Table des matières




Mercredi 12 novembre 2003

- Présidence de M. Jacques Valade, président. -

PJLF pour 2004 - Crédits de la culture - Examen du rapport pour avis

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord examiné le rapport pour avis de M. Philippe Nachbar sur les crédits de la culture pour 2004.

M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis, a indiqué que, dans un contexte budgétaire contraint, l'évolution des crédits du ministère de la culture pour 2004 témoignait de la volonté du Gouvernement de conserver à l'action culturelle de l'Etat son caractère prioritaire.

Il a indiqué que le budget du ministère de la culture et de la communication serait en 2004 de 2.632,70 millions d'euros, contre 2.488,71 millions d'euros en 2003, soit une progression de 5,79 %.

Le projet de loi de finances permet de renouveler l'effort en faveur de la création, notamment dans le domaine du spectacle vivant, mais également de reconstituer les capacités d'engagement du ministère, après l'« opération vérité » conduite à l'occasion de la loi de finances pour 2003. En effet, les craintes relatives au risque d'un repli durable du budget de la culture, suscitées l'an dernier par la diminution des crédits de paiement, se révèlent infondées.

Puis le rapporteur pour avis a analysé l'évolution des différentes catégories de dépenses.

Les crédits du titre III relatifs aux moyens des services progressent de 6,25 %. Cette augmentation est pour une large part optique, sous l'effet de transferts de crédits provenant du titre IV, dans le cadre de l'expérimentation conduite, en région Rhône-Alpes, pour l'application des dispositions de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Si l'on excepte ces transferts, les moyens des services n'augmentent que de 1,42 %, progression qui résulte principalement de la hausse des subventions de fonctionnement versées aux établissements publics.

Il a indiqué qu'à structure constante, les dépenses d'intervention inscrites sur le titre IV progressaient de 2,14 %, pour s'établir à 817,84 millions d'euros. Les mesures nouvelles bénéficieront principalement à la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS) et, dans une moindre mesure, à la direction de l'architecture et du patrimoine et à la direction du livre et de la lecture.

Les dépenses d'investissement des titres V et VI s'élèvent, en crédits de paiement, à 422,89 millions d'euros, en progression de 33,99 % par rapport à l'exercice précédent.

Le rapporteur pour avis s'est félicité des conditions satisfaisantes d'exécution de la loi de finances pour 2003, relevant que les crédits du ministère de la culture n'avaient fait l'objet d'aucune mesure d'annulation. Par ailleurs, il a noté que des efforts avaient été accomplis pour assurer une meilleure consommation des crédits ouverts en loi de finances, notamment en ce qui concerne les dépenses d'investissement.

Il a en outre observé que l'augmentation des dotations budgétaires s'accompagnait de la volonté de poursuivre la modernisation du ministère.

Dans le contexte budgétaire actuel, la progression des crédits ne peut, en effet, constituer le seul moyen de financer les actions nouvelles. C'est dans cette perspective que s'inscrit le souhait exprimé par le ministre de réaliser, d'ici 2006, un redéploiement de 10 % des crédits d'intervention alloués aux différentes directions. D'ores et déjà, des efforts notables en ce sens ont été accomplis en 2003, notamment par la délégation aux arts plastiques et la direction du livre et de la lecture.

Par ailleurs, la maîtrise des dépenses de structure constitue à nouveau une priorité en 2004. Ainsi, 94 départs à la retraite ne seront pas remplacés et 91 emplois seront transférés du budget de l'Etat vers ceux de plusieurs établissements publics. La réduction de l'emploi précaire s'effectuera grâce à la mobilisation de 90 emplois vacants.

Le rapporteur pour avis a souligné, en outre, que s'agissant des établissements publics, dont le poids représente environ 40 % du budget du ministère, l'action engagée pour moderniser les conditions d'exercice de la tutelle et accroître leur autonomie sera poursuivie.

La réforme de la tutelle passe en priorité par un renforcement des compétences des établissements publics pour la gestion de leur personnel et par le développement de relations contractuelles avec le ministère. En ce domaine, l'établissement public du musée du Louvre jouera un rôle pilote.

C'est également dans cette perspective que s'inscrit la réforme des modalités de gestion des musées nationaux. Cette réforme est inspirée par le souci de clarifier les relations entre les musées nationaux et la réunion des musées nationaux (RMN), d'une part, et entre les musées nationaux et la direction des musées de France, d'autre part. Elle se traduit par la transformation en établissements publics des musées d'Orsay et Guimet, des aménagements des statuts du Louvre et de Versailles destinés à accroître leur autonomie et, enfin, par un décroisement des financements entre les musées nationaux dotés de leur autonomie et la RMN.

Puis M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis, a évoqué les priorités du ministère pour 2004.

Un effort bienvenu sera accompli pour renforcer les moyens affectés à la politique du livre et de la lecture. Le budget de la direction en charge de cette politique progresse de 3,69 % par rapport à 2003.

Cette évolution permet d'accroître le soutien apporté par l'Etat aux collectivités territoriales pour renforcer le réseau de la lecture publique. En 2004, la dotation générale de décentralisation pour les bibliothèques progressera de 1,9 %. Cet effort est particulièrement opportun, lorsque l'on considère que 21 % des Français sont inscrits dans une médiathèque ou une bibliothèque.

Le rapporteur pour avis a, par ailleurs, relevé que le programme des « Ruches » destinées à favoriser l'implantation de médiathèques de proximité bénéficierait en 2004 d'une enveloppe de 10,5 millions d'euros.

Il a noté que le projet de budget marquait également un engagement renouvelé en faveur de la création, notamment dans les domaines du spectacle vivant et de l'art contemporain.

En 2004, les crédits de la DMDTS progressent de 4,42 %. Ces moyens nouveaux seront affectés au soutien des collectivités territoriales qui ont souffert des conséquences de l'annulation des festivals, à la suite du mouvement des intermittents et à dégager les moyens nécessaires pour tenir compte des charges nouvelles résultant, pour les structures du spectacle vivant, de l'accord du 26 juin dernier.

Par ailleurs, les moyens consacrés aux actions de soutien à la création contemporaine bénéficieront d'une augmentation de 2,44 % par rapport à 2003. Cette hausse rend possible un renforcement des moyens de diffusion de l'art contemporain ; ainsi les crédits affectés à l'achat d'oeuvres contemporaines et à la commande publique progresseront de 3,5 % pour atteindre 9,6 millions d'euros.

Par ailleurs, les dépenses d'investissement de la délégation aux arts plastiques augmenteront de 29,60 % afin de poursuivre les programmes de rénovation des écoles d'art, mais également de soutenir le réseau de diffusion des arts plastiques, en particulier des fonds régionaux d'art contemporain.

Le rapporteur pour avis a indiqué qu'après l'« opération vérité » conduite en 2003, le projet de loi de finances prévoyait une progression de 10 % des autorisations de programme consacrées à la restauration des monuments historiques -hors grandes opérations. Tout en exprimant le regret que n'ait pas été retenu le principe d'une loi de programme, il s'est félicité des orientations annoncées dans le cadre du plan national pour le patrimoine rendu public par le ministre en septembre dernier. Ce plan correspond à une nécessité au regard du recensement effectué par la direction de l'architecture et du patrimoine, qui fait apparaître que près de 20 % des monuments historiques seraient en péril. En 2004, les moyens seront affectés pour les bâtiments appartenant à l'Etat, notamment à la restauration des cathédrales, aux travaux sur la Villa Cavrois à Croix dans le Nord et à la mise en oeuvre de la première phase du projet de « Grand Versailles ».

Le rapporteur pour avis a toutefois regretté que le montant des crédits d'entretien, qui avaient progressé en 2003 de près de 50 %, ne soit pas réévalué en 2004. Evoquant l'exemple des dommages subis récemment par le Château de Lunéville et la Basilique de Sion, dus à des installations électriques défectueuses, il a rappelé que ces dotations étaient essentielles pour prévenir la dégradation des monuments historiques et éviter des travaux de restauration coûteux.

Il a indiqué que les établissements publics concourant à la conduite de la politique du patrimoine seraient réformés. Le Centre des monuments nationaux, qui a été confronté au cours des dernières années à une crise de gestion, sera réorganisé. Par ailleurs, la Cité de l'architecture et du patrimoine, récemment dotée du statut d'établissement public, constituée à partir du Centre des hautes études de Chaillot, du musée des monuments français et de l'Institut français d'architecture, constituera un nouvel instrument au service de l'action du ministère.

Au regard de l'évolution des dotations budgétaires et de la volonté affichée du ministre de poursuivre les réformes engagées en 2003, le rapporteur pour avis a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la culture pour 2004.

Mme Danièle Pourtaud s'est inquiétée des enveloppes qui seraient consacrées, en 2004, par le ministère de la culture, à la restauration de la chapelle et du grand amphithéâtre de la Sorbonne. Ces bâtiments se trouvent en effet dans un état préoccupant qui nécessite l'intervention rapide de travaux.

