AFFAIRES SOCIALES

Table des matières


Mardi 4 mai 1999

- Présidence de M. Jean Delaneau, président -

Sécurité sociale - Création d'une couverture maladie universelle - Audition de M. Jean-Pierre Davant, président de la fédération nationale de la mutualité française (FNMF)

La commission a poursuivi ses auditions sur le projet de loi n° 338 (1998-1999)portant création d'une couverture maladie universelle (CMU).

Elle a tout d'abord entendu M. Jean-Pierre Davant, président de la fédération nationale de la mutualité française (FNMF).

M. Charles Descours, rapporteur, a souhaité connaître la position générale de la FNMF sur le projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle. Il lui a aussi successivement demandé combien les mutuelles allaient-elles perdre d'adhérents avec la mise en oeuvre de ce dispositif, s'il estimait qu'il était réaliste d'affirmer, comme le faisait le Gouvernement, que la CMU aurait un coût annuel de 9 milliards de francs et si la FNMF était à l'origine du chiffrage du coût de la couverture complémentaire individuelle à 1.500 francs par an. Il l'a interrogé sur le financement du dispositif et sur la légitimité de la participation des représentants des organismes complémentaires au Conseil d'administration du fonds chargé de financer la CMU. Il lui a demandé de porter une appréciation sur la pertinence du système imaginé par l'Assemblée nationale pour limiter les effets de seuil qui résulteraient de l'application du projet de loi. Il l'a enfin interrogé sur la définition de l'assiette de la contribution des organismes complémentaires instituée par ce projet de loi.

M. Jean-Pierre Davant a affirmé qu'il n'était pas acceptable que des personnes n'aient pas accès au système de soins, surtout dans un contexte où la collectivité nationale consacrait des ressources aussi importantes pour le financer. S'il a estimé que la CMU pouvait constituer une réponse à ce problème pour les citoyens qui en seraient bénéficiaires, il a déclaré qu'il aurait été possible de construire un autre dispositif que celui qui avait été prévu par le projet de loi. Il a notamment critiqué le fait que les organismes de protection sociale complémentaire soient appelés à financer la couverture maladie universelle et soient parallèlement opposés aux caisses primaires d'assurance maladie pour la mettre en oeuvre. Il a également observé que le projet de loi mettait les mutuelles en concurrence avec les compagnies d'assurance alors que ces deux types d'institutions n'incarnent pas la même éthique à l'égard de leurs assurés.

M. Jean-Pierre Davant a indiqué que 10 à 15 % des adhérents actuels des mutuelles interprofessionnelles seraient demain bénéficiaires de la CMU et que ce taux était beaucoup plus élevé pour les mutuelles qui assuraient la couverture complémentaire maladie des personnes non salariées. Soulignant le paradoxe de l'institution d'une couverture maladie universelle avant celle d'une assurance maladie universelle et les difficultés rencontrées pour obtenir une bonne connaissance des revenus des indépendants, il a estimé qu'au moins 20 % des personnes adhérant à des mutuelles de non salariés auraient désormais la possibilité de ne plus acquitter la cotisation pour leur couverture complémentaire.

M. Jean-Pierre Davant a estimé que l'évaluation d'un coût de 9 milliards de francs pour la mise en place de la CMU était probablement correcte pour la première année d'application du dispositif, mais a fait part d'une beaucoup plus grande incertitude pour les années qui suivraient. Evoquant l'estimation de 1.500 francs par personne et par an, il a apporté plusieurs précisions de nature à en relativiser la pertinence. Il a ainsi indiqué qu'elle avait été obtenue sur une base correspondant aux dépenses réalisées en 1995, et qu'il faudrait donc ajouter 15 % de cette somme pour obtenir un chiffrage réaliste au 1er janvier 2000. Il a aussi affirmé que l'estimation avait été réalisée sur la base des dépenses engagées pour des personnes âgées de moins de 65 ans et indiqué que le coût de la couverture complémentaire des personnes plus âgées s'élevait en moyenne à 2.500 francs. Enfin, il a estimé que le coût de la couverture complémentaire dépendrait de la nature des accords qui pourraient être conclus entre les régimes obligatoires, les organismes de protection sociale complémentaire et les professionnels, craignant une explosion financière du coût de la CMU si les pouvoirs publics cédaient à la pression de ces derniers, notamment en matière dentaire et optique.

M. Jean-Pierre Davant a déclaré prendre acte de l'institution d'une contribution à la charge des organismes de protection sociale complémentaire, observant à cet égard que la mutualité en acquitterait l'essentiel en raison de sa position sur le marché de la protection complémentaire maladie. Répondant à l'argument selon lequel les mutuelles disposaient de réserves financières importantes qui pourraient être utilisées pour acquitter la nouvelle contribution, il a affirmé que ces réserves devraient être accrues plutôt que réduites dans le cadre de l'évolution européenne et qu'en dernier ressort les véritables contributeurs seraient les adhérents des mutuelles. Il a estimé légitime que les organismes de protection sociale complémentaire participent au conseil d'administration du fonds chargé du financement de la CMU.

Répondant à la question du rapporteur sur la création, par l'Assemblée nationale, d'un nouveau fonds dont les dépenses permettraient de limiter des effets de seuil, M. Jean-Pierre Davant a fait part de ses plus grandes réserves sur ce dispositif et il a estimé que seul un système faisant appel à une cotisation des bénéficiaires serait de nature à satisfaire cet objectif. Il a rappelé que la mutualité avait mis en place des systèmes solidaires permettant aux personnes titulaires de faibles revenus d'accéder à la protection complémentaire. Il a exprimé le voeu que l'institution de la CMU soit une mesure temporaire, dans l'attente d'une meilleure gestion du système de soins permettant à tous d'y accéder.

Evoquant enfin la définition de l'assiette de la contribution des organismes de protection sociale complémentaire, M. Jean-Pierre Davant a affiché sa préférence pour une référence au montant des prestations versées en matière de santé.

M. Charles Descours, rapporteur, a interrogé le président de la FNMF sur la prise de position d'une mutuelle de la fonction publique, selon laquelle l'institution de la couverture médicale universelle telle qu'elle était prévue par le projet de loi portait en germe une privatisation de la sécurité sociale. Il s'est demandé si les caisses primaires d'assurance maladie auraient les moyens de contrôler effectivement le niveau des ressources des personnes qui sollicitaient le bénéfice de la CMU.

Il a enfin demandé à M. Jean-Pierre Davant quelles institutions seraient chargées de déterminer le panier de soins remboursables et si la perte de 20 % d'adhérents entraînée par l'institution de la CMU pouvait menacer l'existence de certaines mutuelles.

M. Jean-Pierre Davant a estimé que la mise en concurrence des caisses primaires et des organismes de protection sociale complémentaire constituait un réel danger politique.

Il a émis des doutes sur l'importance des moyens dont disposaient les caisses primaires pour appréhender de manière efficace l'ensemble des ressources des personnes sollicitant le bénéfice de la CMU.

M. Jean-Pierre Davant a affirmé que l'accord qui venait d'être conclu entre la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM) et les représentants des mutuelles et des compagnies d'assurance ne concernait pas seulement les bénéficiaires de la CMU, mais l'ensemble des assurés sociaux. Il a indiqué que les organismes de protection sociale complémentaire avaient le choix, soit d'acquitter une contribution représentant 1,75 % de leur chiffre d'affaires, soit d'entrer véritablement dans la gestion du dispositif de la CMU. Affirmant sa préférence pour un scénario partenarial avec la CNAM, il a affirmé que si les organismes de protection sociale complémentaire n'étaient pas associés à la maîtrise du dispositif, ils se contenteraient de payer la taxe, l'Etat étant alors invité à assumer ses responsabilités.

