Mardi 15 septembre 2009

- Présidence de M. Josselin de Rohan, président -

Armes à sous-munitions - Examen du rapport

La commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Joëlle Garriaud-Maylam sur le projet de loi n°575 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de la convention sur les armes à sous-munitions.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a indiqué que, à l'image de la convention d'Ottawa de 1997 sur les mines antipersonnel, la convention sur les armes à sous-munitions signée à Oslo le 4 décembre 2008 visait à interdire l'emploi, la détention, la production et le transfert d'armes qui, par leurs caractéristiques, se sont révélées particulièrement dangereuses et meurtrières pour les populations civiles résidant dans les zones de conflit, des années encore après la fin des hostilités.

Elle a rappelé que la commission était déjà particulièrement sensibilisée à la problématique des armes à sous-munitions et de leur impact humanitaire, à la suite du rapport d'information qu'elle avait présenté avec M. Jean-Pierre Plancade en décembre 2006 et qui constituait le premier rapport parlementaire sur le sujet. Elle a ajouté qu'elle avait personnellement continué à s'engager en faveur d'un renforcement du droit international, notamment au sein de la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel et en participant à différentes conférences internationales qui ont abouti à l'adoption de la convention d'Oslo.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a précisé que la notion d'armes à sous-munitions constituait une appellation générique désignant tout système d'armes constitué d'un contenant, ou « munition-mère », destiné à emporter et disperser plusieurs munitions explosives, ou « sous-munitions », conçues pour fonctionner à l'impact. Les sous-munitions peuvent être emportées par tout type de contenant, tel que des missiles, bombes, obus ou roquettes.

La quasi-totalité des bombes ou obus à sous-munitions utilisés au cours des dernières décennies se caractérisent par des taux de défaillance élevés, laissant sur le terrain une forte quantité d'engins non-explosés. Les zones bombardées avec des armes à sous-munitions ont été durablement polluées et les populations civiles y sont donc exposées, longtemps après la fin du conflit, à des accidents mortels ou extrêmement graves. Les enquêtes montrent que 98 % des victimes sont des civils et 40 % sont des jeunes de moins de 18 ans.

Dans la période récente, les armes à sous-munitions ont été utilisées en 2003 en Irak par les forces américaines et, dans une moindre mesure, par les Britanniques, ainsi que par l'artillerie israélienne au Sud-Liban en août 2006, puis par les deux parties lors du conflit russo-géorgien d'août 2008.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a indiqué que, jusqu'à la convention d'Oslo, aucun texte international n'interdisait ou ne restreignait la détention et l'emploi d'armes à sous-munitions. En 2003, un protocole relatif aux restes explosifs a été adopté dans le cadre de la convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques produisant des effets traumatiques excessifs ou frappant sans discrimination. En instaurant une responsabilité de l'utilisateur pour l'enlèvement et la destruction des munitions non explosées laissées sur le terrain, ce texte est apparu comme une incitation à la retenue dans l'emploi des armes à sous-munitions et à l'élimination des armes les moins fiables. Il ne répond toutefois que très partiellement aux problèmes causés par ces armes qui présentent des risques humanitaires disproportionnés au regard de leur utilité militaire.

L'élaboration d'un instrument spécifique sur les armes à sous-munitions apparaissait donc indispensable. Tel était l'objet du « processus d'Oslo », engagé en février 2007, qui a abouti à l'adoption de la convention sur les armes à sous-munitions à Dublin, en mai 2008, puis à sa signature officielle à Oslo le 4 décembre 2008.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a ensuite présenté les principales dispositions de la convention sur les armes à sous-munitions.

L'article 2 définit les armes à sous-munitions dont la fabrication, la détention, l'emploi ou le transfert seront interdits.

Au sens de la convention, une arme à sous-munition désigne une munition classique conçue pour disperser ou libérer des sous-munitions explosives dont chacune pèse moins de 20 kg.

Sont toutefois exclues les munitions ou sous-munitions éclairantes ou fumigènes ou celles conçues à des fins exclusives de défense anti-aérienne, ainsi que les munitions ou sous-munitions conçues pour produire des effets électriques ou électroniques.

