Mardi 8 juin 2010

- Présidence de M. Dominique Braye, président -

Suite et fin de la réunion d'orientation sur les conclusions de la mission

La mission commune poursuit le débat sur les orientations et les conclusions de son rapport.

M. Dominique Braye, président. - Nous aborderons lors de cette réunion la question de la fiscalité, puis celle de la gouvernance.

Vous avez tous reçu la note sur les modifications apportées à la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) par la loi de finances pour 2009. Le dispositif en vigueur est-il satisfaisant ou doit-il être modifié ?

J'ai, pour ma part, déjà évoqué en séance publique la double taxation des mâchefers issus de l'incinération, qui ont déjà subi la TGAP à l'entrée dans l'usine d'incinération. Nous avons également abordé la question de l'instauration d'une franchise d'impôt correspondant à un volume incompressible de déchets à traiter. Puisqu'il est malheureusement inévitable d'avoir à stocker ou à incinérer une fraction non négligeable des déchets, faut-il taxer les déchets ménagers dès le premier kilogramme ? Faut-il imposer une TGAP moindre aux collectivités qui valorisent plus de matières organiques ? La TGAP doit d'abord inciter à adopter de nouveaux comportements vertueux. D'autres questions restent en suspens, comme l'éventuelle incitation à la collecte des déchets en porte-à-porte pour améliorer la méthanisation. La TGAP doit-elle frapper les installations de co-incinération qui utilisent les déchets comme combustibles, à l'instar des cimenteries ? Nous devons au moins dégager des orientations, voire des recommandations dans notre rapport.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - La loi de finances pour 2009 comporte une disposition qui demande au Gouvernement de présenter un rapport au Parlement accompagnant le projet de loi de finances pour 2013 et portant sur l'incidence de la TGAP. Il me semble préférable que ce rapport soit avancé d'un an au moins.

En matière de valorisation énergétique, la méthanisation n'est pas taxée, contrairement à l'incinération et au stockage en centre d'enfouissement avec ou non récupération de biogaz, à l'exception des bioréacteurs. La dernière fois, nous avons évoqué l'instauration d'une TGAP à taux plein en l'absence de toute récupération des biogaz, d'une TGAP à taux adouci lorsque la valorisation excède 70% et d'une taxation nulle lorsqu'est utilisé un bioréacteur, dont les performances sont très largement supérieures à celles d'un centre d'enfouissement technique (CET). Nous avons vu sur place récemment, à l'invite de M. Pastor, que les bioréacteurs permettent de récupérer bien plus de gaz que toute autre technique de stockage.

Faut-il proposer quelques modifications, ou, dès à présent, demander un moratoire ?

Mme Évelyne Didier. - Je souhaite que la mission parvienne à des conclusions consensuelles. Nous partageons très généralement l'avis de M. Braye, quand il insiste sur la nécessité de règles du jeu stables alors qu'il s'agit de décider d'investissements à longue durée de vie.

Deuxièmement, comme la création de nouveaux centres d'enfouissement ou de nouvelles usines d'incinération ne rencontre qu'une très faible acceptation sociale, nous devons utiliser au mieux l'existant. À cette fin, développer le tri est utile, mais comment faire ? En taxant fortement les déchets enfouis ou en pratiquant une pédagogie de la récompense qui incite au tri et à la valorisation ?

Plusieurs députés, de la majorité ou de l'opposition, m'ont dit que la population avait l'impression désagréable que ses efforts s'accompagnaient de coûts supplémentaires. Comment éviter que les plus vertueux ne payent pas davantage ?

À dire vrai, comme l'a indiqué Chantal Jouanno, il faudrait apprécier non une technique isolée, mais l'ensemble du projet d'un territoire. Il est vrai que c'est plus facile à dire qu'à faire...

Je suis d'accord pour que l'on augmente la TGAP frappant l'enfouissement qui ne valorise rien, mais il faut la minorer en cas de récupération sous forme de production d'électricité.

M. Alain Vasselle. - C'est déjà le cas.

Mme Évelyne Didier. - À condition d'atteindre une valorisation de 75 % !

M. Daniel Raoul . - Je m'interroge sur le cas hybride du tri mécanobiologique (TMB) qui ne figure pas dans le tableau. Si j'ai bien compris, les tonnages sont taxés à l'entrée. Pourquoi cette distinction ?

