Projet de loi organique

Discussion des articles

M. le président. - Je rappelle qu'en vertu de l'article 42-10 du Règlement, à partir de la deuxième lecture, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres n'ont pas encore adopté un texte identique.

L'article premier est adopté, ainsi que l'article 2

Article 3

I et II. - Non modifiés............................................

II bis. - Le deuxième alinéa du II de l'article 107 de la même loi organique est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque l'application de cette règle ne permet pas de combler une vacance, il est procédé dans les trois mois à une élection partielle.

« Lorsque la vacance porte sur un seul siège, l'élection a lieu au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. La déclaration de candidature comporte l'indication de la personne appelée à remplacer le candidat élu en cas de vacance du siège. Celle-ci doit remplir les conditions d'éligibilité exigées des candidats. Nul ne peut figurer en qualité de remplaçant sur plusieurs déclarations de candidature. Nul ne peut être à la fois candidat et remplaçant d'un autre candidat.

« Lorsque la vacance porte sur deux sièges, l'élection a lieu au scrutin de liste majoritaire à deux tours, avec dépôt de listes comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir, augmentés de un sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation.

« Dans les cas prévus aux troisième et quatrième alinéas du présent II, est élu au premier tour le candidat ou la liste qui a obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés. Au second tour de scrutin, est élu le candidat ou la liste qui a obtenu le plus de voix. Seuls peuvent se présenter au second tour les candidats ou listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du total des suffrages exprimés ; si un seul candidat ou une seule liste obtient ce nombre de suffrages, le candidat ou la liste arrivé en deuxième au premier tour peut se présenter au second tour ; si aucun candidat ou aucune liste n'obtient un tel nombre de suffrages, les deux candidats ou listes arrivés en tête au premier tour peuvent se maintenir au second tour.

« Lorsque la vacance porte sur trois sièges ou plus, l'élection a lieu dans les conditions fixées à l'article 105.

« Les nouveaux représentants sont élus pour la durée du mandat restant à courir. »

III et IV. - Non modifiés.........................................

M. le président. - Amendement n°1, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Bernard Frimat. - Voilà le troisième mode de scrutin en trois ans que vous nous proposez. Le premier, en 2004, avait été taillé sur mesure par et pour notre collègue M. Flosse ; et contre toute attente, le costume avait été endossé par M. Temaru. Le second fut cousu main pour M. Tong Sang par les députés sans que nous ayons eu à en connaître ; personne n'a pu le revêtir. Voilà donc un nouveau prototype, un scrutin proportionnel à deux tours sans prime, qui n'existe nulle part ailleurs. On ne nous dit pas, mais nous pouvons aisément le deviner, pour qui est taillé ce nouveau costume ; nous souhaitons que les Polynésiens taillent un costume à ceux pour lesquels on l'a façonné...

Ce mode de scrutin ne garantit aucunement la stabilité institutionnelle ; vous voudriez même créer l'instabilité que vous ne vous y prendriez pas autrement. Et vous y croyez tellement peu que vous mettez aussitôt en place des stabilisateurs... On sait que l'instabilité sur le territoire tient moins au mode de scrutin qu'au comportement de certains.

Vous avez refusé à l'Assemblée nationale les propositions alternatives du groupe socialiste. Vous êtes un facteur d'instabilité : nous ne pouvons vous suivre.

M. Christian Cointat, rapporteur. - Le débat a déjà eu lieu. L'avis de la commission est évidemment défavorable. Si l'amendement était voté, nous reviendrions au mode de scrutin actuel, c'est-à-dire à la proportionnelle à un tour dont on ne peut pas dire qu'elle soit un facteur de stabilité.

Le texte organique doit être apprécié dans sa globalité ; c'est la conjonction des dispositions électorales et de celles relatives à la gouvernance qui favoriseront responsabilité et stabilité. J'ajoute que cette loi n'est pas de convenance ; c'est tout simplement une loi qui convient.

M. Robert del Picchia. - Bravo !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État.  - Je le dis avec modestie et humilité, je n'ai pas de certitude. Vous connaissez bien la Polynésie, monsieur Frimat, nous avons eu un dialogue serein ; peut-être devriez-vous approfondir votre réflexion. Vous n'avez pas plus de certitude que moi.

Les modèles applicables en métropole ne sont pas nécessairement transposables en Polynésie. J'ai seulement cherché à permettre aux Polynésiens de faire leurs choix dans la transparence. Votre groupe défend la proportionnelle, celui auquel j'appartiens considère qu'il est anormal que des Français aient le sentiment, après s'être prononcés, de ne pas être représentés. Ce débat est ouvert dans le cadre de la réforme des institutions.

Aucun territoire, aucun Polynésien ne doit ressentir de la frustration, à quelque distance de Papeete qu'il se trouve. J'ai au moins une certitude, c'est que le mode de scrutin que nous avons retenu garantira la représentation des électeurs. Ceux-ci feront leur choix, et je travaillerai avec ceux qu'ils auront désignés. J'ajoute que les alliances entre les deux tours se feront dans la transparence ; les électeurs les valideront ou ne les valideront pas.

M. Bernard Frimat. - Nous entendons marquer nos désaccords. Il est toujours stimulant de réfléchir davantage, j'en conviens ; mais je vous retourne le compliment. Il est bien des points sur lesquels votre réflexion pourrait être approfondie. Vous n'avez pas la certitude que votre mode de scrutin garantira la stabilité institutionnelle ; je vous en donne acte. Mais votre argumentation sur la représentation des électeurs est un peu faible, dès lors vous ne changez rien aux circonscriptions ; je ne vois pas en quoi les populations des Tuamotu ou des Gambier seront mieux représentées.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Article 4

L'article 121 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 121. - L'assemblée de la Polynésie française élit son président pour la durée du mandat de ses membres. Elle élit chaque année les autres membres de son bureau à la représentation proportionnelle des groupes politiques et dans les conditions fixées par son règlement intérieur.

« En cas de vacance des fonctions de président de l'assemblée de la Polynésie française, il est procédé au renouvellement intégral du bureau.

