II. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Article 47 ter (nouveau)

Après le huitième alinéa de l'article L. 2333-67 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les communes et les établissements publics compétents pour l'organisation des transports urbains dont la population est inférieure à 10 000 habitants et dont le territoire comprend une ou plusieurs communes classées communes touristiques au sens de l'article L. 133-11 du code du tourisme, le taux du versement est fixé dans la limite de 0,55 % des salaires définis à l'article L. 2333-65 du présent code. »

III. RAPPORT SÉNAT N° 107 (2011-2012) TOME III

Commentaire : le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Joël Giraud, a pour objet d'étendre le « versement transport », au taux plafond de 0,55 % de la masse salariale, aux communes touristiques de moins de 10 000 habitants.

I. LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DU VERSEMENT TRANSPORT

A. LE PRINCIPE, LE CHAMP ET L'ASSIETTE

Instauré par la loi du 12 juillet 1971 1 ( * ) et initialement conçu comme un prélèvement obligatoire dans la seule région Ile-de-France, le versement destiné aux transports en commun, plus communément appelé « versement transport » (VT), a ensuite été étendu par la loi du 11 juillet 1973 2 ( * ) aux autorités organisatrices des transports urbains (AOTU) de province de plus de 300 000 habitants.

Le seuil minimal de population a été successivement abaissé à 100 000, 30 000 puis 20 000 habitants, pour être finalement fixé à 10 000 habitants par la loi du 13 décembre 2000 3 ( * ) dite « SRU ». Hors région Ile-de-France, le VT est toujours lié à la création d'un périmètre de transports urbains (PTU) par l'AOTU. Il est régi par les articles L. 2333-64 à L. 2333-75 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

Le VT n'est pas systématique mais, aux termes de l'article L. 2333-66 du CGCT, institué par délibération de l'AOTU, c'est-à-dire du conseil municipal ou de l'organe compétent de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), dans les limites de son PTU. Il est une taxe sur les employeurs locaux, dans la mesure où il constitue une contrepartie aux services de transport urbain que fournit l'AOTU, qui favorisent l'accessibilité des salariés à leur lieu de travail. Il est dès lors assis sur la masse salariale des établissements des entreprises privées et des administrations publiques employant au moins dix salariés 4 ( * ) .

Son recouvrement est assuré par l'URSSAF pour les employeurs qui lui versent tout ou partie des cotisations patronales dont ils sont redevables, ou par l'organisme chargé du recouvrement de la part patronale d'assurance maladie pour les autres employeurs.

Le VT est dédié au financement des transports publics urbains relevant du PTU et d'autres services de transports publics qui en constituent le prolongement, dans le cadre d'un contrat passé avec l'AOTU. Aux termes de l'article L. 2333-68 de ce code, il est ainsi « affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics urbains et des autres services de transports publics qui, sans être effectués entièrement à l'intérieur du périmètre des transports urbains, concourent à la desserte de l'agglomération dans le cadre d'un contrat passé avec l'autorité responsable de l'organisation des transports urbains. Le versement est également affecté au financement des opérations visant à améliorer l'intermodalité transports en commun-vélo ».

B. LES DIFFÉRENTS TAUX APPLICABLES

L'article L. 2333-67 du CGCT prévoit un taux plafond progressif en fonction de la population de la commune ou du territoire couvert par l'EPCI, à l'intérieur duquel le tarif du VT peut être fixé, par délibération du conseil municipal ou de l'organe compétent de l'établissement public. Les taux plafonds applicables sont les suivants :

Taux plafond du versement de transport selon la taille de la collectivité
(hors majoration et modulation éventuelles)

Population de la commune ou du territoire de l'EPCI

Plafond de droit commun

Plafond applicable lorsque l'autorité organisatrice des transports urbains a décidé de réaliser une infrastructure de transport collectif en site propre

10 000 à 100 000

0,55 %

-

50 000 à 100 000

0,85 % (1)

Plus de 100 000

1 %

1,75 % (infrastructure
en mode routier ou guidé) (1)

(1) : Si les travaux n'ont pas commencé dans un délai maximum de cinq ans à compter de la date de majoration du taux du VT, le taux plafond applicable à compter de la sixième année est celui de droit commun (0,55 % ou 1 %).

Ces taux plafond peuvent être majorés de 0,05 % dans les communautés de communes et communautés d'agglomération. Cette faculté est également ouverte aux communautés urbaines, aux métropoles et aux AOTU auxquelles ont adhéré une communauté urbaine, une métropole, une communauté d'agglomération ou une communauté de communes.

