Mercredi 19 décembre 2007

- Présidence de Mme Gisèle Gautier, présidente. -

Orientation et insertion professionnelles - Audition de Mme Joëlle Voisin, chef du service des droits des femmes et de l'égalité au ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité

La délégation a procédé à l'audition de Mme Joëlle Voisin, chef du service des droits des femmes et de l'égalité au ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité, accompagnée de Mme Catherine Laret-Bedel, chef du bureau de l'égalité professionnelle.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a présenté l'intervenante en relevant que l'organisation administrative en charge des droits des femmes ne constituait pas une direction, mais un service placé sous l'autorité du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, et de la secrétaire d'Etat chargée de la solidarité.

Récapitulant les enjeux du thème d'étude choisi par la délégation, elle a insisté sur la recherche de solutions concrètes de nature à améliorer l'orientation, à la fois dans un souci de rééquilibrage entre les sexes et d'adaptation aux besoins de l'économie.

Mme Joëlle Voisin a rappelé que fondamentalement, les choix d'orientation étaient le reflet des représentations des rôles sociaux traditionnellement assignés à chacun des deux sexes et que la transformation de ces comportements constituait une tâche de longue haleine. Elle a précisé qu'en France, les femmes demeuraient cantonnées dans 10 familles de métiers, sur un total de 86, et que ce constat était largement partagé dans les différents Etats de l'Union européenne.

Soulignant la nécessité d'accélérer et d'intensifier les progrès d'ores et déjà accomplis dans le rééquilibrage entre les genres, elle a estimé que la formation initiale constituait un atout essentiel en faveur de l'égalité des chances, les difficultés d'insertion professionnelle des jeunes femmes résultant en effet largement de leur orientation scolaire initiale. Elle a rappelé les étapes de la démarche interministérielle mise en oeuvre depuis 1984 : tout d'abord, deux conventions bilatérales ont été signées dès 1984 et 1989 entre le ministère de l'éducation nationale et le service des droits des femmes pour favoriser la diversification des choix professionnels des jeunes filles ; par la suite, a-t-elle indiqué, une action interministérielle plus ambitieuse a été entreprise dans le cadre d'une troisième convention signée en 2000, non seulement par la ministre de l'emploi et de la solidarité et le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, mais aussi par le ministre de l'agriculture et de la pêche, la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire et la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle, afin de travailler à la modification des stéréotypes de sexe influant sur les choix d'orientation et à la promotion d'une éducation fondée sur le respect mutuel.

Elle a fait observer que, dans sa version renouvelée du 29 juin 2006, la convention pour l'égalité des chances entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes, dans le système éducatif, élargissait cet engagement interministériel à huit ministères. Elle a précisé les trois axes de travail de cette convention, pour la période 2006-2011 : améliorer l'orientation scolaire et professionnelle des filles et des garçons pour une meilleure insertion dans l'emploi, assurer auprès des jeunes une éducation à l'égalité entre les sexes et intégrer l'égalité entre les sexes dans les pratiques professionnelles et pédagogiques des acteurs et actrices du système éducatif. Elle a souligné que cette convention nationale avait vocation à être déclinée localement pour formaliser les partenariats et définir des objectifs prioritaires adaptés aux territoires, ce qui est déjà fait dans certaines régions.

Puis Mme Joëlle Voisin a distingué les actions spécifiques et les actions intégrées menées par le service des droits des femmes et de l'égalité (SDFE) pour contribuer à diversifier l'orientation des filles et des garçons, en présentant tout d'abord les différents prix qui encouragent les jeunes filles à s'investir dans des filières dans lesquelles elles sont minoritaires.

Elle a rappelé que son service organisait chaque année le Prix de la vocation scientifique et technique des filles (PVST) à l'intention des élèves de terminale, qui font le choix de braver les préjugés en s'orientant vers une filière scientifique ou technologique de l'enseignement supérieur comptant moins de 40 % de filles : ce prix, créé en 1991, a été revalorisé en 2007, atteignant désormais un montant de 1 000 €, et le nombre de récompenses passera de 600 en 2007 à 650 en 2008. L'objectif de ce prix, a-t-elle précisé, est de renforcer l'orientation des jeunes filles vers des secteurs professionnels porteurs de débouchés, ces distinctions étant attribuées par le préfet de région à la suite de l'examen des candidatures par des jurys régionaux, au regard, en particulier, des facteurs essentiels que constituent la motivation des jeunes filles, ainsi que leur mérite.