« Lors du renouvellement annuel des membres du bureau ou lors de la première réunion suivant le renouvellement d'une partie des membres de l'assemblée de la Polynésie française, celle-ci peut décider, à la majorité absolue de ses membres, de procéder au renouvellement intégral du bureau. »

M. Bernard Frimat. - Vous dites vouloir la stabilité institutionnelle ; mais tout en prévoyant l'élection du président tous les cinq ans, vous imaginez un renouvellement annuel des membres du Bureau. L'Assemblée nationale a de plus prévu qu'une élection partielle pouvait entraîner un tel renouvellement. Nous devons au contraire maintenir des éléments de stabilité, comme la durée du mandat de l'assemblée, de son bureau et de son président ; cela éviterait bien des comportements ...

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Les circonscriptions sont très différentes ; l'une d'entre elles compte 37 sièges. On comprend bien qu'une élection partielle puisse entraîner une nouvelle élection du président. C'est la démocratie.

L'article 4 est adopté.

Article 5

I. - L'article 156 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 156. - L'assemblée de la Polynésie française peut mettre en cause la responsabilité du président de la Polynésie française et du gouvernement de la Polynésie française par le vote d'une motion de défiance. Celle-ci n'est recevable que si elle est signée par au moins le quart des représentants à l'assemblée de la Polynésie française.

« La motion de défiance mentionne, d'une part, les motifs pour lesquels elle est présentée et, d'autre part, le nom du candidat appelé à exercer les fonctions de président de la Polynésie française en cas d'adoption de la motion de défiance.

« Si elle est en session, l'assemblée de la Polynésie française se réunit de plein droit trois jours francs après le dépôt de la motion de défiance. Si la motion de défiance est déposée en dehors de la période prévue pour les sessions ordinaires, une session est ouverte de droit cinq jours francs après ce dépôt. Le vote intervient au cours des deux jours suivants ; faute de quorum, il est renvoyé au lendemain. Les délais mentionnés au présent alinéa s'entendent dimanche et jours fériés non compris.

« Seuls sont recensés les votes favorables à la motion de défiance, qui ne peut être adoptée qu'à la majorité absolue des représentants à l'assemblée de la Polynésie française. Chaque représentant à l'assemblée de la Polynésie française ne peut signer, par année civile, plus de deux motions de défiance.

« Le président de l'assemblée de la Polynésie française proclame les résultats du scrutin et les transmet immédiatement au haut-commissaire. Les résultats du scrutin peuvent être contestés par tout représentant à l'assemblée de la Polynésie française ou par le haut-commissaire, devant le Conseil d'État statuant au contentieux, dans le délai de cinq jours à compter de cette proclamation.

« Lorsque la motion de défiance est adoptée, les fonctions des membres du gouvernement de la Polynésie française cessent de plein droit. Le candidat au mandat de président de la Polynésie française est déclaré élu et entre immédiatement en fonction. Il est procédé à la désignation des autres membres du gouvernement dans les conditions prévues à l'article 73. »

II. - Après l'article 156 de la même loi organique, il est inséré un article 156-1 ainsi rédigé :

« Art. 156-1. - I. - Si, au 31 mars de l'exercice auquel il s'applique, l'assemblée de la Polynésie française a rejeté le budget annuel, le président de la Polynésie française lui transmet, dans un délai de dix jours à compter du vote de rejet, un nouveau projet de budget élaboré sur la base du projet initial, modifié le cas échéant par un ou plusieurs des amendements soutenus lors de la discussion devant l'assemblée. Ce projet est accompagné, le cas échéant, des projets d'actes prévus à l'article 140 dénommés « lois du pays », relatifs aux impôts et taxes destinés à assurer son vote en équilibre réel.

« Si l'assemblée de la Polynésie française n'a pas adopté ce nouveau projet de budget et, le cas échéant, les projets d'actes dénommés « lois du pays » qui l'accompagnent dans un délai de cinq jours suivant leur dépôt, le président de la Polynésie française peut engager sa responsabilité devant l'assemblée. Dans ce cas, le projet de budget et, le cas échéant, les projets d'actes dénommés « lois du pays » qui l'accompagnent sont considérés comme adoptés à moins qu'une motion de renvoi, présentée par au moins le quart des membres de l'assemblée de la Polynésie française, ne soit adoptée à la majorité absolue des membres de l'assemblée. La liste des signataires figure sur la motion de renvoi.

« La motion de renvoi est déposée dans un délai de cinq jours à compter de l'engagement de la responsabilité du président de la Polynésie française devant l'assemblée et comporte un projet de budget, accompagné, le cas échéant, des propositions d'actes prévus à l'article 140 dénommés « lois du pays », relatives aux impôts et taxes destinés à assurer son équilibre réel. Elle mentionne le nom du candidat appelé à exercer les fonctions de président de la Polynésie française en cas d'adoption de la motion de renvoi.

« Le jour du dépôt de la motion de renvoi, le président de l'assemblée de la Polynésie française convoque l'assemblée pour le neuvième jour qui suit ou le premier jour ouvrable suivant. La convocation adressée aux représentants est assortie de la motion de renvoi déposée et du projet de budget qu'elle comporte, accompagné, le cas échéant, des propositions d'actes prévus à l'article 140 dénommés « lois du pays », relatives aux impôts et taxes.

« Le vote sur la motion a lieu au cours de la réunion prévue au quatrième alinéa du présent I.

« Le président de l'assemblée de la Polynésie française proclame les résultats du scrutin et les transmet immédiatement au haut-commissaire. Les résultats du scrutin peuvent être contestés par tout représentant à l'assemblée de la Polynésie française ou par le haut-commissaire, devant le Conseil d'État statuant au contentieux, dans le délai de cinq jours à compter de cette proclamation.

« Si la motion est adoptée, le projet de budget qu'elle comporte et les propositions d'actes dénommés « lois du pays », relatives aux impôts et taxes, qui accompagnent celui-ci sont considérés comme adoptés. Les fonctions des membres du gouvernement cessent de plein droit. Le candidat au mandat de président de la Polynésie française est déclaré élu et entre immédiatement en fonction. Il est procédé à la désignation des autres membres du gouvernement dans les conditions prévues à l'article 73.

« Le budget est transmis au haut-commissaire de la République au plus tard cinq jours après la date à partir de laquelle il peut être considéré comme adopté conformément au deuxième alinéa du présent I ou la date de l'adoption ou du rejet et de la motion de renvoi.

