M. Serge Dassault, rapporteur spécial

II. LES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION

A. LE PROGRAMME 114 « APPELS EN GARANTIE DE L'ETAT » : UNE RÉDUCTION DES CRÉDITS DE 80 % EN LIEN AVEC LA RÉORGANISATION DES PROCÉDURES D'ASSURANCE-CRÉDIT

Conformément à l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances, tout nouveau régime de garantie de l'État doit être autorisé par une loi de finances. Les garanties ainsi octroyées constituent des engagements hors bilan retracés en annexe du compte général de l'État.

Elles n'entraînent une dépense budgétaire pour l'État qu'en cas de réalisation du risque garanti . Ces dépenses sont regroupées au sein du programme 114 « Appels en garantie de l'État ».

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit 27,4 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) au titre du programme 114 « Appels en garantie de l'État », soit une très forte diminution de plus de 80 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016, qui prévoyait des crédits à hauteur de 125 millions d'euros.

Cela s'explique par le transfert de la gestion des garanties liées au développement international de l'économie française , qui concentraient 80 % de la dépense et qui étaient jusqu'ici mises en oeuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur (Coface), filiale de Natixis, à Bpifrance Assurance Export, filiale du groupe Bpifrance.

Ce transfert, décidé en loi de finances rectificative pour 2015 12 ( * ) , s'accompagne du passage à un schéma de garantie directe dans lequel Bpifrance Assurance Export gérera les garanties émises non plus seulement pour le compte mais également au nom de l'État.

La maquette budgétaire est réorganisée en conséquence. D'une part, les garanties seront retracées sur un nouveau compte de commerce « Soutien financier au commerce extérieur » , qui reproduit - à l'exception de la ligne « Garantie de taux d'intérêt Natixis » - la présentation de l'action 4 de ce programme . D'autre part, la rémunération de Bpifrance Assurance Export au titre de sa mission est dorénavant retracée sur le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie » .

Le projet annuel de performances indique que « l'essentiel des informations relatives aux procédures de soutien financier au commerce extérieur (encours, flux de garanties octroyées, etc.) resteront présentées dans les documents budgétaires relatifs au présent programme ».

Cela permettra de continuer de disposer d'une vue d'ensemble des garanties accordées par l'État . Votre rapporteur spécial y est donc favorable.

B. LE PROGRAMME 145 « ÉPARGNE » : DES DÉPENSES QUI DEVRAIENT DEMEURER FAIBLES EN RAISON DU BAS NIVEAU DES TAUX D'INTÉRÊT

L'essentiel du programme 145 concerne la dépense de primes d'épargne-logement qui représente 99,5 % du montant du programme .

Le compte épargne-logement (CEL) et le plan d'épargne-logement (PEL) ont pour finalité de permettre aux ménages de se constituer un apport personnel et leur donnent droit à un prêt épargne logement dont les caractéristiques sont fixées lors de l'ouverture du CEL ou du PEL. Les CEL sont avant tout destinés au financement de petites opérations, tandis que les PEL concernent généralement des acquisitions plus importantes.

Ces deux produits financiers permettent d'obtenir, sous certaines conditions, une prime versée par l'État, dont le montant est plafonné et calculé en fonction des intérêts acquis pendant la phase d'épargne .

À l'issue d'un appel d'offre, le Crédit foncier a été désigné le 9 février 2015 comme opérateur de la gestion de ces primes pour le compte de l'État.

L'action 01 du programme 145 regroupe les crédits consacrés au financement de ces primes , soit 215,53 millions d'euros en 2017 (AE=CP) contre 329,19 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2015, ce qui représente une diminution marquée de près de 35 % .

La baisse tendancielle depuis plusieurs années de la dépense des primes d'épargne-logement peut être imputée à plusieurs facteurs tels que l'évolution du marché de l'immobilier, les taux d'intérêt des prêts PEL qui demeurent supérieurs aux taux des prêts libres ou bien encore l'impact de la réforme de l'épargne-logement de mars 2011 qui impose la souscription d'un prêt d'épargne-logement destiné au financement d'une résidence principale de 5 000 euros minimum pour bénéficier du versement de la prime.

Afin de les rendre plus attractifs, les PEL ouverts depuis le 1 er février 2015 voient désormais leur taux de rémunération fixé à 2 %.

Parallèlement, les frais de gestion et les frais financiers des établissements bancaires sont plafonnés à 120 points de base au-dessus du taux de rémunération du plan, ce qui permet actuellement une distribution des prêts PEL à des taux de 3,2 % contre 4,2 % pour les PEL ouverts entre août 2003 et janvier 2015.

