III. L'AVANT PROJET DU GOUVERNEMENT

Composé de huit articles, l'avant projet de loi du Gouvernement témoignait d'une grande proximité intellectuelle avec la proposition de loi sénatoriale, tout en reprenant à son compte certains traits significatifs de la proposition de l'Assemblée nationale.

Ainsi, ce texte prévoyait-il uniquement la possibilité de la gestion externe et la sortie en rente, ce qui le rapprochait incontestablement de la proposition de loi sénatoriale.

Il retenait également de la proposition sénatoriale, la qualification des plans de retraite comme contrats d'assurance de groupe soumis aux dispositions des articles L. 141 et suivants du code des assurances.

En revanche, cet avant-projet renonçait au titre consacré de fonds de pension, utilisé par la proposition de loi sénatoriale, au profit de celui de "fonds d'épargne retraite" et de "plans d'épargne retraite" (PER) termes utilisés par la proposition de M. Jean-Pierre Thomas.

Il reprenait également des députés l'idée de constituer les fonds de pension sous la forme de personnes morales, distinctes aussi bien au souscripteur que de rapporteur de capital. Mais à la différence du texte finalement adopté par l'Assemblée nationale, ces personnes morales devaient être constituées sous la forme sociale de droit commun et soumis pour l'essentiel aux dispositions du code des assurances.

Enfin, il retenait des conclusions de la Commission des finances de l'Assemblée, l'idée d'un comité de surveillance, chargé de participer collectivement à la gestion des plans.

IV. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'architecture générale de la proposition de loi, soumise à votre examen, est désormais la suivante.

Les fonds d'épargne retraite sont des personnes morales qui ont pour objet exclusif la gestion de plans d'épargne retraite (article 9). Les plans d'épargne retraite peuvent être souscrits par un employeur ou un groupement d'employeur (article 6).

Un fonds d'épargne retraite peut gérer simultanément plusieurs plans d'épargne retraite.

L'adhésion aux plans d'épargne retraite peut être effectuée, sur une base volontaire, par tout salarié majeur titulaire d'un contrat de travail de droit privé relevant du régime d'assurance vieillesse de base et des régimes de retraite complémentaire (article premier).

1. Mise en place

Les plans d'épargne retraite pourraient être souscrits par l'employeur ou un groupement d'employeurs (article 6) et proposés à l'adhésion de l'ensemble de leurs salariés sur le fondement d'un accord collectif de travail, au sens du code du travail, conclu au sein de l'entreprise, d'un groupement d'entreprises, ou à l'échelon professionnel ou interprofessionnel.

A défaut, ils pourraient également être souscrits par décision unilatérale de l'employeur ou d'un groupement d'employeurs, constatée par un écrit remis par ceux-ci à chaque salarié.

2. Bénéficiaires

L'article premier prévoit que la souscription d'un plan d'épargne retraite soit ouverte à l'ensemble des salariés titulaires d'un contrat de travail et relevant de l'assurance vieillesse de base du régime général (ou du régime agricole) de sécurité sociale et aux régimes de retraite complémentaire obligatoires.

Ne seraient donc pas concernés les dirigeants qui ne sont pas également liés à la société par un contrat de travail. Seraient également exclus les salariés ressortissant aux régimes spéciaux de sécurité sociale et les travailleurs indépendants, à qui des dispositifs ayant le même objet sont déjà offerts dans le cadre de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle (dite loi Madelin).

3. Cotisations

L'article 7 prévoit que le plan soit alimenté par des versements de salariés. Ces versements pourraient être complétés par un abondement de l'employeur qui ne saurait dépasser le quadruple des versements du salarié.

Les versements des salariés et l'abondement de l'employeur seraient purement facultatifs. Ils pourraient être suspendus ou repris sans pénalité dans des conditions fixées par les accords collectifs ou, à défaut, par décret.

