Aide publique au développement

Interventions des rapporteurs

M. Michel Charasse, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Notre aide publique au développement se porte un peu mieux. En 2008, elle atteint 7,6 milliards, soit 0,39 % du RNB contre 0,38 en 2007. Nous sommes au quatrième rang mondial en volume et au deuxième du G7 en valeur. La progression 2008 de l'aide française atteint près de 3 % en termes réels et plus de 11 % hors annulations de dettes. En 2009, grâce aux annulations reportées de 2008, nous pourrions être à 0,44 % du RNB, tout près du plus haut niveau enregistré en 2006 : 0,47 %. En 2010, nous serons entre 0,44 et 0,48 selon que les dettes du Congo et de la République démocratique du Congo seront annulées par le FMI.

Cet effort est méritoire dans le contexte contraint de nos finances publiques ; la chute de l'APD française en 2006 et 2007 tend à être aujourd'hui rattrapée. Et notre pays pourra honorer ses engagements internationaux sur ce point -en particulier ceux que le Président de la République a pris lors de la conférence de Doha fin 2008.

La conjoncture économique mondiale impose une solidarité accrue en faveur des pays en développement pour atteindre certains des « objectifs du millénaire » à l'horizon de 2015. Les pays donateurs l'ont compris : en 2008, les membres du comité d'aide au développement de l'OCDE ont augmenté leur aide de plus de 10 %, pour avoisiner les 120 milliards de dollars, montant historique jamais constaté auparavant.

Il faut pourtant relativiser cette satisfaction globale. D'abord, l'aide « de terrain », la plus visible donc la plus rentable politiquement, est toujours tragiquement minoritaire dans l'APD française. En 2008, 41 % de notre aide va au multilatéral et 9 % aux annulations de dettes. La France a obtenu une réduction de sa contribution au FED pour 2011-2013 : en 2011, nous tombons à 804 millions d'euros, soit 68 de moins que pour 2010.

Ensuite, certaines dépenses importantes figurent toujours dans l'APD car engagées sur notre territoire : fonds consacrés à Mayotte et à Wallis-et-Futuna, aides aux réfugiés originaires des pays en développement, frais d'écolage des étudiants étrangers en France. Notons un progrès : seuls les frais concernant les étudiants ressortissants de pays en développement sont décomptés. Mais la qualification de ces dépenses en APD reste sujette à caution.

A l'inverse, certaines dépenses qui contribuent au développement ne sont pas comptabilisées : les dépenses fiscales relatives aux dons faits aux organisations de solidarité internationale, les mécanismes de garanties, la sécurisation de l'aide alimentaire et l'essentiel de la coopération militaire et de défense. Aussi je vous demande, monsieur le ministre, de dresser un inventaire précis et chiffré de tous ces éléments afin d'avoir une vue plus exacte de l'effort national en faveur de l'APD.

Un dernier point pour tempérer l'enthousiasme : en 2011, on estime que cette aide pourrait tomber à 0,42 % du RNB, contre 0,44 au moins en 2010.

Certes, il y a toujours un décalage entre prévision et exécution du fait des aléas liés aux annulations de dettes et dépenses non programmables. Néanmoins, la France s'est engagée à atteindre 0,7 % de son RNB en 2015 et la réalisation de cet objectif suppose une croissance « miraculeuse » de notre APD de 17 % par an sur la période 2012-2015. Or, les contributions budgétaires dépendent de l'amélioration de la situation des finances publiques... et je me garderai bien de prendre des paris !

Je me félicite cependant de certains progrès. Ainsi du renforcement de l'efficacité de notre APD à la suite des décisions de juin dernier de concentrer l'aide française sur un champ prioritaire resserré. C'est une orientation conforme à la RGPP et à mes préconisations récurrentes.

D'abord, 60 % des ressources d'APD iront à l'Afrique subsaharienne, à quatre catégories de pays éligibles à l'APD relevant d'interventions adaptées. Une liste nominative de quatorze États a ainsi été arrêtée, regroupant les « pays pauvres prioritaires ». Cette concentration géographique de l'aide se substitue peu à peu à la notion de « partenariats différenciés ». Ensuite, l'aide française sera dirigée vers cinq secteurs prioritaires -santé, éducation, agriculture, développement durable et soutien à la croissance. Ces heureuses mesures offrent un soutien plus efficace aux pays et aux secteurs qui en ont le plus besoin.

La mission APD elle-même est dotée de 3,1 milliards en autorisations d'engagement et de 3,5 milliards en crédits de paiement. Cette mission ne constitue que le tiers de l'ensemble de l'APD nationale totale -8,6 milliards.

Par rapport à 2009, les autorisations d'engagement baissent d'environ 8 %, évolution pas trop préoccupante à court terme puisqu'elle vient du programme 110, relevant de Bercy : la moindre dotation en AE -moins 46 % par rapport à 2009- tend à préserver la « soutenabilité » du programme, et donc à éviter une « crise des paiements ». Au contraire, les AE du programme 209, qui concentre l'aide « de terrain » pilotée par le Quai d'Orsay, augmentent de 16 %. Je mets en garde contre toute tentation de combler, par une ponction sur le programme 209, les éventuelles insuffisances que l'exécution pourrait révéler sur le programme 110. J'appelle aussi l'attention sur les conséquences, en 2011-2012, de ce tassement des autorisations d'engagement du programme 110.

Les crédits de paiement de la mission, quant à eux, augmentent de 12 %, reflet de la croissance de l'APD générale L'effort de réduction des effectifs se poursuit : le plafond d'emploi est fixé à 2 667 équivalents temps plein, soit 122 postes de moins. La réduction nette d'effectifs publics reste cependant limitée à 87 ETP du fait des transferts vers d'autres administrations.

Pour conclure, quelques préconisations ponctuelles. Primo, la dépense fiscale de l'APD sera proche de zéro en 2010, faute de souscripteurs pour les dispositifs en cause, notamment le « compte épargne co-développement ». Le Gouvernement doit s'interroger sur l'opportunité de maintenir ce dispositif car quand on n'a pas de sous, on ne saurait épargner.

Deuzio, le pilotage stratégique de l'Agence française de développement a été renforcé en juin dernier. Mais nos ambassadeurs doivent disposer des moyens en compétences et effectifs pour porter une appréciation éclairée sur les projets et ne plus s'en tenir à un avis purement formel, style « RAS » que le conseil d'administration de l'AFD se borne à enregistrer avec scepticisme. Cette attitude ne favorise guère l'autorité des ambassadeurs, ni le prestige de la fonction alors qu'ils doivent avoir une vision politique, au sens noble du terme, sur les projets. Aussi, l'affectation en ambassade de sous-préfets en mobilité spécialement chargés du suivi des dossiers permettrait à nos ambassadeurs d'assumer pleinement leur rôle en la matière.

Nous pouvons nous appuyer sur ces fonctionnaires de terrain dont nous connaissons l'efficacité.

L'Office français de l'immigration et de l'intégration remplace l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations. Il aide à la réalisation de projets économiques présentés par les migrants qui souhaitent retourner au pays. Je persiste à penser qu'il faut relever le montant de l'aide de 7 000 à 15 ou 20 000 euros, quitte à renforcer les conditions pour s'assurer du sérieux des projets.

Sans rouvrir le débat sur les frais de scolarité, je crois opportun, pour préserver l'équilibre financier des établissements d'enseignement à l'étranger et soutenir la francophonie, que l'État, les partenaires sociaux et les entreprises concluent une sorte d'accord de bonne conduite pour mieux partager la prise en charge des frais de scolarité des enfants de résidents français. Cela réduirait une charge budgétaire qui préoccupe chaque année la commission des finances.

Sous réserve des amendements que je vous présenterai et au bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits de l'aide publique au développement. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Le compte « Prêts à des États étrangers » est divisé en trois sections. La première comprend les prêts à des États étrangers au titre de la « réserve pays émergents » ; il s'agit d'accords bilatéraux destinés à faciliter la réalisation d'infrastructures lorsque celle-ci fait appel à des biens et services français. La deuxième section comprend des prêts à des États étrangers pour consolider leur dette envers la France et la troisième, des prêts à l'Agence française de développement (AFD). Ce compte est déficitaire car le montant des prêts excède les remboursements encaissés.