« Par dérogation au premier alinéa des I et II de l'article 176 et au premier alinéa des articles 178 et 180, les actes prévus à l'article 140 dénommés « lois du pays », relatifs aux impôts et taxes, qui accompagnent le budget sont publiés au Journal officiel de la Polynésie française et promulgués par le président de la Polynésie française au plus tard le lendemain de leur adoption et peuvent, à compter de la publication de leur acte de promulgation, faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'État au titre du contrôle juridictionnel spécifique des actes dénommés « lois du pays » prévu par la présente loi organique.

« S'il est saisi à ce titre, par dérogation aux deuxième et troisième alinéas de l'article 177, le Conseil d'État annule toute disposition contraire à la Constitution, aux lois organiques, aux engagements internationaux ou aux principes généraux du droit.

« II. - Le présent article est également applicable aux autres délibérations budgétaires relatives au même exercice, hormis le compte administratif, qui font l'objet d'un vote de rejet par l'assemblée de la Polynésie française. Le président de la Polynésie française peut transmettre un nouveau projet à l'assemblée de la Polynésie française, dans un délai de dix jours à compter du vote de rejet, sur le fondement du projet initial, modifié le cas échéant par un ou plusieurs des amendements présentés lors de la discussion. »

III. - Non modifié...........................................

IV. - La même loi organique est ainsi modifiée :

1° Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 71, les mots : « ou par suite du vote d'une motion de censure » et les mots : « ou le vote de la motion de censure » sont supprimés ;

2° Dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 122, les mots : « motion de censure » sont remplacés par les mots : « motion de défiance ou de renvoi » ;

3° Dans l'avant-dernier alinéa du II de l'article 127, les mots : « motion de censure » sont remplacés par les mots : « motion de défiance ou de renvoi » ;

4° Dans l'avant-dernier alinéa du V de l'article 159, les mots : « motion de censure » sont remplacés par les mots : « motion de défiance ou de renvoi ».

M. Bernard Frimat. - Cet article construit un meccano inspiré de ce qui a existé un court moment dans les régions, la motion de défiance constructive.

Les renversements successifs d'alliance ont organisé l'instabilité mais l'assemblée de Polynésie estime que ces motions ont pour effet de maintenir au pouvoir un gouvernement sans aucune majorité. Comment, dans ces conditions, les institutions peuvent-elles fonctionner ? La motion de censure est en cela plus logique : s'il y a blocage des institutions, le plus raisonnable est de revenir devant le peuple, ce que votre majorité a refusé en 2005.

C'est le peuple qui octroie la majorité.

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - Vous êtes dans l'erreur.

M. Bernard Frimat. - Je vous sors donc de l'indifférence !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - La Polynésie est en panne depuis 2004.

M. Bernard Frimat. - C'est votre majorité qui l'a mise en panne.

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - Si vous considérez que les Polynésiens n'ont pas droit au haut débit, à la télévision numérique terrestre, à un système de santé de qualité ; si vous trouvez normal que 12 % seulement des étudiants polynésiens accèdent à la deuxième année ; bref, si vous jugez que cela va mieux depuis 2004...

M. Michel Dreyfus-Schmidt. - Les maux de la Polynésie sont bien plus anciens que cela !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - C'est vous qui plaidez pour la motion de censure, qui a placé la Polynésie dans l'état où elle est, pas moi. Moi, je veux lui garantir la stabilité, ce que peut lui apporter la motion constructive et certainement pas la motion destructive.

L'article 5 est adopté, ainsi que les articles 6 bis, 7A et 7.

Article 7 bis A 

Après l'article 9 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée, il est inséré un article 9-1 ainsi rédigé :

« Art. 9-1. - Au plus tard le lendemain de l'adoption d'un avis par l'assemblée de la Polynésie française émis en application de l'article 9, les groupes constitués au sein de l'assemblée de la Polynésie française peuvent remettre au président de celle-ci un avis dit «avis minoritaire» sur le projet de texte ayant fait l'objet dudit avis. 

« L'avis minoritaire est annexé à l'avis de l'assemblée de la Polynésie française. »

M. Bernard Frimat. - Comme ce texte a été adopté contre l'avis du groupe majoritaire de l'assemblée de Polynésie, nous ne prendrons pas part au vote le concernant.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Nous voterons contre.

L'article 7 bis A est adopté.

Article 7 bis

I. - Le premier alinéa de l'article 13 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les autorités de la Polynésie française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'État par l'article 14 et celles qui ne sont pas dévolues aux communes en vertu des lois et règlements applicables en Polynésie française.

« La Polynésie française et les communes de Polynésie française ont vocation, pour la répartition de leurs compétences respectives et sous réserve des dispositions de la présente loi organique, à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon.

« Les autorités de la Polynésie française ne peuvent, par les décisions prises dans l'exercice de leurs compétences, exercer une tutelle sur les communes de Polynésie française. »

II. - Non modifié...........................................

M. Bernard Frimat. - Point n'est besoin de se livrer au jeu facile de la caricature. Moi aussi, je sais faire mais mieux vaut revenir aux choses sérieuses.

Cet article a été introduit sur proposition du rapporteur du Sénat. À cette occasion, vous avez été amené à répondre à des questions sur la mise à disposition des communes de personnel de cabinet, pratique condamnable très répandue en Polynésie. Vous avez dit aux députés que, sur le fond, vous étiez d'accord pour condamner cette pratique mais qu'elle ne pouvait être supprimée du jour au lendemain. Confirmez-vous ce propos ? La matière est réglementaire ; prendrez-vous des décisions en ce sens ?

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - Un député socialiste, M. Dosières, avait déposé un amendement sur ce point. Je lui avais répondu que ce n'était ni conforme au texte ni opportun. Je constate notre accord sur ce point.

Sur le fond, toutefois, je lui avais donné raison, ajoutant que l'on ne pouvait supprimer brutalement cette pratique sans mettre en difficulté les maires, qui ont déjà si peu de moyens.

J'ai signé, lors de mon dernier voyage là-bas, une convention avec l'association des maires de Polynésie et nous avons créé une fonction publique communale qui sera mise en place sur sept ans. Du moins le statut est-il d'ores et déjà créé. Un projet de loi organique vous sera soumis au printemps, pour donner de nouvelles compétences aux maires de Polynésie. Ils bénéficieront enfin du contrôle a posteriori, eux qui subissent encore le contrôle a priori. Ils recevront les ressources nécessaires à l'exercice de ces compétences. C'est, de notre part, un grand témoignage de la confiance que nous accordons aux maires de Polynésie.

