M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. À périmètre constant, les crédits de paiement (CP) et les autorisations d'engagement (AE) demandés sont en hausse de respectivement 5,80 % et 6,19 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2016.

2. L'année 2017 est marquée par l'impact du « Pacte de sécurité » sur le budget de la sécurité civile, qui va contribuer à renforcer les moyens de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. Ainsi, hors dépenses du pacte de sécurité, le budget 2017 est en baisse de 3,1 % en AE et 1,3 % en CP.

3. Les crédits du programme ne représentent qu'une partie des moyens consacrés à la sécurité civile, même s'ils en constituent la principale partie (49,02 % en AE et 54,82 % en CP) devant les programmes 159 « Météorologie » et 181 « Prévention des risques » de la mission « Écologie ».

4. Le budget des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) s'élève à 4,41 milliards d'euros pour l'année 2015 (+ 1,11 %), soit dix fois les crédits du programme 161 « Sécurité civile ».

5. Les crédits prévus pour 2017 excèdent de 32 millions d'euros en AE et en CP le plafond de la loi de programmation des finances publiques. Cet écart s'explique par les crédits prévus pour le pacte de sécurité en 2017 31,75 millions d'euros (en AE et en CP) dont 28,38 millions d'euros en titre 5 et 3,37 millions d'euros en titre 3 et le nouveau marché de maintien en conditions opérationnelle des avions.

6. L'année 2017 se distingue par une augmentation des dépenses de personnel assortie d'une augmentation du nombre d'ETPT. Ainsi, le plafond d'emplois de la sécurité civile en 2017 est fixé à 2 450 ETPT et le schéma d'emplois à réaliser au cours de l'année est de + 20 ETPT, les dépenses de personnel augmentant de 6,09 %. Votre rapporteur spécial se montrera vigilant à ce que ces créations de postes de démineurs et de géomaticiens n'entraînent pas, à terme, une éviction des dépenses d'investissement.

7. Les crédits d'investissement augmentent fortement par rapport à l'année dernière, en AE (40,04 %) comme en CP (28,54 %). Ils sont principalement dédiés au transfert de la base d'avions de la sécurité civile (BASC) sur la plate-forme de l'aéroport de Nîmes-Garons, à proximité du groupement d'hélicoptères (8,96 millions d'euros en AE et 8,37 millions d'euros en CP) et au remplacement des avions Tracker (25 millions d'euros en AE et en CP).

8. Dans un contexte de stagnation de leurs budgets, les SDIS font face à une augmentation des sollicitations (+ 3,7 % d'interventions entre 2014 et 2015), notamment en matière de secours à personne, de nature à remettre en cause la pérennité du système. Cette pérennité n'apparaît possible que si des mesures visant à augmenter l'efficience des SDIS sont prises ainsi que si le volontariat, colonne vertébrale de notre système de secours, se voit redynamisé.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES CRÉDITS DU PROGRAMME

A. UNE HAUSSE DES CRÉDITS RÉSULTANT PRINCIPALEMENT DU PACTE DE SÉCURITÉ

1. Une hausse des crédits en AE et en CP

À périmètre constant, les crédits de paiement (CP) et les autorisations d'engagement (AE) demandés sont en hausse de respectivement 5,80 % et 6,19 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2016.

Évolution des autorisations d'engagement et des crédits de paiement
du programme « Sécurité civile » à périmètre constant

(en millions d'euros)

Action

2016

2017

Évolution

LFI

PLF (périmètre LFI 2016)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

11 - Prévention et gestion de crises

29,13

34,18

33,59

36,86

15,31 %

7,84 %

12 - Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux

247,09

267,19

256,01

291,7

3,61 %

9,17 %

13 - Soutien aux acteurs de la sécurité civile

130,34

139,52

138,88

139,03

6,55 %

- 0,35 %

14 - Fonctionnement, soutien et logistique

7,73

7,73

9,85

8,8

27,43 %

13,84 %

Total

414,29

448,61

438,33

476,38

5,80 %

6,19 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La hausse des crédits de paiement (CP) et des autorisations d'engagement (AE) se concentre essentiellement sur l'action 14 « Fonctionnement, soutien et logistique », et l'action 11 « Prévention et gestion de crises ».

L'année 2017 est marquée par l'impact du « Pacte de sécurité » sur le budget de la sécurité civile pour 2017 , qui va contribuer à renforcer les moyens de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) explique cette hausse importante, qui permettra notamment :

• l'achat d'avions multi-rôles (25 millions d'euros) ;

• l'achat de moyens de lutte contre les attaques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (1,38 million d'euros) ;

• la poursuite de la modernisation des applications informatiques liées à la gestion des crises (4,39 millions d'euros) ;

• les travaux de sécurisation des sites des moyens nationaux (centres de déminage, notamment).

