Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Dépôt de rapports

Libertés et responsabilités des universités (CMP)

Discussion générale

Interventions sur l'ensemble

Conventions internationales

Travail, emploi et pouvoir d'achat (CMP)

Discussion générale

Discussion des articles

Article 4 bis A

Article 5

Article 6

Interventions sur l'ensemble

ORDRE DU JOUR

du JEUDI 2 AOûT 2007

Dépôts




SÉANCE

du mercredi 1er août 2007

15e séance de la session extraordinaire 2006-2007

présidence de M. Christian Poncelet

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Dépôt de rapports

M. le président. - J'ai reçu de M. le premier ministre, en application de l'article L. 1333-1 du code de la défense, le rapport sur la protection et le contrôle des matières nucléaires pour l'année 2006.

J'ai également reçu de M. Leclercq, président de la Commission d'examen des pratiques commerciales, le rapport d'activité pour 2006-2007 de cet organisme.

Acte est donné du dépôt de ces deux rapports. Ils seront transmis à la commission des affaires économiques et seront disponibles au bureau de la distribution.

Libertés et responsabilités des universités (CMP)

M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités des universités.

Discussion générale

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour le Sénat de la C.M.P. - Nous arrivons au terme de l'examen de la réforme de nos universités, que le Premier ministre, François Fillon, a qualifié de « réforme la plus importante de la législature ». Pour en arriver là, il aura fallu que coule beaucoup d'encre. Celle de connaisseurs de l'université -anciens ministres, enseignants-chercheurs, président d'établissement- dénonçant les dérives et les effets pervers auxquels ont conduit les textes en vigueur ; celle de nos organes de contrôle -rapports de la Cour des comptes ou des inspections générales, qui identifient les insuffisances du système, mais aussi rapports du Sénat et de l'Assemblée nationale, dénonçant, année après année, avec la régularité d'un métronome, les handicaps et tabous qui tendent à paralyser les évolutions nécessaires, bien que parfois douloureuses. Leurs propositions trouvent enfin à se concrétiser dans ce texte.

Le Sénat avait adopté quelque 80 amendements, dont une cinquantaine à l'initiative de notre commission des affaires culturelles. L'Assemblée nationale a adopté conformes neuf articles ainsi que le nouvel intitulé du projet de loi, ce qui me semble symboliquement important tant il est vrai qu'il n'y a pas de liberté sans responsabilité.

L'Assemblée nationale nous a ainsi suivis pour compléter et actualiser les missions du service public de l'enseignement supérieur. Elle a de même confirmé les dispositions introduites par le Sénat tendant à sécuriser le mode de recrutement des personnels agrégés ; à conforter le conseil scientifique ; à améliorer la participation des étudiants au conseil des études et de la vie universitaire ; à assurer le nécessaire dialogue entre les unités de formation et de recherche de médecine, de pharmacie et d'odontologie et leur université, dans le respect des responsabilités de chacun ; à clarifier les missions du comité technique paritaire ; à confirmer dans la loi la compétence du médiateur de l'éducation nationale en matière d'enseignement supérieur ; à maintenir le statut juridique du patrimoine immobilier que les collectivités territoriales mettent à la disposition des établissements ou encore à confirmer les apports précieux de la commission des finances du Sénat sur les articles dont elle s'est saisie pour avis.

Si sur un certain nombre de points, l'Assemblée nationale a utilement amélioré le texte adopté par le Sénat, elle a aussi voté des dispositions allant à l'encontre de nos positions. Nous avions souhaité mieux asseoir la légitimité du président du conseil d'administration, en prévoyant notamment qu'il serait élu par l'ensemble de ses membres, ainsi que clarifier et conforter son statut pendant la période transitoire. Or, sur ces points essentiels, l'Assemblée nationale est largement revenue au texte initial.

La CMP, au grand dam de bien des sénateurs qui y participaient, n'a pas souhaité revenir sur le mode d'élection du président. Seuls les membres élus du conseil auront donc voix au chapitre. (Murmures improbateurs sur plusieurs bancs à droite) En revanche, elle a arrêté, pour les dispositions transitoires de l'article 30, une solution de compromis.

L'Assemblée nationale avait également limité la représentation des collectivités territoriales parmi les personnalités extérieures au sein du conseil d'administration à deux membres, quand le Sénat avait souhaité qu'il ne s'agisse que d'un seuil minimal. La CMP a adopté une rédaction de nature, me semble-t-il, à répondre à l'ensemble des préoccupations.

Alors que le Sénat avait souhaité s'assurer de la représentation des quatre grands secteurs de formation au sein du conseil d'administration, seuls deux grands secteurs au moins, dans la rédaction retenue par l'Assemblée nationale, devront être représentés dans les listes d'enseignants-chercheurs, au risque de voir les représentants d'une ou deux grandes disciplines concentrer le pouvoir au sein du conseil. Et comment imaginer que les décisions stratégiques concernant les secteurs non représentés puissent être prises sans leur participation ? Nous avons convaincu la CMP de revenir assez largement à la position du Sénat, ce dont je me réjouis.

À l'article 5, relatif à l'élection, au mandat et aux compétences du président, la CMP a supprimé l'ambiguïté induite par la rédaction de l'Assemblée nationale. Le président de l'université sera élu parmi les enseignants-chercheurs, les chercheurs, les professeurs ou maîtres de conférences, associés ou invités, ou tous autres personnels assimilés, ceci sans condition de nationalité. Le futur président pourra donc ne pas appartenir à l'université concernée.

À l'article 6, relatif à la composition et aux compétences du conseil d'administration, la CMP a prévu que les personnalités extérieures comprendraient au moins un chef d'entreprise ou cadre dirigeant d'entreprise, au moins un autre acteur du monde économique et social, ainsi que deux ou trois représentants des collectivités territoriales ou de leurs groupements dont un membre du conseil régional désigné par les collectivités concernées. Je me réjouis de cette rédaction car, dans la perspective d'une plus grande ouverture des universités sur l'extérieur, ces dispositions me semblaient indispensables pour améliorer l'insertion professionnelle des jeunes diplômés et permettre aux universités, via leurs laboratoires de recherche et leurs fondations, de renforcer leur budget par des capitaux privés. Cette rédaction assure en outre une représentation équitable des collectivités territoriales, y compris par leurs groupements -communauté urbaine, communauté d'agglomérations- tout en évitant une surenchère.

À l'article 10, relatif au mode de désignation des membres des différents conseils, la CMP a adopté les dispositions suivantes : les listes des enseignants-chercheurs devront assurer la représentation des quatre grands secteurs de formation, et celle des étudiants d'au moins deux des grands secteurs enseignés dans leur université. Je me réjouis tout particulièrement de l'adoption de ces dispositions que j'ai défendues, tout au long de l'examen de ce texte, avec beaucoup de persévérance.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. - Qui trouve ici sa récompense.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. - Les tentations de monopole sont ainsi écartées et les étudiants devront s'efforcer d'éviter les listes mono disciplinaires. Je précise qu'il n'est néanmoins pas exclu, compte tenu du mode de scrutin, que l'un des grands secteurs de formation ne soit pas représenté au sein du conseil d'administration.

À l'article 14 relatif aux contrats pluriannuels d'établissement, la CMP a rétabli la disposition relative à l'outil de contrôle de gestion et d'aide à la décision, pour la rendre applicable à l'ensemble des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPCSCP). À défaut, elle ne se serait appliquée qu'aux seules universités ayant déjà opté pour l'autonomie. Or toutes les universités seront appelées, d'ici à cinq ans, à exercer de nouvelles responsabilités en matière budgétaire et de gestion des ressources humaines et les autres EPCSCP pourront le faire de façon facultative. Un tel outil de contrôle de gestion et d'aide à la décision pourra leur permettre de s'y préparer, comme l'avait souhaité votre commission des affaires culturelles.

Comme l'a dit M. Adnot, les moyens consacrés à la gestion financière ne doivent pas être regardés comme des dépenses, mais d'abord comme des sources d'économie pour l'avenir.

La CMP a supprimé la qualité requise pour diriger un bureau d'aide à l'insertion professionnelle des étudiants : ce pourra être un fonctionnaire, aussi bien qu'un ancien cadre d'entreprise. Enfin, elle a aménagé les conditions dans lesquelles un président en exercice reste en fonction lorsque la durée de son mandat restant à courir est supérieure à six mois, et précisé les modalités de désignation des personnalités extérieures du conseil d'administration qui pourront, pendant cette période transitoire, participer avec les membres élus du conseil à la délibération sur le maintien en exercice dudit président.

J'ai cité Jean Monnet en avant-propos de mon rapport : « Il ne s'agit pas d'être optimiste ou pessimiste, mais déterminé ». C'est maintenant à l'université tout entière de s'engager dans une réforme que chacun s'accorde à dire nécessaire. C'est un impératif à l'égard des communautés éducatives, qui souhaitent davantage de stratégie, à l'égard des jeunes, qui souhaitent pouvoir s'intégrer plus facilement dans le monde professionnel, mais également à l'égard de la nation elle-même, pour qu'elle reste compétitive, car l'avenir est aux pays qui donnent la priorité à l'économie de la connaissance.

Merci, madame la ministre, pour nos dialogues directs et fructueux. J'espère que les arbitrages budgétaires vous donneront les moyens d'accompagner les universités dans leur mutation. Merci au président de notre commission des affaires culturelles, pour sa détermination bienveillante, merci à notre rapporteur pour avis, mais aussi au rapporteur de l'Assemblée nationale, avec qui j'ai engagé des échanges constructifs ! (Applaudissements à droite)

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. - Merci à tous pour votre assiduité : contrairement à ce que certains veulent faire croire, en particulier par voie de presse, l'avenir de l'université mobilise le Parlement, votre nombre aujourd'hui même -alors qu'une séance après CMP n'est jamais des plus grisantes...- démontre bien que vous vous souciez des universités, de nos enfants, de la compétitivité de notre pays ! Les deux assemblées, en recherchant toujours le compromis, ont amélioré le texte : après une phase de concertation, la réforme a pleinement bénéficié du débat politique. Elle est déterminante et ce texte forme le socle d'une réforme plus vaste de l'enseignement supérieur, que nous conduirons dans les cinq années à venir. L'idée d'autonomie a progressé sur tous les bancs, puisque nous en avons débattu les modalités et non le principe : c'est dire que la réforme était mûre et nécessaire. Les universités vont pouvoir recruter plus rapidement, créer des formations, recevoir des fonds avec plus de souplesse, mieux lutter contre l'échec grâce en particulier à l'orientation active, au tutorat et à la reconnaissance d'une nouvelle mission pour l'université, que tous les syndicats appelaient de leurs voeux : la mission d'insertion professionnelle. C'est du reste pourquoi vos collègues députés ont approuvé la création, issue d'un amendement du groupe socialiste, d'un bureau d?insertion professionnelle dans chaque université.

Les universités auront plus de souplesse pour leur gestion, l'État conservera son rôle de pilote et de garant de la réforme de l'enseignement supérieur, c'est très satisfaisant.

Ce texte porte grandement la marque du Sénat. D'abord, grâce à la volonté du président de votre commission d'ouvrir le conseil d'administration à des personnalités extérieures représentatives des collectivités locales dans leur diversité, et de ce que tous les champs disciplinaires y soient aussi présents. Le conseil d'administration ayant une mission stratégique, il faut veiller à ce que tous les champs disciplinaires y soient représentés. Grâce au Sénat également, les UFR de médecine trouvent toute leur place dans l'université.

Vous avez encore su rassurer la communauté universitaire sur la proportion toute marginale qu'y tiendra l'emploi contractuel. Ce sera un outil précieux entre les mains du président de l'université, pour recruter des compétences qui font défaut dans la communauté universitaire -par exemple des architectes, des conducteurs de chantiers- ou pour attirer des spécialistes étrangers et internationalement reconnus. Leur recrutement par contrat se fera désormais dans un cadre légal, ce qui est de loin préférable au bricolage auquel on recourt aujourd'hui. Mais l'emploi contractuel restera dans des limites clairement établies : c'est tout le sens de votre amendement instituant une proportion de l'emploi contractuel par rapport à l'emploi global de l'université.

Vous m'interrogez sur les moyens, le Premier ministre m'a confirmé hier même que la prochaine loi de finances verrait mon budget s'accroître de 1,8 milliard supplémentaire, conformément à l'engagement du Président de la République de consacrer en cinq ans 5 milliards supplémentaires pour l'université et 4 milliards pour l'enseignement supérieur. Cela démontre la priorité accordée à la société du savoir, pour laquelle nous lançons cinq chantiers : les conditions de vie étudiante, l'immobilier universitaire, les carrières, le statut des jeunes chercheurs, la réussite universitaire. Cette progression budgétaire de 5 % est sans précédent, mais cela ne m'empêchera pas, étant comptable de chaque euro dépensé, de lutter contre le moindre gaspillage !