M. Jean-Pierre Davant a confirmé que l'avenir de certaines mutuelles de petite dimension pourrait être menacé par l'institution de la CMU.

Interrogé par M. Jean Delaneau, président, il a précisé que de grandes mutuelles avaient maintenu un système de solidarité se traduisant par des cotisations proportionnelles aux salaires des adhérents et que d'autres avaient mis en place des cotisations en fonction de l'âge, afin de permettre au plus grand nombre d'accéder à une couverture complémentaire.

M. François Autain a demandé à M. Jean-Pierre Davant s'il accordait sa préférence à un système où les caisses primaires d'assurance maladie continuent d'assumer la mission qui est la leur plutôt que d'entrer dans le champ de la protection sociale complémentaire.

M. Jean-Pierre Davant lui a répondu par l'affirmative.

Sécurité sociale - Création d'une couverture maladie universelle - Audition de Mme Dominique Polton, directrice du Centre de recherche, d'études et documentation en économie de la santé (CREDES), et de M. Michel Grignon, directeur de recherche

La commission a ensuite procédé à l'audition de Mme Dominique Polton, directrice du Centre de recherche d'étude et de documentation en économie de la santé (CREDES), et de M. Michel Grignon, directeur de recherche.

M. Charles Descours, rapporteur, a demandé quelle était la part de la population concernée par la CMU disposant déjà d'une couverture complémentaire, notamment dans le cadre de leur entreprise. Il s'est interrogé sur le niveau de la couverture maladie complémentaire de ces personnes et sur l'homogénéité existant entre les branches professionnelles. Citant l'évaluation faite par le Gouvernement d'un coût de 1.500 francs par personne, il a demandé si elle était raisonnable et si l'institution d'une couverture maladie universelle n'allait pas se traduire par un effet de " rattrapage ".

Répondant à la question du rapporteur sur la part de la population concernée par la couverture maladie universelle disposant déjà d'une couverture complémentaire, Mme Dominique Polton a détaillé les résultats d'une enquête réalisée en 1996 auprès d'un échantillon de bénéficiaires dépendant des trois principaux régimes d'assurance maladie. M. Michel Grignon a précisé que cette enquête se fonde sur une échelle d'équivalence, dite " échelle d'Oxford " (1 pour le chef de ménage, 0,7 pour le deuxième adulte et 0,5 pour les moins de quatorze ans), qui est différente de celle retenue par le projet de loi (1 pour le chef de ménage, 0,5 pour le deuxième adulte et 0,3 pour les moins de quatorze ans). Sur 8,5 millions de personnes ayant moins de 3.000 francs de revenu par unité de consommation (au lieu de 6 millions de personnes dans le cadre de l'échelle retenue par la CMU), 6,3 millions disposeraient déjà d'une couverture complémentaire, dont 2,7 millions via leur entreprise. Plus le revenu par unité de consommation est élevé, plus la part des personnes dont l'entreprise assure cette couverture est importante. Mme Dominique Polton a toutefois souligné que le pourcentage de personnes couvertes était probablement surestimé, du fait du mode d'enquête qui ne permet d'appréhender que des personnes disposant d'un logement et plus généralement celles qui sont le mieux insérées socialement.

En réponse à une observation de M. Charles Descours, rapporteur,Mme Dominique Polton a confirmé que la couverture maladie universelle aurait pour conséquence une perte de cotisations pour les organismes de protection complémentaire.

Concernant le niveau de couverture, Mme Dominique Polton a reconnu que cette question était effectivement essentielle. Elle a précisé qu'il n'existait malheureusement pas, pour l'instant, de données objectives sur la qualité de la couverture et que les seules informations connues étaient subjectives, fondées sur l'opinion des personnes interrogées sur le niveau de remboursement. Elle a observé que cette enquête faisait apparaître que le pourcentage de personnes jugeant que leur couverture prend en charge " intégralement ", ou " bien ", leurs dépenses n'était pas différent chez les personnes ayant des revenus inférieurs à 3.000 francs par rapport au reste de la population. Elle a toutefois précisé qu'il lui semblait probable que les couvertures collectives (d'entreprise) offrent un meilleur niveau de protection et un meilleur rapport qualité/prix, par rapport aux contrats souscrits individuellement.

M. Michel Grignon a remarqué que le niveau de revenus n'était pas un facteur déterminant de renoncement aux soins, contrairement au fait d'être couvert ou non par une assurance complémentaire.

Mme Dominique Polton a indiqué qu'elle ne disposait pas d'informations sur la question de l'homogénéité entre les différentes branches professionnelles.

Concernant l'évaluation d'un coût de 1.500 francs par personne retenu par le Gouvernement, Mme Dominique Polton a observé que trois types d'éléments devaient être pris en compte : les dépenses moyennes restant à charge des bénéficiaires, après couverture obligatoire, les caractéristiques de la population ciblée par la CMU et l'étendue de la couverture. Pour les dépenses moyennes restant à charge (ticket modérateur, forfait journalier, dépassements), l'évaluation est de 1.775 à 1.915 francs selon les sources et les méthodes d'estimation. M. Michel Grignon a expliqué que la population ciblée par la CMU présentait deux caractéristiques : sa structure d'âge, nettement plus jeune que la population totale, ce qui en fait un public moins dépensier, et ses comportements spécifiques de consommation, dont on ne sait s'ils vont s'aligner sur ceux de la moyenne générale, ou s'ils vont rester inférieurs pour des raisons socioculturelles. Les données recueillies auprès des départements ayant mis en place une carte santé semblent montrer la persistance de comportements spécifiques de recours aux soins. Enfin, le dispositif retenu pour la CMU peut conduire à ce que les dépassements pris en charge soient inférieurs au dépassement total.

Concernant un éventuel effet de " rattrapage " lié à la mise en place de la couverture maladie universelle, Mme Dominique Polton, après avoir précisé que le CREDES n'avait pas mené d'étude spécifique sur cette question, a remarqué que les données obtenues dans les départements montraient un phénomène de croissance de la consommation médicale, mais qu'il n'existait pas de " système d'investissement préalable ".

M. Jean Chérioux s'est interrogé, au-delà d'une bénéfique uniformisation, sur les modifications réelles apportées par la couverture maladie universelle, à partir du moment où les départements avaient mis en place des systèmes de couverture complémentaire, trop souvent méconnus.

Mme Dominique Polton a rappelé que le CREDES travaillait sur des sources fournies par les régimes d'assurance maladie, et non sur les données des conseils généraux.

Répondant à une interrogation de Mme Marie-Madeleine Dieulangard sur " l'échelle d'Oxford " et les systèmes définis pour apprécier le niveau des ressources, Mme Dominique Polton a observé qu'il s'agissait d'enquêtes sur des revenus déclarés et que l'échelle d'Oxford avait été très utilisée, avant le recours à l'échelle retenue pour le revenu minimum d'insertion (RMI) qui sert pour le projet de loi CMU. M. Michel Grignon a précisé qu'au-delà de la pertinence des échelles utilisées, il était particulièrement audacieux de garder la même échelle pour des personnes à faible revenu comme pour des personnes plus aisées.

M. Dominique Leclerc, établissant un parallèle entre les chiffres utilisés dans le cadre de l'objectif national d'assurance maladie (ONDAM) et les chiffres utilisés par le CREDES, a fait observer que les différentes enquêtes menées dépendaient de la fiabilité des chiffres fournis par l'assurance maladie.

Mme Nicole Borvo s'est interrogée sur le nombre de personnes (2,7 millions) disposant d'un revenu inférieur à 3.000 francs par unité de consommation et actuellement concernées par une couverture complémentaire dans le cadre de leur entreprise.