Le programme 851 contribue à soutenir l'expansion internationale des entreprises françaises. Même si les crédits de paiement s'élèvent à 300 millions contre 180 en 2009, nous déplorons sa modestie, malheureusement révélatrice de l'insuffisance de la présence industrielle française dans le monde. Nous avons pourtant des savoir-faire à rentabiliser ! Plus inquiétante encore est la diminution des autorisations d'engagements. Sur la période 1998-2008, le volume des prêts consentis au titre de la réserve pour pays émergents s'est élevé à 1,94 milliard d'euros. En 2010, les principaux décaissements concerneront la ligne à grande vitesse au Maroc, le tramway de Rabat, le métro du Caire et celui d'Hanoï, des projets touchant l'eau et l'environnement en Arménie et en Mongolie.

Le programme 852 reconduit celui de 2009. Les annulations de dettes consenties par la France s'inscrivent dans le cadre de l'initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE), lancée en 1996 et qui concerne 35 pays -sur 40 éligibles. La France est le premier contributeur en cumul depuis 1996 : 12,7 milliards d'euros, dont 7,7 milliards dans le cadre multilatéral et 5 dans le cadre bilatéral. Certains déplorent l'insuffisante individualisation de la participation de la France à l'effort d'annulation. J'ajoute que nos relations avec les pays pauvres très endettés ne sauraient se résumer à des annulations de dettes. Les pays développés et émergents ont des devoirs à l'égard des plus pauvres, qui souffrent du mal le plus dramatique : la faim. Ce fléau mondial concerne 963 millions de personnes, chiffre malheureusement en croissance. Cruel paradoxe, la moitié des sous-alimentés travaillent la terre. C'est là le principal défi lancé à l'humanité. La répartition inégale des matières premières agricoles engendre conflits et désastres : nous devons privilégier la construction d'infrastructures de transports, la production d'énergie hydraulique et solaire, etc. La sécurité alimentaire dans les pays pauvres ne peut relever ni d'un libre échange mondial -la volatilité des cours du blé ou du pétrole le prouve- ni d'un repli à l'intérieur de frontières incertaines et démunies. Appliquons mieux le principe de régionalisation, à l'instar de la PAC européenne : c'est ce que M. Michel Barnier, à la suite d'Edgar Pisani, a défendu lors du G8 en Italie au mois d'avril dernier. Mais songez qu'au dernier sommet de la FAO à Rome, hormis M. Berlusconi, aucun chef d'État n'était présent...

Vous ne serez pas surpris si je mentionne ici le respect des engagements du paquet climat-énergie : nous avons une dette écologique à l'égard des pays en voie de développement, dette d'autant plus facile à évaluer que nous prétendons connaître le prix du carbone. L'AFD n'est pas insensible à ce sujet... Il faut faire prévaloir une justice climatique : les paradis fiscaux ne pourraient-ils être sollicités ? Au nom de la sécurité alimentaire, il faut instaurer une transparence minimale dans les contrats de location ou de vente de terre à des étrangers. II y a là un champ enthousiasmant pour nos diplomates, qui savent par exemple que le Mali et le Sénégal ne sont pas dans des situations identiques. Nous avons à soutenir une expertise française d'accompagnement, pour tirer un maximum de notre aide. Les créanciers des pays africains doivent respecter des règles de transparence et de justice !

Les prêts AFD sont des prêts à trente ans à un taux de 0,25 %. L'enveloppe demeure modeste : 208 millions d'euros. L'AFD a mis en place un nouveau « prêt très concessionnel contra-cyclique » qui adapte les remboursements aux circonstances économiques dans le pays emprunteur. Lorsque celui-ci exporte un petit nombre de produits aux cours fluctuants, l'instrument est fort utile ! La France est seule à l'avoir expérimenté ; plaidons pour son extension.

Le compte « Accords monétaires internationaux » retrace la coopération monétaire avec les pays de la zone franc. Comme en 2009, il n'est doté d'aucun crédit. La coopération garantit la parité du taux de change et la convertibilité, la liberté de transfert, la centralisation des réserves de change des États membres. Le ministère se réjouit de constater que dans la crise actuelle, les mécanismes de la zone franc ont contribué à stabiliser la situation monétaire et financière des pays concernés. Certains d'entre eux n'en connaissent pas moins une baisse de recettes, une progression des dépenses et une chute de la production des matières premières. Autant de facteurs d'inquiétude : un rapport d'étape serait bienvenu. Avec M. Gouteyron, nous pouvons nous interroger sur la présence française dans le monde. Je vous propose d'adopter sans modification les crédits du compte « Prêts et du compte accords monétaires ». (Applaudissements)

M. André Vantomme, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - J'interviens ici en tant que rapporteur et m'exprimerai tout à l'heure au nom du groupe socialiste. Ce léger dédoublement ne m'empêchera pas d'aborder maintenant les sujets qui fâchent ; je laisserai les autres sujets au co-rapporteur, M. Cambon. L'année 2009 a été marquée par la diffusion dans les pays en développement de la crise financière née dans les pays occidentaux. Selon la Banque mondiale, du fait de la crise, ce sont 53 millions de personnes supplémentaires qui vivent aujourd'hui avec moins de 1,25 dollar par jour.

La communauté internationale a répondu à cette situation sans tarder. Les interventions de la Banque mondiale ont augmenté de 50 %, l'aide publique internationale a augmenté jusqu'à un niveau jamais atteint. La France a-t-elle pris sa part dans cet effort collectif ? Je crois que oui. Elle a augmenté de façon très significative ses lignes de crédit à la disposition du FMI et de la Banque mondiale et demeure le quatrième donateur de l'OCDE en volume. La France se met-elle en mesure d'honorer ses engagements en matière d'aide au développement ? Il me semble que non. Nous nous étions engagés à porter notre effort à 0,51 % en 2010 : il se situera entre 0,44 % et 0,48 %.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Exact !

M. André Vantomme, rapporteur pour avis.  - Atteindrons-nous l'objectif de 0,7 % du revenu national en 2015 ? C'est peu probable. Cela supposerait une croissance de 17 % de ces crédits : ils ont crû de 2,1 % cette année. La commission des affaires étrangères vous invite à ne pas baisser les bras. La France, qui a porté haut et fort sa politique de coopération, doit maintenir le cap. Les tentations de modifier les critères de définition de l'aide sont fortes actuellement. Résistons à la tentation de gonfler artificiellement nos chiffres. Du reste, le Gouvernement a, conformément aux recommandations de l'OCDE, minoré les crédits d'écolage et d'accueil des réfugiés qu'il déclarait comme aide publique au développement.

Il est vrai que vous avez intégré la taxe sur les billets d'avion. C'est peu conforme aux engagements pris à la création de cette taxe mais cela ne manque pas de cohérence avec l'objet de l'Unitaid, qui relève bien de l'aide au développement.

L'aide programmable est pour 55 % multilatérale ; la proportion n'était que de 30 % il y a dix ans. Notre politique de coopération se décide désormais autant à Paris qu'à Bruxelles et à Washington. Ce n'est pas forcément une critique : l'échelon européen ou multinational est souvent le seul efficace, ce qui est l'unique critère pertinent. Les projets de coopération ne devraient être portés au niveau communautaire ou multilatéral que s'ils sont mieux réalisés à ces niveaux. C'est la logique de subsidiarité.