M. Dominique Braye, président et M. Daniel Soulage, rapporteur. - Il n'y a pas de TGAP sur la méthanisation et sur le TMB !

M. Daniel Raoul . - Après la méthanisation, ce qui reste part en CET ou sert de comburant dans les cimenteries.

M. Dominique Braye, président. -Il n'y a toujours pas de TGAP !

M. Daniel Raoul . - Ce n'est pas ce que l'on nous a dit à l'ADEME.

M. Dominique Braye, président. - Théoriquement, une fois que la fraction fermentescible a permis la méthanisation, les digestats sont dirigés vers le compostage.

Le TMB ne permet guère de valorisation ultérieure du compost obtenu, en raison de normes qui vont devenir de plus en plus sévères. Aujourd'hui, la méthanisation ne réussit pas à procurer de l'énergie dans des conditions économiquement acceptables, faute de biodéchets en quantité suffisante, ou en raison de la qualité des déchets collectés.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - La TGAP porte non sur la méthanisation, mais exclusivement sur ce qui est incinéré ou stocké.

M. Dominique Braye, président. - Le progrès technique infirmera peut-être ce que je dis, mais les investissements lies à la méthanisation doivent être programmés aujourd'hui. Or si les ordures ménagères résiduelles (OMR) gagnent en qualité, rien ne garantit encore une valorisation du compost.

L'ADEME préconise la collecte des déchets en porte-à-porte, mais cela pose des difficultés pratiques, même si ça marche bien chez M. Muller, et ce n'est pas économiquement assuré.

M. Daniel Raoul . - Il y a également des objections sanitaires.

M. Dominique Braye, président. - Seule la collecte auprès des gros producteurs de biodéchets peut assurer le fonctionnement des usines, qui sont sous-utilisées.

D'autre part, il n'y a pas de raison pour taxer deux fois les mâchefers.

M. Daniel Raoul . - En effet.

M. Dominique Braye, président. - Certains membres de la commission des finances veulent considérer les mâchefers comme des déchets valorisables. Encore faut-il qu'ils soient effectivement valorisés !

Selon certains juristes, le droit communautaire s'oppose à ce qu'un déchet subisse deux fois la TGAP.

Mme Évelyne Didier. - Le tarif « incinération » est moins élevé que celui qui frappe l'enfouissement.

M. Dominique Braye, président. - Mais l'incinération réduit le volume des déchets de plus de 90 % !

M. Alain Vasselle. - Je voudrais tout d'abord savoir si vous rappellerez dans le rapport que la TGAP devait initialement taxer les déchets non valorisés, c'est-à-dire enfouis sans même récupération de biogaz ?

Par la suite, l'incinération aussi a été taxée, malgré la valorisation énergétique qu'elle apporte. Le seul intérêt de cette extension a été d'abonder le budget de l'ADEME.

M. Dominique Braye, président. - Tout dépend du taux de la valorisation, proche selon les cas de 35 % ou de 90 %. Moins on valorise, plus on doit être taxé.

En réalité, la TGAP a été conçue pour procurer un produit sans « assommer » qui que ce soit. Rappelez-vous nos discussions en hémicycle sur les centres de stockage non autorisés : il a été difficile de leur appliquer en 2015 une TGAP de 150 € par tonne pour pénaliser les mauvais élèves !

Je suis d'accord avec M. Vasselle : la TGAP doit inciter à la vertu. Mais certains devront donc payer plus et plus longtemps, car les installations ne seront amorties qu'en 20 à 30 ans. Lorsque nos collègues ont dû batailler pour créer une usine d'incinération, on ne peut les sanctionner !

M. Jean Milhau. - Il est injuste de pénaliser des ménages qui n'y sont pour rien !

M. Daniel Soulage, rapporteur. - Mme Chantal Jouanno insiste clairement sur la nécessité de réduire la production des déchets, ce qui est déjà un effet de la crise et de la baisse de la consommation. J'approuve l'accent mis sur la méthanisation, mais il faut être réaliste : en milieu rural l'enfouissement est parfois la seule solution. Si l'on supprime les CET, qu'allons-nous faire ? Je propose donc des aménagements à la marge, avec une clause de rendez-vous.

