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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Fin d'une mission temporaire

Organisme extraparlementaire (Candidature)

Proposition de résolution

Modification à l'ordre du jour

Questions orales

Carte scolaire dans le Limousin

Maison du droit et de la justice à Château-Chinon

Ammoniac Agricole

Distribution de carburants

Gaz de schiste

Relations ferroviaires avec l'Italie

Nuisances sonores dues à l'aéroport de Roissy

Mesures agro-environnementales territorialisées (MAE-T)

Épandage des engrais

Délinquance dans l'Aude

Code de la route

Rédacteurs territoriaux

Informaticiens hospitaliers

Bases locatives

France Bleu Maine

Présence postale dans les Côtes d'Armor

Classement des meublés de tourisme

Mandat des présidents d'université

Maison du droit et de la justice à Toulouse

Organisme extraparlementaire (Nomination)

Élection à la présidence d'un groupe

Garde à vue (Suite)

Discussion des articles (suite)

Article 7 (Suite)

Article 7 bis

Article 8

Article additionnel

Article 9

Article 10

Article 11

Article additionnel

Article 11 bis

Article 12

Article 14 bis

Irrecevabilité d'une proposition de résolution

CMP (Nominations)

Garde à vue (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 15

Article 15 bis

Article additionnel

Article 16

Articles additionnels

Article 18

Seconde délibération

Vote sur l'ensemble

Question prioritaire de constitutionnalité




SÉANCE

du mardi 8 mars 2011

80e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Roger Romani,vice-président

Secrétaires : M. Bernard Saugey, M. Jean-Paul Virapoullé.

La séance est ouverte à 9 heures 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Fin d'une mission temporaire

M. le président.  - Par lettre en date du 3 mars 2011, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter du 8 mars 2011, de la mission temporaire sur le développement des véhicules décarbonnés confiée à M. Louis Nègre, sénateur des Alpes-Maritimes, auprès du ministre d'État, ministre de l'écologie, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 297 du code électoral.

Organisme extraparlementaire (Candidature)

M. le président.  - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir désigner le sénateur appelé à siéger au sein du conseil d'administration de l'Établissement public de financement et de restructuration, en remplacement de M. Roland du Luart. La commission des finances propose la candidature de M. Albéric de Montgolfier pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

Proposition de résolution

M. le président.  - En application de l'article 50 ter de notre Règlement, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, présidente du groupe CRC-SPG, a demandé, le 4 mars 2011, l'inscription à l'ordre du jour de la proposition de résolution, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution, relative à la mise en conformité du droit français concernant le régime des astreintes et le système de forfaits en jours sur l'année considérés par le Comité européen des droits sociaux comme violant différentes dispositions de la Charte sociale européenne révisée.

Cette demande a été communiquée au Gouvernement dans la perspective de la prochaine réunion de notre conférence des présidents qui se tiendra le 9 mars 2011.

Modification à l'ordre du jour

M. le président.  - Par lettre en date du 7 mars 2011, M. le ministre chargé des relations avec le Parlement a demandé d'avancer la suite de la discussion de la proposition de loi modifiant la loi portant réforme de l'hôpital du jeudi 10 mars au mercredi 9 mars 2011.

Il a également demandé d'inscrire à l'ordre du jour du matin de la séance du jeudi 10 mars 2011 cinq conventions internationales, dont la commission des affaires étrangères propose qu'elles soient examinées selon la procédure simplifiée. Le délai pour revenir le cas échéant à la procédure habituelle pourrait être fixé au mercredi 9 mars à 17 heures.

Il n'y a pas d'opposition ? Il en est ainsi décidé.

En conséquence, l'ordre du jour des séances des mercredi 9 et jeudi 10 mars 2011 s'établit comme suit :

Mercredi 9 mars 2011

À 14 heures 30 et le soir :

- Suite éventuelle du projet de loi relatif à la garde à vue ;

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications ;

- Suite de la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital.

Jeudi 10 mars 2011

À 9 heures 30 :

- Cinq conventions internationales en forme simplifiée ;

- Sous réserve de leur dépôt, conclusions des commissions mixtes paritaires sur les projets de loi organique et ordinaire relatifs au Défenseur des droits ;

À 15 heures :

- Questions d'actualité au Gouvernement.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle dix-neuf questions orales.

Carte scolaire dans le Limousin

Mme Renée Nicoux.  - La présentation de la carte scolaire 2011-2012 dans le Limousin, qui s'accompagne de la suppression de nombreuses classes, suscite de vives inquiétudes. On va vers un désert scolaire ! Dans la Creuse, une première littéraire est supprimée à La Souterraine, une option de BTS à Aubusson, un bac pro à Felletin dont je suis maire ; un BTS domotique à Guéret voit ses horaires réduits... Les départements sont tous affectés. S'y ajoute la suppression de 95 postes d'enseignants du second degré et de 13 postes de professeurs des écoles, sur la base de critères purement budgétaires, rendant les effectifs pléthoriques. Avec cette politique de désertification éducative, comment offrir des perspectives aux élèves des zones rurales ?

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.  - On ne peut balayer d'un revers de main la donne budgétaire dans un pays aussi endetté que le nôtre... L'Éducation nationale participe à cet effort : la moitié des économies découlant du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux servent à mieux rémunérer les enseignants ; nous modernisons l'Éducation nationale, en dialoguant avec les académies.

Dans le Limousin, le nombre d'écoliers devrait se stabiliser ; le nombre de collégiens augmente, mais celui des lycéens baisse.

L'académie reste une des mieux dotées, précisément pour prendre en compte la ruralité.

Quatorze enseignements d'exploration en seconde pour la voie professionnelle : ce n'est pas la désertification. Il va y avoir un nouveau bac pro à Bourganeuf, une nouvelle section Services à la personne, des filières STI adaptées aux besoins des entreprises locales. Nous réfléchissons à une relance des métiers d'art à Aubusson et à un internat d'excellence à La Souterraine...

Dans le premier degré, le tissu scolaire sera préservé, avec un projet d'accueil des élèves malentendants à Tulle.

La rentrée 2011 s'inscrira dans un processus de modernisation, vital pour la région Limousin.

Mme Renée Nicoux.  - Cela n'est pas perçu par les enseignants ou les parents, vu les manifestations actuelles. La réforme du bac STI et du bac pro entraîne la suppression de filières et la baisse des effectifs dans les établissements qui ne proposent plus certaines formations. Toujours pas de réponse sur la première littéraire de La Souterraine, rien pour répondre aux besoins des professionnels du bâtiment alors que le lycée de Felletin est un établissement au recrutement national retenu comme établissement référent pour la création des lycées des métiers.

La ruralité est prise en compte ? Vous ne dites rien des transports, ni de leur coût.

Maison du droit et de la justice à Château-Chinon

M. René-Pierre Signé.  - La suppression des tribunaux d'instance en zone rurale entraîne des difficultés pour les usagers : c'est une véritable expédition pour eux et ils renoncent à porter plainte. L'absence du juge se fait ressentir en matière de tutelles, de saisies sur rémunération, de surendettement. Le monde rural n'est pas épargné par la délinquance, sans parler des conflits de voisinage. L'existence d'une maison du droit et de la justice à Château-Chinon aiderait à résoudre les litiges et à faire valoir les droits de chacun.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.  - Veuillez excuser M. Mercier. Les maisons du droit et de la justice sont une réponse à la réforme de la carte judiciaire.

Cinq ouvriront leurs portes dans les zones touchées, ce qui portera leur nombre à seize.

Château-Chinon a vu son tribunal supprimé, compte tenu de sa faible activité. Avant d'y créer une maison du droit et de la justice, il faut être sûr que l'activité sera suffisante. Le point d'accès au droit existant n'a accueilli que trente six personnes l'an dernier. Si nécessaire, il pourrait toutefois voir ses moyens renforcés.

M. René-Pierre Signé.  - Votre réponse m'afflige. Vous ne vous basez que sur des chiffres, sans prendre en compte la logique du développement rural. C'est une méthode... Vous l'assumez. Mais elle a un prix : en éloignant la justice du justiciable, tout le monde y perd. Les audiences foraines ne coûtent pas très cher : il faut déplacer un juge et deux secrétaires ! Mais vous préférez faire se déplacer des personnes âgées, impécunieuses... Votre méthode ne tient pas compte des conséquences sur le monde rural.

Vive le bouclier rural, qui pourrait nous protéger !

Ammoniac Agricole

Mme Virginie Klès.  - La société Ammoniac Agricole, filière de la multinationale Yara, qui exerce un monopole en France, a cessé ses activités fin 2010. Les acteurs de la filière entendent donc nouer un partenariat avec une entreprise nationale d'envergure spécialiste de l'ammoniac industriel mais Yara semble s'y opposer par crainte de la concurrence. L'ammoniac a pourtant de nombreux mérites en agriculture, notamment sur le plan environnemental : son injection dans le sol à l'état gazeux, en quantité limitée, évite le lessivage. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour libérer ce marché du monopole qui l'emprisonne ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser Mme Kosciusko-Morizet. L'ammoniac est un gaz toxique, qui peut être mortel. La sécurité du transport et du stockage est donc strictement encadrée. C'est à ce titre uniquement que le ministère de l'écologie intervient.

La société Ammoniac Agricole avait obtenu tous les agréments nécessaires. Le monopole dont elle dispose n'est pas dû à la volonté des pouvoirs publics ! Le Gouvernement a pris acte de sa cessation d'activité et rappelé qu'un éventuel repreneur devrait répondre aux mêmes exigences de sécurité.

Cette technique semble avoir été abandonnée dans de nombreux pays d'Europe. Faute de repreneur, les agriculteurs sont invités à se rapprocher des chambres d'agriculture pour trouver d'autres techniques de fertilisation des sols.

Mme Virginie Klès.  - Le problème est certes complexe. Mais des applicateurs offrent d'ores et déjà toutes garanties de fiabilité et pourraient recevoir l'agrément pour 2011.

Je suis à votre disposition pour en reparler.

Distribution de carburants

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Encore un sujet qui concerne la ruralité ! Les artisans de l'automobile se félicitent de la prorogation de l'échéance de mise en service des stations-service mais s'inquiètent du budget du Comité professionnel, qui est en baisse.

Ses missions sont pourtant essentielles. L'Aveyron est un département très rural : sans mise aux normes environnementales, c'est la mort des stations-service !

Quelles mesures pour maintenir le budget du Comité professionnel ? Pourra-t-on proroger le délai au-delà de 2013 ? J'attire votre attention sur la raréfaction des stations-service, qui constituent des points de vie en milieu rural.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Le Comité professionnel des distributeurs de carburants, créé en 1991, soutient les petits détaillants. Un arrêté du 22 juin 1998 fixait au 31 décembre 2010 la mise en conformité des stations services, par enterrement des réservoirs. Aujourd'hui, la grande majorité des stations-service ont réalisé les travaux nécessaires. Le Gouvernement est attentif à la situation financière des petites stations ; 1 000 n'ont pas encore effectué cette mise en conformité. Le délai a donc été prorogé.

Il est impératif de réduire la dépense publique : le CPDC ne peut échapper à cet effort. La mise aux normes est toutefois une priorité pour le CPDC.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Nos petites stations-service n'ont pu effectuer les travaux nécessaires. Ce sont, je le répète, des points de vie dans la ruralité : il faut les soutenir.

Gaz de schiste

M. Michel Teston.  - Les permis de Montélimar, de Nant et de Villeneuve de Berg vont permettre à Total et GDF-Suez d'effectuer des recherches en vue d'exploiter le gaz de schiste par fracturation hydraulique.

Les risques environnementaux et en matière de santé publique suscitent l'inquiétude : il y a eu au moins 15 000 manifestants dans l'Ardèche ! La ministre souligne qu'il ne s'agit que d'exploration, non d'exploitation. Mais pour réaliser un test de production, il faut une fracturation hydraulique ! Je demande donc l'application du principe de précaution : il ne suffit pas de reporter le processus. Il faut l'interrompre totalement ! La saisine de la commission nationale du débat public s'impose.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Trois permis de recherche de gaz de schiste ont été arrêtés : ils ont pour seul objectif d'évaluer l'existence ou non d'un gisement. Ils ont fait l'objet d'une information publique, par publication au Journal officiel de la République française et de l'Union européenne. L'évaluation de ce type de ressource n'en est qu'à ses débuts. Compte tenu des préoccupations environnementales, une mission a été confiée au conseil général de l'industrie et au conseil général de l'environnement pour en apprécier les conséquences économiques, sociales et environnementales pour les départements concernés, auxquels ont été ajoutés l'Aisne, la Marne et la Seine-et-Marne. Le rapport final, qui sera rendu en mai 2011, sera bien entendu public. Il n'y aura aucun forage avant la remise du rapport final.

Le principe de précaution repose sur la connaissance du risque -qui suppose sa recherche !

M. Michel Teston.  - Les permis de recherche ont été accordés au printemps 2010 dans le plus grand secret. À l'occasion d'une ordonnance du 20 janvier 2011, le Gouvernement a modifié le code minier : plus besoin d'enquête publique préalable !

Les risques environnementaux et pour la santé que fait courir la technique de fracturation hydraulique demeurent. Il est indispensable de tout arrêter.

Le ministre n'a pas répondu sur la saisine de la commission nationale du débat public, qui s'impose en l'occurrence. Elle doit être saisie par le Gouvernement.

Relations ferroviaires avec l'Italie

M. Thierry Repentin.  - Depuis l'été 2010, les passagers empruntant le TGV doivent descendre du train à Modane ou à Chambéry et poursuivre leur trajet jusqu'à Milan en autobus. C'est ubuesque ! Le problème viendrait de l'homologation retardée des rames françaises par RFI, l'équivalent italien de RFF. La SNCF ferait les frais d'une ouverture à la concurrence tendue. Reste que les usagers en pâtissent : de telles conditions de voyage risquent de détourner les usagers des transports collectifs. Ce problème n'a que trop duré, alors que l'ouverture de la LGV Lyon-Turin est prévue pour 2023.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Veuillez excuser M. Mariani. La procédure d'homologation des rames françaises a pris du retard, obligeant les passagers à prendre le bus... Le problème est purement technique et n'a rien à voir avec la concurrence. La SNCF s'emploie à rétablir les trois trains quotidiens d'ici l'été.

La coopération des opérateurs nationaux est nécessaire pour rétablir un service de qualité. L'alliance Artesia prendra fin en décembre prochain et les deux entreprises -SNCF et Trenitalia- seront désormais en concurrence.

Le Gouvernement est attaché au rétablissement rapide de l'ensemble des circulations transalpines. Les usagers n'ont à pas à faire les frais de difficultés techniques.

M. Thierry Repentin.  - Ce dysfonctionnement n'est donc pas lié à la nouvelle concurrence entre opérateurs : je le ferai savoir aux agents de la SNCF qui en étaient convaincus... Pourquoi ne pas avoir prévu une « sortie en sifflet » avec les rames anciennes, qui étaient homologuées, hier ?