Il faut toutefois s'interroger sur le pilotage et l'évaluation de nos contributions multilatérales. Y a-t-il en face de chacune de nos contributions des objectifs et des évaluations ? Nous n'en sommes pas sûrs. Y a-t-il à Paris et sur le terrain, au Niger ou au Mali, une coordination suffisante des différents opérateurs ? Fait-t-on assez pour améliorer la cohérence des actions menées ? Qu'en est-il de notre influence dans ces fonds multilatéraux ? Nous ne disposions que d'un demi-siège au conseil d'administration du fonds Sida alors que nous sommes le deuxième contributeur... Dans les institutions où nos contributions sont marginales, parvenons-nous à faire valoir nos priorités pour l'Afrique ? Qu'en est-il, enfin, de la visibilité de notre aide ? Qui sait que le quart du budget du FED est assumé par la France ?

Quand on voit leur taille et leur compétence, on mesure l'importance du rôle joué par les ONG anglo-saxonnes dans l'influence de leur pays d'origine. Dans ce domaine, la France a pris du retard : les fonds transitant par les ONG s'élèvent à 1,14 % contre 5 % en moyenne dans l'OCDE. Le Gouvernement s'est engagé à redresser la barre. Nous l'y encourageons.

M. André Ferrand.  - Très bien !

M. André Vantomme, rapporteur spécial.  - Je laisse à M. Cambon le soin de vous donner l'avis de notre commission. (Applaudissements)

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - La politique d'aide au développement exige de la persévérance, du bon sens et de l'initiative. Ces qualités, monsieur le ministre, ne vous font pas défaut. Vous manquerait-il des crédits ? Sans doute votre budget n'est-il pas tout à fait à la hauteur des ambitions de la France dans ce domaine mais les crédits de la mission sont préservés dans un contexte budgétaire difficile.

Le Gouvernement a décidé, lors du Cicid du 5 juin, de consacrer plus de 60 % de ce budget à l'Afrique subsaharienne. Notre commission s'en félicite, tout en observant que cette priorité n'a pas été suivie d'effet ces dernières années. L'Afrique subsaharienne représentait 53 % de notre APD en 2005, elle n'en reçoit plus que 42 % en 2008. Et le 12 novembre dernier, le conseil stratégique de l'AFD autorisait l'extension des interventions vers les Philippines, le Mexique et la Colombie. N'y a-t-il pas là une contradiction ? Avons-nous les moyens de couvrir cinq continents ? Je peux comprendre la volonté de ne pas être absent de continents prometteurs mais quand on voit les progrès de l'influence américaine et chinoise en Afrique, on se demande s'il ne faudrait pas concentrer nos efforts dans notre zone d'influence traditionnelle, qui est aussi le continent qui a le plus besoin d'aide.

Ma deuxième observation portera sur le Fonds européen de développement. Avec 22,6 milliards, le dixième FED est un enjeu considérable comparé aux 3,5 milliards de la mission APD sur lesquels nous allons nous prononcer ce matin. L'année 2010 va être marquée par la renégociation des perspectives budgétaires du FED et par la rédaction d'un document cadre définissant la stratégie de la France en son sein. Comment comptez-vous nous associer à ces deux événements ? La modification de la clé de répartition va dégager une marge de manoeuvre de 100 à 150 millions ; comment comptez-vous les utiliser ? N'est-ce pas l'occasion de renforcer notre aide bilatérale à l'Afrique ?

La coopération décentralisée est de plus en plus importante. En 2008, 72 millions ont été consacrés à des projets concrets que votre ministère recense grâce, notamment, à l'excellent portail de la coopération décentralisée. L'État accompagne ce mouvement pour soutenir financièrement les initiatives des collectivités et pour renforcer la cohérence des actions menées. Il y consacre 8 millions, avec un effet de levier considérable puisqu'à chaque euro dépensé par l'État correspondent près de 5 euros abondés par les collectivités territoriales. Mais ces 8 millions ne permettront de toucher que la moitié des projets demandeurs.

Si j'en avais le temps, j'aborderais beaucoup d'autres sujets : le bilan des opérateurs, l'AFD, la Banque mondiale, le fonds Sida, les priorités sectorielles de la France, la nouvelle organisation de la politique européenne de développement. Je vous interrogerais sur les chances de succès de la contribution solidaire internationale. J'évoquerais la réforme de votre administration et les efforts considérables de la direction générale de la mondialisation pour moderniser ses méthodes.

Faute de temps, je vous renvoie à notre rapport écrit mais j'émets le souhait que ce dialogue trop bref se prolonge par un grand débat d'orientation en 2010.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga.  - Très bien !

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis.  - J'ai lu dans un journal de ce matin que vous étiez le ministre « le plus économe des moyens ». Je vous en félicite.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances - Très bien !

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis.  - Approuvant les priorités de ce budget et l'effort du ministère pour se moderniser, la commission des affaires étrangères est favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - Au sein du programme 209, les crédits consacrés à notre influence culturelle et linguistique diminuent de 6 %. Les subventions aux Alliances françaises sont réduites de 25 % alors que celles-ci constituent notre meilleur outil de rayonnement linguistique.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Tout à fait !

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis.  - Concernant notre réseau culturel à l'étranger, les chiffres sont donc préoccupants. La participation totale de la France au financement de la francophonie multilatérale s'établit à 53 millions contre 58 en 2009. Nos contributions à l'Organisation internationale de la francophonie et à ses opérateurs restent cependant substantielles. Si l'on compte aussi les 72 millions de participation majoritaire au financement de TV5 Monde, et les 4 millions de participation au loyer de la Maison de la francophonie, le budget de la francophonie, géré dans sa dimension politique et institutionnelle, atteint 142 millions.

Le pilier culturel sur lequel s'appuie également notre politique en faveur de la francophonie dispose d'un budget évalué à 256 millions, voire 782 si l'on y inclut l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, dont l'État finance 60 % du budget total. Nos établissements culturels à l'étranger et nos établissements scolaires d'enseignement français à l'étranger représentent numériquement la plus grande académie hors de France.

M. Jacques Legendre.  - C'est vrai !

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Et celle qui obtient les meilleurs résultats au bac parce que là-bas, on sait lire et compter !

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis.  - Ils participent naturellement à la diffusion de notre langue.

En considérant les choses ainsi, on peut évaluer à 925 millions l'effort financier total consenti par l'État à une politique francophone ambitieuse, chiffre qui inclut bien évidemment le budget significatif de l'AEFE.

J'ai commenté, lors de mon intervention sur la mission « Médias », l'évolution des ressources affectées à la holding Audiovisuel extérieur de la France, qui augmentent de 6 %. Des incertitudes pèsent néanmoins sur la répartition de la dotation publique entre RFI, France 24 et TV5 Monde, ainsi que sur la signature du contrat d'objectifs et de moyens liant la holding à la puissance publique pour la période 2009-2013. Cette difficulté n'est pas étrangère à la situation sociale délicate que connaît aujourd'hui RFI ; le pilotage stratégique de cette société pâtit de l'absence de concertation interministérielle opérationnelle.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement ».

Je vous demanderai, monsieur le ministre, des éléments d'information sur deux points. Pouvez-vous nous décrire l'effort du ministère en matière d'évaluation et de suivi des dotations publiques consenties à l'Organisation internationale de la francophonie et à ses opérateurs, lesquelles doivent abonder des programmes dont on peut attendre un retour sur investissement ?

Dans quelle mesure votre ministère s'appuie-t-il sur la promotion et l'enseignement de la langue française comme leviers de développement économique et d'intégration régionale ? Au sein du programme 209, un certain nombre de projets financés par le fonds de solidarité prioritaire et l'AFD comportent un volet culturel et linguistique significatif : des montages financiers innovants ne pourraient--ils être imaginés entre l'AFD et notre réseau d'enseignement français à l'étranger ? (Applaudissements à droite et au et au banc des commissions)

Interventions des orateurs

M. Robert Hue.  - Le budget de l'aide au développement constitue l'un des piliers de l'action internationale de la France. Comme chaque année, on nous annonce une augmentation significative de l'effort de la France, mais tous les doutes sont permis... Je regrette que l'on banalise le retard de notre pays à honorer ses engagements, à la différence des autres pays occidentaux. Selon le sondage annuel de l'AFD, deux Français sur trois estiment que malgré la crise, la France doit poursuivre son aide. Seuls 10 % estiment qu'il faut la stopper. En tête des préoccupations viennent la lutte contre la pauvreté et le réchauffement climatique.