Sont également exclues de la définition les armes à sous-munitions comportant moins de dix sous-munitions, dont chacune pèse plus de 4 kg, est conçue pour détecter et attaquer une cible constituée d'un objet unique et possède un mécanisme d'autodestruction et un mécanisme d'autodésactivation.

L'article 3 impose la destruction des stocks d'armes à sous-munitions prohibées dans un délai de huit ans après l'entrée en vigueur de la convention pour l'Etat considéré, avec possibilité de demander une prolongation supplémentaire de quatre ans. Il permet cependant de conserver un nombre réduit d'armes aux fins d'expertise et de formation au déminage, comme cela est prévu par la convention d'Ottawa pour les mines antipersonnel.

L'article 5 pose le principe de l'assistance aux victimes et l'article 6 celui de la coopération et de l'assistance internationale entre les Etats parties à la convention.

L'article 21 autorise les Etats parties à s'engager dans des opérations militaires aux côtés d'Etats non signataires de la convention, afin de préserver l'interopérabilité lors des opérations multinationales.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a précisé que la France avait activement participé à l'élaboration de la convention d'Oslo en jouant un rôle utile de lien entre les pays les plus engagés dans le combat contre les armes à sous-munitions et ceux qui, du fait de leurs responsabilités internationales, devaient nécessairement prendre en compte les impératifs militaires.

Elle a rappelé que la France avait toujours fait preuve d'une attitude responsable au regard des armes à sous-munitions, le seul cas d'utilisation par les forces françaises remontant à la guerre du Golfe de 1991, au cours de deux missions aériennes ponctuelles, sur des objectifs strictement militaires. Ces bombes d'aviation à sous-munitions ont été depuis lors retirées du service et les stocks ont été entièrement détruits entre 1996 et 2002.

L'armée française ne dispose aujourd'hui que d'un nombre réduit de systèmes à sous-munitions, qui obéissent à des hypothèses d'emploi extrêmement spécifiques et restrictives. Il n'y a plus aucun système d'armes à sous-munitions en production. En outre, deux des systèmes en service, le missile de croisière antipiste Apache et l'obus d'artillerie Bonus, sont des armes de précision, qui comportent un nombre limité de sous-munitions pourvues de dispositifs garantissant leur fiabilité. Ces deux armements n'entrent pas dans le champ des armes prohibées par la convention, et la France pourra les conserver.

La ratification de la convention par la France impliquera en revanche de renoncer aux roquettes M-26 du lance-roquette multiple (LRM), dont le rapport du Sénat avait d'ailleurs préconisé le retrait, ainsi qu'à l'obus d'artillerie à grenade OGR. Le coût de la destruction de ces deux systèmes est évalué entre 30 et 60 millions d'euros pour le budget de la défense.

En conclusion, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a précisé que la convention d'Oslo comptait actuellement 98 Etats signataires. Elle a regretté qu'une quarantaine de pays militairement importants n'aient pas signé cette convention. C'est le cas des Etats-Unis d'Amérique, de la Russie, de la Chine, de l'Inde, du Pakistan, de la Turquie et de plusieurs pays d'Asie, d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Huit pays de l'Union européenne restent également pour l'instant hors de la convention.

Elle s'est néanmoins déclarée convaincue que, comme on avait pu le constater pour les mines antipersonnel avec la convention d'Ottawa, la convention d'Oslo constituerait une norme humanitaire de référence, et que nombre d'Etats non signataires seraient de ce fait dissuadés de recourir à ces armes.

Elle s'est réjouie que l'examen de ce texte par le Sénat en session extraordinaire permette à la France de déposer son instrument de ratification dans les tout prochains jours, ce qui accélèrera l'entrée en vigueur de la convention. Elle a proposé à la commission d'adopter le projet de loi.

A l'issue de l'exposé de Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, M. Josselin de Rohan, président, a rendu hommage à son implication personnelle dans la question des conséquences humanitaires de l'emploi des armes à sous-munitions, notamment au travers du rapport d'information qu'elle avait présenté en 2006, puis de son action en faveur de l'aboutissement du processus d'Oslo.