Il n'est pas facile de transborder les usagers, notamment handicapés.

Nuisances sonores dues à l'aéroport de Roissy

Mme Nicole Bricq.  - La ministre de l'écologie présente la configuration préférentielle face à l'ouest par vent arrière comme un bon moyen de réduire les nuisances sonores. En fait, c'est transférer les nuisances : ce n'est pas acceptable, d'autant que d'autres orientations ont été acceptées à l'unanimité par les élus locaux. Lors du dernier groupe de travail sur les nuisances sonores, l'opposition des élus seine-et-marnais a été réaffirmée. Le dernier comité de pilotage prévu a été annulé, à l'initiative de l'État, empêchant la finalisation de la concertation.

Avec les autres parlementaires de la Seine-et-Marne, dont Jean-François Copé, j'ai cosigné une lettre demandant au Gouvernement de surseoir à cette mesure.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Les nuisances sonores sont une préoccupation de Mme Kosciusko-Morizet, élue de l'Essonne. Cette mesure, objet d'une large concertation, s'inscrit dans un processus global. Le résultat est favorable à tous les riverains de Roissy. Toutes les mesures n'ont pas fait l'unanimité mais il faut trancher : la ministre veut aller de l'avant, dans l'intérêt général. Il ne faut pas détricoter l'ensemble des mesures.

La configuration préférentielle sera peu utilisée, puisque uniquement par vent modéré : les nuisances pour les riverains seront limitées.

Mme Nicole Bricq.  - De fait, Mme Kosciusko-Morizet a un ministère très important. Le 25 janvier, elle ne s'est pas préoccupée de l'aménagement du territoire et des transports défaillants dans le nord de la Seine-et-Marne, liés à l'importance du trafic aéroportuaire. On a décidé d'appliquer le rapport Dermagne, qui n'était censé être qu'un rapport, en réduisant la concertation à un faux semblant.

Les riverains demandent une plus grande amplitude de la fermeture nocturne, à Roissy autant qu'à Orly.

Le 21 janvier, le président de la région Ile-de-France et les présidents des trois départements concernés ont déclaré refuser la mise en concurrence des territoires concernés par Roissy, par le déplacement des nuisances de l'un dans l'autre.

Mesures agro-environnementales territorialisées (MAE-T)

M. Michel Doublet.  - Ayons une pensée pour les victimes de Xynthia, il y a un an...

Je m'inquiète du retard de l'instruction et du paiement des MAE-T pour l'année 2010.

Aucun dossier déposé avant le 17 mai n'a pu faire l'objet d'un paiement. C'est incompréhensible et inadmissible. Qu'on ne me parle pas, comme l'an passé, des problèmes rencontrés avec le logiciel Osiris. Il y aurait 800 dossiers en attente dans mon département.

Les MAE-T sont un outil privilégié pour la politique de soutien des prairies humides.

Ne dirigeons pas tous les crédits vers le parc régional de Brouage ! Nos agriculteurs ont besoin de visibilité à long terme.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Les aides relevant de la PAC -plus de 11 milliards- représentent une part prépondérante du revenu des exploitants. Vu la crise de l'an dernier, M. Le Maire a obtenu un paiement anticipé de certaines aides : indemnité compensatrice de handicap, prime à l'herbage agro-environnementale, aides du premier pilier. Dès le 16 octobre, 3 milliards ont été versés à 410 000 exploitants, six semaines avant la date habituelle.

Il est vrai que le calendrier des paiements des MAE a été décalé. Les problèmes à l'origine du retard sont réglés et les paiements seront effectués avant la fin du mois.

M. Michel Doublet.  - Si ce n'était pas le cas, je reviendrai à la charge.

Épandage des engrais

M. Aymeri de Montesquiou.  - Comment la Commission européenne peut-elle pousser l'absurdité jusqu'à réglementer les dates d'épandage des engrais en toute ignorance des réalités de l'agriculture ? Cette lourde bureaucratie digne de Courteline peut avoir des effets pervers même du point de vue écologique.

N'allons pas infliger à des agriculteurs qui connaissent la réalité un carcan administratif dénué de sens. Faites confiance aux agriculteurs ! Traitez-les en entrepreneurs responsables !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement.  - Les États membres se sont engagés, avec la directive Nitrates, à réduire la pollution due aux engrais. Ce n'est pas la commission de Bruxelles qui fixe les dates mais chaque État, au niveau préfectoral pour la France, selon des critères différents en fonction des engrais utilisés.

La date du 15 janvier -liée au sommeil hivernal de la terre- peut être rétablie par le préfet en fonction des conditions climatiques locales. En la matière, la subsidiarité fonctionne.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Chaque culture, chaque parcelle a sa spécificité. Laissons les agriculteurs décider de la bonne date pour épandre leurs intrants.

Délinquance dans l'Aude

M. Marcel Rainaud.  - Les chiffres officiels de la délinquance ont cessé d'être crédibles. Ils ne parviennent pas à masquer la réalité.

Situé entre trois départements plus peuplés, le département de l'Aude connaît un taux de criminalité supérieur à la moyenne de sa strate démographique. Or le commandement de gendarmerie de Castelnaudary a été transféré à Carcassonne, la gendarmerie mobile de Narbonne a été supprimée, de même que le tribunal de Castelnaudary. En outre, la médecine légale est désormais concentrée à Montpellier, où s'effectueront les autopsies réalisées dans huit départements -ce qui engendre surcoûts et pertes de temps pour les enquêteurs.

Va-t-on enfin engager une concertation sur la problématique de la délinquance et de la justice ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - La délinquance a baissé depuis 2002, dans l'Aude comme ailleurs. L'adaptation des moyens dans l'Aude s'est faite après concertation avec les élus locaux. La réorganisation de la gendarmerie a pour but de mieux lutter contre la délinquance routière.

La réforme de la médecine légale crée des contraintes nouvelles pour la police et la gendarmerie mais des adaptations locales sont possibles. Le nombre de médecins légistes était trop faible dans l'Aude. Soyez assurés que la thanatologie reste assurée dans de bonnes conditions.

M. Marcel Rainaud.  - Votre réponse ne me rassure pas. Nous avons besoin de davantage de gendarmes, de policiers, de juges !

Code de la route

Mme Catherine Procaccia.  - Le décret du 12 novembre 2010, qui prétend favoriser la coexistence des différents usagers de la rue, va aggraver les choses en incitant les piétons à traverser les chaussées de façon irresponsable. Que veut dire « manifester l'intention de traverser » ? Par quels moyens la distance des 50 mètres sera-t-elle contrôlée ? Il faut lever toutes ces imprécisions. Que devient dans ces conditions la pédagogie de la prévention ?

Comment va-t-on matérialiser le « tourne-à-droite » des cyclistes aux feux tricolores ? Le coût de la nouvelle signalisation a-t-il été évalué ? Tous ces assouplissements paraissent peu raisonnables.

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Je veux vous rassurer. Non, les piétons ne pourront pas traverser n'importe où ! La règle des 50 mètres n'est pas nouvelle. La priorité donnée au piéton n'est pas absolue. La modification introduite par le décret n'est pas un assouplissement mais un durcissement imposé aux automobilistes, conformément au principe de prudence du plus fort au plus faible. C'est un progrès.

Le « tourne-à-droite » des cyclistes, expérimenté avec succès à Strasbourg et à Bordeaux, devra être autorisé par le maire et faire l'objet d'une signalisation spécifique.

La volonté de prévention du Gouvernement est intacte.

Mme Catherine Procaccia.  - Je suis rassurée sur le fond, mais la communication gouvernementale a tort d'insister sur de « nouveaux droits » des piétons. Tout cela relevait-il d'ailleurs du décret ? Cela me paraît plutôt de nature législative. Quant au « tourne-à-droite » des cyclistes, étendre une expérimentation qui n'a été menée que dans deux villes me semble un peu léger.

Rédacteurs territoriaux

M. Jean-Marc Todeschini.  - Afin de favoriser la promotion interne, le décret du 30 décembre 2004 a ouvert un examen professionnel, pour cinq ans à compter du 1er décembre 2006, aux adjoints administratifs justifiant d'au moins huit ans de services effectifs. Beaucoup d'agents qui envisageaient de se présenter au concours ont opté pour cet examen.

Celui-ci a rencontré un tel succès que nombre d'agents reçus n'ont pas été nommés ; et l'accès à la promotion interne par la voie de cet examen est limité au 1er décembre 2011.

Comment faire pour que la réussite à cet examen ne se réduise pas à un chiffon de papier ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Tous les fonctionnaires ayant satisfait aux épreuves de cet examen n'ont pu être inscrits sur les listes d'aptitude. Un groupe de travail constitué au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale a examiné ces questions ; il a acté la suppression de l'examen professionnel : à compter de 2012, la promotion interne des adjoints administratifs ne se fera que par la voie du choix. Si le groupe de travail a convenu que tous les lauréats n'avaient pas vocation à intégrer le cadre d'emplois de rédacteurs territoriaux, il a prévu qu'ils pourraient garder le bénéfice de l'examen professionnel sans limitation dans le temps et être ainsi recrutés à ce titre. Un assouplissement des quotas est recherché.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Donc la réussite à l'examen ne sera pas un chiffon de papier ? Très bien.

Informaticiens hospitaliers

M. Guy Fischer.  - à la suite de la loi du 2 février 2007, les emplois d'informaticiens hospitaliers ont été constitués en cadres d'extinction. Il était prévu que les 4 000 agents concernés bénéficieraient d'un détachement, de sorte que disparaîtraient les statuts locaux de la fonction publique hospitalière.

Aux Hospices civils de Lyon (HCL), n'ont cependant été admis en détachement que 26 salariés sur les 170 concernés ; 80 des « refusés » ont saisi le tribunal administratif.

Au fil du temps, les HCL ont modifié leur argumentation, opposant dans un premier temps comme motif de refus de détachement l'inadéquation de l'indice terminal du corps d'origine et du corps d'accueil, puis prétextant que les grades du statut local n'étaient pas de niveau comparable aux grades statutaires d'ingénieur hospitalier ou technicien des services hospitaliers.

Il résulte de tout cela des situations ubuesques et des injustices flagrantes, à Lyon comme dans d'autres établissements. Il est indispensable et urgent que l'administration applique l'esprit de la loi du 2 février 2007 ainsi que les textes facilitant le détachement dans les fonctions publiques. Une réunion s'est tenue sur cette question à la Direction des hôpitaux il y a quelques jours. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour remédier enfin à ces anomalies ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - La loi du 3 août 2009 a élargi les conditions de détachement en prévoyant deux conditions cumulatives. Elle permet le détachement des agents sous statut local auxquels vous faites allusion, mais certes pas à ceux qui ont été recrutés par contrat. Une prochaine circulaire rappellera le sens de cette loi.

M. Guy Fischer.  - L'avenir dira si les agents concernés bénéficieront vraiment de ce texte. Il est urgent aujourd'hui d'harmoniser les statuts.

Alors que le problème n'est pas réglé, certains établissements recrutent à nouveau des contractuels. Dans certains établissements, comme à Grenoble ou à Metz, la promotion dans le statut local est maintenue, ce que ne reconnaît pas la CNRACL ; à Lille, les personnels informatiques sont répartis en deux directions... Il est urgent de rétablir le principe d'égalité.

Bases locatives

M. Jean-Pierre Sueur.  - On ne m'a donné aucune réponse satisfaisante en novembre 2009 ; je reviens à la charge.

Les bases locatives des logements du quartier de La Source, à Orléans, sont évaluées par les services fiscaux en prenant pour références des logements d'autres quartiers, où les prix d'acquisition et de location sont supérieurs. Les contribuables concernés subissent une grave injustice. Un jugement du 30 décembre 2009 du tribunal administratif d'Orléans leur a donné raison, considérant que les requérants sont fondés « à relever le caractère exagéré du coefficient de situation générale » et qu'il « sera fait une juste appréciation des inconvénients ainsi relevés en fixant le coefficient de situation générale à - 0,10 ». Mais les services fiscaux refusent d'en tenir compte, au motif que « la réduction du coefficient n'entraîne pas de modification de la valeur locative de plus du dixième ». Cette interprétation est contraire aux considérants de la décision du tribunal. Le rapporteur public a par ailleurs noté que l'usure du temps n'était pas suffisamment prise en compte par l'administration...

Quand les services fiscaux tireront-ils enfin les conséquences de ce jugement ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - L'administration fiscale tient compte des coefficients mais seulement si la variation est supérieure à 10 %.

Le juge administratif s'est prononcé pour une modification limitée du coefficient de situation, mais a souligné que la variation étant inférieure à 10 %, il ne pouvait être fait droit aux prétentions des requérants. La variation des valeurs locatives est sous surveillance ; quand elle sera supérieure au dixième, les services de M. Baroin en tiendront compte.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cela fait des années que les habitants du quartier de La Source -que je connais bien puisque j'y habite- subissent cette injustice fiscale.

Le tribunal a bien dit qu'il fallait revoir le coefficient de situation et Bercy répond « Circulez, il n'y a rien à voir » ! Vous dites que M. Baroin surveille ; j'espère que nous en verrons rapidement les effets.

Les bases locatives datent de quarante ans, il faudra enfin les mettre à jour et sortir de l'injustice actuelle.

France Bleu Maine

M. Jean-Pierre Chauveau.  - Les Sarthois sont très satisfaits de la station France Bleu Maine qui émet depuis le 1er juin 2010. Ceux du moins qui peuvent la capter correctement, ce qui n'est pas le cas des 100 000 habitants du nord-est du département, dans les bassins de vie de Mamers et de la Ferté-Bernard.

Nous attendons une décision du CSA : soit l'attribution d'une nouvelle fréquence, soit l'augmentation de la puissance de l'émetteur du Mans.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer.  - Le Gouvernement est attaché à ce que chacun puisse accéder aux radios auxquelles le CSA a attribué une fréquence sur la bande FM.

Les radios privées relèvent de la procédure de l'appel d'offres, les radios publiques ayant une priorité d'accès à la ressource radioélectrique. Mais la fréquence FM est une denrée rare. Radio France a bénéficié de nouvelles ressources pour France Info, France Bleu, Le Mouv', FIP.

Le CSA n'a pu dégager que trois nouvelles fréquences dans la Sarthe, au Mans, à La Flèche et à Sablé.

Le Gouvernement a demandé au CSA de lui accorder prioritairement la ressource : Radio France a obtenu une couverture optimale. La rareté de la fréquence touche tout le monde !

