B. QUELS ENSEIGNEMENTS EN TIRER ?

1. Les politiques de relance budgétaire sont inefficaces

Les deux phases de creusement volontaire du déficit public (1993-1996 et 1997-2000) ont permis de relancer temporairement la croissance du PIB, mais celle-ci s'est effondrée une fois la stimulation terminée, comme l'indique le graphique ci-après.

Solde public et croissance du PIB

(en points de PIB et en %)

Source : OCDE

Cet échec s'explique par le fait qu'au Japon comme en France, une augmentation des dépenses de travaux publics d'un montant donné augmente le PIB d'un montant à peine supérieur : les économistes disent que le « multiplicateur keynésien », censé permettre la diffusion d'une relance budgétaire dans l'ensemble de l'économie, est à peu près égal à l'unité 66 ( * ) . L'effet multiplicateur des dépenses fiscales serait encore plus faible 67 ( * ) .

2. C'est la charge de la dette qui rend le taux d'endettement public plus ou moins supportable

Un autre enseignement de la situation des finances publiques au Japon est que c'est la charge de la dette qui rend le taux d'endettement public plus ou moins supportable.

Ainsi, si le Japon s'accommode d'une dette publique brute de 160 % du PIB, c'est parce que la charge des intérêts y est de seulement 3 % du PIB, ce qui correspond à celle normalement payée par un Etat ayant un taux d'endettement public d'environ 60 % du PIB, comme l'indique le graphique ci-après.

Dette publique et intérêts de la dette publique

(en points de PIB)

Source : Commission européenne

Cela s'explique par le fait que les taux d'intérêt à long terme sont de l'ordre de 1,5 % au Japon, contre 4 % dans la plupart des autres pays, comme l'indique le graphique ci-après.

Les taux d'intérêt à long terme (2005)

(en %)

Source : Commission européenne

Le faible niveau des taux d'intérêt japonais est provisoire. Il provient d'un triple phénomène :

- la faible demande de crédit des ménages et des entreprises japonais, ces dernières continuant à se désendetter ;

- le faible niveau des taux directeurs, qui favorise l'achat d'obligations d'Etat par les banques ;

- l'achat d'obligations d'Etat par la Banque du Japon, correspondant à 25 % des émissions et à 15 % du stock des obligations d'Etat.

La « normalisation » de la politique monétaire, la reprise de l'investissement privé, et à plus long terme la diminution du taux d'épargne consécutive au vieillissement de la population, devraient normalement susciter une augmentation des taux d'intérêt à long terme, et donc un alourdissement de la charge de la dette publique. Une augmentation des taux de 1 point s'accompagnerait d'une hausse des charges d'intérêts équivalant, à terme, à 2 points de PIB.

Ainsi, la délégation a pu identifier certaines divergences d'appréciation au sujet de la politique monétaire devant être menée entre le ministère des finances et le gouvernement d'une part, la Banque du Japon d'autre part. En particulier, M. Fukui Toshihiko, gouverneur de la Banque du Japon, a souligné que le taux de change neutre était pour le Japon égal à la somme de la croissance potentielle et de l'inflation, chacune de 1,5 %, soit 3 % au total.

A plus long terme, le vieillissement de la population devrait susciter une diminution du taux d'épargne des ménages, et donc une augmentation des taux d'intérêt.

* 66 A l'époque de ces politiques de relance, l'EPA (Economic Planning Agency) estimait l'effet multiplicateur des dépenses de travaux publics à 1,21 la première année, 1,31 la seconde et 1,24 la troisième. Le FMI était plus pessimiste, l'évaluant entre 1 et 1,2 (Anne-Valérie Hermez, « Finances publiques japonaises : tonneau des Danaïdes ? », in Conjoncture, BNP Paribas, juillet 1999).

* 67 Selon la même source, l'EPA l'évaluait alors à 0,41 la première année, 0,57 la seconde et 0,22 la troisième.

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