MM. Michel BOUVARD et Thierry CARCENAC

III. LE PROGRAMME 302 : FACILITATION ET SÉCURISATION DES ÉCHANGES

1. La douane : une administration qui fait face aux évolutions de ses métiers

Le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » porte les crédits de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) . Le responsable du programme est la directrice générale des douanes et droits indirects. Administration régulatrice du commerce international, la douane mène aujourd'hui une triple mission :

- une mission de perception de la fiscalité : la douane est chargée du recouvrement de la TVA à l'importation, des droits de douane reversés à l'Union européenne, des accises sur les tabacs, alcools et produits pétroliers ;

- une mission de facilitation du commerce et de soutien à la compétitivité : la douane offre aux entreprises des procédures simplifiées et accélérées aux entreprises, notamment grâce au statut de l'opérateur économique agréé (OEA), produit des statistiques sur le commerce international et fait respecter les règles de l'organisation mondiale du commerce (OMC) et de l'Union européenne ;

- une mission de sécurisation des échanges : la douane lutte contre la fraude et les trafics de marchandises contrefaites, prohibées (stupéfiants, armes, espèces animales menacées d'extinction etc.) ou réglementées (produits dangereux ou polluants, oeuvres d'arts, matériel militaire etc.), et assure la protection de l'environnement.

Le projet stratégique « DOUANE 2018 » vise à poursuivre la modernisation de la douane, notamment par la simplification des procédures, la dématérialisation des outils, et le renforcement des moyens de lutte contre la fraude. Parmi les projets menés en 2016, on peut notamment citer :

- la mise en oeuvre du projet PNR ( Passenger Name Record ), système de traitement des données relatives aux passagers aériens ;

- la création d'un service national d'analyse de risque et de ciblage (SARC) pour effectuer une analyse des risques portant sur l'avant-dédouanement, le dédouanement et la fiscalité, notamment fondée sur des techniques de data mining ;

- la mise en place d'ici 2018 du service grands comptes (SCG) , destiné à environ 62 grands groupes (soit 307 sociétés), et qui repose sur un portail informatique appelé FIDEL (fiche d'identité des entreprises en ligne) ;

- la mise en place du guichet unique de dédouanement (GUN) , plateforme automatisée rassemblant quinze administrations différentes chargées de délivrer les autorisations d'importation et d'exportation ;

- le développement du téléservice de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), ou encore du télérèglement de la TVA, des droits de douane et de la taxe intérieure sur la consommation de produits pétroliers (TICPE).

Par ailleurs, l'année 2016 sera marquée par l'entrée en vigueur du nouveau code des douanes de l'Union (CDU), qui prévoit notamment un statut d'opérateur économique agréé (OEA) destiné à fluidifier les échanges. Celui-ci permet notamment aux entreprises de centraliser l'ensemble de leurs déclarations en douane dans un seul bureau, non lié aux flux physiques, ou de réaliser certaines opérations douanières sous forme d'« auto-évaluation » (détermination des droits exigibles, contrôles de conformité etc.). À cet égard, si vos rapporteurs spéciaux approuvent naturellement l'objectif de facilitation des échanges, ils s'inquiètent toutefois d'une course au « moins-disant douanier » entre les différents pays européens , où la quantité et la qualité des contrôles seraient sacrifiées sur l'autel de la compétitivité des plateformes logistiques - et ceci dans un contexte de baisse des moyens humains et matériels de la DGDDI.

Évolution par action des crédits du programme 302
« Facilitation et sécurisation des échanges »

(en euros)

Autorisations d'engagement

LFI 2015

PLF 2016

Variation 2016/2015

01 - Surveillance douanière des flux de personnes et de marchandises et lutte contre la grande fraude douanière

451 691 965

464 092 130

12 400 165

2,75%

03 - Préservation de la sécurité et de la sûreté de l'espace national et européen

178 872 557

178 864 884

-7 673

0,00%

04 - Promotion des échanges internationaux et qualité du dédouanement

249 782 414

256 605 561

6 823 147

2,73%

05 - Fiscalité douanière, énergétique et environnementale

391 624 106

331 303 181

-60 320 925

-15,40%

06 - Soutien des services opérationnels

297 936 668

323 597 994

25 661 326

8,61%

Total pour le programme 302

1 569 907 710

1 554 463 750

-15 443 960

-0,98%

Crédits de paiement

LFI 2015

PLF 2016

Variation 2016/2015

01 - Surveillance douanière des flux de personnes et de marchandises et lutte contre la grande fraude douanière