En dépit des accords du millénaire fixés par l'ONU, qui entend réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2015, le compte n'y est pas. La France s'est engagée à consacrer 0,7 % de son PIB à terme et 0,51 % en 2010, à l'aide au développement. Il ne dépassera pourtant pas 0,44 à 0,48 % et M. Charasse prédit le chiffre de 0,42 % en 2011. Notre budget baisse inexorablement ; au mieux, il stagne. Que ceux qui y voient une augmentation m'expliquent comment ils s'y prennent, sauf à prendre en compte les annulations de dette qui rendent les chiffres tout simplement insincères. Pourtant, le Royaume-Uni ou l'Espagne, pays aussi durement touchés que nous par la crise financière internationale, atteignent leur objectif de 0,6 % de leur richesse nationale en 2010.

Les pays pauvres ont le sentiment de payer pour la crise, quand les nations développées sont si promptes à recapitaliser leurs banques et à aider les grands patrons à garder leurs stock-options.

Je suis curieux, monsieur le ministre, de connaître la position que va adopter le Gouvernement lors du prochain sommet sur les objectifs du millénaire, soit cinq ans seulement avant la clause de rendez-vous de 2015.

L'aide au développement, née de la décolonisation, est faite pour parvenir à un rééquilibrage des niveaux de développement, qui doit mettre fin la pauvreté dans le monde. Faut-il rappeler que 1,4 milliard de personnes vivent sous le seuil de pauvreté dans le monde, avec moins de 1,25 dollar par jour ? Qu'un enfant meurt du paludisme toutes les trente secondes ? Que 6 millions de personnes attendent, dans ces pays, un traitement contre le Sida ? Qu'en Afrique, plus particulièrement, 800 000 personnes souffrent de la faim, que des milliers d'enfants exécutent un travail harassant ? Ce continent sera le premier continent touché, si l'on en croit le directeur de l'AFD qui déclare lui-même qu'il faudra « s'accommoder d'une coupe radicale ». Constat d'autant plus alarmant que nos faibles moyens, de moins en moins utilisés pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, vont de plus en plus à la lutte contre l'immigration et à la promotion des entreprises françaises. L'humanitaire est en quelque sorte désormais « sous-traité » aux ONG. Où est la promesse du Président Sarkozy, à Doha, de faire de l'Afrique une priorité ? Car le choix est fait : aider les pays émergents sous forme d'aides publiques pour y accompagner la présence de nos entreprises et écraser l'Afrique de prêts, qu'elle ne pourra d'ailleurs jamais rembourser.

Dans le 9e fonds européen de développement, l'Union européenne n'a consacré que 4,5 % à l'agriculture des pays ACP. L'échec est aujourd'hui patent. L'abaissement des droits de douane et l'ouverture des marchés n'ont évidemment pas enrichi l'Afrique, ainsi que nous l'avions prévu.

L'agriculture sera un enjeu majeur dans les décennies à venir. Jacques Diouf, directeur général de l'Agence de l'ONU pour le secteur alimentaire, ne cesse de répéter qu'il faut produire là où les gens en ont besoin. Nous devons réorienter nos aides pour l'agriculture. Les engagements pris lors du dernier G8 sont appréciables mais les efforts financiers doivent être plus soutenus et les engagements tenus.

Les crédits consacrés à la lutte contre le réchauffement climatique, quant à eux, sont loin des 100 milliards de dollars annuels nécessaires, selon le secrétaire général de l'ONU que nous avons rencontré, pour enrayer la dégradation -chiffre à comparer aux plus de 1 500 milliards de dépenses militaires annuelles dans le monde...

Que dire, enfin, du lamentable attelage par lequel vous liez immigration et co-développement. La Cimade a alerté sur l'évolution de notre coopération, soumise à une obligation de résultat en matière de régulation des flux migratoires. Car cette condition, monsieur le ministre, figure bien dans l'une des conclusions du comité interministériel.

Le décalage entre les discours et la réalité déconcerte et décrédibilise la France dans le monde, et surtout auprès de ses partenaires, en Afrique.

Le groupe CRC-SPG, vous l'aurez compris, ne votera pas ce budget. (Applaudissements à gauche et au banc des commissions)

M. André Ferrand.  - L'aide publique au développement est un élément central des relations internationales et, en vertu de notre histoire, une composante essentielle de notre diplomatie. Cependant, le changement climatique, la mondialisation sont autant de nouveaux enjeux.

La crise qui frappe depuis un an pénalise lourdement les pays pauvres. En 2008, les flux de capitaux privés vers les pays en développement ont accusé une baisse singulière de plus de 700 milliards de dollars et, selon les estimations de la Banque mondiale, les apports nets seront probablement négatifs en 2009.

Cependant, malgré un contexte budgétaire très contraignant, le montant de notre aide publique au développement augmente. Les crédits du programme « Solidarité avec les pays en développement » progressent de 16 %. L'aide de la France envers les pays pauvres, en augmentation constante, représente 0,44 à 0,48 % de son revenu national brut, progressant ainsi vers l'objectif de 0,7 % que le Président de la République s'est engagé à atteindre.

L'aide publique au développement reste donc une priorité et la France confirme sa place de quatrième plus généreux donateur de la planète. Ne serait-il pas cependant souhaitable, monsieur le ministre, de réévaluer notre contribution via les canaux multilatéraux, notamment au sein du Fonds européen de développement où notre quote-part devrait être indexée sur notre contribution au budget de l'Union européenne. Quelle sera, sur ce point, notre marge de manoeuvre dans les négociations à venir ?

Notre participation au FED traduit la priorité accordée aux pays ACP, mais nous avons heureusement aussi, avec ces pays des programmes bilatéraux : ils nous donnent une réelle visibilité ; il faut les promouvoir.

Le Cicid du 5 juin a décidé d'une politique plus concentrée, géographiquement et sectoriellement. Quatorze pays pauvres d'Afrique bénéficieront de programmes d'aide, notamment en matière d'agriculture et de sécurité alimentaire. Alors que la hausse des prix des denrées de première nécessité a fait éclater des émeutes de la faim, quelle est la stratégie du comité interministériel en ce dernier domaine ?

Nous travaillons chaque année à élever notre contribution, mais les vecteurs ont évolué. Nous devons désormais appréhender les chose sous la perspective globale des opérateurs multilatéraux et des acteurs non étatiques que sont les ONG et les collectivités territoriales -et le vaste chantier de la coopération décentralisée a besoin de coordination.

Il faut également se soucier de l'efficacité : les habitants des pays pauvres souffrent trop pour que nous nous satisfassions de voir une partie de l'aide gaspillée, sans utilité réelle pour le développement. Il faut donc mettre en place des outils d'évaluation, moderniser les leviers de l'aide au développement et y associer des acteurs privés. La présence ce matin, au banc du Gouvernement, de Mme la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur est tout un symbole. Il faut établir des partenariats solides avec les entreprises, qui peuvent faire bénéficier les industries des pays les moins avancés de leur expertise et de leurs réseaux.

Plusieurs pays d'Afrique occidentale et centrale, anciennes colonies françaises, fêteront l'an prochain le cinquantième anniversaire de leur indépendance. La France les a depuis lors accompagnés par une aide bilatérale massive et multiforme. Veillons à ce que ces célébrations ne soient pas polluées par des polémiques portant sur notre passé.

Le groupe UMP votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs UMP et au banc des commissions ; M. Jean-Pierre Plancade applaudit aussi)

M. André Vantomme.  - Le montant de l'aide publique au développement stagnera en 2010 à hauteur de 0,44 % du revenu national brut, alors que la France s'était engagée à le porter à 0,51 % cette année et à 0,7 % en 2015. M. Chirac nous avait assigné ce dernier objectif pour 2012 ; M. Sarkozy a repoussé l'échéance jusqu'en 2015, mais il faudra sans doute la reporter encore...

