Futuna, s'est élevée à 381 millions d'euros ;

- d'autre part, à l'invitation du CAD, les frais relatif à l'écolage, à compter de 2008, ont été décomptés au titre de l'APD dans la limite des frais relatifs aux étudiants ressortissants de pays en développement . En conséquence, le coût imputé est passé de 879 millions d'euros en 2007 à 637 millions d'euros en 2008.

En revanche, les dépenses en faveur des réfugiés (224 millions d'euros en 2008) restent comptabilisées, alors qu'il ne s'agit pas directement d'une aide au développement.

A l'inverse, certaines dépenses publiques qui concourent effectivement au développement ne sont pas comptabilisables selon les normes du CAD, notamment la dépense fiscale assise sur les dons aux organisations de solidarité internationale (OSI), les mécanismes de garantie, la sécurisation de l'aide alimentaire et l'essentiel de la coopération militaire et de défense. Votre rapporteur spécial estime donc nécessaire de poursuivre, sur ce terrain, la négociation avec nos partenaires de l'OCDE , conformément aux orientations données par le Comité de modernisation des politiques publiques (CMPP) dans le cadre de la « révision générale des politiques publiques » (RGPP).

En outre, votre rapporteur spécial souhaite que le document de politique transversale (DPT) relatif à l'aide au développement, à l'avenir, chiffre le plus précisément possible et détaille l'ensemble des financements français qui contribuent à cette aide sans, pourtant, qu'il soient actuellement comptabilisés dans les montants notifiés au CAD, y compris la mobilisation de dons privés (dont les enjeux ont été mis en relief à la suite du tsunami survenu en Indonésie fin 2004 cf. le rapport d'information n° 202 (2004-2005) de votre rapporteur spécial avec notre collègue Adrien Gouteyron). Le DPT annexé au PLF pour 2011 pourra ainsi rendre compte de l'effort global réalisé par la France, en la matière, en 2009.

Votre rapporteur spécial rejoint ainsi les propositions formulées par notre collègue député Henriette Martinez, en vue d'une plus juste prise en compte de l'effort national d'aide au développement, dans son rapport sur l'APD française remis au Premier ministre le 31 juillet 2009. Dans cette perspective, il se félicite qu'une mission de l'Inspection générale des finances sur la générosité privée en faveur du développement ait été prévue par le CICID du 5 juin 2009.

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