M. Didier Boulaud a indiqué que le groupe socialiste approuverait le projet de loi, tout en apportant certaines nuances d'appréciation sur ce qu'avait été l'attitude des autorités françaises quant à l'interdiction des armes à sous-munitions. Il a rappelé que la France avait hésité à s'engager dans le processus d'Oslo et privilégiait initialement les discussions menées à Genève dans le cadre de la convention sur certaines armes classiques. Il a évoqué les dispositions relatives à l'interopérabilité entre forces militaires des Etats parties et non parties à la convention. Il a estimé que la France pouvait s'interroger sur son implication dans des coalitions internationales comprenant des Etats qui n'ont pas adhéré à la convention d'Oslo. Enfin, il a souligné la nécessité d'incorporer dans le droit pénal les mesures d'interdiction prévues par la convention.

M. Robert Hue a estimé que la conclusion de la convention d'Oslo sur les armes à sous-munitions constituait un pas extrêmement important, même si l'adoption d'une réglementation internationale aurait gagné à être plus rapide. Soulignant que nombre d'Etats militairement importants n'avaient pas signé la convention, il a jugé indispensable que la France oeuvre résolument à faire évoluer leur position.

Mme Dominique Voynet a estimé que la convention d'Oslo, bien que marquant un pas important du droit international, ne pouvait être considérée comme l'aboutissement ultime du combat contre les armes à sous-munitions et leurs conséquences pour les populations civiles. Elle a considéré que les doctrines d'emploi et les conditions réelles d'utilisation des armements importaient autant que la réglementation de leur détention.

Mme Catherine Tasca s'est également réjouie de la prochaine ratification par la France de la convention d'Oslo et a rappelé que les armes à sous-munitions frappaient particulièrement les populations civiles. Si la convention laisse entrevoir une réduction de l'impact de ces armes, il n'en reste pas moins que les types de conflits actuels épargnent de moins en moins les populations civiles.

M. Jean-Pierre Chevènement a rappelé que les armes à sous-munitions n'avaient pas été conçues contre les populations civiles, mais qu'il s'agissait d'armes de saturation destinées à neutraliser les mouvements de forces blindées. Telle était notamment la fonction du lance-roquettes multiple, en service dans l'armée française. Il a observé que ni les Etats-Unis, ni la Russie n'avaient envisagé de renoncer aux armes à sous-munitions. Il s'est demandé si les conséquences de la signature de la convention d'Oslo par la plupart des pays européens, dont la France, avaient été évaluées au regard du projet d'une Europe dotée de capacités militaires significatives et autonomes.

M. Jacques Berthou a souligné l'impact des mines antipersonnel et des sous-munitions non explosées des années après la fin des conflits. Il a souhaité que les pays non signataires de la convention d'Oslo mais responsables de la pollution de nombreuses zones de conflit, telles que le Laos ou le Cambodge, contribuent beaucoup plus activement aux opérations de déminage indispensables à la protection des populations civiles.

A la suite de ces interventions, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- la France a participé au processus d'Oslo dès la première conférence, tenue en février 2007, et le ministre français des affaires étrangères s'est particulièrement impliqué lors de la conférence de Dublin de mai 2008, au cours de laquelle est intervenu l'accord sur le texte de la convention ; le rôle actif de la France a été largement reconnu par la communauté internationale lors de la signature de la convention à Oslo, en décembre 2008 ;

- eu égard à la durée habituelle des négociations internationales, le processus d'Oslo a été extrêmement rapide, puisqu'une année et demi seulement s'est écoulée entre la première réunion et la signature de la convention ;

- le Gouvernement a annoncé qu'un projet de loi de transposition de la convention d'Oslo en droit interne serait examiné par le Parlement au cours de la prochaine session ;

- les autorités françaises sont résolues à oeuvrer pour créer une dynamique d'adhésion à la convention, au travers des contacts bilatéraux avec les Etats non signataires ; au niveau parlementaire, l'Assemblée parlementaire de l'OTAN pourrait être un cadre approprié pour agir auprès des pays alliés qui n'ont pas encore signé la convention ;