M. Michel Grignon a expliqué qu'une famille composée d'un salarié au SMIC, d'un adulte ne travaillant pas et de deux enfants, disposait d'un revenu inférieur à 3.000 francs par unité de consommation.

Sécurité sociale - Création d'une couverture maladie universelle - Audition de M. Michel Dollé, rapporteur général au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts (CSERC)

La commission a alors entendu M. Michel Dollé, rapporteur général au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts (CSERC).

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que le CSERC s'était intéressé aux phénomènes de " désincitation " et que la couverture maladie universelle pouvait présenter le risque de ne pas favoriser la recherche d'emploi.

M. Michel Dollé a tout d'abord précisé qu'il n'était un spécialiste ni de l'économie de la santé, ni de la sécurité sociale. Il a observé qu'un accord général existait sur la nécessité de reconnaître le droit à l'accès aux soins comme un droit fondamental, alors que la gratuité n'est pas assurée par le mode de fonctionnement du système de santé. Il a indiqué que l'existence d'une " zone de passage " entre la prise en charge totale des frais de santé et la prise en charge partielle posait problème. Citant l'exemple de l'allocation parent isolé (API), où le passage de l'API (revenu non imposable) à un salaire (revenu imposable) entraînait une diminution de l'allocation logement, alors que les revenus sont identiques, il a observé qu'un tel " effet de trappe " pouvait à la fois constituer une désincitation au travail et être condamnable au regard de la justice sociale. Citant un rapport relativement récent du CSERC, il a toutefois ajouté qu'il ne fallait pas surestimer ce facteur désincitatif, les personnes en recherche d'emploi espérant un gain futur plus important et, en tout état de cause, une réinsertion dans la société. Il a observé que les différentes enquêtes de l'INSEE sur les personnes touchant le RMI faisaient apparaître le frein important que représentent les problèmes de santé à la possibilité de trouver un emploi. Il a estimé que la généralisation de la couverture maladie pourrait, de ce fait, avoir un effet incitatif sur la recherche de travail.

M. Michel Dollé a estimé que le projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle comportait deux effets de seuil. Il a observé que le premier effet de seuil, se situant au niveau de la couverture de base, ne se posait que pour les seules personnes prenant un emploi non salarié, ces personnes devant cotiser sur la totalité de leurs revenus. Il a indiqué que la seule solution pour supprimer cet effet de seuil était d'instituer une franchise, en remontant le taux moyen. En ce qui concerne le second effet de seuil, relatif à l'assurance complémentaire, il a observé que la difficulté tenait au caractère facultatif de cette assurance. Il a noté qu'il était de toute façon nécessaire d'atténuer cet effet de seuil, en adoptant un mécanisme similaire à celui prévu pour le revenu minimum d'insertion, à savoir une phase transitoire d'un an, ce qui est prévu par le projet de loi pour les bénéficiaires de la CMU ayant choisi les organismes de protection complémentaire. Il a remarqué que cette disposition ne valait que pour les personnes effectuant un passage temporaire au sein du dispositif, avant de disposer de revenus plus importants. Pour les personnes qui restent dans la zone proche du seuil de la CMU, la technique d'une année de transition n'est pas suffisante. M. Michel Dollé a estimé que la seule solution était d'attribuer une aide dégressive par rapport au revenu, et non pas par rapport à la date d'entrée du dispositif.

M. Jean Delaneau, président, a estimé qu'il convenait d'être d'une grande prudence concernant les phénomènes d'incitation ou de désincitation.

Répondant à une interrogation de M. Jean Chérioux sur la définition des ressources nécessaires, M. Michel Dollé a déclaré qu'il était essentiel, à partir du moment où le travail est considéré dans la société contemporaine comme la base de l'autonomie de la personne, qu'une situation de travail appelle des revenus plus élevés qu'une situation de non travail.

Nomination de rapporteur

La commission a nommé M. Alain Vasselle rapporteur de la proposition de loi n° 245 (1998-1999) présentée par M. Hubert Haenel et plusieurs de ses collègues, tendant à prendre en compte le temps du service national dans le calcul de la retraite.

Emploi - limitation des licenciements des salariés de plus de cinquante ans - Désignation des candidats pour faire partie d'une éventuelle commission mixte paritaire

La commission a procédé à la désignation de sept candidats titulaires et de sept candidats suppléants appelés à faire partie d'une éventuelle commission mixte paritaire, chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi n° 253 (1998-1999) tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans.

Ont été désignés comme candidats titulaires : MM. Jean Delaneau, Louis Souvet, Serge Franchis, André Jourdain, Jacques Machet, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Guy Fischer, et comme candidats suppléants : MM. François Autain, Jacques Bimbenet, Mme Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Alain Gournac, Dominique Leclerc et Jean-Louis Lorrain.

Contrôle de l'application des lois - Loi d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail - Communication

Au titre des questions diverses, M. Louis Souvet, rapporteur de la loi du 13 juin 1998, d'orientation et d'incitation à la réduction du temps de travail, a souhaité pouvoir présenter fin juin à la commission une communication sur l'application de cette loi.

Il a indiqué qu'outre l'examen attentif des accords conclus et des bilans chiffrés avancés par le Gouvernement, cette communication pourrait comporter les observations tirées de la rencontre des partenaires sociaux " sur le terrain " dans une dizaine d'entreprises. Il a souhaité que ses collègues puissent être associés à ces rencontres.

M. Jean Delaneau, président, s'est félicité de cette initiative approuvée par la commission et a souhaité que quelques commissaires puissent se joindre à chacun des déplacements du rapporteur.

Mercredi 5 mai 1999

- Présidence de M. Jean Delaneau, président, puis de Mme Marie-Madeleine Dieulangard, vice-président -

Audition de M. Jean-Paul Cano, président du conseil d'administration et de M. Philippe Duneton, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Paul Cano, président du conseil d'administration, et de M. Philippe Duneton, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.

M. Jean-Paul Cano a tout d'abord remercié le président et les membres de la commission d'avoir organisé l'audition des responsables des nouvelles agences chargées de la sécurité sanitaire. Il a indiqué que cette audition intervenait avant la première séance du conseil d'administration de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (ASSAPS).

M. Philippe Duneton a rappelé que le Sénat avait joué un grand rôle dans la création de l'Agence du médicament, puis de l'ASSAPS et estimé légitime que celui-ci soit immédiatement informé des projets des responsables de l'Agence, avant même la première réunion du conseil d'administration. Il a rendu hommage aux équipes qui ont conduit le développement de l'Agence du médicament dont l'activité avait triplé en cinq ans, les effectifs ayant simplement doublé.

M. Philippe Duneton a cité les trois métiers de base qu'avait exercés l'Agence du médicament, l'évaluation médico-scientifique du médicament et des réactifs, le contrôle en laboratoire sur les trois sites de Saint-Denis, Lyon et Montpellier et l'inspection des produits et des lieux de fabrication. Il a affirmé que ces métiers allaient s'enrichir dans le cadre de l'ASSAPS qui était désormais responsable de la sécurité sanitaire de nouveaux produits de santé.

M. Philippe Duneton a ensuite indiqué que l'organisation de la nouvelle Agence serait complétée par rapport à celle de l'Agence du médicament, avec la création d'un département spécifique pour le médicament biologique au sein de la direction de l'évaluation du médicament, le développement " en râteau " des services d'inspection en fonction des produits de santé et la création d'une direction d'évaluation des dispositifs médicaux. Il a affirmé que la montée en charge de l'établissement se traduirait par le recrutement d'environ 100 personnes en 1999 et que, même si les arbitrages définitifs n'étaient pas encore rendus en la matière, il avait bon espoir que le projet de loi de finances pour 2000 ouvre des crédits d'un montant suffisant pour permettre le bon fonctionnement de l'Agence. Il a notamment mis l'accent sur l'ampleur des investissements à réaliser en matière de systèmes d'information afin de répondre aux besoins spécifiques des interlocuteurs de l'établissement qui s'étaient diversifiés avec l'extension de ses missions. Evoquant les dispositifs médicaux, il a affirmé que l'ASSAPS n'avait pas pour ambition de s'investir dans la dimension médico-économique de la politique concernant ces produits.

