M. Yvon COLLIN et Mme Fabienne KELLER

II. PRÉSENTATION GLOBALE DE LA MISSION

A. DES CRÉDITS DE PAIEMENT STABLES ENTRE 2011 ET 2013

1. Pour 2012, des AE nettement révisées à la baisse (près de 2,7 milliards d'euros, soit - 40 %) et des CP quasi-constants (3,3 milliards d'euros)

La mission « Aide publique au développement » est dotée par le présent PLF de 2,746 milliards d'euros en AE et de 3,333 milliards d'euros en CP . Aucun fonds de concours n'est attendu, pour 2012, en complément de ces dotations.

Ces crédits correspondent :

- d'une part, à 0,7 % du total des AE et 0,9 % du total des CP demandés pour le budget général en 2012 ;

- d'autre part, comme on l'a indiqué ci-dessus, seulement 34 % , en CP , des dépenses totales de l'APD française prévues pour 2012.

Crédits de la mission « Aide publique au développement »

(en millions d'euros)

Programmes

LFI 2011

PLF 2012

AE

CP

AE

Part des AE de la mission

CP

Part des CP de la mission

110 « Aide économique et financière au développement »

2 492,0

1 170,1

627,7

22,9 %

1 191,9

35,8 %

209 « Solidarité à l'égard des pays en développement »

2 053,2

2 134,0

2 090,5

76,1 %

2 113,3

63,4 %

301 « Migrations et développement solidaire »

30,0

30,0

28,0

1,0 %

28,0

0,8 %

Total

4 575,1

3 334,1

2 746,1

100,0 %

3 333,2

100,0 %

Source : PAP de la mission « Aide publique au développement » annexé au PLF pour 2012

Par rapport à la LFI pour 2011 (4,58 milliards d'euros en AE et 3,33 milliards d'euros en CP), la dotation pour 2012 de la mission correspond à une forte baisse des AE , de 40,0 % ; les CP sont quasiment constants (- 0,03 %).

La baisse des AE précitée tient au programme 110 « Aide économique et financière au développement » : après avoir fortement augmenté en 2011, ses AE propres reviennent à un niveau proche de celui de 2010. Les variations d'une année à l'autre reflètent les calendriers de reconstitution de la contribution française à des fonds multilatéraux. Pour leur part, les AE du programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » progressent légèrement (+ 1,8 %).

Les dépenses retracées par la mission sont, en majorité , des dépenses d'intervention (titre 6). Celles-ci sont en effet prévues par le présent PLF à hauteur de 2,28 milliards d'euros en AE et 2,46 milliards d'euros en CP, soit respectivement 83 % du total des AE de la mission et 74 % du total de ses CP.

2. Une stabilité du niveau de CP dans la programmation pour 2011-2013

La programmation triennale visant la mission « Aide publique au développement », traduite par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2013, se caractérise par la stabilité des CP prévus.

En effet, les CP de la mission doivent conserver le même niveau, soit 3,3 milliards d'euros, sur l'ensemble de la période 2011-2013 . L'évolution des AE doit suivre une forte hausse en 2011, puis une nette baisse en 2012, avant de décroître moins rapidement en 2013 (- 2,6 % par rapport à 2012).

La programmation pluriannuelle
des crédits de la mission « Aide publique au développement »

(en millions d'euros)

Programmes

2011

2012

2013

AE

CP

AE

CP

AE

CP

110 « Aide économique et financière au développement »

2 494,0

1 171,1

627,7

1 191,9

580,6

1 191,7

209 « Solidarité à l'égard des pays en développement »

2 053,9

2 134,9

2 095,9

2 116,2

2 071,2

2 116,3

301 « Migrations et développement solidaire »

30,0

30,0

28,0

28,0

28,0

28,0

Total

4 577,9

3 336,1

2 751,6

3 336,1

2 679,8

3 336,0

Source : PAP de la mission « Aide publique au développement » annexé au PLF pour 2011

Comme observé ci-dessus, l'évolution des AE, sur cette période, tient au cycle de reconstitution des fonds multilatéraux auxquels la France contribue, et dont les opérations sont retracées dans le programme 110 « Aide économique et financière au développement ». Les CP du programme, en revanche, augmenteront de 1,7 % entre 2011 et 2012, et ne devraient connaître qu'une baisse infime en 2013 (par rapport à 2012, - 0,1 %). Cette évolution reflète .