Les capacités d'intervention du service du déminage seront intensifiées notamment par le recrutement de quinze démineurs et trois administratifs supplémentaires. Les moyens du pôle transverse d'information géographique et de géomatique seront accrus par le recrutement de deux géomaticiens.

Ainsi, hors dépenses du pacte de sécurité, le budget 2017 est en baisse de 3,1 % en AE et 1,3 % en CP.

Plusieurs grands projets d'investissement seront également poursuivis en 2017. Il s'agit notamment des projets suivants :

• la poursuite de l'équipement des départements en système d'alerte et d'information de la population (SAIP) ;

• la poursuite du projet ANTARES avec notamment le lancement de la couverture en Guyane et à Mayotte ;

• la poursuite du plan de modernisation de la sécurité intérieure avec un enjeu particulier sur la modernisation de l'infrastructure nationale partagée des transmissions à laquelle le réseau ANTARES est adossé.

2. Des crédits représentant une part faible de la dépense publique consacrée à la sécurité civile

Les crédits du programme ne représentent qu'une partie des moyens consacrés à la sécurité civile, même s'ils en constituent la composante la plus importante (49,02 % en AE et 54,82 % en CP), devant les programmes 159 « Météorologie » et 181 « Prévention des risques » de la mission « Écologie ».

Au sein du budget de l'État, sept autres programmes contribuent à cette politique publique, le programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » ayant été pris en compte pour la première fois par le document de politique transversale cette année.

Programmes concourant à la politique transversale « Sécurité civile »

(en millions d'euros)

Programme

Mission

Crédits demandés (PLF 2017)

Part dans le total

AE

CP

AE

CP

307 - Administration territoriale

Administration générale et territoriale de l'État

54,01

54,01

6,04 %

6,22 %

149 - Forêt

Agriculture

43,23

47,26

4,83 %

5,44 %

205 - Sécurité et affaires maritimes

Écologie

29,7

26,72

3,32 %

3,08 %

159 - Météorologie

Écologie

170,13

170,13

19,03 %

19,58 %

181 - Prévention des risques

Écologie

157,38

147,15

17,60 %

16,94 %

190 - Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur

1

1

0,11 %

0,12 %

204 - Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Santé

0,66

0,66

0,07 %

0,08 %

161 - Sécurité civile

Sécurités

438,32

476,32

49,02 %

54,82 %

Total

-

894,12

868,84

100,00 %

100,00 %

Note : il s'agit des crédits de paiement prévus dans les projets annuels de performances.

Source : commission des finances du Sénat (d'après le document de politique transversale « Sécurité civile »)

Surtout, le budget des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) s'élève à 4,41 milliards d'euros pour l'année 2015 (+ 1,11 %) , soit dix fois les crédits du programme 161 « Sécurité civile ».

Enfin, la répartition du financement des SDIS par les collectivités territoriales se maintient à 58 % pour les départements et 42 % pour les communes et EPCI. De même, le nombre de SDIS majoritairement financés par les communes et EPCI reste stable (33 SDIS en 2015 comme en 2014).

Évolution des contributions respectives des contingents communaux
et du département au budget des SDIS

(en euros)

Année

Département

Communes +EPCI

Total

Départ

%

Collectivités

%

Évolution départ

%

Évolution collectivités

Évolution du total

%

2005

1 678 082 952

1 615 806 053

3 293 889 005

51%

49%

12%

2%

7%

2006

1 866 808 132

1 647 032 758

3 513 840 890

53%

47%

10%

2%

7%

2007

1 997 230 806

1 675 503 101

3 672 733 906

54%

46%

7%

2%

4.5%

2008

2 119 064 150

1 705 530 687

3 824 594 837

55%

45%

6%

2%

4.1%

2009

2 216 562 357

1 751 566 849

3 968 129 206

56%

44%

4.6%

2.7%

3.8%

2010

2 288 216 333

1 766 246 661

4 054 462 994

56%

44%

3,2%

1%

2,2%

2011

2 353 449 000

1 787 368 000

4 140 817 000

57%

43%

2,8%

1,2%

2,1%

2012

2 417 729 670

1 828 868 543

4 246 598 213

57%

43%

2,73%

2,32%

2,55%

2013

2 452 878 878

1 860 453 757

4 313 332 635

57%

43%

1,45%

1,73%

1,57%

2014

2 489 707 789

1 868 453 112

4 358 130 901

57%

43%

1,50%

0,43%

1,04%

2015

2 553 446 456

1 853 631 877

4 407 078 333

58%

42%

2,40%

-0,62%

1,11%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

B. UN DÉPASSEMENT DE LA TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE EXPLIQUÉ PAR UNE REPRISE DE L'INVESTISSEMENT ET PAR LA PRIORITÉ ACCORDÉE PAR LE GOUVERNEMENT À LA SÉCURITÉ

1. Un programme difficile à piloter sur le plan budgétaire

Les dépenses de la sécurité civile présentent deux caractéristiques particulières rendant sa gestion particulièrement complexe :