Elle a observé que le PVST avait des effets démultiplicateurs, d'une part, grâce à la mobilisation à l'échelon local de financements extérieurs, notamment des conseils régionaux, prolongeant l'effort de l'Etat, et d'autre part, par l'organisation, autour du PVST, de séances d'information en classes sur l'orientation des jeunes filles. Elle a également souligné que l'organisation du Prix donnait lieu à un important partenariat avec les rectorats et les établissements scolaires, et s'accompagnait, en général, d'une forte médiatisation, essentielle pour faire évoluer les mentalités. S'agissant du devenir des lauréates, elle a noté que, selon certaines études, 94 % des jeunes filles avaient réalisé leur projet professionnel initial, et évoqué la valorisation, dans les lycées, des parcours exemplaires d'anciennes lauréates, ainsi que la mise en place de réseaux grâce à la diffusion d'un annuaire des lauréates.

Puis elle a présenté le Prix Irène Joliot-Curie, créé en 2001 par le ministère de la recherche, et destiné à promouvoir la place des femmes dans la recherche et la technologie. Elle a précisé qu'en 2006, ce Prix comportait trois catégories - « Parcours femme entreprise », « Jeune femme scientifique » et « Femme scientifique de l'année » - dotées chacune de 10.000 € et qu'il était, depuis 2004, organisé avec la Fondation d'entreprise EADS pour la recherche, afin d'ouvrir le plus largement possible l'appel à candidatures, tant dans le secteur de la recherche publique que dans celui de la recherche privée.

Elle a également évoqué le « Prix Excellencia », initiative réunissant différents partenaires, dont en particulier le service des droits des femmes et de l'égalité, le ministère de la recherche et les associations « Femmes et sciences » et « Femmes ingénieurs », dont l'objectif est de promouvoir la réussite de femmes impliquées dans la création, le développement ou la mise en application des nouvelles technologies, afin de valoriser des filières de formation et des métiers vers lesquels encore trop peu de jeunes filles s'orientent.

Mme Joëlle Voisin a ensuite estimé regrettable que le développement, depuis plusieurs années, de l'orientation professionnelle par la voie de l'apprentissage, ne s'accompagne pas d'une amélioration significative de l'accès des jeunes filles à ce mode de formation : aussi, dans plusieurs régions, les déléguées régionales aux droits des femmes et à l'égalité ont-elles mis en place, en partenariat avec les conseils régionaux, des prix destinés à encourager les jeunes filles à s'y diriger.

Prenant l'exemple de l'Alsace, elle a noté que 33 % des apprentis y étaient des jeunes filles, mais qu'elles s'orientaient prioritairement vers le secteur tertiaire (vente, coiffure, esthétique, hôtellerie, secrétariat, travail social, soins et services aux personnes), alors que l'insertion professionnelle était moins facile pour les diplômé(e)s de niveau CAP-BEP dans ces secteurs. Afin d'ouvrir davantage aux jeunes filles l'éventail des métiers de l'industrie et de l'artisanat, elle a souligné que le conseil régional et la délégation régionale aux droits des femmes et à l'égalité, avec le soutien de l'entreprise Electricité de France, avaient mis en place le Prix de la diversification de l'apprentissage féminin, récompensant celles qui se sont engagées dans un parcours de formation original dans des métiers où les femmes sont peu présentes : 16 prix de 800 € ont ainsi été décernés en 2006 par un jury régional à celles qui ont choisi la voie de l'apprentissage, du CAP au diplôme d'ingénieur, dans des métiers d'habitude réservés aux garçons (boulangère, paysagiste, peintre, métallière, mécanicienne automobile, ingénieure ou technicienne dans l'industrie ...).

Puis Mme Joëlle Voisin a brossé un panorama de diverses autres actions destinées à faciliter l'accès des femmes à des métiers peu féminisés, en évoquant tout d'abord les contrats pour la mixité des emplois qui, encore mal connus bien que mis en place en 1987, permettent de financer, dans des entreprises de moins de 600 salariés, des actions de formation, l'aménagement de postes de travail ou l'aménagement de locaux (vestiaires et toilettes). Elle a regretté que trop peu de ces contrats aient été conclus (32 en 2005 et 44 en 2006), tout en expliquant que les crédits qui y étaient consacrés constituaient jusqu'à présent une « variable d'ajustement budgétaire ». En 2007, a-t-elle précisé, il devrait y en avoir une centaine, car des consignes ont été données aux déléguées régionales aux droits des femmes pour que les crédits soient prioritairement utilisés à cette fin, et un objectif de 130 contrats a été fixé pour 2008.

Mme Joëlle Voisin a, dans un second temps, présenté les grandes lignes de « l'approche intégrée » de son service, dont le but est d'amener l'ensemble des acteurs, institutions, branches, entreprises et système éducatif, à intégrer dans leurs pratiques la dimension de l'égalité entre les filles et les garçons et à combattre les stéréotypes de sexes dans la représentation sociale des métiers.