M. Jean-Pierre Chauveau.  - J'espère que l'on trouvera une solution pour couvrir l'ensemble du département.

Présence postale dans les Côtes d'Armor

M. Ronan Kerdraon.  - La Poste, l'AMF et l'État viennent de signer un contrat pour 2011-2013 garantissant la présence postale -mais on annonce encore 50 000 suppressions d'emplois d'ici 2015. Les bureaux de poste sont remplacés par des relais-poste commerçants ou des agences postales communales, les uns comme les autres offrant des services limités ; avec les secondes, l'usager paye deux fois la prestation... Cela revient à transférer les charges du service postal sur les collectivités territoriales, déjà étranglées.

Les élus de mon département sont inquiets. Les missions de la poste ne sont plus garanties -dont celle d'aménagement du territoire- alors qu'il s'agit souvent du dernier service public présent... Les maires subissent des pressions inacceptables : on joue sur des horaires pour justifier la fermeture d'un bureau. De nombreuses communes sont touchées, Cavan, Plénée-Jugon ou encore Plérin, dont je suis l'élu.

La Poste est un symbole fort du service public ; créatrice de lien social, elle contribue au développement des territoires. Élus et habitants en ont assez d'être abandonnés au nom d'une soi-disant rentabilité. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Je vous prie d'excuser M. Besson.

Le contrat de présence postale territoriale définit, département par département, le nombre de points de contact sur le territoire. Pour les Côtes d'Armor, ce nombre ne pourra descendre en dessous de 222 ; 95 % de la population y est à moins de cinq kilomètres d'un point de contact.

Le financement va passer de 130 à 170 millions : c'est beaucoup, dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons.

Des modalités de concertation sont prévues. Un bureau de poste de plein exercice ne pourra être transformé en relais ou en agence communale sans l'accord écrit du maire. Les horaires d'ouverture ne pourront être inférieurs à douze heures par semaine, quelle que soit l'affluence du point de contact.

Le Gouvernement remettra prochainement au Parlement un rapport sur l'exercice de ses missions d'aménagement par La Poste.

M. Ronan Kerdraon.  - Je ne suis pas rassuré. Les élus et la population sont exaspérés par le jeu de dupes de La Poste : transformation en point contact ou réduction des heures d'ouverture. D'accord pour une réorganisation mais pas au détriment du service rendu aux usagers !

Classement des meublés de tourisme

M. Jean-Paul Amoudry.  - La loi du 22 juillet 2009 a réformé le classement des meublés de tourisme. Ceux-ci jouent un rôle très important dans le développement du tourisme, notamment en Haute-Savoie qui en compte 20 000 -10 % du total national.

Or ils ne bénéficient pas d'un accompagnement professionnalisé. Communes et groupements ont donc rempli une mission de conseil, préalable au classement.

L'arrêté du 6 décembre 2010 précise que les organismes réputés détenir l'accréditation qui exercent d'autres activités que le contrôle doivent identifier ces activités au sein de leur organisation. Le conseil aux hébergeurs en fait-il bien partie ?

La nouvelle grille de classement des meublés, issue de l'arrêté du 2 août 2010, est parfois incohérente : un étendage à linge rapporte deux fois plus de point qu'un sauna -qui vaut lui-même un réveil lumineux... Le quantitatif est trop souvent privilégié au détriment du qualitatif. Le Gouvernement va-t-il engager une concertation avec les responsables locaux, pour une meilleure application de ces nouvelles normes ?

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - Veuillez excuser M. Lefebvre. Les organismes réputés détenir l'accréditation peuvent exercer l'activité de conseil, sous réserve de ne pas commercialiser ce service avec celui de la visite de contrôle préalable au classement.

Les critères qualitatifs sont désormais évalués dans le nouveau référentiel ; celui-ci prend notamment en compte les critères de développement durable. Le dispositif, par points, apporte plus de souplesse et de lisibilité. Les critères relatifs à l'état et à la propreté ont un caractère obligatoire et sont affectés d'un nombre de points maximal. Un guide a été élaboré avec les professionnels.

La loi du 22 juillet 2009 a confié à Atout France la conception et la mise à jour des tableaux de classement. La commission de l'hébergement touristique marchand sera saisie fin 2011 pour examiner les modifications qui apparaîtraient nécessaires après un an d'application du dispositif.

M. Jean-Paul Amoudry.  - Ces éléments nourrissent la réflexion et le travail des professionnels. Nous reprendront contact : cette réforme mérite un dialogue entre l'administration et les professionnels.

La séance, suspendue à 11 heures 50, reprend à 12 heures 5.

Mandat des présidents d'université

M. Alain Gournac.  - Je me félicite de voir autant de femmes, à la présidence et sur le banc des ministres, en ce 8 mars, journée de la femme.

Ma question porte sur le renouvellement de mandat des présidents d'université, selon la date d'échéance de celui-ci. Les présidents dont le mandat expirait avant la loi de 2007, chargés depuis d'expédier les affaires courantes, pourront-ils se présenter devant le conseil d'indemnisation pour un premier mandat « nouvelle mouture », ou sera-t-il considéré comme un deuxième mandat, non renouvelable ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.  - La réforme des universités, fondée sur l'autonomie, est un succès : trois ans après son adoption, 90 % des universités ont choisi d'exercer leurs nouvelles responsabilités.

La loi de 2007 permet aux présidents de réaliser deux mandats de quatre ans, contre un de cinq ans auparavant.

La période transitoire prévoyait que les universités ne procèdent à l'élection du conseil d'administration qu'une fois les modifications mises en place. Dans les deux cas de figure, le mandat des présidents en fonction de la date de l'élection peut être renouvelé une fois : en aucun cas, un président ne peut faire plus de deux mandats.

M. Alain Gournac.  - Je suis pour l'autonomie des universités : plus de 90 % d'entre elles sont aux responsabilités.

Le texte n'était pas clair. Votre réponse me satisfait ; je la transmettrai à tous ceux, nombreux, qui m'ont saisi.

Maison du droit et de la justice à Toulouse

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Les maisons de la justice et du droit (MJD) participent d'une justice de proximité ; elles s'intéressent aux victimes, informent les justiciables, notamment les plus démunis, sur leurs droits et obligations. Elles sont, à ce titre, soutenues par le conseil général.

Les quartiers est de Toulouse sont toutefois oubliés. Le canton 7 bénéficie d'un plan de prévention, subventionné à hauteur de 400 000 euros par le conseil général, et d'un contrat local de sécurité, mis en place par la municipalité. Une maison de la justice et du droit parachèverait le dispositif.

J'ai déposé deux voeux, avec mes collègues du conseil général, qui n'ont pas été suivis d'effet. Or la délinquance augmente ! Quelles sont les intentions du Gouvernement ? Va-t-on enfin créer une MJD dans le canton 7 ?

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.  - Veuillez excuser M. Mercier. Celui-ci a décidé la création de cinq MJD supplémentaires, qui ouvriront leurs portes l'an prochain dans les territoires ruraux qui ont perdu leur tribunal d'instance pour renforcer l'accès au droit. L'agglomération toulousaine, qui ne répond pas à ce critère, bénéficie de juridictions et compte déjà 3 MJD. Son réseau d'accès au droit est riche et dense. Si des besoins supplémentaires étaient recensés, ils seraient étudiés avec le comité départemental d'accès au droit.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je regrette l'absence de M. Mercier. Votre réponse, calquée sur celle qui a été faite à M. Signé et juste modifiée à la marge, est frappée au sceau de la RGPP. Étant donné la montée en puissance de la délinquance, dont certain parti fait son miel, votre réponse est bien minimaliste ; 10 000 policiers ou gendarmes ont été supprimés depuis 2007.

Une MJD dans le quartier est se justifie pleinement : on ne va pas traverser toute la ville pour traiter d'un petit délit... Je dirai aux personnes concernées qui sont les responsables.

Organisme extraparlementaire (Nomination)

Mme la présidente.  - Je rappelle que la commission des finances a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement. En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Albéric de Montgolfier membre du conseil d'administration de l'Établissement public de financement et de restructuration.

La séance est suspendue à 12 heures 25.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 heures 35.

Élection à la présidence d'un groupe

M. le président.  - J'informe le Sénat que le groupe UMP a élu ce matin à sa tête notre collègue Jean-Claude Gaudin.

Garde à vue (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la garde à vue.

Dans la discussion des articles, nous en étions parvenus à l'amendement 174 rectifié au sein de l'article 7.

Discussion des articles (suite)

Article 7 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°174 rectifié, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission.

Alinéas 5 à 7

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque les nécessités de l'enquête exigent une audition immédiate de la personne, le procureur de la République peut autoriser, par décision écrite et motivée, l'officier ou l'agent de police judiciaire à débuter l'audition sans attendre l'expiration du délai prévu au premier alinéa.

« À titre exceptionnel, l'officier ou l'agent de police judiciaire peut être autorisé, par décision écrite et motivée prise, selon les distinctions prévues par l'alinéa suivant, par le procureur de la République ou par le juge des libertés et de la détention, à différer la présence de l'avocat lors des auditions ou confrontations, si cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête, soit pour permettre le bon déroulement d'investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes.

« Le procureur de la République ne peut différer la présence de l'avocat que pendant une durée maximale de douze  heures. Lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, le juge des libertés et de la détention peut, sur requête du procureur de la République, autoriser à différer la présence de l'avocat, au-delà de la douzième heure, jusqu'à la vingt-quatrième heure. Les autorisations du procureur de la République et du juge des libertés et de la détention sont écrites et motivées par référence aux conditions prévues à l'alinéa précédent au regard des éléments précis et circonstanciés résultant des faits de l'espèce.

« Lorsque, conformément aux dispositions des deux alinéas qui précèdent, le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention a autorisé à différer la présence de l'avocat lors des auditions ou confrontations, il peut également, dans les conditions et selon les modalités prévues par ces alinéas,  décider que l'avocat ne pourra, pour une durée identique, consulter les procès-verbaux d'audition de la personne gardée à vue.

M. François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois.  - Cet amendement renforce les garanties entourant la possibilité pour le procureur d'autoriser un report pendant une période de douze heures, puis pour le juge des libertés et de la détention (JLD) pendant une nouvelle période de douze heures, en indiquant que ce report doit être exceptionnel et les autorisations motivées par écrit.

En deuxième lieu, il distingue la question du report de l'avocat avec celle de l'autorisation de commencer une audition sans attendre l'expiration du délai d'attente de deux heures.

Enfin, lorsque l'autorisation de reporter la présence de l'avocat a été exceptionnellement décidée par le JLD pour une nouvelle durée de douze heures, ce juge peut également autoriser le report de la communication des procès-verbaux d'audition à l'avocat.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié bis, présenté par MM. Courtois, J. Gautier et Nègre et Mme Dumas.

I. - Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Toutefois, à la demande de l'officier de police judiciaire, le procureur de la République peut autoriser celui-ci à différer l'intervention de l'avocat prévue aux articles 63-3-1 à 63-4-2 pendant une durée ne pouvant excéder douze heures, lorsque cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête, soit pour permettre le bon déroulement d'investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes. L'autorisation du procureur de la République est écrite et motivée.

II. - Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

III. - Alinéa 7

Remplacer les mots :

la présence de l'avocat lors des auditions

par les mots :

l'intervention de l'avocat prévue aux articles 63-3-1 à 63-4-2

M. Jean-Patrick Courtois.  - Dans le texte, l'assistance de l'avocat se décline selon trois modalités : l'entretien confidentiel, l'assistance aux auditions et l'accès à certains procès-verbaux.

L'article 7 permet la possibilité d'y faire exceptionnellement obstacle pendant une durée déterminée, et ce au regard de « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête, soit pour permettre le bon déroulement d'investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes ».

Or la rédaction actuelle prévoit que l'accès aux procès-verbaux puisse être différé pendant une durée maximum de douze heures alors que l'assistance de l'avocat aux auditions pourrait être reportée, elle, pendant une période pouvant aller jusqu'à vingt-quatre heures, tandis que l'entretien confidentiel ne pourrait faire l'objet d'aucun report.

Cette rédaction est source de complexité, ce qui accroît les risques de nullité.

Cet amendement rationnalise la procédure, en considérant que l'assistance de l'avocat doit être affirmée dans son caractère indivisible.

M. le président.  - Amendement n°85, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 5

1° Première phrase

Remplacer les mots :

le procureur de la République peut autoriser

par les mots :

le juge des libertés et de la détention peut décider

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

procureur de la République

par les mots :

juge des libertés et de la détention

M. Alain Anziani.  - Le report de l'intervention de l'avocat, attentatoire aux libertés, relève du juge des libertés et de la détention et non du procureur de la République. S'il y a une innovation dans ce texte, c'est la présence de l'avocat lors de l'audition et des confrontations. Tout report serait un retour en arrière. Il doit relever du JLD, dans le respect de l'habeas corpus.

M. le président.  - Amendement n°117 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 5, première et seconde phrases

Remplacer les mots  :

procureur de la République

par les mots :

juge des libertés et de la détention

M. Jacques Mézard.  - Il doit revenir au seul JLD d'autoriser soit le début de l'audition avant l'expiration du délai de deux heures, soit de différer au-delà de la douzième heure la présence de l'avocat. Cet amendement va dans le même sens que le précédent. Le report de la présence de l'avocat sur décision du procureur va à l'encontre de la jurisprudence européenne. Cela ne tiendra pas ! Tout au moins, la décision doit relever du juge judiciaire.

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Alinéa 5, première phrase

Après les mots :

celui-ci

insérer les mots :

, après autorisation du juge des libertés et de la détention,

II. - Alinéa 5, seconde phrase

Remplacer les mots :

procureur de la République

par les mots :

juge des libertés et de la détention

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Ces dispositions dérogatoires à la présence effective de l'avocat portent atteinte aux droits de la défense.

Votre volonté de revenir sur des avancées de ce texte est pour le moins surprenante ! La jurisprudence européenne et l'avis de la Commission consultative des droits de l'homme du 6 janvier 2011 vont dans le même sens : le report de la présence de l'avocat doit être décidé par le JLD.

M. le président.  - Amendement n°166, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Alinéa 5, première phrase

Après les mots :

l'audition

insérer les mots :

ou la confrontation

et après les mots :

des auditions

insérer les mots :

ou des confrontations

II. - Alinéa 6

Après les mots :

d'audition

insérer les mots :

ou de confrontation

III. - Alinéa 8

Après les mots :

l'audition

insérer les mots :

ou la confrontation

M. Alain Anziani.  - Amendement de coordination avec le texte voté la semaine dernière. Pour éliminer toute ambiguïté, précisons que l'avocat doit être également présent lors des confrontations.

M. le président.  - Amendement n°168, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5, première phrase 

Remplacer les mots :

de deux heures

par les mots :

d'une heure

M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - Amendement de coordination. J'espère qu'il recevra un accueil plus enthousiaste que la semaine dernière ! (Sourires)

M. le président.  - Amendement n°34, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous sommes contre les dérogations portant atteinte au droit d'accès de l'avocat aux procès-verbaux. De surcroît, la rédaction de cet alinéa est peu claire.