- une dépendance forte à l'aléa , qui est le facteur déclenchant de l'engagement des moyens opérationnels. Les dépenses liées au niveau d'activité opérationnelle sont principalement constituées par les dépenses de carburants (des avions, des hélicoptères, et des véhicules opérationnels terrestres), l'achat de produit retardant, le déploiement de colonnes de renfort et les crédits d'extrême urgence. Le niveau de ces dépenses est corrélé aux situations de gestion de crise ;

- un niveau de rigidité élevé . Les dépenses « rigides » sont celles qui sont fixées par un texte (subvention versée à l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers, s'élevant à 4,36 millions d'euros en AE et en CP ou participation de l'État au budget de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris, qui s'élève à 83,21 millions d'euros en AE et en CP), ou qui résultent d'un marché public en cours.

En valeur, les dépenses sur lesquelles les possibilités d'agir à la baisse sont faibles s'élèvent à plus de 195 millions d'euros, sur un budget total de 297 millions d'euros en CP en 2017 (hors dépenses de personnel). Ces masses budgétaires représentent un taux de rigidité de l'ordre de 71,4 % du total hors dépenses de personnel.

Selon la réponse aux questionnaires budgétaires, la contribution de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises à l'effort de réduction des déficits prend ainsi, à titre principal, trois formes :

• une politique d'investissement prudente ;

• la rationalisation de certaines implantations territoriales : c'est ainsi que la base d'avions de la sécurité civile sera transférée sur la plate-forme de l'aéroport de Nîmes-Garons, à proximité du groupement d'hélicoptères ; la réforme territoriale des centres de déminage se poursuivra en 2017 avec la fermeture d'un centre (après deux fermetures en 2016) ;

• un pilotage resserré des dépenses de fonctionnement.

2. Un dépassement de la programmation pluriannuelle supérieur à 32 millions d'euros découlant de la prise en compte du pacte de sécurité par le Gouvernement

Il convient de relever un dépassement important, de 32 millions d'euros en AE et en CP entre la loi de programmation des finances publiques et le projet de loi de finances pour 2017.

Cet écart est concentré sur les dépenses d'investissement, et dans une moindre mesure, de personnel et d'intervention.

La lettre de cadrage du 27 avril 2016 préconisait initialement de réduire la dépense, hors masse salariale, de 5 % en 2017, ces dernières devant également rendre en compte les mesures prévues pour le pacte de sécurité. Pour les dépenses liées à la masse salariale, il était demandé de contenir la hausse à 2 % par rapport à la loi de finances pour 2016. Le montant des crédits de paiements pour 2017 s'établissait alors à 120 millions d'euros pour les dépenses de personnels (hors CAS « Pensions ») et 258,8 millions d'euros pour les autres dépenses.

Compte tenu de « la priorité accordée au secteur de la sécurité, à la contrainte opérationnelle de la sécurité civile et aux rigidités du programme », la lettre-plafond du Premier ministre du 17 juillet 2016 a finalement fixé les crédits pour 2017 à 126 millions d'euros pour les dépenses de personnels (hors CAS « Pensions ») et 298 millions d'euros pour les autres dépenses.

Les arbitrages ont fixé le montant des crédits à un niveau supérieur à la LPFP. Cela s'explique par :

• 31,75 millions d'euros (en AE et en CP), dont 28,38 millions d'euros en titre 5 et 3,37 millions d'euros en titre 3, pour le pacte de sécurité en 2017 ;

• en AE, le nouveau marché de maintien en conditions opérationnelle (MCO) des avions. Le triennal avait été établi en fonction des travaux préparatoires du premier appel d'offre déclaré infructueux.

S'ajoutent à ces éléments des données non connues lors de l'élaboration du budget triennal, à savoir les 41 recrutements du pacte de sécurité (+ 21 en 2016 et + 20 en 2017) la revalorisation du point d'indice en 2016 et 2017 et les transferts prévus en 2017, notamment.

Comparaison entre les crédits demandés et les plafonds
de la programmation pluriannuelle

(en millions d'euros)

Titre

LPFP 1 ( * )

PLF 2017

Écart

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Titre 2

(hors-CAS)

120,47

120,47

126,1

126,1

5,63

5,63

Titre 3

109,25

125,68

107,31

126,32

- 1,94

0,64

Titre 5

23,56

45,19

46,63

65,67

23,07

20,48

Titre 6

98,61

98,61

103,74

103,74

5,13

5,13

Titre 7

2,01

2,01

2,23

2,23

0,22

0,22

Total

353,9

391,96

386,01

424,06

32,11

32,1

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses du ministère de l'intérieur au questionnaire)

Par ailleurs, des rééquilibrages entre titres sont intervenus pour tenir compte de l'évolution de certaines dépenses obligatoires ou inéluctables. L'augmentation de la subvention versée à la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, alors qu'une baisse était prévue dans le triennal, a notamment conduit à une hausse significative du titre 6.


* 1 Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.