M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis, s'est engagé à interroger le ministre sur ces points en séance publique.

Suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission aalors donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la culture pour 2004.

PJLF 2004 - Enseignement scolaire - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Philippe Richert sur les crédits de l'enseignement scolaire pour 2004.

Le rapporteur pour avis a tout d'abord fait observer que le présent projet de budget s'inscrivait à un moment phare pour l'éducation nationale, alors que s'engageaient, d'une part, le grand débat national sur l'Ecole, et, d'autre part, l'acte II de la décentralisation.

Tout en saluant l'effort du Gouvernement en faveur de l'enseignement scolaire, dont les crédits, d'un montant de 55,39 milliards d'euros pour 2004, progressent de 2,83 % par rapport à l'année précédente, il s'est d'abord félicité de l'effort de rationalisation et de modernisation de la gestion du système éducatif engagé dans le présent projet de budget, par la recherche d'une allocation plus optimale des moyens, ciblée sur des priorités éducatives nationales essentielles, à savoir la lutte contre l'illettrisme, l'aide à l'intégration des élèves handicapés et la prévention des violences et de l'échec scolaire.

Il a ensuite fait remarquer que le projet de budget prolongeait de grandes tendances, notamment en consolidant la part prépondérante des dépenses de rémunération des personnels qui représentent près de 96 % du budget total et augmentent de 3,1 % pour 2004 sous l'effet de la hausse rapide des charges de pension d'une part, et des mesures catégorielles d'autre part, auxquelles sont consacrés plus de 181 millions d'euros. S'agissant des crédits d'intervention, il a salué l'effort de sincérité budgétaire en matière de dépenses d'action sociale, faisant observer que la réduction des crédits inscrits à ce chapitre, à hauteur de 22 millions d'euros, était justifiée par leur constante sous-consommation et la volonté de résorber les importants reliquats des crédits des fonds sociaux. Tout en faisant observer que les dépenses en capital, qui occupent la part marginale de 0,1 % du budget global, diminuaient de près de 27 %, il a toutefois rappelé l'engagement du ministre délégué au budget, M. Alain Lambert, de ne pas procéder en 2004, contrairement à cette année, à des annulations de crédits affectant le budget de l'éducation.

En outre, le rapporteur pour avis a salué la volonté traduite dans le présent projet de budget d'instiller des réformes structurelles de nature à dégager des marges de manoeuvre pour l'avenir. La suppression de 1.100 emplois de personnels administratifs, dont 100 au niveau de l'administration centrale, 950 dans les services déconcentrés et 50 dans les établissements publics, correspond ainsi aux orientations du Gouvernement de ne remplacer qu'un départ à la retraite sur deux. Ciblée sur des emplois de catégorie C, cette mesure n'affecte en rien les capacités de pilotage et d'encadrement du système éducatif et traduit une volonté de requalification de la structure des emplois. Par ailleurs, par anticipation de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, deux académies pilotes, Rennes et Bordeaux, expérimentent le nouveau cadre budgétaire prévu pour 2006.

De surcroît, il a précisé que l'évolution des moyens d'enseignement s'inscrivait dans une logique d'affectation en fonction des besoins, par redéploiement du second degré, dont les effectifs sont en baisse continue (- 31.000 élèves à la rentrée 2003 et - 37.000 élèves à la rentrée 2004), vers le premier degré, qui accueille, au contraire, 34.400 élèves supplémentaires à la rentrée 2003 et 55.000 à la rentrée 2004. Aussi, les 1.500 créations d'emplois de professeurs des écoles sont compensées par 1.500 suppressions d'emplois d'enseignants du second degré, si bien qu'au total, le nombre d'emplois budgétaires d'enseignants est stable pour 2004.

Tout en soulignant que la suppression de 2.400 enseignants stagiaires du second degré était, de même, destinée à anticiper la diminution des effectifs, le rapporteur pour avis a néanmoins constaté la nécessité d'une gestion prévisionnelle des emplois, dans le contexte démographique actuel, en particulier pour assurer le renouvellement des enseignants dans certaines disciplines peu attractives, telles que les disciplines scientifiques.

Il a ensuite insisté sur les efforts engagés en vue de corriger certains dysfonctionnements dans l'utilisation et la répartition des moyens d'enseignement devant les élèves, qu'il s'agisse d'améliorer les conditions de remplacement des enseignants absents ou encore de réduire les surnombres disciplinaires à 1.500 d'ici 2004, alors qu'ils sont de 2.437 en 2002-2003.

Rappelant que le projet de loi de finances pour 2004 traduisait la montée en charge progressive du dispositif des assistants d'éducation, le rapporteur pour avis a précisé que le projet de budget pour 2004 prévoyait la création de 33.000 emplois d'assistants d'éducation, dont 20.000 ont été recrutés dès la rentrée 2003, la suppression corrélative de 12.400 emplois de maîtres d'internat-surveillants d'externat (MI-SE) arrivés en fin de contrat et l'augmentation de 50 millions d'euros des crédits destinés à l'indemnisation du chômage des aides éducateurs. Il s'est par ailleurs étonné qu'un récent amendement adopté par l'Assemblée nationale ait transféré aux régions la gestion des contrats Civis, appelés à se substituer aux contrats emplois-jeunes pour les associations employant des auxiliaires de vie scolaire.

Il a ensuite estimé que les avancées encore trop limitées en faveur de l'autonomie pédagogique des établissements devraient être renforcées, parallèlement à la démarche de décentralisation, en particulier par le recentrage des missions du chef d'établissement autour de la définition et de l'animation d'un véritable projet pédagogique.

En ce qui concerne les orientations pédagogiques, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis, a tout d'abord salué la priorité assignée en faveur de la prévention de l'illettrisme à l'école primaire, par le renforcement de l'expérimentation des classes de CP dédoublées, qui concerne ainsi, à la rentrée 2003, plus de 3.800 classes et 70.000 élèves, soit à temps plein, soit pendant les phases d'apprentissage de la lecture et de l'écriture. Des actions connexes accompagnent ces mesures, notamment afin de réduire progressivement le nombre excessif de postes sur listes complémentaires dans le premier degré, qui conduit à une situation telle que de jeunes enseignants sont affectés directement devant une classe sans avoir bénéficié d'une formation pédagogique préalable.

S'agissant de l'aide à l'intégration scolaire des élèves handicapés, il a précisé que le projet de budget prévoyait la création de 100 emplois de professeurs des écoles spécialisés, ainsi qu'une mesure nouvelle de 1,06 million d'euros, sous la forme d'heures supplémentaires pour renforcer les moyens d'enseignement dans les unités pédagogiques d'intégration (UPI) ou auprès des élèves malades, dans le cadre du système d'assistance pédagogique à domicile (SAPAD). En outre, à partir de la rentrée 2003, et jusqu'en 2007, 200 nouvelles UPI seront créées chaque année, pour remédier aux ruptures de scolarité entre le premier degré et le second degré. Enfin, une mesure nouvelle de 10 millions d'euros est destinée à renforcer la formation des enseignants et des auxiliaires de vie scolaire.

Abordant les actions destinées à la prévention des violences et de l'échec scolaire, le rapporteur pour avis s'est félicité de la baisse de 10 % du nombre de signalements effectués en 2002-2003 par rapport à l'année scolaire précédente, ainsi que de la mise en place de plusieurs mesures allant dans le sens d'une restauration de l'autorité et du respect des valeurs, telles que la réforme en cours de la composition des conseils de discipline, ou la mise en oeuvre du plan rénové de lutte contre les manquements à l'obligation scolaire. Il a enfin mis l'accent sur les deux mesures nouvelles prévues par le projet de budget en faveur des dispositifs de partenariat participant à la lutte contre la marginalisation sociale des jeunes en situation de rupture scolaire, à savoir les dispositifs relais, dont les crédits sont abondés de 6,4 millions d'euros supplémentaires, et l'opération « école ouverte », pour laquelle une mesure nouvelle de 5,4 millions d'euros devrait permettre de porter de 3.750 en 2003 à 5.000 en 2004 le nombre total de semaines d'ouverture.

En conclusion de son propos, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis, a salué le développement des dispositifs en alternance au collège, relevant la nécessité de proposer aux élèves des parcours diversifiés, alors que les premiers éléments de diagnostic rendus en octobre dernier par le Haut conseil de l'évaluation de l'école ont mis en exergue l'inquiétant état de stagnation dans lequel s'est installé le système éducatif depuis le milieu des années 1990, en dépit de moyens croissants, puisqu'une part incompressible de 150.000 élèves quitte chaque année le système scolaire sans qualification ou sans diplôme.

