Mercredi 25 juillet 2012

- Présidence de M.  David Assouline, président -

Bilan des travaux de la commission - Échange de vues - Perspectives sur le programme de travail

M. David Assouline, président - Nous avons commencé à évoquer avec les membres du bureau de la commission quelques-uns des sujets inscrits à notre ordre du jour, comme le bilan de notre activité depuis le mois de novembre, l'élaboration d'un projet de règlement intérieur, la définition de nos méthodes de travail ou l'établissement de notre programme pour la prochaine session. Je serais intéressé d'avoir vos points de vue respectifs sur ces questions.

Mme Claire-Lise Campion - Notre bilan est à la fois très dense et nettement positif, si j'en juge aux échos assez unanimes que nous en avons eus. Cela étant, si nous avons pu accomplir tout ce travail en seulement six mois, c'est parce que les commissions permanentes n'étaient pas aussi occupées que d'habitude pendant la période électorale. En temps normal, je crains que la charge de travail devienne très lourde, d'autant que pour répondre aux préoccupations d'actualité, nous devrons aussi nous saisir de nouveaux sujets en cours d'année.

Concernant nos méthodes de travail, le système consistant à désigner sur chaque thème deux co-rapporteurs de sensibilité différente me paraît excellent. Il ne faut pas le systématiser, mais j'y suis favorable, car il valorise nos conclusions.

Mme Muguette Dini - Je suis tout à fait de cet avis, la dualité des rapporteurs est un gage d'impartialité, nos travaux y gagnant à la fois en qualité et en crédibilité.

Mme Corinne Bouchoux - De mon point de vue, le système des binômes est très intéressant, sans d'ailleurs se limiter à des tandems UMP-Socialiste ! On peut aussi imaginer d'autres attelages plus inattendus mais tout aussi productifs. Sur le principe, mon groupe y est donc très favorable.

Mais ne systématisons pas, car il faut préserver une certaine souplesse, par exemple en confiant tel ou tel rapport à un seul rapporteur au départ, quitte à lui adjoindre un co-rapporteur par la suite si ça se révèle utile.

M. David Assouline, président - Je partage votre analyse, d'ailleurs nos binômes n'ont pas toujours été UMP/PS : pour moi, les représentants de tous les groupes ont égale vocation à se voir attribuer des rapports, y compris sur des sujets peu consensuels sur lesquels des rapporteurs de sensibilité différente auront nécessairement des approches divergentes, comme me l'avait fait remarquer notre collègue Jacques Legendre. L'important c'est qu'ils puissent chacun exprimer leur point de vue.

S'agissant de notre programme de travail pour la prochaine session, je devrai présenter un calendrier à la conférence des Présidents de septembre, il serait donc souhaitable que vos commissions respectives me transmettent assez vite leurs propositions.

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je suis convaincu que nous ferons un travail d'autant plus utile si nous nous intéressons à des pans de législation susceptibles d'être réformés, de manière à fournir aux commissions concernées une évaluation « clé en main » lorsqu'elles auront à travailler sur ces textes.

Mme Isabelle Debré -A mon sens, la loi sur la protection de l'enfance se prêterait bien à cet exercice, il serait intéressant de l'évaluer car l'actualité me laisse à penser qu'elle pourrait être remise en chantier assez rapidement.

Mais je trouve dommage que l'intitulé de cette commission n'intègre pas l'idée que notre travail d'évaluation puisse aussi déboucher sur des propositions de réforme.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat - Il y a sur beaucoup de sujets un foisonnement de rapports, pour lesquels on fait toujours appel aux mêmes experts, et dont beaucoup ne débouchent sur rien. Une première précaution serait de nous coordonner avec l'Assemblée nationale qui, elle-aussi, procède à des évaluations, pour éviter les doubles emplois préjudiciables à l'image du Parlement.

Surtout, une bonne coordination de nos travaux avec les commissions permanentes me paraît fondamentale, pour prévenir les chevauchements. Je ne vise pas simplement le choix de nos thèmes de réflexion, mais aussi nos horaires de travail, avec cette difficulté constante des réunions qui tombent en même temps, aussi bien celles des commissions que celles des délégations et de tous les autres groupes de travail du Sénat. En pratique, tout est concentré sur deux jours de la semaine.

