IV. DÉBATS SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE (SÉANCE DU MARDI 22 NOVEMBRE 2011)

Article 9 ter (nouveau)

L'article 139 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 est abrogé.

M. le président. L'amendement n° I-22, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Il s'agit là encore de reprendre ces 200 millions d'euros et, en l'occurrence, de rétablir le prélèvement sur recettes concernant la TGAP « granulats ». (Mme Nathalie Goulet s'exclame.)

L'article 9 ter vise à supprimer cette dotation, ce qui conduirait à une diminution de 23,3 millions d'euros du montant des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.

Nous proposons donc la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. En réalité, cette dotation, qui partait d'une très bonne intention, monsieur le président de la commission, n'a pas encore été mise en place. Par conséquent, nous ne retirons rien aux collectivités.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Si !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Cette dotation pose, en réalité, d'importants problèmes techniques. Il faut recenser les carrières...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce n'est pas difficile !

Mme Valérie Pécresse, ministre. ... et déterminer les critères d'éligibilité des communes en fonction du lieu où se trouve la carrière.

L'exploitation d'une carrière, vous en conviendrez, mesdames, messieurs les sénateurs, suppose que les camions passent effectivement sur le territoire de la commune où elle est exploitée. Toutefois, ce sont les transports qui représentent des nuisances. Ce sont donc ces derniers qui devaient être compensés par la TGAP « granulats », pour les routes et les habitants. Il s'agit de nuisances sonores et de pollution. Cependant, où s'arrête le transport de ces granulats ?

Bref, nous avons eu d'importants problèmes pour déterminer les critères d'éligibilité. Au total, selon l'évaluation du Gouvernement, il y aurait plus de 15 000 communes concernées, ce qui aboutirait à un montant faramineux de 1 600 euros par commune.

Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement vous propose de supprimer purement et simplement cette TGAP « granulats », qui n'a donc jamais été versée, et, en revanche, de concentrer l'effort de l'État sur un outil simple et clair : la dotation globale de fonctionnement des communes.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Elle est en diminution !

Mme Valérie Pécresse, ministre. J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Madame le ministre, je regrette vraiment cette attitude du Gouvernement - en réalité, de l'administration -, car elle fait fi de la volonté du Parlement et, en particulier, de l'ancienne majorité sénatoriale, qui avait voté cette disposition.

Madame le ministre, quand on est élu d'une zone de vallées comprenant différents sites d'exploitation de carrières, on peut parler de manière très concrète de ce sujet, de la réalité des efforts consentis par les communes et les intercommunalités concernées, et en même temps des nuisances induites pour les communes et leurs habitants.

Par conséquent, si le Parlement a voté deux années de suite le principe de la TGAP sur les granulats avec une part communale, ce n'est pas sans raison.

Mme Nathalie Goulet. Absolument !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Que l'on ne nous dise pas que les préfets ne sont pas en mesure de réaliser les recensements demandés : ils sont aux ordres du Gouvernement, et de l'État en général, et il n'est pas difficile de leur demander de faire remonter les informations sur ce thème. Ils le font déjà pour toutes sortes de sujets qui ont sans doute moins d'utilité.

Par conséquent, je ne peux que réitérer, sur ce point, la position que je défendais. Je considère que revenir sur les votes antérieurs est une mauvaise manière faite au Parlement.

M. Richard Yung. Bravo !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je voudrais revenir sur cette question de la TGAP sur les granulats.

Comme le rappelait M. le président de la commission des finances, nous avons adopté cette disposition deux années de suite. Le ministre du budget de l'époque, Éric Woerth, conscient des difficultés d'identification et de répartition de cette TGAP, collectée par les douanes, entre les collectivités, avait même installé un groupe de travail, considérant il se posait là un problème administratif important.

Or ce groupe de travail n'a pu se réunir qu'une seule fois. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement concernant la répartition de la TGAP sur les granulats entre les communes qui hébergent des carrières.

Nous pourrions très bien réactiver ce groupe de travail afin d'essayer de trouver une solution à un problème tout à fait réel ! (Applaudissements sur les travées de l'UCR.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Madame la ministre, vous ne pouvez ignorer que la région Île-de-France est très riche en gypse, utile à la construction de logements, quels qu'ils soient - logements sociaux, pavillons ou autres. Les ambitions en matière de construction d'habitations en Île-de-France sont fortes, pour répondre à la demande des habitants.

Or vous adressez un signal très négatif aux collectivités qui possèdent des carrières ou qui pourraient en accueillir. En Seine-et-Marne - je le sais d'expérience et vous pourrez faire confirmer mes propos par l'administration en charge de ces questions - il a fallu compter pratiquement dix ans pour parvenir à étendre une carrière de gypse. Les entreprises s'y prennent très à l'avance, car les carrières produisent des nuisances. Vous n'encouragez pas les collectivités à accepter leur implantation si vous refusez de mettre en ouvre une décision qui a pourtant été longuement discutée.

Franchement, je ne comprends pas pourquoi l'administration de Bercy y est opposée, sauf à considérer que l'autonomie fiscale des collectivités n'est pas votre tasse de thé ! (M. Jean-Louis Carrère applaudit.)

M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.

M. François Marc. Nous soutiendrons d'autant plus volontiers l'amendement présenté par Mme la rapporteure générale que les sénateurs socialistes, sur l'initiative de notre collègue Jean-Étienne Antoinette, sont à l'origine de l'affectation aux communes, dans la loi de finances pour 2011, d'un tiers du produit de la TGAP sur les granulats.

Le vote de cet amendement s'inscrit donc dans la continuité. Ces recettes sont essentielles au financement d'opérations destinées à la protection de l'environnement ou à l'entretien des voiries municipales.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-22.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 9 ter est supprimé.