Table des matières




Mardi 25 juin 2002

- Présidence de M. Jacques Valade, président. -

Missions d'information - État d'avancement des travaux

A titre liminaire, M. Jacques Valade, président, a indiqué que la commission entendrait prochainement, sur la question du lancement de la télévision numérique de terre, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel et le ministre de la culture et de la communication, et qu'elle poursuivrait également, pendant le mois de juillet, les auditions des nouveaux ministres chargés des départements relevant de sa compétence.

La commission a ensuite entendu des communications sur l'état des travaux des missions d'information qu'elle a constituées.

Mission d'information chargée d'étudier le patrimoine immobilier universitaire

M. Jacques Valade, président, a tout d'abord présenté à la commission une communication sur l'avancement des travaux de la mission d'information chargée d'étudier le patrimoine immobilier universitaire.

Il a indiqué que la mission d'information avait auditionné, depuis quatre mois, une quinzaine de personnalités spécialistes, à un titre ou à un autre, de ce dossier : hauts fonctionnaires du ministère de l'éducation nationale, recteurs, président de l'Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires et de l'enseignement supérieur, conseiller auprès du délégué à l'aménagement territorial et à l'action régionale, premier vice-président de la conférence des présidents d'université, présidents d'universités concernés par l'opération de mise en sécurité et de déménagement du campus de Jussieu, président du conseil régional d'Île-de-France, ancien directeur du centre national des oeuvres universitaires et scolaires.

Il a ajouté qu'une prochaine réunion devrait être consacrée à l'audition des architectes Christian de Portzamparc, responsable de l'opération d'urbanisme de la Rive Gauche, et Jean Nouvel, chargé de la réhabilitation du campus de Jussieu, ainsi que du président de la société d'économie mixte de Paris (SEMAPA).

M. Jacques Valade, président, a indiqué que les auditions auxquelles avait déjà procédé la mission permettaient d'ores et déjà d'établir un premier constat.

Il a rappelé que le patrimoine immobilier universitaire était considérable, sous-utilisé et très diversifié mais se trouvait aussi dans un état très préoccupant : sa surface a été multipliée par deux en quinze ans et représente aujourd'hui quelque 17 millions de m2 ; certaines universités gèrent des superficies très importantes réparties sur de nombreux sites, aussi bien à Paris qu'en région : l'université Louis Pasteur à Lyon est ainsi responsable de la gestion de 80.000 m2 dispersés sur 80 sites.

Il a ajouté que ce patrimoine s'était considérablement accru au titre du plan Université 2000, qui a suscité une sorte de « fuite en avant » en matière de constructions universitaires ; il a évoqué à cet égard les superficies supplémentaires dont bénéficieront les universités de Paris VI et de Paris VII, en se demandant si une réflexion globale avait été véritablement engagée sur les besoins parisiens en matière d'immobilier universitaire.

Il a estimé que le temps n'était plus à la multiplication des surfaces universitaires, mais plutôt à l'émergence de pôles d'excellence et à certains regroupements disciplinaires correspondant à une taille critique qui permettraient à nos universités de faire jeu égal avec leurs homologues étrangères.

Il a également dénoncé les gaspillages résultant de l'utilisation des locaux pendant la seule année universitaire, et selon des horaires d'ouverture trop réduits, et a remarqué qu'une meilleure utilisation du patrimoine existant permettrait de faire l'économie de certaines constructions nouvelles. Il a par ailleurs insisté sur l'implantation anarchique et parfois concurrente, de formations supérieures courtes échappant au contrôle de l'administration centrale, telles que les sections de techniciens supérieurs dont l'implantation ne relève que de la seule décision des recteurs, la création de départements d'IUT et de STS étant par ailleurs encouragée par les pressions locales exercées, tant par les universitaires que par les élus, qui souhaitent favoriser l'émergence de pôles universitaires.