Pour ce qui est des co-rapporteurs, le système fonctionne bien, à condition toutefois que les binômes travaillent dans la même direction et non pas sur le terrain de l'affrontement.

M. David Assouline, président - L'Assemblée nationale n'a pas de commission équivalente à la nôtre, mais elle a constitué un Comité d'évaluation des politiques publiques : je retiens votre proposition : désormais lorsque nous déciderons de lancer un nouveau rapport, nous veillerons à en informer l'Assemblée nationale.

Le problème de l'embouteillage de nos travaux sur deux jours devient, en effet, difficilement supportable. Je crois savoir qu'il se pose aussi à l'Assemblée nationale, il faudrait vraiment engager une réflexion à ce propos.

M. Jean-Claude Lenoir - Au Sénat, le travail en commission occupe une part considérable de notre temps. J'ai siégé pendant des années à l'Assemblée nationale, je peux vous assurer que les députés ont une charge de travail en commission bien moins lourde que la nôtre. D'une manière plus générale, il y a trop de réunions au Sénat.

Pour ce qui concerne notre commission, je demeure assez réservé : on y distribue des rapports, mais nous ne nous prononçons pas dessus, nous nous contentons d'en autoriser la publication, ce qui est assez frustrant. A l'Assemblée nationale, le système est très différent, puisque le suivi de l'application des lois est assuré par le rapporteur qui a géré le texte depuis le départ.

M. David Assouline, président - Ce système d'autorisation de publication n'est pas propre à nos travaux, il est le même pour tous les rapports d'information.

S'agissant de la fréquence de nos réunions, il me semble que nous devons tenir au moins une réunion par mois, de préférence le mercredi. La première année a été particulière, j'en conviens, car nous n'avons commencé à travailler réellement qu'en janvier, mais désormais, nous allons entrer en rythme de croisière.

Concernant les relations avec les commissions permanentes, je rejoins Mme Borvo dans l'idée d'éviter les chevauchements : nous devons être un organe qui aide, pas un organe qui empiète ! C'est d'ailleurs tout l'intérêt d'évaluer en amont les dispositifs manifestement appelés à connaître des modifications, comme par exemple les textes sur la récidive, dont les magistrats eux-mêmes soulignent la dispersion ; de cette sorte, les commissions n'auront pas à refaire ce travail lorsqu'elles seront saisies du projet de réforme.

M. Louis Nègre - Pour ma part, je considère qu'une commission en charge de l'application des lois est une bonne chose, ce travail d'évaluation est un gage de démocratie et de bon fonctionnement du Parlement.

Je conviens que cette initiative a pu bousculer des habitudes, à partir du moment où elle intervenait sur les domaines jusqu'alors très étanches des commissions permanentes. Mais selon moi, aucune commission n'est propriétaire des textes qu'elle traite.

Les binômes de co-rapporteurs me paraissent de nature à renforcer la crédibilité de notre commission, qui est un organe encore jeune. Les co-rapporteurs peuvent fort bien ne pas être du même avis, mais le fait d'exposer leurs différences de vue est en soi un instrument de transparence.

Mme Debré a évoqué la loi sur la protection de l'enfance. Je ferai remarquer que dans ce domaine, les maires aussi ont des responsabilités, alors qu'ils sont tenus dans la plus grande ignorance des dossiers : j'y vois un réel dysfonctionnement législatif.

Je voudrais enfin signaler qu'au cours de nos travaux préparatoires sur le rapport « loi pénitentiaire », j'avais formulé un certain nombre d'observations dont, sauf erreur, je n'ai pas retrouvé mention par la suite.

M. David Assouline, président - Il y a peut être eu un problème de prise de notes, cela arrive rarement mais on ne peut jamais l'exclure.

M. Philippe Kaltenbach - La création de notre commission a eu le mérite de montrer à l'opinion publique que le Parlement ne se contente pas de voter des lois, mais qu'il tient aussi à en assurer le suivi.