Au titre de la prise en compte de l'égalité par les acteurs institutionnels, au niveau national, elle a par exemple indiqué que les documents de l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (ONISEP) intégraient désormais systématiquement une mixité des portraits et des témoignages.

Au niveau des territoires, Mme Joëlle Voisin a souligné que les déléguées régionales aux droits des femmes s'impliquaient fortement pour mobiliser leurs partenaires et les amener à s'engager sur des actions permettant l'accès des filles à des formations et des métiers peu ouverts aux femmes : elle a précisé par exemple que le rectorat de Nantes et l'ONISEP avaient ainsi réalisé en avril 2007 une mallette pédagogique « mixité égalité », qui est adressée à tous les établissements scolaires de l'académie, aux corps d'inspection et aux centres d'information et d'orientation (CIO), et contient des productions multimédia traitant de la construction des stéréotypes sexués, de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la sphère domestique et professionnelle, de la mixité des métiers et de la diversification des choix d'orientation professionnelle des élèves, ainsi que de la place des femmes dans le domaine des sciences et techniques et dans l'histoire.

Elle a ensuite évoqué un protocole régional signé en Basse-Normandie, pour la période 2006-2010, par de multiples acteurs tels que le préfet de région, les responsables du service public de l'emploi et ceux des organisations patronales du secteur « transport et logistique », pour favoriser l'accès des femmes aux métiers de cette filière.

Elle a également signalé qu'en Bourgogne, un travail partenarial avait permis la mise en place de quatre « carrefours des carrières au féminin », qui ont reçu entre 400 et 1 500 visiteurs, et parmi eux, un tiers de parents, dont elle a souligné le rôle essentiel en matière d'orientation. Elle a en outre illustré son propos en citant les actions partenariales conduites en Bretagne, avec le concept « 100 femmes 100 métiers » dont l'objectif est l'élargissement des choix professionnels et la diversification des emplois féminins, en Franche-Comté, avec la mise en place de forums des métiers avec le conseil régional, en Languedoc-Roussillon, avec la réalisation d'une « université d'automne » avec les acteurs du monde économique et du monde de l'éducation, et en Picardie, avec un partenariat développé avec le conseil régional et les représentants des organisations professionnelles des métiers de l'industrie et du bâtiment pour faciliter l'accès des jeunes filles à l'apprentissage.

S'agissant de la prise en compte de l'égalité par les branches professionnelles et les entreprises, Mme Joëlle Voisin a rappelé qu'en application des lois sur la formation professionnelle et l'apprentissage, depuis 1972, les organisations professionnelles avaient signé, avec le ministère de l'éducation nationale, 33 conventions-cadres de coopération. Préconisant leur généralisation, elle a observé que ces conventions devaient par ailleurs entraîner, comme le prévoit l'accord national interprofessionnel du 1er mars 2004 relatif à la mixité et à l'égalité entre les hommes et les femmes, le développement d'actions puissantes de communication sur l'image et la représentation des métiers à destination des enseignants, des élèves et des familles. Se félicitant de l'implication accrue des branches et des entreprises dans ce domaine, elle a cité, à titre d'exemple, la campagne de communication nationale « IndustriELLE » initiée en 2004 par l'Union des industries métallurgiques et minières (UIMM), qui a réuni 12 000 jeunes filles et femmes à Paris en 2005 afin de faire évoluer leur regard sur le monde de l'industrie et de les aider à s'y projeter, à travers les témoignages de professionnelles. Elle a précisé que l'accord du 19 juin 2007 relatif à l'égalité professionnelle signé entre l'UIMM et les organisations syndicales prévoyait la poursuite du travail engagé pour renforcer l'attractivité des métiers industriels auprès des jeunes filles.

Elle a également mentionné l'initiative de la Confédération de l'Artisanat et des petites Entreprises du Bâtiment (CAPEB) qui a développé en 2006, avec le soutien financier du service des droits des femmes et de l'égalité, la première édition d'un concours national « Conjuguez les métiers du bâtiment au féminin ! », destiné à sensibiliser les jeunes en classe de 3e sur l'évolution de ces métiers et sur la possibilité pour les jeunes filles d'intégrer un secteur économique où les opportunités professionnelles sont nombreuses.