Nos partenaires européens ne sont pas tous non plus à la hauteur de leurs promesses. La tentation est grande de casser le thermomètre afin de masquer la médiocrité des résultats. La notion d'« approche globale de l'aide » m'inquiète : est-ce une manière détournée de renoncer à nos engagements ?

Je remarque aussi que l'on privilégie, au détriment des dons, les prêts aux pays à revenus intermédiaires et émergents, qui s'accompagnent d'un soutien aux entreprises françaises. S'agit-il d'une politique de coopération ou de commerce extérieur ?

Certes, le Président de la République a promis de consacrer à l'Afrique la moitié de l'aide publique bilatérale. Mais quels seront les pays bénéficiaires et quelles formes prendra cette aide ? La faiblesse des crédits d'aide-projet, c'est-à-dire des subventions, empêche l'aide au développement de secteurs non rentables comme l'éducation, les transports ou la santé.

Quant à l'Agence française de développement (AFD), plusieurs observateurs regrettent de voir son rôle réduit à celui d'un banquier, qui prête principalement aux pays émergents, alors que sa fonction initiale est d'être le principal opérateur de l'aide au développement. Quelles missions lui assignez-vous, monsieur le ministre ? Comment peut-elle agir efficacement en Afrique subsaharienne ?

Le Gouvernement a fait un effort pour rendre le budget plus sincère. Souvent critiquée pour sa complexité, voire son opacité, l'aide publique de la France gagnerait encore à se passer de méthodes comptables peu orthodoxes, qui permettent de majorer les chiffres et de masquer les déficiences.

Il faut trouver un meilleur équilibre entre aide bilatérale et multilatérale. Le Gouvernement veut stabiliser la proportion entre les deux, ce qui est en effet souhaitable. Mais j'insiste sur la nécessité de contrôler et d'évaluer les contributions françaises aux organismes multilatéraux. Il faut préserver nos capacités d'action bilatérale : je sais, monsieur le ministre, que vous en êtes d'accord, mais comment faire à présent que les services de coopération et d'action culturelle (Scac) ont été réduits, voire supprimés ?

Un mot sur le sommet de Copenhague, qui s'ouvrira dans quelques jours : l'avenir du monde est en jeu. Le sommet doit aboutir à des décisions précises, contraignantes et dont l'effet soit vérifiable. Les pays riches, qui ont une grande part de responsabilité dans la dégradation de l'environnement, doivent s'assigner des objectifs ambitieux pour réduire de 40 % leurs émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990 et faire preuve de solidarité avec les pays pauvres. Il faudra être créatif pour trouver les financements appropriés. Après le sommet, la France devra réorienter son aide au développement en fonction des engagements qui y auront été contractés.

L'aide publique au développement doit être un des principaux axes de la politique étrangère de la France. Mais aujourd'hui le co-développement est devenu le parent pauvre de la politique d'identité nationale et d'immigration : cela augure mal de son avenir... Une application implacable de la RGPP, des caisses désespérément vides, une dette colossale : tels sont les écueils auxquels vous vous heurterez, monsieur le ministre. Malgré quelques améliorations, ce budget est encore loin d'être parfaitement transparent, et la sincérité globale du PLF peut être mise en doute... C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche ; M. Michel Charasse, rapporteur spécial, applaudit également)

M. Jean-Pierre Plancade.  - A l'heure où le monde traverse une grave crise économique, l'aide publique au développement revêt une importance accrue. Les pays pauvres sont plus durement touchés que les riches : M. Jacques Diouf, directeur général de la FAO, soulignait, lors du sommet de Rome, que le nombre de personnes souffrant de la faim s'élevait à 1,2 milliard... Au plan sanitaire, le Sida, qui touche plus de 33 millions de personnes dont les deux tiers en Afrique subsaharienne, et le paludisme, qui tue un enfant toutes les trente secondes, continuent à faire des ravages. Quant à l'éducation, 75 millions d'enfants ne sont pas scolarisés et 776 millions de personnes savent à peine lire et écrire.

Le combat en faveur du développement semble parfois vain, mais les chantiers sont immenses. La communauté internationale s'est mobilisée depuis quelques années : je pense aux objectifs pour le millénaire de l'ONU et à la promesse des pays de l'OCDE de porter à 0,7 % de leur RNB le montant de leur aide publique au développement. Mais nous sommes encore loin du compte : la France n'y consacrera en 2010 que 0,34 % de son RNB.

L'aide publique manque de transparence, pour nous comme pour nos partenaires. Pas moins de quatorze ministères sont concernés. Je me réjouis que le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid) ait décidé, le 5 juin, de mesures améliorant la lisibilité et l'évaluation de nos actions.

Cette mission, qui représente la moitié de l'effort de l'État envers l'aide au développement, est consolidée avec une augmentation de ses crédits de 5 % par rapport à l'an passé. En revanche, en tant que membre de la commission de la culture, je déplore, après M. Duvernois, la consternante diminution des crédits consacrés à la francophonie : moins 6 % pour l'influence culturelle et linguistique française, que ce soit dans les pays émergents, les pays de la zone de solidarité prioritaire ou les pays moins avancés ; moins 25 % pour les alliances françaises ; moins 13 % pour la politique de rayonnement de la langue française au sein des pays de l'OCDE, après une chute de 23 % l'an dernier ; enfin, diminution des crédits alloués au volet politique et institutionnel de la francophonie et des contributions de la France à l'Organisation internationale de la francophonie. Il faut réagir, répondre au désir de France de nos partenaires ! La demande d'apprentissage du français est en progression constante, témoignent les sénateurs représentant les Français de l'étranger. Quand la francophonie ressort à l'évidence de notre diplomatie d'influence, il est d'autant plus dommage de ne pas être entendus !

On ne refuse pas à la France les moyens de politique étrangère, disait notre illustre devancier, François Mitterrand. Le groupe RDSE, attentif aux réponses que le Gouvernement lui apportera sur la francophonie, appliquera son conseil ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.  - (Applaudissements sur quelques bancs UMP) Sans revenir en détail sur les chiffres de cette mission, je veux simplement rappeler que notre effort budgétaire en faveur de l'APD progresse pour se situer entre 0,44 et 0,48 du revenu national brut, selon les annulations de crédits des deux Congo. Le programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » augmente incontestablement. Nous avons donc tenu les engagements pris par le Président de la République.

Monsieur Charasse, il est effectivement temps de dresser un bilan sur la dépense fiscale. Je m'engage à le faire, en collaboration avec M. Besson. L'affectation de sous-préfets dans les ambassades pour coordonner la politique de coopération peut être une bonne idée, j'en discuterai avec nos postes. Laissons le temps au nouvel Office français de l'immigration et de l'intégration de faire ses preuves avant d'étudier les moyens de renforcer son efficacité.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Avoir modifié le nom de cet établissement ne change rien au fait qu'une aide de 7 000 euros, c'est trop peu !

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État.  - Je suis ouvert à vos propositions.

Je laisse Mme Idrac répondre à M. Hervé.

Monsieur Vantomme, chaque organisation internationale est évaluée par un organisme indépendant, ce qui nous permet de connaître l'utilisation de nos contributions que nous engageons et leur efficacité.

Au sein du comité interministériel de la coopération internationale et du développement a été décidé de mieux formaliser notre stratégie de coopération. Le Parlement est parfaitement associé à cette démarche : après la transmission d'un document en octobre concernant la banque mondiale, nous vous remettrons en février prochain une note sur notre aide européenne.

Concernant l'articulation des différents types d'aides multilatérales dans les pays ACP et d'Afrique subsaharienne, je rappelle que l'essentiel de l'effort transite par le FED. Concrètement, nos ambassades sont associées à la définition du plan indicatif national qui fixe les orientations de la politique européenne dans chaque pays bénéficiaire. Des pôles développement ont été récemment installés dans chacune de nos ambassades situées dans les pays bénéficiaires. Ils réunissent la chancellerie politique, la mission économique, le service de coopération et l'AFD.