- la convention d'Oslo constituera, comme la convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel, une norme internationale emblématique ; il sera beaucoup plus difficile qu'aujourd'hui aux pays non signataires d'utiliser des armes à sous-munitions, compte tenu de la pression morale exercée par l'opinion internationale ;

- au-delà des conséquences de l'emploi des armes à sous-munitions, plus de 90 % des victimes de conflits sont aujourd'hui des civils ;

- les armes à sous-munitions auxquelles la France et la plupart de ses partenaires européens ont renoncé en signant la convention d'Oslo ont été conçues dans le contexte de la guerre froide ; l'impact de cet abandon sur les capacités militaires paraît très faible, eu égard aux hypothèses d'engagement des forces européennes ;

- la convention d'Oslo pose le principe de l'assistance aux victimes et de la coopération internationale pour le déminage.

La commission a ensuite adopté le présent projet de loi à l'unanimité.

Mercredi 16 septembre 2009

- Présidence de M. Josselin de Rohan, président -

Accord de coopération entre la France et l'Inde relatif à l'énergie nucléaire - Examen du rapport

La commission a d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Xavier Pintat sur le projet de loi n° 335 (2008-2009), autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a indiqué que la France et l'Inde avaient posé le principe d'une coopération nucléaire civile dans deux déclarations conjointes des 12 septembre 2005 et 20 février 2006. L'accord de coopération pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire, signé à Paris le 30 septembre 2008, en constituait la concrétisation.

L'Inde est actuellement le sixième consommateur mondial d'énergie et sa demande s'accroît de manière extrêmement rapide du fait de sa démographie, de la croissance économique et de la volonté d'améliorer l'accès de la population au réseau électrique. L'énergie nucléaire, avec dix-sept réacteurs en fonctionnement, ne couvre que 3 % des besoins en électricité de l'Inde. Son développement est un axe privilégié par les autorités indiennes pour répondre à la progression de la demande, dans le cadre d'un plan prévoyant de multiplier par dix la capacité de production d'électricité d'origine nucléaire avant 2020. L'Inde envisage ainsi de se doter de vingt-cinq à trente réacteurs supplémentaires, plus puissants que les réacteurs actuels.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a indiqué que cette politique ambitieuse supposait la reprise d'une coopération internationale qui avait été en partie remise en cause dès le premier essai nucléaire indien de 1974, puis fortement réduite à la suite d'une décision de principe prise en 1992 par le Groupe des fournisseurs nucléaires (Nuclear Suppliers Group - NSG). Celui-ci exclut en effet l'exportation de technologie nucléaire vers les Etats n'ayant pas accepté les « garanties généralisées » de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), c'est-à-dire le placement de la totalité de leur programme nucléaire sous le contrôle de l'agence. Or l'Inde, du fait de son programme nucléaire militaire, ne pouvait satisfaire à cette condition.

Cette situation a évolué à la suite de négociations intervenues durant près de trois années avec l'Inde ainsi qu'au sein de l'AIEA et du NSG.

L'Inde a adopté en 2006 un plan de séparation entre ses installations et activités nucléaires militaires, d'une part, et nucléaires civiles, d'autre part. Elle a identifié les installations qu'elle soumettra au contrôle de l'AIEA à des échéances définies et qui comprennent à la fois certaines installations civiles existantes et toutes les futures centrales nucléaires.

Un nouvel accord de garanties, entré en vigueur cette année, a été conclu entre l'Inde et l'AIEA. L'Inde a également signé, le 15 mai 2009, un protocole additionnel qui donne à l'AIEA les pouvoirs d'inspection et de contrôle les plus étendus sur les installations et activités civiles soumises aux garanties.

L'Inde s'est engagée à ne pas transférer de technologies d'enrichissement et de retraitement aux Etats qui n'en sont pas possesseurs et à établir un système national de contrôle des exportations. Elle s'est également engagée à maintenir son moratoire unilatéral sur les essais nucléaires et à collaborer à la conclusion d'un traité multilatéral d'interdiction de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires.