M. le président.  - Amendement identique n°119 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

M. Jacques Mézard.  - A plusieurs reprises, j'ai souligné que ce texte était hélas défensif : on nous propose des solutions pour tenter de gagner du temps avant une intervention effective de l'avocat. (M. Michel Mercier, garde des sceaux, le conteste) Au regard des décisions du Conseil constitutionnel et de la jurisprudence européenne, on croit rêver ! Reviendrait-on à l'entretien de courtoisie ? (M. Roland Courteau s'esclaffe) On s'arc-boute sur des positions qui seront balayées demain.

M. le président.  - Amendement n°86, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 6

Remplacer les mots :

procureur de la République

par les mots :

juge des libertés et de la détention

M. Alain Anziani.  - Attention au ridicule : on va empêcher l'avocat de lire ce que son client a déclaré, alors que ce dernier aura inévitablement l'occasion de le lui dire : dans l'obscurité du commissariat, il y aura des échanges entre l'avocat et le client. C'est absurde ! (MM. Roland Courteau et Pierre-Yves Collombat renchérissent)

M. Jean-Pierre Michel.  - Le ridicule ne tue pas !

M. le président.  - Amendement identique n°120 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

M. Jacques Mézard.  - Amendement de repli. J'en appelle à la sagesse du Sénat ; à supposer que, dans certains cas, fort rares, il existe une raison d'empêcher l'avocat d'accéder aux procès-verbaux, cette décision doit relever du seul JLD : encore une fois, le procureur est partie poursuivante. (« Très bien ! » à gauche)

M. le président.  - Amendement n°88, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 7 

Supprimer cet alinéa.

M. Alain Anziani.  - Cet alinéa donne la possibilité au procureur de la République de différer la présence de l'avocat jusqu'à la vingt-quatrième heure lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans. Cette décision doit être motivée par les nécessités de l'enquête. La Cour de Strasbourg n'acceptera pas cette dérogation faite au nom de la nature de l'infraction.

M. le président.  - Amendement n°101 rectifié, présenté par MM. Fouché, Doligé et Trillard, Mme Bout et MM. Cléach et Doublet.

Alinéa 7

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

Mme Brigitte Bout.  - L'abaissement de cinq à trois ans du quantum de peines requis pour différer la présence de l'avocat lors des auditions au-delà de la douzième heure permettra de mieux répondre aux besoins de l'enquête en élargissant la catégorie d'actes qui justifient, au regard de leur gravité, de cette nécessité.

M. le président.  - Amendement n°118 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 7

Remplacer le chiffre :

cinq

par le chiffre :

sept

M. Jacques Mézard.  - Restreindre les droits de la défense doit être réservé aux infractions les plus graves. D'où le relèvement du quantum de la peine à sept ans, soit le seuil de la peine de sûreté.

M. le président.  - Amendement n°89, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 8 

Supprimer cet alinéa.

M. Alain Anziani.  - Nous demandons la suppression de l'alinéa 8. Si une difficulté intervient lors d'une audience, la procédure de droit commun doit s'appliquer. (M. Roland Courteau approuve)

M. le président.  - Amendement n°121 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 8

Après les mots :

le procureur de la République qui informe,

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

s'il y a lieu, le bâtonnier. Ce dernier statue conformément aux règles déontologiques qui régissent la profession.

M. Jacques Mézard.  - Le procureur de la République n'a pas qualité pour apprécier s'il y a lieu de faire désigner un autre avocat. Seul le bâtonnier est compétent pour le faire. On ne peut pas laisser la partie poursuivante dire à l'avocat de « dégager », un mot à la mode ces temps-ci. (Sourires)

Il y a une tradition : au bâtonnier, dans le respect des règles déontologiques, de juger s'il y a lieu de désigner un autre avocat.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Si l'amendement n°9 rectifié bis est adopté, il marquera un retrait par rapport au droit actuel : défavorable. Concernant les amendements nos85, 117 rectifié et 33, j'ai dit, à plusieurs reprises, pourquoi nous souhaitions maintenir le contrôle de la garde à vue par le procureur. Mon amendement n°174 rectifié donne des garanties supplémentaires. L'amendement n°166 est satisfait pour ses I et II ; favorable au III. Avis défavorable à l'amendement n°168 car nous voulons laisser deux heures à l'avocat pour arriver sur le lieu de la garde vue : il faut maintenir des brigades de gendarmerie de plein exercice sur tout le territoire. Par cohérence, avis défavorable aux amendements nos34 et 119 rectifié, 86 et 120 rectifié. Rejet également de l'amendement n°88 et de l'amendement n°101 rectifié qui ouvrirait trop largement le champ du dispositif.

Pour les mêmes raisons, avis défavorable à l'amendement n°118 rectifié. Je suggère le retrait de l'amendement n°89 car nous avons réécrit les dispositions sur la police de l'audition dans un souci d'apaisement. Enfin, l'amendement n°121 rectifié est certainement tiré de l'expérience d'avocat de M. Mézard. Pour autant, la procédure n'a pas commencé. Le bâtonnier doit pouvoir désigner un autre avocat si le précédent ne permet pas à la garde à vue de se dérouler dans de bonnes conditions. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - La possibilité de report de présence de l'avocat est autorisée par la Cour de Strasbourg, le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation. La rédaction de la commission des lois est conforme aux exigences de ces trois instances. Le procureur est compétent pour les douze premières heures ; ensuite, au JLD de statuer. Dans nombre de pays étrangers, cette décision relève des enquêteurs eux-mêmes ; notre droit est donc plus protecteur.

Compte tenu de ces remarques, avis favorable à l'amendement n°174 rectifié qui renforce les garanties prévues par le texte et avis défavorable à tous les autres amendements.

M. Jean-Pierre Michel.  - Le dépôt de l'amendement de la commission a entraîné la discussion commune de ces amendements, qui obscurcit la discussion. Cet article 7 revient sur l'article premier. On peut toujours attendre, croit-on entendre dire, avant qu'intervienne l'avocat ! C'est inacceptable. Nous voterons contre.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'amendement du rapporteur améliore à la marge le texte. Les dérogations sont un piège. Nous ne voterons ni l'amendement n° 174, ni l'article 7.

M. Jacques Mézard.  - Nous ne pourrons pas davantage nous associer à cet amendement qui est presque pire que le texte initial. (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, le conteste) Vous avez même rajouté l'APJ ! C'est un signe qui ne trompe pas...

M. Roland Courteau.  - Oh oui !

M. Jacques Mézard.  - Par ces exceptions, vous portez atteinte au principe posé à l'article premier. Dans la pratique, le garde des sceaux aura la possibilité de donner des instructions au procureur de la République. (M. Michel Mercier, garde des sceaux, se récrie) L'exception deviendra la règle, dans les circonstances actuelles, malgré le bon travail des procureurs. Quant à différer la présence de l'avocat, la logique est la même.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - J'ai écouté avec attention M. Mézard. Il a eu raison sur la mention de l'agent de police judiciaire. Je propose de rectifier mon amendement pour supprimer cette mention. La décision de reporter l'intervention de l'avocat doit être motivée, par écrit, au regard de raisons impérieuses liées à l'enquête. Le cadre est donc très précis ; ni l'OPJ ni le procureur n'auront intérêt à différer la présence de l'avocat puisque toute la procédure en serait fragilisée. Peut-être pouvons-nous interroger le garde des sceaux ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je souligne l'extrême bonne volonté du rapporteur. L'interprétation de M. Mézard est biaisée : le texte de l'amendement n°174 rectifié était excellent : pourquoi le rectifier ? Il était cohérent avec les autres dispositions du texte, entre autres à l'alinéa 8, qui mentionnent l'agent de police judiciaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Oui, mais il opère sous contrôle de l'OPJ.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Seuls le procureur et le JLD sont décisionnaires ; l'enquête est menée soit par un APJ soit par un OPJ.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Je ne comprends pas qu'un agent de police judiciaire puisse mener des auditions. Nous avons tous souligné la nécessité de confier les auditions à des personnels qualifiés, au moins à des officiers. Les agents interviennent sous le contrôle des officiers à l'alinéa 8. A la réflexion, cela ne tient pas ! Mieux vaut confier les auditions aux seuls OPJ. Cessons de tenir des discours contradictoires !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Mon seul objectif est de ne pas bloquer le système. D'après l'article 20 du CPP, les APJ secondent les OPJ. (Exclamations sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Michel.  - C'est très grave !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Cet article a tout d'un acte manqué. On souligne la nécessité structurelle de la présence d'un avocat dans un État de droit et on y fait obstacle à l'article 7.

M. Alain Anziani.  - La décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010 a mis en avant les garanties insuffisantes entourant la garde à vue, notamment la réduction des exigences quant aux OPJ dont le nombre a plus que doublé ; M. Zocchetto l'a souligné dans son rapport. Supprimons la mention des APJ dans tout le texte !

L'amendement n°174 rectifié bis est adopté.

Les amendements nos9 rectifié bis, 85, 117 rectifié, 33, 168, 34, 119 rectifié, 86, 120 rectifié, 88, 101 rectifié, 118 rectifié, 89 et 121 rectifié deviennent sans objet.

L'amendement n°166 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°100 rectifié, présenté par M. Fouché, Mmes Mélot et Bout et MM. Cléach, Doublet et Trillard.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'officier ou l'agent de police judiciaire qui exerce la police de l'audition peut à ce titre, si l'avocat compromet, par ses interventions, le bon déroulement de l'audition, en référer au procureur de la République qui peut autoriser, sur décision écrite et motivée, la poursuite de l'audition hors de la présence de l'avocat.

Mme Brigitte Bout.  - Cet amendement prévoit que l'officier ou l'agent de police judiciaire assure la police de l'audition.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Cet amendement ouvrirait une nouvelle exception au droit à l'assistance d'un avocat. En cela, il n'est pas conforme à l'esprit de la réforme. Retrait, sinon rejet.

L'amendement n°100 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°169, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 9, première phrase

Après les mots :

chaque audition

insérer les mots :

ou confrontation

M. Alain Anziani.  - Coordination.

L'amendement n°169, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°90, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 9, deuxième et dernière phrase

Supprimer ces phrases.

M. Alain Anziani.  - Ces dispositions sont inutiles. Il n'y a pas d'obligation de répondre aux questions de l'avocat. Est-ce d'ailleurs à l'OPJ d'apprécier si une question doit être posée ou non ? Si la question est outrageante, au bâtonnier d'intervenir.

M. le président.  - Amendement n°122, présenté par MM. Mézard et Collin.

Alinéa 9, deuxième phrase

Supprimer les mots :

ou à la dignité de la personne

M. Jacques Mézard.  - Cet alinéa est extraordinaire... Laisser entendre qu'un avocat pourrait poser des questions attentatoires « à la dignité de la personne » est extravagant, insultant pour la profession et dénote l'état d'esprit des auteurs de ce texte. La profession est soumise à des règles déontologiques ; en cas de non-respect de celles-ci, il appartient à l'OPJ de saisir le procureur qui alertera le bâtonnier. Le parallèle avec l'audition dans le cabinet du juge d'instruction ne tient pas. Que chacun fasse son travail. Au vu de ce qu'on a constaté ces dernières années lors des gardes à vue, donner des leçons aux avocats n'est pas de bon goût...

M. Jean-Pierre Fourcade.  - M. Mézard s'enflamme !

M. Jean-Patrick Courtois.  - Corporatisme !

M. le président.  - Amendement n°37, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 9, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

L'officier ou l'agent de police judiciaire retranscrit au procès-verbal d'audition les questions posées et les réponses faites y compris celles formulées par l'avocat, ainsi que les éventuels refus de répondre.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je partage ces propos. Cet amendement vise à garantir les droits de la personne gardée à vue.

M. le président.  - Amendement n°123 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 9, dernière phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, avec le texte intégral de la ou des questions posées par l'avocat

M. Jacques Mézard.  - Le corporatisme m'est étranger mais il y a des règles fondamentales auxquelles je suis, comme d'autres ici, très attaché. La mention des questions litigieuses est importante.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - La loi doit prévoir la discipline des auditions ; le législateur ne peut s'en remettre à un décret ou à une circulaire : avis défavorable à l'amendement n°90.

Favorable à l'amendement n°122 rectifié de M. Mézard. L'amendement n°37 est inutile : l'avocat pourra toujours joindre ses questions à ses observations sur le procès-verbal, et même les adresser au procureur pendant la garde à vue. Défavorable, ainsi qu'à l'amendement n°123 rectifié.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - A la loi d'organiser la police des auditions : défavorable aux amendements nos90, 37 et 123 rectifié. Le texte reprend celui de l'article 120 du code de procédure pénale, qui précise que le juge d'instruction peut s'opposer à des questions de nature à nuire à la dignité de la personne, règle qui date de la loi Guigou de 2000 et qui n'a jamais posé de difficulté d'application.

Il n'y a aucun sous-entendu vexant pour les avocats. Défavorable à l'amendement n°122 rectifié.

M. Pierre-Yves Collombat.  - On peut comprendre la nécessité d'organiser l'audition mais qu'est-ce qu'une question susceptible de nuire au bon déroulement de l'enquête ?

M. Jacques Mézard.  - Que cette règle date de la loi Guigou m'indiffère au plus haut point. Tous les gouvernements peuvent faire des erreurs ; vous le vivez quotidiennement, monsieur le ministre... Outre qu'il y a très peu d'instructions, on ne peut comparer avec la garde à vue.

L'amendement n°90 n'est pas adopté.

L'amendement n°122 rectifié est adopté.

L'amendement n°37 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°123 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°170, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 10, première phrase

Après les mots :

chaque audition

insérer les mots :

ou confrontation

L'amendement de coordination n°170, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

L'amendement n°124 rectifié devient sans objet.

M. le président.  - Amendement n°171, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par les mots :

et aux confrontations

L'amendement de coordination n°171, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°151 rectifié, présenté par Mme Klès et M. Michel.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Si l'interrogatoire de la personne gardée à vue n'a pas été effectué en présence de l'avocat, le contenu du procès-verbal doit être obligatoirement validé, à peine de nullité, par l'intéressé devant le juge des libertés et de la détention. »

Mme Virginie Klès.  - Je sais, grâce à M. Collombat, ce qu'est une question de nature à perturber... le débat. Il n'a pas eu de réponse... Quand l'avocat n'est pas là, il y aura un enregistrement, dit-on. Mais tous les locaux de garde à vue ne sont pas équipés. La moindre des choses est alors de faire confirmer ses propos par l'intéressé. L'expérience est parlante... Prenons exemple sur la Turquie.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Défavorable. Vous proposez un mécanisme extrêmement lourd. Et le texte prévoit que chaque personne gardée à vue peut bénéficier de l'assistance d'un avocat... A ce stade, le JLD n'a pas à intervenir. Enfin, cette mesure risque de fragiliser l'enquête.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'article premier A dénie tout poids incriminant aux déclarations faites sans la présence de l'avocat. Retrait ?