La France est le premier contributeur européen du Fonds mondial Sida, le deuxième au niveau mondial après les États-Unis, avec une contribution actuelle de 300 millions de 2008 à 2010. Nous sommes très présents dans cette organisation qui comprend 65 Français sur 400 personnes. Nous consacrons beaucoup d'efforts pour mieux y associer les ONG françaises et francophones, mais leur dimension est parfois insuffisante pour mener des projets.

Je rencontre les ONG très souvent, notamment Coordination Sud et son président, Jean-Louis Vielajus. La France a pris du retard, il est vrai, concernant le transit de l'aide par les ONG : 1,1 à 1,2 %, contre 5 % en moyenne dans l'OCDE. Le Gouvernement s'est engagé à porter ce chiffre à 2 % en fin de quinquennat ; les crédits sont budgétés à cet effet en 2010, comme l'an passé.

Monsieur Cambon, nous participerons avec plaisir à un débat d'orientation sur notre politique de coopération au Parlement. Nous soutenons les projets de coopération décentralisée à hauteur de 8 millions en cofinancement avec les collectivités. Je mène d'ailleurs, actuellement, un tour de France pour mobiliser les collectivités intéressées. Nous sommes particulièrement intéressés par les projets de développement économique, seule solution durable contre la pauvreté. Les acteurs locaux sont le prolongement de l'action de l'État.

Monsieur Duvernois, l'utilisation des crédits de la francophonie...

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - ...sert à traduire des livres français en anglais ! C'est honteux !

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État.  - ...est évaluée. Par exemple, via les rapports du commissaire au compte pour l'OIF, actuellement la Cour des comptes française. Nous sommes présents dans le conseil d'administration de nombreux organismes tels que l'agence universitaire de la francophonie, l'université Senghor d'Alexandrie. Nous avons une convention d'objectifs et de moyens avec l'Association internationale des maires francophones.

La promotion de la langue française doit être un outil de développement économique : il s'agit de faire émerger de la main-d'oeuvre qualifiée francophone. Chaque fois que nous finançons des programmes francophones de formation professionnelle, nous contribuons à créer de la richesse et à lutter contre la pauvreté.

Le cercle vertueux est toujours le même.

Monsieur Hue, nous avons toujours fait ce que nous avions dit. Les chiffres que nous annonçons seront tenus. Évidemment, quand il s'agit de développement, les crédits sont toujours insuffisants, mais après quelques années difficiles, nous sommes à nouveau sur une pente vertueuse.

Un mot sur les commémorations, monsieur Ferrand : avec Jacques Toubon, nous travaillons sur le sujet et nous ferons très attention, dans le cadre de ces commémorations, à éviter les polémiques et les surcoûts car nous avons besoin de tous les crédits disponibles pour l'aide publique sur le terrain.

M. Vantomme a repris la parole au nom de son groupe : certes, nous devrons revoir notre façon de comptabiliser l'aide publique au développement. Beaucoup de crédits ne sont pas pris en compte tandis que M. Charasse a mis le doigt, à juste titre, sur des actions qui se trouvent dans le budget et qui ne devraient pas y être : il faudra donc procéder à un toilettage pour ajouter et retirer ce qui doit l'être.

Oui, monsieur Plancade, il y a bien un désir de France. Mme Idrac et moi-même nous déplaçons sur les cinq continents et nous avons pu le constater. Nous faisons le maximum pour répondre à ce désir de France et faire en sorte que notre action fasse durablement reculer la pauvreté. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.  - Compte tenu de la grande qualité des rapports et des informations que vient de vous communiquer mon collègue Joyandet, je vais me contenter de donner quelques coups de projecteurs sur des points particuliers.

Même s'ils ne souffrent pas directement de la crise financière, les pays africains en connaissent malheureusement les répercussions économiques. La demande extérieure a diminué de 12 % en 2009, contre une hausse de 3 % en 2008, le prix des matières premières a baissé et les flux des investissements étrangers s'est ralenti : moins 50 % dans les pays émergents en 2008 et encore moins 50 % pour 2009. Ce phénomène sera sans doute le plus marquant : alors que les investissements en Afrique se montaient à 53 milliards de dollars en 2007, contre 29 milliards en 2000, ils ont chuté à 29 milliards en 2008. Nous ne sommes pas très loin d'une diminution par deux des volumes d'investissements directs étrangers. C'est considérable, notamment quand on les compare au volume d'aide publique au développement.

Dans le même ordre d'idée, les transferts de fonds des migrants, qui représentent une contribution essentielle au revenu des ménages dans les pays en développement, et donc à leur consommation, accusent d'ores et déjà une baisse significative. M. Charasse s'est interrogé sur l'épargne des migrants et sur les incitations fiscales : nous souhaitons favoriser la baisse du coût des transferts des fonds des migrants qui représentent 300 milliards de dollars dans le monde, c'est-à-dire trois fois l'aide publique au développement. En outre, nous cherchons à encourager l'épargne des migrants avec le compte d'épargne co-développement qui bénéficie d'une aide fiscale mais qui s'est révélé décevant. Nous avons lancé une réflexion interministérielle qui sera confiée prochainement à une personnalité compétente et qui portera sur deux volets : la baisse du coût des transferts, qui sont particulièrement élevés en France car nous n'avons pas réussi à passer suffisamment de conventions avec les banques, et les raisons de l'échec du dispositif de soutien à l'épargne des migrants.

Au total, la croissance en Afrique, qui était de 6 % avant la crise, devrait être légèrement supérieure à 1 % cette année, alors que la croissance démographique demeure bien supérieure. La lutte contre la pauvreté a donc marqué le pas. Pourtant, nous sommes frappés par la capacité des Africains à résister aux difficultés économiques.

Avec cette crise, nous devons penser à un nouvel équilibre entre aide bilatérale et aide multilatérale. Sous l'impulsion du G20, dynamisé par les propositions du Président de la République, des mesures contra-cycliques ont été prises pour lutter contre la crise. Des moyens financiers supplémentaires ont été fournis par le FMI aux pays les plus pauvres. Il a prévu d'augmenter de 8 milliards de dollars ses prêts sans intérêt pour les pays à faibles revenus, grâce à la vente de son or, ce qui est une décision historique. La France a accordé à cette occasion un nouveau prêt d'un milliard de dollars au FMI.

La France a largement contribué à ce que le FMI refonde son modèle de prêts pour les pays à faibles revenus afin de mieux répondre à leurs besoins. M. Hervé a rappelé que nous avons été très en avance en matière de prêts bilatéraux mais nous avons aussi beaucoup oeuvré pour que les instruments financiers du FMI profitent aux pays à revenus intermédiaires mais aussi aux pays les plus en difficulté.

Le projet de loi de finances prévoit des ouvertures de crédits permettant de couvrir l'intervention de la France au titre du FMI : 20 millions permettront de bonifier les prêts que notre pays accorde au FMI.

Pour remédier à la crise, la France a demandé l'accélération des décaissements des banques multilatérales et l'augmentation de leurs engagements. Le G20 a fixé un objectif d'augmentation de 100 milliards des financements des banques multilatérales sur trois ans. Nous serons sans doute amenés à accompagner certaines augmentations de capital de ces banques lors du projet de loi de finances pour 2011. La première recapitalisation qui est intervenue est celle de la banque asiatique de développement avec un triplement du capital acté lors du G20 à Londres. La France participera à hauteur de 54 millions.

Le comité interministériel, présidé par M. Fillon il y a quelques mois, a retenu deux priorités. La sécurité alimentaire : le Gouvernement vous demande d'autoriser l'engagement de 35 millions au profit du fonds international de développement agricole et nous avons demandé à l'agence française de développement (AFD) de doubler ses engagements, qui atteindront 1,5 milliard sur cinq ans. L'environnement sera la deuxième priorité : nous confirmons nos engagements auprès du fonds pour l'environnement mondial. Au plan bilatéral, nous soutenons une approche identique via le fonds français pour l'environnement mondial, qui est plus particulièrement ciblé sur l'Afrique et qui permet à nos entreprises d'apporter leur soutien à divers projets.