Pour leur part, les crédits du programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » sont assurés par la programmation triennale d'une quasi-stabilité . D'une part, les AE devraient croître de 2 % entre 2011 et 2012, puis enregistrer un reflux d'une ampleur un peu plus faible en 2013 (- 1,8 % par rapport à 2012). D'autre part, les CP devraient connaître une légère baisse en 2012 (- 0,8 % par rapport à 2011), pour rester constants en 2013 (hormis une augmentation de l'ordre de 0,1 million d'euros par rapport à 2012).

Le maintien du niveau des crédits traduit une priorité attachée aux moyens de la politique française d'APD par rapport à d'autres politiques publiques, mais ne suffit pas atteindre les objectifs fixés lors du sommet du G8 à Gleneagles en 2005 30 ( * ) .

Dans le projet annuel de performances de la mission « Aide publique au développement » annexée au projet de loi de finances pour 2012, les prévisions d'évolution pluriannuelle ont été modifiées à la marge par des mesures de changement de périmètre , notamment des transferts d'emplois détaillés plus haut.

Ainsi, le plafond des crédits de paiement de la mission fixé par la loi pluriannuelle de programmation des finances publiques (LPFP) a été réévalué à 3,309 milliards d'euros en LFI 2011 (au lieu de 3,336 milliards d'euros, soit une révision à la baisse de 0,8 %). Les nouveaux plafonds de CP révisés, en application de la LPFP, s'élèvent à 3,311 milliards d'euros en 2012 et 3,309 milliards d'euros en 2013. Les plafonds des AE selon la LPFP sont, quant à eux, révisés à 4,550 milliards d'euros en 2011 (au lieu de 4,578 milliards d'euros), 2,726 milliards d'euros en 2012 (au lieu de 2,752 milliards d'euros) et 2,653 milliards d'euros en 2013 (au lieu de 2,680 milliards d'euros).

A périmètre constant, les plafonds de la mission « Aide publique au développement » figurant au présent PLF sont pratiquement identiques à ceux révisés de la LPFP : 2,722 milliards d'euros en AE (au lieu de 2,724 milliards d'euros dans la LPFP) et 3,309 milliards d'euros en CP (au lieu de 3,311 milliards d'euros en LPFP).

B. DES DÉPENSES FISCALES QUASIMENT NULLES

1. Le compte épargne co-développement et le livret d'épargne pour le co-développement : deux dispositifs abrogés

Eu égard à l'importance des transferts de fonds effectués par les étrangers résidant en France (environ huit milliards d'euros, soit près de 3 % du montant global de transferts des migrants dans le monde 31 ( * ) ), le législateur avait institué deux produits d'épargne réglementés visant à orienter l'épargne des étrangers vers le financement d'investissements dans les pays en développement , et concourant ainsi à l'essor économique de ces derniers.

Ces produits, partie prenante de la politique française de « co-développement », n'ont toutefois pas connu le succès escompté, et les dispositions législatives les concernant ont été abrogées par l'article 107 de la loi de finances initiale pour 2011, adopté sur l'initiative de notre collègue Philippe Marini, alors rapporteur général.

Le premier de ces produits, le « compte épargne co-développement » (CEC), avait été créé par la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et codifié à l'article L. 221-33 du code monétaire et financier. Suivant cet article, le CEC était destiné à recevoir l' épargne d'étrangers ayant la nationalité d'un pays en voie de développement figurant sur une liste de pays établie par arrêté conjoint des ministres chargés des affaires étrangères, de l'intérieur, de l'économie et du budget, et titulaires d'une carte de séjour permettant l'exercice d'une activité professionnelle, afin de financer certains investissements dans leur pays d'origine .

En application des dispositions de l'article 199 quinvicies du code général des impôts, le compte épargne co-développement ouvrait droit à une réduction d'impôt sur le revenu à hauteur de 40 % des sommes versées dans l'année, retenues dans la limite annuelle de 25 % du revenu net global du contribuable et de 20 000 euros. Cet avantage fiscal, toutefois, se trouvait expressément limité aux sommes versées entre le 1 er janvier 2009 et le 31 décembre 2011.