4. Gestion

Les plans d'épargne retraite seraient gérés par des fonds d'épargne retraite, personnes morales soumises à agrément administratif préalable, qui auraient pour activité exclusive la gestion de tels plans (article 9). Ces fonds pourraient avoir le statut de société anonyme d'assurance de société d'assurance mutuelle, d'institution de prévoyance régie par le Code de la sécurité sociale ou d'organisme mutualiste.

Ces fonds auraient l'obligation de gérer les droits dans un cadre prudentiel strict adapté à des opérations à très long terme.

Ils auraient à informer annuellement chaque affilié des données essentielles concernant leur gestion.

Ils seraient soumis au contrôle des commissions de contrôle des assurances et des institutions de prévoyance et des mutuelles réunies en formation commune.

En outre, chaque plan serait suivi par un comité de surveillance composé pour moitié au moins de représentants élus des participants.

En vue de favoriser le renforcement des fonds propres des entreprises, la part des titres de taux (obligations, notamment) dans les placements des fonds d'épargne retraite serait limitée à 65 %.

En cas de rupture du contrat de travail, les salariés pourraient soit conserver leurs droits dans le plan de leur ancienne entreprise, soit en demander le transfert intégral sans pénalité sur un autre plan d'épargne retraite.

5. Prestations

Les droits acquis dans le plan ne seraient ouverts qu'à la liquidation de la retraite de base et prendraient la forme d'une rente viagère.

Par dérogation :

- le titulaire du plan pourrait obtenir un versement en capital dans la double limite de 20 % de la provision mathématique du plan et de 100.000 francs ;

- les rentes d'un montant inférieur à un seuil fixé par arrêté (vraisemblablement 500 francs) pourraient faire l'objet d'un versement unique.

Le titulaire aurait la faculté de demander la réversibilité totale ou partielle de la rente, après son décès, sur son conjoint survivant ou sur ses enfants mineurs, incapables ou invalides.

6. Régime social et fiscal

Les dispositions adoptées sur proposition du Gouvernement ou avec son accord visent à ouvrir au profit des versements des salariés et des abondements des employeurs au plan d'épargne retraite des possibilités de déduction distinctes des dispositifs actuels d'exonération sociale et fiscale des contributions de retraite complémentaire.

Il est prévu :

- une exonération d'impôt sur le revenu du total des versements des salariés et des abondements dans la limite de 5 % de la rémunération brute ou de 20 % du plafond annuel moyen de sécurité sociale. S'agissant du résultat imposable de l'entreprise, le principe de la limitation de la déductibilité de l'abondement a été abandonné ;

- une exonération de cotisations de sécurité sociale de l'abondement de l'employeur dans une limite annuelle à déterminer par décret. Selon les indications fournies par le Gouvernement, il est envisagé de la fixer a 4.000 francs majorés de 2 % du salaire brut (pour une rémunération annuelle brute de 120.000 francs, la limite s'élèverait ainsi a 4.000 + 2.400 = 6.400 francs, soit 5,3 %). L'exonération proposée s'étendrait aussi aux autres cotisations (chômage, retraite complémentaire AGIRC et ARRCO) à la CSG, à la CRDS, à la taxe d'apprentissage et aux participations-formation-continue et construction.

Les rentes et capitaux versés au titre des plans d'épargne retraite seraient passibles de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des pensions, avec abattements de 20 et 10 %, et, pour les versements en capital, un système de quotient permettrait de limiter les effets de la progressivité de l'impôt.

Enfin, les fonds d'épargne retraite seraient assujettis à l'impôt sur les sociétés.

Le schéma de fonctionnement des fonds d'épargne retraite, qui figure à la page suivante, permet de bien distinguer les différents acteurs et les différentes relations :

- adhésion au plan par les salariés ;

- souscription du plan par les employeurs ou leurs groupements ;

- constitution du fonds par les entreprises d'assurance ;

- gestion du fonds, en direct par les entreprises d'assurance ou déléguée à des gestionnaires pour compte de tiers.

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