452 121 305

454 768 754

2 647 449

0,59%

03 - Préservation de la sécurité et de la sûreté de l'espace national et européen

182 527 271

176 536 082

-5 991 189

-3,28%

04 - Promotion des échanges internationaux et qualité du dédouanement

251 145 656

248 183 579

-2 962 077

-1,18%

05 - Fiscalité douanière, énergétique et environnementale

392 093 725

327 732 304

-64 361 421

-16,41%

06 - Soutien des services opérationnels

304 703 744

305 141 732

437 988

0,14%

Total pour le programme 302

1 582 591 701

1 512 362 451

-70 229 250

-4,44%

Source : projet de loi de finances pour 2016.

Évolution par titre des crédits du programme 302
« Facilitation et sécurisation des échanges »

(en euros)

Autorisations d'engagement

LFI 2015

PLF 2016

Variation 2016/2015

Titre 2 : personnel

1 131 668 032

1 140 238 997

8 570 965

0,76%

Autres dépenses :

438 239 678

414 224 753

-24 014 925

-5,48%

Titre 3 : fonctionnement

163 173 616

201 743 984

38 570 368

23,64%

Titre 5 : investissement

40 036 249

40 900 956

864 707

2,16%

Titre 6 : intervention

235 029 813

171 579 813

-63 450 000

-27,00%

Total programme 302

1 569 907 710

1 554 463 750

-15 443 960

-0,98%

Crédits de paiement

LFI 2015

PLF 2016

Variation 2016/2015

Titre 2 : personnel

1 131 668 032

1 140 238 997

8 570 965

0,76%

Autres dépenses :

450 923 669

372 123 454

-78 800 215

-17,48%

Titre 3 : fonctionnement

163 925 328

161 069 028

-2 856 300

-1,74%

Titre 5 : investissement

51 968 528

39 474 613

-12 493 915

-24,04%

Titre 6 : intervention

235 029 813

171 579 813

-63 450 000

-27,00%

Total programme 302

1 582 591 701

1 512 362 451

-70 229 250

-4,44%

Source : projet de loi de finances pour 2016.

2. Les dépenses de personnel : l'impératif de lutte contre le terrorisme et les bénéfices encore lointains de la réorganisation du réseau territorial

Les crédits demandés au titre du programme 302 pour 2016 s'élèvent à environ 1,5 milliard d'euros, en baisse de 4,4 % (70 millions d'euros) en CP mais seulement de 1 % en AE (15 millions d'euros) . Cette baisse générale, qui représente 22 % de l'effort consenti par la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », soit 70 millions d'euros sur 317 millions d'euros, est toutefois très hétérogène en fonction des actions et des titres du programme.

Tout d'abord, il faut souligner que les crédits de titre 2 de la DGDDI ne connaissent aucune baisse en 2016 , ce qui contraste avec la situation de la DGFiP. Ceux-ci affichent ainsi une hausse de 0,8 %, soit 8,6 millions d'euros, pour s'établir au total à 1,1 milliard d'euros. Certes, des efforts sont réalisés en termes de réduction d'effectifs, puisque 215 ETP devraient être supprimés , le plafond d'emplois passant de 16 396 ETPT en 2015 à 16 206 ETPT en 2016 - si toutefois les départs en retraite ne sont pas sous-estimés , comme cela est le cas depuis plusieurs années, en dépit des remarques de vos rapporteurs spéciaux. Mais les mesures catégorielles (3,1 millions d'euros), le glissement vieillesse-technicité (GVT) positif (0,8 million d'euros) et surtout divers rebasages de dépenses au profil atypique 20 ( * ) (10,5 millions d'euros) expliquent l'essentiel de la hausse.

Toutefois, à la suite des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, le Président de la République a annoncé, devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles le 16 novembre 2015, la création de 1 000 postes supplémentaires à la DGDDI, afin de renforcer les moyens de lutte contre le terrorisme 21 ( * ) . Ces créations pourraient impliquer un surcoût d'environ 70 millions d'euros au titre de l'exercice 2016.

Vos rapporteurs spéciaux approuvent pleinement cette décision . De fait, les suppressions de postes exposées plus haut sont prévues dans une perspective de modernisation et de rationalisation de la DGDDI, et sont cohérentes avec les gains d'efficience attendus. Elles doivent être distinguées des créations de postes exceptionnelles dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, qui sont plus que jamais nécessaires .