Mme Virginie Klès.  - Il s'agit de déclarations, pas nécessairement de propos incriminants. Y aura-t-il tant d'auditions sans avocat -ou très peu ?

L'amendement n°151 rectifié n'est pas adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

Article 7 bis

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par Mme Des Esgaulx, MM. Vial et J. Gautier et Mme Mélot.

I. - Alinéas 2 et 3

Remplacer les mots :

la victime

par les mots :

une personne qui se déclare victime

 II. - Alinéa 7

Remplacer les mots :

une victime

par les mots :

une personne qui se déclare victime

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Au stade de l'enquête, une personne n'a pas la qualité de victime ; seule une juridiction peut reconnaître cette qualité. L'enquête de police ou de gendarmerie peut fort bien démontrer qu'une personne se prétendant victime ne l'est pas. Il convient d'utiliser une qualification plus neutre.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - La qualification de « victime » ne préjuge pas de la décision de la juridiction. Le code de procédure pénale utilise cette dénomination, classique. Retrait ?

L'amendement n°6 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°92, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

Si la victime est confrontée

insérer les mots :

ou auditionnée

M. Alain Anziani.  - La victime peut être assistée par un avocat lors des confrontations mais également lors des auditions lorsque l'auteur de l'infraction est lui-même assisté d'un avocat.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Défavorable. Lorsque la victime est auditionnée avec la personne gardée à vue, il s'agit d'une confrontation...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié bis, présenté par MM. Courtois, J. Gautier et Nègre et Mme Dumas.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

qui est assistée d'un avocat lors de son audition

M. Jean-Patrick Courtois.  - Cet amendement permet à la victime d'être assistée d'un avocat lors des confrontations, même si la personne gardée à vue a renoncé à l'être. L'équilibre de la procédure pénale exige que les droits de la victime soient clairement consacrés.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Le droit pour la victime d'être assisté d'un avocat est dans l'esprit du texte ; il faut l'égalité des armes. Ce qui implique que si le gardé à vue a été privé de ce droit par décision du procureur, la victime ne pourra être assistée. Favorable à l'amendement n°10 rectifié bis.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°10 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°102 rectifié, présenté par MM. Fouché et du Luart, Mme Mélot, MM. Gouteyron, Doligé, Trillard et B. Fournier, Mme Bout et MM. Lefèvre, Cléach, Doublet et Vial.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

est informée de ce droit

par les mots :

se voit notifier son droit à bénéficier de l'assistance d'un avocat par l'officier de police judiciaire ou l'agent de police judiciaire lors du dépôt de plainte et

Mme Brigitte Bout.  - Dans un souci d'égalité, le droit pour la victime de bénéficier d'un avocat doit lui être notifié et entrer dans la procédure pénale.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Le projet de loi prévoit déjà que la victime est informée du droit d'être assistée d'un avocat avant la confrontation. J'ajoute que le dépôt de plainte n'est pas toujours, loin s'en faut, suivi d'une confrontation. Retrait de l'amendement n°102 rectifié.

L'amendement n°102 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°125 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« À sa demande, l'avocat peut avoir accès aux pièces du dossier pénal qui concernent directement la personne qu'il assiste.

M. Jacques Mézard.  - Selon le principe d'égalité des armes, l'avocat de la victime doit avoir accès aux pièces du dossier qui intéressent directement son client.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Cet amendement est cohérent avec le souhait de M. Mézard que l'avocat du gardé à vue ait accès au dossier ; le Sénat ne l'avait pas suivi. Par cohérence, avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le principe d'égalité des armes nous contraint à donner un avis défavorable.

L'amendement n°125 rectifié n'est pas adopté.

L'article 7 bis, modifié, est adopté.

Article 8

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'article 8 pose le principe du respect de la dignité des personnes gardées à vue. Qu'en sera-t-il en pratique ? Le texte est muet sur les conditions matérielles de la garde à vue, pourtant évoquées dans le texte initial présenté devant le Conseil d'État. Un amendement de notre groupe donnait suite aux exigences posées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 2010 ; il s'est heurté à l'article 40. Nous voulions donner aux institutions les moyens d'exercer leur mission et sanctionner les manquements. La pudeur, l'intimité, l'hygiène sont loin d'être respectées : c'est une humiliation pour la République, dénoncée au niveau international. Ce que vous voterez sera nul et non avenu si les budgets ne suivent pas !

L'article 8 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article 803 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les deux cas, il est dressé un procès-verbal, versé au dossier, qui motive substantiellement les mesures prises. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Lors de la garde à vue, il peut arriver que les OPJ aient recours à la contrainte physique. L'article 803 du code de procédure pénale dispose que « nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite ».

Si l'usage abusif de cette disposition peut entraîner la responsabilité de l'État pour voie de fait, les effets sur la nullité de la procédure sont très limités. Les juridictions considèrent souvent que la preuve de l'usage des menottes n'est pas rapportée ou que le risque de fuite a été à bon droit invoqué.

Dans un arrêt du 13 août 2010, la cour d'appel de Douai a regretté l'absence de mention menottage dans les procès-verbaux. Notre amendement tend à y remédier.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'article 803 encadre la pratique du menottage ; il nous paraît bien rédigé. La jurisprudence de la Cour de cassation est stable. Avis défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - S'il suffit de la jurisprudence, pourquoi légiférer ?

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

Article 9

M. le président.  - Amendement n°127 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 3

1° Après les mots :

des objets

insérer les mots :

, vêtements et sous-vêtements

2° Compléter cet alinéa par les mots :

et de son intimité

M. Jacques Mézard.  - On va m'objecter que le mot « objets » inclut vêtements et sous-vêtements, mais on connaît les dérives dénoncées par le contrôleur général des lieux de privation de liberté...

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'amendement serait contreproductif. Vêtements et sous-vêtements sont des objets ; si on énumère, un OPJ risque de raisonner a contrario et priver la personne gardée à vue de ses lunettes ou de sa canne, par exemple ! Gardons le terme le plus large.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°127 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5, première phrase

Remplacer les mots :

celle-ci doit être décidée par un officier de police judiciaire et

par les mots :

un officier de police judiciaire peut réaliser celle-ci après autorisation expresse du juge des libertés et de la détention. Elle doit être

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Les fouilles à corps intégrales sont suffisamment attentatoires à la dignité de la personne pour justifier une autorisation préalable du juge des libertés et de la détention. En acceptant certains de nos amendements, la commission des lois a reconnu que les fouilles intégrales étaient loin d'être anodines ; humiliantes, a noté le contrôleur général des lieux de privation de liberté dans son rapport de 2008, elles rendent la personne plus vulnérable. Il faut renforcer les garanties.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Le projet de loi encadre strictement les fouilles intégrales, qui ne peuvent plus être désormais justifiées par des mesures de sécurité. La commission des lois a intégré dans son texte un amendement CRC-SPG qui limite encore de telles fouilles. Retrait, sinon rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Défavorable, pour les mêmes motifs.

L'amendement n°40 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mme Des Esgaulx, MM. Vial et J. Gautier et Mme Mélot.

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Toute seconde fouille intégrale d'une personne gardée à vue ainsi que toute fouille intégrale ultérieure ne peut être effectuée que sur décision écrite et spécialement motivée du procureur de la République.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Les secondes fouilles intégrales doivent elles aussi être encadrées afin d'éviter toute atteinte à la dignité de la personne gardée à vue ou des humiliations inutiles.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - La procédure est déjà très encadrée et s'applique à tous les cas de fouilles. Retrait, sinon rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis. Le projet de loi apporte un progrès notable.

L'amendement n°7 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°128 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf impératif spécialement motivé par les nécessités de l'enquête. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin désigné à cet effet par le juge des libertés et de la détention.

M. Jacques Mézard.  - On nous avait dit, lors de l'examen de la loi pénitentiaire, que les fouilles internes n'existaient pas... Les progrès techniques devraient les rendre inutiles au fil des années et des budgets du ministère de la justice... Tant qu'elles existent, elles doivent demeurer exceptionnelles et se faire sous le contrôle du JLD.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

et après autorisation expresse du juge des libertés et de la détention

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Les investigations corporelles internes sont suffisamment attentatoires à la dignité de la personne pour justifier une autorisation préalable du JLD.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'amendement de M. Mézard reprend les termes de la loi pénitentiaire. Pourquoi pas ? Mais nous ne souhaitons pas l'intervention du JLD à ce stade. Avis défavorable aux deux amendements.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Les fouilles internes sont assimilées à des perquisitions : elles ne peuvent être décidées sans l'accord de la personne qu'en cas de flagrance. En pratique, on y a recours essentiellement en cas de trafic de stupéfiants ; et alors il faut faire vite, ce qui serait impossible s'il fallait attendre l'autorisation du JLD. Retrait.

M. Jacques Mézard.  - Cette argumentation me semble manquer de fondement. En matière de stupéfiant, on a le plus souvent recours à la radiographie.

L'amendement n°128 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°41.

M. le président.  - Amendement n°93 rectifié, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. 63-7 bis. - Toute nullité relative à la garde à vue est d'ordre public.

« Les formalités mentionnées aux articles 62-3, 62-5, 63, 63-1, 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4, 63-4-1, 63-4-2, 63-4-3, 63-5, 63-6, 63-7, 63-8 et 64 sont prescrites à peine de nullités. Leur violation porte atteinte aux intérêts de la personne gardée à vue au sens de l'article 802 du code de procédure pénale.

M. Richard Tuheiava.  - L'amendement prévoit que les critères de mise en garde à vue, le contrôle de celle-ci et les règles de prolongation, les informations données à la personne gardée à vue, la possibilité pour elle de faire prévenir un proche et son employeur, la visite du médecin, l'assistance d'un avocat, le respect de la dignité de la personne, les mesures de sécurité pendant la garde à vue et l'établissement du procès-verbal par l'officier de police judiciaire sont prescrits à peine de nullités. On ne peut s'en remettre à la jurisprudence pour dire le régime des nullités.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - A l'heure actuelle, il n'y a pas de nullité sans grief. La Cour de cassation a toujours eu une interprétation protectrice s'agissant de la garde à vue, en considérant que certaines irrégularités « font nécessairement grief ». Il importe de ne pas fragiliser l'enquête. Le législateur a toujours refusé d'inscrire des nullités textuelles. Restons-en là. Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Les nullités d'ordre public n'existent pas dans le code procédure pénale ; c'est une notion purement jurisprudentielle. Il ne faut pas toucher par la loi à cette question complexe, qui concerne toute la procédure pénale. J'ajoute que la jurisprudence de la Cour de cassation est très rigoureuse en matière de garde à vue. Retrait, sinon rejet.

L'amendement n°93 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°42, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L'officier de police judiciaire lui remet une copie du procès-verbal mentionné à l'article 64 du même code.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Tout gardé à vue doit être informé de la suite de la procédure, conformément à l'article 77-2 du code de procédure pénale. Cette information n'est pas toujours donnée. Nous demandons donc que le gardé à vue ait copie du procès verbal dès sa remise en liberté.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Il s'agit du procès-verbal visé à l'article 64 du code de procédure pénale, non de celui de l'audition. Ce document est de nature administrative. L'émargement du gardé à vue étant requis, la précision n'est pas nécessaire.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°42 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°179, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission.

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. 63-9. - Le procureur de la République compétent pour être avisé des placements en garde à vue, en contrôler le déroulement, en ordonner la prolongation et décider de l'issue de la mesure est celui sous la direction duquel l'enquête est menée.

« Toutefois, le procureur de la République du lieu où est exécutée la garde à vue est également compétent pour la contrôler et en ordonner la prolongation. »

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Cet amendement reprend les dispositions de l'alinéa 11 de l'article premier, précisant que le procureur de la République compétent pour assurer le contrôle de la garde à vue est non seulement celui en charge du dossier mais également le procureur du ressort dans lequel la garde à vue est exécutée.

La rédaction proposée apporte des précisions complémentaires, destinées à éviter des difficultés d'application de cette disposition.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Excellent amendement !

L'amendement n°179 est adopté.

L'article 9, modifié, est adopté.

Article 10

M. le président.  - Amendement n°44, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5 

Compléter cet alinéa par les mots :

ou si elle a été préalablement auditionnée conformément à l'article 62

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le procès-verbal doit faire mention du cas où la personne a été placée en garde à vue en qualité de témoin.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Cet amendement et les suivants alourdissent la procédure, sans apporter de précisions utiles. Rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'alinéa 5 de l'article 10 donne satisfaction à Mme Borvo. Retrait, sinon rejet.

L'amendement n°44 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°43, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 6 

Remplacer les mots :

et 63-3-1

par les mots :

63-3-1, 63-4-1 et 63-4-2 

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - En matière de droits de la personne, un peu de formalisme est nécessaire ! Le procès-verbal qui consigne le déroulement de la procédure doit mentionner les interventions de l'avocat.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Mme Borvo a déjà satisfaction.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - En quoi ?

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Tout est indiqué à l'article 64 du code. Retrait ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'amendement est redondant. Je n'ose vous demander de le retirer...

L'amendement n°43 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7 

Compléter cet alinéa par les mots :

ou des mesures de sécurité, notamment s'il a été fait usage de menottes ou de contrainte physique

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le procès-verbal doit mentionner l'ensemble des interventions contraignantes pour l'individu et qui peuvent porter atteinte au respect de sa dignité ou à son intégrité physique.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'article 803 du code encadre les interventions contraignantes et les escortes. Dans ce cas, la mention proposée par Mme Borvo est-elle utile ? Rejet ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°46 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°45, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7 

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il mentionne dans ce cas les raisons qui les ont motivées

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Ce projet de loi met fin au vide juridique sur les fouilles internes et intégrales. Nous nous en réjouissons car ces pratiques étaient monnaie courante. Afin que la loi n'en reste pas aux principes, il faut prévoir que les fouilles soient mentionnées au procès-verbal et justifiées. En cas d'abus, elles seraient sanctionnées et sources de nullités.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Le texte apporte effectivement des garanties, qui semblent suffisantes. Rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Les alinéas 5 et 6 de l'article 9, ainsi que cet article 10, vous donnent entièrement satisfaction. Retrait, sinon rejet.

L'amendement n°45 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°94, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« 6° L'état des locaux de garde à vue.

Mme Virginie Klès.  - Le procès-verbal doit décrire l'état des locaux dans lesquels s'est déroulée la garde à vue.

M.le président.  - Amendement n°152 rectifié, présenté par Mme Klès et M. Michel.

Après l'alinéa 7

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Les conditions matérielles de la garde à vue doivent répondre à des critères déterminés par décret en Conseil d'État.

« Le procès-verbal concernant la notification de la fin de la garde à vue et récapitulant le déroulement de la garde à vue devra contenir une appréciation de l'officier de police judiciaire concernant l'état des locaux de la garde à vue en fonction des critères retenus.