M. Claude Huriet a rappelé le constat de complexité des structures et de cloisonnement des circuits de décision qui avait conduit à l'adoption de la loi tendant au renforcement de la veille et de la sécurité sanitaires. Il s'est félicité que le discours préliminaire du directeur général de l'ASSAPS manifeste la volonté d'assurer à la fois l'évaluation et la gestion du risque. Il l'a interrogé sur le financement de l'Agence, estimant qu'il ne convenait pas que l'industrie pharmaceutique soit la seule appelée à contribuer, ni que le rapport entre les financements publics et privés soit trop déséquilibré. Il a aussi demandé à M. Philippe Duneton d'évoquer la dimension européenne et internationale des travaux de l'Agence et d'aborder le sujet des vigilances concernant les différents produits de santé. Il a fait part de son exaspération face au retard pris pour publier les décrets d'application des dispositions de la loi du 28 mai 1996 concernant les thérapies génique et cellulaire.

M. Charles Descours a fait siens les propos de M. Claude Huriet sur les thérapies génique et cellulaire. Il a affirmé que les parlementaires étaient très souvent saisis de questions relatives à la réorganisation de la transfusion sanguine.

M. Dominique Leclerc a observé que les modifications de frontière entre les médicaments et les dispositifs médicaux avaient des conséquences économiques, notamment en raison des taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) distincts applicables à ces produits.

M. Francis Giraud a abordé la question des recherches biomédicales et a demandé à M. Philippe Duneton si elles entraient dans le champ des compétences de l'Agence.

M. Jean-Louis Lorrain l'a interrogé sur les " alicaments ", le dopage et la toxicomanie.

Enfin, Mme Marie-Madeleine Dieulangard a estimé utopique d'imaginer une politique de vigilance sanitaire strictement nationale.

M. Philippe Duneton a indiqué que deux voies pouvaient être explorées pour renforcer l'assise budgétaire de l'Agence, à savoir soit un plus grand recours aux subventions de l'Etat, soit la mise en place de nouvelles taxes. Rappelant que le choix entre ces deux hypothèses appartenait au Gouvernement, il a affirmé que ses services en avaient étudié les aspects techniques.

M. Jean-Paul Cano a affirmé comprendre les préoccupations des sénateurs et a rappelé que, lors des débats de la loi portant réforme de la transfusion sanguine, en 1993, les différents intervenants avaient estimé qu'un rapport de 60-40 % entre ressources privées et ressources publiques était raisonnable. Il a jugé qu'il serait souhaitable d'y revenir.

Evoquant la dimension européenne, M. Philippe Duneton a souligné la position un peu spécifique de la France par rapport à d'autres pays en matière de dispositifs médicaux et a indiqué qu'il n'était pas exclu que certaines préoccupations françaises soient mieux prises en compte à l'avenir. Il a estimé que la vigilance ne constituait pas une mission impossible, à condition que les vigilances concernant les différents produits soient mieux ccordonnées. Rappelant que l'an dernier, l'activité de pharmaco-vigilance de l'Agence du médicament avait crû de 50 %, il a admis que l'augmentation de l'information disponible rendait l'exercice délicat et qu'il convenait de bien différencier les signalements peu importants des signalements d'importance moyenne ou grave. Il a affirmé que les thérapies génique et cellulaire constituaient une priorité de l'ASSAPS et a affirmé que le travail des administrations avait avancé de manière très significative, un premier décret devant être prochainement soumis au Conseil d'Etat. Il a indiqué qu'il était très important que l'ASSAPS constitue l'interlocuteur unique des chercheurs en la matière, comme elle est l'interlocuteur unique en matière de recherche biomédicale.

M. Jean-Paul Cano a affirmé que la volonté de mieux contrôler les produits biologiques allait nécessiter la mise en place d'une approche intégrée au sein de l'Agence. Il a manifesté le souhait de revenir devant la commission pour évoquer ce point si sensible.

M. Philippe Duneton a indiqué que la responsabilité de l'Agence en matière de transfusion sanguine concernait l'hémovigilance et le contrôle des produits du sang. Affirmant comprendre les incidences des délimitations de frontière entre dispositifs médicaux et médicaments, il a toutefois indiqué que l'ajustement des taux de TVA ne constituait pas sa première préoccupation. Il a aussi exposé les compétences de l'Agence en ce qui concerne les allégations santé des aliments, ainsi que sur les produits susceptibles d'être utilisés par des toxicomanes.

Audition de Mme Yannick Mauro, présidente du conseil d'administration, et M. Jacques Drucker, directeur général de l'Institut de veille sanitaire

La commission a ensuite entendu Mme Yannick Mauro, présidente du conseil d'administration, et M. Jacques Drucker, directeur général de l'Institut de veille sanitaire.

Dans son propos liminaire, M. Jacques Drucker a déclaré que le nouvel Institut de veille sanitaire, actuellement installé à l'hôpital national de Saint-Maurice, comprenait un effectif d'environ 100 personnes, soit 37 personnes supplémentaires par rapport à celui du Réseau national de santé publique (RNSP). Il a souligné que cette augmentation s'expliquait par la fusion opérée avec le Centre européen de surveillance du Sida qui comprenait 22 personnes et par la création de 15 nouveaux emplois. Il a observé que le budget de cette nouvelle structure était en hausse de 50 % par rapport à celui du Réseau national de santé publique.

M. Jacques Drucker a déclaré que l'Institut de veille sanitaire s'était fixé plusieurs objectifs prioritaires parmi lesquels le renforcement des actions à l'encontre des maladies transmissibles (hépatite B, infection par le VIH, infections nosocomiales), une surveillance accrue des effets de la pollution atmosphérique sur la santé et un effort supplémentaire en matière de toxico-immunologie.

Il a souligné que l'année 1999 verrait la mise en place de deux nouveaux départements techniques : un premier département de surveillance des maladies chroniques et d'observation des populations à risque et un second département consacré à la coordination des programmes européens. Il a insisté sur le rôle européen de l'Institut de veille sanitaire qui coordonnait la surveillance européenne de l'évolution de la tuberculose et du Sida et publiait un bulletin européen bilingue.

Concernant le développement de nouvelles missions, M. Jacques Drucker a déclaré que l'Institut de veille sanitaire avait engagé des partenariats avec la Fédération des observatoires régionaux de la santé, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, la Direction des relations du travail et la Direction générale de la santé. Il a également évoqué la création d'un groupe de travail sur les registres de morbidité.

M. Jacques Drucker a considéré que la montée en puissance de l'Institut de veille sanitaire se ferait en deux phases. Dans un premier temps, il a observé que la période d'installation s'accompagnerait d'une réflexion sur les besoins, l'identification des partenaires et la définition d'actions nouvelles. Dans un second temps, il a évoqué la négociation d'un contrat d'objectifs et de moyens avec l'Etat pour la période 2001-2003. Il a considéré qu'à cet horizon, l'effectif de l'institut devrait représenter environ 200 personnes pour un budget de 200 millions de francs. Il s'est fixé pour objectif la bonne articulation de l'action de l'Institut de veille sanitaire avec celle des deux agences de sécurité sanitaire. Il a souhaité que les ressources financières de l'Institut soient augmentées et diversifiées. A cet égard, il a envisagé des actions communes avec les organismes de sécurité sociale, inscrites dans la loi de financement de la sécurité sociale, et des coopérations avec les associations de lutte contre le cancer qui pourraient être intéressées par un soutien financier à la veille sanitaire.