M. Michel Charasse. - Très bien !

Mme Valérie Pécresse, ministre. - L'État accompagnera les universités sur ce long chemin de l'autonomie -que les 84 universités françaises souhaitent emprunter sans attendre.

Je serai très heureuse de vous présenter un rapport d'étape sur l'avancée de cette réforme et je vous remercie pour la qualité du texte issu de la commission mixte paritaire. (Applaudissements à droite)

M. Ivan Renar. - Face aux problèmes que connaissent nos universités, une réforme de grande ampleur était nécessaire. Il était ainsi indispensable de répondre aux difficultés des étudiants, de plus en plus confrontés à la précarité, y compris dans le domaine de la santé. Il fallait aussi lutter contre l'échec en premier cycle. Il était urgent de remédier à la pénurie de doctorants. Ces questions ont été abordées maintes et maintes fois, notamment lors des débats budgétaires et, plus d'une fois, nous avons dit que la France ne pouvait rester un grand pays dans un monde difficile, sauf à investir massivement dans la matière grise : l'éducation, la recherche mais aussi l'innovation technologique, la culture et les arts.

Certes, l'autonomie des établissements peut donner un nouveau souffle à l'enseignement supérieur mais la situation exigeait une réforme beaucoup plus audacieuse que celle qui nous est proposée, d'autant qu'elle ne s'accompagne pas des moyens financiers et humains indispensables. Alors qu'une loi de programmation était attendue, qu'un collectif budgétaire d'au moins 600 millions était indispensable pour répondre aux urgences, pas un euro de plus ne sera versé aux universités avant 2008, même si j'ai pris bonne note de l'annonce que vous venez de faire, madame la ministre.

La réforme de l'enseignement supérieur était pourtant qualifiée de prioritaire. Le monde universitaire appréciera vos déclarations d'intention, d'autant que le gouvernement vient de consacrer 11 milliards aux déductions et exonérations fiscales durant cette session extraordinaire.

Plus inquiétant encore, votre texte ne prévoit aucun financement pérenne des universités et il laisse entrevoir un désengagement progressif de l'État qui se traduira par une course aux financements. Les 85 universités ne pourront devenir autonomes dans les cinq prochaines années que si l'État assure la mise à niveau de chacune d'entre elles, notamment pour leurs bâtiments.

Au risque de nous répéter, l'État doit investir massivement dans ses universités. Pour reprendre les termes de la CPU, « la mise en oeuvre de la réforme nécessitera une forte mobilisation de moyens sans laquelle l'évolution statutaire n'apparaîtrait que comme un exercice de style. Une loi de programmation budgétaire est plus que jamais nécessaire ». Autrement dit, sans moyen, l'autonomie ne sera qu'un leurre.

Pour le gouvernement, l'autonomie se limite à une réforme du mode de gouvernance des universités. Et sur ce plan, le texte n'est guère satisfaisant puisqu'il écarte du projet d'établissement bon nombre des acteurs et usagers des universités, remettant en cause le fonctionnement collégial. Alors que toutes les énergies sont nécessaires, c'était une grave erreur que d'écarter le conseil scientifique et le conseil des études et de la vie universitaire de la gestion démocratique des établissements.

Donner un nouveau souffle à l'université nécessite de mobiliser toute la communauté universitaire sur la base de projets définis collectivement et non uniquement par un conseil d'administration resserré. En outre, les qualités des enseignants-chercheurs ne peuvent être objectivement évaluées que par leurs pairs. Aussi, la mise en place d'une nouvelle procédure de recrutement ne manquera pas de provoquer de graves dysfonctionnements. Y avait-il urgence à bouleverser un mode de recrutement certes perfectible mais qui avait fait ses preuves ?

Il aurait été plus pertinent d'engager une véritable concertation avec la communauté scientifique pour parvenir à une solution vraiment satisfaisante. Enfin, ce texte remet gravement en cause l'emploi statutaire qui devrait demeurer l'emploi de référence. Cela est particulièrement vrai pour les enseignants-chercheurs auxquels leur statut permet de mener des travaux de recherches sur le long terme. Il est vrai que la logique de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux entraîne des coupes claires dans tous les services et administrations de l'État et encourage le recrutement d'agents contractuels pour tous les types d'emplois.

De telles dispositions, qui fragilisent les statuts des personnels de l'université et laissent les conseils d'administration et les présidents d'université totalement libres de fixer les charges de services et les rémunérations, sont inadmissibles. L'enseignement supérieur et la recherche doivent être prioritaires et ils ont besoin d'un véritable plan pluriannuel de l'emploi statutaire.

Un mot sur notre amendement visant à protéger et à conserver les biens mobiliers des universités tels que les incunables, manuscrits et oeuvres d'art. Je regrette que cette disposition ne figure pas dans le texte et de nombreux collègues souhaitent que nous revenions sur cette question.

M. Jacques Legendre. - C'est vrai !

M. Ivan Renar. - C'est pourquoi nous déposerons une proposition de loi pour voir avec vous, madame la ministre, ce qu'il convient de faire.

Le débat se termine mais cette réforme demeure bien insuffisante au regard des défis qui doivent être relevés. En introduisant des mécanismes concurrentiels entre universités et entre personnels, elle menace l'avenir du service public de l'enseignement supérieur et de la recherche. D'autres choix étaient possibles, mais encore fallait-il entendre les propositions de la communauté universitaire, qui poursuit son travail de réflexion.

Oui, l'enseignement supérieur n'a pas de prix, même s'il a un coût ; oui, la question du financement de l'enseignement supérieur aurait dû faire l'objet d'un large débat. S'il faut imaginer de nouveaux partenariats, le service public a fait ses preuves, même s'il est perfectible. L'État devra assumer ses responsabilités concernant les universités car elles sont loin de disposer de budgets comparables à ceux des pays développés et même des pays émergents.

Les enjeux de ce siècle appellent au développement des formations supérieures et pourtant l'organisation actuelle empêche de trop nombreux étudiants de réussir. Ce texte n'y changera rien. Alors que l'avenir de notre pays dépend étroitement de l'enseignement supérieur et de la recherche, le gouvernement a privilégié l'urgence en réduisant la concertation a minima.

Si la réforme était nécessaire, cette loi suscite l'inquiétude. En témoignent les motions votées par les conseils d'université et la mobilisation des organisations de personnels.

C'est pourquoi nous voterons contre un texte qui ne redonnera pas un nouvel élan au service public des universités. Mais, comme le disait un célèbre jazzman dans un clin d'oeil à mai 68 : « Ce n'est qu'un débat, continuons le début ! » (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Marc Todeschini. - Nous voilà donc réunis pour entériner un texte présenté comme l'un des plus importants de cette législature. Or, la montagne a accouché d'une souris (« Oh ! » à droite) puisque ce projet de loi se résume à organiser une nouvelle gouvernance des universités.

Alors que tous les candidats avaient fait de l'université un des thèmes majeurs de la campagne, alors que le gouvernement nous annonçait qu'il ferait des universités et de la recherche une priorité et qu'il nous annonçait un signe fort, nous ne pouvons que constater qu'il n'a pas jugé utile d'accompagner cette loi d'un collectif budgétaire, même si le premier ministre a annoncé pour l'an prochain 1,8 milliard de plus.

Le seul signe fort après les élections aura été l'instauration d'un bouclier fiscal pour les plus fortunés et près de 13 milliards de déductions fiscales diverses. Cela méritait d'être rappelé.

Oui, nous souhaitions, nous aussi, donner plus d'autonomie à nos universités, mais pas n'importe comment. Oui, il fallait responsabiliser les présidents d'universités, mais ne pas aller jusqu'à l' hyper présidentialisation que vous instaurez. Oui, nous sommes favorables à une nouvelle gouvernance, encore faut-il que l'État assume son rôle en ce qui concerne l'enseignement supérieur et la recherche. Or, rien ne sera fait pour les conditions de vie et d'études des étudiants, rien non plus pour lutter contre la précarité dont ils sont victimes. La réforme du premier cycle, où l'échec reste massif, est encore dans les limbes. Rien, non plus, sur la place des universités face aux grandes écoles et à la recherche. Quid de la place des doctorants et des post-docs et de leur insertion professionnelle ? Quid, d'ailleurs de l'insertion de tous les étudiants ? Enfin, cette réforme ne s'accompagne pas des moyens financiers nécessaires.

Le texte voté par le Sénat n'a pas été amélioré par l'Assemblée nationale ni par la commission mixte paritaire, au contraire. D'ailleurs, une grande partie des modifications proposées par notre commission des affaires culturelles n'a pas été retenue par les députés. Il est vraiment difficile d'être dans la majorité sénatoriale depuis les élections, à croire que l'ouverture n'est pas allée jusqu'au groupe UMP et qu'elle s'est arrêtée à la défense de la francophonie ! (Exclamations à droite)

Alors que cette réforme était indispensable pour tous les personnels enseignants, administratifs et techniques et pour tous les étudiants, ce projet de loi ne laisse pas d'inquiéter, tant en ce qui concerne la situation des contractuels que la remise à plat des moyens consacrés aux universités. Dans les deux cas, vous laissez la porte ouverte à toutes les déviances possibles et nous n'aurons pas une université à deux mais à plusieurs vitesses. En refusant d'encadrer la masse salariale réservée aux contractuels, vous allez mettre à mal l'encadrement statutaire à l'université. Certes, certaines universités ont du mal à recruter des professeurs étrangers, et une certaine souplesse était nécessaire, mais il ne faut pas que les contractuels se substituent aux statutaires car l'université n'a pas besoin de plus de précarité. D'ailleurs, la Conférence des présidents d'université vous a dit sa façon de penser et son refus de l'expérimentation université par université. Il convenait en outre de remettre à niveau les dotations financières de chaque université afin de corriger les inégalités. Or, rien de tout cela ne figure dans le texte de la commission mixte paritaire.

Après vos belles promesses, nous attendions avec impatience cette loi. Or, nous restons sur notre faim car elle ne s'attaque pas aux racines du mal. Difficile dans ces conditions de vous suivre, même si nous avons voulu être une opposition constructive !

Je m'associe aux paroles de notre rapporteur pour vous dire combien nous avons apprécié le climat de travail en commission, en séance et même en commission mixte paritaire. Merci donc au président Valade et à notre rapporteur. (Applaudissements à gauche)

Mme Catherine Morin-Desailly. - Ce texte important participe à la rénovation globale de notre système d'enseignement supérieur et de recherche ; essentiellement axé sur la gouvernance et l'autonomie, il était indispensable : la compétition mondiale se joue désormais sur le terrain de la formation.

Après son passage dans les deux assemblées, dont les appréciations étaient parfois divergentes, le texte se rapproche de sa rédaction initiale ; ses éléments principaux sont préservés, qu'il s'agisse du conseil d'administration resserré, du président manager, de la clarification des procédures de décision ou des responsabilités en termes budgétaires et de gestion des ressources humaines.

Nous nous réjouissons de la rédaction de la CMP relative à la représentation des collectivités locales au sein du conseil d'administration ; à la présence au titre des personnalités extérieures d'au moins un chef d'entreprise ou cadre dirigeant ; à la représentation des quatre grands secteurs de formation dans la composition des listes pour l'élection des enseignants-chercheurs. Nous sommes en effet attachés à une expression pluraliste des disciplines enseignées et des courants d'opinion.

Enfin, même sur les procédures dérogatoires de recrutement des enseignants-chercheurs, le Parlement aura réussi à améliorer le projet de loi, notamment en garantissant la qualité académique des membres du nouveau comité de sélection. C'est déjà une avancée.

Cette réforme ne réussira toutefois que si elle est suivie d'autres réformes et de moyens. Deux sujets me semblent essentiels. J'avais plaidé, lors de la discussion générale, pour la mise en oeuvre d'une orientation active qui permette aux étudiants de passer progressivement de l'université au monde du travail. Je me réjouis donc que le projet de loi confie aux universités une nouvelle mission d'orientation et d'insertion professionnelle ; la procédure de préinscription va dans ce sens. L'université devra informer les étudiants sur le contenu et les débouchés des filières qu'ils souhaitent intégrer. Cette procédure, qui devra faire l'objet d'une attention toute particulière des établissements, rejoint la proposition de Patrick Hetzel de définir une séquence d'orientation du pré-bac au post-bac. Les débats au Sénat ont renforcé ce dispositif, notamment en instituant un bureau d'aide à l'insertion professionnelle des étudiants dans chaque université.