Le second produit d'épargne, le « livret d'épargne pour le co-développement » (LEC), avait été créé par la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile et se trouvait codifié à l'article L. 221-34 du code monétaire et financier. En vertu de ce texte, le LEC était destiné à recevoir l' épargne d'étrangers majeurs ayant la nationalité d'un pays en voie de développement figurant sur la liste de pays, précitée, établie pour la mise en oeuvre du CEC, titulaires d'un titre de séjour d'une durée supérieure ou égale à un an et fiscalement domiciliés en France. Les sommes épargnées devaient financer des opérations d'investissement dans les pays signataires d'un accord avec la France prévoyant la distribution de ce livret. En pratique, une clause pouvait être insérée à cet effet dans les « accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire » que conclut notre pays.

Les produits d'un compte épargne co-développement ou d'un livret d'épargne pour le co-développement bénéficiaient du prélèvement libératoire au taux réduit de 5 % prévu pour l'ensemble des mécanismes d'épargne dits « solidaires », contre un taux normal de 18 %, par le 10° du paragraphe III bis de l'article 125 A du code général des impôts.

Le CEC et le LEC pouvaient être proposés par tout établissement de crédit autorisé à recevoir des dépôts qui s'engageait, par convention avec l'Etat, à respecter les règles précitées. Ils étaient rémunérés par un taux librement fixé entre l'établissement et l'épargnant.

Lors de l'abrogation de ces dispositifs en 2010, ceux-ci n'avaient rencontré qu'un très faible écho .

S'agissant du CEC , seules deux conventions avaient été signées par l'Etat, l'une avec le groupe des Caisses d'épargne, en septembre 2007, l'autre avec l'Union tunisienne des banques en novembre 2007. En outre, en pratique, seule l'Union tunisienne des banques distribuait ce produit. Seulement 31 CEC étaient souscrits au 31 juillet 2010, selon les informations communiquées l'an dernier à vos rapporteurs spéciaux. Le montant de l'encours correspondant était de 261 000 euros.

E n ce qui concerne le LEC, aucune banque n'avait conclu de convention avec l'Etat et c e produit n'était donc pas distribué.

2. Des dépenses fiscales évaluées comme pratiquement nulles mais dont l'évaluation appelle des éclaircissements

Le compte épargne co-développement ayant été souscrit (à la différence du livret d'épargne pour le co-développement), les dépenses fiscales correspondantes continuent d'être retracées dans le PAP annexé au présent PLF :

- pour la réduction d'impôt visée à l'article 199 quinvicies du code général des impôts, dans la présentation du programme 301 « Développement solidaire et migrations » ;

- pour le prélèvement libératoire à taux réduit sur les produits de placement, dans les dépenses fiscales retracées au programme 209 « Aide économique et financière au développement ».

Comme les années antérieures, ces dépenses fiscales sont présentées comme ayant un coût inférieur à 500 000 euros. On observera cependant que le nombre de bénéficiaires en 2010 selon le Gouvernement - soit 625 ménages pour la réduction d'impôt, et 450 ménages seulement pour le prélèvement libératoire à taux réduit - n'est pas cohérent avec les seules 31 souscriptions d'un CEC à la date du 31 juillet 2010 par l'Union tunisienne des banques.

Par ailleurs, une instruction fiscale devant préciser les conditions d'extinction du CEC était en cours de préparation en juillet 2011, selon les informations transmises par le Gouvernement à notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, dans un rapport d'information 32 ( * ) sur l'application des mesures fiscales du PLF 2011.

En séance publique, vos rapporteurs spéciaux demanderont des précisions au Gouvernement sur le nombre réel de souscriptions d'un CEC et l'état d'avancement de l'instruction fiscale .


* 30 Cf. supra , I A 1(b)

* 31 Ces transferts sont estimés par la Banque mondiale à 325 milliards de dollars en 2010, soit plus de deux fois et demie le montant total de l'APD versée par les Etats membres du CAD de l'OCDE (128,7 milliards de dollars en 2010 ; cf . supra , I, A).

* 32 Assemblée nationale, rapport d'information n° 3 631 (XIII ème législature).