Mme Yannick Mauro a déclaré qu'elle avait accepté la présidence de l'Institut de veille sanitaire afin d'améliorer l'organisation du Réseau de santé publique et de développer une véritable culture de santé publique définissant les responsabilités de chacun. Elle a souhaité que le conseil d'administration de l'Institut définisse les orientations, assure la mise en place de l'organisation et assume un rôle de fédération des actions dans le domaine de la veille sanitaire. Elle a estimé qu'une augmentation des moyens de l'Institut était, à terme, indispensable. Elle a évoqué une mise à contribution de la branche accidents du travail, dont les comptes sont régulièrement excédentaires.

M. Jean Delaneau, président, a souhaité connaître la situation des Observatoires régionaux de la santé (ORS).

M. Charles Descours a appelé à une prise de position rapide de l'Institut de veille sanitaire sur la nécessité de relancer les vaccinations après avoir observé que la vaccination contre l'hépatite B avait brutalement baissé.

Il s'est interrogé sur le nombre important de missions confiées à l'Institut et sur les modalités de la coordination avec les autres établissements et agences spécialisées.

M. Claude Huriet, après s'être félicité que les actions de suivi et d'alerte constituent les deux principales missions de l'Institut de veille sanitaire, a souhaité connaître les modalités d'organisation du réseau de veille sanitaire.

En réponse aux intervenants, M. Jacques Drucker a considéré que les Observatoires régionaux de la santé exerçaient leur activité dans des conditions de grande précarité pour la majorité d'entre eux et que le soutien de trois millions de francs que pouvait leur fournir l'Institut de veille sanitaire était insuffisant. Il a estimé que le développement de ces structures constituait un enjeu de première importance.

Revenant sur la fonction d'alerte de l'Institut, il a évoqué le développement d'un partenariat avec notamment la médecine du travail et la médecine ambulatoire sous la forme de structures légères pouvant recourir aux laboratoires de recherche et aux laboratoires universitaires. Il a déclaré que des partenariats plus lourds étaient également envisagés pour assurer le suivi des grandes questions de santé publique.

Evoquant la coordination des actions de l'Institut de veille sanitaire avec celles des autres organismes, il a souligné que l'Institut était le seul à s'être vu reconnaître la mission d'assurer le suivi sanitaire des populations. Par conséquent, il a estimé que la création de nouvelles agences, par exemple dans le domaine de la radioprotection, ne présenterait pas de difficultés dès lors que seraient mises en place des modalités efficaces de coordination.

Audition de M. Bernard Chevassus-au-Louis, président du conseil d'administration, et de M. Martin Hirsch, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA)

Présidence de Mme Marie-Madeleine Dieulangard, vice-président -

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Bernard Chevassus-au-Louis, président du conseil d'administration, et de M. Martin Hirsch, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA).

M. Bernard Chevassus-au-Louis a d'abord présenté la composition du conseil d'administration de l'AFSSA, telle qu'elle résultait du décret du 26 mars 1999 et l'a jugée équilibrée. Il a indiqué que l'arrêté désignant les membres de ce conseil d'administration serait prochainement publié. Evoquant les comités d'experts extérieurs à l'Agence qui assisteraient cette institution dans sa mission d'évaluation des risques, il a estimé qu'il convenait de les faire fonctionner pendant une période d'environ six mois avant de faire des propositions de réorganisation. Il a affirmé que, certains de ces comités fonctionnant depuis plusieurs dizaines d'années, ils ne devaient pas être " inviables ".

M. Martin Hirsch a affirmé que l'AFSSA devait répondre à une triple attente, celle des pouvoirs publics en termes de fiabilité de l'expertise et d'aide à la décision, celle des consommateurs en termes de sécurité et d'information et celle des experts, car il n'y aura pas d'agence efficace sans experts compétents et prêts à s'y investir.

M. Martin Hirsch a d'abord exposé les principes juridiques et financiers de l'Agence, tels qu'ils étaient régis par le décret du 26 mars 1999 et par deux arrêtés interministériels, relatifs au budget pour 1999 et au contrôle financier. Il a souligné les éléments qui fondaient la spécificité de l'AFSSA, ses rôles d'expertise, de police sanitaire en matière de médicaments vétérinaires et d'appui technique à l'élaboration de certaines mesures. Il a indiqué que le décret d'organisation prévoyait les modalités de communication des avis de l'Agence aux ministres, ainsi que celles de leur publicité. Il a rappelé que le directeur général était amené à prendre des décisions au nom de l'Etat en matière de médicament vétérinaire et a souligné le double rôle du conseil scientifique en matière d'élaboration de la politique scientifique de l'établissement et en ce qui concerne l'activité d'évaluation des risques. Il a indiqué que l'Agence serait dotée de plusieurs directions, deux directeurs étant identifiés par le décret dans leurs attributions et leur mode de nomination. Il s'agit du directeur chargé de la santé et du bien-être des animaux et le directeur de l'Agence nationale du médicament vétérinaire.

M. Martin Hirsch a évoqué le budget de l'AFSSA qui s'élevait pour 1999 à 349,28 millions de francs, par l'addition du budget de l'ancien Centre national d'études vétérinaires et alimentaires (CNEVA), à hauteur de 309 millions de francs, et d'une mesure nouvelle, inscrite en loi de finances, de 40 millions de francs. Il a rappelé que la partie du budget correspondant à l'ancien CNEVA comprenait elle-même plusieurs sous-parties, le budget de l'Agence nationale du médicament vétérinaire s'élevant à 22 millions de francs et celui des laboratoires et de la direction générale à 286 millions de francs. Il a indiqué que la partie nouvelle du budget de l'AFSSA provenait d'une inscription en loi de finances sur les budgets des trois ministères de tutelle à hauteur de 11,7 millions de francs chacun, plus 4,95 millions de francs provenant du ministère de la santé au titre du transfert du laboratoire d'hydrologie. Evoquant la structure du budget, il a indiqué que les recettes et les dépenses se décomposaient en 280 millions de francs consacrés au fonctionnement et 69 millions de francs à l'investissement. Au sein de ce budget, la masse salariale constitue un poste relativement peu important (51 %) en raison du nombre d'emplois mis à disposition dont bénéficie l'Agence. Au total, l'Agence disposera de 794 emplois, dont 61 emplois nouveaux.

M. Martin Hirsch a ensuite décrit l'organisation provisoire de l'Agence. Elle repose sur deux directions principalement en charge des activités de recherche, la direction de la santé et du bien-être des animaux et la direction de l'hygiène des aliments et deux directions principalement en charge d'activités d'évaluation, la direction de l'agence nationale du médicament du vétérinaire et celle de l'évaluation des risques nutritionnels et sanitaires. Il a affirmé que des relations conventionnelles seraient établies avec la direction générale de la santé et la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes pour que soit assuré le secrétariat des commissions pendant la phase provisoire en attendant que l'Agence dispose de ses propres personnels à cette fin.

M. Martin Hirsch a enfin énuméré les chantiers prioritaires de l'Agence. Il s'agit notamment de rationaliser l'expertise en évitant les doublons, de renforcer l'expertise interne, de clarifier les règles de fonctionnement de l'AFSSA en fonction de ses missions, de permettre rapidement une ouverture vers les consommateurs, d'élaborer le règlement intérieur et de trouver des locaux complémentaires pour une installation définitive du siège de l'AFSSA à Maison-Alfort, conformément à la décision du Premier ministre.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard, président, a remercié M. Martin Hirsch pour son exposé très clair, rappelant que le schéma d'organisation de l'AFSSA n'était pas très simple et avait donné lieu à beaucoup de débats.