M. Jacques Valade, président, a ensuite constaté que le tiers du patrimoine immobilier universitaire se caractérisait par une sécurité aléatoire et que l'on pouvait légitimement s'interroger sur l'opportunité de rénover certains sites, l'exemple du campus de Jussieu étant éclairant à cet égard. Il a par ailleurs indiqué qu'un questionnaire avait été envoyé à tous les rectorats pour faire un inventaire exhaustif, aussi bien quantitatif que qualitatif, de notre patrimoine immobilier universitaire.

Il a précisé que les commissions de sécurité émettaient 11 % d'avis défavorables sur les constructions universitaires, contre 7 % sur les établissements d'enseignement scolaire et que le tiers des passages de ces commissions, lorsqu'elles étaient sollicitées, s'effectuaient hors délais. Il a noté que de nombreux présidents d'université, qui ne disposent pas de crédits de maintenance suffisants, tendaient à différer le passage des commissions de sécurité afin de ne pas courir le risque d'une fermeture de leurs locaux, alors que leur responsabilité pourrait être mise en jeu.

Il a également souligné l'état très préoccupant du parc des résidences universitaires et a souhaité une clarification des responsabilités en ce domaine entre le centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS), les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) ainsi que des conséquences de l'inscription des programmes de construction et de rénovation dans les contrats de plan.

Il a observé que le contenu des contrats de plan en matière universitaire était très variable et que les différents partenaires concernés y étaient associés selon des modalités très différentes selon les régions ; il a appelé de ses voeux une plus grande cohérence à travers la définition de grands objectifs dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, afin d'optimiser les financements consacrés aux constructions universitaires.

S'agissant de la propriété des locaux, il a remarqué que les présidents d'université n'étaient pas unanimes pour souhaiter un transfert de celle-ci aux établissements et a estimé que la mission d'information aurait vocation à formuler des propositions en ce domaine, compte tenu des diverses modalités proposées.

M. Jacques Valade, président, a par ailleurs noté que la conduite de la politique immobilière universitaire, depuis la mise en oeuvre des plans U2000 et U3M, résultait pour l'essentiel de négociations périodiques entre l'État et les collectivités territoriales dans le cadre des contrats de plan ; cet effacement de l'État est, selon lui, à l'origine d'un développement quelque peu anarchique des sites universitaires, au détriment d'un aménagement équilibré du territoire et d'une nécessaire solidarité interrégionale.

Évoquant enfin la situation de Paris et de l'Île-de-France, il a rappelé que la région parisienne regroupait 45 % des chercheurs, 27 universités et le quart des étudiants, qui sont accueillis dans des conditions très médiocres, notamment du fait de l'insuffisance des résidences universitaires.

Il a indiqué que le rapport de la mission d'information consacrerait sans doute une part importante de ses développements à la restructuration des universités parisiennes, et notamment à Paris VII, dont le déménagement à Tolbiac apparaît opportun, et à Paris VI, qui est appelée à rester à Jussieu, après désamiantage et réhabilitation du campus. Il s'est interrogé sur la pertinence de la décision prise pour Paris VI et a estimé que le débat « rénovation ou reconstruction » était susceptible d'apparaître sur d'autres sites, compte tenu de la proportion non négligeable de bâtiments universitaires amiantés à structure métallique.

Il a précisé que la mission d'information devrait poursuivre ses travaux jusqu'au mois d'octobre prochain, en auditionnant notamment les ministres concernés, et a souhaité que son rapport et ses propositions soient portés aussi rapidement que possible à la connaissance du Gouvernement.

Mission d'information sur l'évolution du secteur de l'exploitation cinématographique

L'état des travaux de la mission d'information sur l'évolution du secteur de l'exploitation cinématographique a ensuite été présenté par M. Marcel Vidal, président, et M. Michel Thiollière, rapporteur, avec M. Jack Ralite, de la mission d'information.

M. Marcel Vidal est tout d'abord intervenu pour rappeler les raisons qui avaient justifié la mise en place de la mission d'information.