Il a, de ce fait, proposé d'accompagner et de soutenir les efforts engagés par le Gouvernement, en donnant un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement scolaire.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jacques Legendre s'est ému du constat selon lequel 150.000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans diplôme ni qualification, alors même qu'en 1980, lorsqu'il était secrétaire d'Etat à la formation professionnelle, l'objectif fixé consistait déjà à réduire ce phénomène. Constatant qu'en dépit des efforts et moyens croissants de la Nation, ce noyau dur restait incompressible, il a souhaité qu'une réflexion soit engagée afin d'envisager, le cas échéant, une entrée plus précoce dans la vie professionnelle.

M. Pierre Laffitte a souhaité attirer l'attention du rapporteur pour avis sur l'opération « La main à la pâte » qui permet de susciter, dès l'école primaire, et y compris dans les zones difficiles, une motivation pour les études scientifiques, en proposant aux enfants une approche à la fois concrète et ludique.

Relayant ces propos, M. Jacques Valade, président, a fait observer la nécessité de mener une gestion prévisionnelle des emplois d'enseignants dans les disciplines scientifiques, en ayant éventuellement recours, comme cela avait été évoqué lors de l'audition des ministres devant la commission, à une forme de prérecrutement, sur le modèle des anciens instituts de préparation aux enseignements du second degré (IPES).

Après avoir salué les orientations suivies par le ministère dans le présent projet de loi de finances pour 2004, M. André Vallet a souhaité se voir préciser, d'une part, l'évolution démographique des effectifs d'enseignants, et d'autre part, les mesures mises en oeuvre en vue de prévenir les violences scolaires.

Il s'est enfin interrogé sur les éventuelles traductions dans le projet de budget du principe de bivalence des enseignants évoqué par le ministre.

Après avoir exprimé son adhésion aux remarques formulées par les différents intervenants, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis, a apporté les éléments de réponse suivants :

- le problème des sorties du système scolaire sans qualification suppose une révision des méthodes d'enseignement proposées actuellement au sein du collège unique, dans le sens d'une plus grande diversification des parcours. A cet effet, le développement de l'alternance encouragée par le ministre représente une initiative courageuse, qui pourrait se nourrir de l'exemple de l'Allemagne, où les entreprises sont particulièrement impliquées dans le système de formation initiale ;

- le département du Bas-Rhin a également mis en place des activités offrant une approche ludique des sciences, l'objectif étant d'en rendre l'accès gratuit pour les classes scolaires. M. Jacques Valade, président, a, de même, salué l'opération « Cap sciences » à Bordeaux, mise en exergue dans le récent rapport de la mission d'information présidée par M. Pierre Laffitte sur la diffusion de la culture scientifique ;

- dans la mesure où l'expérience des IPES a joué un rôle de levier remarquable pour attirer des jeunes vers les métiers de l'enseignement, l'introduction de possibilités de prérecrutement devrait être envisagée avec intérêt et attention ;

- le flux de départs à la retraite des enseignants des premier et second degrés devrait culminer en 2006-2007 à environ 35.000 départs, contre 23.000 en 2001, si bien que d'ici 2010, plus de 40 % des enseignants auront quitté le système scolaire, ce qui constitue un réel problème, pour le second degré notamment ;

- le projet de budget pour 2004 ne propose pas de pistes pour développer la bivalence des enseignants, qui pourrait être envisagée pour certaines disciplines, comme l'allemand ou la philosophie, confrontées à des phénomènes de surnombres, que le ministère s'est par ailleurs engagé à réduire ;

- l'ensemble des mesures mises en place dans le cadre du plan de prévention des violences en milieu scolaire est exposé dans le présent rapport. Il convient néanmoins de souligner, en ce sens, et à partir de l'expérience réussie des établissements d'enseignement privé sous contrat, le rôle que doit jouer l'équipe éducative et l'importance de renforcer sa cohérence autour d'un véritable projet pédagogique, porté par le chef d'établissement.

A l'issue de ce débat, après que M. Jacques Valade, président, a souligné qu'il serait poursuivi dans le cadre du grand débat sur l'école devant déboucher sur la proposition d'une nouvelle loi d'orientation pour l'éducation, au sein duquel la commission aura un rôle fondamental à jouer, la commission a donné, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement scolaire pour 2004, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen s'étant abstenus.

PJLF 2004 - Enseignement technologique et professionnel - Examen du rapport pour avis

La commission a enfin procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Annie David sur les crédits de l'enseignement technologique et professionnel pour 2004.

A titre liminaire, Mme Annie David, rapporteur pour avis, a rappelé qu'il lui était, cette année encore, difficile d'évaluer l'effort budgétaire de l'Etat en faveur de l'enseignement technologique et professionnel, dans la mesure où les moyens du second degré font l'objet d'une notification globale auprès des recteurs, qui ont ensuite la responsabilité de les répartir entre les voies générale, technologique ou professionnelle.

De fait, outre une mesure nouvelle de 0,6 million d'euros destinée au renforcement du dispositif de validation des acquis de l'expérience, les moyens consacrés à l'enseignement technique suivent les évolutions constatées dans le second degré. Ainsi, sur les 1.500 emplois d'enseignants et 2.400 stagiaires supprimés pour 2004 dans le présent budget, sont concernés 300 emplois de professeurs de lycée professionnel et 400 professeurs de lycée professionnel stagiaires.

Elle a néanmoins souligné la création de 550 emplois au titre de la résorption de l'emploi précaire, à savoir 500 emplois de personnels administratifs affectés dans les groupements d'établissements pour la formation continue (GRETA), et 50 emplois d'enseignants destinés à la mission générale d'insertion, ainsi que l'intégration dans l'éducation nationale, prévue par l'article 78 du projet de loi de finances rattaché au budget de l'enseignement scolaire, de 8 personnels non enseignants de l'ancienne Ecole des métiers Jean Drouant transformée en établissement public local d'enseignement. La mise en place du dispositif des assistants d'éducation a par ailleurs un impact direct sur les lycées professionnels, dans lesquels intervenaient à la fois des aides éducateurs et environ 6.300 maîtres d'internat et surveillants d'externat, en particulier dans les internats, plus développés dans les lycées professionnels que dans les autres établissements, puisque 1 lycée professionnel sur 4 environ en dispose.

Elle a ensuite fait remarquer que les suppressions d'emplois d'enseignants ou de stagiaires pourraient compromettre la réalisation de l'objectif affiché de revalorisation de la filière professionnelle, d'autant plus qu'elles interviennent dans un contexte marqué par des besoins conséquents de renouvellement du corps enseignant, plus de 14.000 professeurs de lycée professionnel devant partir à la retraite sur la période 2004-2008, alors que certaines disciplines professionnelles connaissent dès à présent d'importantes difficultés de recrutement.

Mme Annie David, rapporteur pour avis, a ainsi relevé qu'à la session 2003 du concours externe, seuls 2.878 postes ont été pourvus sur les 3.105 postes ouverts, le métier d'enseignant pouvant apparaître, d'une part, moins attractif que les emplois équivalents sur le marché du travail, et, d'autre part, les candidats potentiels aux concours privilégiant le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement technique (CAPET), destiné à l'enseignement technologique, au concours d'accès au corps des professeurs de lycée professionnel (CAPLP), qui n'est trop souvent choisi que par défaut. Il en résulte un plus fort taux de précarisation dans les lycées professionnels, où la part des non titulaires (contractuels, maîtres auxiliaires ou vacataires) atteint 9,5 %, contre 3 % dans les lycées d'enseignement général.

Tout en saluant la mise en place, depuis 2002, dans 7 disciplines professionnelles sinistrées, de cycles préparatoires aux concours de recrutement de professeurs de lycées professionnels, qui constituent une forme de prérecrutement, le rapporteur pour avis a néanmoins regretté que, sur les 100 postes ouverts à la session 2003, seuls 68 candidats aient été finalement admis.

Enfin, elle a fait observer que les suppressions d'emplois d'enseignants intervenaient alors que, contrairement à l'ensemble du second degré, les effectifs scolarisés dans le second cycle professionnel infléchissent légèrement à la hausse pour 2003 et 2004, à hauteur de + 0,4 % environ, même si les évolutions sont contrastées selon les filières et les secteurs, comme l'a révélé le Haut conseil de l'évaluation de l'école (Hcéé) dans un avis présenté en octobre 2003, présentant des premiers éléments de diagnostic sur le système scolaire. Deux déséquilibres majeurs caractérisent en effet la répartition des effectifs de l'enseignement technologique et professionnel : d'une part, la prédominance des secteurs des services, alors que les formations du secteur de la production, qui bénéficient d'une attractivité insuffisante, sont mieux adaptées au marché de l'emploi, et, d'autre part, la permanence de taux de sortie trop élevés au niveau V de formation, c'est-à-dire au niveau du CAP ou du BEP, alors que les effectifs préparant un baccalauréat professionnel stagnent.

Mme Annie David, rapporteur pour avis, a ensuite exposé les orientations suivies par le ministère dans le sens de la politique de revalorisation de la voie professionnelle engagée depuis 2002.

