Mercredi 6 février 2019

- Présidence de Mme Catherine Morin-Desailly, présidente -

La réunion est ouverte à 09 heures.

Audition de M. Guillaume Poitrinal, président de la Fondation du patrimoine

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - C'est un vrai plaisir d'accueillir aujourd'hui parmi nous Guillaume Poitrinal, qui est à la tête de la Fondation du patrimoine depuis avril 2017. Je connais bien la fondation pour y avoir siégé pendant une douzaine d'années, avant d'être remplacée désormais par Dominique Vérien.

Notre commission de la culture, de l'éducation et de la communication est très attachée à l'action que mène votre fondation en matière de sauvegarde et de valorisation du petit patrimoine. Nous serions désireux que vous nous en disiez plus sur votre action concrète dans les territoires.

Nous sommes également attentifs au financement de la fondation. Le Sénat a d'ailleurs été très actif pour consolider vos moyens d'action : c'est notre ancien collègue, Yann Gaillard, qui avait oeuvré pour qu'une fraction du produit des successions en déshérence vous soit attribuée chaque année. Le montant de cette ressource s'est contracté depuis quelques années, avec des conséquences importantes pour votre fonctionnement. Les récentes réformes fiscales, qu'il s'agisse de la mise en place du prélèvement à la source ou de la transformation de l'impôt sur la fortune en impôt sur la fortune immobilière (IFI) ont également eu un impact négatif sur le montant des dons que vous collectez pour vos souscriptions. Nous suivons de près ces questions de mécénat, pour avoir réalisé un important travail au printemps dernier à leur sujet, dont Maryvonne Blondin présidait les travaux et Alain Schmitz était le rapporteur. Nous avons également été plusieurs à déposer des amendements pour que les demeures patrimoniales puissent être exonérées suite à la création de l'IFI.

Peut-être pourriez-vous enfin nous faire un point sur le Loto du patrimoine ? Nous avons auditionné Stéphane Bern la semaine dernière à propos de sa mission. Mais, nous voudrions être rassurés sur les modalités de sélection des sites concernés par la mission. J'attire votre attention sur l'importance de veiller à ce que le choix soit transparent et équitable.

M. Guillaume Poitrinal, président de la Fondation du patrimoine. - La Fondation du patrimoine est née d'une proposition de loi d'origine sénatoriale en 1995. Elle constitue une initiative à la fois publique et privée, plusieurs grandes entreprises ayant versé des fonds au moment de sa création que l'État est venu abonder ensuite avec le produit des successions en déshérence. Cette combinaison publique et privée se poursuit aujourd'hui : je suis accompagnée de Célia Vérot, la directrice générale de notre fondation, qui est issue d'un grand corps de l'État, alors que je suis moi-même chef d'entreprise.

Le premier message que je souhaiterais vous transmettre, c'est que la fondation que vous avez créée va bien, même si elle est confrontée à un certain nombre d'enjeux. Sa mission est de soutenir le patrimoine non protégé au titre des monuments historiques ou patrimoine vernaculaire. À ce titre, nous contribuons à sauver le petit patrimoine et à dynamiser la vie locale dans les zones rurales en aidant à la réouverture de petits théâtres, de petits musées, de maisons d'écrivains... 70 % des projets que nous soutenons sont situés dans des communes rurales de moins de 2 000 habitants.

Nous avons aujourd'hui près de 2 800 projets pour lesquels des souscriptions sont ouvertes. Notre rôle est de lancer et d'accompagner ces projets : nous aidons les porteurs de projet dans leur lancement, leur donnons des moyens financiers, ouvrons des souscriptions populaires. J'attire votre attention sur le fait que nous sommes très attentifs à l'utilisation des fonds : nous n'octroyons nos subventions qu'une fois les travaux réalisés conformément au cahier des charges, sur présentation des factures. C'est l'un des éléments, avec le caractère désintéressé de notre gestion et le bénévolat, qui nous distinguent des acteurs qui se développent aujourd'hui dans notre secteur, en particulier les plateformes de crowfunding. Ces caractéristiques nous permettent de nous intéresser à tous les types de projets, y compris de faible envergure.

Nous nous appuyons sur une armée de 570 bénévoles à travers la France, qui oeuvrent au sein des cent délégations départementales et vingt-trois délégations régionales dont nous disposons. Nous avons également soixante-dix salariés à temps plein. Ces effectifs font de nous le premier organisme de soutien au patrimoine après l'État et nous permettent de nous concentrer sur le petit patrimoine, souvent négligé dans un pays comme le nôtre marqué par une tradition de centralisation.

Notre deuxième moyen d'action en faveur de la protection et de la valorisation du patrimoine est notre label « Fondation du patrimoine », que nous pouvons octroyer aux propriétaires privés dont les immeubles ne sont pas protégés au titre des monuments historiques, et qui leur permet de prétendre au bénéfice de dispositifs de déductions fiscales pour les travaux visibles de la voie publique qu'ils entreprennent. Nous distribuons environ 1 000 labels par an.

Sur le terrain, nous avons évidemment noué une collaboration avec les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) comme avec les architectes des bâtiments de France (ABF). Elle n'a pas été évidente à mettre en place au départ. Nous avons mis du temps à être reconnu par ces acteurs sur le terrain, mais notre réputation n'est désormais plus à faire, pour le plus grand bénéfice du patrimoine en général.

Cette année, nous avons injecté environ 48 millions d'euros d'aides directes et indirectes dans les projets, un montant qui a significativement augmenté avec la mise en place du Loto du patrimoine, puisqu'il n'était encore que de 30 millions d'euros il y a deux ans. Grâce à un effet multiplicateur que nous évaluons à dix, ce sont au total 500 millions d'euros de travaux qui sont ainsi entrepris chaque année. Nous observons que notre présence au sein d'un projet facilite l'obtention de subventions de la part des collectivités territoriales ou le soutien financier des entreprises.

Les récentes évolutions législatives ont indéniablement compliqué la donne pour nous. À l'instar de tout le secteur associatif, la transformation de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en IFI s'est traduite par une baisse sensible des dons - pour nous en baisse de 53 % en dépit de l'engouement suscité par la mission Bern. Quant à la mise en place du prélèvement à la source, son impact ne devrait être que transitoire. Mais l'année blanche s'est traduite par une baisse de 69 % du nombre de demandes de labels en 2018. On observe un rattrapage en janvier 2019.

L'introduction par la loi de finances pour 2019 d'un plafond alternatif de 10 000 euros destiné à faciliter le mécénat des très petites entreprises est en revanche positive. Le fait d'avoir retenu jusqu'ici une fraction du chiffre d'affaires comme base pour le calcul du plafond ne me paraît pas forcément pertinent.

En outre, pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est à peu près équivalent à leur marge, et qui ont une capacité de contribution (cabinets d'avocats, certains prestataires de services,...), le chiffre d'affaires n'est pas la bonne référence. Une réflexion a été engagée par le Parlement sur le mécénat d'entreprise, avec un plafonnement du don des grandes entreprises à 10 millions d'euros, et peut-être une différenciation du taux de réduction fiscale selon que les dons profitent à des fondations reconnues d'utilité publique (comme la nôtre) ou à des fondations d'entreprise : nous vous implorons de préserver la capacité des premières à attirer les flux, d'autant qu'on connaît les difficultés que posent parfois les fondations domestiques... Nos grands mécènes - Total, GPA, ou d'autres - sont sensibles à la question ; s'ils ne peuvent plus nous soutenir, il y aura un vrai problème pour certaines régions. Total, là où il exploite des raffineries, est très actif.

Le Gouvernement envisage de créer un régime plus avantageux pour les legs aux oeuvres. Nous avons peu travaillé jusqu'à présent sur le sujet. Pourtant, donner pour préserver le patrimoine, c'est une idée qui « parle » à beaucoup de gens ! Nous avons l'intention de nous pencher sur le legs plus sérieusement, et tout ce que vous pourrez faire pour nous aider à capter au profit du patrimoine des legs, des donations par avance, des usufruits, sera bienvenu.

Nous sommes inquiets de la révision des niches fiscales...

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous aussi.

Mme Célia Vérot, directrice générale de la Fondation du patrimoine. - Dans le secteur du patrimoine comme de la culture, de nouveaux concurrents émergent, ils sont encore très petits mais connaissent une croissance importante, alors que la réforme fiscale a eu un fort impact sur tout le secteur caritatif en 2018 - 10 % de collecte en moins - soit 200 millions d'euros. Les résultats des plateformes et cagnottes n'en sont que plus spectaculaires. Leetchi a recueilli 50 millions d'euros de dons dans les cagnottes caritatives - nul doute qu'une partie des 200 millions perdus s'y retrouve ! Efficacité, jeunesse, jeu sur l'émotionnel, réactivité : ces acteurs ont beaucoup d'atouts. Mais ils n'offrent pas les mêmes garanties - rationalité de l'usage, légitimité des collectes - que les organismes caritatifs ; ils ne sont pas contrôlés par la Cour des comptes comme toutes les grandes fondations ; et si le don devient un objet de commerce, le législateur devra réfléchir à la manière de l'encadrer. Il n'y a pas eu de détournements à ce jour, mais cela pourrait arriver.