Notre assemblée a, également, à l'initiative de notre collègue Pierre Laffitte, proposé d'engager l'orientation dès la seconde en prévoyant une concertation entre les universités et les lycées. Il faut que l'orientation devienne une priorité dès l'enseignement secondaire. Enfin, nous saurons désormais mieux ce que deviennent les étudiants après leur sortie de l'université grâce aux statistiques et indicateurs de réussite et d'insertion professionnelle que devront publier les établissements d'enseignement supérieur.

Nous devrons poursuivre dans cette voie et traiter de l'échec en premier cycle, notamment en traduisant dans les faits les propositions du rapport Hetzel. Je pense, en particulier, à l'élaboration d'un dispositif privilégiant l'accès des bacheliers professionnels aux sections de technicien supérieur et des bacheliers technologiques aux instituts universitaires de technologie -ce qui imposera l'ouverture de places dans ces filières. Ce sont ces bacheliers qui connaissent le plus fort taux d'échec en premier cycle.

Nous savons tous, enfin, que notre pays dépense peu pour ses étudiants et ses universités, moins que pour un lycéen et bien moins que ce que dépensent les pays comparables.

M. Michel Charasse. - C'est parce qu'il met son argent ailleurs !

Mme Catherine Morin-Desailly. - Nous avions salué la volonté du Président de la République d'engager un « effort inédit » ; je me félicite que le Premier ministre ait annoncé hier que 1,8 milliard d'euros supplémentaires seraient alloués en 2008 à l'enseignement supérieur et à la recherche. Cet effort devra être poursuivi pendant le quinquennat et même au-delà. J'avais évoqué, pour ma part, un pacte d'investissement pour l'enseignement supérieur sur dix ans, nécessaire pour traiter les chantiers ouverts par madame la ministre : système d'aides sociales et logements étudiants, revalorisation des carrières des enseignants-chercheurs et statut des jeunes chercheurs, conditions matérielles de travail.... Tout cela demande un effort massif et durable pour mener 50 % d'une classe d'âge au niveau licence, comme le recommande la stratégie de Lisbonne. Nous serons attentifs, lors de l'examen du projet de loi de finances, à ce que les crédits soient bien là.

Le groupe UC-UDF votera ce texte, qui est une étape importante pour l'avenir de l'université française, même si ce n'est pas le grand projet de loi attendu. (Applaudissements au centre et à droite)

La discussion générale est close.

Interventions sur l'ensemble

M. David Assouline. - Même si le temps parlementaire que méritait ce texte, qu'on voulait fracassant, le plus important de la mandature, nous a manqué, les arguments principaux ont pu être échangés. Les débats se sont déroulés dans l'indifférence de l'opinion, parce que le gouvernement a voulu faire vite, au coeur de l'été, marquant ainsi sa défiance envers la communauté universitaire. Celle-ci pourtant, comme les personnels, comme les forces politiques, était prête à un vrai débat, consciente qu'une réforme était nécessaire. Mais vous avez fait le choix de ne légiférer que sur la gouvernance. Nous construisons le socle sur lequel la construction sera plus aisée, dites-vous ; mais ce n'est pas le cas. Il eût mieux valu commencer par les chantiers que vous avez annoncés, madame la ministre !

Il est vrai que l'autonomie ne fait pas aujourd'hui vraiment débat. Mais de quelle autonomie parle-t-on ? Pour nous, elle est synonyme de souplesse, de réactivité, de capacité de recrutement, d'investissement. Le texte fait quelques progrès dans cette direction. Mais souvenez-vous ! Il y a peu encore, lorsque la droite parlait d'autonomie, elle entendait remise en cause des diplômes nationaux, sélection et compétition ; elle pensait que de la concurrence de tous contre tous naîtrait nécessairement l'excellence. Le danger a été perçu, mais il n'est pas complètement écarté...

Le risque, c'est que demain l'État laisse filer. L'hyper présidentialisation, l'affaiblissement de la démocratie interne, la remise en cause des statuts : les risques sont là. Faites confiance aux présidents, dites-vous, les financiers privés ne seront pas si gourmands, les sciences humaines seront préservées.

Faire confiance, soit, mais la loi doit prévenir les dérives ! Et faut-il encore que l'État ne soit pas un simple accompagnateur mais encadre, donne des moyens, et en donne plus à ceux qui en ont plus besoin. Les universités solides iront vite, attireront des capitaux ; mais les autres, dans nos territoires, doivent continuer à vivre elles aussi...Elles ne le pourront qu'épaulées par un État équitable, qui répartit, surveille, encadre.

Nous avons abordé ce débat ouvert, non à un vote positif...

Plusieurs voix à droite. - Ah ! Nous étions inquiets !

M. David Assouline. - ...mais à une grande réforme qui dés 2007 se serait traduite par un effort nouveau. Une véritable ouverture politique de votre part nous aurait encouragés à l'abstention. Mais votre ouverture n'est que d'affichage, de débauchage de quelques personnalités ; sur le fond, rien ! Nous en prenons acte et tout en demeurant constructifs et forts de propositions, nous voterons contre ce projet. (Applaudissements à gauche)

M. Gérard César. - Le groupe UMP, lui, votera pour cette loi essentielle. Si nous voulons rester compétitifs au niveau mondial et protéger nos emplois, nous devons bousculer les traditions et extraire notre système universitaire des trop nombreuses contraintes qui le paralysent. Les universités pourront accéder en cinq ans à l'autonomie budgétaire et patrimoniale et s'ouvrir au monde extérieur pour améliorer l'insertion professionnelle et obtenir des financements privés. Tout le monde appelait à une telle réforme et si le texte a été soumis à la procédure d'urgence, il est avant tout le fruit de la concertation.

La Haute assemblée a enrichi le texte ; la CMP a apporté les derniers ajustements. Les sénateurs savent quels liens se nouent entre les universités et les collectivités : ces liens trouvent une traduction concrète dans la nouvelle gouvernance des établissements. Le projet de loi rééquilibre aussi la composition des différentes instances universitaires afin que leur travail gagne en rapidité et en efficacité. Nous avons souhaité garantir la représentativité en respectant la répartition des grands secteurs de formation. Je me réjouis aussi qu'ait été inscrite l'authentification du président par le conseil d'administration.

Fortes de leur nouvelle gouvernance, les universités pourront enfin assumer des compétences nouvelles et agir de manière autonome. Les fondations leur fourniront un outil de gestion supplémentaire -les fondations partenariales en particulier. Demain, nos universités pourront diversifier leurs ressources, ce qui est indispensable à leur survie ; car les engagements budgétaires de l'État pour les prochaines années, remarquables, ne peuvent suffire.

L'Assemblée nationale a souhaité autoriser les établissements à se regrouper. Nous avons inclus dans le contrat pluriannuel les modalités de la participation à un pôle de recherche et d'enseignement supérieur. Les classements internationaux prouvent clairement la nécessité d'augmenter la taille et donc la visibilité de nos universités. Nous souhaitons que des forces auparavant dispersées travaillent ensemble !

M. Jacques Valade, président de la commission. - Très bien !

M. Gérard César. - Il est important enfin que les universités publient des statistiques sur les taux de réussite, les débouchés, l'insertion professionnelle des diplômés et créent un bureau chargé d'assister les étudiants dans leur recherche de stages et de premier emploi. Ce projet de loi reconnaît -enfin !- l'orientation et l'insertion professionnelle comme des missions de l'université.

Ce texte est une première étape. Avec les autres chantiers annoncés, madame le ministre, nous bâtirons la nouvelle université. Nous serons à vos côtés ! (Applaudissements sur les bancs de l'UMP)

M. Yves Fréville. - J'hésite encore à voter ce texte. Non que l'autonomie financière m'effraye. En 1980, le Premier ministre d'alors, Raymond Barre, avait installé une commission de la réforme financière des universités, que j'avais présidée. Nous avions conclu que l'autonomie financière était un pari nécessaire. Mais dans votre texte, le risque que prévalent encore les corporatismes, les syndicalismes, les localismes, ne sont pas éliminés. Je suis très attaché à l'indépendance des corps universitaires, c'est un principe fondamental de notre République  mais il ne faut pas la confondre avec l'indépendance des universités ! Les universités appartiennent à la nation (Applaudissements sur les bancs socialistes), non aux professeurs, aux étudiants (Applaudissements à droite) ou aux personnalités extérieures ; elles appartiennent à tous.

M. David Assouline. - Pas au marché !

M. Yves Fréville. - L'élimination des personnalités extérieures de l'élection du président et les modalités de choix de ces personnalités ne me semblent pas totalement satisfaisantes.

MM. Adrien Gouteyron et Roland du Luart. - Oui !

M. Yves Fréville. - C'est un signal de fermeture des universités, quand elles auraient besoin de s'ouvrir davantage.

M. Adrien Gouteyron. - C'est dommage.

M. Yves Fréville. - Je regrette aussi que la France ne soit pas encore mûre pour créer des conseils d'orientation qui apportent tant aux universités étrangères.

Merci, madame la ministre, d'accepter de prendre un risque. Je ne sais pas si je vais vous suivre...

M. Michel Charasse. - Il faut tout de même vous dépêcher de décider !

M. Yves Fréville. - ...mais je suis heureux que vous ayez entrepris cette réforme, qui devra être prolongée ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. François Fortassin. - Elle était en effet nécessaire et attendue. Fallait-il la faire dans la précipitation ? Nos concitoyens nous prendront-ils au sérieux, lorsque nous votons une loi sur les universités le 1er août ? (Voix à gauche : « Le 4 août ! ») Nous aurions sans doute pu attendre le 15 septembre...

M. Henri de Raincourt. - L'ouverture de la chasse ! (Rires à droite)

M. François Fortassin. - La Haute assemblée a bien travaillé. Cependant j'ai en vain espéré quelques signes forts, tels qu'une rallonge budgétaire de quelques centaines de millions d'euros ; quant au slogan de l'ouverture, il n'a pas trouvé d'application pratique ici et tous les amendements de l'opposition ont trouvé porte close, je dirais même, cadenassée ! (M. le président de la commission le conteste) Je déplore en particulier votre refus d'élargir le corps électoral, d'autant qu'un président extérieur élu par un tel collège aurait eu plus de poids. C'est pourquoi, bien que le texte contienne des éléments intéressants, les Radicaux de gauche voteront contre. (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. - Sans revenir sur le fond, je voudrais dire à M. Assouline combien j'ai apprécié son changement d'attitude par rapport à un passé récent. J'espère que cette révision n'est pas trop déchirante et que l'ouverture qu'il évoque correspond à son évolution actuelle. Je m'en réjouis à la fois pour lui et pour le groupe dont il fait partie.

Je voudrais répondre à mon collègue et ami le professeur Fréville que nous sommes un certain nombre, universitaires ou non, à partager son interrogation. Il est évident, et nous en avons débattu tant en commission qu'en commission mixte paritaire, où le rapporteur pour avis Philippe Adnot est intervenu sur le sujet, qu'au moment où l'on parle d'autonomie des universités, de possibilités de choix, restreindre par la loi la possibilité de faire intervenir des personnalités extérieures à l'université dans des domaines essentiels, comme l'élection du président, alors qu'elles sont associées au vote du budget et au plan de développement universitaire, nous paraît une anomalie.

Nous avons accepté l'argumentation de nos collègues de l'Assemblée nationale et de Mme la ministre, à condition naturellement qu'elle ne soit pas une fin en soi, et que l'on puisse imaginer, comme vous l'avez évoqué vous-même, madame la ministre, une évolution de ces dispositions...

M. Adrien Gouteyron. - Il le faudrait !

M. Jacques Valade, président de la commission. - D'aucuns ont considéré que nous n'avions pas pris assez de temps pour poursuivre notre réflexion. Or nous sommes en session extraordinaire et le Président de la République a fondé sa campagne électorale sur la nécessité d'une rénovation de la formation des élites françaises. Nous ne pouvions pas nous permettre de perdre une année universitaire. Les cycles universitaires, en effet, sont tels que si l'on perd du temps, on passe son tour. C'est donc une excellente chose que d'aller vite et le plus loin possible. (M. Assouline s'exclame) Il faut beaucoup de courage à un gouvernement pour s'attaquer à la réforme des universités, comme l'ont montré les difficultés suscitées par telles ou telles dispositions suggérées ou prises par d'autres gouvernements.

Il faut rendre hommage à celles et ceux qui sont chargés de ce dossier et je voudrais vous dire, madame la ministre, combien j'ai apprécié votre engagement, votre pugnacité, votre capacité de persuasion. Vous obéissez, sous la responsabilité du Premier ministre, aux instructions du Président de la République lui-même -qui nous ont coûté une semaine en moins de travail- lequel a souhaité conduire la concertation.