Abordant ensuite la prise en compte de l'égalité par les acteurs du système éducatif, Mme Joëlle Voisin a souligné qu'il était impératif de se soucier conjointement de l'orientation des filles et de celle des garçons, tout autant concernés par les représentations stéréotypées : aujourd'hui, a-t-elle observé, on trouve encore étrange qu'une jeune fille se destine à un métier de plombière, de charpentière ou d'ingénieure en mécanique ou aéronautique, mais de la même manière on s'étonne qu'un garçon devienne sage-femme, esthéticien ou éducateur de jeunes enfants et, sans toujours en être conscients, les parents, tout comme les enseignants, les médias et la société tout entière véhiculent des préjugés.

Mme Joëlle Voisin a poursuivi son analyse en soulignant que faire évoluer l'orientation, c'était surtout faire évoluer les mentalités, ce qui nécessite de porter une attention particulière à la formation des enseignants et des professionnels de l'orientation : à cet égard, elle a pris l'exemple du travail effectué par la délégation aux droits des femmes de la région Languedoc-Roussillon, qui participe à une formation du personnel enseignant dans le cadre d'un module obligatoire intitulé « Citoyenneté, laïcité, fait religieux, genre et mixité », d'une durée de six heures, inscrit, depuis 2004, dans le plan de formation initiale de l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) de Montpellier. Elle a ajouté que, selon une enquête de la direction de l'enseignement scolaire, en 2005, 18 IUFM sur 31 avaient introduit la question de l'égalité dans leur cursus, dont 7 sous la forme de modules obligatoires, avant de préconiser la sensibilisation à cette question de l'ensemble des futurs enseignants, ce qui constitue un des axes de la convention interministérielle signée avec le ministère de l'éducation nationale, ainsi que d'une recommandation adoptée par le comité des ministres du Conseil de l'Europe le 10 octobre 2007.

En définitive, soulignant le travail déjà accompli depuis vingt ans, au niveau national et dans de nombreuses régions, pour diversifier l'orientation professionnelle des filles, Mme Joëlle Voisin a estimé nécessaire de « passer à une vitesse supérieure » dans le combat contre des représentations fortement ancrées dans les esprits. Elle a rappelé que M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, et Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la solidarité, en accord avec M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, et Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, avaient annoncé, lors de la Conférence sur l'égalité professionnelle et salariale entre les femmes et les hommes du 26 novembre 2007, que la convention renouvelée en juin 2006 allait être réactivée et qu'un nouveau comité de pilotage serait installé dès le mois de janvier 2008, ce qui devrait permettre d'enclencher un programme précis, pragmatique et efficace. En conclusion, elle a de nouveau souligné que l'orientation était l'un des éléments clés pour faire progresser l'égalité professionnelle et l'égalité salariale entre les hommes et les femmes.

Un débat a suivi l'exposé de Mme Joëlle Voisin.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a jugé très intéressantes les informations délivrées par Mme Joëlle Voisin, notant que si certaines d'entre elles confirmaient des réalités déjà connues de la délégation, d'autres apportaient des éléments nouveaux, notamment sur les initiatives conduites à l'échelon départemental ou régional.

Mme Brigitte Bout s'est également déclarée très intéressée par les indications apportées par Mme Joëlle Voisin sur les conventions-cadres de coopération signées par les organisations professionnelles avec le ministère de l'éducation nationale, ou encore sur les modules d'enseignement relatif à l'égalité introduits par certains IUFM dans leur cursus. Revenant sur les résultats de l'enquête qui a montré que plus de la moitié des emplois occupés par les femmes étaient concentrés dans 10 des 86 familles professionnelles répertoriées, elle a jugé, partant du cas concret de l'école d'ingénieur dont elle est elle-même issue, que la proportion des étudiantes n'avait guère progressé, ou du moins, pas dans les proportions que l'on aurait pu espérer. Elle a certes relevé que l'on avait assisté à une féminisation récente de certains métiers, et qu'ainsi, l'on rencontrait aujourd'hui de plus en plus de femmes conductrices de bus, ou même de camions. Elle s'est cependant interrogée sur la disproportion que l'on constate souvent en pratique entre le surcoût que représente, pour les collectivités publiques, la construction de casernes de pompiers ou de gendarmes conformes aux normes nécessaires à l'accueil de personnel féminin, et la faible féminisation des équipes locales.

S'appuyant sur une plaquette éditée par son administration, qui recense les données chiffrées disponibles sur l'accès des hommes et des femmes aux différentes professions, Mme Joëlle Voisin a estimé que des améliorations sensibles avaient été enregistrées dans certains métiers au cours des récentes années, citant notamment le secteur de la police, et notant que certaines voix s'étaient d'ailleurs élevées pour juger excessive cette féminisation. Elle a cependant convenu que la faible proportion des femmes dans les filières scientifiques restait un phénomène d'autant plus choquant que les filles représentent une proportion non négligeable des élèves inscrits en section scientifique de l'enseignement général.