M. Guillaume Poitrinal. - Les porteurs de projets nous disent parfois : « Avec les plateformes, c'est plus simple qu'avec vous. » Oui et je le revendique. Car je fais très attention à l'utilisation des sommes allouées. Il n'y a pas chez nous de bénéficiaire partant en vacances aux Bahamas sur des sommes collectées en quelques jours grâce à l'émotion... La potentielle ubérisation des dons représente tout de même un danger. Le don philanthropique peut-il faire l'objet d'un courtage ? Pour le don du sang, le commerce est interdit... Il y a là matière à un débat de société. Soit dit en passant, nous aussi faisons des progrès dans l'exploitation de l'outil internet.

À la différence de ces plateformes, nous sommes régulièrement soumis aux contrôles de la Cour des comptes. Nous en avons eu un tout récemment, le deuxième en quatre ans. La Cour a émis cinq recommandations. D'abord, renforcer l'attrait de la fondation dans certaines régions où sa présence est faible, comme outre-mer, alors qu'elle est historiquement forte dans certaines régions, comme la Normandie ou la Bourgogne, dotées d'un important patrimoine. Garantir le contrôle technique des projets réalisés : nous le faisons bien me semble-t-il. Nous renforcerons cependant ce point. Réexaminer le dispositif de labellisation et son périmètre d'application, pour plus d'efficience. Distribuer les fonds avec plus de sélectivité, dans une période de diminution des ressources non affectées, en veillant à maintenir un taux d'abondement significatif : il est vrai que nous avons du mal à dire non aux multiples demandes qui nous sont adressées. Nous avons 2 800 souscriptions ouvertes, pour 800 inaugurations par an. Il semble contre-intuitif par rapport à notre mission d'être plus sélectif, car remonter un muret écroulé, restaurer un banc, un monument aux morts, tout cela n'est pas à négliger ! Enfin, améliorer l'information fournie aux donateurs.

Parmi nos objectifs pour 2018-2020 est inscrit le doublement de nos ressources, afin d'investir dans le patrimoine au moins 100 millions d'euros. Nous sommes parvenus aujourd'hui à 48 millions d'euros, contre 30 lorsque Mme Vérot et moi avons pris nos fonctions. Stéphane Bern s'est ému devant vous de constater que 500 millions d'euros étaient consacrés aux travaux de rénovation du Grand Palais, 300 millions à celle du site historique de la Bibliothèque nationale de France (BnF) : effectivement, on mesure l'écart avec les budgets modestes affectés aux travaux en régions. Je constate moi aussi une différence, entre la France d'où je viens et celle où j'habite. Nous pensons avoir un excellent vecteur pour recevoir davantage de moyens financiers et pouvoir, grâce aussi au dynamisme des bénévoles - issus du monde de l'entreprise, du commerce, et même de la politique - multiplier les inaugurations.

Car c'est là notre objectif : non pas accroître le nombre des souscriptions, mais couper du ruban ; faire travailler toutes nos entreprises d'artisanat magnifiques, dotées de savoir-faire multiples, sur les vitraux, les toitures, les charpentes, afin de rouvrir au public des monuments, tel ce théâtre à l'italienne à Châtellerault, la ville de mon enfance. Situé sur la place centrale, à côté de la mairie, il était fermé depuis dix-neuf ans. Aujourd'hui, il reçoit à nouveau du public et fait la fierté de la population. Dans un bassin d'emploi où la situation est plutôt désespérante - les Fonderies du Poitou, qui comptaient 400 salariés, viennent de déposer le bilan -, c'est un moteur de lien social.

Faire grandir, rajeunir et féminiser notre organisation et notre réseau de bénévoles : voilà l'un de nos enjeux. Nous sommes trop masculins ! Notre organisation ressemble un peu à celle de l'armée du salut, avec des délégués. Nous voudrions intéresser davantage de jeunes actifs et de femmes. Nous souhaitons également être plus efficaces et plus agiles dans la gestion des activités.

La mission Bern, contrat tripartite signé entre la Fondation du patrimoine, la Française des jeux et le ministère de la culture, a permis l'organisation d'un tirage spécial, qui n'a rien coûté à l'État, puisqu'il s'est agi d'un tirage supplémentaire qui a eu lieu le vendredi, et non le samedi. Par ailleurs, tous les buralistes nous l'ont dit, cet événement a attiré une population qui n'était pas adepte de tels jeux.

En somme, nous avons créé un nouveau business, qui a généré des ressources supplémentaires et enrichi l'État par les taxes et la TVA. C'est un jeu à trois bandes, dont tout le monde sort gagnant. Il faut poursuivre cette initiative. En Angleterre, le patrimoine est sauvé chaque année par la loterie.

En ce qui concerne la revitalisation des centres-bourgs, nous sommes limités par une instruction fiscale, qui fixe un seuil de moins de 2 000 habitants et qui nous empêche d'intervenir.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - La protection du petit patrimoine est ce qui a présidé à la création de la Fondation du patrimoine, afin qu'elle se consacre à un patrimoine plus éloigné et en relégation.

M. Guillaume Poitrinal. - Cela figure, non pas dans la loi, mais dans une instruction fiscale. Toujours est-il que nous ne pouvons aider des communes de 3 000 habitants, même lorsque leur patrimoine se trouve en centre-bourg, pour des raisons de seuil. Il faut également moderniser les labels.

Par ailleurs, nous devons dynamiser les souscriptions, notamment par le crowdfunding. Enfin, nous devons procéder à une modernisation de nos statuts, qui sont très compliqués.

Notre action est fortement soutenue en région ; la cause du patrimoine est immensément populaire. Les enquêtes d'opinion montrent que « L'émission patrimoine » représente 13 % de parts de marché, 86 % des Français soutiennent le patrimoine local et 81 % des joueurs comptent rejouer l'année prochaine. Je rappelle que 4 millions de Français ont participé à ce jeu. C'est donc une bonne idée, qui est issue d'une vieille revendication de François de Mazières, aujourd'hui maire de Versailles.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Rappelons que l'idée du loto du patrimoine a été lancée voilà une dizaine d'années au Sénat par Philippe Richert et Philippe Nachbar ; elle a fait son chemin depuis.

M. Alain Schmitz. - La Fondation du patrimoine n'a jamais bénéficié d'un tel coup de projecteur. L'engagement fort du Président de la République a constitué un élément moteur et le succès populaire a été au rendez-vous.

Je m'interroge sur la façon dont les dossiers remontent, notamment les dossiers emblématiques par région et les projets de maillage. Quelles aides sont octroyées par le ministère de la culture ? Comment se fait la remontée de l'information ?

Je m'interroge également sur la méthodologie. La Fondation du patrimoine a agi dans l'urgence : il a fallu faire très vite avec très peu de moyens. Comment se fera l'instruction des dossiers et comment comptez-vous la modifier à l'avenir ? Une grille de lecture est-elle prévue ? Quelle est la proportion de l'aide que vous apporterez ? Un pourcentage est-il prévu ou cela dépend-il de différents critères ? En effet, sur France 2, le maire de Saint-Léon de la Baussaine, commune de 600 habitants à côté de Saint-Malo, a fait part de sa déception : pour refaire la toiture de l'église, il ne bénéficiait que d'une aide de 60 000 euros, alors que le montant des travaux s'élève à près de 400 000 euros.

M. Guillaume Poitrinal. - Soumettre un dossier est très facile et prend peu de temps : il suffit d'aller sur le site « missionbern ». Ensuite vient le travail de sélection des projets.

Nous assumons, dans la majorité des cas, de ne pas fournir la totalité du capital nécessaire. En effet, nous pensons que donner de l'argent peut faire des petits, car cela rend crédible un projet, permet de trouver localement des sponsors et de solliciter de la souscription populaire. Cela démultiplie notre action et provoque l'engagement des autres. Nous ne voulons pas abandonner cette méthode : nous commençons par une subvention et, si de l'argent supplémentaire est levé, nous contribuerons de façon plus importante encore.

Mme Célia Vérot. - Nous avons dû nous organiser très rapidement pour sélectionner les dossiers les plus porteurs et faire en sorte que cela s'articule avec le calendrier des jeux lui-même. Nous avions pour impératif, ce qui a été rendu possible par une communication très efficace, de choisir d'abord les sites, que les Français ont pu découvrir et identifier, ensuite de vendre les jeux. Ce décalage temporel a créé de nombreuses contraintes. Ainsi, il a fallu choisir les bâtiments avant de connaître les sommes dont nous disposerions, sans savoir si les projets ne seraient pas reportés, voire abandonnés. Enfin, nous n'avons reçu le produit des jeux qu'à la fin de l'année.

Cette année, nous essaierons de réduire ce décalage temporel, mais il faut d'abord sélectionner les sites, c'est la clé du succès de l'opération.

Le premier temps, c'est l'appel à projets. La sélection se fait à l'échelon local : les propriétaires de sites ou le grand public signalent les projets sur une plate-forme ou auprès des délégations.

Le deuxième temps, c'est la concertation entre les DRAC et les délégations pour présélectionner les projets les plus intéressants. Elle sera systématique cette année. Les relations avec les DRAC s'améliorent : la coopération est très bonne.

Après cette présélection locale, une itération nationale permet de sélectionner les projets qui seront ensuite soumis aux membres officiels de la sélection : Stéphane Bern, le ministère de la culture, la Française des jeux (FDJ), la Fondation du patrimoine.

Là encore, 18 projets emblématiques seront mis en avant, un par région administrative ou collectivité d'outre-mer, ainsi que d'autres projets de maillage. Grâce au Loto du patrimoine, la Fondation finance entièrement le besoin de financement des projets emblématiques : elle comble en quelque sorte le trou, une fois que tous les autres financements sont trouvés, pour les tranches immédiates et urgentes. Ainsi, tous les projets emblématiques ont été entièrement financés, voire surfinancés, pour la première tranche cette année.