Elle a tout d'abord salué la priorité consistant à améliorer les conditions d'entrée dans la voie professionnelle, par le développement des dispositifs en alternance au collège, qui proposent aux élèves des parcours alternant enseignements généraux et découverte concrète des métiers et des formations professionnelles, tout en soulignant néanmoins la nécessité d'accompagner ces dispositifs d'un suivi pédagogique rigoureux et de moyens suffisants, afin de ne pas privilégier seulement une vision de court terme consistant à éviter l'abandon d'élèves « décrocheurs ».

Mme Annie David, rapporteur pour avis, a, en outre, estimé que la mise en oeuvre, à compter de la rentrée 2003, de la rénovation du CAP, répondait à l'objectif d'adapter la formation aux défis de l'insertion professionnelle des 216.000 jeunes qui obtiennent chaque année ce diplôme, dont la finalité est l'insertion directe sur le marché du travail. Si, d'une part, les nouveaux programmes des enseignements généraux ont été enrichis pour permettre aux élèves de faire face aux exigences liées au développement économique et aux évolutions des emplois, par l'introduction de l'apprentissage d'une langue vivante, de l'éducation civique, juridique et sociale, et du projet pluridisciplinaire à caractère professionnel, la dimension « professionnalisante » est, d'autre part, réaffirmée, par l'allongement de la période de formation en entreprise, fixée de 12 à 16 semaines au lieu de 3 à 4 semaines auparavant. A ce titre, elle a regretté que cette mesure conduise à diminuer de près d'un trimestre la part dévolue à la formation générale.

Elle a ensuite évoqué les mesures destinées à favoriser la poursuite d'études, d'une part après le BEP, alors que seuls la moitié des diplômés s'engagent ensuite soit vers un baccalauréat professionnel (30 %) soit vers un baccalauréat technologique (moins de 15 %), et, d'autre part, après le baccalauréat technologique ou professionnel, en particulier vers les sections de techniciens supérieurs. En effet, seuls 17 % des bacheliers professionnels s'engagent dans une poursuite d'études, dont 11 % en STS, et 20 % des jeunes issus de la voie technologique, notamment de la filière STT, s'orientent par défaut vers l'université, où ils ne connaissent qu'un très faible taux de réussite (38 %).

Elle a toutefois jugé nécessaire de mettre en place, en parallèle, des dispositifs d'adaptation ou de soutien en direction de ces élèves, ainsi que de veiller dans le cadre du plan régional de développement de la formation professionnelle, dont le projet de loi relatif aux responsabilités locales réaffirme la dimension de planification et de programmation, à la mise en cohérence de l'implantation des formations d'une même filière.

Evoquant le développement du concept de lycée des métiers, qui constitue un volet prioritaire de la politique de revalorisation de l'enseignement professionnel, elle a précisé qu'il devait permettre de relancer l'apprentissage, dont les effectifs sont en stagnation, pour faire en sorte que ce mode de formation participe à la diversification des parcours et des profils. Elle s'est ensuite félicitée de l'assouplissement, en 2003, de la procédure de labellisation, de nature à dissiper tout risque de voir se créer un clivage entre les établissements labellisés et les plus petits lycées professionnels ne pouvant proposer l'ensemble des formations correspondant à un métier de référence.

Elle a enfin exprimé quelques réserves sur les conditions du développement des dispositifs d'accès à la validation des acquis de l'expérience, estimant que la montée en puissance de ce dispositif, qui a concerné 8.000 bénéficiaires en 2002, devrait être accompagnée d'un encadrement suffisant des candidats, en particulier pour les aider dans la constitution du dossier et rendre ainsi la procédure plus accessible. Elle a regretté que, d'une part, les enseignants participant aux jurys ne bénéficient d'aucune formation ni d'aucune décharge spécifique, et que, d'autre part, la validation des acquis de l'expérience reste trop négligée par l'éducation nationale elle-même, comme voie d'accès aux concours de recrutement de professeurs de lycées professionnels.

A l'issue de cette présentation, constatant que les moyens mis en oeuvre, et notamment les moyens d'enseignement, n'apparaissaient pas à la hauteur des défis et enjeux liés à la valorisation de l'enseignement professionnel, Mme Annie David, rapporteur pour avis, a indiqué qu'elle ne pouvait proposer de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement technologique et professionnel pour 2004 et qu'elle souhaitait que la commission s'en remette à la sagesse du Sénat.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jacques Valade, président, a souligné les difficultés d'insertion rencontrées par les bacheliers professionnels, lesquels s'engagent parfois dans des filières universitaires qui ne leur correspondent pas, et a souhaité qu'ils bénéficient d'une information claire sur les orientations qui leur sont offertes, ainsi que, le cas échéant, d'une remise à niveau.

Il s'est ensuite étonné que Mme Annie David, rapporteur pour avis, soit réservée quant à l'allongement de la période de formation en entreprise dans le cadre de la rénovation du CAP, alors que cette mesure est de nature à favoriser l'insertion professionnelle des diplômés. Il a enfin regretté que le dispositif de validation des acquis de l'expérience soit empesé de lourdeurs administratives de nature à retarder la procédure d'examen des dossiers.

M. Fernand Demilly a tout d'abord souhaité connaître l'évolution des crédits consacrés à l'enseignement technologique et professionnel par rapport à l'année précédente. Il s'est ensuite interrogé sur la pertinence du maintien de la scolarité obligatoire à 16 ans, alors que cela ne correspond à l'âge de sortie d'aucun cursus ou diplôme, le CAP étant le plus souvent obtenu à l'âge de 17 ans. Il s'est enfin prononcé en faveur d'une relance de l'apprentissage, dans le cadre plus général d'un développement des relations entre l'institution scolaire et le monde de l'entreprise, dans la mesure où une approche concrète du monde du travail peut contribuer à redonner à des jeunes une motivation pour les apprentissages généraux.

En réponse à ces intervenants, Mme Annie David, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- dans la mesure où les crédits consacrés à l'enseignement technologique et professionnel ne peuvent être isolés, leur évolution suit celle observée pour l'ensemble des crédits du second degré public, en hausse de + 1,67 % par rapport à 2003 ;

- si l'âge de la scolarité obligatoire ne correspond actuellement à aucun cursus scolaire, un allongement de celui-ci permettrait de concilier, dans la formation initiale, les périodes professionnalisantes de stages en entreprise et les enseignements généraux, un socle de connaissances de base étant désormais nécessaire afin de s'adapter aux évolutions du marché de l'emploi.

M. Jacques Valade, président, a fait remarquer qu'un tel allongement de la scolarité obligatoire provoquerait de nombreuses difficultés.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de ne pas suivre les conclusions de son rapporteur pour avis et a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement technologique et professionnel pour 2004.

PJLF 2004 - Francophonie - Examen du rapport pour avis



Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a entendu le rapport de M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis sur les crédits de la francophonie pour 2004.

M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis, a rappelé que le budget de la francophonie incluait à la fois les actions menées par la France sur le plan bilatéral en faveur de la langue française, dont l'examen relève du rapport de Mme Danièle Pourtaud sur les relations culturelles extérieures, et l'appui que la France apporte à la francophonie multilatérale et institutionnelle, par l'intermédiaire du service des affaires francophones, qui constitue l'objet du rapport dont il a la charge.

Il a indiqué que l'examen de ces crédits, au demeurant modiques, permettait de faire le point sur la politique menée par le Gouvernement en faveur de la langue française et de la francophonie.

Passant à l'analyse des crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2004 en faveur de la francophonie multilatérale, il a estimé que ceux-ci reflétaient globalement les engagements pris par la France lors du sommet de Beyrouth en octobre 2002.

Il a rappelé que le Président de la République avait annoncé, à cette occasion, une relance de la francophonie qui avait trouvé une première traduction dans le vote, en loi de finances rectificative pour 2002, d'une enveloppe de 20 millions d'euros supplémentaires, au bénéfice de la francophonie multilatérale. Il a ajouté que le projet de loi de finances pour 2004 prévoyait à son tour 20 millions d'euros de mesures nouvelles en faveur de la francophonie. Il a noté que la moitié de ces crédits -10 millions d'euros- bénéficierait, à travers le Fonds multilatéral unique, aux opérateurs de la francophonie qui devraient recevoir en 2004 du ministère des affaires étrangères 46,7 millions d'euros, contre 36,7 les années précédentes, soit une hausse de 27 %.

Il s'est réjoui que les 10 autres millions d'euros contribuent au renforcement du programme de bourses dans le cadre des actions de soutien à la francophonie, estimant que les efforts menés dans ce domaine, pourtant essentiel, avaient été, par le passé, insuffisants. Il a toutefois indiqué qu'il demanderait au ministre d'en confirmer le montant, ayant noté dans la présentation du « bleu » budgétaire une ambiguïté, qui n'est sans doute qu'apparente, mais qu'il convient de lever.