Mme Virginie Klès.  - Dans sa grande sagesse, le Sénat adoptera sans doute cet amendement qui précise les critères d'hygiène à respecter dans ces lieux pour la dignité d'un gardé à vue présumé innocent...

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'article 8 de ce projet de loi dispose que l'état des lieux de la garde à vue doit garantir le respect de la dignité de la personne. En outre, le procureur de la République assure un contrôle. Qu'en est-il dans la pratique, monsieur le garde des sceaux ? Le contrôleur des lieux de privation de liberté effectue également un contrôle rigoureux. Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous partageons l'objectif : assurer le respect de la dignité de la personne. Le procureur doit visiter les locaux au moins une fois par an. Un rapport annuel est adressé au procureur général et à la Chancellerie. Outre le contrôleur général, les parlementaires ont également un droit de contrôle. Compte tenu de ces trois niveaux de contrôle, retrait, sinon rejet.

Mme Virginie Klès.  - Le principe inscrit à l'article 8 ne semble pas suffisant : il a fallu préciser que le gardé à vue a droit de conserver certains objets !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Ce n'est pas pareil !

Mme Virginie Klès.  - En outre, cet amendement reviendrait à effectuer un autocontrôle régulier, comme dans les cantines scolaires. Les forces de sécurité, en qui j'ai confiance, pourraient même consigner des suggestions d'amélioration dans le procès-verbal.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Richard Tuheiava.  - Cet amendement est important. J'ai vu des gardés à vue obligés de se mettre à terre pour respirer sous la porte ou protester parce que le local était souillé par les matières fécales des occupants précédents.

Franchissons un pas vers le respect de la dignité du gardé à vue ! C'est dans l'intérêt du système judiciaire et de l'enquête.

M. Alain Anziani.  - Cet amendement devrait nous rassembler. Nous sommes tous horrifiés par les informations contenues dans le rapport du contrôleur général.

M. Roland Courteau.  - Un scandale ! Ce que nous proposons n'ajoute rien, ne retranche rien. Qui cela gênera-t-il ? Les mesures de contrôle exceptionnelles ne suffisent pas. Cet amendement ne mange pas de pain !

L'amendement n°94 n'est pas adopté ; non plus que l'amendement n°152 rectifié.

L'article 10 est adopté, ainsi que l'article 11 A.

Article 11

M. le président.  - Amendement n°147 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Supprimer cet article.

M. Jacques Mézard.  - Nous abordons un article délicat. Les dispositions de l'article 62 qu'il réintroduit à l'article 61 du code ont été déjà censurées par le Conseil constitutionnel. Il reconstitue l'audition libre que les députés ont heureusement supprimée. Le diable est parfois dans les détails ! La comparution sans contrainte n'est entourée d'aucune garantie, sauf à accepter les amendements que nous proposons. Il faudra revoir cette rédaction tôt ou tard...

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Cet amendement m'a surpris car l'article 11 apporte des précisions et des garanties nécessaires à la comparution sans contrainte. Les témoins peuvent être auditionnés quatre heures au plus. Quant aux suspects, ils sont obligatoirement placés en garde à vue. Rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'audition des témoins a été instaurée par la loi du 3 janvier 1993. Les suspects sont, eux, placés en garde à vue ; la jurisprudence de la Cour de cassation est constante. Vous pouvez être rassuré et retirer votre amendement.

M. Jacques Mézard.  - Je ne suis pas rassuré : comment différencier les témoins des suspects ? Vous allez trop vite par rapport à la décision du Conseil constitutionnel. Il y a bien contrainte puisqu'une personne peut être retenue quatre heures au maximum.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Quatre heures au plus !

M. Jacques Mézard.  - Quand on voit comment on peut passer de témoin à gardé à vue, on n'est pas rassuré.

L'amendement n°147 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'alinéa 5 

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'officier de police judiciaire les informe qu'elles peuvent quitter à tout moment les locaux de la police ou de la gendarmerie.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - S'il n'y a aucune contrainte, la personne auditionnée doit être informée qu'elle a toute liberté de s'en aller.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Ces amendements obscurcissent les dispositions du texte. L'article 11 vise les témoins ; ceux-ci peuvent être retenus quatre heures. Si la personne est ensuite placée en garde à vue, les quatre heures seront imputées sur les douze heures. L'article 11 bis vise l'audition libre des suspects ; leur droit de s'en aller leur est notifié. Nous clarifions les choses. Ne revenons pas en arrière ! Rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le texte clarifie effectivement la situation. La décision du Conseil constitutionnel n'emporte pas de conséquences sur les témoins. Retrait ?

Mme Virginie Klès.  - Si le délai des quatre heures d'audition s'impute sur les douze heures de garde à vue, cela est-il pris en compte pour le délai de deux heures laissé à l'avocat pour atteindre le lieu de la détention ?

M. Pierre-Yves Collombat.  - Et ainsi, on atteint six heures !

M. François Zocchetto, rapporteur.  - A mon avis, le délai de deux heures court à partir du moment où la garde à vue est notifiée.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Tout à fait ! L'OPJ devra faire très attention car on ne pourra pas retenir contre le témoin les propos qu'il a tenus hors de la présence d'un avocat. Il n'y aura donc pas d'intérêt à transformer le témoin en gardé à vue !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je suis troublé ! La logique voudrait que l'on interdise de placer un témoin en garde à vue. Sinon, six heures s'écouleront avant que l'avocat ne puisse intervenir.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Ce débat montre que le travail des OPJ est difficile : ils doivent faire preuve d'un grand discernement pour savoir s'ils auditionnent une personne comme témoin ou comme gardé à vue. Le texte clarifie la situation. N'y revenons pas.

M. Jacques Mézard.  - M. Badinter a excellemment souligné l'importance de ce débat. L'article 61 du code de procédure pénale donnera aux OPJ, qui font leur métier d'enquêteurs, la possibilité d'auditionner une personne sans avocat comme témoin, dont les déclarations pourront être retenues, en dépit de l'article 1 A. Nous sommes dans un système hybride parce que le Gouvernement avance à reculons. Je crains qu'à l'avenir, du témoin, on use et abuse.

M. Richard Tuheiava.  - Attention aux articles 11 et 11 bis. Les garanties apportées à la garde à vue ne doivent-elles pas s'appliquer à la comparution si l'on veut éviter de futures dérives ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Il faut savoir raison garder... Nous avons défini clairement la garde à vue, les personnes en charge de son contrôle et ses conditions de prolongation. La comparution, réservée aux témoins, est un régime tout à fait différent. L'objectif n'est pas de placer tout le monde en garde à vue mais de diminuer le nombre des gardés à vue. Témoigner est un acte civique ; la retenue des témoins est légitime. La sûreté est aussi un objectif constitutionnel : il faut donner aux OPJ la possibilité de réaliser leur enquête. Rejet des amendements à l'article 11.

L'amendement n°47 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°130 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 6, première phrase

Remplacer le mot :

plausibles

par le mot :

sérieuses

M. Jacques Mézard.  - Il est plausible que cet amendement ne soit pas accepté. Je m'incline.

L'amendement n°130 rectifié est retiré.

L'amendement n°95 tombe.

M. le président.  - Amendement n°131 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 6, première phrase

Après les mots :

d'une peine 

insérer les mots :

supérieure ou égale à trois ans

M. Jacques Mézard.  - Amendement de conséquence.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - L'amendement est tombé... Défavorable.

L'amendement n°131 rectifié devient sans objet.

M. le président.  - Amendement n°132 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours de l'audition, la personne peut également demander, par un document écrit, à être placée à la disposition des enquêteurs sous le régime de la garde à vue. S'il n'est pas donné suite à cette demande, la personne peut immédiatement quitter les lieux où elle est entendue. S'il est donné suite à cette demande, la garde à vue est réputée avoir débuté dès transmission de cette demande à l'officier de police judiciaire. »

M. Jacques Mézard.  - Cet article 11 crée une zone de non-droit pour la personne « gardée à disposition » des enquêteurs. Elle ne prend fin qu'à son départ ou à son placement en garde à vue : on revient au droit antérieur à 1993 !

La création du statut de témoin assisté avait partiellement résolu le problème. Nous permettons au témoin de demander par écrit à être placée en garde à vue pour bénéficier des garanties afférentes.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - A force de retourner le texte dans tous les sens, on en arrive à des absurdités ! Ce n'est pas la personne entendue qui décide de son statut ! Votre amendement conduirait à ce que la personne reconnaisse qu'elle peut être soupçonnée d'avoir commis l'infraction ! Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Cet amendement me laisse perplexe, même si je devine son objectif.

La garde à vue est une mesure grave, qui vise une personne suspectée d'avoir commis une infraction passible d'emprisonnement !

L'article 2 dispose que seul un OPJ peut placer en garde à vue : on ne peut s'auto-placer au garde à vue. Le témoin peut toujours se taire et partir. Avis défavorable.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Le témoin peut demander à être placé en garde à vue ; il ne se place pas en garde à vue. Vous avez insisté sur le rôle protecteur de la garde à vue : étendons ces droits aux témoins !

Mme Virginie Klès.  - J'approuve ces propos. Un témoin, voyant que l'étau se resserre, peut souhaiter l'assistance d'un avocat !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Je crois aux vertus du débat parlementaire. Vous reconnaissez que ce projet de loi est protecteur : voilà un aveu de nature à nous conforter ! (Mme Virginie Klès le conteste) Merci de votre soutien ! Au bout de quatre heures, soit le témoin est placé en garde à vue, soit il repart chez lui. Les choses sont claires. Si tous les témoins demandent à être placés en garde à vue, on manquera de locaux -et d'avocats ! Cet article 11 est réservé aux témoins, qui ne sont pas tous coupables, loin de là. On ne peut passer d'une culture de l'aveu à une culture de la preuve en se passant des témoignages.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La difficulté vient de l'ambigüité de l'article 11. Quelle est la différence entre le témoin et le gardé à vue, sinon que ce dernier a un avocat ? Le statut du témoin doit offrir davantage de garanties !

M. Jacques Mézard.  - Ce projet de loi marque une avancée, mais vous n'allez pas au bout du chemin. Dans une minorité de cas, la personne est auditionnée comme témoin, alors qu'elle est déjà soupçonnée. Il est normal que cette personne puisse anticiper son placement en garde à vue, quitte à ce que cela lui soit refusé.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Il n'y a aucune raison que les enquêteurs détournent la procédure : cela entraînerait sa nullité. L'OPJ n'est pas le juge et ne peut avoir les mêmes pouvoirs.

L'amendement n°132 rectifié n'est pas adopté.

L'article 11 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°48, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du troisième alinéa de l'article 78-3 du même code, les mots : « quatre heures, ou huit heures » sont remplacés par les mots : « deux heures, ou quatre heures ».

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Amendement de cohérence visant à réduire les durées d'audition ou de rétention des personnes. Je rappelle que le Conseil constitutionnel impose au législateur de concilier la recherche des auteurs d'infractions et la garantie des libertés.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Les contrôles d'identité ne rentrent pas dans le champ du texte. Il ne paraît pas opportun de diviser par deux les durées d'audition de personnes qui refusent de décliner leur identité.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°48 n'est pas adopté.

La séance, suspendue à 17 heures 50, reprend à 17 heures 55.

Article 11 bis

M. Alain Anziani.  - Cet article essentiel est un article d'hypocrisie. Le texte initial prévoyait l'audition libre ; les députés l'ont refusée, mais elle a ressurgi à l'article 11 bis sous de nouveaux habits. Votre but est purement quantitatif : réduire le nombre de gardes à vue. Nous, nous voulons éviter les gardes à vue inutiles et abusives.

Vous inventez donc d'autres solutions. Où est la différence entre audition libre et comparution libre ? C'est blanc bonnet et bonnet blanc ! Quel est le progrès par rapport à la garde à vue ? La personne interpellée reste sous la menace de la garde à vue. Celle qui accepte de comparaître ne bénéficie pas des droits de la garde à vue ! (Marques d'impatience au banc de la commission) Si la personne est suspecte, au sens de la Convention européenne des droits de l'homme, un certain nombre de droits lui sont garantis ; vous les supprimez par un tour de passe-passe. La Cour européenne des droits de l'homme ne manquera pas de censurer cet article.

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - L'article 11 bis issu d'un amendement gouvernemental vise à lutter contre l'automaticité de la garde à vue. L'article précise que les conditions de cette mesure prévues par le présent code sont réunies. Autrement dit, on se trouve dans une situation où les conditions posées à l'article 62-3 sont réunies mais où les droits accordés à toute personne placée en garde à vue ne sont pas assurés.

C'est bien la réintroduction de l'audition libre, supprimée à l'Assemblée nationale.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'article 11 bis est nécessaire. Il inscrit dans la loi une jurisprudence de la Cour de cassation constante selon laquelle le placement en garde à vue n'est justifié que quand il apparaît nécessaire de retenir la personne sous la contrainte. Vos inquiétudes n'ont pas lieu d'être : vous pourriez retirer vos amendements à l'article 11 bis, qui est une avancée.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Il n'y a pas d'audition libre, vous le voyez derrière chaque article, comme l'ombre derrière le soleil ! (Mme Anne-Marie Escoffier cite Zoroastre) Même quand ces conditions de la garde à vue sont réunies, le procureur apprécie si la garde à vue est nécessaire ou non ! Il n'y a pas d'obligation de mettre en garde à vue. L'article 11 bis traduit cette règle. A vous entendre, la garde à vue serait la panacée ; vous dénonciez pourtant tout à l'heure l'état des locaux ! Il y aura désormais beaucoup d'enquête sans garde à vue. On ne peut à la fois restreindre le champ de la garde à vue et vouloir placer tout le monde en garde à vue !

L'audition libre est supprimée : on n'en parle plus ! Soit il y contrainte -dixit Mme Guigou- et la personne bénéficie des droits de la défense, soit la personne vient librement, et repart librement.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Et si elle reste quatre heures ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Vous confondez avec l'article précédent, qui vise le témoin.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le distinguo de Mme Guigou est très clair.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Eh bien, votez l'article !

M. Alain Anziani.  - M. le ministre est très fort car il est de mauvaise foi ! Vous connaissez pourtant notre point de vue : nous voulons que la personne suspecte dispose d'un minimum de droits. Or l'article 11 bis prive le suspect de ces droits, ce qui est contraire à la Convention européenne des droits de l'homme.

L'amendement n°49 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°96, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Dans les cas prévus aux paragraphes I, II et III du présent article l'audition ne peut excéder six heures.

L'auditionné doit, sans délai, être informé, dans une langue qu'il comprend, des faits qui lui sont reprochés, de son droit, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire et la possibilité d'être placé en garde à vue à l'issue de cette audition.