Évoquant les profondes mutations qu'avaient connues, dans le cadre de la mondialisation, l'ensemble des secteurs de la communication et les interrogations relatives à la préservation de la diversité culturelle, il a souligné que l'exploitation en salle était un élément fondamental de la spécificité du cinéma, l'oeuvre cinématographique étant, à la différence des autres oeuvres audiovisuelles, conçue pour être diffusée en salle, devant un public. L'importance de l'exploitation en salle est donc un facteur déterminant de la vitalité de la création cinématographique. Il a noté, à cet égard, que les effets bénéfiques sur la production nationale de la reprise de la fréquentation des salles étaient déjà perceptibles.

M. Marcel Vidal a également relevé l'importance du réseau d'exploitation en termes d'aménagement du territoire. La salle de cinéma est un élément essentiel de la vie culturelle et sociale locale et un lieu de convivialité dans les petites villes ou les zones rurales. Les élus l'ont bien compris, qui se sont investis de façon massive dans le soutien aux salles, la diffusion des films et l'éducation du jeune public.

En dehors de ces raisons de fond, M. Marcel Vidal a également jugé nécessaire d'analyser le phénomène que constitue la reprise spectaculaire de la fréquentation des salles de cinéma, qui ont accueilli en 2001 184 millions de spectateurs. M. Marcel Vidal s'est réjoui de cette reprise. Mais, il a rappelé qu'elle avait aussi provoqué certaines turbulences et suscité des inquiétudes légitimes, concernant notamment la préservation de la diversité de l'offre, la concentration du secteur, la liberté de concurrence et la cohérence du réseau d'exploitation.

Il a donc estimé qu'il fallait, pour consolider cette « embellie », en analyser la dynamique et les causes et définir les moyens de prévenir ses possibles effets pervers.

Il a également mentionné la nécessité de prendre la mesure des évolutions technologiques, qui joueront un rôle décisif dans l'avenir du secteur de l'exploitation. D'une part, parce que les nouvelles télévisions, Internet et le DVD peuvent créer de nouvelles concurrences à l'exploitation en salle. D'autre part et surtout, en raison de la numérisation annoncée de la distribution et de l'exploitation cinématographique, question essentielle et qui se pose avec une urgence nouvelle depuis les déclarations de Mme Viviane Reding lors du festival de Cannes : M. Marcel Vidal a noté, à cet égard, les conséquences notamment financières d'une transition rapide vers la projection numérique.

M. Marcel Vidal a indiqué que c'était à partir de ces prémices que la mission entendait s'attacher à dégager les perspectives du secteur de l'exploitation et les conditions à remplir pour assurer son équilibre et sa contribution à la bonne santé, à la fois culturelle et économique, du cinéma français.

Il a exposé que, depuis sa constitution, la mission d'information avait tenu cinq réunions consacrées à des auditions et effectué un déplacement à Saint-Étienne.

Il a estimé que ces premières auditions lui avaient permis d'effectuer un tour d'horizon du secteur de l'exploitation et de « faire le point » de sa situation présente, et il a relevé que, lors de sa visite à Saint-Étienne, la mission avait pu constater qu'il était possible d'organiser de manière cohérente, au plan local, « l'offre de cinéma », mais aussi que toutes les catégories d'exploitants étaient confrontées à des difficultés spécifiques.

Il a conclu son propos en soulignant l'excellent climat, à la fois studieux et convivial, dans lequel se déroulaient les travaux de la mission d'information.

S'associant à ce jugement, M. Michel Thiollière, rapporteur de la mission d'information, a ensuite souligné que les interlocuteurs de la mission s'étaient accordés pour estimer que l'embellie que connaît le secteur de l'exploitation cinématographique, si elle est incontestable, est aussi fragile.