Il a ensuite exprimé la préoccupation constante que lui inspiraient les régulations budgétaires qui ont touché les précédents budgets. Il a relevé que, sur les 20 millions du plan de relance inscrits en loi de finances rectificative pour 2002, 12 millions d'euros ont bien été versés aux opérateurs de la francophonie avant la fin de l'année 2002, mais que les 8 millions d'euros restants, qui devaient être reportés sur l'exercice 2003, sont restés jusqu'à ce jour gelés.

Il a également noté qu'une annulation de crédits de 5 millions d'euros était venue amputer, au cours de l'année 2003, les 35,7 millions d'euros inscrits en loi de finances initiale et que la moitié de la subvention de l'Université Senghor pour 2002 avait été bloquée.

Il a invité le Gouvernement à débloquer ces crédits de façon à permettre à la France de montrer à ses partenaires de la francophonie, lors du prochain sommet de Ouagadougou, sa détermination à tenir ses engagements.

Le rapporteur pour avis a ensuite présenté les autres crédits qui concourent à l'action de la France en faveur de la langue française et de la francophonie.

Il a indiqué que le service des affaires francophones disposait d'une seconde enveloppe de crédits, plus modique, destinée à subventionner des associations oeuvrant pour la francophonie. Il a noté que ces crédits, d'un montant de 580.000 euros étaient reconduits au même niveau que les années précédentes et a souhaité qu'ils ne fassent pas l'objet, en cours d'année, d'une mesure de régulation budgétaire.

Il a ensuite relevé que certains crédits consacrés à la francophonie multilatérale ne transitaient pas par le Fonds multilatéral unique, comme c'est le cas, en particulier, des subventions versées à TV5 qui sont passées de 65,5 millions d'euros en 2002 à 66,9 millions d'euros en 2003.

Il a ensuite indiqué que les crédits consacrés aux actions bilatérales qui constituent l'autre versant de l'effort de la France en faveur de la francophonie, devraient, en 2004, être reconduits à un niveau comparable à celui de 2003, soit plus de 684 millions d'euros.

Le rapporteur pour avis a ensuite rappelé que M. Maurice Schumann, lorsqu'il était président de la commission, avait obtenu du Gouvernement que soit publié un état récapitulatif permettant d'évaluer la contribution globale de la France en faveur de la francophonie. Il a déploré que ce document n'ait pas été publié, une fois de plus, dans les délais requis. Il a souhaité que la commission marque son mécontentement à l'égard d'une pratique qui entrave le bon exercice du contrôle parlementaire.

M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis, a ensuite abordé les enjeux actuels de la politique de défense de la francophonie.

Il a observé que si, dans de nombreux pays du Sud de tradition francophone, le français restait parlé par les élites, notamment urbaines, il avait en revanche tendance à reculer dans le reste des pays et dans l'ensemble de la population.

Il a ensuite évoqué le roman de l'algérienne Assia Djebar, « La disparition de la langue française », qui raconte l'histoire d'un homme, ancien combattant du Front de libération nationale (FLN), qui est enlevé, bien des années plus tard par des islamistes, notamment parce qu'il est un intellectuel algérien de langue française.

Estimant que ce livre montrait avec acuité les enjeux et les risques qui s'attachent aujourd'hui à la question des langues, il a jugé que, contrairement à ce que pouvait en apparence laisser présumer son titre, ce roman témoignait de la place que tient la langue française dans un pays où la francophonie est particulièrement vivante, même s'il n'appartient pas à la francophonie institutionnelle.

Il a ensuite présenté les deux axes d'actions prioritaires que doit privilégier la francophonie pour assurer l'avenir du français comme langue internationale.

Soulignant que la place du français en Afrique constituait la première de ces priorités, il a estimé que la francophonie devait se fixer comme objectif de permettre aux francophones virtuels de ces pays de devenir des francophones réels, par une remise en état de leurs systèmes éducatifs.

Rejoignant les conclusions d'une récente conférence internationale consacrée à l'enseignement du français en Afrique, il a considéré que les pays francophones du Nord devaient aider les Etats africains à reconstruire leurs systèmes éducatifs et à alphabétiser, en langue africaine ou en français, leurs enfants (garçons et filles) ; il a expliqué que le français ne devait pas se mettre en position de détrôner les langues africaines, mais concourir avec elles au développement de l'Afrique.

Il a ensuite présenté la défense de la langue française dans l'Union européenne comme l'autre grande priorité de la francophonie. Il a rappelé que la place du français dans les institutions européennes n'avait cessé de régresser, au cours des récentes années, sous la pression de la langue anglaise, et a déploré que la France n'ait pas plus vigoureusement réagi lorsque les pays candidats à l'Union européenne ont été tenus d'effectuer leurs démarches en anglais, accréditant l'idée que l'anglais serait, en quelque sorte, déjà la langue des relations internationales de l'Europe. Il s'est réjoui cependant qu'une réaction soit enfin intervenue, en coopération avec la communauté française de Belgique et le Luxembourg, pour mettre sur pied un « plan pluriannuel pour le français dans la perspective de l'Union européenne ». Il a cependant déploré la regrettable légèreté dont font preuve certains hauts fonctionnaires français qui ne s'expriment pas toujours systématiquement dans notre langue, en particulier devant le Parlement européen.

Estimant que l'élargissement de l'Union européenne à vingt-cinq membres ne rendait pas inéluctable le recours au monolinguisme, il a cité en exemple le Conseil de l'Europe, qui réunit 46 Etats, et dont le régime linguistique repose sur deux langues officielles, le français et l'anglais, et cinq langues de travail.

Il a rappelé que la dépense globale de l'Union européenne en matière de traduction et d'interprétation représentait actuellement deux euros par an et par européen, qu'elle passerait à trois euros dans l'Europe à 25. Il a constaté que ce coût n'était pas excessif au regard de l'enjeu politique que représentait la préservation de la diversité linguistique, et de la diversité culturelle.

Il a indiqué que ces considérations avaient conduit l'Assemblée parlementaire de la francophonie à adopter la « déclaration de Strasbourg » par laquelle elle proclame sa détermination à promouvoir le français dans les institutions européennes, rappelle son attachement à la diversité linguistique, et préconise le recours à un système de langue pivot et de langues de travail. Il s'est réjoui que le président de la Convention européenne, à qui il avait transmis le texte de cette déclaration, lui ait, en réponse, confirmé son attachement à « la pratique la plus étendue du plurilinguisme ».

Pour finir, le rapporteur pour avis a souhaité que le Parlement apporte son plein soutien à l'action conduite par le Gouvernement dans le cadre de l'Union, en faveur de l'adoption d'un instrument juridique international garantissant la diversité culturelle.

Un échange de vues a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Louis Duvernois s'est réjoui de l'annonce d'un renforcement de la politique des bourses dans le cadre de la francophonie et a souhaité savoir si celles-ci porteraient exclusivement sur l'enseignement supérieur ou si elles pourraient également concerner l'enseignement secondaire. Il a souhaité que le nouveau Secrétaire général de la francophonie fasse de l'enseignement du français une priorité véritable de son action. Evoquant enfin la réalisation d'une « Maison de la francophonie » regroupant sur un site unique les différentes implantations parisiennes de la francophonie institutionnelle, il s'est interrogé sur l'opportunité d'une opération coûteuse et a souhaité que, dans le contexte budgétaire actuel, elle ne s'effectue pas au détriment des dépenses d'intervention.

M. Yves Dauge a estimé que si les Etats-Unis avaient opéré un retour remarqué au sein de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), c'était précisément pour s'opposer à l'adoption d'un instrument international garantissant la diversité culturelle, et qu'il faudrait donc faire preuve d'une volonté pugnace pour faire aboutir ce projet d'ici 2005. Il a jugé nécessaire de faire comprendre à l'ensemble de nos partenaires que le combat pour la diversité culturelle ne se réduisait pas à la défense de la francophonie, mais qu'il devait intéresser l'ensemble des Etats. Il a souhaité que la commission procède à l'audition de M. Mounir Bouchenaki, sous-directeur général pour la culture à l'UNESCO.

Evoquant les difficultés financières graves que rencontre le réseau culturel français à l'étranger qui, régulation après régulation, est privé de moyens d'intervention, il a souhaité qu'il fasse l'objet d'un réexamen global pour éviter qu'il ne se vide progressivement de sa substance. Estimant essentielle la question des bourses, il s'est prononcé en faveur d'une gestion plus ciblée de leur attribution en fonction d'objectifs définis par pays et par discipline.

M. Jacques Valade, président, a indiqué qu'il retenait la suggestion formulée par M. Yves Dauge de procéder à une audition de l'UNESCO sur le projet de convention relatif à la diversité culturelle, audition à laquelle pourraient être conviés le directeur général, M. Koïchiro Matsuura, et M. Mounir Bouchenaki.