Quant aux autres projets sélectionnés, l'option retenue a été de ne pas les financer entièrement, car nous savions très bien que cela ne serait pas possible : cela représenterait 50 millions d'euros, alors que le produit du loto est de 21 millions d'euros. Il s'agit de leur donner un montant très significatif, entre 10 % et 40 % de leurs besoins de financement, dans les proportions inverses de ce que l'État est capable de leur donner. Ainsi, on a donné moins aux plus gros et plus aux plus petits.

Pour reprendre l'exemple de l'église de Saint-Léon de la Baussaine, l'État doit compléter ce besoin de financement, de même que le conseil régional. L'effet de levier évoqué par Guillaume Poitrinal est réel, nous l'avons constaté dans un certain nombre de lieux : la très forte médiatisation a attiré des financeurs.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vous suggère de vous appuyer sur les services de l'inventaire, transférés de l'État aux régions. Ils réalisent un travail remarquable et se sentent un peu en dehors du coup, alors qu'ils auraient un certain nombre de propositions à formuler. Il y a là un lien à construire.

M. Guillaume Poitrinal. - C'est une très bonne idée. Cette année, nous travaillerons également avec toutes les autres associations de défense du patrimoine, qui accomplissent un travail remarquable sur le terrain.

La frustration est inévitable ! Nous avons reçu 2 milliards d'euros de demandes de fonds, alors que nous n'avons récupéré du Loto du patrimoine que 21 millions d'euros. Mais cela ne nous arrête pas. Par ailleurs, la Fondation du patrimoine a le dernier mot : c'est elle qui choisit et elle essaie d'être juste.

Mme Dominique Vérien. - Avez-vous un regard sur l'affectation des fonds dégelés de l'État ? Vont-ils au projet de la mission Bern ou à d'autres projets ?

Il est nécessaire de développer le mécénat et le bénévolat. Avez-vous des pistes ?

Comment fonctionnent les plateformes concurrentes, comme Dartagnans ? Quelle part gardent-elles par rapport à ce qui est versé aux différents projets ?

Mme Marie-Pierre Monier. - Où en sommes-nous des successions en déshérence ?

Quel sera l'impact de la privatisation de la FDJ prévue par la loi PACTE (plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises) ? Le Sénat y est opposé de manière unanime. Que se passera-t-il après 2019 ? Nourrissez-vous, vous aussi, des inquiétudes ?

Vous avez expliqué vos choix et vos décisions de financement, qui ont provoqué de nombreuses déceptions de la part des maires. Avez-vous noué des liens avec les maires pour prévenir ce sentiment ?

Quel bilan dressez-vous de la loi LCAP ?

Enfin, il faut féminiser au plus haut, pour briser le fameux plafond de verre.

M. Pierre Ouzoulias. - J'ai été conservateur du patrimoine en administration centrale quand a été créée la Fondation du patrimoine, en 1996. Je me rappelle les discussions avec les services de l'État et les DRAC. Je constate avec plaisir qu'aujourd'hui la complémentarité sur le terrain est acquise.

Sur la sélection des projets, il faut que les acteurs locaux se saisissent des dossiers. Reste que la sélection contributive sur le terrain ne permet pas toujours une vision nationale du patrimoine vernaculaire peu connu. C'est pourquoi il faut réintégrer les services de l'inventaire, comme l'a suggéré la présidente de la commission. Je pense au patrimoine vernaculaire agricole, par exemple les machines ou les petits édifices, qui disparaissent à toute vitesse. Il faut éviter une sélection contributive qui empêche une vision d'ensemble.

M. Philippe Nachbar. - Quels sont les financements propres de la Fondation du patrimoine ? Je sais le rôle que vous jouez dans les départements : il me paraît donc essentiel que cette structure puisse fonctionner de manière convenable.

Conserverez-vous l'année prochaine la même clé de répartition des crédits qui vous seront attribués à l'issue du Loto du patrimoine ?

Mme Sonia de la Provôté. - La Fondation du patrimoine a reçu 2 milliards d'euros de demandes. Voilà qui permet de grossir l'inventaire officiel et d'augmenter de façon quantitative et qualitative notre patrimoine. Une fois cet inventaire dressé de façon exhaustive, ne sera-t-il pas nécessaire d'établir des stratégies de choix et des priorités en fonction des typologies de patrimoine, des époques, des lieux, des thématiques... ?

Mme Laure Darcos. - Je remercie le Sénat d'avoir adopté hier soir, dans le cadre de l'examen de la loi PACTE, à la quasi-unanimité le sous-amendement d'Albéric de Montgolfier sur l'exonération de taxes du Loto du patrimoine, ainsi que cela avait été prévu en loi de finances.

Sur la privatisation de la FDJ, Bruno Le Maire a précisé qu'une convention pérenniserait le Loto du patrimoine. Nous savons qu'un prélèvement a été réalisé en direction d'activités sportives. Ne pourrait-on faire de même avec les lotos sportifs et prévoir une taxation qui serait reversée au patrimoine ?

Mme Maryvonne Blondin. - Je souligne l'enthousiasme de la commission sur la question du patrimoine. Je salue l'action de la fondation, notamment en matière de patrimoine maritime, en particulier la protection du littoral. Je pense aussi au musée de Pont-Aven.

Lors de la discussion sur la vie associative, Jacques-Bernard Magner a suggéré de récolter l'argent sur les comptes bancaires dormants pour le destiner à la vie associative, aux sports ou à la culture. Malheureusement, si c'était possible, cela ne pourrait pas être fléché et ces sommes iraient dans le budget général de l'État.

Mme Catherine Dumas. - Quels sont les liens entre la Fondation du patrimoine et la Fondation Ateliers d'art de France ? En plus de préserver le patrimoine, il faut le restaurer : à ce titre, l'utilisation des métiers d'art et des savoir-faire me semble primordiale.

M. Jean-Pierre Leleux. - Nous sommes tous des soutiens actifs du Loto du patrimoine et plusieurs d'entre nous ont acheté des tickets. Toutefois, j'avoue avoir hésité entre acheter des tickets du Loto du patrimoine, en connaissant le hold-up fiscal qui serait opéré par l'État, et faire un don de la même somme avec une déductibilité fiscale de 60 %. Qu'en sera-t-il de cette concurrence, lorsque les Français en auront pris conscience, malgré le gain hypothétique d'un million d'euros ?

La Fondation du patrimoine contrôle les travaux réalisés et ne paie qu'après présentation de la facture. Quid des bénévoles compétents, artisans, ferronniers, etc. ? Comment valoriser leurs interventions ?

M. Guillaume Poitrinal. - La Fondation du patrimoine compte seulement 500 bénévoles ; il en faudrait beaucoup plus. C'est beaucoup moins qu'en Angleterre où l'on en dénombre 30 000. Nous avons un véritable potentiel de recrutement et beaucoup de tâches à leur confier. C'est pourquoi je pousse mes délégués à avoir plus de bénévoles, même si ces derniers ne sont pas toujours simples à guider.

Il est vrai que les sites de crowdfunding nous font concurrence. Étonnamment, Dartagnans se déclare lié à la mission Bern et, sur son site, il est même possible de déposer un dossier. Son objectif est de créer de la data et du trafic en ajoutant des mots clefs pour les recherches Google. Il faut faire la différence entre les associations, les entreprises philanthropiques et les entreprises commerciales.

Le montant des successions en déshérence remonte légèrement. Grâce à la nouvelle directrice des domaines, nous avons davantage de clarté sur ce qui se passe. On nous promet 6 millions d'euros pour 2019, ce qui nous permettra d'investir davantage dans l'internet et d'abonder ces projets. C'est important pour lancer des souscriptions et leur donner du crédit.

Je ne me prononcerai pas sur la privatisation de la FDJ, je ne fais pas de politique. Il est vrai que perdre ce tirage spécial serait un drame pour notre pays. Notre plus grande protection, c'est l'intérêt commercial que trouve la FDJ à travailler avec la Fondation du patrimoine et l'immense succès populaire de cette opération.

Je rappelle que nous avons empoché 20 millions d'euros grâce au Loto du patrimoine. Dans le même temps, avec Stéphane Bern, nous avons monté des souscriptions sur chacun des projets, lesquelles ont atteint 6 millions d'euros. Les Français ont donc eu le choix. Nous avons besoin des deux. Beaucoup de Français qui ont gagné au Loto du patrimoine ont versé leur gain en souscription. La synergie est donc possible.

Un nouveau tirage aura lieu l'année prochaine. La Fondation du patrimoine peut aider les projets en dehors du Loto du patrimoine et il est possible de déposer à nouveau un dossier qui aurait été refusé cette année.

La stratégie nationale est une ambition qui me tient à coeur. Quelques pistes se dessinent : paysages, locomotives... Il faudrait créer des commissions nationales à cette fin, procéder à des recensements, organiser des journées particulières...

Évidemment, la Fondation du patrimoine est tout à fait d'accord pour avoir plus d'argent, notamment par le loto sportif.

Mme Célia Vérot. - La répartition des aides aux projets et le produit des taxes sont complémentaires. Sur les 21 millions d'euros que le ministère de la culture a reçus en crédits dégelés, 14 millions d'euros iront au projet de la mission Bern, ce qui correspond au produit exact des taxes, 2 millions d'euros étant destinés aux projets du Centre des monuments nationaux. La somme restante ira à du patrimoine local, pour des projets hors mission Bern, par exemple un pont à Rochefort.

Il faut aussi, site par site, identifier les difficultés qui se poseront et envisager la façon dont l'État pourra verser des abondements complémentaires. L'attribution de subventions à des monuments historiques est encadrée par des règles. Ainsi, la loi prévoit que les monuments inscrits ne peuvent pas toucher plus de 40 % de subventions de la part de l'État par rapport au montant des travaux. C'est le cas pour l'église de Saint-Léon de la Baussaine, qui est inscrite au titre des monuments historiques. Faut-il maintenir ces règles de façon intangible ou envisager de les adapter, pour mieux répondre aux enjeux ?

Il existe d'autres contraintes, notamment de nature réglementaire : un décret paru cette année prévoit que, une fois que l'État verse une notification d'abondement, il ne peut la rehausser, sauf si le projet a été bouleversé dans son schéma général. L'État s'est lui-même empêché de compléter.

M. Guillaume Poitrinal. - Pour contourner ces contraintes, il suffit que l'État contribue à la mission Bern par un virement sur le compte séparé de la Fondation du patrimoine.

Mme Célia Vérot. - Il ne nous revient pas de porter un jugement sur ces règles, mais nous constatons que, dans un certain nombre de cas, elles pourraient empêcher les travaux de démarrer. À nous d'être capables de pallier ces situations d'urgence.

J'en viens au bilan de la loi LCAP et à la capacité de la Fondation du patrimoine à intervenir dans les sites patrimoniaux remarquables. Les délégations commencent à prendre la mesure des innovations permises, ce qui nous permet de réaliser des opérations nouvelles dans des centres-bourgs ou des centres urbains, même si c'est limité aux communes de moins de 2 000 habitants. Aujourd'hui, nous sommes face à ce hiatus : la Fondation du patrimoine est limitée au patrimoine ultra rural ou aux sites patrimoniaux remarquables, qui sont souvent situés dans des zones urbaines très favorisées. Entre les deux se trouve un no man's land, alors que l'État cherche à revitaliser les centres-bourgs. C'est le cas en outre-mer, où aucune commune ne compte moins de 15 000 habitants et où il est donc impossible de créer des labels.

Sur les métiers d'art, nous menons une action de longue date, notamment à travers la Fondation Ateliers d'art de France et la Fondation Bettencourt, qui est l'un de nos mécènes dans ce domaine. De façon plus précise, nous sommes en discussion avec la Fondation Ateliers d'art de France pour modifier les conditions de notre partenariat et le poursuivre sous une autre forme.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous saluons le travail réalisé par l'ensemble de vos bénévoles, qui sont présents sur tous les territoires. Nous restons à votre écoute, car le Sénat s'intéresse à la Fondation du patrimoine.

Nomination d'un rapporteur

La commission désigne M. Antoine Karam en qualité de rapporteur sur la proposition de loi n° 486 (2017-2018) en faveur de l'engagement associatif.

Audition de M. Hervé Godechot, candidat désigné par le Président du Sénat aux fonctions de membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel en application de l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication et vote sur la proposition de nomination

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Mes chers collègues, je souhaite la bienvenue à M. Hervé Godechot, candidat proposé par le Président du Sénat pour intégrer le collège du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).

Cette nomination s'exerce dans le cadre du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986, relatif à la composition du CSA, selon lequel « dans chaque assemblée parlementaire, [les membres du collège] sont désignés en raison de leurs compétences en matière économique, juridique ou technique ou de leur expérience professionnelle dans le domaine de la communication, notamment dans le secteur audiovisuel ou des communications électroniques, après avis conforme de la commission permanente chargée des affaires culturelles statuant à bulletin secret à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés ». À l'issue de l'audition, nous nous prononcerons donc par un vote à bulletins secrets.

Monsieur Godechot, vous avez fait l'ensemble de votre carrière au sein du groupe France Télévisions avec une dominante territoriale puisque vous avez exercé dans plusieurs stations locales du réseau France 3.

Notre commission travaille depuis de nombreuses années sur l'audiovisuel public et sur sa nécessaire évolution. La semaine dernière, lors de son audition, Roch-Olivier Maistre, désormais président du CSA, a rappelé que, si une réforme de l'audiovisuel public était sur la table, c'était en grande partie grâce à nos travaux.

Ceux-ci ont également porté sur le rapprochement entre France 3 et France Bleu et je ne doute pas que notre rapporteur, Jean-Pierre Leleux, mais également nos autres collègues, auront des questions à vous poser sur cette dimension territoriale du service public de l'audiovisuel. Je termine en rappelant que cette audition est captée et diffusée en direct sur internet.

M. Hervé Godechot. - Je vais m'efforcer de vous faire part de mon expérience et de ma vision des choses, afin que vous puissiez vous déterminer à mon sujet.

Bien que j'aie plus de trente ans de journalisme et de télévision derrière moi, il est probable que nombre d'entre vous ne me connaissent pas. J'y vois la marque de l'une des valeurs que j'ai toujours portées, la discrétion, à savoir m'effacer derrière ce qui est plus grand que ma personne, l'information du public.

J'ai toujours été un homme de médias. Ma carrière a commencé alors que j'étais encore lycéen, comme animateur radio à Nancy. J'ai immédiatement attrapé le virus et il ne m'a jamais quitté. Après l'École publique de journalisme de Tours, je me suis dirigé vers la télévision de service public, celle de la proximité, FR3, et fait un tour de quelques stations régionales. À l'armée, on dirait que je suis « issu du rang ».

En 1994, j'ai rejoint brièvement le service informations générales de la rédaction nationale, puis le service économie. Nommé grand reporter, j'ai beaucoup voyagé, mais j'ai continué de labourer mon terrain préféré, la France. J'ai ainsi assisté à la transformation de notre pays, qui a en partie tourné le dos à l'industrie lourde et à l'agriculture pour se concentrer sur les services, avec pour conséquences la désertification de certaines zones rurales et la concentration urbaine.

En 2000, j'ai pris la tête du service économie, d'abord comme chef de service adjoint et éditorialiste, puis, en 2003, comme chef. En 2006, Paul Nahon me nomme rédacteur en chef des journaux du week-end ; en 2012, je dirige le 12/13 et, en 2013, je deviens rédacteur en chef du 19/20. Pendant presque dix ans, chaque jour, je me suis demandé comment raconter, le plus fidèlement possible, notre société et le monde, y compris celui dont on parle peu. J'ai créé, à l'époque, des rubriques comme « Vu de... » ou « Découverte » pour exposer une France délaissée par beaucoup de médias.

Ces trois dernières années, je suis retourné au service économie pour procéder à la fusion des services économie de France 2 et de France 3, dans le cadre du projet Info 2015. J'ai repris, en parallèle, mes activités de chroniqueur et eu le bonheur de monter dans le train de la nouvelle chaîne, France Info TV, en créant un petit journal hebdomadaire et en participant régulièrement aux Informés.

Au cours de ces trente années, j'ai vu notre monde se transformer, et les médias aussi. Il y a trente ans, le métier de journaliste à la télévision consistait à aller chercher l'information et l'image et à les restituer à un public captif et relativement inerte : captif, car il y avait très peu de chaînes de télé, inerte, car la seule possibilité de dialogue était le courrier des téléspectateurs.

Ensuite, le nombre de chaînes a explosé avec le numérique et la concurrence a changé la donne. Internet et les réseaux sociaux sont arrivés. Aujourd'hui, le public dialogue avec nous. De récepteur captif, il est devenu émetteur et, à son tour, prescripteur, pour le meilleur comme pour le pire. La capacité acquise à mettre en ligne tout et n'importe quoi et à toucher parfois des centaines de milliers de gens d'un clic fait croire à certains que nous sommes entrés dans l'ère du « tous journalistes ». Il n'est qu'à voir les interviews d'un prétendu journaliste « gilet jaune » ces dernières semaines.

Seuls sont journalistes ceux qui ont une carte de presse et travaillent pour des organes de presse reconnus comme tels, obéissant à un code de déontologie. À ce titre, les réflexions autour de la création d'un conseil de la déontologie multipartite sont intéressantes. Notre métier est ainsi sous la pression d'enjeux gigantesques, son rôle dans notre démocratie mis à mal.

Au-delà des agressions inadmissibles de confrères, de l'incendie criminel de la station de France Bleu Isère, des insultes et de la violence verbale subies sur les réseaux sociaux, le récent baromètre des médias Kantor pour La Croix est une claque : la confiance envers la télévision et la radio est en chute libre. Comment renouer le lien ? Comment labelliser une information fiable et reconnaissable par tous ? Comment former le public face aux fausses informations, au complotisme, aux appels à la haine et au racisme ? La loi dite « anti fake news », limitée aux périodes électorales, sera-t-elle efficace et répondra-t-elle aux attentes ?

Les chaînes de télévision et de radio ont pris le taureau par les cornes : de nombreuses rubriques sont consacrées à la lutte contre les infox. Reste que le régulateur, en application des décisions du législateur, ne peut laisser les rédactions seules face à ce déferlement. Il ne peut pas non plus maintenir cette asymétrie de droits et de devoirs entre les médias traditionnels et les nouveaux entrants. Il ne s'agit pas seulement de déontologie de l'information. L'enjeu est aussi économique : les médias sont aujourd'hui confrontés aux agrégateurs, qui mettent gratuitement à la une de leurs applications et de leurs sites des produits qui ne leur appartiennent pas et qu'ils n'ont ni créés ni financés. C'est ainsi que les médias traditionnels ont de plus en plus d'audience, mais perdent aussi de plus en plus d'argent, car cet argent va dans la poche des GAFA, qui recueillent 80 % de la recette publicitaire sur internet.

Nous suivrons tous avec beaucoup d'intérêt l'avenir de la proposition de loi tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse, déposée au mois de septembre dernier et dont les premiers signataires sont MM. les sénateurs Assouline, Kanner et Daunis. Et que dire du piratage ? Espérons que la loi sur l'audiovisuel, transcription dans le droit français de la directive européenne « service des médias audiovisuels » (SMA) et probable refonte de la loi de 1986, nous aidera tous, producteurs, diffuseurs et régulateur.

D'autres enjeux demeurent. La télévision et la radio sont dans tous les foyers, ou presque. Les médias traditionnels sont des facteurs essentiels de continuité territoriale et de cohésion culturelle. Eux aussi se transforment : la télévision fait du web, la radio aussi, la presse écrite se lance dans la télévision. L'offre se démultiplie et se délinéarise, mais seulement pour ceux qui y ont accès. En effet, dans certaines zones de notre territoire, celle-ci est inaccessible. En 2017, 500 000 personnes n'avaient aucun moyen de recevoir internet.

Surtout, il y a les contenus. Dans notre société ultraconnectée, si l'on ne parle pas de vous dans les médias, si vous n'êtes pas présents, vous n'existez pas pour le reste du pays. Le dernier baromètre de la diversité, publié par le CSA le 16 janvier dernier, laisse pantois : les personnes perçues comme blanches représentent 83 % de celles qui sont vues sur les écrans ; les CSP+, 74 %, alors qu'elles ne représentent que 27 % de la population française. Quant aux Ultramarins, si on enlève France Ô, ce sont 0,3 % seulement des gens présents dans les infos, les jeux, les séries, etc.

Entre l'inaccessibilité aux contenus et les contenus qui ne parlent jamais d'eux, c'est toute une France des invisibles qui est exclue : des personnes victimes de la fracture numérique, en situation de handicap, des pauvres, des périurbains, des habitants de certaines zones rurales, les Ultramarins, tous regardent de loin ce maelstrom médiatique et technologique dont ils ne profitent pas. Là encore, les règles doivent probablement être revues et il appartient au CSA de jouer un rôle d'aiguillon pour combler cette faille, numérique et culturelle. Je connais bien cette France des zones délaissées. Bien que Parisien d'origine, j'ai passé toute mon adolescence dans un village de Lorraine, près de Pont-à-Mousson ; cela fait 35 ans que je randonne et que je vois ce territoire des « chemins noirs » si bien décrit par Sylvain Tesson. J'ai fait mes classes de jeune étudiant en journalisme à Cantal FM, à courir les comices agricoles... Je connais aussi les territoires outre-mer, pour être allé à plusieurs reprises à la Réunion, en Martinique et en Polynésie... Il y a un effort collectif à faire. C'est une question dont j'entends me saisir, à la suite de ma collègue et amie Mémona Hintermann, dont je salue le travail et l'engagement, si vous me faites l'honneur de me nommer au CSA.

Autre sujet, la présence des femmes dans les médias. Les choses avancent, mais pas assez vite. À France Télévisions, la présidente, Delphine Ernotte Cunci, a fait un grand travail. Il y a davantage de journalistes femmes à l'écran. J'enseigne à l'Institut Pratique du Journalisme, les étudiantes sont nombreuses. Des efforts aussi sont faits pour interviewer des femmes dans la rue ou pour des sujets du quotidien... Mais on ne voit encore que peu d'expertes, même si un annuaire a été créé. Peu de femmes politiques également, diront certains... Cette question ne concerne pas seulement les professionnels des médias. Peut-être n'y a-t-il pas assez d'expertes en France ? De femmes politiques ? De femmes dirigeantes ? D'après l'observatoire Ethics and Boards, on ne compte que 17% de femmes dans les instances de direction des 100 plus grandes entreprises françaises. Et le salaire moyen d'une femme est encore inférieur de plus de 20 %, à fonction et ancienneté égales, à celui d'un homme. Les médias sont le triste reflet de la société toute entière. Cela ne doit pas, pour autant, les exonérer d'une démarche encore plus proactive qu'elle ne l'est déjà. Et le CSA a son rôle à jouer. Cette fois, c'est au travail de Sylvie Pierre-Brossolette que je veux rendre hommage.

Enfin, dans cet effort pour contribuer à la continuité territoriale et à la cohésion culturelle et sociétale de la nation, l'audiovisuel public - Radio France et France Télévisions en tête - joue un rôle de tout premier plan. Le CSA a pour mission de veiller sur lui, de dialoguer avec lui et de le rendre comptable de la bonne exécution des contrats d'objectifs et de moyens (COM). L'audiovisuel public est face à de grandes échéances de modernisation et d'adaptation. Mais il est difficile de lancer des projets dans la durée quand les COM sont trop souvent remis en cause, peu de temps après leur signature, comme l'a dénoncé, à plusieurs reprises, M. Leleux. La taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (TOCE), initialement dédiée à l'audiovisuel public, sera réaffectée au budget de l'État. Ces contraintes budgétaires peuvent pousser la direction de France Télévisions à s'écarter d'une politique d'investissement nécessaire et à privilégier une logique comptable. Cela se répercute dans les contenus. Quand, dans une station régionale, vous n'avez que deux ou trois équipes pour faire tout le journal, vous aurez tendance à envoyer les journalistes à peu de distance de la rédaction, là où ils auront le temps de réaliser deux reportages dans la journée, plutôt qu'à les envoyer à l'autre bout du département couvrir la fermeture du bureau de poste dans un village.

Les expérimentations de programmes communs entre France Bleu et France 3 sont très intéressantes. Pour autant, il faudra veiller à ce qu'elles soient portées par un véritable projet éditorial et non par une simple mutualisation comptable des moyens. La suppression de France Ô va priver les Ultramarins du peu d'exposition qu'ils avaient. Cette chaîne a les défauts de ses qualités, à savoir d'offrir aux outre-mer un canal qui, en même temps, les cantonne sur une seule chaîne. Il appartient aux médias, et particulièrement aux médias publics, d'augmenter considérablement la présence des citoyens et des territoires ultramarins à l'écran.

De même, le basculement de France 4 sur internet pose la question de la diffusion des programmes jeunesse. Comment, dès lors, continuer à promouvoir les films d'animation, fleurons de la technologie française, que nous exportons dans le monde entier ? Les plus jeunes, vont quitter les programmes de flux contrôlables pour regarder ces programmes de manière délinéarisée, sur une tablette par exemple. Comment, dès lors, maîtriser l'exposition aux écrans ? Je rejoins, en cela, votre préoccupation, madame la présidente, qui portez la proposition de loi visant à lutter contre l'exposition précoce des enfants aux écrans. Comment faire appliquer, sur un site délinéarisé, la loi, initiée par M. Gattolin, sur l'interdiction des publicités pendant les programmes pour les moins de douze ans ? Si l'État, en tant qu'actionnaire du service public de l'audiovisuel doit, sans doute, prendre ses responsabilités en stabilisant les COM, le CSA aussi doit prendre les siennes en accompagnant France Télévisions et Radio France sur toutes ces questions.

Enfin, s'il n'appartient qu'au législateur de définir le périmètre du CSA, au moment où celui-ci va vraisemblablement évoluer, avec la refonte de la loi de 1986 et la nouvelle loi sur l'audiovisuel à venir, je m'avancerai à dire que le CSA doit être un partenaire. Partenaire du législateur, dont il applique et veille à faire appliquer les décisions, des producteurs et diffuseurs, des autres régulateurs, qu'ils soient en France ou en Europe, et des citoyens. Place doit être faite au dialogue, au droit souple, à la co-régulation et à la médiation, sans pour autant abandonner les prérogatives de mise en demeure et de sanction si cela s'avère nécessaire. Je partage en cela les deux rêves exprimés par le président Maistre : faire entrer le régulateur de plain-pied dans l'ère du numérique et aider à renouer le lien de confiance entre les Français et les médias.

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur des crédits de l'audiovisuel. - Notre commission a organisé, en juillet dernier, un colloque consacré à l'avenir de l'audiovisuel public en Europe. Compte tenu de votre carrière passée toute entière dans l'audiovisuel public, comment décririez-vous les principes et les valeurs de l'audiovisuel public au XXIe siècle ?

On ne peut que se réjouir qu'un responsable d'un grand groupe de médias soit proposé pour intégrer le collège du CSA. À l'avenir, il serait d'ailleurs sans doute intéressant qu'un responsable d'un grand groupe privé puisse apporter, à son tour, son expérience. Cependant, cela n'est pas sans poser des questions au regard d'éventuels conflits d'intérêt. Comment envisagez-vous de procéder lorsque des questions concernant France Télévisions seront traitées par le collège ? Je pense par exemple au projet annoncé par le ministre de la culture de regrouper les chaînes d'information dans la numérotation.

Le grand défi du CSA pour les prochaines années sera de concevoir une régulation adaptée au numérique et à ses acteurs. Les responsables français des médias ont assurément sous-estimé le développement des plateformes ces dernières années. Comment voyez-vous les prochaines évolutions ? Quel doit être le rôle du CSA pour accompagner la modernisation des modes de diffusion ? Comment faire émerger quelques acteurs français de poids dans l'univers des plateformes ?

M. Hervé Godechot. - L'audiovisuel est en pleine évolution. Les modes de diffusion changent avec le multimédia et internet. Ainsi, France Télévisions a créé une chaîne d'informations. Culturebox et francetvinfo.fr ont beaucoup de succès. On constate la même évolution concernant Radio France ou l'audiovisuel extérieur. Le périmètre et les métiers évoluant, les valeurs doivent-elles évoluer ? Je ne le crois pas. En dépit de propositions du privé, j'ai toujours souhaité travailler dans le public car celui-ci est porteur de valeurs. Il privilégie la qualité avant de penser à l'audience, à l'inverse du privé, où l'audience détermine les recettes liées à la publicité et donc le chiffre d'affaires. Il importe de proposer des contenus originaux, de qualité, car le contribuable, qui nous finance, est en droit d'exiger des programmes à la hauteur de ses attentes. Le pluralisme, la diversité, l'honnêteté intellectuelle, la qualité, telles sont les valeurs qui nous portent.

En ce qui concerne le risque de conflits d'intérêts, la meilleure garantie est la transparence. Le CSA agit sous l'oeil du public et du Parlement. Pour ma part, je suis d'abord un professionnel de la télévision, attaché au service public : si je rejoins le CSA, je serai toujours dans le service public, et je continuerai donc à agir, en tant que membre du CSA, dans l'intérêt du public. Enfin, je ne serai pas seul au sein du collège, et je pense que son président et mes collègues seront très vigilants quant au risque de conflit d'intérêts.

Quel rôle peut jouer le CSA pour accompagner la modernisation des modes de diffusion ? Il y a beaucoup à attendre de la transposition de la directive SMA sur les services des médias audiovisuels et de la refonte de la loi de 1986. À cette occasion, j'espère que le législateur confiera de nouvelles fonctions au CSA en étendant son pouvoir de régulation aux nouveaux entrants, aux opérateurs numériques et à internet. J'aimerais, à cet égard, que le CSA dispose du même pouvoir d'aiguillon, de modération, de médiation, mais aussi de régulation et de sanction si nécessaire.

M. Michel Laugier. - Vous êtes proposé par le Président du Sénat. Ce choix me paraît pertinent. Nous sommes les représentants des territoires et vous êtes un spécialiste des territoires. Les grands groupes privés, comme TF1 ou Canal Plus, considèrent que les règles fixées par la loi de 1986 et les décisions de l'Autorité de la concurrence et du CSA sont responsables de leur déficit de compétitivité. Qu'en pensez-vous ? Comment favoriser l'émergence de groupes puissants ?

Ce matin, Le Canard enchaîné titrait : « Macron n'est pas en campagne, mais c'est tout com' ! ». Nous sommes dans une période particulière, entre Grand débat et préparation des élections européennes. Avez-vous une idée de la manière dont on doit décompter le temps de parole des partis politiques en ces temps complexes ?

Le rapprochement entre France Bleu et France 3 se traduira par une augmentation de la place accordée à l'information locale et donc à une baisse de la place accordée à l'information nationale. Faut-il revoir, dans ces conditions, la répartition des positionnements entre France 2 et France 3, ce qui pourrait se traduire par la suppression des journaux nationaux sur France 3 ?

Enfin, France Télévisions a contesté vivement dans le passé les mises en garde adressées par le CSA à l'occasion de différentes manifestations. Les journalistes ont contesté la légitimité du CSA à rappeler France Télévisions à l'ordre. Qu'en sera-t-il si vous devez être appelé à rappeler vos anciens collègues à l'ordre ?

M. Hervé Godechot. - Les groupes français sont déjà importants. TF1 n'est pas une PME ! Et M6 est en train de racheter les chaînes du groupe Lagardère. Mais la question de la taille critique se pose car les nouveaux entrants sont encore plus gros. Quand nos producteurs ont des budgets de plusieurs centaines de milliers d'euros, Netflix réfléchit en milliards d'euros. Surtout, ces nouveaux acteurs n'obéissent pas aux mêmes règles que celles qui sont imposées aux médias traditionnels. Il faudra que le législateur et le CSA modifient les règles pour corriger cette asymétrie. La première asymétrie est celle de la taille. Pourquoi ne pas envisager des syndications sur certains sujets entre plusieurs groupes, comme pour les droits sportifs par exemple ? En même temps, il faut aussi veiller à garantir le pluralisme et les situations de monopole ou de quasi-monopole.

Le Président de la République s'est exprimé pendant plusieurs heures d'affilée au cours de plusieurs sessions du Grand débat national. C'est un exercice démocratique nouveau, porté par l'existence des chaînes d'information en continu. Sur le décompte du temps de parole, les règles sont claires : un tiers pour l'exécutif, et les deux tiers restant sont répartis entre les autres formations de manière équitable en fonction de certains critères de représentativité politique. En période électorale, l'équité doit être parfaite en fonction de la représentation politique de chacun. Lors de l'élection présidentielle, c'est l'égalité pour tous. Il appartient au CSA de vérifier que les temps de parole sont respectés. J'ai vécu comme rédacteur en chef à France Télévisions plusieurs campagnes électorales, notamment les présidentielles : les réunions sont quotidiennes avec les services qui décomptent le temps de parole, et les calculs sont à la seconde près ! Dans le cas d'espèce, sans doute est-il légitime que les interventions du Président de la République soient incluses dans le décompte du temps de parole.

Chaque chaîne de l'audiovisuel doit avoir une ligne éditoriale claire. France 3 est historiquement la chaîne des régions ; cela ne veut pas dire qu'elle ne doive pas diffuser des programmes nationaux, comme des jeux, ou Des racines et des ailes, qui s'intéressent à la France des régions, par exemple. En ce qui concerne l'information, je ne suis pas persuadé qu'il faille réduire l'antenne de la rédaction nationale de France 3 en même temps que l'on augmente celle des régions car la demande est forte. Quand j'étais rédacteur en chef du 19/20, j'avais rêvé d'une grande tranche d'information nationale et régionale. Aujourd'hui, le journal régional est séparé du journal national par un générique et les téléspectateurs ont le sentiment de regarder deux journaux. Peut-être faut-il réfléchir à une imbrication de l'ensemble des programmes à tonalité régionale au sein d'une même tranche, entre 19 heures et 20 heures.

Enfin, je ne faisais pas partie des journalistes qui contestaient la légitimité du CSA. Il n'appartient pas aux journalistes, mais au législateur, de définir ses prérogatives.

M. David Assouline. - À chaque fois cet exercice de nomination est difficile. La loi nous donne la mission de ratifier une proposition de désignation à la majorité des trois cinquièmes, afin de dégager un certain consensus. Mais, comme je l'avais fait remarquer il y a deux ans, la méthode devrait être revue. En effet, un choix est toujours un choix par rapport à d'autres, jamais un choix en soi. On n'est jamais le meilleur dans l'absolu, mais toujours par rapport à d'autres. Il y avait probablement d'autres candidatures. Nous n'avons à nous prononcer que sur une seule candidature, ce qui personnalise excessivement les enjeux. Aussi, je réitère ma demande pour que la procédure soit similaire à celle que nous appliquons pour la désignation du président de Public Sénat, afin que nous puissions mener le processus de sélection dans la durée, établir une shortlist de plusieurs candidats, et nous prononcer sur cette base.

J'ai été surpris que vous n'ayez pas répondu, dans votre présentation liminaire, à certains éléments parus dans la presse. Ainsi, un article de Libération, ce matin, relate que vous avez écopé, en 1997, de quelques jours de mise à pied pour avoir pris part à un système de faux journaux télévisés tournés pour vanter les mérites de l'industrie pharmaceutique, et que, alors que vous étiez rédacteur en chef du 19/20 de France 3 en 2014, vous avez supprimé du journal un scoop concernant l'affaire des écoutes de Nicolas Sarkozy. Que répondez-vous à ces allégations ?

Par ailleurs, je considère qu'avoir fait sa carrière dans l'audiovisuel public constitue un point positif. Cela ne vous met pas en situation de conflit d'intérêts car la mission de service public est une mission d'intérêt général que doit aussi garantir le CSA.

La télévision en continu a un avantage concurrentiel sur le direct. Or, le direct aujourd'hui, c'est avant tout le sport et l'information. Le sport a quasiment disparu de l'audiovisuel en clair, gratuit, et, en particulier, du service public, du moins pour les grandes compétitions. Qu'en pensez-vous ?

Vous avez aussi dit que la spécificité du service public était la qualité et non la recherche de l'audience. Or, la suppression de la publicité a très peu atténué la recherche de l'audience. Il suffit de voir comment, après chaque émission, Laurent Delahousse donne ses résultats d'audience sur Twitter ! Chaque matin, on est abreuvé des scores d'audimat de la veille. Le CSA ne pourrait-il pas utiliser le « Qualimat » comme indicateur de référence ?

Je voudrais aussi connaître votre conception de l'indépendance de l'audiovisuel : quel est votre point de vue sur les concentrations économiques dans le privé, et comment concevez-vous l'indépendance de l'audiovisuel public vis-à-vis du pouvoir politique et de l'État ?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Le « Qualimat » avait été introduit en 2009 dans la loi sur l'audiovisuel à l'initiative du Sénat.

Monsieur Assouline, nous suivons la procédure de nomination prévue par la loi du 15 novembre 2013 relative à l'indépendance de l'audiovisuel public, dont vous avez d'ailleurs été rapporteur. La future loi sur l'audiovisuel sera peut-être l'occasion d'en rediscuter. Pour l'heure, nous appliquons la loi.