Inversement, l'AOTU peut réduire , pendant une durée maximale de cinq ans, le taux du VT sur le territoire des communes nouvellement incluses à la faveur d'une extension du PTU .

Le 1° de l'article L. 2333-64 prévoit également l'imposition des personnes physiques ou morales employant plus de neuf salariés dans une commune ou une communauté de communes dont la population est inférieure à 10 000 habitants et dont le territoire comprend une ou plusieurs communes classées communes touristiques au sens de l'article L. 133-11 du code du tourisme 5 ( * ) . L'article L. 2333-67 dispose par ailleurs que dans les territoires comprenant une ou plusieurs communes classées touristiques, le taux applicable peut être majoré de 0,2 % . Cette disposition n'est toutefois pas applicable lorsque la population est inférieure à 10 000 habitants puisqu'il n'est prévu aucun plafond de base.

II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article, adopté à l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Joël Giraud, avec l'avis défavorable du Gouvernement et de la commission des finances, propose de créer un versement transport dans les communes touristiques de moins de 10 000 habitants .

Il modifie ainsi l'article L. 2333-67 du CGCT, précité, pour prévoir que dans les communes et les établissements publics compétents pour l'organisation des transports urbains dont la population est inférieure à 10 000 habitants et dont le territoire comprend une ou plusieurs communes classées communes touristiques, le taux du versement est fixé dans la limite de 0,55 % des salaires.

Ce plafond vient donc compléter la majoration de 0,2 % précitée, applicable aux plafonds des territoires dont la population est supérieure à 10 000 habitants et qui comprennent une ou plusieurs communes touristiques.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Ainsi que nos collègues députés à l'origine du présent article l'ont précisé, ce VT ne fait que traduire un engagement formulé dans la loi « Grenelle II 6 ( * ) » . De fait, son article 55 a complété l'article L. 2333-64 du CGCT pour assujettir les personnes morales situées dans les communes touristiques de moins de 10 000 habitants, ainsi qu'il a été précisé supra , mais il n'avait pas fixé de plafond de taux, rendant la mesure inapplicable.

Cette extension du VT assurerait donc la cohérence des engagements pris dans le Grenelle de l'environnement et la prise en compte de la spécificité touristique des communes, que leur population soit inférieure ou supérieure à 10 000 habitants.

De même, la progressivité du VT des communes touristiques serait préservée, compte tenu de la majoration applicable au-delà de 10 000 habitants. Le taux serait ainsi de 0,55 % pour les territoires inférieurs à 10 000 habitants, 0,75 % entre 10 000 et 100 000 habitants, et 1,2 % au-delà (hors majorations pour modes de transport en site propre).

Pour autant, cette mesure tend aussi à s'éloigner un peu plus de la logique du VT , qui était originellement dédié à l'Ile-de-France et dont la justification repose sur la meilleure accessibilité des salariés à leur lieu de travail. Elle est également susceptible de concerner avant tout les communes isolées, par exemple en montagne, ce qui peut contrevenir à l'objectif du VT, qui est de financer les transports urbains . Certes, le VT est juridiquement un « versement destiné aux transports en commun », mais il reste tributaire d'un périmètre de transport urbain.

Enfin, ainsi que le rapporteur général du budget, Gilles Carrez, l'a souligné en séance à l'Assemblée nationale, cet élargissement du périmètre du VT contribuerait à alourdir les charges pesant sur les PME locales de dix salariés et plus et sur les « petites activités » des communes touristiques.

Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur cet article.


* 1 Loi n° 71-559 du 12 juillet 1971 sur le versement des employeurs destiné aux transports en commun de la région parisienne.

* 2 Loi n° 73-640 du 11 juillet 1973 autorisant certaines communes et établissements publics à instituer un versement destiné aux transports en commun.

* 3 Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

* 4 A l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique à but non lucratif dont l'activité est de caractère social.

En Ile-de-France, lorsque l'atteinte ou le dépassement du seuil de dix salariés résulte d'un accroissement de l'effectif, les employeurs sont dispensés pendant trois ans du versement. Le montant du VT est ensuite réduit de 75 %, 50 % puis 25 % pour chacune des trois années suivant la dernière année de dispense.

* 5 Cet article dispose que « les communes qui mettent en oeuvre une politique du tourisme et qui offrent des capacités d'hébergement pour l'accueil d'une population non résidente, ainsi que celles qui bénéficient au titre du tourisme (...) de la dotation supplémentaire ou de la dotation particulière identifiées au sein de la part forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement, peuvent être dénommées communes touristiques ».

* 6 Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.