Débat sur les infrastructures de transport

M. le président.  - L'ordre du jour appelle un débat sur le schéma national des infrastructures de transport (Snit).

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.  - Le projet de schéma national des infrastructures de transport (Snit) est directement issu du Grenelle de l'environnement. Le Snit sera aussi la feuille de route de l'État, au-delà de 2011, en matière d'infrastructures.

Le schéma concerne la modernisation et l'entretien des infrastructures, l'inscription dans l'environnement. Une première version a été présentée par M. Borloo et soumise à consultation. L'Autorité de l'environnement a rendu son avis et votre commission de l'économie m'a auditionnée à ce sujet.

Nous proposons aujourd'hui à la concertation un document consolidé qui comporte 60 mesures, dont notamment 28 projets de développement ferroviaire et dix projets portuaires incluant un report intermodal vers les voies fluviales.

Le schéma réaffirme la priorité donnée aux modes de transport alternatifs à la route. Bien sûr, la situation n'est pas identique partout...

L'optimisation des infrastructures existantes -le quotidien des Français- améliorera aussi la performance du système.

Le document reprend la stratégie de la version initiale : optimisation de l'existant, amélioration du bilan énergétique, réduction de l'empreinte environnementale.

Les principaux projets de développement contribuent aussi à répondre aux besoins de déplacement de nos voisins en Europe.

Des inflexions ont été introduites, de nouveaux projets aussi -Paris-Brest, Paris-Quimper, Lorraine-région du Nord, par exemple. À l'inverse, le contournement autoroutier de Tours a été retiré car l'inscription dans l'espace est délicate.

La nouvelle version est plus précise énumérant tous les projets de développement retenus.

Quant au financement, des choix devront être faits ; ce schéma nous y aidera, faisant prévaloir une mobilité plus collective, moins énergivore, moins consommatrice d'espace, préservant les emplois.

Le document est en ligne, la consultation publique engagée. Son aspect technique est parfois rebutant, mais souhaitons que les citoyens s'y intéressent, avant la saisine du Cese.

Ce projet équilibré va dans la bonne direction, celle du développement durable. (Applaudissements à droite)

M. Raymond Vall, pour le groupe RDSE, auteur de la demande.  - Je remercie M. Emorine d'avoir accepté notre demande de création d'un groupe de suivi sur le Snit. M. Nègre, le rapporteur, a beaucoup travaillé. Ce débat s'imposait. La première version du document a suscité mon émotion : caricature de l'esprit du Grenelle, diabolisation de la route et de la mobilité ! La nouvelle version, découverte en janvier 2011, a intégré le renforcement de l'accessibilité des territoires fragiles.

Le document privilégie les transports non routiers ni aériens et le multimodal. Les projets représentent 166 milliards d'euros d'investissements, dont 80 % dans les modes alternatifs à la route.

Je ne m'en suis pas caché : nous ne pouvons accepter en l'état le Snit. J'ai souligné, comme d'autres membres du groupe de suivi, que beaucoup est à préciser et réviser. M. Nègre a fidèlement, bien que pudiquement, (sourires) rapporté notre inquiétude.

Contribuer à la réduction des émissions de gaz à effets de serre, au maintien de la biodiversité, à la performance énergétique : tels sont les objectifs poursuivis. Mais le projet de Snit est encore loin de satisfaire ces exigences.

Nos réserves sont multiples et la dernière version est encore inacceptable. Les projets existants relèvent de la modernisation et d'une enveloppe extérieure. Mais comment des projets non inclus dans le Snit pourront-ils être financés ?

Pour le désenclavement par des axes dits nationaux, adressez-vous aux collectivités locales, nous dit-on en substance, si ces axes ne sont pas inscrits dans le Snit. L'affaire de l'éco-redevance pose aussi problème. Tous les types de projets d'aménagement ne sont pas compris dans le Snit, seulement les projets innovants, induisant de nouveaux comportements et de vaste ampleur. La Dordogne compte de nombreuses routes laissées à l'abandon. Quelle cohérence avec le diagnostic établi par la Datar en 2003 ? Quid des engagements du comité interministériel de 2010 ? Le président de la République affirme pourtant qu'il refuse d'abandonner certains territoires en renonçant à tout projet autoroutier ! Sur les 260 milliards d'euros, les collectivités territoriales paieront plus que l'État ! La bataille du désenclavement est oubliée...

Entre Bordeaux et Toulouse, Pau et Narbonne, que de zones sans grand axe routier ! Sur la route que d'Artagnan emprunta pour rallier Paris, impossible de doubler pendant des dizaines de kilomètres ! Où sont les budgets d'étude ?

Ce document est d'une subtilité inquiétante : voyez la page 118 ! Si les études ne figurent pas dans la loi de finances pour 2011, la ruralité apparaîtra condamnée, et nous aurons raté le rendez-vous.

Le nouveau document a au moins le mérite de nous mobiliser pour faire remonter à Mme le ministre des messages de désespoir. Encore 30 ans pour espérer pouvoir survivre ? Je vous en conjure, entendez notre appel ! Songez à ces territoires qui ont le droit d'exister ! (Applaudissements à droite, au centre et sur plusieurs bancs socialistes)