Il a également fait état des préoccupations et des attentes très diverses qu'ils avaient exprimées, parmi lesquelles il a relevé :

- une « demande » de régulation, à la fois pour préserver la diversité du réseau, limiter les effets de la concentration et assurer une implantation harmonieuse des équipements ;

- un attachement très fort aux mécanismes d'aide et le souhait d'un renforcement de leur sélectivité ;

- une interrogation sur le rôle de l'Europe, pour s'inquiéter, bien sûr, de l'avenir des aides nationales ou pour dénoncer l'insuffisance des aides apportées dans le cadre du programme Média Plus, mais aussi pour souligner la nécessité d'une action au niveau communautaire dans les domaines de la lutte contre la concentration et de la préservation de la diversité culturelle ;

- des inquiétudes relatives à l'impact des nouvelles technologies sur les modes de diffusion des films et sur l'économie de l'exploitation en salle.

A partir de ce constat, M. Michel Thiollière a estimé que la réflexion de la mission d'information pourrait s'articuler autour de trois thèmes :

- le cadre juridique de l'exploitation cinématographique ;

- les moyens de consolider la reprise de la fréquentation des salles et de restaurer durablement la place de la « sortie au cinéma » dans les pratiques culturelles nationales ;

- les conditions dans lesquelles le secteur pourra affronter la révolution annoncée de la projection numérique.

Reprenant chacun de ces thèmes, M. Michel Thiollière a tout d'abord constaté que, si le système d'aides a été efficace pour limiter les conséquences de la baisse de la fréquentation, il n'a pas été à l'origine de sa reprise. Celle-ci a été provoquée par les décisions du marché, par des initiatives stratégiques et commerciales qui ont appelé des mesures de régulation, lesquelles n'ont pas toujours été prises dans de bonnes conditions.

Soulignant que la réglementation n'était pas toujours « en phase » avec les évolutions économiques et technologiques, M. Michel Thiollière a estimé qu'il était sans doute temps de repenser l'ensemble des dispositifs en vigueur, de les évaluer et de mieux définir les rôles respectifs des aides et des mesures de régulation.

Il a, à cet égard, considéré qu'il convenait de prendre toute la mesure du rôle essentiel joué par les aides locales ; il a souligné que les réflexions menées sur le renforcement de la sélectivité des aides n'avaient toujours pas abouti ; il a dénoncé, en revanche, le caractère un peu improvisé de la réaction des pouvoirs publics au lancement des cartes d'abonnement illimité ; il a estimé qu'une réflexion d'ensemble sur la réglementation des multiplexes restait à mener.

Concluant que dans la période récente, les pouvoirs publics avaient semblé être un peu pris de court par l'évolution du secteur, M. Michel Thiollière a donc jugé nécessaire un effort de remise à plat et d'évaluation du cadre juridique de l'exploitation cinématographique.

S'interrogeant ensuite sur les moyens de consolider la reprise de la fréquentation des salles, M. Michel Thiollière a souligné que le problème de la concurrence entre l'exploitation en salle et les autres modes de diffusion de l'oeuvre cinématographique pourrait prendre une nouvelle ampleur avec le développement des « nouvelles télévisions », de la diffusion des films en ligne, du DVD et du « home cinema ». Il a noté à cet égard l'importance des politiques d'éducation du public, et essentiellement du jeune public, dans lesquelles les collectivités territoriales se sont beaucoup investies.

Enfin, revenant sur les déclarations à Cannes de Mme Viviane Reding, M. Michel Thiollière a rappelé que la Commission européenne semblait décidée à hâter la transition vers la projection numérique, en considérant que l'Europe ne pouvait se laisser devancer dans ce domaine par les Etats-Unis. Il a souligné l'importance des problèmes techniques, financiers, juridiques que posait cette transition, et a déclaré comprendre les vives inquiétudes exprimées à Cannes par les exploitants, notant que la projection numérique nécessitait de lourds investissements et s'interrogeant sur ses conséquences sur les rapports entre distributeurs et exploitants et sur la concentration de la commercialisation des films.