Au vu de cette démarche, les quarante-cinq Etats du NSG ont adopté, le 6 septembre 2008 par consensus, une décision exemptant l'Inde de la clause des garanties généralisées. Le NSG a autorisé ses membres à transférer des articles ou technologies destinées à des applications pacifiques dans les installations nucléaires civiles indiennes soumises aux garanties de l'AIEA.

Cette décision du NSG a ouvert la voie à la conclusion par l'Inde d'accords de coopération bilatéraux avec la France, les Etats-Unis d'Amérique et la Russie.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a souligné l'évolution notable de la position de l'Inde au regard du régime international de non-prolifération nucléaire. Bien que n'ayant pas adhéré au traité de non-prolifération (TNP), l'Inde a souscrit auprès des instances internationales des engagements concrets précis en matière de non-prolifération qui lui ouvrent désormais l'accès à la coopération nucléaire civile.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a estimé que ces engagements, tout comme le fait que l'Inde n'ait jamais été par le passé à l'origine de flux de prolifération en matière nucléaire, avaient fortement pesé dans la décision du NSG qui ne pouvait également ignorer l'impact des besoins énergétiques indiens sur la lutte contre les changements climatiques et l'intérêt de l'énergie nucléaire pour contribuer à les satisfaire.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a ensuite présenté les principales dispositions de l'accord franco-indien du 30 septembre 2008 qui énumère les différents champs de coopération, notamment la recherche fondamentale, la coopération relative aux réacteurs nucléaires civils, la fourniture de combustible, la gestion du combustible nucléaire et des déchets, la sûreté et la radioprotection, ainsi que les recherches sur la fusion nucléaire dans le cadre d'ITER, l'Inde étant l'un des partenaires du projet.

L'accord souligne l'objet exclusivement pacifique de la coopération et il prévoit explicitement que les matières, équipements et technologies transférés sont soumis aux garanties de l'AIEA. De même, conformément aux règles internationales, les exportations de biens et technologies nucléaires vers l'Inde ne pourront s'effectuer que vers des installations soumises aux garanties de l'AIEA.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a ajouté qu'AREVA avait été sélectionné au mois d'août dernier pour la construction de deux réacteurs nucléaires et la fourniture du combustible associé. Ultérieurement, quatre autres réacteurs pourraient également être réalisés sur le même site, sur la côte occidentale de l'Inde.

En conclusion, M. Xavier Pintat, rapporteur, a souligné l'importance des enjeux énergétiques pour l'Inde et rappelé les raisons ayant conduit le Groupe des fournisseurs nucléaires à lever les obstacles à la coopération nucléaire civile avec ce pays. Il a demandé à la commission d'adopter le projet de loi autorisant l'approbation d'un accord s'inscrivant dans le cadre du partenariat stratégique franco-indien.

A la suite de cet exposé, M. Jean-Pierre Chevènement s'est demandé si la décision prise par le NSG à l'égard de l'Inde ne risquait pas d'être inévitablement ressentie comme une fragilisation du TNP, dans la mesure où l'Inde se voit proposer une coopération nucléaire civile alors qu'elle a développé un programme nucléaire militaire hors du cadre du TNP. Il a toutefois reconnu qu'un consensus large, incluant notamment la Chine, s'était établi sur la situation particulière de l'Inde, tant au sein du NSG qu'au conseil des gouverneurs de l'AIEA. Il s'est interrogé sur ce que serait l'attitude du NSG si le Pakistan ou Israël, non adhérents au TNP, venaient à demander le bénéfice du même traitement.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a rappelé que la situation de l'Inde à l'égard du TNP avait constitué le principal obstacle au développement d'une coopération nucléaire civile, ce qui expliquait la longueur des négociations approfondies menées avec le NSG. Par ailleurs, si l'Inde a développé un programme nucléaire militaire, elle n'a enfreint aucun de ses engagements internationaux, puisqu'elle n'avait pas adhéré au TNP. Alors qu'il paraît aujourd'hui difficile que l'Inde renonce à l'arme nucléaire, les décisions prises au sein de l'AIEA et du NSG ont le mérite de l'engager dans un processus vertueux, puisqu'elle a accepté les contrôles de l'AIEA sur les activités civiles et a souscrit à plusieurs engagements concrets en matière de non-prolifération.