En réponse aux intervenants, M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :

- les difficultés que rencontre le réseau des centres culturels et des alliances françaises à l'étranger, dont l'examen relève du rapport de Mme Danièle Pourtaud sur les relations culturelles extérieures, montrent que la France n'a pas actuellement les instruments de pilotage adaptés et plaide en faveur de la création d'un ministère délégué en charge de la francophonie et des relations culturelles, la coopération devant en revanche relever d'une autre structure ministérielle ;

- les bourses attribuées dans le cadre de la francophonie multilatérale sont gérées par l'Agence universitaire de la francophonie et portent, à ce titre, sur l'enseignement supérieur ; la politique des bourses fait actuellement l'objet d'un débat qu'il conviendra de clarifier : un grand nombre des étudiants des pays du sud, qui viennent étudier dans les universités des pays développés, et en France en particulier, ne reviennent pas dans leur pays d'origine à l'issue de leurs études ; le président de la République a souhaité que la politique française des bourses à l'étranger n'encourage pas cette fuite des cerveaux qui est un frein au développement des pays pauvres ; cette préoccupation généreuse ne doit cependant pas conduire à pénaliser notre pays face à nos partenaires étrangers, et notamment européens, qui ne sont pas nécessairement habités par les mêmes scrupules ;

- la réalisation d'une « Maison de la francophonie » résulte d'un engagement pris par le Président de la République pendant sa campagne électorale et doit, en principe, aboutir en 2005, la mission mandatée pour la préfiguration de ce projet ayant déjà étudié plusieurs propositions de sites ; il n'est pas mauvais de rassembler en un lieu unique les différentes antennes parisiennes de la francophonie multilatérale, à condition, bien entendu, que le coût de cette opération reste dans des limites raisonnables.

A l'issue de ce débat, la commission, suivant son rapporteur pour avis, a émis, à l'unanimité, un avis favorable à l'adoption des crédits de la francophonie pour 2004.

PJLF pour 2004 - Crédits de l'enseignement supérieur - Examen du rapport pour avis

Puis la commission a examiné le rapport pour avis de M. Jean-Léonce Dupont sur les crédits de l'enseignement supérieur pour 2004.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis
, a indiqué qu'il présenterait tout d'abord les crédits proposés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2004, avant d'exposer les défis auxquels se trouve confronté l'enseignement supérieur face à l'évolution des besoins de la société et de l'économie françaises, en particulier dans la perspective de sa nécessaire harmonisation en vue de la création de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et qu'il traiterait, enfin, l'important sujet de la réforme des universités.

Le rapporteur pour avis a enregistré un satisfecit : le budget de l'enseignement supérieur pour 2004 augmente de 2,93 %, à 9,086 milliards d'euros. Ce budget de rupture marque enfin, selon lui, la priorité accordée à l'enseignement supérieur, alors que celle-ci avait été jusqu'ici toujours conférée à l'enseignement secondaire.

Il a estimé que ce signal positif devrait illustrer le début d'un rééquilibrage structurel, d'autant que la dépense par étudiant reste un peu inférieure à la moyenne des pays de l'OCDE et très inférieure à celle de proches voisins.

Le rapporteur pour avis a indiqué que la hausse des crédits recouvrait une augmentation de 1,9 % des dépenses ordinaires et de 15,3 % des dépenses en capital, en crédits de paiement, alors que ces derniers avaient sensiblement diminué les deux années précédentes, en raison notamment de l'insuffisante maîtrise par le ministère de la gestion de ses crédits d'investissement et de l'ampleur des crédits non consommés.

Il a exprimé le souhait que le ministre précise les modalités d'attribution de la mesure nouvelle de 5 millions d'euros en faveur des établissements privés et indique s'il entendait faire entrer l'ensemble de ces écoles dans le système de financement.

S'agissant des personnels, il s'est félicité de la poursuite de la requalification des emplois des personnels IATOS et de la création d'emplois de catégorie A, dont les universités manquent encore trop cruellement.

Il a ensuite signalé plusieurs mesures concernant la vie étudiante, avec en particulier la progression de 1,6 % du taux des bourses à la rentrée 2004, l'offre de 6.000 mois supplémentaires de bourses de mobilité et de 2.000 bourses supplémentaires de mobilité internationale, la rénovation de 7.000 chambres d'étudiants, ainsi que plusieurs mesures nouvelles en faveur des jeunes chercheurs.

Le rapporteur pour avis a, par ailleurs, exposé que le financement des contrats de Plan Etat-régions enregistrait une avance de 2 % sur un rythme linéaire. Compte tenu de l'ampleur des besoins que la mission d'information de la commission sur le patrimoine immobilier universitaire avait constatée, il s'est réjoui de la hausse de 33 % des dépenses de maintenance et de mise aux normes de sécurité des bâtiments universitaires.

Il a souligné que l'emploi par l'enseignement supérieur de ces crédits restait toutefois critiquable à plusieurs titres. En effet, en dépit des progrès enregistrés dans un certain nombre de domaines, trois types de problèmes s'avèrent, selon lui, particulièrement préoccupants :

- la gestion des emplois s'opère sans grande visibilité, ce qui handicape considérablement la gestion prévisionnelle ;

- le patrimoine immobilier universitaire. Le ministre sera interrogé  à ce sujet, compte tenu de la pauvreté des réponses apportées par le ministère concernant les mesures envisagées à la suite des préconisations de la commission ;

- la place de l'évaluation au sein des établissements est trop faible, et ceux-ci mettent en oeuvre des moyens dont ils ignorent assez largement les coûts. Il est normal qu'ils s'adaptent aux exigences actuelles de la gestion publique, les critiques de la Cour des comptes à cet égard étant particulièrement sévères.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a estimé par ailleurs indispensable que l'enseignement supérieur réponde mieux à l'évolution des besoins de la société et de l'économie françaises. En effet, plus que jamais dans une France confrontée au vieillissement de sa population, il constitue -avec la recherche- un moteur fondamental de la croissance. Pour le rapporteur pour avis, le défi pour l'avenir ne consistera plus à développer quantitativement l'offre de formation, mais à l'adapter afin de garantir l'insertion professionnelle d'un nombre désormais stabilisé d'étudiants, et à contribuer à la formation continue d'un nombre croissant de personnes amenées à exercer une « seconde carrière ». Ceci permettra, en outre, une meilleure utilisation des bâtiments universitaires, notoirement sous-employés.

Le rapporteur pour avis a précisé que l'enseignement supérieur devra assurer le remplacement de ses propres enseignants -sachant que dans les dix ans, près de la moitié des professeurs des universités et plus d'un quart des maîtres de conférence devraient partir à la retraite- et, parallèlement, veiller à dispenser des formations permettant d'assurer la « relève » des générations.

Tel est, pour lui, l'horizon dans lequel doivent s'inscrire les réflexions sur la modernisation de l'enseignement supérieur. Après avoir rappelé les préoccupations de la commission concernant la diminution du nombre d'étudiants attirés par les études scientifiques et la crise des carrières scientifiques, il a estimé que la diffusion de la culture scientifique et technique devait être une priorité. Il s'est félicité que le ministre ait adopté un certain nombre de mesures en ce sens, un effort particulier étant consacré aux premiers cycles universitaires.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a souhaité que les établissements présentent plus clairement aux étudiants les débouchés qui s'offrent à eux et favorisent le recrutement de post-doctorants en rendant la recherche plus attractive, et il s'est réjoui des efforts effectués depuis un an dans ce sens.

Jugeant par ailleurs que la synergie entre enseignement supérieur et recherche devait être mieux reconnue au niveau institutionnel, il s'est félicité que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), le ministère propose de créer une mission interministérielle « enseignement supérieur et recherche ».

Evoquant le problème de l'orientation des étudiants, il a exposé que seulement 46,2 % des étudiants à l'université passaient en deuxième année et qu'au total, deux à cinq ans après la première inscription à l'université, seuls 56,8 % d'entre eux réussissaient leur premier cycle universitaire, 20 % de ceux qui avaient échoué abandonnant leurs études sans aucun diplôme. 86.000 étudiants ont été dans ce cas en 2000, ce qui, a-t-il ajouté, constitue un gâchis, tant pour eux que pour la collectivité.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a ensuite relevé quelques mesures nouvelles : en particulier, l'amélioration de la formation prodiguée par les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), ainsi que le renforcement -depuis la rentrée 2002- d'un enseignement de culture générale adapté à chaque grande voie de formation, dont il demandera à connaître le premier bilan.

S'agissant de l'adaptation à l'Espace européen de l'enseignement supérieur, qui devrait s'achever en 2010, il a indiqué que le système européen du LMD (licence-mastère-doctorat) se mettait en place, la France n'ayant pas pris de retard, puisque 50 % des universités l'auront adopté en 2004 et la totalité en 2006-2007. Ce système devrait s'accompagner d'une plus grande ouverture sur l'Europe, d'une plus grande mobilité et d'une saine émulation entre les établissements, français et étrangers.