Jugeant que la mission d'information venait à point pour réfléchir à ce problème, il a indiqué que ses membres se rendraient à Bruxelles pour rencontrer Mme Viviane Reding et que la mission devait également entendre ou réentendre sur ce sujet toutes les parties concernées.

Mission d'information sur la gestion des collections des musées

Puis, M. Philippe Richert, rapporteur de la mission d'information sur la gestion des collections des musées, a dressé un bilan de l'état d'avancement de ses travaux.

Il a indiqué que, constituée à la fin du mois de janvier, la mission d'information avait consacré plusieurs réunions à des auditions mais avait surtout privilégié les visites, à Paris comme en province.

Ainsi, la mission s'est rendue au musée du Louvre et au musée d'Orsay. Par ailleurs, un déplacement dans le département du Nord a été notamment organisé afin d'apprécier l'intérêt d'une mise en réseau des musées- la région Nord-Pas-de-Calais étant en ce domaine exemplaire- mais aussi de cerner les attentes des musées territoriaux à l'égard des musées nationaux en matière de collaboration scientifique et de circulation des oeuvres.

Il a relevé que la mission, dont les premiers travaux confirmaient l'intérêt, permettait d'appréhender nombre d'aspects de la politique des musées qui n'avaient pu être abordés lors de l'examen de la loi relative aux musées de France.

Il a souligné que, destinée en premier lieu à évaluer l'état des réserves des musées, la mission d'information avait vocation à examiner plus généralement la gestion des collections sans se limiter d'ailleurs à ses aspects patrimoniaux, qu'il s'agisse de la tenue des inventaires ou des politiques d'acquisition, puisqu'elle s'interrogerait aussi sur les modalités de diffusion de ce patrimoine avec la préoccupation de l'aménagement culturel du territoire.

Le rapporteur a indiqué que, si l'état matériel des réserves des musées, conservées dans leur ensemble dans des conditions correctes, ne soulevait pas d'inquiétudes, leur organisation administrative apparaissait moins satisfaisante.

Les inventaires, lorsqu'ils existent, ne sont pas toujours complets et, en tout état de cause, ne font pas l'objet de récolements réguliers. Les négligences constatées en ce domaine sont préoccupantes, y compris pour le musée du Louvre pour lequel n'existe aucune liste à jour des oeuvres mises en dépôt.

M. Philippe Richert a observé que cette situation compliquait le travail de la commission de récolement des dépôts d'oeuvres d'art entrepris en 1997 à la suite des observations formulées par la Cour des comptes dans un rapport particulier consacré aux musées nationaux.

Il a également noté que, pour la même raison, la disposition de la loi relative aux musées de France prévoyant le transfert de propriété des oeuvres déposées par l'Etat dans des musées territoriaux avant 1910 au profit des collectivités territoriales serait vraisemblablement difficile à appliquer.

Il a regretté que la tenue des inventaires n'ait jamais été considérée par les conservateurs comme une priorité et que les plans d'informatisation aient été réalisés dans un relatif désordre.

Le rapporteur a estimé que ces lacunes, préoccupantes au regard d'un impératif de bonne gestion administrative dans la mesure où des collections qui ne sont pas inventoriées ne bénéficient d'aucune protection juridique, sont également préjudiciables à leur mise en valeur. Il a noté à cet égard que le récolement entrepris en 1997 avait été l'occasion de retrouver des oeuvres majeures mais également de procéder à des réattributions.

Soulignant l'extension du champ des responsabilités des conservateurs, M. Philippe Richert a estimé nécessaire une évolution du contenu de leur formation.

Il a rappelé que, si l'Etat et les collectivités territoriales avaient consenti des efforts considérables pour valoriser le patrimoine des musées, la diversification de leur public restait encore à accomplir. Il a indiqué que la mission s'attacherait à évaluer les moyens mis en oeuvre pour assurer une démocratisation de la fréquentation.