Sans nier le poids négatif d'une certaine prégnance des mentalités, Mme Gisèle Gautier, présidente, a estimé que les auditions réalisées par la délégation avaient confirmé l'émergence dans l'opinion d'une prise de conscience, de plus en plus largement partagée, du problème que constitue l'inégal accès des hommes et des femmes aux différents métiers. Elle a jugé que cette prise de conscience était alimentée par le sentiment que les inégalités en matière d'insertion professionnelle soulèvent une question d'équité. Elle s'est réjouie de ce que les conférences interparlementaires favorisent, à travers les comparaisons internationales, cette prise de conscience. Elle a regretté néanmoins que les actions engagées en faveur de la promotion des femmes ne soient pas mieux relayées dans l'opinion par les médias, et notamment par la presse dite « féminine ».

Elle a cependant estimé que, par delà leur apparente modestie, les actions conduites par le service des droits des femmes et de l'égalité apportaient une contribution tout à fait positive à ce mouvement.

Elle a également jugé indispensable de développer les actions menées en partenariat et de prendre en compte les différents acteurs, insistant notamment sur le rôle joué par l'environnement familial dans le dépassement, ou au contraire la confirmation, des stéréotypes de genre.

Se réjouissant d'apprendre que certains IUFM avaient rendu obligatoire dans leur cursus de formation un module relatif à l'égalité, elle a souhaité savoir de quelle autorité relevait ce type de décision.

Mmes Joëlle Voisin et Catherine Laret-Bedel ont estimé, sous réserve de confirmation, qu'il revenait au rectorat d'inscrire cette formation dans le cahier des charges de chaque établissement.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a cité en exemple l'opération « 1 000 ambassadrices pour les sciences à Paris », mise en oeuvre par la Ville de Paris, en liaison avec les associations « Femmes et sciences » et « Femmes ingénieures », pour inciter les filles à s'engager dans les filières scientifiques, estimant que ce type d'actions devrait être étendu à toutes les régions.

Insistant à son tour sur la force d'une communication par l'exemple, Mme Joëlle Voisin a cité un projet d'exposition itinérante consacrée à un certain nombre de portraits de femmes, ainsi que le prix de la vocation scientifique et technique qui sera prochainement décerné.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a jugé prioritaire la lutte contre les idées reçues sur les métiers, souhaitant que l'association des maires de France suscite, dans tous les départements, des actions de sensibilisation et des rencontres entre les enseignants et le monde économique, à l'image de l'initiative qu'elle avait prise dans sa municipalité lorsqu'elle était maire, avec l'appui du président de région et du président de la communauté urbaine, en mettant en places des « journées de l'emploi » qui attiraient environ 3 000 jeunes visiteurs.

Mme Joëlle Voisin a souligné l'intérêt de telles initiatives, estimant qu'elles gagneraient à être généralisées. Elle a considéré qu'il convenait également de sensibiliser les parents à la nécessité de ces évolutions.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a jugé nécessaire de moderniser l'image de certaines filières qui ont pu s'ouvrir aux femmes grâce à l'utilisation des nouvelles technologies, en citant l'exemple de femmes exerçant la profession de soudeuse à l'arc. Elle s'est inquiétée de la régression récente de la proportion de femmes dans le secteur de l'informatique, constatant qu'en revanche leur part restait prédominante parmi les instituteurs.

Interrogée sur les raisons de la surreprésentation des femmes dans certaines professions comme celles de l'enseignement ou de la santé, Mme Joëlle Voisin a estimé que ces métiers présentaient souvent l'avantage, aux yeux des intéressées, de leur permettre d'organiser plus facilement les tâches familiales, dont la responsabilité continue le plus souvent à incomber aux femmes.

Insistant sur la nécessité de faire évoluer l'image que les jeunes et leurs parents se font des métiers, Mme Gisèle Gautier, présidente, a invité le service des droits des femmes et de l'égalité à y consacrer des films ou des spots télévisés, à l'image de ceux qu'il avait réalisés pour dénoncer les violences faites aux femmes et dont elle a vanté le très fort impact.

Mme Joëlle Voisin a expliqué que son service avait déjà produit des films courts sur les femmes travaillant dans le secteur du bâtiment et dans des métiers considérés traditionnellement comme masculins, et réfléchissait actuellement à la production d'un plus long métrage, voire éventuellement d'une fiction sur ce thème.

En conclusion, Mme Gisèle Gautier, présidente, a insisté sur le rôle que peuvent jouer les parents, et en particulier les mères, pour faire évoluer les représentations qu'ont leurs enfants des différents métiers.