M. Claude Huriet a affirmé que la lecture du décret d'application des dispositions de la loi du 1er juillet 1998 concernant l'AFSSA donnait à penser que le long combat mené par le législateur pour créer une agence véritablement indépendante n'était pas achevé. Il a estimé que par rapport à l'esprit, voire à la lettre de la loi, le pouvoir réglementaire n'avait donné à l'AFSSA, ni la plénitude de ses missions, ni celle de ses moyens. Il a observé que des signes de mauvaise augure étaient perceptibles dans la définition des attributions mêmes du directeur général et ironisé sur la nomination, par le ministre, du directeur du bien-être des animaux et des membres des comités d'experts. Il a estimé que ces dispositions allaient à l'encontre de la volonté du législateur. Il a félicité M. Martin Hirsch pour son propos qui était tout à la fois dans la ligne de la volonté du législateur et respectueux des textes d'application.

Evoquant les propos de M. Bernard Chevassus-au-Louis selon lesquels les commissions et comités existants n'étaient pas " inviables ", il a affirmé que le législateur avait considéré qu'ils étaient trop nombreux, non coordonnés et qu'une sévère rationalisation était indispensable. Il a interrogé M. Martin Hirsch sur le financement ultérieur de l'Agence et s'est étonné que le décret d'organisation ne prévoit pas les modalités de mise à disposition de l'Agence des laboratoires des services de l'Etat.

M. Bernard Chevassus-au-Louis a affirmé qu'il fallait que l'expertise de l'Agence soit crédible et a évoqué la possibilité d'une accréditation des experts auprès de l'Agence et la nécessité de former les experts juniors.

M. Martin Hirsch a rappelé que l'AFSSA constituait un outil de sécurité sanitaire mais que son organisation comportait des spécificités liées à l'intégration du CNEVA. En effet, cette institution avait des missions plus larges que la seule sécurité sanitaire, dont il ne fallait pas compromettre la continuité. Il a affirmé la volonté des dirigeants de l'Agence d'assumer ses missions dans la plus grande clarté. Evoquant le financement de l'Agence, il a affirmé la nécessité d'examiner, au sein de la masse des subventions diverses dont bénéficiait l'ancien CNEVA, celles qui n'étaient plus compatibles avec ses nouvelles missions. Il a estimé qu'il était trop tôt pour dire s'il était nécessaire de créer de nouvelles taxes.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard, président, a manifesté le souhait de la commission de renouveler, un peu plus tard, l'audition des dirigeants de l'AFSSA, notamment en raison des inquiétudes suscitées par les dispositions du décret d'organisation. Elle a demandé à M. Martin Hirsch comment l'Agence pourrait intervenir dans le débat sur l'importation des viandes bovines en provenance des Etats-Unis.

M. Martin Hirsch a indiqué que l'Agence aurait à conduire des évaluations dans ce domaine, qui entrait explicitement dans son champ de compétence.

Retraites - Audition de M. Jean-Michel Charpin, commissaire général du Plan, sur son rapport au Premier ministre sur les retraites

Présidence de M. Jean Delaneau, président - Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Michel Charpin, commissaire général du Plan, sur son rapport au Premier ministre sur les retraites.

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que la commission avait déjà entendu M. Jean-Michel Charpin le 16 décembre 1998 et qu'elle avait souhaité pouvoir l'auditionner à nouveau après la remise de son rapport au Premier ministre le 29 avril dernier.

M. Jean-Michel Charpin a indiqué que le Premier ministre lui avait confié, à la fin du mois de mai 1998, la mission d'établir un diagnostic sur l'avenir des retraites aussi partagé que possible par les partenaires sociaux et les gestionnaires des différents régimes. Il a souligné que le rapport qui résultait de cette mission présentait deux caractéristiques originales par rapport aux travaux qui l'avaient précédé : d'une part, le diagnostic avait été établi en concertation avec les partenaires sociaux et les régimes de retraite concernés, d'autre part, il portait sur la plupart des régimes et traitait également des compensations entre régimes.

M. Jean-Michel Charpin a rappelé qu'il avait constitué une commission de concertation réunissant les sept ministères concernés, les partenaires sociaux, les gestionnaires des différents régimes de retraite et les représentants du comité national des retraités et des personnes âgées (CNRPA). Cette commission de concertation s'était réunie onze fois entre octobre 1998 et mars 1999 : dix réunions avaient été consacrées à l'étude des différents thèmes et la dernière réunion, en date du 25 mars 1999, avait permis de présenter aux participants le rapport établi par le Commissariat général du Plan. Il a souligné que cette démarche se distinguait de celles qui avaient prévalu lors de la rédaction du Livre blanc sur les retraites en 1991 et du rapport sur les perspectives à long terme des retraites de 1995 : à l'époque, les rapports avaient été élaborés par les experts puis rendus publics.

M. Jean-Michel Charpin a jugé que l'ambiance au sein de la commission de concertation avait été studieuse, coopérative et interactive, dans la mesure où le Commissariat général du Plan s'était efforcé de répondre aux différentes demandes de travaux complémentaires exprimées par les partenaires sociaux. Le rapport final avait cependant été rédigé sous la seule responsabilité du Commissariat général du Plan. Au vu de ce rapport, les partenaires sociaux avaient fait part de leurs observations dans des contributions écrites annexées au rapport.

Evoquant le champ d'étude très large couvert par le rapport, M. Jean-Michel Charpin a précisé qu'il était nécessaire de connaître les caractéristiques détaillées de chaque régime avant de dresser un bilan global de la situation des retraites. Il a souligné que le Commissariat général du Plan avait entendu partager toutes les informations disponibles avec les directions techniques des régimes de retraite qui avaient été étroitement associées à ses travaux.

M. Jean-Michel Charpin a présenté les principales conclusions de son rapport. Il a indiqué que ce dernier faisait le constat du succès du système par répartition qui avait permis au niveau de vie des retraités de rejoindre celui des actifs et qui avait contribué à faire diminuer très sensiblement les phénomènes de pauvreté des personnes âgées. L'allongement de la durée de la vie et l'arrivée à l'âge de la retraite, à partir de 2006, de la génération du baby-boom allaient cependant fragiliser l'équilibre économique de notre système de retraite. Entre 1998 et 2040, la population âgée de plus de 60 ans allait augmenter de 10 millions de personnes, pour atteindre 22 millions de personnes, tandis que la population des moins de 20 ans diminuerait de plus d'un million.

M. Jean-Michel Charpin a reconnu que 2040 pouvait paraître un horizon un peu lointain pour des projections financières ; il a cependant fait valoir que certains pays, tels que les Etats-Unis ou l'Italie, formulaient des prévisions à des horizons de 50 ans, voire de 70 ans. Il a également souligné que le choix de l'horizon 2040 avait permis de mieux distinguer les évolutions de certains régimes de retraite après 2015 et de démontrer que la croissance des besoins de financement pour les retraites s'apparentait davantage à une montée vers un plateau qu'au passage d'une bosse.

Reconnaissant que des projections à une échéance aussi lointaine étaient toujours incertaines, M. Jean-Michel Charpin a souligné que le rapport prévoyait précisément la création d'un dispositif de pilotage permanent qui permettrait de réévaluer régulièrement les projections et de procéder aux ajustements qui paraîtraient nécessaires.

M. Jean-Michel Charpin a précisé que les projections étaient effectuées sur la base de trois scénarios d'évolution du chômage avec respectivement trois taux de chômage : 9 %, 6 % et 3 %, ce dernier scénario ayant été introduit à la demande des partenaires sociaux. Il a observé que ces différents scénarios démontraient que la diminution du chômage améliorerait les perspectives financières sans cependant supprimer les déficits.