Par ailleurs, la rationalisation du réseau territorial de la DGDDI doit accompagner l'évolution des ressources humaines . Celle-ci inclut notamment : le regroupement de la fiscalité routière à Metz et de la fiscalité écologique à Nice ; le rassemblement des centres de dédouanement induit par le nouveau code des douanes de l'Union (CDU) ; le regroupement du réseau comptable, avec un objectif de douze recettes interrégionales ; la fermeture des petits bureaux de douane trop fragiles au profit de bureaux multifonctions (dédouanement, déclaration, gestion des tabacs etc.). À cet égard, vos rapporteurs spéciaux saluent l'accord intervenu en mars 2015 avec plusieurs organisations syndicales, qui devrait permettre d'accompagner les agents touchés par la réorganisation du réseau. En revanche, la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi Notre) ne devrait pas entraîner de conséquences majeures pour le réseau de la DGDDI, qui est d'ores et déjà interrégional.

3. Les dépenses de fonctionnement : une hausse problématique

S'agissant ensuite des dépenses de fonctionnement, on note que celles-ci sont en légère baisse de 1,7 % (2,9 millions d'euros) en CP, mais en forte hausse de 24 % (39 millions d'euros) en AE , pour s'établir respectivement à 161 millions d'euros et 202 millions d'euros. Les éléments fournis à vos rapporteurs spéciaux ne permettent pas d'identifier précisément les raisons de cette différence entre AE et CP. Toutefois, la nette hausse des AE concerne la totalité des actions du programme, ce qui suggère que les dépenses de fonctionnement courant pourraient être amenées à augmenter au cours des prochaines années . Ceci est particulièrement notable pour l'action 01 « Surveillance douanière des flux de personnes et de marchandises et lutte contre la grande fraude douanière », où les dépenses relatives au plateau technique de base (loyers, fluides, nettoyage, entretien etc.) augmentent à elles seules de 10 millions d'euros en AE. Si de tels écarts entre AE et CP sont justifiées pour les investissements lourds (cf. infra ), elles apparaissent plus difficilement explicables s'agissant de dépenses courantes .

D'après les informations transmises à vos rapporteurs spéciaux, la hausse des dépenses de fonctionnement est notamment due au vieillissement du part aéronaval , dans l'attente du renouvellement complet des moyens opérationnels 22 ( * ) .

En tout état de cause, vos rapporteurs spéciaux estiment que la technique du « rabot » sur les dépenses de fonctionnement montre aujourd'hui ses limites : seules les réformes structurelles de la douane, notamment grâce aux technologies numériques , sont à même de permettre une véritable modernisation.

4. La préservation des investissements informatiques : une priorité justifiée de la DGDDI

La question des investissements de la DGDDI mérite un développement particulier . Les crédits de titre 5 affichent une forte baisse de 24 % (12 millions d'euros) en CP, pour s'établir à 39 millions d'euros au titre de l'année 2016. Cette baisse des CP tient à l'achèvement, l'année dernière, d'un cycle d'investissement lié au renouvellement des moyens opérationnels de la douane : aéronefs « multi-missions » BEECH Aircraft 350 ER, navires patrouilleurs en Méditerranée, dans l'Atlantique et dans la Manche etc. De même, l'année 2015 fut celle de l'achèvement du projet PNR ( Passenger Name Record ).

En revanche, les investissements futurs sont relativement préservés, ce dont se félicitent vos rapporteurs spéciaux qui avaient précédemment insisté sur cette nécessité . Les crédits de titre 5 affichent en effet une hausse de 2,2 % en AE (865 000 euros), pour s'établir à 41 millions d'euros. Dans le détail, les autorisations d'engagement pour de nouveaux investissement sont en baisse sur la plupart des actions du programme, mais en hausse de plus de 7 millions d'euros sur l'action 06 « Soutien » , où elles représentent au total 16 millions d'euros en 2016. Ceci correspond surtout à la modernisation des moyens informatiques de la DGDDI : dotation des brigades en terminaux connectés reliés à l'infrastructure nationale partageable des transmissions (INPT), amélioration de différentes applications liés aux télé-procédures, aux ressources humaines et au système décisionnel de la douane, modernisation du centre informatique douanier (CID) d'Osny (Val d'Oise), etc.