S'agissant des autres Etats non parties au TNP, la question de l'octroi d'une exemption aux règles du NSG n'est pas aujourd'hui posée. Il faut souligner la différence de situation existant entre l'Inde et le Pakistan, tant en matière de besoins énergétiques que de politique de non-prolifération.

M. Jean-Pierre Chevènement a observé que les engagements pris par l'Inde constituaient des garanties unilatérales et qu'elles n'étaient pas consolidées dans un traité juridiquement contraignant.

M. Michel Boutant s'est interrogé sur la couverture des besoins de l'Inde en uranium, et de manière plus globale, sur les perspectives d'approvisionnement à long terme en ce minerai eu égard à l'état des réserves mondiales et aux projets de développement de l'énergie nucléaire.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a répondu que les réserves connues d'uranium permettent d'assurer les approvisionnements durant plusieurs décennies et que les futurs réacteurs seraient beaucoup moins consommateurs en uranium.

M. Didier Boulaud a estimé que l'exemption décidée au bénéfice de l'Inde illustrait une certaine inadaptation du TNP aux réalités actuelles. Il s'est interrogé sur les arguments que l'Iran pourrait tirer des avantages accordés à l'Inde.

M. René Beaumont a demandé des précisions sur le NSG et sur la part, dans ses directives, entre les objectifs de non-prolifération et de développement du marché du nucléaire civil.

M. Jean-Pierre Chevènement a souhaité savoir si l'Inde pourrait bénéficier de transferts de technologies relatives à l'enrichissement ou au retraitement du combustible nucléaire. Il a évoqué les garanties apportées par l'Inde et estimé que la décision du NSG ne pouvait être entendue que comme une exception unique à la règle générale.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a rappelé les conditions qui avaient été posées à la décision du NSG et il a estimé que les négociations avec l'Inde revenaient à l'encourager dans la voie d'un rapprochement du régime international de non-prolifération. Il a précisé que le NSG réunissait quarante-cinq Etats disposant de technologies nucléaires, comprenant les Etats de l'OCDE, mais également la Russie, la Chine, l'Afrique du Sud, le Brésil, l'Argentine ou des pays de l'ex-Union soviétique. Il a ajouté que la raison d'être du NSG était bien la lutte contre la prolifération nucléaire, au travers d'une politique commune de contrôle des exportations de biens et technologies nucléaires. Il a également indiqué qu'il n'était pas prévu de transférer à l'Inde des technologies liées à l'enrichissement ou au retraitement du combustible nucléaire. Les pays du G8 appliquent actuellement un moratoire sur ce type de transfert et le NSG pourrait modifier très rapidement ses directives pour définir des critères plus stricts encadrant ces transferts.

M. Joseph Kergueris a constaté que la décision prise à l'égard de l'Inde prenait en compte la situation particulière de ce pays, qui n'a pas contribué à la prolifération, qui possède un régime démocratique et qui a souscrit à des engagements concrets sur le contrôle de son programme nucléaire civil. Il s'est demandé si cette politique de conditionnalité ne pouvait pas avoir valeur d'exemple vis-à-vis d'autres pays.

M. Josselin de Rohan, président, a lui aussi souligné la singularité de la situation indienne. S'agissant de l'Iran, il a rappelé que le Conseil de sécurité avait toujours reconnu son droit au développement de l'énergie nucléaire civile et à la coopération internationale, dès lors qu'il n'y avait pas de doute sur le respect par l'Iran des engagements internationaux qui découlent de son adhésion au TNP.

La commission a ensuite adopté le présent projet de loi à l'unanimité.

Nomination de rapporteurs

La commission a ensuite nommé rapporteurs :

- M. Joseph Kergueris sur le projet de loi n° 582 (2008-2009) relatif à l'action extérieure de l'État ;

- M. André Dulait sur le projet de loi n° 607 (2008-2009) relatif à la lutte contre la piraterie et à l'exercice des pouvoirs de police de l'État en mer.