M. Dominique Braye, président. - Ceux qui ne veulent pas d'installations de traitement des déchets ménagers devront payer ! Au Nord de la Loire, les usines de traitement sont bien plus nombreuses qu'au Sud. C'est une question de volonté politique.

M. Alain Vasselle. - On peut moduler la TGAP en fonction de la valorisation des déchets, mais à condition de prendre en compte l'optimum techniquement atteignable dans des conditions économiquement compatibles avec les capacités contributives de nos concitoyens.

On peut aussi ne taxer que les déchets ultimes en exonérant de TGAP tout déchet valorisé.

Certains, comme M. Pastor, ont choisi le CET avec valorisation sous la forme du bioréacteur. Je me suis orienté vers un centre multifilières avec méthanisation. Le rapporteur pourrait-il suggérer qu'un président de conseil général ne devrait pas pouvoir refuser le projet d'un opérateur assurant une valorisation optimale ? Le président de mon conseil régional s'oppose à celui que je propose, pourtant conforme au Grenelle.

M. Dominique Braye, président. La loi va être bientôt modifiée en ce sens. En résumé, la TGAP devrait être maximale pour les centres de stockage qui reçoivent des OMR ; à l'inverse, aucune taxe ne serait appliquée aux déchets ultimes impossibles à stocker ailleurs que dans des centres de stockage de déchets ultimes ; entre ces cas extrêmes, la TGAP serait modulée. Au demeurant, la marge de modulation serait limitée pour tenir compte des contraintes géographiques.

Actuellement, 17 incinérateurs ne valorisent rien. Les 522 000 tonnes annuelles qu'ils reçoivent doivent donc être taxées. En revanche, les 13 millions de tonnes traitées dans les 112 autres centres d'incinération sont valorisées, de façon très variable. Certains ne produisent que de l'électricité, tandis qu'Isséane valorise au maximum.

M. Alain Vasselle. - Il faut être en ville pour faire du chauffage urbain. Je ne fais que de l'électricité et un peu de cogénération.

M. Dominique Braye, président. - Faut-il moduler la TGAP en fonction de la valorisation ?

M. Jean-Marc Pastor. - Indépendamment des techniques utilisées ?

M. Dominique Braye, président. - Oui. Quelle est la performance d'un bioréacteur par rapport à l'incinération ?

M. Jean-Marc Pastor. - L'incinération obtient en 48 heures ce que le bioréacteur dégage en 12 ans.

M. Dominique Braye, président. - L'exonération de TGAP est donc un pari sur l'avenir. Quel est le taux de valorisation par tonne d'OMR ? Quel est le rendement ?

M. Jean-Marc Pastor. - L'ADEME a fourni des chiffres, comme les opérateurs privés.

M. Dominique Braye, président. - Ce qui compte, c'est la valorisation totale, pas la durée. Si la production de déchets ménagers est stable, les deux techniques aboutissent à une valorisation identique à partir de la douzième année.

Lorsque le réseau de chaleur existe comme à Paris, il est facile de l'utiliser. En revanche, il est difficile d'en créer un. Nous devons récompenser ceux qui font des efforts, mais en tenant compte des réalités de terrain.

M. Jacques Muller. - J'approuve la proportionnalité entre la valorisation et la TGAP.

Sur un autre plan, celui des CET - je préfère évoquer des centres de stockage, car ce terme comporte alors l'idée de réversibilité -, il faut taxer les OMR à taux plein.

Les mâchefers valorisables doivent être taxés en partie.

M. Dominique Braye, président. - Dans ce cas, il suffirait d'ajouter un produit toxique comme le mercure pour que les mâchefers ne soient pas valorisables !

Mme Évelyne Didier. - La production de chaleur et d'électricité doit être prise en compte !

M. Daniel Dubois. - Il faut aussi prendre en considération la différence de situation des milieux urbain et rural.

M. Dominique Braye, président. - Absolument !

M. Daniel Dubois. - Quels critères retenir pour apprécier la valorisation ? J'ai entendu que la méthanisation produisait moins d'énergie qu'elle n'en consommait.