Evoquant le chapitre de son rapport consacré aux comparaisons entre régimes, M. Jean-Michel Charpin a considéré que cet exercice soulevait de nombreuses difficultés méthodologiques et nécessitait à l'évidence un approfondissement des outils statistiques disponibles. Il a souligné que si les retraites étaient aujourd'hui comparables entre le public et le privé, à salaires identiques, l'écart allait se creuser dans les prochaines années entre les assurés des régimes qui avaient l'objet de réformes en 1993 et les assurés des régimes spéciaux.

Après avoir indiqué que le rapport évoquait la façon dont les réformes des retraites avaient été mises en place dans les pays étrangers, M. Jean-Michel Charpin a constaté qu'une telle réforme n'était simple nulle part, et que les difficultés que rencontrait la France à réformer son système de retraite ne constituaient pas une exception. Il a également observé que les tentatives de réforme brutale avaient partout échoué.

Après avoir précisé qu'elles ne constituaient pas un projet de réforme bouclé, M. Jean-Michel Charpin a énuméré les propositions formulées dans son rapport.

Evoquant l'allongement à 170 trimestres, soit 42 années et demie, à l'horizon 2019, de la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier du taux plein, M. Jean-Michel Charpin a expliqué qu'une telle réforme aurait un effet progressif et ne pèserait de façon significative qu'à partir des années 2010, à un moment où la situation du marché du travail se serait vraisemblablement améliorée. Il a souligné que cette réforme devait toutefois laisser une possibilité pour les personnes concernées d'opérer un arbitrage individuel entre niveau de la retraite annuelle versée et durée d'activité. Ceci supposait la neutralité actuarielle, pour départ anticipé, des abattements sur les taux de pension. Ces abattements ne devaient pas pénaliser de façon indue, comme c'était aujourd'hui le cas pour les salariés du secteur privé, les personnes qui souhaiteraient partir avant d'avoir acquis le nombre de trimestres nécessaire pour bénéficier du taux plein.

M. Jean-Michel Charpin a indiqué que le rapport étudiait également la création d'un fonds de réserve pour les retraites en examinant quelles pouvaient être les finalités et les modalités de fonctionnement et de gestion d'un tel fonds. Estimant qu'il était déjà très tard pour constituer un fonds de réserve, puisque les premières difficultés financières des régimes de retraite se manifesteraient dès 2006, il a considéré que, seule, la création d'un fonds transitoire, destiné à lisser la hausse prévue des taux de cotisation, était aujourd'hui envisageable. Dans ce cas, les sommes accumulées, qui devraient s'élever à au moins trois points du produit intérieur brut (PIB), avaient vocation à être consommées progressivement, le fonds s'épuisant à terme.

Après avoir précisé que le rapport évoquait également les possibilités d'élargissement de l'assiette du financement des retraites et les questions d'indexation des pensions et des salaires portés au compte, M. Jean-Michel Charpin a conclu en formulant le souhait que ce diagnostic concerté puisse servir utilement aux réflexions ultérieures.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour l'assurance vieillesse des lois de financement de la sécurité sociale, a rendu hommage au travail accompli par le Commissariat général du Plan. Il a interrogé M. Jean-Michel Charpin sur la méthode suivie et sur le contenu du rapport.

Il a souhaité savoir dans quelle mesure et sur quels aspects ce diagnostic était effectivement partagé. Il s'est enquis des principales modifications apportées, à la demande des partenaires sociaux, à la version initiale du rapport et a demandé à M. Jean-Michel Charpin si la tonalité des contributions écrites des partenaires sociaux l'avait surpris.

M. Alain Vasselle s'est demandé si le retard pris dans la remise du rapport pouvait être interprété comme le signe d'une volonté du Gouvernement de se démarquer de son contenu. Il a souhaité savoir si le Commissariat général du Plan participerait à la nouvelle phase de concertation que venait d'annoncer le Premier ministre.

M. Alain Vasselle a relevé que le rapport étudiait, parmi les pistes de réformes envisagées, la constitution d'un fonds de réserve pour les retraites, sans toutefois se prononcer sur la façon dont ce fonds pourrait être alimenté. Il a demandé à M. Jean-Michel Charpin si le Commissariat général du Plan avait réfléchi sur ce point. Il s'est inquiété des conséquences du passage de la proratisation de la pension de 1/150e à 1/170e pour les personnes qui n'auraient pas atteint les 170 trimestres de cotisations.

M. Alain Vasselle a demandé pourquoi le commissariat général du Plan n'avait pas étudié la création d'un dispositif d'épargne retraite de type " fonds de pension " et a souhaité connaître le sentiment de M. Jean-Michel Charpin sur les récentes propositions du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) sur les retraites, notamment l'allongement de la durée de cotisation à 45 ans.

En réponse à M. Alain Vasselle, M. Jean-Michel Charpin a estimé que le diagnostic était concerté et qu'il s'était contenté de prendre acte des contributions des partenaires sociaux dont certains partageaient cependant les analyses du rapport. Il a souligné qu'il s'était fait peu d'illusions quant à la possibilité d'établir un diagnostic véritablement partagé. Il a rappelé à cet égard que M. Marc Blondel, secrétaire général de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO), lui avait adressé, au début du mois d'octobre 1998, une lettre ouverte dans laquelle il contestait l'objectif d'aboutir à un diagnostic partagé.

M. Jean-Michel Charpin a rappelé que les partenaires sociaux avaient apporté, sur tous les thèmes abordés, de nombreuses modifications aux travaux menés par le Commissariat général du Plan. Il a cité l'exemple du scénario à 3 % de taux de chômage qui avait été intégré dans le rapport à la demande des partenaires sociaux. Il a expliqué qu'une première version du rapport avait été communiquée aux partenaires sociaux lors de la réunion du 25 mars dernier et que ces derniers avaient ensuite fait part de propositions d'amendements compatibles avec la logique du rapport. Ces amendements avaient été presque tous intégrés dans la version finale du rapport.

M. Jean-Michel Charpin a indiqué qu'il n'avait pas été surpris par la teneur des contributions écrites transmises par les partenaires sociaux, même si certaines pouvaient refléter le décalage entre les positions des délégations participant à la commission de concertation et les positions des instances de direction des organisations syndicales.

Il a estimé que le léger retard pris dans la remise du rapport tenait avant tout aux contraintes de calendrier et aux répercussions d'une actualité internationale très chargée. Rappelant que le Premier ministre avait souhaité qu'il lui remette en mains propres le rapport et qu'il avait annoncé, dès le lendemain, dans la presse, la suite qu'il entendait lui donner, M. Jean-Michel Charpin a précisé que c'était désormais le Gouvernement qui piloterait la nouvelle phase de concertation.

Evoquant les différentes possibilités de réforme des retraites, M. Jean-Michel Charpin a expliqué que si certaines pouvaient être décidées à tout moment -une hausse des cotisations par exemple-, d'autres nécessitaient du temps et devaient être engagées sans délai. Il a souligné que la constitution d'un fonds de réserve devait par exemple se faire le plus rapidement possible, avant que la situation financière des régimes de retraite ne se dégrade.

M. Jean-Michel Charpin a souligné que le rapport proposait explicitement que toutes les personnes puissent bénéficier d'une pension à taux plein à l'âge de 65 ans, quelle que soit leur durée effective de cotisation.

Evoquant la création de fonds de pension, il a noté que cette question ne figurait pas dans le champ d'étude du rapport. Il a expliqué que les régimes de retraite auraient à l'horizon 2040 un besoin de financement équivalant à quatre points du PIB et que les fonds de pension, qui créaient des droits nouveaux autofinancés, n'apportaient aucune solution à ce problème, contrairement au fonds de réserve dont l'objet était précisément de financer les régimes de retraite par répartition. Il a considéré que les problématiques des fonds de pension et du fonds de réserve étaient radicalement différentes, même si les supports d'investissement de ces fonds pouvaient s'avérer identiques.