Pour autant, il reste encore beaucoup à faire pour ancrer cette instance nouvelle dans la durée ; à mon avis, nous n'y parviendrons qu'en travaillant en coordination étroite avec les commissions permanentes.

Beaucoup de sujets mériteraient de retenir notre attention, je pense par exemple au dispositif relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (loi SRU) ; dans un tout autre domaine, vous avez cité l'exemple de la récidive, qui est en effet devenu un véritable maquis législatif, avec cinq ou six lois adoptées ces dernières années. Il faudrait procéder à une évaluation, à la fois pour aider les magistrats et, surtout, pour prévenir plus efficacement ce phénomène. Mais cela suppose un arrangement avec la commission des lois, qui ne sera obtenu que moyennant un travail de médiation.

Enfin, nous avons déjà publié une première série de rapports en six mois : allons-nous poursuivre au même rythme, soit deux séries de rapports par an, ou bien une seule série par année parlementaire ?

M. David Assouline, président - Je suis bien sûr d'accord pour travailler en pleine harmonie avec nos commissions permanentes, mais en veillant à les traiter toutes à égalité. Je ne vois pas de raison d'adopter une démarche spécifique vis-à-vis de la commission des lois.

Pour ce qui est de notre rythme de travail, le premier semestre a été exceptionnel, puisque nous venions de nous constituer. A partir de maintenant, nous allons travailler différemment, je pense que nous relancerons de nouveaux rapports au fur et à mesure de la publication des précédents, mais toujours en restant attentifs et réactifs à l'actualité.

Dans l'immédiat, j'attends les propositions que me feront les commissions, de manière à présenter un programme de travail à la conférence des Présidents de septembre.

Mme Corinne Bouchoux - Il y a un sujet transversal qui mériterait notre attention, d'autant qu'il dépasse la compétence d'une seule commission : la lutte contre l'homophobie chez les jeunes, dans l'enseignement et les programmes scolaires.

M. David Assouline, président - Ce sujet pourrait faire l'objet d'une table ronde au quatrième trimestre, assortie d'une large communication.

Mme Catherine Deroche - L'idée de mettre de nouveaux rapports en chantier au fur et à mesure de l'achèvement des rapports précédents semble de bonne pratique, même si je ne crois pas nécessaire de nous enfermer dans des règles intangibles.

Me référant par ailleurs à l'audition du Secrétaire général du Gouvernement tout au début de nos travaux, je constate que le plus souvent, les rapporteurs des lois sont tenus complètement à l'écart du processus de publication des décrets d'application : c'est un point sur lequel, à mon avis, notre commission pourrait formuler des propositions constructives.

M. David Assouline, président - Cette audition était en effet intéressante, et je vous propose que nous entendions au début du mois d'octobre le nouveau ministre des relations avec le Parlement, M.  Alain Vidalies, ainsi que le Secrétaire général du Gouvernement. Je vous indique, à ce propos, que le ministre m'a confirmé son intention de réactiver le Comité en charge de suivre la publication des textes d'application mis en place par son prédécesseur.

M. Yves Rome - Serait-il envisageable d'engager une étude sur l'impact du numérique dans tous les domaines de la vie quotidienne de nos concitoyens ?

M. David Assouline, président - A titre personnel, je suis particulièrement attentif à ces questions ; votre proposition pourrait être envisagée, mais seulement à condition de pouvoir la raccrocher à une législation précise, et en veillant à ne pas interférer avec les travaux d'autres organes comparables, par exemple ceux de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

M. Luc Carvounas - L'industrie du tourisme est un autre domaine où nous pourrions tenter de vérifier la pertinence du dispositif légal : de quels moyens juridiques dispose la puissance publique pour porter efficacement cette industrie qui, je le souligne, est un des premiers secteurs économiques français, avec près de 6  % du PIB et des dizaines de milliers d'emplois stables et non délocalisables.

M. David Assouline, président - N'hésitez pas à plaider ces dossiers auprès de vos Présidents de commission, puisque ce sont eux qui formuleront leurs propositions d'ici à septembre.