S'agissant du CID, vos rapporteurs spéciaux saluent la mise en place d'une offre d'hébergement informatique à destination de plusieurs ministères 23 ( * ) , qui constitue une initiative bienvenue de valorisation des investissements de la DGDDI et dont pourraient s'inspirer d'autres ministères. Les modalités de financement et de traitement comptable et budgétaire de cette opération doivent cependant être précisées, conformément aux principes de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), et en lien avec la direction interministérielle du numérique, des systèmes d'informations et de communication (Dinsic), placée auprès du Premier ministre. De fait, à ce jour, la DGDDI éprouve des difficultés à identifier le coût précis de la mise à disposition de son infrastructure à d'autres administrations ; des travaux sont en cours pour établir des clés forfaitaires pour certaines dépenses (maintenance, électricité etc.).

Par ailleurs, l'usage croissant par la douane des méthodes de data mining , notamment dans le cadre du futur service national d'analyse de risque et de ciblage (SARC), requiert le recrutement de compétences spécifiques, souvent difficiles à trouver et donc relativement coûteuses . À cet égard, il serait souhaitable que la douane, et plus généralement l'administration, puisse être en capacité d'offrir, sous certaines conditions, une rémunération attractive aux meilleurs profils. Alors que des défis majeurs et des outils prometteurs sont attendus, l'État ne doit pas prendre de retard en la matière par rapport aux entreprises privées et à ses partenaires.

5. La baisse des dépenses d'intervention : une mesure comptable

S'agissant enfin des dépenses d'intervention, celles-ci affichent une baisse très importante de 27 %, soit 63 millions d'euros , qui représentent en fait l'essentiel des 70 millions d'euros d'économies du programme 302. Cette évolution correspond à la diminution des aides versées aux 26 000 buralistes , notamment celles qui sont prévues par le troisième contrat d'avenir signé avec l'État le 23 septembre 2011 pour la période 2012-2016. Ces aides sont retracées au sein de l'action 05 « Fiscalité douanière, énergétique et environnementale », même si vos rapporteurs spéciaux estiment qu'elles auraient plutôt vocation à être rattachées à la mission « Économie ». Répondant à des finalités très diversifiées, les aides aux buralistes incluent la remise compensatoire, la remise additionnelle, la prime de service public de proximité (PSPP), les indemnités de fin d'activité (IFA), la subvention sécurité ou encore le complément de remise. Le total des aides aux buralistes est de 170 millions d'euros en 2015, contre 225 millions d'euros en 2015 et 247 millions d'euros en 2014.

Sans cette diminution, qui ne tient en rien à la modernisation de la DGDDI, les économies affichées par le programme 302 seraient largement moins visibles .

6. La reconversion du centre de Metz créé pour l'écotaxe

Dans la perspective de la mise en oeuvre de l'écotaxe poids-lourds 24 ( * ) , la douane avait installé à Metz un service dédié, le service taxe poids lourds (STPL), composé de 130 agents et dont le coût était évalué à 23 millions d'euros en régime de croisière . Dépositaire du pouvoir régalien de l'État, c'est ce service qui, formellement, devait constater les manquements et les infractions, et proposer les éventuelles transactions, la société Ecomouv' étant quant à elle chargée de l'essentiel des missions de conception, de maintenance et surtout de recouvrement dans le cadre d'un partenariat public-privé 25 ( * ) .

Suite à la « suspension sine die » de l'écotaxe annoncée par le Gouvernement le 9 octobre 2014, vos rapporteurs spéciaux s'étaient inquiétés des perspectives incertaines du STPL et des agents rattachées à ce service. Plusieurs hypothèses avaient alors été évoquées, puis écartées : installation du futur service national d'analyse de risque et de ciblage (SARC), réaffectation des douaniers au contrôle des entreprises ayant recours aux travailleurs détachés 26 ( * ) etc. Finalement, vos rapporteurs spéciaux se félicitent de la décision de centraliser à Metz les différentes structures chargées de la fiscalité des transports , avec la création du service national douanier de la fiscalité routière (SNDFR). Celui-ci sera chargé de la perception de la taxe spéciale sur les véhicules routiers (TSVR) et des demandes de remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Une rationalisation plus poussée pourrait toutefois être entreprise , dans le cadre de la réorganisation du réseau territorial de la DGDDI. De plus, cette centralisation aurait pu s'accompagner d'efforts supplémentaires en matière de réduction d'effectifs , pour « compenser » la création des 130 postes destinés à la gestion de l'écotaxe.