L'article 7 bis est adopté, ainsi que les articles 7 ter, 7 quater, 8 et 9 bis.

Article 10

I et II. - Non modifiés..................................

III. - L'article 91 de la même loi organique est ainsi modifié :

1° Dans le 19°, après les mots : « domaniaux de la Polynésie française », sont insérés les mots : «, notamment les transactions foncières, » ;

2° Sont ajoutés un 30° et un 31° ainsi rédigés :

« 30° Approuve les conventions conclues avec des personnes morales en application d'actes prévus à l'article 140 dénommés «lois du pays» ou de délibérations de l'assemblée de la Polynésie française ;

« 31° Approuve, au vu de demandes motivées, dans les conditions et selon les critères définis par l'assemblée de la Polynésie française, l'attribution d'aides financières ou l'octroi de garanties d'emprunt aux personnes morales. »

IV. - Après l'article 129 de la même loi organique, il est inséré un article 129-1 ainsi rédigé :

« Art. 129-1. - Dans les conditions fixées par son règlement intérieur, l'assemblée de la Polynésie française fixe les attributions de la commission de contrôle budgétaire et financier, ainsi que les modalités selon lesquelles les représentants élisent ses membres à la représentation proportionnelle des groupes politiques.

« La Polynésie française peut conclure avec l'État une convention qui détermine les conditions dans lesquelles des agents de l'État sont, en application du deuxième alinéa de l'article 169, mis à disposition de l'assemblée de la Polynésie française pour assister sa commission de contrôle budgétaire et financier dans l'exercice de ses attributions. Cette convention est signée par le haut-commissaire de la République et le président de l'assemblée de la Polynésie française. »

V. - L'article 144 de la même loi organique est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - L'assemblée de la Polynésie française définit, par une délibération distincte du vote du budget ou par un acte prévu à l'article 140 dénommé «loi du pays», les conditions et critères d'attribution des aides financières et d'octroi des garanties d'emprunt aux personnes morales.

« Toutefois, pour les aides financières dont l'attribution n'est pas assortie de conditions, l'assemblée de la Polynésie française peut décider :

« 1° D'individualiser au budget les crédits par bénéficiaire ;

« 2° D'établir, dans un état annexé au budget, une liste des bénéficiaires avec, pour chacun d'eux, l'objet et le montant de l'aide financière.

« L'individualisation des crédits ou la liste établie conformément au 2° vaut décision d'attribution des aides financières précitées. »

VI. - Après l'article 157 de la même loi organique, sont insérés deux articles 157-2 et 157-3 ainsi rédigés :

« Art. 157-2. - Le président de la Polynésie française transmet à l'assemblée de la Polynésie française tout projet de décision relatif :

« 1° À l'attribution d'une aide financière ou d'une garantie d'emprunt à une personne morale ;

« 2° Aux participations de la Polynésie française au capital des sociétés mentionnées à l'article 30 et au capital des sociétés d'économie mixte ;

« 3° Aux opérations d'acquisition, de cession ou de transfert de biens immobiliers réalisées par la Polynésie française.

« La commission de contrôle budgétaire et financier émet un avis sur le projet de décision dans les vingt jours suivant sa transmission à l'assemblée de la Polynésie française ou, en cas d'urgence déclarée par le président de la Polynésie française, dans les dix jours. À l'issue de ce délai, un débat est organisé à l'assemblée de la Polynésie française ou, en dehors des périodes de session, au sein de sa commission permanente, à la demande d'un cinquième de leurs membres, sur le projet de décision.

« Sur le rapport de sa commission de contrôle budgétaire et financier, l'assemblée de la Polynésie française peut, par délibération, décider de saisir la chambre territoriale des comptes si elle estime que le projet de décision est de nature à accroître gravement la charge financière de la Polynésie française ou le risque financier qu'elle encourt. En dehors des périodes de session, cette saisine peut être décidée dans les mêmes conditions par la commission permanente de l'assemblée de la Polynésie française.

« Le projet de décision peut être délibéré en conseil des ministres de la Polynésie française, à l'issue d'un délai d'un mois ou, en cas d'urgence déclarée par le président de la Polynésie française, de quinze jours à compter de sa transmission à l'assemblée de la Polynésie française. 

« Art. 157-3. - Le président de la Polynésie française transmet à l'assemblée de la Polynésie française tout projet de décision relatif à la nomination des directeurs d'établissements publics de la Polynésie française, du directeur de la Caisse de prévoyance sociale et des représentants de la Polynésie française aux conseils d'administration et conseils de surveillance des sociétés d'économie mixte.

« La commission compétente émet un avis sur le projet de décision dans les vingt jours suivant sa transmission ou, en cas d'urgence déclarée par le président de la Polynésie française, dans les dix jours. À l'issue de ce délai, un débat est organisé à l'assemblée de la Polynésie française ou, en dehors des périodes de session, au sein de sa commission compétente, à la demande d'un cinquième de leurs membres, sur le projet de décision.

« Le projet de décision peut être délibéré en conseil des ministres de la Polynésie française, à l'issue d'un délai d'un mois ou, en cas d'urgence déclarée par le président de la Polynésie française, de quinze jours à compter de sa transmission à l'assemblée de la Polynésie française. »

M. Bernard Frimat. - L'apport de notre rapporteur à cet article a été important, même s'il n'a obtenu qu'un succès relatif dans son effort pour substituer une procédure intelligente à une usine à gaz.

En première lecture nous nous étions abstenus, considérant que l'Assemblée de Polynésie n'avait pas été consulté sur cette modification importante de ses statuts, de portée mal ajustée de surcroît. L'Assemblée nationale, sans revenir sur ce que nous avions voté, en a considérablement réduit la portée. Son rapporteur ayant modérément approuvé, c'est un euphémisme, la création de cette commission de contrôle, il l'a corsetée pour éviter qu'elle ne déstabilise l'exécutif local. De ce fait, l'Assemblée nationale n'est pas entrée dans le détail de son organisation. Nous le regrettons, car une discussion mieux approfondie en CMP aurait permis d'avancer. Nous nous abstiendrons à nouveau.

L'article 10 est adopté.

L'article 11 est adopté.