Il a relevé que la circulation des oeuvres demeurait un point faible de l'organisation des musées. Les musées nationaux, à l'exception du musée national d'art moderne, n'ont pas de politique volontariste en ce domaine. Le développement de passerelles entre les fonctions publiques de l'Etat et des collectivités locales, qui constituent sans doute un moyen de surmonter les réticences des musées nationaux à prêter leurs collections, doit être encouragé. Par ailleurs, la mise en réseau des musées territoriaux doit être soutenue afin de renforcer la cohérence de leurs collections.

Le rapporteur a indiqué que ces constats conduiraient la mission à s'interroger sur l'organisation administrative des musées. S'agissant des musées nationaux, des évolutions réglementaires s'imposent afin de renforcer l'identité des établissements publics déjà créés, à l'image du Louvre, mais aussi de doter d'autres institutions d'un statut plus autonome. Ces réformes exigeront de remettre en cause les mécanismes sur lesquels repose le fonctionnement de la Réunion des musées nationaux, dont les difficultés financières rendent nécessaire au demeurant une redéfinition des missions.

Mission d'information sur la diffusion de la culture scientifique

La commission a ensuite entendu M. Pierre Laffitte, président de la mission d'information sur la diffusion de la culture scientifique, qui a indiqué qu'à l'issue de son exposé, il proposerait à la commission d'adopter quatre premières recommandations.

M. Pierre Laffitte a rappelé que la création de la mission répondait à la conviction que la diffusion de la culture scientifique revêtait une importance cruciale, car le développement des sciences et techniques est au coeur du fonctionnement des sociétés innovantes modernes. Il a jugé qu'à ce titre, elle devait être considérée comme une priorité nationale.

Il a indiqué que la mission s'était fixé pour objectif d'examiner dans quelle mesure le dispositif français de diffusion de la culture scientifique était à la hauteur de cet enjeu, précisant que, pour établir son diagnostic, elle avait déjà procédé à une vingtaine d'auditions, et que pour disposer d'éléments de comparaison internationale, elle avait adressé un questionnaire détaillé aux conseillers scientifiques français dans une vingtaine de pays.

M. Pierre Laffitte a d'abord décrit le contexte général dans lequel s'inscrit aujourd'hui la diffusion de la culture scientifique.

Il a noté que la perception de la science dans l'opinion n'était plus aussi positive qu'elle l'avait été dans les années soixante-dix. Il en a attribué la raison aux mutations rapides que les nouveaux savoirs et leurs applications entraînent dans l'organisation et le fonctionnement de la société, affectant les dimensions les plus fondamentales de la vie. Soucieux d'éviter le développement de craintes irrationnelles, il a jugé indispensable de dispenser à l'ensemble des citoyens le minimum de connaissances indispensables pour comprendre la portée des recherches scientifiques, pour en peser les avantages et les risques, et pour participer de façon éclairée aux débats sur les choix auxquels est confrontée notre société.

M. Pierre Laffitte a relevé que, dans la poursuite de cette ambition, la France disposait d'atouts non négligeables : une véritable soif de connaissances présente en particulier chez les plus jeunes ; de grandes institutions jouissant d'un véritable prestige, quoique trop centrées sur elles-mêmes ; des centres de culture scientifique à l'échelon régional, et des associations locales bien en prise sur le terrain social ; enfin, des initiatives prometteuses comme « l'Université de tous les savoirs », « La main à la pâte » ou « La fête des sciences ».

M. Pierre Laffitte a ensuite brossé un rapide tableau des principaux acteurs qui, à l'échelle nationale, participent à la diffusion de la culture scientifique.

Il a d'abord rappelé que, au plan de l'organisation gouvernementale, la culture scientifique concernait plusieurs ministères.

Il a insisté sur la nécessité que le ministère de la culture ne limite pas son action au seul exercice de sa tutelle de la Cité des sciences et de l'industrie, mais qu'il considère dorénavant la culture scientifique et technique comme partie intégrante de la culture au sens large, et participe à ce titre à sa diffusion sur l'ensemble du territoire.