Nous avons accompli du bon travail. Heureusement, la commission des affaires culturelles était prête, car depuis de nombreuses années, nous avons étudié ce sujet et suggéré quelques dispositions. Ainsi la commission a été très studieuse, même si son temps de travail fut limité -d'aucuns parleraient de précipitation ! Nous avons travaillé comme d'habitude, c'est-à-dire au fond, grâce à la diligence du rapporteur, à sa compétence, à son engagement personnel, avec la commission des finances et Philippe Adnot. Ainsi, nous avons abouti à ce que la position du Sénat permette des avancées utiles.

Le débat à l'Assemblée nationale nous a inquiétés : il nous a semblé retirer à ce texte des dispositions intéressantes et des améliorations que nous avions obtenues au Sénat. Par chance, grâce à une bonne concertation entre le rapporteur du Sénat et celui de l'Assemblée nationale, auquel je tiens à rendre hommage, grâce à une bonne coopération entre nous, nous avons réussi à trouver un point d'équilibre. Est-ce pour autant une loi définitive ? Aucune loi ne l'est réellement...

M. Adrien Gouteyron. - Certes !

M. Jacques Valade, président de la commission. - ... surtout dans un domaine si difficile ! Cette loi est nécessaire. Mais elle n'est évidemment pas suffisante. Vous avez vous-même, madame la ministre, ouvert cinq chantiers, auxquels nous sommes prêts à participer.

Cette loi est le socle de la réforme : nous allons voir quelles initiatives prendront les universitaires. Il appartient en effet, monsieur Fréville, aux présidents d'université de prendre l'affaire en main, avec de nouvelles structures qui leur sont proposées, de nouvelles responsabilités, par rapport au passé, le respect des libertés universitaires, auxquelles nous sommes très attachés, et des moyens supplémentaires.

Nous étions en effet partis de l'hypothèse de 0,8 milliard d'euros pour la recherche, confirmés après le séminaire gouvernemental d'hier ; s'y ajoutent, en conformité avec l'engagement du Président de la République, un milliard d'euros pour l'enseignement supérieur, soit 1,8 milliard d'euros au total.

M. David Assouline. - Insuffisant !

M. Jacques Valade, président de la commission - Comme vous l'avez dit, madame la ministre, nous nous donnons les moyens structurels et matériels de faire évoluer l'université dont l'État sera l'accompagnateur, pour aller dans le sens que nous souhaitons tous, c'est-à-dire celui de l'amélioration de la performance des universités. Il y a un corps d'enseignants et de chercheurs tout à fait exceptionnels, il y a des structures et des moyens : il faut maintenant appliquer tout cela...

M. Henri de Raincourt. - Très bien !

M. Jacques Valade, président de la commission. - La commission des affaires culturelles votera, dans sa majorité, ce texte et suivra avec beaucoup d'attention l'application de cette loi, comme de la loi sur la recherche, à laquelle nous sommes également très s'attachés. (Applaudissements au centre et à droite)

L'ensemble du projet de loi, dans la rédaction résultant des conclusions de la commission mixte paritaire, est mis aux voix par scrutin public à la demande du groupe socialiste.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 322
Nombre de suffrages exprimés 321
Majorité absolue des suffrages exprimés 161
Pour l'adoption 195
Contre 126

Le Sénat a adopté. (Applaudissements à droite, où l'on félicite Mme la ministre)

Mme Valérie Pécresse, ministre. - Je tiens à vous remercier, monsieur le président, pour votre présidence bienveillante et tout à fait... présidentielle ! Je remercie également la commission des affaires culturelles, son président et son rapporteur, ainsi que l'ensemble des groupes et leurs représentants.

Je souhaite que toutes les interrogations qui demeurent sur ce projet de loi puissent être levées.

Je rappelle à l'ensemble des sénateurs qui nous ont fait l'amitié de marquer leur intérêt pour ce texte en étant présents aujourd'hui qu'il y aura un comité de suivi qui procédera chaque année à un état des lieux et auquel participeront un sénateur et un député. Sa composition n'est pas encore arrêtée, mais les parlementaires qui se sont le plus engagé dans ces débats y seront certainement associés. Nous regarderons chaque année comment cela se passe et où sont les points de blocage.

Plus de la moitié des universités ont déjà pris l'attache de mon ministère pour préparer leur autonomie. Nous avons devant nous un travail d'accompagnement considérable.

C'était un débat et c'est un début ! (Applaudissements à droite et au centre)

Conventions internationales

M. le Président. - L'ordre du jour appelle l'examen des projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l'approbation de conventions internationales. La Conférence des Présidents a retenu la procédure simplifiée. Je vais donc les mettre successivement aux voix :

- projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc relatif au statut de leurs forces ;

- projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation d'un accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Chypre relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure ;

- projet de loi autorisant l'adhésion à la convention sur la mise à disposition de ressources de télécommunications pour l'atténuation des effets des catastrophes et pour les opérations de secours en cas de catastrophe ;

- projet de loi autorisant l'approbation du septième protocole additionnel à la Constitution de l'Union postale universelle ;

- projet de loi autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume de Belgique sur la coopération sanitaire transfrontalière ;

- projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation des amendements à la constitution et à la convention de l'Union internationale des télécommunications adoptés à Marrakech le 18 octobre 2002 ;

- projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'adhésion au protocole relatif à la convention internationale de Torremolinos sur la sécurité des navires de pêche ;

- projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre la France et les États-Unis du Mexique sur le mécanisme de développement propre dans le cadre du protocole de Kyoto ;

- projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Canada sur l'exploration et l'exploitation des champs d'hydrocarbures transfrontaliers ;

- projet de loi autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif aux implantations communes de missions diplomatiques et de postes consulaires ;

- projet de loi autorisant la ratification de l'acte constitutif de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (ensemble une annexe) ;

- projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif aux transports routiers internationaux et au transit des voyageurs et des marchandises ;

- projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et l'Agence spatiale européenne relatif à l'Ensemble de lancement Soyouz (ELS), au Centre spatial guyanais (CSG) et lié à la mise en oeuvre du programme facultatif de l'Agence spatiale européenne intitulé « Soyouz au CSG » et à l'exploitation de Soyouz à partir du CSG.

Ces projets de loi sont successivement adoptés.

M. le Président. - L'Assemblée nationale n'a pas fini d'examiner les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ; je vais donc suspendre la séance.

La séance est suspendue à 16 h 35.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 17h 30.

Travail, emploi et pouvoir d'achat (CMP)

M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

Discussion générale

M. Paul Girod, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat de la C.M.P. - Permettez-moi d'excuser l'absence de M. Philippe Marini qui, retenu par des obligations impératives dans son département, ne peut vous présenter les conclusions de la CMP sur le projet de loi TEPA, dernier acte de la trilogie budgétaire, financière et fiscale de cet été, après la loi de règlement et le débat d'orientation budgétaire, CMP qui s'est réunie à l'Assemblée nationale sous la présidence de M. Didier Migaud.

Les points de désaccord étaient peu nombreux et onze des vingt-deux articles restant en discussion ont été adoptés dans la rédaction du Sénat. De fait, les dispositions que nous avions introduites ont presque toutes été conservées : à l'article premier, relatif aux heures supplémentaires, la mise en place d'un mécanisme empêchant l'optimisation fiscale et sociale, qui aurait pu coûter 400 à 500 millions par an aux finances publiques ; à l'article 3, le doublement du crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt pour les personnes handicapées ; à l'article 4, le relèvement de l'abattement applicable pour les dons aux neveux et nièces de 5 000 à 7 500 euros et la mesure de coordination relative aux réversions d'usufruit entre époux ; à l'article 4 bis, le mécanisme d'indexation des barèmes relatifs aux droits de mutation à titre gratuit en fonction de l'inflation. J'en viens à l'article 5 et à la « refacturation » aux collectivités territoriales que le Sénat préconisait de supprimer. Madame le ministre, je vous remercie d'avoir accepté de lever le gage et de confirmer votre décision en présentant un amendement au texte issu des travaux de la CMP. (M. Robert del Picchia applaudit)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - C'était chic !

M. Paul Girod, en remplacement de M. Philippe Marini. - Car cette « refacturation » était une véritable usine à gaz (M. Charasse approuve), impossible à mettre en oeuvre sur les plans technique et administratif. Les autres principaux apports du Sénat entérinés par la CMP sont à l'article 5 bis nouveau, la réduction de dix à six ans de la durée du droit de reprise de l'administration fiscale en matière d'ISF, longtemps réclamée par le Sénat, ainsi que la remise d'un rapport du gouvernement au Parlement, à la demande du groupe socialiste, sur le retour des expatriés fiscaux...

M. Jean Arthuis, président de la commission. - Les réfugiés fiscaux ! (Sourires)

M. Paul Girod, en remplacement de M. Philippe Marini. - Enfin, la CMP a adopté dans les termes du Sénat, à quelques rectifications rédactionnelles près, les articles 8 et suivants qui instaurent le RSA expérimental -monsieur le haut-commissaire, toutes nos félicitations !- ainsi que l'article 14 introduit à l'initiative des sénatrices de l'UMP relatif à la formation des femmes qui reprennent une activité professionnelle.

En revanche, la création à l'article 6 d'un crédit d'impôt égal pour les redevables de l'ISF qui investissent dans les PME ou font des dons au profit d'organismes d'intérêt général a donné lieu à de vifs débats. La CMP, conformément aux souhaits de l'Assemblée nationale, a exclu les groupements fonciers agricoles du dispositif et maintenu l'agrément pour les établissements d'enseignement supérieur susceptibles de recevoir des dons. Par parenthèse, sur le dernier point, le gouvernement donne finalement raison au Sénat puisqu'il s'apprête à présenter un amendement supprimant l'agrément et, madame le ministre, nous vous en savons particulièrement gré. Mais le Sénat a emporté l'adhésion de la CMP sur une question essentielle : les modalités suivant lesquelles les investissements donnant lieu à crédit d'impôt sont mis à la disposition des PME. Lors des débats, nous avions trouvé un compromis. D'une part, nous avions donné satisfaction aux partisans de l'investissement direct qui défendaient l'importance du lien personnel entre investisseur et PME -pour préserver l'affectio societatis- en adoptant le dispositif proposé par M. Adnot, qui permet aux redevables de l'ISF de bénéficier d'un crédit d'impôt de 50 % dans la limite de 10 000 euros s'ils investissent dans des fonds d'investissement de proximité. D'autre part, nous n'avions pas fermé la porte aux petits contribuables de l'ISF en votant un dispositif favorisant la constitution de clubs d'investissements. Notons que l'avantage fiscal est à mesure de la prise de risque : le crédit d'impôt est de 75 % pour les investissements directs tandis qu'il est de 50 % pour les investissements « intermédiés », car ils sont moins dangereux.

Enfin, le Sénat a renoncé au dispositif d'auto-liquidation du bouclier fiscal, difficile à mettre en oeuvre, mais nous espérons que cette mesure aboutira dans le cadre de la loi de finances pour 2008. En effet, on fait un mauvais procès au bouclier fiscal : sur 90 000 contribuables éligibles, seuls 12 000 sont assujettis à l'ISF. Bref, le bouclier fiscal bénéficie d'abord aux petits contribuables qui se sont enrichis suite à un accident de la vie... Les deux rapporteurs généraux ont adressé une lettre au ministre de l'économie pour qu'il étudie l'élargissement de la procédure d'auto-liquidation à tous les bénéficiaires du bouclier fiscal par l'intermédiaire d'un crédit d'impôt.

Cela clôt un certain nombre de procès d'intention fait au gouvernement et à sa majorité.

La majorité de la commission estime que ce texte fait partie d'un dispositif global qui devrait rapprocher l'ensemble des Français de leurs entreprises et créer un choc de confiance. Il engage ceux qui ont réussi à mettre leur énergie au service de l'économie tout entière et aide le pays à retrouver le goût du risque.

Je remercie Mme la ministre, au nom de la commission des finances, de son attention à nos propositions. Nous voterons ce texte pour appuyer son effort et celui du gouvernement. (Applaudissements à droite et sur quelques bancs au centre)

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.  - « Le travail est un trésor » : ce dernier vers du Laboureur et ses enfants de Jean de La Fontaine résume bien le sens du projet de loi sur lequel vous êtes appelés à vous prononcer aujourd'hui : revaloriser le travail, réconcilier les Français avec le succès. C'est un texte qui rompt avec bien des ambiguïtés. Ambiguïté intellectuelle sur le sens du travail, ambiguïté morale sur la valeur de l'argent, ambiguïté économique sur l'avenir de la France.

M. Charles Revet. - Très bien !

Mme Christine Lagarde, ministre. - Nous avons voulu rendre confiance à nos concitoyens. Confiance en eux-mêmes, puisque leur travail sera reconnu à sa juste valeur, confiance en l'avenir, puisqu'ils pourront désormais transmettre en franchise de droits de succession, confiance en l'État, qui est là pour aider au respect de l'intérêt général. Car c'est un choc de confiance qui peut propulser la croissance et par là, dynamiser l'emploi.

Texte de confiance, texte, aussi, de liberté. Liberté de travailler plus pour gagner plus, liberté de transmettre, liberté de donner et d'affecter à l'entreprise.

Cette loi se fonde sur des principes clairs. Travail, mérite, juste récompense des efforts accomplis dans le libre choix. Je suis fier de le revendiquer.

Je remercie l'ensemble des sénateurs pour le travail accompli, pour leurs propositions fructueuses, pour des débats parfois hauts en couleurs. La loi y aura gagné en précision, en efficacité, en clarté. Je pense en particulier au dispositif de l'intermédiation, voté à l'initiative de la commission des finances, qui permet à un redevable de l'ISF souhaitant investir dans les PME de placer jusqu'à 10 000 euros dans les fonds d'investissement de proximité en bénéficiant d'un abattement de 50 %.

S'agissant de la refacturation, débattue au cours de la navette, l'État s'engage à rembourser aux collectivités territoriales les impôts locaux dont le bouclier fiscal désormais les prive. Je suis convaincue, monsieur le rapporteur général, monsieur le président, de la bonne volonté que mettront les représentants des collectivités locales à participer au débat à venir sur les équilibres budgétaires, la réduction de la dépense publique et la question, qui les touche de près, de l'indexation des concours de l'État aux collectivités.

Je veillerai à l'application rapide des mesures que vous allez voter. Les dispositions de l'article premier relatif aux heures supplémentaires entreront en vigueur au 1er octobre 2007 ; les revenus des étudiants de l'ensemble de l'année 2007 seront exonérés ; tous les prêts de moins de cinq ans bénéficieront des mesures prévues à l'article 3 et les dispositions de l'article 4 entreront en vigueur dès le lendemain de la parution du texte au Journal officiel. Les Français verront vite l'impact de ce texte sur leur pouvoir d'achat. Nous tiendrons l'obligation de résultat que nous nous sommes donnée. Je suis convaincue que ce texte rétablira la confiance. (Applaudissements à droite)

M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. - Je voudrais souligner que, pour ce qui concerne les articles que j'ai eu l'honneur de défendre devant vous, tous les amendements adoptés par le Sénat ont été repris par la CMP. Certains permettent de réouvrir la porte aux départements qui souhaiteraient expérimenter le contrat unique d'insertion ; d'autres clarifient les critères d'entrée des départements dans le dispositif expérimental du RSA ; l'obligation, à laquelle je suis très attaché, d'associer les bénéficiaires de ces politiques au programme d'expérimentation est inscrite dans le texte.

Le Sénat tenait aussi à ce que l'on ne néglige pas les dizaines de droits connexes mis en place par l'État ou par les collectivités territoriales, afin qu'ils se concilient avec le nouveau dispositif. Il eût été absurde de simplifier d'un côté et de maintenir la complexité de l'autre.

La démarche qui guide le RSA est au carrefour de trois exigences, conformes à celles de votre Haute assemblée. (M. Revet approuve) Le Sénat a toujours été à la pointe de l'innovation sociale, l'importante bibliographie que j'ai citée lors de la discussion générale en atteste. Nous aurons encore besoin de lui. Il a également toujours porté l'exigence du bon usage des deniers publics.

M. Charles Revet. - Absolument !

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Il n'y a pas à rougir à être économe : la dépense n'est pas un gage de l'efficacité des politiques sociales. Pour paraphraser une formule célèbre, si nous travaillons bien, nous obtiendrons plus. C'est ainsi que nous réduirons l'oxymore de la solidarité et de l'activité.

Le Sénat, enfin, est toujours sensible à la représentation des collectivités territoriales, dont ce texte fait le lieu par excellence d'élaboration des politiques sociales, l'État continuant d'assurer la solidarité nationale.

Tels sont les trois fils directeurs de ce texte. Mais notre travail ne s'achèvera pas avec lui. Il nous appartient de faire vivre l'expérimentation, pour revenir devant vous tête haute. Il nous revient aussi d'ouvrir le chantier des finances locales, celui des minima sociaux, et de lancer la réflexion sur certains dispositifs d'intéressement, afin de tourner résolument les politiques sociales vers l'activité. Nous ne pouvons pas rester éternellement les mauvais élèves de l'Europe. Il est temps que notre modèle social cesse d'être une formule pour devenir une fierté. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Yves Pozzo di Borgo. - Dans son travail, que je trouve satisfaisant, la CMP a traité de l'importante question du bouclier fiscal. La commission des finances, par la voix de son rapporteur général et de son président, avait su vous démontrer que le système actuel de liquidation du bouclier fiscal n'était pas satisfaisant et risquait de vider le dispositif de sa substance. L'obligation, pour le redevable, de formuler une demande spécifique de restitution du trop-versé, peut décourager les contribuables ayant potentiellement dépassé le plafond, soit par crainte d'attirer sur eux l'attention de l'administration fiscale...

M. Michel Charasse. - Ils ont tort !

M. Yves Pozzo di Borgo. - ...soit parce qu'ils ignorent leur droit à restitution.

L'auto-liquidation bénéficiera à tous les contribuables, puisque les contribuables à l'ISF ne seront pas les seuls concernés. Chacun n'étant pas nécessairement un fiscaliste chevronné, nous proposions que l'administration fiscale établisse elle-même le calcul ; l'auto-liquidation a finalement été retenue, il faudra en évaluer les résultats.

Nous sommes naturellement très sensibles à la compensation intégrale aux collectivités locales, indice effectif de la libre administration des collectivités. Votre engagement dans ce sens, madame le ministre, nous rassure, c'est un signal fort en direction de toutes les collectivités -un signal utile à leur confiance dans l'État, et cette dimension psychologique n'est certainement pas à négliger dans la réforme de l'État, c'en est même l'une des dimensions.

Toutes ces mesures vont dans le bon sens, mais elles doivent s'accompagner d'un véritable ajustement budgétaire. La défiscalisation des heures supplémentaires rassure, de même que la réforme du bouclier fiscal. Cependant, comme élu du 7ème arrondissement de Paris, je constate que mes électeurs ne s'enthousiasment pas nécessairement à l'annonce d'un bouclier fiscal plus protecteur, et nous ne pouvons aujourd'hui dire avec certitude quel effet aura la réforme auprès des « émigrés fiscaux ».

Il fallait s'attaquer à l'ISF, pourquoi n'avoir pas eu le courage de le supprimer tout simplement ? La « rupture » n'était-elle pas l'occasion à saisir ? L'ISF est un impôt injuste, qui rapporte peu et qui fait fuir le capital. La possibilité d'en obtenir la réduction en investissant dans des PME et en effectuant des dons au profit d'organismes d'intérêt général est un pis-aller. Il fallait encadrer les parachutes dorés pour moraliser le capitalisme. Enfin, tout faire pour activer les minima sociaux, pour lutter contre les trappes à pauvreté et à inactivité. Sur ce dernier chantier, monsieur le haut-commissaire, votre parcours suffit à ce que nous vous suivions en toute chose !

Au total, ces mesures représentent près de 14 milliards de moindres rentrées fiscales. Elles devraient être compensées par la confiance, le mouvement et le dynamisme économique, c'est ce que nous espérons. Mais l'état des comptes publics n'est pas bon : il faut prévoir 15 milliards pour les autres engagements du candidat président, tout en conservant l'objectif d'un retour à l'équilibre des finances publiques à l'horizon 2012. Il faut donc trouver 80 milliards d'ici cinq ans, sans parler des 45 milliards de la programmation militaire, même si certaines de ces dépenses s'échelonneront jusqu'en 2020. Dans la lettre qu'il a adressée à la commission chargée de l'élaboration du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, le Président de la République vient de rappeler que l'effort de dépense devrait être maintenu à 2 % du PIB : cela ne sera pas sans conséquences budgétaires.

Madame le ministre, la logique du TEPA est keynésienne : c'est celle de la dépense fiscale. En redonnant du pouvoir d'achat par la fiscalité, on stimule la consommation. C'est une bonne chose quand l'économie subit un repli de la demande, à condition que l'économie nationale soit suffisamment protégée de la concurrence étrangère ou que ses produits soient suffisamment compétitifs. Ce n'est pas le cas en France et c'est pourquoi nous devons rompre avec cette logique keynésienne que nous suivons depuis cinquante ans. Notre environnement économique a changé, nous subissons des chocs structurels qui appellent des remèdes de même nature : ce n'est qu'au prix d'un assainissement des comptes publics, d'une véritable réforme de l'État et du financement de la protection sociale, que la confiance et la croissance reviendront ! La France dispose, grâce à l'action du Président de la République, d'un crédit fort dans l'Union européenne, mais cette confiance dépend de notre capacité à nous conformer aux critères de Maastricht. Le gouvernement en est parfaitement conscient, le Premier ministre l'a confirmé en qualifiant le redressement des finances publiques de « clé de rupture économique ». La tâche sera très difficile : nous sommes dans un paquebot immense qui avance tout seul, ayons le courage de l'alléger ! L'opinion publique elle-même sait que c'est nécessaire, les agents publics également, très souvent même contre le discours de leurs syndicats. Nous vivons au dessus de nos moyens !

Il faut s'attaquer aux pesanteurs administratives, remettre en cause certaines missions que l'État ne peut plus assumer. Le Président de la République l'a dit aux parlementaires le 20 juin 2007 « Nous le ferons en délestant l'État des missions et des dépenses du passé pour en faire l'instrument décisif de notre avenir ». Nous attendons les propositions du gouvernement dans ce sens, nous les examinerons à l'aune des travaux d'évaluation des missions publiques, qui ne manquent pas dans nos grands corps de l'État ni au Parlement !

L'État recèle encore des doublons absurdes. Si je devais vous conseiller une lecture de vacances, madame le ministre, je vous recommanderais volontiers Le Bottin administratif ! Sa lecture est des plus instructives, surtout dans le détail : on y apprend, par exemple, que deux hauts fonctionnaires de la défense sont attachés... au ministère de la culture ! On s'interroge sur leur emploi !

Le Canada présente un exemple réussi d'assainissement des finances publiques : la diminution de la pression du secteur et de l'endettement publics a fait diminuer le chômage. Le gouvernement doit être courageux : nous accompagnerons son action s'il ne faiblit pas, mais je crains qu'il n'ait déjà donné quelques signes de faiblesses.

Je regrette l'abrogation du décret pris par M. de Robien pour supprimer les pesanteurs du décret de 1950, relatif aux obligations réglementaires de service pour le personnel du second degré : c'est un mauvais signe donné à l'Éducation nationale. De même, le gouvernement plie-t-il déjà sur le nombre de remplacements de fonctionnaires partant à la retraite !

Le prochain budget est placé sous le signe de la lutte contre les déficits, c'est une excellente nouvelle. Mais comment concilier le TEPA et cet impératif ? Je regrette que les solutions proposées par notre collègue député, M. de Courson, n'aient pas été retenues.

Mais ces quelques regrets ne m'empêcheront pas, avec la majorité du groupe UC-UDF, de voter ce texte, parce que j'ai confiance dans la volonté de votre gouvernement, madame le ministre, de prendre les mesures structurelles dont notre pays a besoin ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Robert Bret. - La représentation nationale est détournée de son rôle d'expression de l'intérêt général, pour se plier aux promesses électorales du Président de la République, langage certes séduisant mais ô combien éloigné des réalités ! Les heures supplémentaires à moindres charges, afin de « travailler plus pour gagner plus » ? La vérité, c'est que les salariés les plus modestes seront les dindons de la farce : moins de prime pour l'emploi, d'allégements de fiscalité locale, d'indemnités journalières en cas de maladie, moins de retraite, voilà la réalité ! Et les entreprises pourront utiliser les heures supplémentaires plutôt que d'embaucher ou d'augmenter les salaires. Le gouvernement prétend augmenter le pouvoir d'achat, alors qu'il comprime le traitement des fonctionnaires depuis 2002 et qu'il a limité à 2,1 % la hausse du Smic en juillet. Ce qui est certain, en revanche, c'est que la durée du travail va augmenter, et avec elle la mobilisation des outils de production et le bénéfice de l'entreprise. Cela n'a pas échappé à nos collègues de la commission des finances : le « gagner plus », ce sera pour le dividende !

A ces réalités, le texte ajoute bien des cadeaux fiscaux aux plus hauts revenus et patrimoines. Les heureux parents aisés d'étudiants bénéficieront d'une remise d'impôt sur le revenu de 1 500 euros : toujours ça de pris. Grâce à l'article 3, relatif aux prêts immobiliers, les promoteurs pourront plus facilement écouler leurs stocks de logements et les établissements financiers, se prémunir des risques croissant d'insolvabilité de leur clientèle. L'article 7, relatif aux parachutes dorés, rejoindra bientôt le musée des dispositions légales inappliquées ; tout droit inspiré de l'OCDE, il ne fait qu'aménager la piste d'atterrissage de parachutes qui resteront dorés ou argentés ! Quant au RSA, on ne sait plus s'il servira à l'insertion professionnelle des exclus du travail, ou à la démolition des statuts dans la fonction publique comme des garanties collectives dans le privé !

Que pèse d'ailleurs le RSA dans l'esprit d'un gouvernement qui ne pense qu'à imposer le service minimum, le contrat de travail unique, la généralisation des horaires de travail atypiques ?

L'article 4, relatif à la réforme des droits de mutation, est l'illustration même de la rupture : exploitant un prétendu bon sens populaire, le gouvernement prétend permettre à chacun de transmettre à ses enfants le fruit de son travail. Louable intention, si elle ne masquait un cadeau fiscal éhonté en direction des patrimoines les plus élevés, qui vont, à n'en pas douter, connaître une optimisation maximale dans les années à venir, afin d'échapper à toute imposition.

Une succession moyenne en France pèse 100 000 euros. En relevant les franchises de droits à 150 000 euros, on ne règle que la situation éventuellement délicate des couples sans enfants. Mais on permet surtout aux ménages les plus aisés de bénéficier d'une réduction sensible des droits. L'exonération pour la part du conjoint survivant, ce n'est pas la même chose quand le patrimoine vaut 100 000 euros ou 10 millions ! Grâce aux donations, les patrimoines très importants vont bénéficier d'allégements fiscaux sensibles. Un heureux propriétaire de château, père de cinq enfants majeurs, pourra en vertu de l'article 4, les doter de 900 000 euros de patrimoine, sous réserve d'usufruit, et inviter son épouse à en faire de même. Cela ne coûte rien ! Et l'exonération ou l'allégement d'ISF découlant du démembrement familial de ce patrimoine viendra en sus de l'économie réalisée grâce à la donation !

Le salaire médian, en France, s'élève à 1 600 euros mensuels. Un salarié ayant travaillé pendant 40 ans aura perçu au total 768 000 euros. Or, cette somme est équivalente au patrimoine donnant lieu à l'ISF. Bref, pendant toute une vie de travail, la moitié des salariés de ce pays ne gagneront pas plus que le plancher de l'ISF. Encore aurait-il fallu que, pendant ces quarante années, ils ne consomment rien ! En fait, une grande majorité des assujettis à l'ISF disposent d'un patrimoine dû à la naissance ou à un héritage, sans que leur mérite ou leurs qualités professionnelles n'interviennent.

Quand vous vous attaquez à l'ISF, vous vous en prenez à l'un des rares impôts progressifs et justes puisqu'il met à contribution des patrimoines dont l'essentiel provient du travail d'autrui. Il est donc légitime que, par la fiscalité, une partie de ce produit revienne à autrui.

Les actionnaires minoritaires n'accordent souvent aucune attention au devenir des entreprises dont ils détiennent des titres. Tout ce qui les intéresse, c'est le montant du dividende et de l'éventuelle plus-value en cas de revente des titres. Que l'entreprise dont ils sont actionnaires embauche, décide un plan social, licencie ou délocalise est le cadet de leurs soucis. Ils veulent avant tout que la rémunération de leur capital soit assurée.

Peu importe aux membres de la famille Mulliez que les caissières d'Auchan, de Décathlon ou de Leroy Merlin soient embauchées à temps partiel imposé et soumises au bon vouloir du responsable de leur magasin : ils veulent que les profits soient au rendez-vous.

M. Jean Arthuis, président de la commission. - Un certain nombre de membres de cette famille ont certes franchi la frontière, mais êtes-vous sûr que les caissières dont vous parlez ne soient pas, elles aussi, actionnaires ?

M. Robert Bret. - Certaines, peut-être.

M. Jean Arthuis, président de la commission. - La plupart !

M. Robert Bret. - Mais combien d'actions détiennent-elles, et ont-elles le pouvoir de donner leur avis sur la bonne marche de l'entreprise ? C'est un autre débat.

Quand vous dites, madame la ministre, que vous voulez permettre le travail le dimanche, je connais dans mon département certains responsables de chaînes commerciales qui se réjouissent. Depuis des mois et des mois, du côté de Plan de Campagne, les temps de repos des salariés ne sont plus respectés, dans la plus parfaite illégalité !

L'ISF n'a pas disparu au terme de ce débat, en droit, tout du moins. Mais vous avez voté un article permettant à 97 % des assujettis à l'ISF de se trouver libérés de leurs obligations s'ils financent des PME.

Nous nous félicitons, une fois n'est pas coutume, que la CMP ait supprimé l'autoliquidation du bouclier fiscal, proposée par notre rapporteur général et adoptée par la majorité du Sénat.

M. Paul Girod, rapporteur. - Il n'a pas été supprimé, mais différé !

M. Robert Bret. - Nous resterons donc attentifs. Cette disposition mettait à mal l'égalité devant l'impôt, déjà largement mise en cause par le reste du texte. Reste une question cruciale : qui paiera la facture des cadeaux fiscaux faits aux plus gros patrimoines ? Ce seront les autres, ceux qui ne sont pas partie prenante des 120 000 successions imposables chaque année et qui ne font pas partie des 530 000 contribuables de l'ISF. Les autres, ce sont les 20 millions de salariés, les 4 millions de chômeurs, les 6 millions de retraités non imposables et leurs familles. La facture des cadeaux fiscaux sera également payée par la réduction de la dépense publique. Les premières tendances sont connues : suppression de 23 000 emplois publics, reconduction en euros courants des dépenses budgétaires de 2007. Pour mon département, c'est la remise en cause des aides à l'agriculture, la diminution des crédits de la politique de la ville et du logement, la réduction de la participation de l'État au financement des services d'incendie et de secours et aux dépenses sur le réseau routier. C'est aussi la fermeture de classes dans les villages ruraux, la suppression d'options de formation dans les lycées, la réduction des contrats aidés pour les chômeurs. Et nous pouvons tous, dans nos départements respectifs, égrener cette même litanie.

Dans mon département, plus de 500 000 ménages ne paient pas l'impôt sur le revenu. A Marseille, en 2006, près de 5 000 familles ont payé l'ISF. Mais, dans le seul secteur de la ville où je suis élu local, près de 60 % de contribuables, soit plus de 40 000 familles, sont non imposables et le revenu moyen y est d'à peine 22 000 euros par an, ce qui signifie que ces ménages vivent sous le seuil de pauvreté. Avec ce texte, vous avez choisi de vous adresser aux 5 000 privilégiés et de faire supporter le poids de ces cadeaux aux 40 000 autres.

Ne serait-ce que pour cette raison, nous ne pouvons approuver ce texte qui tourne le dos à nombre de principes fondamentaux de notre droit, comme l'égalité fiscale, la justice sociale et la prise en compte de la situation réelle des habitants de notre pays. Ce n'est décidément pas l'intérêt général que défend ce texte mais les intérêts de quelques centaines de milliers de familles contre la grande majorité de nos compatriotes.

Nous confirmons donc notre rejet de ce projet de loi.

M. Michel Charasse. - Voici donc arriver la fin du parcours : quels qu'aient été les mérites des travaux parlementaires, des commissions des finances et même de la commission mixte paritaire, le texte final a été peu modifié par rapport au dispositif et à l'intention initiaux. Je ne parle bien évidemment pas de vos six amendements, madame la ministre, qui correspondent à des modifications techniques, dont trois destinés à lever des gages d'ailleurs forts illusoires.

Quoi que l'on pense du fond, le bicamérisme a bien fonctionné

M. Robert del Picchia. - Très bien !

M. Michel Charasse. - Alors que l'on parle beaucoup, sous ce nouveau quinquennat, de réformes institutionnelles, et alors que j'entends dire beaucoup de bêtises sur le Sénat, il n'était pas inutile de le rappeler.

M. Charles Revet. - Tout à fait !

M. Michel Charasse. - Pour avoir assisté à la commission mixte paritaire, je puis vous assurer que, sur certaines questions extrêmement techniques, le rôle du Sénat a été d'une formidable utilité et a été apprécié à sa juste valeur. Je ne suis pas un adversaire des réformes, y compris du Parlement, mais j'entends certaines tentations monocamérales qui m'effrayent un peu.

Ce texte a pu susciter dans mon groupe quelques motifs de satisfaction, comme la suppression de l'autoliquidation de l'ISF, le rapport sur le retour des immigrés fiscaux qui -tels les immigrés de Coblence- devraient rentrer au pays, -rapport qui sera sans doute assez drôle-, les mesures votées en faveur des SCOP. Nous devons à notre assemblée la suppression de la restitution par les collectivités territoriales du surplus du bouclier fiscal. Comme l'a dit M. Girod, il s'agissait d'une véritable usine à gaz qui aurait coûté des sommes folles aux contribuables tant il aurait fallu créer de fonctionnaires pour en calculer et en contrôler le fonctionnement. Nous pouvons également nous réjouir de la rectification du calcul de dégrèvement de la taxe d'habitation qui aurait pu, cet automne, coûter fort cher, politiquement s'entend, mais frapper aussi beaucoup de braves et de pauvres gens.

Sur le fond, les questions posées par mes amis n'ont pas toujours eu de réponses. On ne sait à combien reviendra ce projet de loi et les chiffres varient en fonction du ministre qui s'exprime : 12, 15, voire 20 milliards ! Au fond, on n'en sait rien ! Et pourquoi pas une surprise agréable ? On nous dit que beaucoup de contribuables hésiteraient à faire valoir leurs droits. A mon avis, et parce que nous sommes entre nous, si j'étais à leur place, je n'hésiterais pas beaucoup car l'administration fiscale n'aura pas les moyens de contrôler tout le monde. Mais c'est un conseil purement gratuit ! (Sourires)

Les paradoxes demeurent : on distribue de l'argent alors que la France est percluse de dettes et l'on donne de l'argent aux riches et aux rentiers plutôt qu'aux consommateurs.

Bien des questions restent sans réponse mais je puis vous assurer que, dans mon groupe personne, et certainement pas moi, ne souhaite votre échec, car ce serait celui de la France.

Arriverez-vous à mobiliser les Français en distribuant l'argent que vous n'avez pas à ceux qui en ont, et largement ? Beaucoup y voient une injustice, et le disent hautement ; mais je ne suis pas de ceux qui décrivent sans cesse une France en guenilles peuplée de miséreux, et je ne suis guère sensible aux larmes les plus bouillantes, sachant que les vraies difficultés sont cachées et silencieuses. Les grandes douleurs sont muettes, dit-on. Bref, la CMP n'a rien changé de fondamental ; elle ne peut modifier l'opinion du groupe socialiste, qui votera contre ce projet de loi.

Je ne veux pas terminer, madame, sans dire le plaisir que nous avons eu à travailler avec vous, sans dire votre gentillesse, votre compétence, votre formidable connaissance des dossiers, votre courtoisie et votre patience. Nous avons particulièrement apprécié le brio avec lequel vous avez résisté à l'aimable attention dont le Sénat fait montre d'ordinaire pour les « petits nouveaux ». (Sourires) Tout cela atténuera un peu le mauvais souvenir que nous gardons de votre texte, et ce n'est pas rien.

A écouter les thuriféraires de votre projet, on pouvait croire à une nuit du 4 août à rebours mettant bas les privilèges des plus pauvres, et en premier lieu l'égalité fiscale dans la République. Je vous remercie de nous avoir évité cet anniversaire en bloquant le compteur au 1er août, qui est à peu de choses près la date à laquelle le docteur Guillotin se préoccupait de désinfecter la salle des Menus Plaisirs de miasmes dangereux pour les députés de l'époque. (Sourires)

Le groupe socialiste votera contre votre texte, ce qui ne m'empêchera pas de vous souhaiter de très bonnes vacances. (Applaudissements à droite)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

M. le président. - En application de l'article 42-12 du Règlement, le Sénat examinant le texte après l'Assemblée nationale se prononce par un seul vote en ne retenant que les amendements ayant reçu l'accord du gouvernement.

Article 4 bis A

I. - L'article 777 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les limites des tranches des tarifs prévus aux tableaux ci-dessus sont actualisées au 1er janvier de chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondies à l'euro le plus proche. »

II. - L'article 779 du même code est complété par un VI ainsi rédigé :

« VI. - Le montant des abattements du présent article est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi à l'euro le plus proche. »

III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...................................................................................................