Toutes choses égales par ailleurs, votre rapporteur spécial Michel Bouvard regrette que l'écotaxe ait été abandonnée sans que le Parlement ait eu à se prononcer sur les conséquences, notamment financières, de cette décision . Votre rapporteur spécial pointe le manque de responsabilité collective des élus, qui ont approuvé la création de l'écotaxe à une large majorité, et ont été bien peu à la défendre in fine .

7. L'essor du commerce en ligne : l'occasion d'une modernisation profonde des missions de la douane

La DGDDI est chargée de la collecte des droits de douanes et de la TVA à l'importation. À ce titre, elle est compétente pour contrôler et taxer les envois en provenance de pays extérieurs à l'Union européenne, et notamment les envois issus du e-commerce, qui sont souvent expédiés par fret express ou postal . Or le e-commerce est aujourd'hui en pleine explosion : en 2014, son volume atteint 424 milliards d'euros en Europe (+ 14 %), et presque 1 500 milliards d'euros dans le monde (+ 24%).

Alors que le commerce traditionnel implique des flux physiques relativement concentrés aux enjeux élevés (entrepôts, conteneurs etc.), le e-commerce donne lieu à une multitude de petits envois individuels très morcelés, représentant chacun un enjeu financier très faible . Les droits de douane et la TVA à l'importation doivent théoriquement être payés à l'aéroport, sur la seule base de la valeur déclarée du colis, mais la douane n'a évidemment pas les moyens de contrôler les quelques 40 millions d'envois (au moins) qui arrivent chaque année à Roissy . De fait, le montant des droits et taxes redressés à Roissy n'a été que de 1,4 million d'euros en 2014 27 ( * ) . Il faut y ajouter l'effet pervers de la franchise dont bénéficient les « envois à valeur négligeable » (EVN) inférieurs à 22 euros pour la TVA et 150 euros pour les droits de douane, qui constitue une incitation objective à la sous-déclaration.

À cet égard, la proposition d'un prélèvement à la source de la TVA formulée par le groupe de travail de la commission des finances sur le recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique 28 ( * ) , trouve particulièrement à s'appliquer dans le cas des importations . Il suffirait ainsi que le vendeur appose sur le colis expédié un code-barres permettant aux douaniers de savoir que les droits et taxes ont été acquittés lors de la transaction pour celui-ci puisse être dédouané, accélérant ainsi le passage en douane et libérant les douaniers pour des tâches plus essentielles de contrôle ciblées sur les enjeux de trafics (contrefaçons, stupéfiants, produits prohibés etc.). Une telle réforme, qui nécessite une modification du droit de l'Union européenne ou à tout le moins une dérogation, permettrait de considérables gains d'efficience et d'efficacité de la DGDDI . Vos rapporteurs appellent le Gouvernement à considérer celle-ci avec la plus grande attention.


* 20 Rachat des jours placés sur les comptes épargne temps (CET), indemnités de restructuration et de départ volontaire etc.

* 21 Pour mémoire, suite aux attentats de janvier 2015, les réductions de postes au titre de l'année 2016, initialement fixées à 250 ETP, avaient déjà été atténuées de 70 ETP, suite aux annonces du Premier ministre le 22 janvier 2015.

* 22 Source : questionnaire budgétaire.

* 23 Source : audition par vos rapporteurs spéciaux de la directrice générale des douanes et droits indirects, Hélène Crocquevieille, le 29 octobre 2015.

* 24 La taxe nationale sur les véhicules de transport de marchandises a été instaurée par l'article 153 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009. Sur ce sujet, voir l'avis n° 334 (2012-2013) de Marie-Hélène Des Esgaulx, fait au nom de la commission des finances, sur le projet de loi portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports, déposé le 5 février 2013.

* 25 Le consortium Ecomouv' , détenu à 70 % par la société italienne l'Autostrade per l'Italia - le reste étant détenu par Thalès (11 %), la SNCF (10 %), SFR (6 %) et Steria (3 %) - a été désigné le 20 octobre 2011 pour une durée d'environ treize ans.

* 26 Source : Acteurs publics, 27 et 28 octobre 2014.

* 27 Ce chiffre amène à relativiser les résultats de l'indicateur 3.1 du programme 302, qui fait apparaître un indice de « civisme fiscal », c'est-à-dire le ratio entre les créances dues et les créances payées à l'échéance, « supérieur à 99 % »...

* 28 Rapport n° 691 (2014-2015), « Le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source », 17 septembre 2015.