Article 11 quater 

L'article 124 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 124. - Le fonctionnement des groupes d'élus à l'assemblée de la Polynésie française  peut faire l'objet de délibérations sans que puissent être modifiées, à cette occasion, les décisions relatives au régime indemnitaire des élus prévu à l'article 126.

« Les groupes politiques à l'assemblée de la Polynésie française se constituent par la remise au président de l'assemblée d'une déclaration, signée de leurs membres, accompagnée de la liste de ceux-ci et du nom de leur représentant.

« Dans les conditions qu'elle définit, l'assemblée de la Polynésie française peut affecter aux groupes d'élus, pour leur usage propre ou pour un usage commun, un local administratif, du matériel de bureau et prendre en charge leurs frais de documentation, de courrier et de télécommunications. Lorsque des élus n'appartenant pas à la majorité de l'assemblée de la Polynésie française forment un groupe, ils disposent sans frais, à leur demande, du prêt d'un local commun et de matériel de bureau.

« Le président de l'assemblée de la Polynésie française peut, dans les conditions fixées par l'assemblée de la Polynésie française et sur proposition des représentants de chaque groupe, affecter aux groupes d'élus une ou plusieurs personnes. L'assemblée de la Polynésie française ouvre dans son budget, sur un chapitre spécialement créé à cet effet, les crédits nécessaires à ces dépenses sans que les dépenses de personnel puissent excéder 30 % du montant total des indemnités versées chaque année aux membres de l'assemblée.

« Le président de l'assemblée de la Polynésie française est l'ordonnateur des dépenses susmentionnées. L'élu responsable de chaque groupe d'élus décide des conditions et modalités d'exécution du service confié que ces collaborateurs accomplissent auprès de ces groupes au sein de l'assemblée de la Polynésie française.

« Lorsque la collectivité diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d'information générale sur les réalisations et la gestion de l'assemblée de la Polynésie française, un espace est réservé à l'expression des groupes d'élus. Les modalités d'application de cette disposition sont définies par le règlement intérieur.

« Les autres conditions de fonctionnement des groupes politiques sont déterminées par le règlement intérieur. »

M. Bernard Frimat. - Nous voterons cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'unanimité.

L'article 11 quater A est adopté.

L'article 11 quater est adopté.

Article 12

I. - L'article 128 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est ainsi modifié :

1° Supprimé...................................... ;

2° Le second alinéa est complété par les mots : « et rendu accessible au public sur support numérique, dans un délai de huit jours à compter de ces séances ».

II.  -  Non modifié..............................

M. Bernard Frimat. - La langue de la République est le français, nous en sommes tous d'accord. Mais faire une application stricte de ce principe aux débats de l'Assemblée de Polynésie, où il est souvent fait usage des langues vernaculaires, aurait conduit à invalider bon nombre de ses décisions. À quoi bon continuer de se voiler les yeux sur une pratique qu'eu égard à la situation politique locale, seuls les plus jacobins d'entre nous peuvent encore refuser d'admettre ?

Notre rapporteur, en première lecture, avait fait une proposition judicieuse, qui me semblait de nature à entraîner les bonnes questions. Je regrette qu'elle ait été supprimée par l'Assemblée nationale. Nous nous abstiendrons sur l'article.

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État.  - La proposition de M. Cointat instituant une traduction simultanée pour éviter l'invalidation des actes, qui avait déjà suscité, sur vos bancs, l'opposition de quelques éminents constitutionnalistes, s'est heurtée à l'opposition de la commission des lois de l'Assemblée nationale.

Je rappelle que le statut de la Polynésie française est unique parmi les territoires d'outre-mer. L'article 57 de la loi organique du 24 février 2004, dispose que « le tahitien est un élément fondamental de l'identité culturelle » de la Polynésie, et que le français, le tahitien, le marquisien, le paumotu et le mangarevien étant les langues de la Polynésie française, « les personnes physiques et morales de droit privé en usent librement dans leurs actes et conventions ; ceux-ci n'encourent aucune nullité au motif qu'ils ne sont pas rédigés dans la langue officielle. »

Cette reconnaissance des langues locales me plaît personnellement beaucoup, tout comme vous. Je me suis engagé, quel que soit l'aboutissement de nos débats, à aller plus loin pour trouver le moyen de légaliser une pratique difficilement condamnable de l'Assemblée de Polynésie. M. Cointat l'a tenté ; c'est tout à son honneur. Je propose que nous mettions en place, dans les prochaines semaines, une commission réunissant des représentants de l'Assemblée nationale, du Sénat, de l'Assemblée de Polynésie et du Gouvernement pour rechercher une solution conforme à la Constitution.

L'article 12 est adopté.

Les articles 13, 13 bis, 13 ter et 14 sont successivement adoptés.

Article 14 bis

I. - L'article 164 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 164. - Le président du haut conseil de la Polynésie française est désigné parmi les magistrats de l'ordre administratif, en activité ou honoraires.

« Les autres membres du haut conseil de la Polynésie française sont désignés en considération de leur compétence en matière juridique, parmi les magistrats de l'ordre administratif ou judiciaire, les professeurs et maîtres de conférence des universités dans les disciplines juridiques, les fonctionnaires de catégorie A, les avocats inscrits au barreau et les personnes ayant exercé ces fonctions.

« Les magistrats de l'ordre administratif ou judiciaire mentionnés aux deux premiers alinéas ne doivent pas exercer leurs fonctions en Polynésie française ou y avoir exercé de fonctions au cours des deux années précédant leur nomination.

« Les fonctions de membre du haut conseil de la Polynésie française sont incompatibles avec celles de président de la Polynésie française, de membre du gouvernement de la Polynésie française, de représentant à l'assemblée de la Polynésie française et de membre du conseil économique, social et culturel de la Polynésie française. Les incompatibilités prévues à l'article 111 sont également applicables aux membres du haut conseil de la Polynésie française.

« Les membres du haut conseil de la Polynésie française sont nommés par arrêté délibéré en conseil des ministres de la Polynésie française, pour une durée de six ans renouvelable une fois, dans le respect des règles statutaires de leur corps le cas échéant. Ils ne peuvent être démis de leurs fonctions que pour motifs disciplinaires.