M. le président. - Amendement n°1, présenté par le gouvernement.

Dans le second alinéa du II de cet article, après le mot :

actualisé

sont insérés les mots :

au 1er janvier de

Mme Christine Lagarde, ministre. - Amendement rédactionnel et de clarification.

M. le président. - Amendement n°4, présenté par le gouvernement.

Supprimer le III de cet article.

Mme Christine Lagarde, ministre. - Il s'agit d'une levée de gage.

M. Paul Girod, rapporteur. - Avis favorable.

Article 5

I. - Dans le premier alinéa de l'article 1er du code général des impôts, le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».

II. - L'article 1649-0 A du même code est ainsi modifié :

1° Le 1 est ainsi modifié :

 Dans le premier alinéa, les mots : « suivant l'année du paiement des impositions dont il est redevable » sont remplacés par les mots : « de la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;

 Le second alinéa est complété par les mots : «, au 1er janvier de l'année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;

2° Le 2 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Sous réserve qu'elles aient été payées en France et, d'une part, pour les impositions autres que celles mentionnées aux e et f, qu'elles ne soient pas déductibles d'un revenu catégoriel de l'impôt sur le revenu, d'autre part, pour les impositions mentionnées aux a, b et e, qu'elles aient été régulièrement déclarées, les impositions à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution sont : » ;

b) Le a est complété par les mots : « dû au titre des revenus mentionnés au 4 » ;

c) Le b est complété par les mots : « établi au titre de l'année qui suit celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;

d) Dans le c, après les mots : « non bâties », sont insérés les mots : «, établies au titre de l'année qui suit celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4,  » ;

e) Dans le d, après les mots : « d'habitation », sont insérés les mots : «, établie au titre de l'année qui suit celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4,  » ;

f) Il est complété par un e et un f ainsi rédigés :

« e) Les contributions et prélèvements, prévus aux articles L. 136-6 et L. 245-14 du code de la sécurité sociale et à l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, ainsi que la contribution additionnelle à ces prélèvements, prévue au 2° de l'article L 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, sur les revenus du patrimoine compris dans les revenus mentionnés au 4 ;

« f) Les contributions et prélèvements, prévus aux articles L. 136-1 à L. 136-5, L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale et aux articles 14 et 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précitée, ainsi que la contribution additionnelle à ces prélèvements, prévue au 2° de l'article L 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, sur les revenus d'activité et de remplacement et les produits de placement compris dans les revenus mentionnés au 4 » ;

3° Dans le premier alinéa du 3, les mots : « du paiement de ces impositions » sont remplacés par les mots : « suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;

4° Le 4 est ainsi modifié :

a) Dans le premier alinéa, les mots : « au titre de l'année qui précède celle du paiement des impositions » sont supprimés ;

b) Le a est ainsi rédigé :

« a) Des revenus nets soumis à l'impôt sur le revenu majorés, le cas échéant, du montant de l'abattement mentionné à l'article 150-0 D bis. Les plus-values mentionnées aux articles 150 U à 150 UC sont retenues dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VE. Par dérogation au premier alinéa du présent 4, les revenus soumis à l'impôt sur le revenu, sur option du contribuable, selon une base moyenne, notamment en application des articles 75-0 B, 84 A ou 100 bis, ou fractionnée, notamment en application des articles 75-0 A, 163 A ou 163 bis, sont pris en compte, pendant la période d'application de ces dispositions, pour le montant ayant effectivement supporté l'impôt au titre de chaque année ; »

c) Dans le c, le mot et la référence : « et 9° » sont remplacés par les références : «, 9°, 9° ter et 33° bis » ;

5° Le 8 est ainsi modifié :

a) Dans le premier alinéa, les mots : « l'année suivant celle du paiement des impositions mentionnées au 2 » sont remplacés par les mots : « la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 » ;

b) Dans le second alinéa, les mots : « rectifiés ayant servi de base à ces impositions » sont remplacés par les mots : « pris en compte pour la détermination du droit à restitution ».

II bis. - 1. Le IV de l'article 74 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi rédigé :

« IV. - La restitution prévue à l'article 1649-0 A du code général des impôts est prise en charge par l'État. »

2. Le 1 est applicable aux impositions payées à compter du 1er janvier 2006.

III. - Les I et II s'appliquent pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2006. Toutefois, les impositions, mentionnées au a du 2 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, tel qu'il résulte du présent article, ne peuvent être prises en compte pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés en 2006 lorsqu'elles ont été prises en compte pour l'exercice du droit à restitution acquis au 1er janvier 2007.

IV. - La perte de recettes résultant pour l'État de l'absence de prise en charge par les collectivités territoriales du coût du bouclier fiscal est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. - Amendement n°2, présenté par le gouvernement.

Supprimer le IV de cet article.

Mme Christine Lagarde, ministre. - Il s'agit à nouveau d'une levée de gage.

M. Paul Girod, rapporteur. - Encore plus favorable !

Article 6

I. - Le I de l'article 885 I ter du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les trois alinéas sont regroupés sous un 1 ;

2° Dans le premier alinéa, après les mots : « sa souscription au capital », sont insérés les mots : « initial ou aux augmentations de capital » et, après les mots : « aux aides de l'État en faveur des petites et moyennes entreprises », sont insérés les mots : «, modifié par le règlement (CE) n° 364/2004 du 25 février 2004, » ;

3° Le b est ainsi rédigé :

« b) La société a son siège de direction effective dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. » ;

4° Il est ajouté un 2 ainsi rédigé :

« 2. L'exonération s'applique également aux titres reçus par le redevable en contrepartie de sa souscription en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :

« a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celle tenant à son activité ;

« b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au a du 1.

« L'exonération s'applique alors à la valeur des titres de la société détenus directement par le redevable, dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l'actif brut de celle-ci représentative de la valeur des titres reçus en contrepartie de sa souscription au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1. » ;

5° Il est ajouté un 3 ainsi rédigé :

« 3. L'exonération s'applique dans les mêmes conditions aux parts de fonds d'investissement de proximité définis par l'article L. 214-41-1 du code monétaire et financier dont la valeur des parts est constituée au moins à hauteur de 20 % de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans vérifiant les conditions prévues au 1 du I de l'article 885-0 V bis.

« L'exonération est limitée à la fraction de la valeur des parts de ces fonds représentative de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1 du I de l'article 885-0 V bis. »

II. - Après l'article 885 V du même code, il est inséré un article 885-0 V bis ainsi rédigé :

« Art. 885-0 V bis. - I. - 1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives ouvrières de production définies par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50 000 €.

« La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit satisfaire aux conditions suivantes :

« a) Répondre à la définition des petites et moyennes entreprises figurant à l'annexe I au règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de l'État en faveur des petites et moyennes entreprises, modifié par le règlement (CE) n° 364/2004 du 25 février 2004 ;

« b) Exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater, et notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités de gestion ou de location d'immeubles ;

« c) Avoir son siège de direction effective dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;

« d) Ses titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger.

« e) Être soumise à l'impôt sur les bénéfices dans les conditions de droit commun ou y être soumise dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France.

« 1 bis. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions effectuées par des personnes physiques en indivision. Chaque membre de l'indivision peut bénéficier de l'avantage fiscal à concurrence de la fraction de la part de sa souscription représentative de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1.

« 2. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :

« a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celle tenant à son activité ;

« b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1.

« Le montant des versements effectués au titre de la souscription par le redevable est pris en compte pour l'assiette de l'avantage fiscal dans la limite de la fraction déterminée en retenant :

« - au numérateur, le montant des versements effectués, par la société mentionnée au premier alinéa du présent 2 au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1, entre la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année d'imposition. Ces versements sont ceux effectués avec les capitaux reçus au cours de cette période lors de la constitution du capital initial ou au titre de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit ;

« - au dénominateur, le montant des capitaux reçus par la société mentionnée au premier alinéa du présent 2 au titre de la constitution du capital initial ou de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit au cours de la période mentionnée au numérateur.

« II. - 1. Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au I est subordonné à la conservation par le redevable des titres reçus en contrepartie de sa souscription au capital de la société jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription.

« La condition relative à la conservation des titres reçus en contrepartie de la souscription au capital s'applique également à la société mentionnée au premier alinéa du 2 du I et à l'indivision mentionnée au 1° bis du I ;

« 2. En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au premier alinéa du 1 du présent II par suite d'une fusion ou d'une scission au sens de l'article 817 A, l'avantage fiscal mentionné au I accordé au titre de l'année en cours et de celles précédant ces opérations n'est pas remis en cause si les titres reçus en contrepartie sont conservés jusqu'au même terme. Cet avantage fiscal n'est pas non plus remis en cause lorsque la condition de conservation prévue au premier alinéa du 1 du présent II n'est pas respectée par suite d'une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire.

« II bis. - 1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 50 % du montant des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire aux parts de fonds d'investissement de proximité définis par l'article L. 214-41-1 du code monétaire et financier dont la valeur des parts est constituée au moins à hauteur de 20 % de titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés exerçant leur activité ou juridiquement constituées depuis moins de cinq ans vérifiant les conditions prévues au 1 du I, lorsque les conditions suivantes sont satisfaites :

« a. les personnes physiques prennent l'engagement de conserver les parts de fonds jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription ;

« b. le porteur de parts, son conjoint ou son concubin notoire et leurs ascendants et descendants ne doivent pas détenir ensemble plus de 10 % des parts du fonds et, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices des sociétés dont les titres figurent à l'actif du fonds ou avoir détenu ce montant à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la souscription des parts du fonds ;

« c. le fonds doit respecter le pourcentage initialement fixé de son actif investi en titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1 du I.

« Les versements servant de base au calcul de l'avantage fiscal sont ceux retenus après imputation de l'ensemble des frais et commissions et dans la limite du pourcentage initialement fixé de l'actif du fonds investi en titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions prévues au 1 du I.

« 2. L'avantage fiscal prévu au 1 du présent II bis ne peut être supérieur à 10 000 € par an. Le redevable peut bénéficier de l'avantage fiscal prévu audit 1 et de ceux prévus aux 1, 1 bis et 2 du I au titre de la même année, sous réserve que le montant imputé sur l'impôt de solidarité sur la fortune résultant de ces avantages n'excède pas 50 000 €.

« 3. L'avantage fiscal obtenu fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle le fonds ou le redevable cesse de respecter les conditions prévues au 1 du présent II bis.

« 4. Sont exclues du bénéfice de l'avantage fiscal prévu au 1 du présent II bis les parts de fonds donnant lieu à des droits différents sur l'actif net ou sur les produits du fonds ou de la société, attribuées en fonction de la qualité de la personne.

« III. - Les versements ouvrant droit à l'avantage fiscal mentionné au I ou au II bis sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.

« IV. - La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au I ou au II bis ne peut donner lieu à l'une des réductions d'impôt sur le revenu prévues à l'article 199 terdecies-0 A.

« Le redevable peut bénéficier de l'avantage fiscal prévu au présent article et de celui prévu à l'article 885-0 V bis A au titre de la même année, sous réserve que le montant imputé sur l'impôt de solidarité sur la fortune résultant des deux avantages n'excède pas 50 000 €.

« Par dérogation à l'alinéa précédent, la fraction des versements pour laquelle le redevable demande le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au présent article ne peut donner lieu à l'application de l'article 885-0 V bis A.

« L'avantage fiscal prévu au présent article ne s'applique pas aux souscriptions au capital d'une société dans laquelle le redevable, son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin notoire bénéficie des dispositions des articles 885 O et 885 O bis.

« V. - Le bénéfice de ces dispositions est subordonné au respect de celles du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis.

« VI. - Un décret fixe les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux sociétés visés au I ainsi qu'aux gérants et dépositaires de fonds visés au II bis. »

III. - Après l'article 885 V du même code, il est inséré un article 885-0 V bis A ainsi rédigé :

« Art. 885-0 V bis A. - I. - Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune, dans la limite de 50 000 €, 75 % du montant des dons en numéraire et dons en pleine propriété de titres de sociétés admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger effectués au profit :

« 1° Des établissements de recherche ou d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique publics, ou des établissements privés de même nature agréés par le ministre chargé du budget ainsi que par le ministre chargé de la recherche ou par le ministre chargé de l'enseignement supérieur ;

« 2° Des fondations reconnues d'utilité publique répondant aux conditions fixées au a du 1 de l'article 200 ;

« 3° Des entreprises d'insertion et des entreprises de travail temporaire d'insertion mentionnées aux articles L. 322-4-16-1 et L. 322-4-16-2 du code du travail ;

« 4° Des associations intermédiaires mentionnées à l'article L. 322-4-16-3 du même code ;

« 5° Des ateliers et chantiers d'insertion mentionnés à l'article L. 322-4-16-8 du même code ;

« 6° Des entreprises adaptées mentionnées à l'article L. 323-31 du même code ;

« 7° De l'Agence nationale de la recherche.