Après avoir informé les commissaires du lancement de la phase de généralisation des licences professionnelles, il a soulevé quelques difficultés et ambiguïtés concernant, tout particulièrement, les conséquences de la mise en place du système LMD sur les bac+2 et bac+4. Il s'est inquiété de leur pérennité, surtout pour les DEUG, et par conséquent, de la viabilité d'un certain nombre d'antennes délocalisées. En outre, il a estimé qu'il conviendrait d'autoriser tous les établissements délivrant un diplôme bac+4 à proposer des programmes qui pourraient être validés à bac+5.

Il s'est enfin enquis de l'avenir des écoles d'ingénieurs et de gestion auxquelles l'habilitation des diplômes aurait été refusée et de l'objectivité dans l'application des critères retenus pour cette habilitation. A cet égard, il demandera au ministre s'il envisage de passer outre l'avis défavorable du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) du 20 octobre dernier, sur le projet d'arrêté fixant la liste des diplômes de 28 écoles de commerce, établie par la commission d'évaluation ad hoc.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué la nécessaire réforme des établissements d'enseignement supérieur et émis le souhait que le projet de loi de modernisation soit prochainement soumis à l'examen du Parlement.

Les universités étant désormais à l'étroit dans leur statut, il a estimé qu'elles avaient aujourd'hui besoin d'une plus grande autonomie. Alors que se poseront en particulier les questions de la globalisation de leur budget et de la dévolution du patrimoine immobilier, le rapporteur pour avis a fait état du bilan positif de la globalisation du budget des universités italiennes et il a souhaité que le ministère établisse un bilan des autres expériences européennes.

Il a insisté sur le fait que cette plus grande autonomie devait avoir pour corollaire l'amélioration de la gestion ainsi que le développement de la contractualisation et d'une culture de l'évaluation.

Pour lui, l'amélioration de la gestion des universités passera à la fois par une meilleure affirmation de leur gouvernance (renforcement de la présidence, plus grande efficacité du conseil d'administration, création d'un conseil d'orientation stratégique) et par le développement des compétences d'expertise de leur personnel administratif.

Les établissements devraient, par ailleurs, clarifier leurs relations contractuelles avec l'Etat, mais aussi développer celles-ci avec les collectivités territoriales et les milieux socio-économiques, le renforcement des synergies entre les universités et l'ensemble des acteurs locaux étant en effet essentiel.

Le rapporteur pour avis a aussi souhaité que soit développée une culture de l'évaluation, ce qui nécessitera notamment une meilleure prise en compte des différentes activités des enseignants-chercheurs.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

Après avoir félicité le rapporteur pour avis, M. Pierre Laffitte a confirmé que l'évaluation se situait au coeur de la démarche vers un renforcement de l'autonomie des établissements, ce qui nécessite une réflexion sur les critères de cette évaluation. Il a prôné une approche multicritères, l'un d'entre eux devant concerner la recherche de l'excellence par les départements universitaires. Il a jugé qu'il faudrait une volonté forte pour que l'évaluation ne soit pas globale, mais d'abord interne.

Il a ensuite estimé nécessaire une réforme de la gouvernance, à l'image des universités italiennes ou allemandes, avec en particulier un renforcement de la présidence et une simplification du fonctionnement du conseil d'administration.

Evoquant enfin le problème du taux élevé d'échec en premier cycle universitaire, il a suggéré que soient multipliés les premiers cycles en alternance.

Après s'être interrogé sur le rôle des missions du Conseil national d'évaluation, M. Jacques Valade, président, a exprimé le souhait que le ministre recale les modalités de l'évaluation des établissements.

M. Jacques Legendre a partagé les préoccupations du rapporteur pour avis concernant, d'une part, la répartition des crédits entre l'enseignement supérieur et l'enseignement scolaire -qui devrait profiter davantage au premier- et, d'autre part, l'avenir des antennes délocalisées. Il a rappelé que ces dernières avaient permis la démocratisation de l'enseignement supérieur et soulagé les universités face à l'afflux de demandes d'inscriptions dans les premiers cycles. Il a souhaité que les universités n'oublient pas cet effort des villes moyennes et ne soient pas tentées de reconcentrer leurs départements, remettant ainsi en cause ces antennes alors que le système LMD ne condamne pas les bac + 2.

Il s'est en revanche inquiété, dans le contexte démographique actuel, du fait que le système LMD risque d'augmenter encore le temps de la scolarité.

S'agissant du taux d'échec dans les premiers cycles, il a rappelé qu'il résultait partiellement de la liberté donnée à tout élève disposant d'un baccalauréat, quel qu'en soit le type, de s'inscrire dans la filière de son choix. Or en application de la seconde partie de la « loi Haby », les différents baccalauréats devaient orienter vers les différentes branches de l'enseignement supérieur.

Il a enfin souhaité que les établissements profitent de la stabilisation des effectifs étudiants pour accueillir davantage d'étudiants étrangers.

M. Jacques Valade, président, a rappelé qu'il avait été un farouche partisan de la délocalisation des premiers cycles. Celle-ci a permis à de nombreux jeunes de poursuivre des études qu'ils n'auraient probablement pas entreprises en l'absence de telles antennes à proximité de leur domicile. Il a estimé que celles-ci avaient donc toute leur place, à condition toutefois de ne pas chercher à devenir des universités de plein exercice, le système LMD n'ayant pas vocation à être mis en place partout.

En réponse aux intervenants, M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis, a déclaré partager pleinement les propos de M. Pierre Laffitte. Il a indiqué que d'après les informations communiquées par le ministère, l'orientation des bacheliers semblait avoir été mieux réalisée cette année, les problèmes en la matière tenant en particulier au fait que les titulaires de baccalauréats généralistes s'orientent trop souvent vers les instituts universitaires de technologie (IUT), au détriment des autres bacheliers.

Il a souhaité une répartition équilibrée des antennes délocalisées sur le territoire, mais que soit évité leur éparpillement.

Il a ensuite souligné le nombre croissant d'étudiants étrangers, en progression de 47,7 % entre 1998 et 2002 (180.000 inscriptions à la rentrée 2002), qui ne fait cependant que compenser la diminution enregistrée les années précédentes. Il a dénoncé les difficultés d'accueil que rencontrent trop souvent ces étudiants et a regretté la faiblesse des effectifs provenant des Etats membres de l'Union européenne ou des pays candidats à l'adhésion.

A cet égard, M. Jacques Valade, président, s'est inquiété du risque que soient accueillis des étudiants ayant échoué aux concours d'entrée dans l'enseignement supérieur dans leur propre pays.

A l'issue de ces débats, la commission a donné, à l'unanimité, un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur pour 2004.

Enseignement des langues vivantes dans les établissements scolaires - communication

La commission a ensuite entendu une communication de M. Jacques Legendre sur l'enseignement des langues vivantes dans les établissements scolaires.

A titre liminaire, M. Jacques Legendre a rappelé qu'il avait été à l'origine, en 1994, de la création, au sein de la commission des affaires culturelles, d'une mission d'information sur l'enseignement des langues étrangères en France, dont les travaux avaient abouti à la proposition de 50 mesures adoptées à l'unanimité, afin de remédier au resserrement des langues étudiées autour de l'anglais et de l'espagnol. Il a précisé qu'il avait en outre contribué, au sein du Conseil de l'Europe, à faire imposer l'idée selon laquelle chacun devrait apprendre au moins deux langues en plus de sa langue maternelle.

Il a regretté que ce message n'ait pas reçu un écho suffisant chez les ministres successifs de l'éducation nationale, M. François Bayrou n'ayant qu'instillé une sensibilisation aux langues vivantes à l'école primaire et M. Claude Allègre ayant ensuite contribué à élargir le « tunnel de l'anglais » en déclarant qu'il ne fallait plus considérer cette langue comme une langue étrangère. S'il a reconnu que M. Jack Lang s'était approprié nombre des idées du rapport de la mission d'information, il a néanmoins constaté qu'en l'absence de moyens adaptés, ces velléités avaient abouti à l'échec de la diversification à l'école et par l'école. Les tendances dénoncées huit ans auparavant se sont renforcées au fil des années, l'anglais occupant désormais une position hégémonique, tandis que se poursuit le déclin de l'allemand, ce qui est paradoxal au moment même où la France et l'Allemagne entendent jouer le rôle de moteur de l'Europe.

M. Jacques Legendre s'est de même inquiété du recul de l'enseignement du russe, dans un contexte marqué par le vieillissement du corps enseignant et la diminution du nombre de postes ouverts aux concours de recrutement, alors que la Russie cherche à se rapprocher de l'Europe.