M. Dominique Braye, président. - La méthanisation n'est pas taxée. En revanche, si le compost va en décharge ...

M. Daniel Dubois. - À Barcelone, vous avez dit que la méthanisation sur OMR était une mauvaise solution en raison d'un bilan énergétique négatif.

M. Dominique Braye, président. - Par la suite, nous avons modifié notre point de vue, car nous n'avons vu d'abord à Barcelone que des installations insatisfaisantes.

En fait, la méthanisation n'est qu'un prétraitement et doit s'insérer dans toute une chaîne d'opérations débouchant sur la valorisation des digestats en compost. Encore faut-il que leur composition s'y prête. C'est tout le problème des OMR. Sur le plan agronomique, selon la chercheuse de l'INRA que nous avons rencontrée, le compost issu du TMB est le meilleur sur le plan agronomique.

La méthanisation est une technique excellente, si le produit entrant est de bonne qualité, mais elle est soumise à de fortes contraintes.

Il faut surtout assurer la valorisation après TMB de la fraction fermentescible.

M. Daniel Dubois. - Nous devons accorder une grande attention aux critères permettant d'évaluer l'efficacité de la valorisation.

M. Dominique Braye, président. - Nous sommes d'accord sur les principes : les déchets ultimes, les REFIOM (résidus d'épuration des fumées d'incinération d'ordures ménagères), ne doivent pas être taxés. Pour le reste, il faut respecter les normes ISO, mais le taux de valorisation ne dépasse guère 30 % lorsqu'on est limité à la production d'électricité.

M. Daniel Raoul. - Il faut pourtant moduler la TGAP selon que l'on obtient 30 % ou 90 % de valorisation.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - La loi comporte déjà une échelle allant de 50 à 150 € par tonne, afin d'inciter à disposer d'installations de stockage certifiées ISO 14001.

En pratique, il n'y a qu'un seuil pour prendre en compte le pourcentage de valorisation : 75 %. Pour obtenir une progressivité plus marquée, je propose une catégorie intermédiaire couvrant la plage 60 % - 90%, pour le stockage.

M. Dominique Braye, président. - L'idée de progressivité est intellectuellement séduisante, mais déconnectée de la réalité : avec une valorisation exclusivement électrique, le taux ne peut guère dépasser les 35 % ; il passe à 75 % avec le chauffage urbain. Entre les deux, il n'y a rien.

M. Daniel Raoul. - M. Vasselle a dit ne pas pouvoir alimenter de réseau de chaleur. Or, on peut améliorer le rendement des turbines dans le cycle de Rankine avec le méthane. Le rendement global passe alors de 35 % à 65 %, voire 70 %. Des brevets existent ; voyez notre ancien collègue, Pierre Laffitte.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - Pour le stockage, nous avons conçu quatre tranches de 10 en 10, allant de 60 % à 90 % et plus.

M. Alain Vasselle. - Est-on sûr de pouvoir partout valoriser les déchets à au moins 60 % ? Si tel n'est pas le cas, il ne faut pas pénaliser ceux qui n'atteignent pas semblable niveau.

M. Dominique Braye, président. - Il ne s'agit que du stockage.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - Dans ce cas, la valorisation atteint 60 % au minimum.

M. Jean-Marc Pastor. - Dans les centres d'enfouissement technique on peut au bout de trente ans récupérer 25 % à 30 % de biogaz, sans parler de la valorisation matière. Mais il est très difficile de valoriser des casiers de trop grande dimension. Les résultats les meilleurs sont obtenus à partir de petits casiers dotés d'un drainage intérieur, qui permettent de valoriser le méthane à plus de 60 %.

M. Dominique Braye, président. - Avec le stockage, on peut faire évoluer les techniques d'une année sur l'autre, alors que l'incinération représente un choix pour 25 à 30 ans.

M. Pastor propose la solution la moins coûteuse, mais c'est celle qui consomme le plus d'espace et qui rapporte le plus aux entreprises privées.

M. Jean-Marc Pastor. - Chez moi, c'est le contribuable qui en bénéficie.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - Il est presque impossible d'installer un CET. Dans mon département, j'ai dû l'installer dans ma propre commune.

M. Jean-Marc Pastor. - Je souhaite que le rapporteur prenne en compte le bioréacteur.

M. Dominique Braye, président. - Il faut aussi interdire certains produits en centre de stockage. Je pense notamment au carton.