Le Parlement est associé à la réflexion sur la stratégie de la Banque mondiale. Le document qui est soumis à votre appréciation développe deux axes : le renforcement de notre rôle en tant qu'actionnaire et le renforcement des partenariats opérationnels entre nos propres actions bilatérales et les projets financés par la banque.

M. Hervé est intervenu sur le compte spécial « Prêts aux États étrangers ». Effectivement, nous devons intervenir sur le secteur urbain. Avec la Chine, l'Inde et les pays du Maghreb, nous développons d'ailleurs divers projets relatifs à l'eau, aux déchets et à l'efficacité énergétique.

En 2009, les pays bénéficiaires des crédits que vous aviez accepté d'augmenter fortement ont été l'Égypte, la Tunisie, le Maroc, le Vietnam, le Pakistan, le Sri Lanka et la Serbie. Nos engagements portent sur le financement de onze nouveaux projets et sur des compléments de financement, dont le métro de Hanoï et du Caire.

Les 400 millions d'autorisation d'engagement prévus pour 2010 ne permettront pas de satisfaire la totalité des demandes. En revanche, les 300 millions de crédits de paiement permettront de financer le démarrage des projets les plus importants, notamment la ligne à grande vitesse Tanger-Casablanca.

J'en viens aux prêts aux États étrangers : ce deuxième compte de prêts relate la participation de la France aux efforts de la communauté internationale pour réduire le poids de la dette. Notre pays assure la présidence et le secrétariat du Club de Paris.

Les annulations de dettes sont imputées sur le programme 110.

Les rééchelonnements de dettes sont imputés sur le programme 852, « Consolidation des dettes ».

Je suis consciente de la question des relations entre les différents dispositifs et l'intérêt des entreprises françaises. Nous avons fait en sorte que les échanges d'information entre l'AFD et Ubifrance leur permettent de répondre aux appels d'offres.

Nous avons souhaité que la France développe les prêts souverains, y compris en Afrique subsaharienne, afin de contribuer à soulager le problème financier. Nous sommes très clairs, cette évolution ne doit en aucun cas menacer la soutenabilité de la dette. Nous privilégions ailleurs les prêts concessionnels. Le développement significatif de l'activité de prêts non souverains concerne au premier chef l'Afrique subsaharienne où les engagements AFD vont doubler d'ici 2012.

Des interrogations se sont fait jour sur les interventions hors Afrique mais les prêts non concessionnels déploient les interventions de la France et en diversifient les modalités : on voit l'intérêt qui y est porté dans le monde entier. (Applaudissements à droite et au centre)

Examen des crédits

M. le président.  - Amendement n°II-4, présenté par M. Charasse, au nom de la commission des finances.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

 

29.000.000

 

12.350.000

Solidarité à l'égard des pays en développement Dont titre 2

 

 

 

 

Développement solidaire et migrations

 

 

 

 

TOTAL

29.000.000

 

12.350.000

SOLDE

- 29.000.000

- 12.350.000

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - La commission des finances est la gardienne de l'application de la loi organique. Voilà de nombreuses années qu'elle demande que certaines missions, dont l'aide publique au développement, reçoivent bien les crédits qui les concernent mais qu'elles ne conservent pas ceux qui n'ont rien à voir avec leur objet. Cette situation rend en effet les choses très difficiles ; par exemple, pour aller à l'OCDE regrouper les crédits et constater que, malgré les critiques, l'on est toujours l'un des plus généreux et plus forts donateurs.

On n'a pas insisté la première année d'application de la Lolf mais les années ont passé, d'où cet amendement qui vise non à annuler mais à sortir des crédits de la mission « Aide publique au développement » où ils n'ont rien à faire, et qui laisse le soin au Gouvernement de les reprendre par amendement dans les bonnes missions ; la commission s'est bien gardé de dire où.

Au titre de l'aide au développement, nous trouvons en effet 15 millions pour l'enfermement du réacteur de Tchernobyl...

M. Robert del Picchia.  - C'est important !

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - ...14 millions pour réduire à néant le combustible de cette centrale et 3,5 millions pour aller dans la mer de Barents récupérer des sous-marins nucléaires russes pourris.

Pourquoi est-ce là ? Je n'ai jamais obtenu d'explications mais j'ai fini par comprendre : le ministère des finances considère que la Berd est le monopole de la maison. C'est le confort des bureaux, il ne faut rien leur enlever, même si c'est stupide. Nous ne sommes pas là pour le confort de la direction du Trésor ! Va-t-elle s'occuper de briques, de crayons Bic, de moutarde de Dijon, de chipolatas, de chapeaux pour la Sainte-Catherine ou de sapins de Noël ? (Sourires) On enlève donc tout ce qui ne relève pas de la mission -le Conseil constitutionnel finira d'ailleurs par s'y intéresser. On ne demande pas de renoncer à des engagements internationaux mais de les placer au bon endroit.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Très bien !

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État.  - J'ai été étonnée que vous n'ayez pas cité les produits auvergnats. (Sourires)

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - J'y ai pensé.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État.  - La situation peut paraître bizarre mais il se trouve que les crédits pour l'Ukraine font, dans le cadre de l'OCDE, partie de la stratégie de développement de l'Ukraine : elle est éligible à l'APD et les dépenses de démantèlement des centrales font partie du mandat des organisations internationales.

Je le reconnais, la Russie n'est pas éligible.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - On peut la mettre si ça arrange les bureaux.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État.  - Il n'y en a plus que pour un an et les crédits sont gérés par la Berd : pourquoi se compliquer la vie ? Au-delà du confort des chefs de bureau...

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Je les connais bien et je les aime beaucoup.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État.  - Moi aussi ! La possibilité de jouer sur des effets de trésorerie n'est pas forcément idiote. Cela peut paraître bizarre pour l'Ukraine mais nous sommes d'équerre et il n'y en a plus que pour un an pour que le problème de la Russie soit réglé. Un retrait de l'amendement éviterait de donner un mauvais signe sur la sûreté nucléaire.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - L'amendement que vient de défendre M. Charasse ne remet pas en cause les crédits et leur affectation. Nous estimons qu'ils sont plutôt mal placés par rapport à la loi organique mais celle-ci ne donne pas au Parlement la possibilité de transférer les crédits d'une mission à l'autre : nous sommes contraints de rester à l'intérieur des missions. Si le Sénat acceptait de suivre la commission, le Gouvernement pourrait prendre un engagement. Il y aura sans doute une seconde délibération. Le Gouvernement pourrait utiliser les crédits ainsi libérés pour les affecter, par exemple, à l'écologie et au développement durable. Le Gouvernement pourrait imaginer ce transfert ; la commission des finances appuierait alors...

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - ...très favorablement...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - ...cette initiative. Le deuxième amendement que présentera M. Charasse procède de la même philosophie.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État.  - Je veux renforcer ce qu'a dit Mme Idrac. La partie la plus importante des crédits est éligible à l'aide publique au développement et l'on nous demande en permanence de rassembler les crédits à l'APD, si possible dans la mission APD. Ne vient-on pas de dire qu'elle ne comptabilise que trois milliards sur huit, soit le tiers de notre aide publique au développement ? Le problème de la Russie sera réglé l'an prochain.