Estimant qu'il n'avait pas à juger de la pertinence des propositions des partenaires sociaux, M. Jean-Michel Charpin a souhaité ne pas commenter les propositions du MEDEF sur les retraites.

M. Jean Chérioux s'est interrogé sur les modalités d'alimentation du fonds de réserve pour les retraites. Il s'est demandé par ailleurs s'il n'était pas possible de convertir les sommes actuellement collectées au titre de l'épargne salariale en une forme d'épargne retraite.

M. Guy Fischer a rappelé que les propositions du MEDEF avaient provoqué un tollé parmi les organisations syndicales. Il a souligné que son groupe avait fait part d'un certain nombre d'interrogations lors du débat sur la création du fonds de réserve pour les retraites, à l'occasion de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Il s'est interrogé sur la notion d'écarts entre régimes du secteur privé et régimes spéciaux et a souhaité savoir selon quelles modalités pourrait s'opérer le recours à la capitalisation.

Après avoir qualifié de travail sérieux et utile le rapport de M. Jean-Michel Charpin, M. Roland Huguet a souligné les difficultés que comportait toute prévision à 10 ou 20 ans. Il s'est demandé ce qu'il adviendrait lorsque les sommes accumulées au sein du fonds de réserve se seraient épuisées.

M. Charles Descours a considéré que 2040 ne constituait pas un horizon très lointain. Il a jugé que les grandes tendances de l'évolution des retraites étaient déjà connues depuis le Livre blanc de 1991 et le rapport Briet de 1995. Il s'est dit convaincu qu'il fallait réformer notre système de retraite par répartition si l'on souhaitait le sauver. Il s'est inquiété du risque que le Gouvernement ne prenne finalement aucune décision à l'issue de la nouvelle phase de concertation.

Mme Nicole Borvo a souligné les nombreuses incertitudes que comportait le rapport Charpin. Elle s'est étonnée que le rapport puisse proposer une augmentation de la durée de cotisation, alors même que le taux d'activité des plus de 50 ans était, dans notre pays, le plus faible d'Europe. Elle a regretté que le rapport ne comporte pas d'étude approfondie sur la possibilité d'un élargissement à la valeur ajoutée de l'assiette de la cotisation vieillesse.

M. Bernard Seillier a souligné les mérites de ce rapport. Il a considéré qu'il n'était pas choquant que la réglementation des retraites prévoie des avantages supplémentaires pour les familles, dans la mesure où celles-ci assuraient le renouvellement des générations et donc, la survie du système par répartition.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Michel Charpin a considéré que la question de l'alimentation du fonds de réserve pour les retraites constituait essentiellement un problème politique et ne nécessitait pas d'études techniques spécifiques. Il a souligné que la France connaissait un taux d'épargne élevé et qu'il n'était pas évident que la création de fonds de pension augmente encore ce niveau d'épargne.

M. Jean-Michel Charpin a fait observer que les régimes spéciaux étaient également concernés par le choc démographique des prochaines années et que l'écart entre ces régimes et les régimes ayant été réformés en 1993 allait se creuser d'année en année. Il a jugé que toute réforme des retraites devrait également concerner les régimes spéciaux.

M. Jean-Michel Charpin a convenu qu'il fallait être modeste en matière de prévision. Il a ajouté que c'était pour cette raison que le rapport proposait l'institution d'un dispositif de pilotage de la réforme des retraites à même de réévaluer périodiquement les estimations. Il a cependant précisé que tout n'était pas incertain et qu'une bonne part des données démographiques était déjà parfaitement connue. Après avoir rappelé que de nombreux pays formulaient des prévisions à long terme, il s'est demandé pourquoi la France serait incapable de se livrer au même exercice.

M. Jean-Michel Charpin a affirmé que toute mesure touchant à la durée de cotisation devait être très étalée dans le temps afin d'éviter de trop fortes inégalités entre les générations. Il a considéré que la proposition formulée dans le rapport devait s'accompagner d'un effort particulier en faveur du maintien dans l'emploi des personnes âgées de plus de 55 ans. Constatant que la France présentait le taux d'activité des 55-65 ans le plus bas des pays industrialisés, il a jugé que cette situation ne pouvait s'expliquer par l'émergence des nouvelles technologies, qui n'était en rien une spécificité française.

M. Jean-Michel Charpin a considéré que l'extension de l'assiette de la cotisation vieillesse à la valeur ajoutée avait déjà fait l'objet de multiples études par le passé et qu'il n'apparaissait pas nécessaire de lui consacrer une étude technique supplémentaire. Il a ajouté que cette question relevait désormais d'une décision politique.

Après avoir relevé que les avantages familiaux en matière de retraite représentaient un montant considérable de 73 milliards de francs par an, M. Jean-Michel Charpin s'est interrogé sur le caractère incitatif de ces avantages et sur la possibilité d'une prise en charge de ces dépenses par la branche famille. Il a considéré que ce sujet méritait à l'évidence un véritable débat.

Mission d'information sur les retraites - Communication

A l'issue de l'audition de M. Jean-Michel Charpin, M. Jean Delaneau, président, a émis le souhait, approuvé par la commission, que M. Alain Vasselle, rapporteur du volet assurance vieillesse des lois de financement de la sécurité sociale, puisse poursuivre le travail entamé par la commission sur la question fondamentale des retraites. Il lui a semblé en effet nécessaire qu'à côté de la réflexion des experts et de la concertation avec les partenaires sociaux à laquelle appelle le Gouvernement, le Parlement puisse procéder à ses propres investigations.

Il a souhaité en conséquence en accord avec le rapporteur, que ce dernier puisse présenter à la commission, avant la fin de la session, un projet de rapport mesurant notamment les apports de l'étude du commissariat général du plan au regard des travaux connus depuis une dizaine d'années, appréciant le caractère partagé ou simplement concerté du diagnostic réalisé mais également les réactions des partenaires sociaux aux propositions formulées. Il a estimé que ce travail contribuerait en amont à la réflexion de la commission sur la question des retraites que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ne saurait passer sous silence.

Santé - Création de la couverture maladie universelle - Communication et nomination de rapporteurs

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que lors de sa réunion du 17 mars 1999, la commission avait désigné M. Charles Descours comme rapporteur du projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle alors en instance d'examen à l'Assemblée nationale. Il a proposé à la commission de confirmer cette nomination dès lors que le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale avait été transmis au Sénat.

M. Charles Descours a fait observer que l'Assemblée nationale avait ajouté, aux six articles que comportait initialement le volet " diverses mesures d'ordre sanitaire " du projet de loi (titre IV), pas moins de 23 articles additionnels dont certains à l'initiative du Gouvernement. Il a émis les plus grandes réserves sur cette procédure et souhaité qu'un second rapporteur puisse être nommé.

Considérant qu'il avait déjà procédé à un large programme d'auditions sur certaines des mesures figurant au titre IV, M. Charles Descours a suggéré que M. Claude Huriet puisse rapporter conjointement avec lui les diverses dispositions d'ordre sanitaire du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale.

M. Jean Delaneau, président, a fait observer que M. Claude Huriet avait rapporté pour la commission les volets santé publique de plusieurs textes portant diverses mesures d'ordre social et a constaté à son tour que la porte ouverte par le Gouvernement dans le texte initial se traduisait, dans le texte transmis au Sénat, par l'adjonction au projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle, d'un second projet de loi portant diverses mesures d'ordre sanitaire.

La commission a désigné M. Charles Descours (titres préliminaire, I, II, III, IV et V) et MM. Claude Huriet et Charles Descours (titre IV) comme rapporteurs du projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle.