Mercredi 7 juillet 2021

- Présidence de M. Laurent Lafon, président -

La réunion est ouverte à 9 h 35.

Désignation de rapporteurs

M. Laurent Lafon, président. - Bonjour à toutes et à tous. Avant d'examiner les points inscrits à notre ordre du jour, je vous propose de désigner un rapporteur en vue de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale ayant trait à la démocratisation du sport en France. Cette désignation nous permettra de commencer les auditions dès la rentrée et de conduire un travail sérieux dans le temps nécessaire. À cette fin, je vous propose de désigner Michel Savin.

La commission désigne Michel Savin rapporteur sur la proposition de loi n° 465 (2020-2021) visant à démocratiser le sport en France (procédure accélérée).

« Promouvoir et protéger une culture partagée de l'intégrité scientifique » - Présentation du rapport

M. Laurent Lafon, président. - Nous avons le plaisir d'accueillir notre collègue député de la Vendée, Pierre Henriet, qui a réalisé avec notre collègue Pierre Ouzoulias, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), un rapport très intéressant sur l'intégrité scientifique. Je vous remercie l'un et l'autre d'avoir accepté de nous le présenter.

En février 2019, à la suite de l'écho médiatique rencontré par une série de méconduites scientifiques impliquant d'éminents chercheurs français mettant en lumière des conflits d'intérêts, des falsifications et des plagiats voire des autoplagiats, notre commission, à l'initiative de Catherine Morin-Desailly, a invité l'Office à s'emparer de ce sujet. Nous soulignions alors que ces mauvaises pratiques pouvaient porter gravement atteinte au secteur de la recherche et nous estimions que les réponses apportées à ces comportements étaient inappropriées, car trop souvent basées sur des méthodes, des sanctions et des critères de transparence hétérogènes. Il y avait donc un vrai enjeu à se saisir de cette question, qui a également été abordée dans le cadre de la loi de programmation de la recherche (LPR) via le dépôt de plusieurs amendements.

Sans plus tarder, je vous laisse la parole pour la présentation de votre rapport qui vise à présenter les moyens permettant d'appréhender, de prévenir et de traiter ces méconduites scientifiques, à s'interroger sur les limites de certains dispositifs et les moyens de raffermir les outils et procédures existants, à formuler des propositions dans le but de développer une culture de l'intégrité scientifique et un environnement propice à une recherche vertueuse.

M. Pierre Henriet, co-rapporteur. - Merci monsieur le président. Mesdames et messieurs les sénateurs, je souhaite tout d'abord remercier tous les membres de la commission présents ce matin pour l'intérêt qu'ils portent au sujet de l'intégrité scientifique et, plus généralement, à la politique publique du monde de la science. Rien ne prédestinait un sénateur communiste chevronné et un jeune député marcheur à accorder leurs violons ! C'était sans compter sans les talents du chef d'orchestre Gérard Longuet, alors président de l'OPECST, qui a eu l'audace de confronter nos idées sur un sujet commun : l'intégrité scientifique.

Notre rapport fait suite aux travaux de l'Office, après la saisine de votre commission en février 2019. Depuis cette date, nous avons vu l'intérêt de dresser un état des lieux de l'intégrité scientifique en France. Éclairer la représentation nationale sur les choix de politique publique à opérer dans le domaine de l'intégrité scientifique était judicieux et quelque peu anticipateur d'autres sujets médiatiques venus sur le devant de la scène dans un second temps. Cette saisine procède d'un contexte à la fois structurel et conjoncturel.

Sur le plan structurel tout d'abord, on remarque une appréhension très inégale de l'intégrité scientifique suivant les établissements, les universités ou les disciplines, et une culture de l'intégrité encore peu répandue malgré le développement de la formation, à destination en particulier des doctorants.

Sur le plan conjoncturel ensuite, nous avons assisté à une multiplication des cas de méconduite dont certains ont été très médiatisés avec un traitement de ces affaires qui a été réalisé de façon hétérogène et qui révélait parfois des environnements de recherche peu propices aux comportements intègres. La crise sanitaire a aussi mis en lumière une augmentation significative de la défiance à l'encontre de la parole scientifique ; c'est peut-être cela qui doit le plus nous alerter en tant que décideurs publics car les effets à moyen et long terme seront dévastateurs. L'actualité a aussi conduit à questionner les pratiques de recherche dans certaines disciplines.

Notre rapport vise à dresser un état des lieux de l'intégrité scientifique en France et à émettre des recommandations afin de la renforcer. Ce travail implique aussi d'étudier les causes qui sont susceptibles de conduire les chercheurs à des comportements peu intègres et la façon dont les cas de méconduite sont identifiés et instruits. Nos deux principaux objectifs à terme sont donc : d'abord, restaurer l'image de la science et la confiance dans la parole scientifique ; ensuite, permettre à la France de jouer un rôle moteur dans le développement et la généralisation des pratiques de recherche intègres et scientifiquement rigoureuses. En effet, si ce sujet évolue positivement en France, ce n'est pas le cas dans tous les pays, et ceux qui ont une forte puissance scientifique n'échappent malheureusement pas à la règle.

Notre éminent collègue Pierre Ouzoulias vous présentera les avancées que nous avons déjà obtenues collectivement. Ce rapport intervient dans un contexte inédit car certaines des recommandations formulées ont pu faire l'objet d'une intégration dans la législation, notamment dans le cadre de la loi de programmation de la recherche.

Plusieurs champs d'action se sont naturellement dessinés au fil des auditions et de la rédaction du rapport.

Le premier point que je souhaite souligner est le renforcement et la clarification du rôle des acteurs de l'intégrité scientifique, à commencer par les référents « intégrité scientifique » qui sont les personnes habilitées à dialoguer avec l'ensemble des acteurs dans un établissement ou dans un organisme de recherche sur ces questions. Ils sont des interlocuteurs privilégiés, mais ils ne disposent pas encore d'un statut défini à l'instar des déontologues. Il est donc essentiel de fixer un statut de référent « intégrité scientifique », notamment pour leur conférer la protection et la légitimité inhérentes à cette fonction.

Au niveau national, l'Office français de l'intégrité scientifique (OFIS) et le Conseil français de l'intégrité scientifique (CoFIS) sont hébergés par le Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres) en charge de l'évaluation des programmes et des organismes de recherche. Ces deux structures ont pour mission d'opérer des réflexions sur l'intégrité scientifique, d'observer les pratiques et d'animer les réseaux. Les missions de l'OFIS et du CoFIS méritent d'être clarifiées et leurs positions renforcées. Cela sera fait relativement rapidement si l'on se réfère aux échanges que nous avons pu avoir avec le nouveau président du Hcéres. À terme, il est souhaitable que l'OFIS puisse fonctionner de façon totalement indépendante. C'est aujourd'hui une instance incubée par le Hcéres et cette incubation est nécessaire pour renforcer cette structure. Nous espérons également que l'OFIS puisse devenir un interlocuteur privilégié des référents « intégrité scientifique » sur le terrain et puisse à terme les soutenir grâce à l'expertise développée. Cette évolution implique que l'OFIS dispose de données et d'outils suffisants pour offrir une analyse de haut niveau lorsqu'il sera saisi sur une affaire de méconduite.

Cela fait l'objet de la deuxième recommandation de notre rapport laquelle a trait à la réévaluation des conditions d'exercice des missions de l'OFIS et du CoFIS, ainsi qu'à leur rôle institutionnel.

Le deuxième point clé de ce rapport vise à faire évoluer l'appréhension des méconduites. Il apparaît que des disparités existent entre les organismes et établissements de recherche dans les procédures d'instruction, bien qu'il soit utile de saluer la qualité du guide pour le recueil et le traitement, qui a été créé par le réseau des référents « intégrité scientifique ». Nous recommandons d'harmoniser davantage les procédures en matière de méconduite. Le contradictoire doit être renforcé et la décision finale prise par un organe collégial afin d'éviter que la sanction ne repose que sur une personne, et cela afin d'éviter les conflits personnels qui sont parfois liés à des « guerres de clochers » entre différents courants scientifiques d'une même discipline. La création d'une base de données permettrait également de doter les chercheurs de référentiels en matière d'instruction et éventuellement de sanctions. Si dans la plupart des cas, seuls les cas de méconduite flagrante, comme la falsification de données ou le plagiat de grande ampleur, donnent lieu à une instruction voire à une sanction, l'intégrité scientifique doit être envisagée aussi au sens large et conduire les chercheurs à améliorer leurs pratiques, notamment dans les disciplines de sciences humaines et sociales en faveur d'une plus grande rigueur scientifique. Le comportement de certains chercheurs qui utilisent la caution universitaire pour justifier leur position militante va à l'encontre des principes de l'intégrité scientifique. La rigueur scientifique doit conduire à écarter certains travaux qui, sans justifier une sanction disciplinaire pour le chercheur qui les a produits, ne peuvent être considérés comme des publications scientifiques au sens des standards internationaux en raison d'une absence de neutralité.

Nous recommandons également que les personnes mises en cause dans les procédures soient mieux accompagnées pour éviter une incidence trop grave sur la santé physique et mentale du chercheur. La question de la réhabilitation des chercheurs sanctionnés doit aussi être développée.

Ceci me conduit au troisième pilier fondamental du rapport, à savoir la question de l'amélioration de l'environnement de recherche. Cet environnement est un facteur déterminant pour les chercheurs. Ainsi, il est urgent de réviser les modalités d'évaluation, notamment les référentiels utilisés en matière de publications et le développement de nouveaux outils plus pertinents pour apprécier la qualité du travail du chercheur. Dès 2013, la déclaration de San Francisco sur l'évaluation de la recherche avait mis en avant le fait que ces facteurs d'impact sont inopérants et biaisés, notamment parce que, d'une revue à l'autre, les distributions de citations sont asymétriques et peuvent aisément être manipulées. La limite des indicateurs métriques est largement démontrée comme étant défavorable aux jeunes chercheurs. Il faut mettre fin au « publier ou périr », ce dispositif nocif pour le monde de la recherche, mais valoriser les pratiques de recherche rigoureuses et transparentes. Nous souhaitons que la formation à l'intégrité scientifique, aujourd'hui réservée aux doctorants, soit développée et rendue obligatoire pour toute personne habilitée à diriger des recherches et pour toute personne assumant des fonctions de mentorat dans les laboratoires. C'est l'objet de notre septième recommandation.

Pour conclure et avant de céder la parole à Pierre, je souhaite redire que l'intégrité scientifique n'aura sa juste place dans le monde de la recherche que si nous nous donnons les moyens d'une politique ambitieuse sur ce volet. Être référent « intégrité scientifique » ne doit pas être une responsabilité annexe qui s'ajoute à de nombreuses autres responsabilités administratives. À ce titre, nous recommandons que la nomination d'un référent « intégrité scientifique » soit systématique dans tous les établissements. En outre, la recommandation n° 3 propose de préciser le statut de ces référents afin de garantir l'indépendance et les moyens nécessaires à l'exercice de leurs missions.

J'ai interrogé la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur les moyens affectés à l'intégrité scientifique, encore très récemment à l'occasion du printemps de l'évaluation, mais nous n'avons pas obtenu de réponses, ce qui nous inquiète grandement. Nous devons donc nous battre pour préserver la qualité de la recherche universitaire et sa rigueur scientifique. L'intégrité scientifique renforce la crédibilité de la recherche française sur la scène internationale, et il est donc important de pouvoir lui donner des moyens.

M. Pierre Ouzoulias, co-rapporteur. - Merci Pierre. Monsieur le président, mes chers collègues, je souhaiterais commencer par de vifs remerciements à Catherine Morin-Desailly, ancienne présidente de la commission, car c'est elle qui a été à l'initiative de la saisine de l'OPECST à un moment où l'intégrité scientifique n'était pas un sujet clairement appréhendé par le Parlement. Par une conjonction heureuse, notre rapport est arrivé à point nommé, au moment de la discussion sur la loi de programmation de la recherche. Cette loi ne portait initialement pas sur l'intégrité scientifique mais notre rapport, la manière dont Cédric Villani et Gérard Longuet s'en sont saisis, et l'investissement de notre rapporteure, Laure Darcos, sur ce dossier ont permis d' ajouter cette problématique comme un volet évident. J'admets aussi que certaines controverses sur certains médicaments qui pourraient être utiles contre certains virus nous ont aussi aidés... En effet, ces affaires ont mis au grand jour le caractère catastrophique de certaines controverses scientifiques et - pour le dire plus clairement - nous avons connu un effet Raoult.

Je suis très content aussi de voir que plusieurs de nos collègues ici présents sont actifs sur cette question de l'intégrité scientifique : Pierre Henriet qui continuera à travailler sur cette question au niveau de l'Assemblée nationale, Sonia de La Provôté pour le Hcéres et Laure Darcos pour la nouvelle saisine de l'OPECST par notre commission sur la science ouverte. D'ailleurs, les sujets de l'intégrité scientifique et de la science ouverte sont très proches.

Avant même le rendu de notre rapport, la loi de programmation de la recherche a intégré un certain nombre des dispositions qu'il porte. C'est un fait très rare et une avancée tout à fait intéressante. La France se trouve maintenant dotée d'outils législatifs extrêmement puissants pour encadrer l'intégralité scientifique, qui n'existent dans aucun autre pays. Nous avons le souhait de les faire évoluer en fonction des besoins.

Grâce à la loi de programmation de la recherche et au travail de nos deux chambres, plusieurs dispositions ont été introduites dans le code de la recherche. Je vous propose de les énumérer très rapidement.

L'article L.114-3-1 donne au Hcéres une mission nationale sur l'intégrité scientifique. Le haut conseil doit recenser les bonnes pratiques et évaluer l'activité des universités et des établissements de recherche sur le sujet de l'intégrité scientifique. Il doit également promouvoir l'intégrité scientifique et veiller à sa prise en compte dans les évaluations qu'il conduit et dont il valide les procédures.

Le code de la recherche donne également une définition de l'intégrité scientifique. Cette définition est très simple et s'adapte à chaque domaine de la science. Elle est la suivante : « L'intégrité scientifique contribue à garantir l'impartialité des recherches et l'objectivité de leurs résultats. Les travaux de recherche respectent les exigences de l'intégrité scientifique visant à garantir leur caractère honnête et scientifiquement rigoureux et à consolider le lien de confiance avec la société ». Cette confiance est absolument fondamentale car il ne peut pas y avoir de politique publique sans une adhésion forte aux résultats de la science. Si ces résultats sont contestés, alors c'est la capacité à agir des parlementaires qui est remise en question. Ce texte demande aussi aux établissements publics qui participent à la recherche de donner aux chercheurs les conditions pour respecter ces exigences d'intégrité scientifique. Ces établissements publics se voient ainsi dotés d'objectifs et de moyens.

Il a été par ailleurs rédigé un nouvel article du code de la recherche : « Sans préjudice des dispositions du code du patrimoine sur les archives publiques, ils [les établissements de recherche] conservent les résultats bruts des travaux scientifiques réalisés en leur sein afin de permettre leur vérification ». Ce paragraphe pose l'obligation d'enregistrement public des données de la science, et cela afin de pouvoir réaliser des contrôles.

L'article L.612-7 du code de l'éducation institue un serment de thèse. Cet amendement dont Laure Darcos et moi-même sommes coauteurs nous a valu quelques réactions dans le milieu de l'enseignement supérieur. Il prévoit que « à l'issue de la soutenance de la thèse, le candidat doit prêter serment en s'engageant à respecter les principes et les exigences de l'intégrité scientifique dans des conditions fixées par arrêté du ministre ». Avec cette disposition, l'objectif est que les jeunes docteurs soient soumis à une forme de serment d'Hippocrate, comme les docteurs en médecine, et ainsi au respect d'une forme de déontologie. J'espère que les universités se saisiront de ce serment pour donner plus de solennité à la soutenance de thèse.

Enfin, grâce à un amendement du Sénat, le code de la recherche introduit une disposition obligeant tous les chercheurs qui travaillent avec les pouvoirs publics, les collectivités et le Parlement, à déposer une déclaration préalable d'intérêts pour vérifier l'absence de conflit sur les sujets pour lesquels leur compétence est requise. Un décret d'application est en cours de rédaction. Il a été présenté au Conseil commun de la fonction publique le 28 juin dernier. Aujourd'hui, les parlementaires sont soumis à un régime de déclaration des liens d'intérêts plus strict que les chercheurs, alors que près de 80 d'entre eux viennent au Sénat, et autant à l'Assemblée nationale, pour répondre à des questions dans le cadre de missions d'information et de commissions d'enquête, sans être soumis à aucune déclaration d'intérêts, ce qui a posé régulièrement problème au Sénat quand un conflit a été mis au jour.

Notre ambition est de retisser le lien, un peu rompu, entre la représentation nationale, la nation, la science et les chercheurs pour éviter que les pires idées et le complotisme ne nourrissent une forme de retrait face à la science et à la rationalité. C'est urgent lorsque l'on note qu'une majorité de nos concitoyens refusait la vaccination contre la Covid-19 au moment de la sortie des premiers vaccins. Au pays de Pasteur, cette méfiance doit nous interpeller et nous conduire à rendre sa légitimité à la science.

M. Laurent Lafon, président. - Merci à chacun d'entre vous. Je vais maintenant donner la parole aux collègues qui souhaitent s'exprimer en commençant par notre rapporteure Laure Darcos.

Mme Laure Darcos. - Merci monsieur le président d'avoir organisé cette restitution qui montre la continuité de nos travaux avec l'OPECST et la manière dont nos propositions peuvent se décliner ensuite dans les textes de loi.

Je rejoins Pierre quant à son alerte face au complotisme. Avec la vaccination contre la Covid-19, nous voyons à quel point nous semblons atteindre un plafond de verre. Sur ce terrain, le Parlement doit pouvoir entendre la parole de scientifiques dont les travaux sont crédibles. Après les auditions que j'ai faites au printemps 2020, je suis malheureusement moins optimiste que Pierre sur la suite, car je crois que les complotistes ont encore de beaux jours devant eux.

Je souhaite également vous interroger sur les structures privées, qu'il s'agisse des entreprises ou des laboratoires. Sur le plateau de Saclay, les connexions sont nombreuses entre les grands centres de recherche et les entreprises privées. Or certains chercheurs sont tiraillés entre le rendement économique exigé par leurs financeurs et leurs recherches.

Mme Sonia de La Provôté. - Merci pour la présentation de votre rapport.

Ma question portera sur la déclaration d'intérêts car je crains que le conflit d'intérêts soit difficile à définir puisque, dans le domaine de la recherche clinique, les laboratoires privés ont forcément besoin des établissements hospitaliers pour recruter les patients ou les cohortes nécessaires à leurs travaux de recherche. Quel sera l'objectif de cette déclaration d'intérêts ? Ira-t-elle aussi loin que celle des parlementaires ? Si tel est le cas, ce sera un changement profond.

Par ailleurs, le chapitre relatif aux conditions de la recherche est très important et conditionne l'intégrité scientifique. Depuis plusieurs années, nous constatons un renforcement de la course aux financements. Or ces financements dépendent de la médiatisation des chercheurs, des publications, des projets à la mode, etc. Cette situation renvoie à la question de la sécurisation des financements et à la stabilisation des équipes de chercheurs sur le temps long, entrant de fait en contradiction avec notre fonctionnement par appel à projets qui repose sur le court ou le moyen terme. Quel est votre point de vue à ce sujet car, lors des débats sur la LPR, nous avons eu du mal à convaincre qu'il fallait financer sur le temps long ?

Enfin, quel est l'état actuel de la situation dans les organismes et universités ? Les référents « intégrité scientifique » sont-ils désormais déployés dans tous les établissements ?

M. Laurent Lafon, président. - La localisation de l'OFIS au sein du Hcéres a soulevé plusieurs questions lors de la discussion de la LPR. Nous avons compris que cette incubation était nécessaire pour des questions de mise en route. Néanmoins, nous avons tous relevé qu'il faudrait, à un moment ou à un autre, que l'OFIS soit totalement indépendant. Dans cet objectif, un calendrier a-t-il été fixé ?

Vous avez par ailleurs souligné que le cadre législatif avait été significativement renforcé. Il semble aujourd'hui solide et offre une définition de l'intégrité scientifique. Cependant, la notion de sanction n'est pas définie dans la législation. Or, pour que l'intégrité scientifique soit réelle, des sanctions ne sont-elles pas nécessaires à introduire dans un dispositif législatif ?

M. Pierre Henriet, rapporteur. - Merci pour vos interventions.

Une question a été posée sur le risque de conflit d'intérêts dans la recherche privée. C'est un sujet en soi qui aurait pu prendre une place beaucoup plus importante si nous n'avions abordé l'intégrité scientifique que sous cet angle. Il existe aujourd'hui des cas de méconduite dans la recherche publique, ainsi qu'un cadre de recherche pas toujours favorable aux comportements intègres. Nous pouvons supposer que cette proportion des méconduites est au moins la même dans le secteur privé. Aussi, je ne pense pas qu'il existe une différence majeure entre le public et le privé. La recherche du rendement n'entraîne pas forcément la falsification de données car les organismes privés posent aussi des exigences.

Nous avons aussi interrogé plusieurs directeurs régionaux en charge du contrôle de l'utilisation du crédit d'impôt recherche (CIR) et ces derniers n'ont pas avancé que l'environnement de recherche dans les structures privées était moins propice à une recherche de qualité que dans les structures publiques. En outre, les parcours public-privé des chercheurs sont nombreux et confortent une certaine homogénéité dans les pratiques.

Dans vos questions, vous avez aussi évoqué la course aux financements. C'est un point sur lequel nous mettons l'accent dans notre rapport car l'environnement actuel ne permet pas aux équipes de se focaliser uniquement sur leurs travaux de recherche. Cette situation peut mettre en danger l'efficacité des chercheurs qui peuvent parfois passer autant de temps à trouver des financements qu'à se consacrer à leurs travaux. C'est une gabegie qui pénalise l'ensemble de la recherche française. D'autres pays ont des dispositifs plus attractifs, notamment les États-Unis qui accordent des financements pour encadrer les travaux de recherche, ce qui crée les conditions d'une bonne qualité de la recherche et favorise l'attractivité de ses métiers. Cette question de l'attractivité a aussi été débattue lors des discussions sur la LPR. Sur ce sujet, l'Agence nationale de la recherche (ANR) aura un travail à mener. L'objectif est bien de freiner la course aux financements ; la LPR ne résoudra pas tout et les organismes doivent aussi être moteurs dans ce domaine.

Depuis le renforcement de l'arsenal législatif, nous avons noté de très légères améliorations en matière de nomination des référents « intégrité scientifique ». Nous attendons les décrets d'application qui viendront renforcer les décisions prises au Parlement pour que la mesure se déploie plus largement. Cependant, d'ores et déjà, l'inventaire que nous avons dressé a pu conduire certains organismes ou établissements à accélérer leurs démarches, ces derniers ne souhaitent pas se distinguer en leur défaveur par rapport à leurs pairs.

Lors de l'examen de la LPR, nous avons eu un débat passionnant sur le rôle de l'OFIS et sur son indépendance : nous estimons qu'une structure indépendante sera mieux à même de traiter les méconduites et les conflits d'intérêts, y compris lorsque ces affaires impliquent des personnalités ayant de hautes responsabilités dans les organismes de recherche. Toutefois, il est apparu compliqué de conférer d'emblée le statut d'autorité indépendante à l'OFIS, notamment parce qu'elle a très peu de moyens humains pour traiter les dossiers. Cela étant dit, le président du Hcéres a la volonté d'outiller et de renforcer les ressources humaines de l'OFIS en recourant à des conseillers juridiques. C'est aussi cette problématique qui nous a conduits à poser un cadre législatif fort et à garantir l'indépendance des organismes de recherche.

Pour le moment, nous n'avons pas fixé une date à laquelle l'OFIS pourrait être indépendant. Nous ne pouvons pas dire si l'aboutissement interviendra dans deux ans ou dans quatre ans. Il convient tout d'abord de structurer l'OFIS. Dans deux ans, nous pourrons dresser un bilan et vérifier si les saisines qui remontent vers l'OFIS permettent de poursuivre dans cette voie. C'est ensuite que nous pourrions envisager son indépendance.

M. Pierre Ouzoulias. - Lors des auditions que nous avons réalisées, les chercheurs ont été unanimes pour souligner toute l'importance de l'expertise contradictoire. Nous ne pouvons donc pas partir du principe que les expertises et compétences apportées par la recherche privée sont suspectes par rapport à celles apportées par la recherche publique. En revanche, beaucoup de chercheurs regrettent que certains domaines essentiels soient désertés par la recherche privée, comme le domaine de la toxicologie dans lequel la France était pionnière il y a quinze ans. Aujourd'hui, pour investiguer sur des sujets complexes, par exemple sur les produits phytosanitaires, nous manquons cruellement de compétences pour alimenter la décision publique. Il faudrait une politique nationale pour obliger les organismes à former des chercheurs et à constituer des équipes dans ces domaines d'intérêt national.

Vous avez aussi abordé la question de la sanction. Dans ce champ, la plus grande difficulté est celle de la judiciarisation des affaires de méconduite scientifique car les tribunaux peinent à établir les fondements scientifiques de ces comportements. Les tribunaux sont plus armés pour traiter les affaires de plagiat. Je pense notamment à la thèse soutenue par un élu des Hauts-de-Seine qui était finalement très inspirée de travaux non cités dans la bibliographie. Dans cette affaire, l'auteur a été condamné. Aujourd'hui, pour le traitement des méconduites scientifiques, il n'existe aucun code de procédure. Les établissements expérimentent simplement des formules. Nous avons notamment été surpris de constater qu'il n'existe aucun droit reconnu à la défense, c'est-à-dire qu'un scientifique sera seul face à ses pairs qui l'accuseront de méconduite et, très souvent, il ne sera pas autorisé à être secondé par un avocat ou appuyé par un représentant du personnel. De la même manière, chaque établissement définit son propre code de sanction. Qui plus est, une fois la sanction prise, il n'est pas indiqué au chercheur les moyens de sa réhabilitation. Il peut donc arriver que des chercheurs sanctionnés traînent tout au long de leur carrière une faute sans possibilité de réhabilitation. Sur cette question, nous avons résolument besoin de progresser pour définir les droits et devoirs des chercheurs et essayer de mettre en avant un code de procédure. Cependant, nous n'avons pas voulu aller trop loin avec la loi car il nous semble préférable de procéder par étapes. La reconnaissance de l'intégrité scientifique est toute récente et nous devons laisser trois à quatre ans aux structures pour voir comment elles s'approprieront ce sujet. Alors, si nous voyons que ces exigences n'ont pas été intégrées dans leurs règles internes, le Parlement pourra intervenir de manière plus directe.

Pour ce qui concerne le lien entre l'OFIS et le Hcéres, une séparation nette s'impose, presque de manière théorique, car la manière dont sont menées les évaluations peut produire des méconduites scientifiques. En effet, si un jury de recrutement retient le critère du facteur d'impact, c'est en définitive un appel à tricher sur cet objectif. À titre d'illustration, sur les critères quantitatifs de la recherche, l'Italie est passée devant la France, ce qui ne signifie pas que les investissements de recherche y aient fait un bond, mais les chercheurs italiens ont utilisé des moyens opportunistes pour utiliser les facteurs d'impact et faire progresser leur classement international. Auparavant, ils publiaient un article sur un sujet mais ils en publient aujourd'hui quatre sur la même matière. Pour cette raison, nous souhaiterions que l'OFIS soit complètement indépendant du Hcéres. Avec Laure Darcos, nous avions envisagé plusieurs formules, mais nous n'avons pas réussi à les faire aboutir dans la loi. Je pense toutefois qu'il faudra y revenir avec l'aide de Sonia de La Provôté et de Pierre Henriet, qui siègent au sein du Hcéres, pour voir si le message envoyé par la représentation nationale a bien été entendu par le Hcéres et s'il existe une volonté de son président de respecter l'indépendance de l'OFIS.

Mme Sonia de La Provôté. - Je souhaite confirmer que cette question a été évoquée lors du dernier conseil d'administration du Hcéres. À cette occasion, il a été avancé que l'indépendance de l'OFIS était bel et bien un des objectifs poursuivis, mais sans en préciser l'échéance.

M. Laurent Lafon, président. - Merci chers collègues pour cet échange. Notre commission est très attachée à la notion d'intégrité scientifique et veillera à poursuivre son travail de fond sur cette question.

Contribution vie étudiante et de campus (CVEC) - Présentation du rapport d'information

M. Laurent Lafon, président. - Je propose de poursuivre avec le rapport d'information sur la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC). C'est un dispositif mis en place par la loi « Orientation et réussite des étudiants (ORE) ». Par l'intermédiaire de notre rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement supérieur au sein de la mission « Recherche et enseignement supérieur », Stéphane Piednoir, nous nous sommes interrogés à plusieurs reprises sur la CVEC. Il nous a donc semblé utile de programmer ce point d'étape devant notre commission. Nous avons à cet effet confié à Céline Boulay-Espéronnier et Bernard Fialaire le soin de réaliser cette mission en mars dernier, mission qu'ils ont conduite dans des délais rapides. Je les remercie pour leur diligence car notre objectif était aussi de faire le lien entre leur mission et la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante dont nous avons présenté les conclusions hier après-midi.

Mme Céline Boulay-Espéronnier, co-rapporteure. - Merci beaucoup monsieur le président pour cette introduction.

Depuis sa création par la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants du 8 mars 2018, notre commission porte une attention particulière à la contribution de vie étudiante et de campus. Il est vrai qu'en seulement trois années d'existence, celle-ci a déjà connu polémiques, critiques et rebondissements : polémiques, tout d'abord, sur son plafonnement à 95 millions d'euros en loi de finances pour 2019, laissant craindre une affectation du surplus de sa collecte au remboursement de la dette publique plutôt qu'à la vie étudiante ; critiques, ensuite, sur le manque d'information et de transparence quant à son utilisation, les étudiants peinant concrètement à voir où va l'argent dans ils s'acquittent ; rebondissements, enfin, pendant la crise sanitaire, période au cours de laquelle la CVEC a été fortement mobilisée pour venir en aide aux étudiants en difficulté financière et sociale.

C'est dans ce contexte mouvementé que la commission nous a confié cette mission d'information qui se veut parfaitement complémentaire à celle sur les conditions de la vie étudiante dont nous sommes d'ailleurs tous deux membres. Nous avons mené notre travail d'audition en parallèle de celui de la mission commune d'information, ce qui nous a permis d'approfondir un certain nombre de points soulevés par les différents acteurs de la vie étudiante et d'apporter un éclairage global.

Les constats et recommandations que nous vous présentons aujourd'hui viennent donc compléter ceux et celles qui ont été examinés hier en réunion de la mission d'information, ces deux travaux de contrôle s'enrichissant mutuellement.

Pour rappel, la CVEC est une taxe d'un montant de 92 euros à la rentrée universitaire 2020, acquittée par les étudiants lors de leur inscription dans l'enseignement supérieur et affectée au financement d'actions visant à améliorer les conditions de la vie étudiante dans les campus. Depuis sa création, la CVEC a fait l'objet de trois collectes correspondantes aux années universitaires 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021. Dans les faits, celles-ci ne constituent pas trois années « pleines » : la première a été une année d'appropriation du nouveau dispositif et la troisième a été très fortement perturbée par la crise. Il est donc difficile de dresser un bilan à trois ans du fonctionnement de la CVEC, celle-ci n'ayant pas été déployée dans les conditions normales. Un autre facteur vient compliquer la donne : l'absence de données quantitatives et qualitatives consolidées au niveau national sur l'usage de la CVEC. Cette lacune fait l'objet de critiques vives et régulières tant de la part des acteurs de la vie étudiante que de la Cour des comptes ou de la représentation nationale. Notre rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement supérieur, Stéphane Piednoir, pointe ainsi chaque année le manque d'information et de transparence sur les modalités d'utilisation de la CVEC. Celle-ci étant une taxe affectée, seul un plafond de recettes prévisionnelles figure en projet de loi de finances, ce qui ne nous permet pas d'être pleinement informés de son affectation, ni de pouvoir contrôler son bon usage.

Les résultats de l'enquête nationale menée par le ministère sur les collectes 2018-2019 et 2019-2020 ne sont toujours pas parus et ne devraient pas l'être avant l'automne prochain. Le ministère invoque un ordre des priorités bouleversé par la crise, qui a quand même bon dos. Face à une contestation grandissante, la ministre s'est décidée à diligenter deux missions, l'une confiée aux inspections générales pour dresser un bilan de l'utilisation des crédits CVEC, l'autre à la direction générale de l'enseignement supérieur pour analyser le fonctionnement de la procédure CVEC. Leurs conclusions sont elles aussi attendues pour l'automne.

L'insuffisance des données disponibles fait obstacle au suivi du bon usage d'une taxe payée par les étudiants. Aussi nous demandons au ministère de rapidement mettre en place un suivi plus fin et plus systématique de l'utilisation de la CVEC permettant la publication annuelle de données consolidées au niveau national, de mieux informer le Parlement dans le cadre de l'examen annuel de la loi de finances sur l'affectation des ressources issues de la CVEC, de lever le plafond auquel elle est soumise en loi de finances puisque, par définition, la CVEC doit exclusivement être affectée à l'amélioration des conditions de vie étudiante et ne saurait être reversée à d'autres postes budgétaires.

Une meilleure transparence paraît d'autant plus nécessaire que le produit de la CVEC se révèle être dynamique. Au total, sur les années universitaires 2018-2019 et 2019-2020, ce sont près de 270 millions d'euros qui ont été collectés dont 230 millions d'euros au bénéfice des établissements affectataires et 40 millions d'euros au bénéfice des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous). Malgré l'absence de bilan national consolidé, les informations transmises par les établissements et le réseau des oeuvres universitaires permettent d'identifier les principaux domaines faisant l'objet de financements CVEC : l'aide sociale, la santé, la culture, le sport, la vie associative et l'accueil des étudiants. Selon la conférence des présidents des universités, le premier poste de dépenses est l'aide sociale, suivi par le sport, puis la santé et la culture. S'agissant des actions portées par les Crous, les secteurs du social et de la culture sont ceux qui ont le plus bénéficié de l'apport de la CVEC.

De nos auditions, il ressort que la CVEC est un précieux levier pour l'essor et la structuration de la vie étudiante et de campus. Sa création a eu le grand mérite, au-delà de l'aspect financier, d'apporter de la visibilité à la vie étudiante, ce dont elle avait besoin, et de mettre en avant l'enjeu stratégique qu'elle représente à la fois pour la réussite académique des étudiants et l'attractivité des établissements. La CVEC est pour ceux-ci un instrument de déploiement et de pilotage de leur politique de la vie étudiante, et donc un outil au service de leur autonomie. Elle est, pour les étudiants, un vecteur d'association et de participation puisqu'elle repose sur un principe de gouvernance universitaire à travers les commissions CVEC des établissements. Elle constitue une opportunité de développement partenarial dans les territoires, les Crous étant chargés d'impulser des actions impliquant les établissements non-affectataires et plus largement l'ensemble des acteurs engagés dans la vie étudiante, les collectivités notamment. Enfin, elle s'est révélée être un outil rapidement mobilisable en situation de crise. Pour toutes ces raisons, nous estimons que l'instauration de la CVEC constitue une avancée certaine pour la vie étudiante et de campus.

Nous avons néanmoins identifié plusieurs insuffisances ou lacunes dans le dispositif qui est encore jeune, donc perfectible.

M. Bernard Fialaire, co-rapporteur. - Notre premier point de vigilance concerne l'information et l'association des étudiants. Très clairement, il reste beaucoup à faire en la matière pour donner réellement aux étudiants les moyens de s'approprier la CVEC. Nous avons été frappés par le consensus des organisations étudiantes à ce sujet. Toutes pointent un problème de visibilité. Les étudiants ne sont pas au courant des actions financées grâce à elle, ni au fait de ses procédures. Cette critique renvoie à la problématique plus générale de l'accès à l'information qui est centrale dans le monde étudiant et sur laquelle a beaucoup insisté la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante.

Les acteurs institutionnels, représentants des établissements, responsables de Crous, recteurs, ne partagent pas cette appréciation très négative des étudiants. Ils estiment au contraire que d'importants efforts sont faits pour les informer. Il est vrai que de nombreuses bonnes pratiques existent dans les établissements mais elles gagneraient sans doute à être davantage diffusées et partagées. Dans le même temps, nos interlocuteurs ont reconnu que des marges de progression existent, comme l'a souligné la présidente du centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous) qui a déclaré que « la communication à destination des étudiants doit être remise sur le métier fréquemment ».

Même si la vérité se situe sans doute à mi-chemin entre ces deux positions, l'accès à une information régulière, lisible et complète nous semble être un devoir vis-à-vis des étudiants contributeurs. C'est pourquoi nous préconisons, premièrement, de systématiser l'information des étudiants en amont, au moment du paiement de la CVEC, par exemple via la diffusion d'un livret d'information ou d'un guide pratique. Deuxièmement, nous proposons de généraliser l'utilisation du logo CVEC pour permettre, en aval, l'identification des actions et des projets financés sur crédits CVEC. Nous recommandons, troisièmement, dans le cadre de l'élaboration d'un portail d'information unique recensant l'ensemble des dispositifs dédiés aux étudiants - recommandation formulée par la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante -, d'identifier clairement les actions et projets menés grâce à la CVEC. Enfin, nous proposons d'inciter les établissements d'enseignement supérieur à organiser des sessions de formation sur la CVEC à destination de leurs étudiants.

Les représentants étudiants pointent également collectivement le manque d'association active des étudiants aux procédures d'utilisation et de suivi des crédits CVEC, alors que sa création reposait sur une promesse de démocratie participative universitaire. Au niveau des commissions CVEC, les remontées de terrain font état d'un degré de prise en compte des étudiants qui varie fortement d'une instance à l'autre. Dans certains établissements, leur participation se limite à proposer des idées. Dans d'autres, ils sont davantage associés à la prise de décision et au suivi des projets, mais ne disposent pas toujours des moyens et des connaissances nécessaires pour jouer un rôle actif faute de formation. Cette participation encore trop limitée des étudiants explique qu'ils aient le sentiment d'une gestion de la CVEC qui leur échappe et d'être insuffisamment acteurs de sa mise en oeuvre. Le directeur de la vie étudiante au ministère a lui-même reconnu que le système de gouvernance de la CVEC n'avait pas encore trouvé ses marques. Plusieurs interlocuteurs nous ont également alertés sur le fait que ce sont souvent les mêmes représentants étudiants qui siègent dans les instances CVEC au niveau des établissements, des Crous, des rectorats, ce qui ne permet pas de refléter la diversité des publics étudiants et de leurs attentes. Ce constat plaide pour un élargissement du vivier des représentants en incitant tous les étudiants à s'investir et à se mobiliser dans le fonctionnement de la vie étudiante.

Pour permettre aux étudiants de mieux s'approprier la CVEC, nous formulons plusieurs recommandations qui sont les suivantes. Nous suggérons premièrement d'inciter les établissements, dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion, de déployer un modèle de gouvernance de la CVEC fondé sur la participation active des étudiants. Nous proposons deuxièmement d'encourager les établissements à mettre en place des formations à destination des représentants étudiants siégeant aux commissions CVEC. Nous recommandons troisièmement, à l'occasion de la prochaine rentrée universitaire, de lancer des actions de communication pour promouvoir l'engagement étudiant.

Notre deuxième point de vigilance porte sur les disparités entre étudiants et entre établissements qui, selon nous, appellent un meilleur cadrage national de la part du ministère.

S'agissant tout d'abord des étudiants, certains d'entre eux, pourtant assujettis à la CVEC, ne bénéficient pas ou peu des services et actions qu'elle finance. Tel est notamment le cas des étudiants inscrits dans des établissements non-affectataires, des étudiants effectuant leurs études sur des sites ou antennes délocalisés et des étudiants des classes préparatoires aux grandes écoles. Or il n'est pas acceptable qu'un étudiant qui paie la CVEC ne puisse pas obtenir un retour sur investissement. Pour permettre à chaque étudiant de tirer les bénéfices de la CVEC dans sa vie de campus, nous estimons nécessaire de mieux prendre en compte l'ensemble des étudiants assujettis à la CVEC tant au niveau de la politique de la vie étudiante menée par les établissements que des projets territoriaux impulsés par les Crous. Nous nous interrogeons en outre sur la différence de traitement entre les élèves de classes préparatoires et les élèves de BTS non assujettis à la CVEC, alors que ces deux catégories d'étudiants suivent leurs formations au sein des lycées.

S'agissant ensuite des établissements, une inégalité originelle existe puisque certains sont affectataires de la CVEC, tandis que d'autres ne le sont pas, en particulier les établissements privés non labélisés établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG). Si un élargissement du périmètre des établissements affectataires ne semble pas évident au regard de la réglementation des finances publiques, il convient a minima de mieux inclure les établissements non-affectataires dans le cadre des projets partenariaux pilotés par les Crous. A ces inégalités vient s'ajouter une hétérogénéité de mise en oeuvre de la CVEC selon les établissements, qui est la contrepartie inhérente à leur autonomie. Ce constat est particulièrement visible au niveau du fonctionnement des commissions CVEC, très différentes d'un établissement à l'autre. Certaines commissions n'ont qu'un rôle consultatif, alors que d'autres sont décisionnaires. Le poids accordé à la représentation étudiante en leur sein varie de 20 % à 50 % ; les sites délocalisés sont parfois représentés mais parfois ne le sont pas. Le respect du principe d'autonomie ne permet certes pas d'imposer aux établissements les modalités des procédures CVEC, mais il appartient au ministère de fixer des orientations et d'assurer un pilotage national pour harmoniser les pratiques.

Afin de garantir un traitement plus équitable des étudiants sur l'ensemble des territoires, nous plaidons pour un cadrage plus qualitatif des établissements, c'est-à-dire : les inciter à garantir un fonctionnement des commissions CVEC conformes aux objectifs de gouvernance participative dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion, favoriser l'échange de bonnes pratiques entre les établissements en développant des outils de partage et de diffusion, élaborer au niveau national un référentiel commun de fonctionnement des commissions CVEC portant notamment sur les modalités de représentation et de participation étudiantes.

Mme Céline Boulay-Espéronnier, co-rapporteure. - Notre troisième point d'alerte porte sur la procédure de gestion de la CVEC par les établissements. Celle-ci est d'abord marquée par sa longueur. Il faut en effet compter six mois entre le paiement de la contribution par les étudiants (printemps de l'année N) et le premier versement aux établissements (fin de l'année N), puis à nouveau six mois entre celui-ci et le second versement (juin-juillet de l'année N+1). Ce laps de temps est source de complexité dans la saisie des écritures comptables, en particulier pour les petits établissements.

L'étalement de la procédure est, en outre, un facteur d'incompréhension chez les étudiants qui s'étonnent de ne pas pouvoir engager des actions une fois qu'ils se sont acquittés de la taxe.

Viennent également se greffer certaines lourdeurs administratives, notamment dues à la multiplication des demandes de remontées d'informations aux établissements de la part de leurs différents interlocuteurs publics (Crous, rectorat, ministère). Celles-ci sont souvent redondantes et ne font l'objet d'aucune centralisation. Dans le but d'alléger et de faciliter la gestion de la CVEC par les établissements, nous proposons donc de mettre à l'étude la possibilité d'un premier versement plus tôt dans l'année et de centraliser et consolider les données transmises par les établissements affectataires, soit au niveau des rectorats, soit au niveau national au moyen d'une plate-forme spécifique.

Notre quatrième remarque concerne le risque d'effet d'éviction financière. Au moment de la création de la CVEC, l'intention était de permettre aux établissements et aux Crous de mettre en oeuvre des actions nouvelles en faveur de la vie étudiante et de campus ou d'augmenter les financements alloués à des actions préexistantes. Cependant, l'attribution d'une nouvelle taxe affectée peut laisser craindre un désengagement de la part des financeurs traditionnels de la vie étudiante au premier rang desquels l'État, les établissements et les collectivités. Sur ce risque potentiel, les avis sont partagés. Plusieurs de nos interlocuteurs ont identifié des signaux dans certains territoires, certes faibles, mais qui doivent inciter à la vigilance pour éviter que la CVEC ne vienne en substitution à d'autres financements. Dans le même temps, le très fort engagement des collectivités en faveur de la vie étudiante a été souligné et salué, notamment dans le contexte de crise.

Face à un risque limité mais néanmoins réel, nous souhaitons réaffirmer que les ressources obtenues grâce à la CVEC ne se substituent pas aux financements apportés par les différents opérateurs publics de la vie étudiante, mais qu'elles viennent bien en plus.

Notre cinquième axe de vigilance porte sur la dynamique partenariale dont est porteuse la CVEC. Son déploiement est, de l'avis de tous les acteurs de la vie étudiante, à géométrie variable selon les territoires. Ce constat s'explique par un degré d'appropriation différent de l'outil CVEC par les Crous. Certains s'en sont très vite emparés pour impulser des projets territoriaux avec les établissements non-affectataires et les collectivités, alors que d'autres peinent à s'engager dans cette dynamique faute de temps et de personnel dédié.

Des marges de progression ont été explicitement identifiées par la présidente du Cnous parmi lesquelles : impliquer davantage d'établissements non-affectataires de la CVEC afin de toucher le maximum d'étudiants sur les territoires, inciter les Crous à partager et diffuser leurs bonnes pratiques, mieux harmoniser les pratiques entre Crous pour traiter équitablement tous les territoires et donc tous les étudiants.

La dynamique partenariale doit aussi être mise en oeuvre au niveau des rectorats puisque les recteurs délégués à l'enseignement supérieur sont chargés de réunir annuellement des conférences territoriales de la vie étudiante. Là encore, de grandes disparités existent d'un territoire à l'autre. Des projets partenariaux financés grâce à la CVEC ont vu le jour dans certaines régions. Dans d'autres, les avancées sont beaucoup plus timides. L'irruption de la crise a néanmoins eu le mérite de mettre un coup d'accélérateur aux échanges entre acteurs territoriaux. Ainsi, à l'initiative de plusieurs rectorats, des ateliers thématiques régionaux portant sur la précarité étudiante ont été organisés, académie par académie, pour faire émerger des solutions coordonnées. Nous estimons qu'il convient de préserver cet acquis de la crise et même de le renforcer en incitant les rectorats à monter en puissance sur cette dynamique territoriale en faveur de la vie étudiante.

M. Bernard Fialaire, co-rapporteur. - Notre sixième et dernier point d'attention concerne la mobilisation exceptionnelle de la CVEC pendant la crise qui oblige à penser l'après.

Dès le début de l'épidémie, la ministre a invité les établissements à utiliser la CVEC pour mettre en place trois types d'actions prioritaires : la satisfaction des besoins alimentaires et hygiéniques des étudiants, le financement d'outils informatiques et de forfaits de téléphonie, l'octroi d'aides financières à ceux ayant perdu leur emploi ou leur stage gratifié. Ces orientations se sont accompagnées d'un assouplissement des obligations procédurales pesant sur l'engagement des crédits CVEC, ce qui a permis un déblocage très rapide des fonds et leur affectation sur des actions urgentes. Les établissements ont ainsi été autorisés à dépasser le plafond de 30 % du montant de la CVEC normalement dédié à l'aide sociale. Selon les données du ministère, 30 millions d'euros de CVEC ont été dépensés par les établissements affectataires pendant la crise, dont 80 % au titre de l'aide sociale. Ces crédits ont prioritairement servi à lutter contre la précarité étudiante sous toutes ses formes : financière, alimentaire, menstruelle, numérique.

De manière unanime, les représentants des établissements ont considéré que la CVEC avait constitué, pendant cette période, un levier d'intervention rapide et efficace ayant fortement contribué à amortir le premier choc de la crise. Les représentants des étudiants ont eux aussi reconnu que ce recours exceptionnel avait été bénéfique pour répondre plus vite aux besoins des plus fragilisés. Cependant, des inquiétudes s'expriment aussi sur ce ciblage de la CVEC sur l'aide sociale et sur l'avenir du financement de la vie étudiante et de campus.

Aussi, il nous paraît important de rappeler la nécessité de ne pas détourner la CVEC de son objectif premier, à savoir l'amélioration et le développement de la vie étudiante et de campus qui requiert des projets structurants inscrits dans la durée. Il ne faut pas non plus substituer les crédits CVEC aux dotations de l'État s'agissant de la prise en charge sanitaire et sociale des étudiants, laquelle exige des financements récurrents et pérennes au regard de l'ampleur des besoins révélés par la crise. Il ne faut pas faire non plus de la CVEC un palliatif au manquement financier de l'État. Une fois ces fondamentaux réaffirmés, nous pensons que la crise doit être mise à profit pour réfléchir dans un cadre concerté à d'éventuelles évolutions de la CVEC.

C'est pourquoi nous proposons de lancer une consultation de l'ensemble des acteurs concernés sur la CVEC d'après-crise portant notamment sur son périmètre d'affectation. Faut-il procéder à un redimensionnement de ses domaines d'affectation, en particulier donner plus de poids au secteur du social et du sanitaire ? Faut-il introduire un fléchage sur ce qui relève du conjoncturel et du structurel ? Le financement des dispositifs exceptionnels mis en place pendant la crise grâce aux crédits CVEC doit-il être prolongé ou transformé ? Faut-il continuer à les financer par le biais de la CVEC ou les faire prendre en charge par l'État ou les collectivités ? En fonction des arbitrages rendus à l'issue de cette consultation, il conviendra de mettre en place un calendrier de sortie de l'usage exceptionnel de la CVEC comprenant des étapes de transition afin d'éviter un retour brutal de la situation d'avant-crise.

Mme Céline Boulay-Espéronnier, co-rapporteure. - Conscients d'avoir été sans doute un peu longs, nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions. Nous espérons que nos principaux constats et recommandations auront permis d'enrichir la vie étudiante et de campus de demain.

M. Laurent Lafon, président. - Merci à nos deux rapporteurs. Sans plus tarder, j'ouvre la discussion générale.

M. Stéphane Piednoir. - Merci pour cet exposé très complet qui relaie les observations que j'ai pu faire lors de la présentation de mes avis budgétaires. En fait, le péché originel est presque dans l'intitulé de la contribution de vie étudiante et de campus. En effet, si l'on opte pour le terme de CVEC, on est alors en droit d'attendre un retour effectif. Nous sommes nombreux à pointer cette défaillance car il n'y a pas de fléchage de cette manne financière qui coûte 92 euros par étudiant.

Je remercie les deux rapporteurs pour leurs propositions qui contribueront à une meilleure communication, à un fléchage plus lisible de la contribution et à une plus grande transparence. J'espère que ce rapport permettra à ce dispositif de gagner en maturité et en lisibilité. Si la CVEC a été mobilisée à d'autres fins pendant la crise, c'est qu'elle n'avait pas de finalité avant cela. C'est la démonstration par l'absurde.

Vous avez également pointé les disparités dans son utilisation par zone géographique et par typologie d'étudiants. Les étudiants de classes préparatoires sont effectivement assujettis à la CVEC, mais n'ont pas de campus puisqu'ils étudient dans des lycées, tandis que les étudiants de BTS n'y sont pas assujettis alors qu'ils suivent aussi leur parcours dans un lycée. De même, les étudiants des EESPIG paient la CVEC, mais ne perçoivent parfois aucun retour. Le mécontentement est donc en train de monter.

Je souscris bien évidemment à toutes les recommandations visant une meilleure gestion de la CVEC, notamment celle concernant son versement dans des délais plus raisonnables. Merci beaucoup pour votre travail.

M. Pierre Ouzoulias. - Merci monsieur le président, merci mes chers collègues pour la qualité de votre rapport. C'est la première fois que j'entends un bilan aussi exact et fin de l'utilisation de la CVEC. Jusqu'alors, les informations fournies aux parlementaires étaient très nébuleuses.

Le Gouvernement nous avait promis une taxe affectée pour améliorer le consentement à l'impôt, mais nous constatons que l'affectation des crédits ne permet pas aux étudiants d'obtenir un retour efficace sur la manière dont leur argent est utilisé, ce qui ruine l'argument de départ. Bien entendu, il ne peut y avoir consentement à l'impôt si l'on n'en comprend pas l'objet.

J'entends que vous vous interrogez aussi sur les moyens de pilotage infra-annuel de la contribution, c'est-à-dire comment une augmentation soudaine des besoins en matière de vie étudiante peut affecter l'usage de la CVEC. Cependant, le Parlement n'a pas d'informations sur les outils de pilotage infra-annuel.

Enfin, l'essentiel des recettes perçues par les universités échappe au contrôle du Parlement car elles relèvent du domaine réglementaire. Je pense notamment aux droits d'inscription. Il faudrait peut-être mener une réflexion sur la réappropriation par le Parlement du contrôle des moyens financiers mis à disposition en l'autorisant à discuter du budget des universités. C'est d'ailleurs une tradition ancienne qui remonte à 1956, époque à laquelle le Parlement fixait le prix d'entrée au Louvre ! Sans en arriver là, il me semble juste que le Parlement se réapproprie ces outils budgétaires qui sont fondamentaux au moins à l'occasion d'une discussion qui aurait lieu une fois par an.

M. Laurent Lafon, président. - Avant de vous laisser répondre, je souhaite ajouter quelques mots pour saluer la qualité de votre rapport et la solidité de vos propositions. C'est en effet le premier document de qualité que nous obtenons sur la CVEC.

Vous avez souligné que la CVEC avait permis d'affecter 270 millions d'euros de financement aux universités. Ces fonds ont été très utiles au-delà du contexte sanitaire que nous connaissons. Nous ne sommes pas loin du plafond inscrit dans la loi pour lequel nous nous sommes déjà battus afin de le revaloriser à 140 millions d'euros. Nous devrons sans doute être vigilants à ce sujet lors de la prochaine loi de finances.

Mme Céline Boulay-Espéronnier, co-rapporteure. - Vous avez tout à fait raison de souligner que l'intitulé même de la CVEC laisse penser que l'étudiant est au centre du système, alors que les associations d'étudiants et les étudiants eux-mêmes s'estiment exclus et déplorent l'absence d'information. Il faut donc absolument que toutes les procédures soient plus lisibles.

Il est, par ailleurs, exact que la CVEC a été très utile pendant la crise et qu'il a été possible de la mobiliser rapidement au point de se demander si elle était aussi efficace en dehors de la crise sanitaire. Celle-ci nous a montré qu'il existait des leviers d'intervention rapides et que les crédits pouvaient être débloqués extrêmement rapidement, notamment pour lutter contre la précarité étudiante.

Avec ce rapport, nous souhaitons tirer des enseignements pour l'avenir et éventuellement redessiner des périmètres. Ces perspectives pourraient porter sur la pérennité des aides sociales, demande portée par certains étudiants, et sur le fonctionnement effectif de la démocratie participative.

M. Bernard Fialaire, co-rapporteur. - Tous les étudiants paient la CVEC sauf les étudiants boursiers les étudiants étrangers et quelques autres étudiants. Ces fonds sont ensuite redistribués aux établissements en fonction de leur effectif total. La quote-part est de 41 euros pour les étudiants des universités et de 20 euros pour ceux des EESPIG. Par le passé, les étudiants payaient des droits d'inscription à la sécurité sociale étudiante de l'ordre 217 euros, alors que la CVEC n'est que de 92 euros.

Sur la méthode, il faisait sens de mener nos travaux en même temps que ceux de la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante. Nous regrettons toutefois que les conclusions de la mission d'inspection et de l'audit interne ne soient attendues que pour l'automne. Nous pourrons donc refaire le point à cette échéance sur la base de ces nouvelles informations.

Par ailleurs, laisser de la souplesse en période de crise est une bonne chose, mais nous souhaiterions que les efforts soient renforcés, notamment dans les territoires où il y a des lacunes en infrastructures sportives, culturelles ou de soutien à la vie étudiante. La situation ne pourra être améliorée que par davantage de communication entre les acteurs locaux de la vie étudiante. Dans certains territoires, les établissements éloignés des grands centres universitaires et les établissements non-affectataires peuvent bénéficier de la CVEC grâce à la part gérée par les Crous, ce qui contribue à prendre en compte l'ensemble des étudiants ; telle est bien la mission de la CVEC. Mais c'est un outil encore jeune et dont l'utilisation est aujourd'hui teintée par la crise.

Aujourd'hui, nous avons absolument besoin de la vigilance du Parlement sur le niveau de son plafond de recettes prévisionnelles et sur l'harmonisation des pratiques au niveau national.

Mme Monique de Marco. - Ce rapport est très intéressant mais il serait utile de disposer d'un suivi de l'utilisation de la CVEC. Un nouveau point d'étape pourrait donc être organisé d'ici un an, après avoir obtenu les données qualitatives et quantitatives qui vous manquent encore, notamment pour vérifier si vos préconisations ont été suivies d'effets.

M. Laurent Lafon, président. - Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de suivre attentivement l'usage de la CVEC. Après ce point d'étape très utile, il faudra confronter votre vision avec celle des deux missions engagées par le ministère. Lors de la prochaine loi de finances, nous devrons aussi être collectivement vigilants et notre rapporteur budgétaire le sera, je n'en doute pas.

Pour conclure, je dois vous demander l'autorisation de publier ce rapport.

La commission autorise la publication du rapport.

La réunion est close à 11 h 30.