« Le président de la Polynésie française transmet à l'assemblée de la Polynésie française le projet d'arrêté portant nomination. Dans le mois qui suit cette transmission, l'assemblée, sur le rapport de sa commission compétente, donne son avis sur cette nomination. Hors session, la commission permanente exerce, dans les mêmes conditions, les attributions prévues au présent alinéa. »

II.   -  Non modifié....................................

III. - L'article 165 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cet arrêté détermine, notamment, le régime indemnitaire des membres du haut conseil de la Polynésie française ainsi que le régime applicable aux fonctionnaires qui y sont nommés, dans le respect des règles statutaires de leurs corps d'origine. »

M. le président. - Amendement n°2, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Bernard Frimat. - Cet article est issu d'un amendement présenté par M. Flosse. Lors de son examen, la discrimination qu'il instituait envers les avocats nous paraissant surprenante, nous l'avions sous-amendé pour le rendre plus acceptable. L'enfer est pavé de bonnes intentions. Car nous n'en avions pas discerné, alors, la finalité : en l'adoptant, nous avons de fait voté la destitution à six mois d'une personne physique, comme si nous l'avions nommément désignée. Le moins que l'on puisse dire est que nous ne sommes pas là dans notre rôle de législateur. M. Temaru nous a écrit pour nous alerter : le haut conseil de la Polynésie française est présidé par une avocate polynésienne, docteur en droit, dont la compétence n'est mise en cause par personne.

Je sais que telles ne sont pas vos pratiques, monsieur le rapporteur : vous n'aviez nullement l'intention de destituer cette personne. En outre, il semble qu'il n'existe aucun magistrat de l'ordre administratif qui soit polynésien. Bien sûr, la loi n'a pas à indiquer des éléments ethniques, qu'ils soient statistiques ou autres. Mais la réalité s'impose quand même : le Parlement de la République dit aux Polynésiens que, dans un délai de six mois, ils devront destituer l'actuelle présidente. C'est totalement inacceptable. Il convient donc de supprimer cet article malheureux, même si je ne fais aucun procès d'intention au rapporteur. Je me garderai bien en revanche de me prononcer sur les intentions de l'auteur de cet amendement qui a une connaissance intime de la réalité du terrain.

L'idéal serait que vous soyez favorable à mon amendement. Mais M. Cointat va exprimer sa sympathie, le texte restera en l'état car le calendrier électoral de Polynésie ne permet pas une nouvelle navette. Il n'en reste pas moins que c'est inacceptable : qui d'entre nous voterait une loi qui vise une personne physique ?

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Effectivement, cet amendement a été présenté par le sénateur de Polynésie, qui connaît bien le terrain. Sous réserve des modifications que nous avions proposées et qui avaient été acceptées par l'auteur de l'amendement, il nous semblait que la rédaction améliorait le texte de 2004 car elle précisait davantage les compétences, la composition et le rôle du Haut conseil. Il s'agit quand même d'une institution qui devra se comporter par rapport aux lois de son pays comme le fait notre Conseil d'État. Il ne nous a donc pas semblé anormal que la personne appelée à la présider soit un magistrat de l'ordre administratif. Mais il est également vrai que si j'avais eu connaissance des effets que cet article allait produire, j'aurais proposé une autre solution.

Contrairement à nous, l'Assemblée nationale a voté cet article en toute connaissance de cause et elle n'a pas jugé opportun de modifier l'article. Nous sommes donc contraints d'en faire de même puisque l'objectif reste d'avoir une institution aussi efficace que possible. Enfin, je suis persuadé que le délai de six mois permettra de trouver une solution.

C'est donc avec regret que je ne puis être favorable à cet amendement.

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État.  - Votre position pourrait être louable, monsieur Frimat, à condition qu'elle soit dénuée de toute arrière-pensée. Connaissant votre intégrité, je ne puis l'imaginer un seul instant. Comme l'a rappelé M. Cointat, le sénateur Flosse a présenté un amendement pour améliorer la transparence et la compétence juridique du Haut conseil, et je tiens à lui en rendre hommage alors qu'il est absent ce matin. Les nominations au Haut conseil seront désormais soumises à l'avis de l'assemblée de la Polynésie française alors qu'avant, seul le conseil des ministres se prononçait. Il n'y a là rien de choquant ni de critiquable, d'autant que cette procédure est utilisée pour d'autres instances. Une telle procédure peut même éviter des nominations de complaisance, comme la désignation de membres de sa propre famille... Vous avez parlé, monsieur Frimat, des qualités de la présidente actuelle. Je n'ai pas à les contester, mais je vous demande de vous renseigner sur les conditions de sa nomination.

Désormais, le président sera auditionné par une commission de l'assemblée de Polynésie qui pourra se faire une idée précise de ses compétences juridiques. Comme le dispositif prévoit un remplacement du président au plus tard six mois après l'élection de l'assemblée de la Polynésie, il n'y a aucune urgence à remplacer la présidente actuelle. De plus, le Haut conseil est un organe purement consultatif chargé de conseiller le Gouvernement. Ce n'est ni une juridiction, ni une autorité administrative indépendante. Enfin, l'intéressée pourra, en tout état de cause, demeurer membre du Haut conseil.

M. Bernard Frimat. - Je tiens à remercier M. le rapporteur pour sa sincérité et dire à M. le ministre que j'ai bien entendu son hommage à M. Flosse. Je ne tiens pas à polémiquer sur les conditions de nomination de la présidente actuelle qui a été désignée en vertu du statut de 2004 que vous aviez adopté pour complaire à M. Flosse. Vous n'imaginiez pas, à l'époque, qu'il puisse perdre les élections. La présidente du Haut conseil a été nommée par M. Temaru, ce qui est bien normal puisqu'il était président de la Polynésie.

Lors de la première lecture, le Sénat ne connaissait pas tous les tenants et les aboutissants de cet amendement et je ne suis pas persuadé, connaissant l'intégrité de notre rapporteur, qu'il y aurait été favorable s'il en avait su toutes les conséquences. Je ne suis pas non plus convaincu que cet amendement aurait ressuscité à l'Assemblée nationale si nous l'avions enterré ici.