« II. - Les dons ouvrant droit à l'avantage fiscal mentionné au I sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.

« III. - La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au I ne peut donner lieu à un autre avantage fiscal au titre d'un autre impôt.

« Le redevable peut bénéficier de l'avantage fiscal prévu au présent article et de celui prévu à l'article 885-0 V bis au titre de la même année, sous réserve que le montant imputé sur l'impôt de solidarité sur la fortune résultant des deux avantages n'excède pas 50 000 €.

« Par dérogation à l'alinéa précédent, la fraction des versements pour laquelle le redevable demande le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au présent article ne peut donner lieu à l'application de l'article 885-0 V bis. 

« IV. - Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au I est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis et à la condition que soient jointes à la déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune des pièces justificatives attestant le total du montant et la date des versements ainsi que l'identité des bénéficiaires.

« V. - Un décret fixe les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux personnes mentionnées au I. »

III bis. - L'article 1763 C du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'administration établit qu'un fonds commun d'investissement de proximité n'a pas respecté son quota d'investissement susceptible de faire bénéficier à ses porteurs de l'avantage fiscal prévu à l'article 885 0 V bis, la société de gestion du fonds est redevable d'une amende égale à 20 % du montant des investissements qui permettraient d'atteindre le pourcentage initialement fixé de son actif en titres de sociétés éligibles. Le montant de cette amende est toutefois limité à la moitié du montant des sommes qui lui sont dues par le fonds au titre des frais de gestion pour l'exercice au titre duquel le manquement est constaté. »

III ter. - Après l'article 757 B du code général des impôts, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :

« 6. Dons consentis en application de l'article 885-0 V bis A

« Art. 757 C - Les droits de mutation à titre gratuit ne s'appliquent pas aux dons consentis aux organismes mentionnés à l'article 885-0 V bis A. »

III quater. - Après l'article 150 undecies, il est inséré un article 150 duodecies ainsi rédigé :

« Art. 150 duodecies. - En cas de donation de titres prévue au I de l'article 885-0 V bis A, le gain net correspondant à la différence entre la valeur des titres retenue pour la détermination de l'avantage fiscal prévu à ce même I et leur valeur d'acquisition est imposé à l'impôt sur le revenu, lors de la donation, selon les règles prévues aux articles 150-0 A et suivants.

« Pour l'appréciation de la limite mentionnée au 1 du I de l'article 150-0 A, la valeur des titres retenue pour la détermination de l'avantage fiscal prévu au I de l'article 885-0 V bis A est ajoutée au montant des cessions réalisées au cours de la même année. »

III quinquies. - Dans le 7 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, les mots : « à titre onéreux » sont supprimés.

III sexies. - Dans le e du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, après les mots : « l'article 200 A du code général des impôts » sont ajoutés les mots : « et le gain défini à l'article 150 duodecies du code précité ».

IV. - Le I s'applique aux souscriptions réalisées à compter du 20 juin 2007. Les II et III s'appliquent aux versements et aux dons réalisés à compter de cette même date.

V. - La perte de recettes résultant pour l'État de la non-application des droits de mutation à titre gratuit aux dons aux organismes d'intérêt général mentionnés à l'article 885-0 V bis A est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.

Après le mot :

publics

rédiger ainsi la fin du 1° du I du texte proposé par le III de cet article pour l'article 885-0 V bis A du code général des impôts :

ou privés, d'intérêt général, à but non lucratif ;

Mme Christine Lagarde, ministre. - Amendement de cohérence avec le texte sur l'autonomie des universités.

M. Jean Arthuis, président de la commission. - Où l'on revient au texte du Sénat ...

M. le président. - Amendement n°3, présenté par le gouvernement.

Dans le texte proposé par le III ter de cet article pour l'article 757 C du code général des impôts, remplacer les mots :

dons consentis aux organismes mentionnés

par les mots :

dons pris en compte pour la détermination de l'avantage fiscal prévu

Mme Christine Lagarde, ministre. - Amendement de précision.

M. le président. - Amendement n°6, présenté par le gouvernement.

Supprimer le V de cet article.

Mme Christine Lagarde, ministre. - Levée de gage, à nouveau.

M. Paul Girod, rapporteur. - Je dirais : enthousiasmant !

Interventions sur l'ensemble

M. Jean Arthuis, président de la commission. - Je veux à mon tour dire que le bicamérisme a en l'espèce démontré toutes ses vertus ...

M. Charles Revet. - Bel exemple !

M. Jean Arthuis, président de la commission. - ... et que le Sénat a su imprimer sa marque. J'en remercie tous ceux qui ont participé à nos délibérations.

Je formulerai trois observations. Je me félicite tout d'abord que les collectivités locales aient été finalement exonérées de leur part du remboursement dans le cadre de l'application du bouclier fiscal. Après l'inclusion de la CSG et de la CRDS, un tel remboursement ne pouvait se comprendre. Il n'y a aucune corrélation entre le bouclier et la gestion municipale. Faire subir une telle pénalité aux collectivités locales aurait été offensant à leur égard. Aucune des 2 500 demandes de remboursement n'a porté sur les impôts locaux. D'ailleurs, si le bouclier fiscal a été si peu sollicité, c'est peut-être parce que les collectivités auraient été sanctionnées ... Le gouvernement sera désormais plus à l'aise pour communiquer sur le sujet avec le plein soutien des élus territoriaux. Soyez sincèrement remerciée, madame, pour avoir, malgré les réserves que nous connaissons, levé le gage.

Ma deuxième observation porte sur la liquidation de l'impôt choisi au profit des PME. Je me félicite que le gouvernement ait été attentif à nos arguments et ait résisté à la tentation de l'intermédiation, celle-ci contribuant à l'hyperfinanciarisation et éloignant les actionnaires des entreprises dans lesquelles ils investissent. Il est impératif de réconcilier les Français avec l'esprit d'entreprise, de redonner tout son sens à l'affectio societatis. Avec l'intermédiation, on n'aurait mis en place qu'une nouvelle formule de gestion de l'épargne -sans parler du risque d'inconstitutionnalité. J'espère que les élus locaux, les chambres consulaires se mobiliseront pour aider les redevables à sortir de la suspicion qui pèse sur eux. Qu'ils se fassent connaître, ils participeront au développement local !

Je salue le Haut commissaire pour son pragmatisme, qui a bien voulu rappeler les emprunts qu'il a faits aux réflexions du Sénat. Je remercie également M. Novelli.

Ma troisième observation porte sur le bouclier fiscal. Le texte est perfectible, nous aurons l'occasion de revoir notre copie -ce qui ne sera pas simple avec l'inclusion de la CSG et de la CRDS- lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2008. Prenons un foyer fiscal : le mari est exploitant agricole, l'année a été mauvaise, il y a des pertes ; la femme est institutrice ou infirmière, son salaire est en-deçà de ce qui est imputable sur les pertes agricoles. Les revenus du foyer sont proches de zéro. Comment fera-t-on pour la CSG et la CRDS ? Tout cela devra être clarifié ...

Ce texte sera un outil puissant pour créer un choc de confiance et de croissance. Nous n'avons pas assez parlé des enjeux et des défis de la mondialisation. M. Bret veut taxer le patrimoine et le capital ; mais à quoi cela sert-il de prévoir un impôt élevé lorsque la matière imposable s'exile et s'échappe ? J'ai la conviction que les 35 heures et l'ISF nous pénalisent, économiquement et socialement.

M. Jean Arthuis, président de la commission. - On les a aménagés, et ce faisant créé des usines à gaz. Et voilà qu'on en construit d'autres ! Il faudra bien un jour en tirer les conséquences.

Je souhaite que ce texte porte tous ses fruits. Je vous souhaite, madame la ministre, beaucoup de courage pour la préparation du budget 2008 ; il vous en faudra pour tendre vers la maîtrise des dépenses et l'équilibre du budget, pour lutter enfin contre l'accroissement apparemment inexorable de la dette publique. Les dépenses commencent à être sous contrôle ; reste l'immense chantier du financement de la protection sociale.

Merci, madame la ministre, pour votre disponibilité, votre exquise courtoisie, vos réponses si précises qui ont éclairé nos votes : si c'était un examen de passage, vous l'avez brillamment réussi ! Et si c'était un bizutage, comme M. Charasse en a émis l'hypothèse, il a été surmonté aisément...(Sourires) Merci aussi à M. le Haut commissaire pour sa conviction, que nous partageons : il faut lutter contre la pauvreté.

Ce texte concilie les enjeux économiques et l'exigence de cohésion sociale. Nous avons tous bien travaillé, notre repos sera mérité. Bonnes vacances ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Pierre Fauchon. - Ce projet de loi est si complexe qu'il est bien difficile de se prononcer par un seul vote ! Je félicite M. Hirsch d'appliquer cette démarche expérimentale que nous avons récemment inscrite dans la Constitution. Il est toujours délicat d'analyser les résultats et d'estimer l'intérêt qu'il y a à généraliser, bravo de donner l'exemple.

Ce texte s'emploie avec une grande ingéniosité à neutraliser les 35 heures -la réduction du temps de travail fut l'une des erreurs monumentales de notre histoire récente- et l'ISF ; mais pourquoi ne pas le reconnaître et revenir dessus ? On n'ose pas, on a peur de la rue. Le grand mouvement de confiance qui s'est manifesté lors de la présidentielle, tant dans les résultats que par le nombre de votants autorisait pourtant des mesures radicales, conformes au programme approuvé très nettement par l'opinion publique.

Nos collègues communistes raisonnent à hexagone fermé. Faire payer les riches, d'accord, mais le monde a changé. Et on ne peut lutter contre la mondialisation, tout au plus peut-on espérer qu'un jour l'humanité sera assez intelligente pour mettre en place un gouvernement mondial. Reste qu'en revanche, on ne saurait tolérer qu'au sein même de l'Union européenne, des États, à nos flancs, sucent notre sang économique. Supprimer les disparités fiscales entre membres de l'Union est une priorité, afin que cessent ces mauvais procédés. Il serait grotesque d'ouvrir ses frontières et d'accepter que de telles disparités persistent.

J'ai voté pour l'actuel Président de la République au second tour et j'apprécie qu'il honore ses engagements. Vous aurez cependant en conséquence, madame la ministre, à faire face à des échéances délicates dans les trimestres à venir, car la croissance, en dépit de vos efforts, ne pourra se redresser si rapidement. Voyez la conjoncture américaine.

Néanmoins, puisque l'on est, selon le cardinal de Retz, plus souvent la dupe de sa défiance que de sa confiance, je voterai votre texte. Je le ferai moins par conviction que par solidarité. (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite)

M. Robert del Picchia. - Le groupe UMP se félicite du résultat de la CMP. Les principales modifications apportées par le Sénat ont été maintenues, sur la défiscalisation des heures supplémentaires, l'augmentation du crédit d'impôt pour les handicapés, les droits de succession acquittés par les neveux, la réduction de l'ISF, l'investissement dans les PME, les dons aux organismes d'intérêt général. La Haute assemblée a aussi adressé un signal fort aux collectivités locales, en obtenant que l'État prenne entièrement à sa charge la refacturation provoquée par le bouclier fiscal.

Des débats, sur plusieurs pistes de réforme devront se poursuivre lors de l'examen de la prochaine loi de finances : efficacité du bouclier fiscal, question de l'autoliquidation, etc. Mme la ministre a démontré son pragmatisme et son ouverture d'esprit. Nous y sommes sensibles. La cohérence politique, économique et budgétaire de ce texte mérite d'être saluée. Nous voterons les conclusions de la CMP.

Madame la ministre, vous êtes l'illustration de ce que les Français de l'étranger, revenus en métropole, peuvent faire beaucoup pour notre pays. Nous avons tout motif d'être fiers d'eux ! (Applaudissements à droite et au centre)

Les conclusions modifiées de la CMP sont adoptées, les groupes socialiste et CRC votant contre.

Prochaine séance jeudi 2 août 2007 à 16 heures ou le soir.

La séance est levée à 19 heures.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

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ORDRE DU JOUR

du JEUDI 2 AOûT 2007

Séance publique

A SEIZE HEURES OU EVENTUELLEMENT LE SOIR

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.

Rapport de Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

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Dépôts

La présidence a reçu de :

- Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Richard Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés une proposition de loi relative aux indemnités des conseillers élus à l'Assemblée des Français de l'étranger ;

- M. Xavier Pintat une proposition de loi tendant à autoriser la réversibilité de l'exercice des droits relatifs à l'éligibilité pour l'achat d'énergie électrique ;

- Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Richard Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés une proposition de loi relative à l'exercice par les Français établis hors de France du droit de vote aux élections du Parlement européen.