M. Jean-Marc Pastor. - C'est tout le problème de la valorisation matière.

M. Jean Milhau. - Le produit total de la TGAP me semble excessif.

M. Dominique Braye, président. - 511 millions d'euros !

Mme Évelyne Didier. - Les ménages finissent par subir une ponction énorme qui sert à financer l'ADEME, ainsi que des politiques sans rapport avec les déchets.

M. Jean Milhau. - Et les élus locaux subissent l'impopularité fiscale.

M. Dominique Braye, président. - Les OMR ne doivent plus être mises en décharge. Certains pays les ont déjà interdites. On consomme du terrain pour rien. Il faut faire évoluer les comportements et donc taxer !

M. Jean Milhau. - Il reste que le produit global de la TGAP est excessif.

M. Dominique Braye, président. - Nous sommes d'accord pour taxer plus sévèrement les OMR, car il est trop difficile de créer des décharges et il est absurde de les remplir avec ces déchets. Il faut pénaliser les solutions intenables et savoir ce que l'on veut.

M. Alain Vasselle. - Avec le bioréacteur, notre collègue Pastor valorise tous les déchets de poubelles, avec un prix de revient très inférieur à celui de ceux qui valorisent. Nos concitoyens ne comprennent pas que le coût du traitement puisse varier de 10 % à 20 % par an.

M. Dominique Braye, président. - Le Gouvernement ne sait pas comment ouvrir la porte à des procédés qui valorisent le biogaz mais dévorent de l'espace, des terres arables, alors que nous, dans les pays tempérés, devons songer à l'alimentation de la planète. Nous devons avoir une vision globale.

M. Jean-Marc Pastor. - Le bioréacteur n'a rien d'une solution bon marché. J'ai déjà investi 30 millions d'euros et je devrai en dépenser autant pour traiter 120 millions de tonnes pendant 25 ans.

M. Dominique Braye, président. - Ce n'est pas cher.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - Gardons le sens des proportions. En périphérie de Bordeaux et de Toulouse, on consomme beaucoup plus de terres arables avec l'urbanisation. Pour ma part, j'ai mis le CET dans une carrière.

Mme Évelyne Didier. - Il faut certes ménager les décharges existantes, mais sans aboutir à une taxation insupportable pour les milieux modestes.

M. Daniel Dubois. - Le niveau actuel est franchement excessif !

Mme Évelyne Didier. - Les gens vont finir par se rebeller.

M. Dominique Braye, président. - En Grande-Bretagne, la taxation est quatre fois plus lourde que chez nous. En France, les OMR en décharge sont interdites depuis la loi de 2002 ! Il faut trouver d'autres voies.

Mme Évelyne Didier. - L'incinération assure-t-elle une valorisation ?

M. Dominique Braye, président. - Oui ! En revanche, le stockage doit être réservé aux déchets ultimes. C'est ce qui figure dans la directive européenne et le code de l'environnement. Ne faisons pas n'importe quoi. Le stockage d'OMR est interdit en Suède.

M. Daniel Soulage, rapporteur. - Je propose d'avancer d'un an la clause de revoyure, afin qu'elle joue dès 2011. D'ici-là, les techniques de méthanisation vont évoluer, le bioréacteur va se mettre en route, la récupération des gaz va progresser.

M. Dominique Braye, président. - Notre rapport doit seulement indiquer certaines directions, laissant à la loi et à la discussion parlementaire le soin de mettre en oeuvre nos réflexions.

Il faut bien stocker les déchets ultimes et atteindre le plus vite possible les objectifs inscrits dans le code de l'environnement.

M. Alain Vasselle. - Certains déchets ultimes peuvent encore subir une méthanisation. Nous l'avons constaté à Montpellier.

M. Dominique Braye, président. - Il ne s'agit pas alors de déchets ultimes, mais de sous-produits énergétiquement valorisables. Par nature, la définition des déchets ultimes est tributaire des techniques disponibles à un moment donné.

L'incinération doit respecter l'environnement, ce que font toutes les installations existantes. Mais ce qui compte, c'est la valorisation, largement tributaire des réseaux de chaleur, qui doit recevoir une prime, sans des seuils trop discriminants.