Il n'en reste pas moins que cet article a de graves effets : je maintiens donc mon amendement et les Polynésiens apprécieront, d'autant qu'avec ces nouvelles conditions de nomination, il y a fort à parier que ce ne sera pas un Polynésien qui sera président du Haut conseil. C'est quand même paradoxal et cela rappelle curieusement une époque que je croyais révolue et que l'on qualifiait de coloniale ! (Murmures à droite)

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

L'article 14 bis est adopté

M. Bernard Frimat. - Nous ne participerons pas au vote sur les articles 15 à 17. En revanche, comme en première lecture, nous voterons l'article 18 car nous sommes favorables à la transparence financière. Au moment où vous abandonnez votre sponsoring à l'opacité, nous aurions mauvaise grâce à ne pas vous soutenir.

Vous avez enfin compris, grâce notamment au rapporteur, que la Polynésie française, dans le processus de « déflossification », a aussi le droit à la transparence et je m'en réjouis.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Nous nous abstiendrons sur les articles 14 quater à 17.

L'article 14 quater est adopté, ainsi que les articles 15, 16, 17.

L'article 18 est adopté.

M. le président. - L'article 18 a recueilli l'unanimité

Article 20

I. - Par dérogation aux dispositions de l'article 104 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, le premier tour des élections pour le renouvellement intégral de l'assemblée de la Polynésie française sera organisé en janvier 2008.

Le mandat des représentants à l'assemblée de la Polynésie française en fonction à la date de publication de la présente loi organique prend fin à compter de la réunion de plein droit de l'assemblée élue en application du premier alinéa du présent I, qui se tiendra dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 118 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée.

Sans préjudice de l'application des dispositions de l'article 156 de la même loi organique, le mandat de l'assemblée de la Polynésie française élue en application des deux premiers alinéas du présent I expirera à compter de la réunion de plein droit prévue à l'article 118 de la même loi organique et, au plus tard, le 15 juin 2013.

I bis. - Pour les élections organisées en application du I, le délai de six mois prévu au III de l'article 109 de la même loi organique est remplacé par un délai d'un mois. La mise en disponibilité des agents publics qui souhaitent se porter candidats à ces élections est de droit dès réception de leur demande par l'autorité dont ils dépendent.

II. - Non modifié.......................................

III. - Les articles 1er, 5, 6, 11, 13 à 16 et 18 entrent en vigueur à compter du renouvellement de l'assemblée de la Polynésie française prévu au I du présent article.

Les autres dispositions de la présente loi organique entrent en vigueur à compter de sa publication au Journal officiel de la République française.

IV. - L'article 14 quater est applicable aux recours déposés à compter de la publication de la présente loi organique au Journal officiel de la République française. 

V. - Les règles prévues au II de l'article 7 bis et aux articles 9, 10 et 11 quater doivent être adoptées par les autorités de la Polynésie française au plus tard le 1er juillet 2009. 

M. le président. - Amendement n°3, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le I de cet article.

M. Bernard Frimat. - Avec cet amendement, je veux marquer notre opposition à ce texte. Cet article est le coeur de ce projet de loi organique : vous aviez besoin d'une procédure dérogatoire pour dissoudre, destituer -je vous laisse les choix des termes- l'assemblée actuelle de Polynésie française qui ne vous convient pas. M. Dominique Paillé, député de la majorité, a récemment déclaré à la presse souhaiter un renouvellement profond des hommes et des idées en Polynésie française en marquant sa préférence pour M. Tong Sang plutôt que pour l'ami de M. Chirac, M. Flosse.... (M. Henri de Raincourt s'esclaffe.) Ses collègues de l'UMP apprécieront qu'il dise tout haut ce que tout le monde pense tout bas !

Le Parlement n'a pas pour fonction de dissoudre l'assemblée de Polynésie française. Vous n'avez pas eu le courage politique d'assumer vos désaccords aussi avez-vous pris le biais parlementaire. Je vous fais grâce des éléments qui retiendront l'attention du Conseil constitutionnel, que j'avais rappelés en première lecture.

M. Christian Cointat, rapporteur. - Je n'aurais pas compris que M. Frimat ne déposât pas cet amendement de suppression, comme M. Frimat ne comprendrait pas que la commission ne lui donnât pas un avis défavorable ! (Sourires) En 2007, toutes les forces politiques polynésiennes ont demandé la tenue d'élections anticipées (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission, approuve.) lorsqu'elles étaient, il est vrai, dans l'opposition...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Ce qui change tout !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - Le Gouvernement a pris la décision d'élaborer ces textes le 1er août, lorsque le président de la Polynésie française était M. Tong Sang. Il ne s'agit donc pas d'une décision de circonstance (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.) Nous avons refusé une dissolution précipitée de l'assemblée, demandée par MM. Flosse et Temaru, pour prendre le temps de la concertation. Après la communication en conseil des ministres du 1er août, les textes ont été soumis aux responsables polynésiens et au Conseil d'Etat, puis présentés au conseil des ministres avant d'être transmis au Parlement et feront éventuellement l'objet d'un contrôle par le Conseil constitutionnel. La plupart des acteurs polynésiens, je le répète, ont approuvé cette modification du statut. Le 27 janvier prochain, les Polynésiens retourneront devant les urnes pour décider de leur propre destin. Qui peut craindre leur choix ?

M. Bernard Frimat. - Pas nous !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - Ensuite, l'Etat travaillera de manière impartiale avec ceux que le peuple aura élus. Tous les Polynésiens que j'ai rencontrés m'ont dit : « Il faut faire vite, très vite, nous avons besoin de retrouver la stabilité pour que nos élus s'occupent enfin de nos enfants et engagent la Polynésie française sur le chemin de prospérité ! »

M. Robert del Picchia. - Très bien !

L'amendement n°3 n'est pas adopté.

L'article 20 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. le président. - Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Monsieur le ministre, prétendre que l'instabilité politique depuis 2004 explique un moindre développement de la santé et de l'enseignement et s'est accompagnée de pratiques financières douteuses est faux. Sur ce dernier point, vous savez, comme moi, que les dysfonctionnements pointés par la Cour des comptes sont antérieurs à 2004.

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. - C'étaient les arguments de M. Frimat, et non les miens !

M. Bernard Frimat. - Caricature !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Pourtant, il m'a semblé vous entendre dire que l'instabilité politique avait freiné le développement et empêché l'accès à l'égalité des chances !