Rappelant ensuite que la France pouvait puiser dans la diversité de sa population d'importants gisements linguistiques, M. Jacques Legendre a regretté que la présence de communautés portugaise, polonaise ou arabe ne soit pas suffisamment valorisée pour entretenir et développer des relations avec les pays concernés. Il s'est ainsi prononcé en faveur de la promotion de l'enseignement des langues de l'immigration, et de l'arabe en particulier, au sein de l'école de la République, pour favoriser l'intégration des jeunes issus de l'immigration et nouer des relations plus étroites avec nos partenaires arabophones, afin de renforcer en retour la francophonie.

Au sujet de l'apprentissage précoce des langues vivantes, M. Jacques Legendre a fait remarquer que les compétences des professeurs des écoles, essentiellement formés en anglais, et le souci de l'articulation entre l'école primaire et le collège, entravaient toute réelle possibilité de choix de la part des familles.

Dans une perspective de diversification, il a souhaité que chaque élève puisse débuter l'apprentissage d'une deuxième langue dès l'entrée au collège, et que la hiérarchie pernicieuse instaurée entre les langues étudiées soit remplacée par des parcours plus souples, permettant le cas échéant de passer à une phase d'entretien.

Observant que la mise en place d'une carte des langues dans certaines académies avait abouti à une rationalisation peu satisfaisante de l'offre de langues, ainsi recentrée sur les langues les plus importantes, M. Jacques Legendre a évoqué l'idée d'insérer cette carte académique des langues dans le contexte local, pour en faire le support de la politique linguistique locale élaborée après consultation, non seulement des autorités éducatives, mais aussi des instances économiques et des élus locaux, et prenant appui sur l'existence éventuelle de jumelages, de coopération décentralisée ou la présence de locuteurs natifs. Si une telle politique est parfois mise en place, comme dans les académies de Strasbourg ou de Nancy-Metz notamment, cela reste encore trop rare, alors qu'un choix des langues étudiées fondé sur une analyse des besoins peut donner aux jeunes un avantage considérable sur le plan économique, dans la mesure où la langue maîtrisée aux côtés de l'anglais est celle qui fait la différence entre les candidats à l'embauche.

Rappelant les préconisations formulées, M. Jacques Legendre a affirmé son ambition de donner à l'enseignement des langues vivantes un nouvel élan, fondé à la fois sur une approche locale, une diversification des parcours, en dotant chaque élève d'un carnet de route sur le modèle du portfolio européen des langues élaboré par le Conseil de l'Europe, mais aussi un renforcement de la formation des enseignants et la mobilisation de l'ensemble des compétences, y compris le recours à des locuteurs natifs. Il a enfin souhaité que l'ouverture interculturelle et internationale soit placée au coeur de l'enseignement des langues vivantes, par une extension des sections européennes, auxquelles il est parfois adressé un reproche d'élitisme.

En conclusion de son propos, M. Jacques Legendre a souligné l'importance de réaffirmer, alors que s'engage le grand débat national sur l'école, la nécessité de mener chaque futur citoyen à la maîtrise de plusieurs langues, alors que le fait d'être monolingue est, sans conteste, un handicap.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Après avoir félicité le rapporteur pour avoir ainsi suscité une réflexion sur ce sujet majeur, M. Jacques Valade, président, a tout d'abord déploré la progressive disparition de l'apprentissage de la langue française par les jeunes générations des pays arabes et souhaité que des efforts soient déployés pour renforcer la présence de notre langue dans ces pays.

Il a ensuite souligné combien les opportunités offertes par la maîtrise des langues de l'Extrême-Orient, en termes d'ouverture à la fois économique et culturelle, devaient être valorisées pour inciter les jeunes à apprendre ces langues, le chinois et le japonais notamment.

Faisant remarquer que la ville de Bordeaux était jumelée avec la ville de Wuhan en Chine, ce qui a permis la mise en place d'un accord de coopération entre l'école de commerce bordelaise et l'université de management de Wuhan, il a néanmoins regretté que la langue d'enseignement utilisée dans le cadre de ces échanges d'étudiants soit l'anglais.

Enfin, s'agissant de l'apprentissage précoce des langues étrangères, il a relayé les préconisations du rapporteur quant à l'exigence de continuité entre les différents niveaux d'enseignement. En effet, dans la région Aquitaine, alors que les initiatives d'une inspectrice générale de l'éducation nationale, Mme Aline Delaunay, avaient permis le développement de l'apprentissage de l'allemand dès l'école maternelle, le suivi n'a pas été assuré à l'école primaire et au collège.

M. Louis Duvernois a salué l'opportunité d'un tel rapport, alors même que notre pays ne semble pas encore avoir pris conscience de l'importance d'un enseignement des langues reposant sur une politique spécifique. Si M. Jack Lang avait perçu ce problème, il n'y a néanmoins pas répondu avec des moyens adaptés. M. Louis Duvernois a ensuite fait observer que les établissements d'enseignement français à l'étranger pouvaient servir de référence quant à l'apprentissage précoce des langues étrangères, préconisé par le linguiste M. Claude Hagège, dans la mesure où les enfants étudient, dès l'école primaire, la langue du pays d'accueil, avec d'excellents résultats sur le plan pédagogique, puisque les performances au baccalauréat sont de 10 points supérieures à la moyenne nationale. A ce titre, il a évoqué l'argument avancé par les écoles américaines proposant une immersion en français, selon lequel cette pratique permet de développer l'ensemble des capacités cérébrales des enfants.

Il a enfin insisté sur l'urgence d'une véritable politique nationale en faveur de l'enseignement des langues, indispensable pour assurer la présence de notre pays et de notre culture au-delà de nos frontières.

M. Jacques Valade, président, a affirmé, sur ce dernier point, que la commission ferait en sorte que le rapport parvienne au ministère de l'éducation nationale et reçoive l'écoute qu'il mérite.

Après avoir rappelé que dans certaines grandes écoles l'étude de trois langues était obligatoire, M. Pierre Laffitte a souligné l'importance de maîtriser plusieurs langues dans les secteurs du tourisme et du commerce international. Il a en outre exprimé son adhésion aux propos du rapporteur quant à l'importance de promouvoir un enseignement de l'arabe, notamment à destination des jeunes des banlieues.

Mme Brigitte Luypaert a insisté sur la nécessité de rendre l'enseignement des langues à la fois plus attractif et plus efficace, en différenciant notamment les niveaux d'apprentissage visés. Elle a ensuite souhaité connaître s'il existait un bilan des répercussions de l'introduction de l'enseignement des langues à l'école primaire sur les résultats des élèves.

Tout en remerciant les intervenants pour leur participation au débat, M. Jacques Legendre a apporté les éléments de réponse suivants :

- le présent rapport a précisément pour objet de susciter une réaction plus volontariste en faveur de l'enseignement des langues étrangères de la part du ministère de l'éducation nationale, alors même que le président de la République, M. Jacques Chirac, a, lors de son allocution du 14 juillet 2003, évoqué la nécessité de renforcer l'apprentissage des langues vivantes au nombre des priorités assignées à l'école ;

- les premières analyses relatives aux effets de l'introduction à l'école primaire de l'enseignement des langues sur le niveau des élèves ne sont guère positives, dans la mesure où cet enseignement a souffert pendant plusieurs années d'atermoiements et d'hésitations quant aux méthodes et aux publics visés. De fait, à défaut d'une véritable évaluation des élèves, les professeurs du collège sont conduits le plus souvent à ignorer les acquis éventuels des élèves. A ce titre, M. Jacques Valade, président, a fait remarquer le problème identique qu'avait suscité la mise en place des mathématiques modernes, tout en espérant que cet échec, à défaut de maturation suffisante, ne soit pas reproduit en matière d'apprentissage précoce des langues ;

- s'agissant de la première langue apprise, M. Jack Lang a cherché à relayer la pensée de M. Claude Hagège, selon lequel il serait impératif d'apprendre une langue autre que l'anglais à l'école primaire ; à cette fin, et sans opter pour une méthode radicale et peu satisfaisante, consistant à interdire l'étude de l'anglais à l'école, les familles doivent bénéficier d'une information en amont de leur choix ;

- l'intérêt d'être polyglotte est incontestable dans les secteurs du commerce et du tourisme, comme cela a par ailleurs été souligné lors d'une récente séance de l'Assemblée générale du Conseil de l'Europe ;

- un roman paru en 2003 sous la plume de l'écrivain algérien Assia Djebar, intitulé « La disparition de la langue française », aborde le risque de voir les élites des pays arabes se tourner vers la langue et la culture anglo-saxonnes, constat qui doit être toutefois nuancé si l'on considère que l'Algérie reste le deuxième pays francophone ;

- l'enseignement du chinois tend à se développer, en particulier dans le cadre de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), même si la part qui lui est dévolue reste marginale et insuffisante, tout comme l'est celle du vietnamien, malgré les nombreuses possibilités d'échanges avec ces pays asiatiques.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé, à l'unanimité, d'autoriser la publication des conclusions de la communication relative à l'enseignement des langues vivantes étrangères en France sous la forme d'un rapport d'information.