M. Alain Vasselle. - Ceux qui peuvent utiliser un réseau de chaleur doivent être taxés s'ils ne le font pas.

M. Dominique Braye, président. - Il faut recommander la construction d'usines d'incinération en plein centre-ville ! Mais aucun réseau de chaleur ne sera imposé en milieu rural.

M. Alain Vasselle. - Très bien !

Mme Évelyne Didier. - Quid en cas de réseau de chaleur à partir d'une décharge ?

M. Dominique Braye, président. - Encore faut-il avoir assez de biogaz ! Les consommateurs échapperont à la TGAP, mais acquitteront un prix très élevé pour le fonctionnement. Pour une petite ville, c'est irréaliste, sauf à bénéficier des subventions du département comme en Charente-Maritime.

M. Jacques Muller. - Nous n'avons pas encore abordé la question des quantités incompressibles. Pensez-vous exonérer les premiers kilos de toute TGAP ? Je ne l'accepterais pas ! Le syndicat mixte du Haut-Rhin envisageait il y a deux ans de construire un incinérateur de 85 000 tonnes en plus de ceux qui existaient déjà dans le département à Mulhouse et Colmar. Je m'y suis opposé, car j'estimais que l'on pouvait progresser en matière de collecte et de tri. Ainsi, nous sommes passés de 285 kilogrammes en 2008 à 210 en 2009 et l'objectif est de descendre à 150 en 2011. En 2008, on aurait sans doute fixé le seuil incompressible à 250 kilos...

M. Alain Vasselle. - Il faut le revoir chaque année.

Mme Évelyne Didier. - En outre, le projet global n'est pas identique partout.

M. Dominique Braye, président. - Je suis d'accord. Mieux vaut laisser ce sujet, car l'important est de maîtriser l'augmentation de la TGAP.

Passons à la gouvernance.

Êtes-vous d'accord pour que la dimension scientifique soit placée au centre du débat ? Le Grenelle a trop privilégié le point de vue des seules associations.

Les agences « indépendantes », quant à elles, devraient l'être effectivement, comme le Parlement l'avait souhaité en les créant. Aujourd'hui, leur communication est subordonnée à celle du ministre. C'est dangereux pour la démocratie et le développement durable.

Toute la noblesse de la science tient à son indépendance et à son objectivité, en fonction de ce que permettent les connaissances du moment.

Êtes-vous d'accord pour que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) équilibre le coût de la collecte, au lieu d'abonder le budget des collectivités ? Aujourd'hui, les entreprises acquittent parfois la majeure part de la TEOM, sans guère bénéficier du service.

M. Alain Vasselle. - Si elles ne payent plus, le report sur les ménages suscitera une levée de boucliers. Pour se défendre, le maire dira que la loi votée lui impose cet accroissement de dépenses et la majorité en pâtira politiquement.

M. Charles Guené. - Nous pourrions au moins formuler une recommandation.

M. Dominique Braye, président. - Oui. Autre question, comment une tarification peut-elle être incitative tout en épargnant les habitants ?

La tarification incitative est intellectuellement séduisante mais difficile à mettre en oeuvre concrètement.

M. Jean Milhau. - C'est une fausse bonne idée.

Mme Évelyne Didier. - On pourrait moduler la TEOM en fonction de la taille du foyer fiscal, à titre expérimental.

M. Dominique Braye, président. - Reste la question des plans d'élimination des déchets. Le département, actuellement compétent, est-il l'échelon pertinent ?

M. Daniel Dubois. - Il va bientôt disparaître !

M. Dominique Braye, président. - Faut-il confier l'élaboration du plan départemental des déchets au préfet ?

M. Alain Vasselle. - Oui !

M. Dominique Braye, président. Vous poursuivez votre combat, mais, au demeurant, c'est peut-être une bonne idée, même si elle est contraire à la décentralisation...

M. Jean Milhau. - Cela relèvera de la loi sur les compétences locales.

M. Charles Guené. - Il faudra alors financer la mise en oeuvre des normes imposées par le préfet...

M. Dominique Braye. - Dans de nombreux départements, les difficultés trouvent leur source dans les affrontements entre élus.

Le rapport vous sera envoyé le 18 juin et nous nous réunirons le 22.