Le danger collatéral de cet amendement, c'est que des crédits éligibles à l'aide publique au développement seraient comptabilisés ailleurs et que la dispersion serait encore plus grande. On pourrait en discuter au fond mais, pour le moment, c'est de l'APD. Sur la Russie, M. Charasse a raison mais il ne reste plus qu'un an.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Cela fait plusieurs années, depuis la Lolf précisément, que la commission des finances appelle l'attention sur ce genre d'anomalies. Par cet amendement -et je parle sous le contrôle de son président-, elle a voulu dire : « Ça suffit ! ». Pour une partie des crédits, il n'y en a plus que pour un an -mais je ne le savais pas en déposant l'amendement. Pour l'autre partie, c'est de l'APD, mais dans d'autres missions. Monsieur le ministre, votre ministère doit se mettre d'accord avec les autres pour que tout tombe dans l'APD et soit sous le pilotage des affaires étrangères qui dépendent du Président de la République, du Premier ministre, du Quai d'Orsay et de personne d'autre ! Les autres ministères font du travail à façon, cela leur plait mais rien n'est pire pour un État que d'être divisé entre plusieurs acteurs et que les interlocuteurs étrangers ne sachent plus à qui ils ont affaire. Tout cela devrait donc être regroupé au sein d'une seule mission sans aller se balader dans un ministère du ravitaillement ou un ministère des sports. Avec l'accord du président Arthuis, je veux bien, pour cette année, renoncer à cet amendement puisqu'un des programmes n'a plus qu'un an à vivre mais, pour le reste, il nous faut un reclassement général l'an prochain. Si nous l'obtenons, nous aurons joué notre rôle de gardiens de la loi organique. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°II-4 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-5, présenté par M. Charasse au nom de la commission des finances.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

25 000 000

Solidarité à l'égard des pays en développement Dont titre 2

25 000 000

Développement solidaire et migrations

TOTAL

25 000 000

25 000 000

SOLDE

0

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Cet amendement opère un transfert à l'intérieur d'une mission. Pour des raisons qui m'ont toujours échappé, les crédits du fonds français pour l'environnement mondial (FFEM) sont gérés dans le programme 110, par Bercy -qui, c'est bien connu, sait tout faire-, alors qu'il s'agit d'actions qui ressemblent fort à celles du programme 209. Pour cette raison, ces crédits sont difficiles à mettre en oeuvre et ils font souvent doublon avec ceux du fonds pour l'environnement mondial (FEM). J'ai donc proposé à la commission des finances, qui l'a accepté, que les crédits du fonds français soient rattachés au programme 209 qui coordonnera mieux ses actions ; il s'agit de seulement 25 millions...

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État.  - Mon avis est défavorable, et non par corporatisme, croyez-le bien. Le FFEM a été mis en oeuvre collectivement avec le Quai d'Orsay, l'Agence française de développement et des entreprises françaises spécialisées, par exemple, dans l'eau ou l'électrification. Il fonctionne très bien, il a un réel rôle de catalyseur et nous veillons à ce qu'il ne fasse pas doublon avec le fonds mondial.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga.  - Je soutiens l'amendement car les affaires étrangères, avec leur nouvelle direction générale de la mondialisation, sont mieux à même de gérer ces crédits.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Compte tenu des enjeux diplomatiques bilatéraux qui s'attachent au FFEM, la gestion de ce fonds paraît relever davantage des missions du ministère chargé des affaires étrangères que de celles du ministère chargé de l'économie.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État.  - Je vais faire une proposition, valable aussi pour l'amendement suivant. A la faveur du retrait de ces amendements, nous pourrions nous engager à procéder rapidement, entre la commission des finances et nos ministères, à un toilettage sur ces différents points et cela, d'une manière plus posée et plus globale. Pouvez-vous nous faire ce crédit ? Car finalement, d'une année sur l'autre, nous tenons compte de vos réclamations et arrivons ainsi progressivement à une meilleure conformité avec la Lolf. Vos propositions sont tout à fait opportunes. Le rapporteur spécial nous les égrène petit à petit chaque année pour ne pas nous effrayer mais il est vrai qu'il reste sept à huit points à discuter et à toiletter avec les deux commissions.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Le souci de la commission des finances, c'est que notre politique étrangère soit cohérente. Notre identité nationale c'est aussi cela, c'est aussi l'unité des autorités et de la politique françaises. Et si nous transigions autour de 10 millions, pour amorcer la pompe dès cette année ?

M. le président.  - La séance est-elle le lieu idéal pour ce marchandage ?

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - Ce n'est pas un marchandage !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances  - Cette rectification serait déjà un jalon par lequel le Sénat marquerait sa détermination. L'APD se monte à 4 milliards, alors que d'autres missions y contribuent à hauteur de 2 milliards ! Nous sommes d'accord avec votre proposition d'y travailler globalement ensemble mais, en attendant, la commission maintient son amendement en le rectifiant.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État.  - En accord avec Mme Idrac, je m'en remets à la sagesse du Sénat.

L'amendement n°II-5 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-92 rectifié, présenté par M. Cambon au nom de la commission des affaires étrangères.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

1 500 000

1 500 000

Solidarité à l'égard des pays en développementDont Titre 2

1 500 000

1 500 000

Développement solidaire et migrations

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

0

0

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis.  - Cet amendement a été adopté à l'unanimité par la commission des affaires étrangères. Il tend à rétablir la contribution de la France au fonds central d'intervention d'urgence de l'ONU, le « Cerf ». Celui-ci, dirigé par le secrétaire général adjoint de l'ONU, finance des opérations de secours en cas de catastrophes naturelles ou d'urgences humanitaires. Avant d'interrompre son versement en 2009, la France était, avec 1,5 million d'euros, le 17e contributeur, loin derrière le Royaume-Uni qui verse 80 millions de dollars par an. En tant que membre permanent du conseil de sécurité et promoteur du droit humanitaire, notre pays se doit de participer au financement du Cerf : ses actions minimisent les pertes en vies humaines lors de crises.

Le secrétaire général de l'ONU lui-même, devant une délégation conduite par M. de Rohan, a déploré que la France ait interrompu ses versements, déjà infimes dans le total des contributions. La commission comprend que le Gouvernement cherche à réduire les dépenses et à rationaliser ses contributions aux fonds d'intervention multilatérale, mais M. Chirac avait aussi annoncé un doublement des contributions, or celles-ci sont en chute drastique. Nous avons conscience des contraintes budgétaires mais estimons que le choix opéré au détriment du Cerf n'est pas bienvenu.

L'adoption de notre amendement serait un signe positif, à quelques jours de la rencontre entre le secrétaire général de l'ONU et notre ministre des affaires étrangères. Ils s'entretiendront du devenir de la CSI. Les règles budgétaires nous font obligation de prélever le montant correspondant sur un autre programme, donc le 110, et plus précisément sur le fonds pour l'environnement mondial, seul poste qui puisse supporter une ponction de 1,5 million d'euros. Bien sûr, le symbole n'est pas excellent non plus, à la veille du sommet de Copenhague. Nous souhaiterions plutôt que le Gouvernement procède par redéploiements au sein du programme 209, mais il est seul habilité à le faire. La commission unanime m'a donné mandat pour obtenir une réponse claire sur la contribution au fonds en 2010.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial.  - La commission des finances n'ayant pas été saisie, nous nous en remettons, comme il est d'usage, à l'avis du Gouvernement.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État.  - J'ai compris l'importance que votre commission des affaires étrangères attache au règlement de cette affaire. Le président M. de Rohan a récemment attiré mon attention sur la nécessité de continuer à abonder de fonds. Mais ôter des crédits à un fonds en faveur de l'environnement ne me paraît pas de bonne méthode.

Je m'engage à rétablir les crédits par redéploiement au sein des crédits multilatéraux, mais ne retirons pas des crédits à un fonds pour l'environnement dirigé, qui plus est, par une Française ! (Sourires) Retrait ou rejet.

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis.  - Si l'engagement est solennellement pris devant la Haute assemblée de réabonder le Cerf dés 2010 (M. le ministre fait signe que oui) et si M. de Rohan peut écrire en ce sens à M. Ban Ki-moon, qui lui a demandé de le tenir informé de l'affaire, je retire mon amendement. Nous serons très attentifs à la suite !

L'amendement n°II-92 rectifié est retiré.

Les crédits de la mission sont adoptés.

La séance est suspendue à 13 h 10.

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

La séance reprend à 15 h 15.

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Plan de relance de l'économie ».