Il peut faire prévenir de la procédure dont il fait l'objet un proche et son employeur. Il doit être informé de son droit d'être examiné par un médecin. Avant le début de cette audition ou au cours de celle-ci, l'intéressé peut demander à bénéficier d'un entretien téléphonique d'une demi-heure avec son avocat ou un avocat commis d'office.

Il peut être mis fin à tout moment, à l'audition, à la demande de l'auditionné, ou sur décision de l'officier de police judiciaire.

La durée de cette audition s'impute sur la durée de la garde à vue.

M. Richard Tuheiava.  - Il s'agit d'encadrer l'audition afin de la rendre conforme aux exigences de la Cour européenne des droits de l'homme.

Nous ne reconnaissons pas les avancées du texte ; nous demandons seulement à pouvoir débattre afin d'éclairer l'intention du législateur.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Défavorable. L'article 11 bis vise les personnes à l'encontre desquelles il existe une raison de soupçonner qu'elles ont commis une infraction. Il faut faire la distinction entre les personnes maintenues sous contrainte et celles qui peuvent quitter à tout moment la gendarmerie ou le commissariat et n'ont donc pas les mêmes garanties.

M. Alain Anziani.  - Comme dans l'audition libre !

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Nous ne sommes pas d'accord : avis défavorable.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Voila un bon argument !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Il peut y avoir enquête sans mesure privative de liberté !

Voulez-vous placer tous les gens suspectés en garde à vue ?

Monsieur Mézard, voulez-vous restreindre le champ de la garde à vue ou l'étendre ? La garde à vue étant une mesure privative de liberté, la Convention européenne des droits de l'homme s'applique, notamment dans son article 5-3 et, compte tenu de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, à l'article 6, alinéas premier et 3.

Les autres sont libres de partir quand ils veulent. Il ne vous reste plus qu'à retirer vos amendements ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Michel.  - Votre texte est une coquille vide ; les avancées sont purement formelles.

Forcés de céder sur l'avocat, vous revenez tout de suite sur cette avancée. Oui, l'avocat est un gêneur : il est là pour empêcher qu'une machine infernale ne s'emballe. Me Le Borgne n'a pas craint de gêner le procès de M. Chirac !

Si la personne convoquée pour une affaire grave refuse de coopérer, elle sera placée en garde à vue ! Les syndicats de police proposent de fixer la durée d'audition à six heures : pas besoin d'avoir toute la lourdeur de la garde à vue, mais au moins un minimum de garanties ! Que la personne entendue dans le cadre de l'article 11 bis puisse au moins prévenir un proche, un employeur ! Les policiers ne sont pas contre.

En l'état, l'article 11 bis encourt la censure constitutionnelle.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Soyons honnêtes. Cet article complète l'article 73 du code de procédure pénale. On nous dit que 200 000 gardes à vue sont liées à des infractions routières : c'est de la flagrance ! Ce sont ces gardes à vue inutiles que nous voulons éviter !

Dire que l'on restitue l'audition libre, c'est exagéré ! (Applaudissements à droite et au centre)

L'amendement n°96 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°133 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours de l'audition, la personne peut également demander, par un document écrit, à être placée à la disposition des enquêteurs sous le régime de la garde à vue. S'il n'est pas donné suite à cette demande, la personne peut immédiatement quitter les lieux où elle est entendue. S'il est donné suite à cette demande, la garde à vue est réputée avoir débuté dès transmission de cette demande à l'officier de police judiciaire. »

M. Jacques Mézard.  - L'article 11 bis est tout en clair-obscur... Certes, on complète l'article 73, qui concerne les délits et crimes flagrants. Mais l'article 11 bis ne s'applique pas quand la personne a été conduite sous la contrainte. (« Bien sûr ! » sur le banc de la commission) Va-t-on la laisser partir quand elle veut ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Il s'agit des cas de flagrance !

M. Jacques Mézard.  - Elle sera placée en garde à vue !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Non ! Elle sera déférée, ou convoquée !

M. Jacques Mézard.  - Quand elle le souhaite, la personne suspectée doit pouvoir faire appel à un avocat. Là est le vrai problème ; vous ne l'avez pas résolu. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Comme à l'article 11, défavorable.

M. Jean-Pierre Michel.  - Perseverare diabolicum...

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Demander allègrement à être placé en garde à vue est un non-sens. La garde à vue est une privation de liberté ! Je vous croyais attachés à la notion de liberté...

La garde à vue, c'est d'abord la privation de liberté.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Eh oui !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Les contreparties sont l'assistance d'un avocat, le droit de prévenir les proches. Il ne faut surtout pas banaliser la garde à vue.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Ce sont les flagrants délits !

Mme Virginie Klès.  - Puisque nous sommes dans un dialogue de sourds (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, marque son agacement), répétons ce que nous disons depuis le début : toute personne entendue doit pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Si on ne place pas la personne interpelée en garde à vue, pourquoi la retenir ? Elle sera convoquée plus tard, c'est tout !

M. Jacques Mézard.  - Nous entendre accusés de vouloir augmenter le nombre de gardes à vue par un gouvernement qui y place 800 000 Français chaque année, c'est un peu fort de café ! (Applaudissements sur les bancs socialistes) La vérité est que ce projet de loi est rendu nécessaire par les dérives constatées dans la procédure.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Depuis cinquante ans !

M. Jacques Mézard.  - Si vous voulez ! Je note cependant que le mouvement s'est accéléré ces dernières années... Notre procédure pénale restera fragile tant que l'avocat ne pourra pas assister à l'audition. Le problème de l?article 11 bis, c'est celui-là. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - C'est faux !

L'amendement n°133 rectifié n'est pas adopté.

L'article 11 bis est adopté.

Article 12

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous sommes pour l'abrogation des régimes dérogatoires au droit commun en matière de garde à vue. Ce serait plus conforme à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. La CNCDH l'a souligné. De fait, les exceptions à la règle sont légion ; on n'a cessé depuis des années de prendre prétexte du terrorisme pour justifier le durcissement de l'arsenal répressif. Le juge Thiel a évoqué une extension insidieuse et Mme Mireille Delmas-Marty a souligné à raison l'impact indirect des attentats de 2001 sur notre procédure pénale. La loi du 5 janvier 2011, en son article 5, prévoit un nouveau régime dérogatoire en matière de lutte contre la piraterie. Il faut se souvenir que les personnes interpelées dans l'affaire de Tarnac ont été placés en garde à vue pour pas moins de 96 heures -avant d'être relâchées en raison de la fragilité de l'accusation.

Les régimes dérogatoires portent une atteinte disproportionnée à la présomption d'innocence, quelle que soit la gravité de l'infraction.

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 706-88 du code de procédure pénale est abrogé.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je l'ai défendu.

M. le président.  - Amendement n°52, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger ainsi cet article :

Le sixième alinéa de l'article 706-88 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° A la première phrase, les mots : « , à l'issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure » sont supprimés ;

2° La seconde phrase est supprimée.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'intervention de l'avocat ne doit pas être différée. Si le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur les régimes dérogatoires, ses conclusions doivent aussi s'appliquer. Plus l'infraction est grave, plus l'avocat est nécessaire. L'affaire de Tarnac a bien illustré les risques de qualification abusive...

M. le président.  - Amendement n°134 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéas 3 à 6

Supprimer ces alinéas.

M. Jacques Mézard.  - La logique est de ne plus restreindre l'accès à l'avocat, d'autant que la personne, dans le cadre des régimes dérogatoires, est placée pour de longues heures en garde à vue. L'affaire de Tarnac a montré que la qualification initiale des faits n'avait rien d'anodin ; elle détermine le régime juridique applicable. Or la garde à vue ne peut être un pré-jugement. Quelque dix-sept infractions justifient les régimes dérogatoires. La présence d'un défenseur n'altérera pas le travail de l'enquête. Enfin, les avocats seront choisis sur une liste. Bref, tout concours à la présence de l'avocat !

M. le président.  - Amendement n°97, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 5

1° Première et troisième phrases

Supprimer ces phrases.

2° Deuxième phrase 

Rédiger ainsi cette phrase :

Le report de l'intervention de l'avocat est décidé dans les limites fixées au sixième alinéa par le juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République ou du juge d'instruction lorsque la garde à vue intervient dans le cadre d'une commission rogatoire.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - Selon la Cour de Strasbourg et la Cour de cassation, seule une raison impérieuse, qui ne peut découler de la seule nature de l'infraction, peut justifier une restriction au droit du gardé à vue d'être assisté d'un avocat dès le début de la garde à vue. Le report ne peut être qu'exceptionnel et autorisé par le JLD.

L'amendement n°8 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°135 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par les mots :

, établie par le conseil de l'ordre de chaque barreau

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les modalités d'application de l'alinéa précédent sont définies par décret en Conseil d'État. »

M. Jacques Mézard.  - Dans les cas de terrorisme, la liste des avocats habilités doit être établie par les différents conseils de l'ordre, et non par le conseil national des barreaux. En quoi ce dernier est-il compétent en l'espèce ? La disposition proposée, inspirée de l'expérience espagnole, est sage. Nous voulons simplement l'améliorer.

M. le président.  - Sous-amendement n°181 à l'amendement n°135 rectifié de M. Mézard, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3 de l'amendement n° 135 rect. bis

Remplacer les mots :

par le conseil de l'ordre

par les mots :

par le bureau du Conseil national des barreaux sur propositions des conseils de l'ordre

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous proposons un compromis : les avocats seront choisis sur une liste établie par le bureau du Conseil national des barreaux sur propositions des conseils de l'ordre de chaque barreau.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des articles 63-5, 63-6, 63-7 et 63-8 sont applicables à toute la durée de la procédure. »

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Les règles du procès équitable et du respect du droit à la dignité doivent impérativement s'appliquer aux régimes dérogatoires. Pour la Cour de cassation, le régime dérogatoire prévu par le septième alinéa de l'article 63-4 et l'article 706-88 est contraire à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Les régimes dérogatoires se justifient par la complexité et la gravité des affaires concernées. Le Conseil constitutionnel les a jugés conformes en 2004. La CEDH les reconnaît également, à condition qu'ils fassent l'objet d'un contrôle effectif. C'est le cas en droit français. En outre, ce texte apporte des améliorations : le report de la présence de l'avocat devra être motivé au cas par cas. Supprimer les régimes dérogatoires nuirait considérablement au travail d'enquête dans les affaires de délinquance organisée et de terrorisme. Rejet de l'amendement n°50.

Quant aux amendements nos52, 134 rectifié et 97, je rappelle que le report de la présence de l'avocat ne sera plus automatique mais devra être justifié au cas par cas en fonction des circonstances de l'espèce. Le texte respecte les exigences de la Cour de cassation et de la CEDH. Défavorable, ainsi qu'à l'amendement n°97 : le délai de 24 heures est inférieur aux quatre jours évoqués dans la jurisprudence européenne.

La commission a émis un avis favorable à l'amendement n°135 rectifié bis. Dans un souci de compromis avec l'Assemblée nationale, le Gouvernement a proposé une rédaction qui, à titre personnel, me semble acceptable : les conseils de l'ordre feront des propositions ; le Conseil national des barreaux arrêtera la liste.

Rejet de l'amendement n°51 : tout ce qui vaut pour les régimes de droit commun en matière de dignité vaut pour les régimes dérogatoires, cela va de soi. Retrait, sinon rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le Gouvernement considère indispensable de maintenir les régimes dérogatoires pour lutter contre la criminalité organisée, le trafic de stupéfiants ou le terrorisme. Ils ont prouvé leur efficacité, les supprimer est inenvisageable. D'autant qu'aucune juridiction ne le demande et qu'ils sont strictement encadrés ; ne privons pas l'État de cette arme que la Cour de cassation et la CEDH ont jugée valide. Favorable à l'amendement n°135 rectifié bis que le Gouvernement sous-amende ; rejet des autres amendements.

L'amendement n°50 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos52, 134 rectifié et 97.

M. Jacques Mézard.  - Le sous-amendement n°181 ne résout pas tous les problèmes. Initialement, le texte proposait une liste nationale établie par le conseil national des barreaux, sans consultation des conseils de l'ordre locaux. Quelle est la compétence du conseil national en la matière ? Comment cet organe de 80 personnes pourrait-il établir la liste ?

Notre souci est que figurent sur cette liste des avocats reconnus par leurs pairs dans chaque barreau, qui ont l'expérience des affaires difficiles. Seuls les conseils de l'ordre, qui ont la compétence disciplinaire, peuvent y parvenir. En France, je ne connais pas d'avocats spécialisés dans les affaires de terrorisme, mais j'en connais auxquels on peut faire confiance pour défendre leurs clients dans l'intérêt général et le respect des règles... Mon amendement est la solution de sagesse. Et ce décret en Conseil d'État m'inquiète un peu...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Une liste arrêtée par le conseil national des barreaux est une garantie supplémentaire. Les conseils de l'ordre feront des propositions. C'est le sens du sous-amendement du Gouvernement. Vous devez donc, monsieur Mézard, être rassuré. Et le décret en Conseil d'État est dans votre amendement...

Le sous-amendement n°181 est adopté.

L'amendement n°135 rectifié bis, sous-amendé, est adopté.

L'amendement n°51 n'est pas adopté.

L'article 12, modifié, est adopté.

L'article 13 est adopté.

Les amendements nos136 rectifié, 137 rectifié et 138 rectifié sont devenus sans objet.

L'article 14 est adopté.

Article 14 bis

M. le président.  - Amendement n°139 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Alinéa 5

Après les mots :

d'une peine

insérer les mots :

supérieure ou égale à trois ans

M. Jacques Mézard.  - Le Conseil constitutionnel a exigé du législateur, dans sa décision du 22 septembre 2010, qu'il remédie au déséquilibre entre prévention des atteintes à l'ordre public et préservation des droits de la défense en matière de retenue douanière. Par cohérence, nous souhaitons que la retenue douanière soit subordonnée à la commission d'un flagrant délit douanier puni d'au moins trois ans d'emprisonnement.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Par analogie avec la garde à vue, la commission considère que réserver la retenue douanière aux faits encourant une peine de trois ans n'est pas justifié. Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Nous avons aligné la retenue douanière sur la garde à vue, conformément aux exigences du Conseil constitutionnel. Rejet.

L'amendement n°139 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Je défends simultanément les amendements nos53 et 55. Nos réserves sur la garde à vue valent pour la retenue douanière : son contrôle doit être confié à un juge du siège ; elle doit être limitée à 24 heures ; l'avocat doit intervenir dès le début de la privation de liberté. La Charte des douaniers fait d'ailleurs mention du droit à l'assistance d'un conseil.

M. le président.  - Amendement n°140 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

I. - Alinéa 7

Remplacer les mots :

sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République

par les mots :

par une décision motivée du juge des libertés et de la détention

II. - Alinéa 8

Remplacer les mots :

L'autorisation est accordée

par les mots :

La décision est rendue

M. Jacques Mézard.  - Cette défense vaudra pour l'amendement n°141 rectifié. Nous faisons du JLD le magistrat référent de la retenue douanière.