M. Hervé Godechot. - Vous avez fait référence à un article de Libération, paru très opportunément hier soir, à la veille de mon audition... Ce n'est sans doute pas le fait du hasard et cela en dit en long sur certaines tentatives pour faire pression sur la représentation nationale. Je ne connais pas le journaliste qui a écrit l'article. Il fait référence d'abord à un faux 19/20, affaire d'une grande complexité, qui remonte à plus de 20 ans, dont je n'ai pas été l'artisan mais bien une victime collatérale. J'étais un jeune pigiste à l'époque ; j'avais fait un micro-trottoir et une interview d'un médecin, sans être sous contrat avec France 3, le tout pour 150 euros. J'ai découvert avec tout le monde et avec stupeur à quoi ces contenus avaient servi quand l'affaire a éclaté. À l'époque il fallait chercher des responsables et, comme on ne les trouvait pas, c'est tombé sur moi et quelques autres. Connaissant la force de caractère et l'indépendance des journalistes de France 3, s'il y avait eu le moindre doute sur ma probité et sur mon sens de la déontologie et de l'éthique, jamais je n'aurais pu faire une carrière de manager pendant vingt ans dans la rédaction nationale de France 3.

J'assume aussi avoir décidé, en tant que rédacteur en chef, de surseoir à la diffusion du reportage qui mentionnait des procès-verbaux d'écoutes de Nicolas Sarkozy. Le reporter avait travaillé seul dans son coin. Il m'a présenté son travail une heure avant l'antenne. Il n'était pas diffusable en l'état, même si le contenu était intéressant. Celui-ci ne nous avait pas dit qu'il avait conclu un accord avec d'autres médias, qui l'ont diffusé tout de suite. Nous avons voulu le mettre sur notre site internet, mais il était trop tard. C'est un ratage qui est regrettable, dont je ne porte pas seul la responsabilité. Enfin cet article repose sur trois témoignages : celui d'un syndicaliste et deux témoignages anonymes... Je ne mettrai pas en doute leur existence, mais c'est quand même léger alors qu'il y a plus de 9 000 salariés dans l'entreprise et plus de 250 journalistes ! Peu de gens ont donc été interviewés pour corroborer les informations. Cela pose des questions sur la déontologie, sujet que je serais ravi d'aborder avec l'auteur de l'article.

La diffusion en direct par les chaînes d'information pose de nombreuses questions. On l'a bien vu avec la crise des Gilets jaunes. L'accès à ce qui se passe en direct est un progrès intéressant, même si toutes les chaînes d'information ne choisissent pas ce mode de traitement, très spécifique à BFM TV. Franceinfo ou LCI se précipitent moins sur la diffusion en direct. Cette pratique soulève la question de la maîtrise des images mises à l'antenne, en cas de violences par exemple. Le CSA peut être saisi ou se saisir a posteriori en cas de dérapages à l'antenne ou d'images violentes. Mais comment peut-il intervenir sur des images en direct sans porter atteinte à la liberté éditoriale ? C'est compliqué. Je ne vois pas le CSA téléphoner au rédacteur en chef pour lui demander de cesser la diffusion d'un direct... Le CSA a organisé des rencontres entre les différents responsables de chaînes sur le traitement de la crise des Gilets jaunes. Il convient donc de travailler en amont avec les responsables des chaînes pour convenir du mode de traitement approprié sans s'immiscer dans la ligne éditoriale, avec ensuite un travail de contrôle a posteriori en cas de saisine.

Vous évoquez aussi la question du sport. Les droits de diffusion sont devenus très importants, difficilement accessibles aux chaînes gratuites ; ils sont captés par les chaînes à péage qui en ont les moyens. Dès lors tout le monde ne peut plus regarder ces événements sportifs, sauf à payer des abonnements. Le sport intéresse beaucoup les Français. Alors que les Jeux olympiques seront prochainement organisés à Paris, on ne peut éluder cette question. Peut-être faut-il envisager une syndication entre les grandes chaînes gratuites pour acheter certains droits. L'autre problème est celui du piratage, qui a pris des proportions considérables : on estime à deux millions le nombre de personnes qui regardent des événements sportifs sur des sites illégaux, avec une perte de recettes évaluée à 500 millions d'euros pour le secteur. Il faut y mettre fin. Mais les deux phénomènes sont liés : à moins d'acheter plusieurs abonnements, ce qui est assez coûteux, les amateurs de sport n'ont d'autre choix que d'aller sur des sites illégaux pour regarder leur événement préféré. Il faut repenser tout cela.

Vous posez aussi la question de l'indépendance des médias. Les liens entre l'audiovisuel public et le pouvoir politique sont assez bien définis par les contrats d'objectifs et de moyens. Le CSA joue son rôle de régulation, de dialogue, de garant. Lorsque je regarde les émissions politiques sur le service public, je n'ai pas l'impression que les journalistes soient particulièrement complaisants avec le pouvoir en place. Je n'ai pas d'inquiétude sur ce sujet. En cas de problème, le CSA serait saisi. En ce qui concerne la concentration économique, et donc la dépendance des chaînes privées par rapport à leurs actionnaires, la question se pose et de manière accrue. Pourtant, là encore, le journal télévisé de TF1 n'est pas particulièrement complaisant. Il est plus difficile de réguler, mais la régulation se fait naturellement. La meilleure garantie pour le pluralisme de l'information est l'éventail de programmes offert au téléspectateur : si celui-ci a le sentiment qu'on lui présente des informations dévoyées ou qu'on le prend pour un imbécile, il peut zapper et changer de chaîne !

Mme Françoise Laborde. - Votre introduction a été large. Je voulais vous poser les mêmes questions que M. Assouline. Vous y avez répondu. Vous avez évoqué plusieurs fois la déontologie. Pourriez-vous préciser votre pensée sur ce point ?

Le piratage concerne beaucoup le sport. Ce n'est pas parce que les abonnements sont chers que le piratage est justifié. Ce sujet tient à coeur notre commission. Il faudra le résoudre. Vous avez aussi mentionné la syndication, mais je suis un peu perplexe. Pourriez-vous être plus précis ? Le CSA est pris entre la nécessité de respecter la liberté d'entreprendre et la volonté d'aider les entreprises à se regrouper.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Permettez-moi de compléter la question sur la déontologie. Je ne peux pas m'empêcher de poser la question des fausses nouvelles, les infox. Quelles actions le CSA pourrait-il mettre en oeuvre pour sensibiliser les médias et tous les internautes ? Comment aider à s'orienter, face à la multitude des informations, dans cette jungle qu'est internet ? Comment lutter contre la tentation du scoop et de l'immédiateté sans un éclairage toujours suffisant ?

M. Hervé Godechot. - La déontologie, en effet, est un sujet qui me tient à coeur, comme à beaucoup de journalistes. C'est une question essentielle si l'on veut renouer la confiance entre les citoyens et les médias. Le meilleur moyen d'y parvenir est le sérieux du travail. Au milieu de toutes les infox, il importe de proposer au public une information fiable et reconnue comme telle. Une réflexion est en cours pour la création d'un conseil de déontologie de la presse. La déontologie fait partie du travail quotidien des journalistes. Chacun a la mission de vérifier les informations, de s'assurer qu'elles ont été délivrées de manière juste et impartiale, et recueillies de manière légale, conformément aux règles éthiques. Les journalistes se surveillent eux-mêmes et se surveillent entre eux. C'est très bien comme cela. La plupart des médias ont rédigés des chartes. Dans les grands médias, il y a aussi des sociétés de journalistes qui veillent à la déontologie, tandis que le CSA joue aussi son rôle de garant en dernier ressort. L'idée d'un conseil de déontologie me semble intéressante ; il serait tripartite, avec des journalistes, des directeurs de publication, qui sont coresponsables en France des contenus publiés, et des représentants de la société civile, dont le contour reste à définir. Il faudrait aussi définir le rôle et les prérogatives de cette instance : instance de conseil, lieu de débats, ou autorité de régulation, dotée du pouvoir d'édicter des règles ou de prononcer des sanctions ? Ces points n'ont pas encore été abordés.

Comment lutter contre les infox ? C'est une question d'actualité par excellence. La crise des Gilets jaunes a donné lieu à une intense bataille de tweets. Mais les fausses informations ne datent pas d'hier, qu'il s'agisse de fantasmes, de tromperies, voire de manipulations organisées. La loi dite anti-fake news vient d'entrer en vigueur et sera en application pour les élections européennes. Le CSA et les juges l'appliqueront du mieux qu'ils pourront. Je ne vous cacherai pas que j'attends de voir comment cela se passera car des questions restent en suspens. Le Conseil constitutionnel a pris la peine de définir avec un peu de précision ce qu'il considérait être une infox. Mais comment le juge pourra-t-il statuer en 48 heures ? C'est parfois simple, parfois très compliqué : comment distinguer une infox dans une enquête sur le Lévothyrox par exemple ? Le risque est de multiplier les suspensions conservatoires et de porter atteinte à la liberté de la presse.

La future loi sur l'audiovisuel, transposition de la directive SMA, élargira, je l'espère, les compétences du CSA, pour intervenir sur internet ou les médias sociaux. Je note d'ailleurs que la Commission européenne vient d'enjoindre à Twitter et à Facebook de mettre en oeuvre certaines règles éthiques concernant les fausses nouvelles à l'approche des élections européennes.