Au vrai, l'Etat n'a pas pu s'empêcher d'imposer à la Polynésie française les conditions de son évolution politique, ce qui est contraire, malgré tout ce que vous pourrez dire, à l'autonomie garantie à ce territoire. Pour éviter que la Polynésie ne s'éloigne de Paris, vous cherchez un nouveau couple sûr qui remplacerait celui que formaient autrefois MM. Flosse et Chirac. Au reste, la majorité des représentants de l'assemblée de Polynésie ont contesté la modification du statut de 2004 et la tenue d'élections dès le 27 janvier : pourquoi cette précipitation ?

Certes, les Polynésiens ne supportent plus les querelles politiciennes et l'instabilité. Mais ces textes ne permettent pas de répondre à leurs attentes, ils ont pour objet d'installer une assemblée à votre convenance. Le groupe CRC votera donc contre !

M. Bernard Frimat. - Monsieur le rapporteur, si la commission avait donné un avis favorable à l'amendement n°3, j'en aurais été ravi (Sourires).

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - On peut toujours changer d'avis !

M. Bernard Frimat. - Trêve de boutades, je regrette que ce débat n'ait pas été davantage polyphonique et que l'on n'ait pas discuté des véritables problèmes.

Vous dites avoir pris tout votre temps, mais nous avons commencé l'examen de ce texte le 7 novembre : connaissez-vous beaucoup de textes organiques que les deux assemblées aient examinés en seulement 22 jours ? La vérité, c'est que nous devons ce débat à grande vitesse à l'obsession du Gouvernement, de changer l'assemblée de Polynésie le plus vite possible ! Vous me dites qu'il ne faut pas avoir peur, mais je ne suis pas d'une nature craintive et je respecte pleinement le suffrage universel, même lorsque je ne suis pas satisfait de ses choix ! La démocratie, c'est accepter le suffrage universel : combien les gouvernements précédents auraient été bien inspirés de respecter le suffrage des Polynésiens, plutôt que de tout faire pour déstabiliser l'Assemblée qui en était issue ! Nous connaissons tout le feuilleton, en particulier le rôle de Mme Girardin : vous n'êtes pas responsable des actions personnelles de votre prédécesseur, mais une majorité est responsable de la continuité d'une politique que nous ne pouvons passer sous silence !

Vous parlez d'État impartial ? Pour les Polynésiens, c'est de la science-fiction, ils ne connaissent qu'un État interventionniste et partial ! Nous nous refusons à tout procès d'intention et nous jugerons votre action sur pièces. Le passif est cependant tel, en Polynésie, que l'État devra fournir beaucoup de preuves pour démontrer qu'il est devenu impartial.

Vous m'avez pris à partie, faisant comme si je souhaitais des obstacles au développement de la Polynésie, alors que je dis qu'elle doit se libérer d'un long passé clientéliste et que ce sera difficile ! Nous sommes tous pour le développement de la Polynésie et nous avons, à gauche, suffisamment combattu certains de vos amis politiques outre-mer, pour savoir quel est l'intérêt des peuples !

M. Christian Cointat, rapporteur.  - L'assemblée territoriale a certes émis un avis négatif, mais c'était contre le projet initial, avant que nous n'intégrions la plupart des propositions de cette assemblée. J'ai commencé mes consultations le 17 octobre, rencontré toutes les forces politiques polynésiennes : le débat a donc été diligent, six semaines, et l'Assemblée nationale s'est rendue au point de vue du Sénat, fort des propositions des Polynésiens !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État.  - Merci à tous, pour cet excellent débat. J'ai particulièrement apprécié votre explication de vote, monsieur Frimat. Nous nous sommes beaucoup parlé : j'en retiens un échange de contributions, plutôt qu'une confrontation, chacun a donné le meilleur de lui-même, dans l'intérêt des Polynésiens. Vous avez évoqué bien des sujets où je ne vois pas ce qui nous empêcherait de nous rejoindre, sans procès d'intentions, et nous y passerons le temps qu'il faudra ! (Sourires) Le statut de 2004 a quelque vertu, puisqu'il a donné à la chambre territoriale des comptes les pouvoirs d'investigation grâce auxquels elle a mis en lumière les faits répréhensibles que vous dénoncez, sur le parc automobile, les primes, le nombre de personnels... M. Dosière nous a fait lecture, à l'Assemblée nationale, des observations des magistrats financiers, je ne suis pas sûr que les choses aient beaucoup changé depuis 2004... C'est pourquoi j'attends plus de transparence des outils que nous mettons en place. Les Polynésiens se défient de leurs représentants, parfois à tort. Ils sauront désormais que tous les actes de la vie publique seront décidés en toute transparence : nous allons rétablir ce lien de confiance entre les Polynésiens et leurs représentants !

N'ayons pas peur ! Avec ce texte, nous insufflons à la Polynésie cette volonté de changement profond que les Français ont exprimée le 6 mai. Je continuerai de donner le meilleur de moi-même, pour que vous ne soyez pas déçus, ni les Polynésiens : nous leur devons la transparence et l'impartialité ! (Applaudissements à droite et au centre)

En application de l'article 59 du Règlement, le projet de loi organique est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin.

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 326
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 200
Contre 126

Le Sénat a adopté.

Rappels au Règlement

M. Bernard Frimat. - Je ferai le même rappel au règlement qu'en première lecture. La Conférence des Présidents a admis qu'un mandat écrit permette à un groupe -aujourd'hui l'UMP- de voter pour un groupe dont aucun membre n'est présent au débat. Personnellement je trouve cela choquant et je vous demande, monsieur le président, de le signaler au Président du Sénat. A nouveau, le président du groupe socialiste lui demandera si cela est conforme à un fonctionnement parlementaire normal. Lorsqu'on forme un groupe politique, le minimum est d'assurer une présence à tous les débats.

M. le président. - Je prends acte de votre déclaration dont je ferai part au Président du Sénat et le sujet sera abordé à la prochaine Conférence des Présidents. Quoiqu'il en soit, j'ai en main les deux mandats.

M. Bernard Frimat. - Je ne le mettais pas en doute.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Je ferai la même observation. Nous tenons à la représentativité des groupes et il n'est pas bon de se constituer en groupe uniquement pour en tirer certains avantages.

M. Laurent Béteille. - Votre remarque est un peu singulière...

M. le président. - Acte est donné de votre déclaration.

M. Bernard Frimat. - Autre chose : s'il est possible, même avec un effectif réduit, de participer à un débat, activement et au fond, je m'interroge sur le fait que certain groupe, plus massivement représenté, puisse observer un silence religieux tout au long d'un débat....