En outre, en 2016 sont intervenues deux nouvelles modifications des plans d'épargne-logement : le taux de rémunération des plans a été fixé à 1,50 % à compter du 1 er février 2016 puis, à compter du 1 er août 2016, le taux a été fixé à 1 %. Ces deux modifications visent à renforcer l'attractivité des prêts PEL et à améliorer l'accès à la propriété à un horizon de quatre ans - soit au terme de la phase minimale d'épargne des nouveaux plans. En effet, le taux de prêts d'épargne-logement ouverts à compter du 1 er février 2016 est de 2,70 %. Pour les plans ouverts à partir du 1 er août 2016, il s'élève à 2,20 %.

L'action 02, pour sa part, retrace d'une part les dépenses d'aide de l'État au secteur aidé , dispositif ancien de prêts à l'accession sociale distribués et gérés par le Crédit Foncier et d'autre part le remboursement des frais de la Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS) pour le contrôle des prêts conventionnés.

Cette action finance principalement des bonifications d'intérêt et des commissions de gestion de prêts à l'accession à la propriété accordés aux personnes physiques dans le cadre de dispositifs aujourd'hui fermés et en extinction, ainsi que des frais de gestion et de contrôle des prêts conventionnés.

Le montant des crédits portés par cette action pour 2016 est de 1,5 million d'euros contre 1,8 million d'euros en loi de finances initiale pour 2016 (soit une baisse de 18 %).

C. LE PROGRAMME 344 « FONDS DE SOUTIEN RELATIF AUX PRÊTS ET CONTRATS FINANCIERS STRUCTURÉS À RISQUE » : UN ABONDEMENT EN CRÉDITS DE PAIEMENT CONFORME AUX ENGAGEMENTS DE L'ÉTAT

À la suite de la crise financière, il s'est avéré que certaines collectivités territoriales avaient souscrit des emprunts risqués dont les charges d'intérêt seraient très importantes (plusieurs fois le montant du capital) et qui fragilisaient les finances locales.

Dans le but de faciliter le remboursement de ces emprunts par anticipation, le fonds de soutien aux collectivités territoriales et à leurs groupements ayant souscrit des emprunts structurés et des instruments financiers à risque a été créé par l'article 92 de la loi de finances pour 2014 13 ( * ) .

D'abord rattaché à un programme de la mission « Économie », ce fonds a été intégré dans le périmètre de la mission « Engagements financiers de l'État » à partir de 2015 par la création du programme 334 qui regroupe les seuls crédits destinés au fonds.

Le financement du fonds est partiellement assuré par le secteur bancaire à travers deux mécanismes : d'une part, le versement de 11,5 millions d'euros 14 ( * ) par an pendant quinze ans par Dexia et la Société de financement local (SFIL) à un fonds de concours abondant les crédits du programme 334, d'autre part, l'acquittement d'une taxe spécifique , prévue à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts et qui reprend les principales caractéristiques de la taxe pour risque systémique.

La taxe pour le financement du fonds de soutien aux collectivités territoriales

Le fonds de soutien devait initialement être financé à hauteur de 50 millions d'euros par une fraction de la taxe pour risque systémique, dont le taux avait été relevé par la loi de finances pour 2014 15 ( * ) . Cette taxe a toutefois été mise en extinction à partir de 2015 16 ( * ) afin de tenir compte de la mise en place d'un Fonds de résolution unique (FRU) au niveau européen.

A donc été créée, par la loi de finances rectificative pour 2014 17 ( * ) , à l'article 235 ter ZE bis du code général des impôts, une nouvelle taxe, pesant sur le secteur bancaire, au profit du fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés dits « emprunts toxiques » , due jusqu'en 2028 et recouvrée à l'appui de l'annexe à la déclaration de TVA. Son taux était fixé à 0,026 % en 2015, afin d'assurer un rendement de 40 millions d'euros en 2015 et 2016 et 50 millions d'euros par an à partir de 2017.

Il a été relevé par la loi de finances pour 2016 18 ( * ) à 0,0642 % pour les années 2016 à 2025 et à 0,0505 % pour les années 2026 à 2028. Par ailleurs, une fraction du produit de la taxe est affectée, à hauteur de 28 millions d'euros par an, à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés pour les années 2016 à 2025.

En 2015, 34,2 millions d'euros ont été recouvrés . Au total, le secteur bancaire a donc participé à hauteur de 45,7 millions d'euros au financement du fonds de soutien en 2015.

Il faut noter que le produit de la taxe n'est pas affecté au fonds de soutien stricto sensu dans la mesure où le montant recouvré, hors fraction affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie, est versé au budget général. Le lien entre cette taxe et le fonds de soutien relève ainsi de l'intention du législateur et non d'une disposition inscrite dans le droit.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données transmises par le ministère du budget)

La mise en oeuvre du fonds a tout d'abord connu un certain retard au démarrage , la doctrine d'emploi du fonds n'ayant été validée par le comité national d'orientation et de suivi (CNOS) que le 13 novembre 2014 19 ( * ) .

