III. UN FAIBLE TAUX DE CHÔMAGE

A. LA MONDIALISATION N'IMPLIQUE PAS UN TAUX DE CHÔMAGE ÉLEVÉ, MAIS SEMBLE CONSTITUER UN FACTEUR DE PRÉCARITÉ

Au pire des ralentissements économiques récents, le taux de chômage de la Corée et du Japon, normalement de l'ordre de 3-4 %, n'a été que de 6,9 % en 1998 pour la Corée et 5,4 % en 2002 pour le Japon , comme l'indique le graphique ci-après.

Le taux de chômage

(en % de la population active)

Source : OCDE

Dans les deux pays, le taux de chômage présente une double caractéristique :

- il est structurellement bas ;

- il fluctue relativement peu.

Autrement dit, dans ces deux pays, pour expliquer le faible taux de chômage il faut expliquer le faible niveau des deux composantes du chômage :

- le chômage conjoncturel, ou keynésien, c'est-à-dire celui qui provient d'une insuffisance de l'activité économique ;

- le chômage structurel, c'est-à-dire celui qui subsisterait quel que soit le niveau de l'activité économique.

La décomposition du taux de chômage entre ces deux composantes peut conduire à des résultats très différents selon la méthodologie utilisée. En particulier, celle utilisée par l'OCDE conduit à attribuer plus de 80 % du chômage au chômage structurel pour la quasi-totalité des pays (90 % dans le cas du Japon 53 ( * ) ). Compte tenu de la signification incertaine de ces chiffres 54 ( * ) , on se gardera d'en déduire que les Etats de l'OCDE sont à peu près « à égalité » pour le chômage conjoncturel, et que la bonne performance du Japon et de la Corée en matière de taux de chômage devrait être expliquée exclusivement en termes structurels.

On examinera donc ci-après les facteurs pouvant expliquer un faible niveau des chômages conjoncturel et structurel dans les deux pays.

1. Un faible chômage conjoncturel grâce à une logique de « partage du travail »

a) Dans le cas du Japon, une production par travailleur plus faible que dans l'Union européenne

Le faible chômage conjoncturel du Japon peut s'expliquer par une production par travailleur relativement modeste. Autrement dit, l'activité économique de ce pays est « riche en emplois ».

Ainsi, alors qu'un travailleur moyen des Etats-Unis ou de l'Union européenne produit respectivement 80.000 dollars ou 60.000 dollars de PIB (70.000 dollars dans le cas de la France), ce chiffre n'est que de 55.000 dollars dans le cas du Japon, comme l'indique le graphique ci-après.

Production par travailleur (2002)

(en dollars ; conversion faite sur la base de
la parité de pouvoir d'achat)

Source : d'après l'OCDE

Ainsi, le travailleur japonais moyen produit 10 % de moins que le travailleur européen moyen. Cette donnée montre un faible niveau relatif de la productivité du travail, dans la mesure où la durée moyenne du travail est de l'ordre de 1.900 heures par an au Japon (et aux Etats-Unis), contre environ 1.500 heures dans les principaux pays européens, dont la France.

Ce phénomène ne peut en revanche être constaté dans le cas de la Corée, dont la production par travailleur est analogue à ce qu'elle est dans des pays européens de développement comparable, comme le Portugal ou la Grèce.

* 53 Les « Perspectives économiques de l'OCDE » ne fournissent pas d'estimation du taux de chômage structurel de la Corée.

* 54 Selon M. Edmond Malinvaud, « (...) le taux de chômage structurel, version OCDE, ne peut guère servir à juger de l'efficacité des politiques structurelles, car il diffère peu de toute autre mesure du taux de chômage observé, après lissage pour en éliminer les fluctuations à court terme. La dénomination de taux de chômage structurel ne peut qu'introduire de la confusion » (commentaire du rapport « Plein emploi » de M. Jean Pisani-Ferry, Conseil d'analyse économique, 2000).

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