Convaincu de l'importance de la formation initiale, il a souhaité en outre que le ministère de l'éducation nationale s'attache à faire mieux connaître, en particulier auprès des enseignants, un certain nombre d'opérations, comme « La main à la pâte » initiée par le professeur Charpak et l'Académie des sciences, qui proposent une nouvelle approche de l'enseignement des sciences dans l'enseignement primaire ; attentif au plan de rénovation de l'enseignement des sciences, il a préconisé au collège et au lycée une approche plus concrète des réalités de la recherche grâce à l'organisation de stages et de visites.

Considérant que la diffusion de la culture scientifique sur l'ensemble du territoire devait tirer parti d'une conjonction des efforts, il a proposé la création d'une fondation à laquelle participeraient les administrations concernées, les collectivités territoriales intéressées, les établissements publics de recherche et le monde économique, estimant que cette fondation pourrait, notamment, favoriser la diffusion des expositions de culture scientifique et apporter un appui logistique à de nombreuses initiatives locales.

Il a relevé que l'Etat consacrait à la diffusion de la culture scientifique des efforts financiers non négligeables, mais a déploré que ceux-ci ne profitent pour l'essentiel qu'à quelques grands établissements parisiens, dont l'action reste trop exclusivement centrée sur la capitale. Afin que les politiques publiques parviennent à irriguer l'ensemble du corps social, il a préconisé la mise en réseau des centres et des associations de culture scientifique présents sur tout le territoire, la mise en commun d'expositions itinérantes, et le recours à des supports d'exposition modestes mais mobiles à l'image des « bibliobus » ou des « internetbus ».

Il a insisté sur le fait que les grandes institutions parisiennes -Cité des sciences et de l'industrie, Palais de la découverte, Muséum national d'histoire naturelle, musée des arts et métiers- devaient, bien entendu, y contribuer car leur mission de diffusion de la culture scientifique doit s'étendre à l'ensemble du territoire. Il a en conséquence souhaité qu'elles réalisent, davantage qu'elles ne le font aujourd'hui, des expositions à la mesure des capacités d'accueil et de financement des centres de culture scientifique et des musées locaux, et que les prestations qu'elles leur fournissent obéissent à une logique de service public plutôt qu'à une logique commerciale.

Dans cette perspective, il a invité la commission à tirer parti de la nomination prochaine d'un nouveau président de la Cité des sciences pour inciter le gouvernement à rappeler, dans la lettre de mission qu'il adressera à celui-ci à cette occasion, que cet établissement public doit, conformément à sa vocation statutaire, effectivement contribuer à la diffusion de la culture scientifique sur l'ensemble du territoire.

Considérant que les médias -et en particulier la télévision- étaient sans doute aujourd'hui le meilleur outil pour la diffusion en profondeur de l'information sur l'ensemble du territoire, il a jugé bon d'inciter les chaînes de télévision hertziennes à améliorer la place qu'elles réservent aux sciences et techniques dans leurs grilles de programme. Il a souhaité en particulier que le Conseil supérieur de l'audiovisuel prête une attention particulière, dans la redistribution des fréquences permise par la télévision numérique terrestre, à la place faite aux émissions scientifiques, car celles-ci relèvent d'une mission d'intérêt général prioritaire.