En outre, la décision prise par la Banque nationale suisse de laisser fluctuer sa monnaie par rapport à l'euro à compter du 15 janvier 2015 a conduit à un brusque changement du taux de change , passé de 1 euro pour 1,2 franc CHF à 1 euro pour 1 franc CHF. Les emprunts indexés sur le taux de change entre l'euro et le franc CHF ont vu les coûts d'indemnités de remboursement anticipé augmenter . L'État a donc décidé de renforcer la capacité d'intervention du fonds de soutien. Les conditions d'octroi des aides 20 ( * ) ont également été revues en 2015 afin de prendre en charge la quasi-totalité des surcoûts.

Les autorisations d'engagement avaient été engagées dans leur quasi-totalité à la fin de l'année 2015 (2,9 milliards d'euros), moins de 30 millions d'euros de crédits de paiement avaient été effectivement décaissés. Les crédits n'ont pas non plus été consommés en 2016 et 204,6 millions d'euros devraient être reportés sur l'exercice 2017 .

183,3 millions d'euros sont ouverts en crédits de paiement pour 2017, soit un montant conforme aux engagements de l'État .

Au total, le fonds disposera de près de 400 millions d'euros de crédits de paiement en 2017 .

D. LE PROGRAMME 168 « MAJORATION DE RENTES » : UN DISPOSITIF EN EXCTINCTION

Les crédits du programme 168 pour 2016 sont consacrés au financement du dispositif des majorations légales de rentes viagères. Les montants versés sont fonction du nombre, de l'âge des crédirentiers et de leurs conditions de ressources ainsi que de la date de souscription du contrat et du montant des arrérages versés.

Ce dispositif ayant été fermé, les droits acquis disparaissent avec la diminution progressive de la population des crédirentiers .

En 2017, les crédits devraient s'établir à 145,6 millions d'euros, soit une baisse de près de 4 % par rapport aux 151 millions d'euros de crédits votés en loi de finances initiale pour 2016.

Comme indiqué en réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial, « au regard de l'exécution de dépenses 2016 qui s'établirait à près de 149,5 millions d'euros, les provisions actualisées (au taux de l'OATi€ 2024) pour charges à payer futures représentent un montant global de l'ordre de 1,86 milliard d'euros jusqu'à l'extinction du programme à l'horizon 2050 , sur la base des tables de mortalité en vigueur ».

E. LE PROGRAMME 336 « DOTATION EN CAPITAL DU MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILITÉ » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2017

Le programme 336 « Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité » retrace l'engagement de la dotation en capital apportée par la France , à la suite de l'adoption de la loi n° 2012-323 du 7 mars 2012 autorisant la ratification du traité instituant le Mécanisme européen de stabilité (MES).

Le MES a pris le relais du Fonds européen de stabilité financière (FESF) , mis en place en juin 2010 pour trois ans et ayant une capacité d'intervention financière de 440 milliards d'euros. Le MES ne repose pas seulement sur des garanties des États, mais sur un capital effectivement constitué.

La souscription de la France au capital MES s'est élevée au total à 16,3 milliards d'euros et a été versée en cinq tranches de 3,3 milliards d'euros chacune. La dernière tranche a été versée le 29 avril 2014.

Le présent projet de loi de finances ne prévoit pas de dépenses pour l'exercice 2017 .

F. LE PROGRAMME 338 « AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA BANQUE EUROPÉENNE D'INVESTISSEMENT » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2017

La Banque européenne d'investissement (BEI) est la banque de prêts à long terme de l'Union européenne . Elle a été créée en 1958 par le Traité de Rome.

Aucune augmentation de capital n'étant envisagée à ce jour, il n'est pas inscrit de crédits dans le projet de loi de finances pour 2017 .


* 12 Article 103 de la loi n° 1786-2015 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 13 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 14 Dont 1,5 million d'euros pour Dexia et 10 millions d'euros pour la SFIL.

* 15 Article 35 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 16 Article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 17 Article 26 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 18 Article 31 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

* 19 Le décret n° 2014-444 fixant les modalités d'intervention du fonds de soutien a été publié le 29 avril 2014, son arrêté d'application le 4 novembre 2014. Doit aussi être signalé le décret n° 2014-810 du 16 juillet 2014 relatif au service à compétence nationale dénommé « Service de pilotage du dispositif de sortie des emprunts à risque ».

* 20 Rehaussement du taux maximal d'aide à 75 % du montant des indemnités de remboursement anticipé par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre), limitation des possibilités de refinancement des emprunts à risque par le décret n° 2015-619 du 4 juin 2014, barèmes différenciés selon la nature juridique du bénéficiaire par l'arrêté du 22 juillet 2015 et adoption d'une nouvelle doctrine d'emploi du fonds par le CNOS le 2 avril 2015.