M. Pierre Ouzoulias. - Comme vous, je crois que la pluralité des approches dans le traitement de l'information est fondamentale, aussi bien l'approche partisane que scientifique. Vous avez beaucoup travaillé sur l'économie. Avez-vous le sentiment que le pluralisme d'approches est de vigueur dans le traitement de l'information économique ? Quelles mesures envisageriez-vous pour garantir ce pluralisme, menacé par une forme de pensée commune ?

M. Hervé Godechot. - Cette question sur la déontologie scientifique est très importante. Elle est sous-jacente dans des affaires récentes qui touchent le grand public à propos du Levothyrox, du Mediator, du glyphosate, de la vaccination, de l'impact des téléphones portables sur la santé, etc. Dans un monde de plus en plus complexe, il est crucial de déployer une grande rigueur déontologique scientifique. Mais les journalistes ne sont pas toujours des spécialistes, ils sont souvent tributaires des propos, parfois contradictoires, des scientifiques qu'ils rencontrent et donc réduits à exposer les versions antagonistes.

Sur le pluralisme économique, j'ai toujours eu la chance de bénéficier d'une grande liberté de ton et de traitement. Quand on fait un édito ou une chronique, quand on prend la parole, on engage toute une rédaction, le rédacteur en chef, la direction du journal, etc. Il est donc normal de rendre compte et de soumettre ses propos à la rédaction. Le dialogue a toujours été de mise. Je n'ai jamais fait l'objet d'aucune pression, ni politique, ni économique, si ce n'est la pression amicale d'une entreprise extérieure pour inviter à traiter tel sujet plutôt qu'un autre. Dans ce cas, il suffit de dire non. Enfin, le pluralisme économique s'inscrit dans la réflexion sur le pluralisme global. Le ton et les sujets varient entre TF1, BFM, France 2, etc. Là encore, le juge de paix est le public qui se fait son opinion et est libre de changer de chaîne.

M. André Gattolin. - Votre candidature a une double particularité. C'est la première fois que l'on nous présente un candidat plus de 15 jours après l'expiration du mandat de la précédente équipe. Le mandat d'Olivier Schrameck arrivait à son terme le 23 janvier. Le Président de la République a proposé un candidat le 18 janvier, à peine 5 jours avant. Nous avons eu vent de votre candidature le 1er février. Nous sommes déjà le 6 février. Ce qui me gêne c'est que pendant ces 15 jours le collège du CSA n'a pas pu se réunir, alors que l'opinion publique s'interroge sur le traitement médiatique des Gilets jaunes, sur le décompte du temps de parole présidentiel. L'instance a été bloquée.

Vous ne serez pas le premier journaliste issu du service public à rejoindre le CSA : il y a déjà eu Geneviève Guicheney, ou Rachid Arhab, qui plutôt que démissionner s'est mis en position de disponibilité, restant donc attaché par un contrat de travail à France Télévisions, ce qui avait suscité une polémique. D'où ma question, que comptez-vous faire si vous êtes nommé : démissionnerez-vous ou demanderez-vous à être placé en disponibilité ?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Un mot sur les délais. La loi ne fixe aucun délai. Là encore, espérons que la future loi sur l'audiovisuel sera l'occasion de parfaire le dispositif. Quant au CSA, en l'absence de président, les affaires courantes ont été traitées dans la continuité, même si le collège ne s'est pas réuni en instance plénière.

M. Hervé Godechot. - Parmi les anciens membres du CSA issus du service public, vous auriez aussi pu citer mon amie Mémona Hintermann ou Françoise Laborde. Je le dis catégoriquement : je démissionnerai de France Télévisions si je suis nommé au CSA. C'est une évidence pour moi.

Mme Annick Billon. - Vous avez mis en avant l'objectif de qualité. Celle-ci est dépendante de moyens pour recruter des journalistes compétents en nombre suffisant et avec des moyens technologiques modernes. Les recettes publicitaires sont en baisse dans les médias traditionnels. Quelles recettes nouvelles envisager ? Vous avez noté la faible représentation des territoires ultra-marins et des femmes, et le manque d'expertes. Il faut aussi poser la question des contenus. Sylvie Pierre-Brossolette était favorable à la mise en place de contraintes pour améliorer la représentation des femmes. Êtes-vous favorable à l'instauration de contraintes ou d'objectifs précis ? Enfin, le CSA doit-il jouer un rôle dans l'éducation aux médias ?

M. Maurice Antiste. - Votre regard et votre jugement, très objectifs, mettent en exergue des failles étonnantes qui laissent à penser qu'un grand chantier de modernisation s'impose. Comment expliquez-vous toutes ces insuffisances après tant d'années ? Vous avez évoqué l'insuffisante représentation des femmes, la visibilité des invisibles, les difficultés d'accès au numérique. Le CSA avait-il les prérogatives suffisantes pour avancer des solutions ? Que suggérez-vous enfin pour améliorer la visibilité des outre-mer ?

M. Michel Savin. - Comment le CSA peut-il intervenir pour lutter contre le piratage des diffusions des événements sportifs ? Ce piratage met en danger certaines filières sportives car les droits audiovisuels contribuent au financement du sport amateur.

M. Hervé Godechot. - Sur les financements, madame Billon, l'enjeu est de trouver le bon équilibre pour permettre à la fois aux groupes privés d'atteindre la taille critique pour concurrencer les nouveaux entrants, qui ne respectent pas les mêmes règles, tout en veillant à préserver le pluralisme et en empêchant les concentrations qui seraient excessives, même si on n'en n'est pas là.

Les relations entre l'audiovisuel public et la tutelle sont définies par les COM. Or ceux-ci sont trop souvent remis en cause par l'État un ou deux ans après leur conclusion. Difficile dans ces conditions pour France Télévisions ou Radio France d'investir pour relever les défis de la numérisation ou du développement des nouveaux médias. Ces groupes ne sont plus seulement des chaînes de télévision ou de radio. Le développement de nouveaux modes de communication et de nouveaux médias suppose des investissements coûteux de long terme, mais le mandat des équipes dirigeantes n'est que de cinq ans. Si les COM sont instables, si la TOCE n'est plus versée à l'audiovisuel public, on impose à l'audiovisuel public de s'engager dans des choix technologiques, de gouvernance ou de structure à l'aveuglette, avec le risque de voir tout remis en cause plus tard. C'est compliqué de travailler ainsi. Le CSA doit jouer un rôle de dialogue avec l'État et France Télévisions. Il lui est difficile de demander le respect du COM s'il sait que toutes les conditions n'ont pas été réunies pour l'appliquer.

Je suis favorable à des objectifs contraignants pour la représentation des femmes, des ultramarins ou, plus largement, de la diversité culturelle. Il y a déjà des mesures en ce sens dans le COM. Sans doute faut-il aller encore plus loin. Les directions des groupes semblent proactives sur ce sujet.

L'éducation aux médias est une cause nationale. Les médias, les journalistes, l'État, le CSA, l'éducation nationale doivent travailler ensemble. Je suis, par exemple, intervenu dans une école au Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie, pour sensibiliser des élèves. Il faut apprendre aux citoyens de demain à distinguer le vrai du faux.

Monsieur Antiste, vous avez compris mon attachement aux outre-mer. Je ne peux que déplorer, comme vous, les insuffisances que vous mentionnez. On peut néanmoins se réjouir de l'émergence d'une prise de conscience globale sur la nécessité de combler notre retard. Là aussi, je suis favorable à des mesures contraignantes. France Ô va disparaître de la TNT. Nous devons veiller à ce que les ultramarins soient représentés dans tous les médias, dans tous les programmes et pas seulement dans des émissions ad hoc. La dernière fois que l'on a parlé de La Réunion, c'est lorsque l'île s'est enflammée avec les Gilets jaunes. Il me semble qu'il y a beaucoup d'autres choses à dire sur cette île !

Comment lutter contre le piratage ? Nous devons inventer de nouveaux outils. La taxation des nouveaux entrants fera bouger les lignes. Il faut aussi se donner les moyens nécessaires pour faire appliquer la loi. C'est évidemment compliqué car beaucoup de sites illégaux sont hébergés à l'étranger. Nous devons travailler avec les instances de régulation, Hadopi en France ou ses homologues européennes, car nous devons avancer de manière groupée sur cette question qui dépasse les frontières françaises.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vous remercie.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Vote et dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination, par le Président du Sénat, de M. Hervé Godechot aux fonctions de membre du CSA

La commission procède au vote sur la proposition de nomination de M. Hervé Godechot par le Président du Sénat comme membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel en application de l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous allons maintenant procéder au vote sur la candidature de M. Godechot. Nous allons tout d'abord désigner deux scrutateurs. J'appelle nos deux collègues Mme Colette Mélot et M. Jacques Grosperrin. Je rappelle que les délégations sont admises.

Y a-t-il des explications de vote ?

Il est procédé au scrutin par vote à bulletin secret et au dépouillement.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Mes chers collègues, voici le résultat du scrutin :

- nombre de votants : 40

- abstentions : 11

- nombre de suffrages exprimés : 29

- pour : 26

- contre : 3

La majorité des trois cinquièmes étant de 18 voix, les conditions prévues par l'article 4 de la loi du 30 septembre 1986 sont réunies pour permettre la nomination de M. Hervé Godechot aux fonctions de membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel.

La commission donne donc un avis conforme à la nomination de M. Hervé Godechot aux fonctions de membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).

La réunion est close à 12 h 30.