En conclusion, M. Pierre Laffitte a invité la commission à approuver quatre premières recommandations que souhaitait lui soumettre la mission d'information relative à la diffusion de la culture scientifique, à cette étape de sa réflexion :

- la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle doit être érigée par le gouvernement au rang de priorité nationale ; en conséquence, tous les ministères qui y contribuent -et notamment le ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, celui de la culture et de la communication, ainsi que celui de l'industrie- doivent préciser les actions qu'ils mènent ou comptent mener en ce domaine, et les moyens qu'ils y consacrent ; une meilleure conjugaison de tous les efforts en matière de diffusion de la culture scientifique pourrait être assurée grâce à la création d'une fondation à laquelle participeraient les administrations concernées, les collectivités locales, les grands établissements publics, et le cas échéant, les industriels intéressés, et qui apporterait son appui à des initiatives locales ou à des projets destinés à des acteurs locaux ;

- le gouvernement, dans la lettre de mission qu'il adressera au futur président de la Cité des sciences et de l'industrie à l'occasion de sa nomination prochaine, doit rappeler que la mission qui incombe à cet établissement de « rendre accessible à tous les publics le développement des sciences, des techniques et du savoir-faire industriel » s'étend à l'ensemble du territoire, et qu'à ce titre il doit participer effectivement à leur diffusion dans les régions, comme le prévoit d'ailleurs l'article 2 du décret n° 85-268 du 18 février 1985 qui en a porté création ;

- la place des émissions scientifiques dans les grilles de programme des télévisions hertziennes doit être améliorée ; le délai de réflexion pris pour le choix des futures chaînes de télévision numérique terrestre doit être mis à profit pour inciter tous les candidats, publics et privés, à prévoir, dans leurs programmes, des créneaux consacrés à des programmes de qualité portant sur des sujets scientifiques ou techniques importants ;

- les ministères compétents et les collectivités locales, les organismes de recherche ainsi que la Fondation dont il est proposé la création doivent créer des prix et des distinctions afin de récompenser les initiatives les plus intéressantes et fructueuses en matière de diffusion scientifique, en prenant en compte leur dimension économique, sociale et prospective, et leur implication dans la vie locale.

Un échange de vues a suivi l'exposé de M. Pierre Laffitte.

M. Ivan Renar, rapporteur de la mission d'information
, a déclaré qu'il partageait pleinement les analyses présentées par M. Pierre Laffitte. Il a insisté sur la nécessité d'ériger la diffusion de la culture scientifique en priorité nationale, et d'inciter l'ensemble des administrations compétentes à préciser les actions et les moyens qu'elles entendaient y consacrer. Il a ajouté qu'il lui paraissait indispensable d'inciter les grandes institutions nationales de diffusion scientifique à jouer pleinement leur rôle de « tête de réseau », à mieux s'adapter aux besoins des associations et institutions décentralisées de diffusion de la culture scientifique, et à contribuer ainsi à la valorisation des efforts accomplis par les collectivités territoriales en ce domaine.

Mme Marie-Christine Blandin, rapporteur de la mission d'information, a rappelé que la vocation fondamentale de la culture scientifique devait être de permettre aux citoyens de comprendre le monde dans lequel ils vivent. Elle a estimé que le ministère de la culture, dans la conduite de son action, ne prenait pas encore véritablement en compte cette composante intrinsèque de la culture.

Évoquant une opération réalisée en coopération avec la Cité des sciences, M. Philippe Richert a déploré que le conseil général du Bas-Rhin ait dû financer l'ensemble des prestations fournies par cet établissement public sans bénéficier d'aucune participation de l'Etat.

M. Jacques Valade, président, a fait état d'une expérience très comparable à Bordeaux pour Cap Sciences, qui n'a pu obtenir un soutien financier, au demeurant modeste, qu'à travers le contrat de Plan Etat-région.

A l'issue de ce débat, la commission a approuvé les premières recommandations de la mission d'information sur la diffusion de la culture scientifique.

Nomination d'un rapporteur

Au cours de la même réunion, la commission a désigné M. Daniel Eckenspieller, rapporteur du projet de loi n° 271 (2001-2002) relatif à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs.

Organisme extraparlementaire - Haut Conseil des musées de France - Désignation de candidats

Elle a également décidé de proposer à la nomination du Sénat M. Philippe Richert, comme membre titulaire, et M. Philippe Nachbar, comme membre suppléant du Haut Conseil des musées de France.