M. le président.  - Amendement n°98, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 7

Remplacer les mots :

procureur de la République

par les mots :

juge des libertés et de la détention

M. Alain Anziani.  - Toujours la même logique...

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Rappelons que nous parlons d'infractions lourdes qui confinent avec la criminalité organisée -contrebande, blanchiment, défaut de déclaration de transferts de capitaux... Les enquêteurs ont besoin de moyens pour travailler. Dans ces affaires, une retenue limitée à 24 heures est irréaliste ! En deçà de 48 heures, le contrôle de la retenue est confié au procureur, qui devra motiver par écrit la prolongation au-delà de 24 heures ; au-delà de 48 heures, celle-ci devra être autorisée par le JLD. Rejet.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis pour les raisons déjà évoquées.

L'amendement n°54 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos140 rectifié et 98.

M. le président.  - Amendement n°53, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 12

Remplacer les mots :

procureur de la République

par les mots :

juge des libertés et de la détention

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°141 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

M. Jacques Mézard.  - Il est défendu.

Les amendements identiques n°s53 et 141 rectifié, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°172, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission.

Alinéa 14

1° Première phrase

Remplacer les mots :

un proche et son employeur

par les mots :

un proche ou son curateur ou son tuteur, de faire prévenir son employeur

2° Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Lorsque la personne placée en retenue douanière est de nationalité étrangère, elle peut faire contacter les autorités consulaires de son pays.

L'amendement de coordination n°172, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 15

Supprimer cet alinéa.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°142 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

M. Jacques Mézard.  - Rien ne justifie que puisse être différée l'assistance de l'avocat. En matière de retenue douanière, cette limitation des droits paraît complètement disproportionnée !

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

Les amendements identiques nos55 et 142 rectifié ne sont pas adoptés.

L'article 14 bis, modifié, est adopté.

L'article 14 ter est adopté.

Irrecevabilité d'une proposition de résolution

M. le président.  - Par courrier en date de ce jour, M. le Premier ministre a fait connaître à M. le président du Sénat qu'il estime irrecevable la proposition de résolution, présentée par Mme Annie David et plusieurs de ses collègues, en application de l'article 34-1 de la Constitution, relative à la mise en conformité du droit français concernant le régime des astreintes et le système de forfaits en jours sur l'année considérés par le Comité européen des droits sociaux comme violant différentes dispositions de la Charte sociale européenne révisée, déposée le 4 mars 2011.

J'informe le Sénat que Mme Annie David a décidé de rectifier le texte de cette proposition de résolution, qui va être adressée au Premier ministre.

CMP (Nominations)

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution de commissions mixtes paritaires sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique et du projet de loi relatifs au Défenseur des droits.

En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du jeudi 3 mars prennent effet.

Garde à vue (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 15

M. le président.  - Amendement n°56, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 4 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est ainsi rédigé :

« Art. 4.-I. - Le mineur de dix-sept ans ne peut être placé en garde à vue. Toutefois, à titre exceptionnel, le mineur de treize ans à dix-sept ans contre lequel il existe des indices graves ou concordants laissant présumer qu'il a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement peut, pour les nécessités de l'enquête, être retenu à la disposition d'un officier de police judiciaire avec l'accord préalable et sous le contrôle d'un juge des enfants, pour une durée que ce magistrat détermine et qui ne saurait excéder douze heures. Cette retenue peut toutefois être prolongée à titre exceptionnel par décision motivée de ce magistrat pour une durée qui ne saurait non plus excéder douze heures, après présentation devant lui du mineur, sauf si les circonstances rendent cette présentation impossible. Elle doit être strictement limitée au temps nécessaire à la déposition du mineur et à sa présentation devant le magistrat compétent ou à sa remise à l'une des personnes visées au II du présent article.

« II. - Lorsqu'un mineur est retenu, l'officier de police judiciaire doit informer immédiatement de cette mesure les parents, le tuteur, la personne ou le service auquel est confié le mineur.

« III. - Dès le début de la retenue prévue au I, le procureur de la République ou le juge chargé de l'information doit désigner un médecin qui examine le mineur dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article 63-3 du code de procédure pénale.

« IV. - Dès le début de la retenue, le mineur doit être immédiatement informé de son droit à être assisté par un avocat ; il peut demander à s'entretenir avec un avocat, dans les conditions prévues à l'article 63-4 du code de procédure pénale. Lorsque le mineur n'a pas sollicité l'assistance d'un avocat, cette demande peut également être faite par ses représentants légaux qui sont alors avisés de ce droit lorsqu'ils sont informés de la retenue en application du II. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Au fil des modifications de l'ordonnance de 1945, les droits des mineurs ont été réduits. Le Conseil constitutionnel a pourtant censuré l'extension de la garde à vue aux mineurs de 13 ans. Il y a un an, la Défenseure des enfants avait mis en garde contre la garde à vue trop systématique des mineurs, à la suite d'une affaire impliquant une jeune fille de 14 ans. Les mineurs en conflit avec la loi restent des enfants et doivent être traités comme tels.

Nous supprimons la possibilité de mettre un mineur en garde à vue mais maintenons la possibilité exceptionnelle de retenir le mineur à disposition d'un OPJ.

L'amendement n°143 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°58, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 6 

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La garde à vue du mineur cesse de plein droit si un examen médical n'a pas été effectué dans les six heures qui suivent le début de la mesure de garde à vue.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Aux termes de l'article 4, le mineur de 16 ans peut demander un examen médical mais ce droit n'est pas toujours respecté, comme l'a dénoncé la CNDS qui rappelle le caractère absolu des droits des mineurs en garde à vue. Le Comité européen pour la prévention de la torture préconise un rappel de règles en la matière.

M. le président.  - Amendement n°144 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la seconde phrase du V, les mots : « au procureur de la République ou au juge d'instruction du lieu d'exécution de la mesure » sont remplacés par les mots : « au juge chargé de l'information ou au juge des enfants » ;

M. Jacques Mézard.  - Il s'agit de concilier la garde à vue avec les spécificités de la justice des mineurs. Notre amendement renforce les garanties qui bénéficient aux mineurs, dont la responsabilité est atténuée. La présentation physique du mineur doit se faire devant un magistrat spécialisé.

M. le président.  - Amendement n°59, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'alinéa 8

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Le premier alinéa du VI est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Cet enregistrement est considéré comme une formalité substantielle au sens de l'article 171 du code de procédure pénale. » 

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous reprenons la jurisprudence, notamment les arrêts du 3 avril 2007 et du 26 mars 2008 de la Cour de cassation.

M. le président.  - Amendement n°57, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 9 

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

4° Le VII est ainsi rédigé :

« VII. - Les dispositions de l'article 706-88 du code de procédure pénale ne sont pas applicables. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les dispositions de l'article 706-88 du code de procédure pénale sont particulièrement attentatoires à la liberté individuelle et ne sauraient se justifier pour un mineur.

M. le président.  - Amendement n°60, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° À la première phrase du quatrième alinéa du VI, les mots : « impossibilité technique » sont remplacés par les mots : « cause insurmontable » et les mots : « de cette impossibilité » sont remplacés par les mots : « de cette cause ».

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - La circulaire du 9 mai 2001 précise que « seule une cause insurmontable qui fera l'objet d'un avis au magistrat compétent et d'une information spécifique du mineur pourra justifier l'absence d'enregistrement ». L'absence d'enregistrement des interrogatoires des mineurs placés en garde à vue ne peut donc se justifier en raison d'une simple impossibilité technique.

L'amendement n°145 est retiré.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Dans le droit actuel, la garde à vue des mineurs est possible à partir de 13 ans ; les mineurs de 10 à 13 ans peuvent faire l'objet d'une retenue de 24 heures maximum, pour des crimes punis de plus de cinq ans.

Le régime, validé par le Conseil constitutionnel, est bien encadré. Défavorable à l'amendement n°56.

Les représentants légaux d'un mineur de plus de 16 ans pourront demander pour lui un examen médical ; si l'enquêteur passait outre, il risquerait la nullité. La décision ne peut dépendre du médecin. Défavorable à l'amendement n°58, ainsi qu'à l'amendement n°144 rectifié.

L'amendement n°59, qui traduit une jurisprudence de la Cour de cassation, entraînerait un risque d'interprétation a contrario. Défavorable.

Le régime dérogatoire peut s'appliquer aux mineurs de 16 à 18 ans : défavorable à l'amendement n°57.

La commission avait émis un avis favorable à l'amendement n°60 mais il y a un risque d'interprétation concernant l'interrogatoire des majeurs dont le régime sera différent. Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Le projet de loi renforce les garanties en matière de garde à vue des mineurs mais il faut conserver ce régime, compte tenu du développement de la délinquance des mineurs. Défavorable aux amendements nos56, 58, 144 rectifié, 59 et 57. Sur l'amendement n°60, la circulaire du 9 mai 2001 prévoit que seule une cause insurmontable justifie l'absence d'enregistrement. La rédaction actuelle de l'article 4 de l'ordonnance de 1945, qui résulte de la loi de 2007, rend toutefois cette circulaire caduque... Avis défavorable : il s'agit pour le Sénat de confirmer ses positions antérieures.

L'amendement n°56 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos58, 144 rectifié, 59 et 57.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il faudra m'expliquer pourquoi tant de mineurs de 15 ans se sont retrouvés placés en garde à vue abusivement... Comment va-t-on réduire leur nombre ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Ce sera l'objet d'une prochaine loi.

L'amendement n°60 n'est pas adopté.

L'article 15 est adopté.

Article 15 bis

M. le président.  - Amendement n°161, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 8

Insérer vingt-et-un alinéas ainsi rédigés :

III bis. - Le dernier alinéa de l'article 627-5 du même code est ainsi rédigé :

« S'il décide de ne pas laisser en liberté la personne réclamée, le procureur de la République la présente au juge des libertés et de la détention qui ordonne son incarcération à la maison d'arrêt. Toutefois, s'il estime que sa représentation à tous les actes de la procédure est suffisamment garantie au regard des principes édictés à l'article 59 du Statut de Rome, le juge des libertés et de la détention peut soumettre la personne réclamée, jusqu'à sa comparution devant la chambre de l'instruction, à une ou plusieurs des mesures prévues aux articles 138 et 142-5. Les dispositions de l'article 696-21 sont applicables. »

III ter. - L'article 695-28 du même code est ainsi modifié :

1° Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa  ainsi rédigé :

« À la suite de la notification du mandat d'arrêt européen, s'il décide de ne pas laisser en liberté la personne recherchée, le procureur général la présente au premier président de la cour d'appel ou au magistrat du siège désigné par lui » ;

2° Aux premier et deuxième alinéas, les mots : « le procureur général » sont remplacés par les mots : « le premier président de la cour d'appel ou le magistrat du siège désigné par lui » ;

3° Au quatrième alinéa, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le procureur général ».

III quater. - L'article 696-11 du même code est ainsi modifié :

1° Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À la suite de la notification de la demande d'extradition, s'il  décide de ne pas laisser en liberté la personne réclamée, le procureur général  la présente au premier président  de la cour d'appel ou au magistrat du siège désigné par lui » ;

2° Aux premier et deuxième alinéas, les mots : « le procureur général » sont remplacés par les mots : « le premier président de la cour d'appel ou le magistrat du siège désigné par lui ».

III quinquies. - Au premier alinéa de l'article 696-20 du même code, les mots : « ou la modification de celui-ci » sont remplacés par les mots : « de l'assignation à résidence sous surveillance électronique ou la modification de ceux-ci ».

III sexies. - L'article 696-23 du même code est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « et son placement sous écrou extraditionnel » sont supprimés ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Après avoir vérifié son identité, le procureur général informe la personne réclamée, dans une langue qu'elle comprend, de l'existence et du contenu de la demande d'arrestation provisoire. S'il décide de ne pas la laisser en liberté, le procureur général la présente au premier président de la cour d'appel ou au magistrat désigné par lui, qui statue conformément aux dispositions de l'article 696-11. »

III septies. - Au troisième alinéa de l'article 706-71 du même code, les mots : « ou d'un mandat d'arrêt européen » sont remplacés par les mots : « d'un mandat d'arrêt européen, d'une demande d'arrestation provisoire, d'une demande d'extradition ou d'une demande d'arrestation aux fins de remise, à la présentation au juge des libertés et de la détention, au premier président de la cour d'appel ou au magistrat désigné par lui en application des articles 627-5, 695-28, 696-11 et 696-23 si la personne est détenue pour une autre cause ».

III octies. - Au premier alinéa des articles 627-9 et 696-32 du même code, après les mots : « La mise en liberté », sont insérés les mots : « ou la mainlevée ou la modification du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence sous surveillance électronique ».

III nonies. - À la première phrase du deuxième alinéa des articles 695-28 et 696-11 du même code et au troisième alinéa des articles 695-34 et 696-19 du même code, les mots : « à l'article 138 » sont remplacés par les mots : « aux articles 138 et 142-5 ».

III decies. - À l'avant dernier alinéa de l'article 695-28 du même code et au dernier alinéa de l'article 696-11 du même code, après les mots : « sous contrôle judiciaire », sont insérés les mots : « ou sous assignation à résidence sous surveillance électronique », et sont ajoutés les mots : « ou de l'assignation à résidence sous surveillance électronique ».

III undecies. - Au premier alinéa de l'article 695-35 du même code et aux premier et quatrième alinéas des articles 695-36 et 696-21 du même code, après les mots : « contrôle judiciaire », sont insérés les mots : « ou de l'assignation à résidence sous surveillance électronique ».

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Cet amendement tire les conséquences de l'arrêt Moulin rendu le 23 novembre 2010 par la Cour européenne des droits de l'homme en matière d'entraide judiciaire internationale. Il appartiendra au procureur de la République, s'il n'entend pas laisser en liberté la personne interpellée, de présenter sans délai l'intéressé à un magistrat du siège afin que ce dernier décide d'un éventuel placement sous écrou extraditionnel ou sous contrôle judiciaire.

Le Gouvernement n'a eu de cesse d'appliquer immédiatement la jurisprudence !

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Favorable à ces coordinations opportunes.

L'amendement n°161 est adopté.

L'article 15 bis, modifié, est adopté.

L'article 15 ter demeure supprimé, de même que l'article 15 quater.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°146 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi.

Après l'article 15 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 269 du même code est complété par les mots : « , ladite maison d'arrêt étant située dans le ressort du tribunal de grande instance dont relève la cour d'assises ».

M. Jacques Mézard.  - L'accusé renvoyé devant la cour d'assises doit, dès que sa mise en accusation est devenue définitive, être transféré dans la maison d'arrêt du département où se tient son procès. Il s'agit d'éviter des déplacements éprouvant et coûteux. C'est une mesure de sagesse et d'aménagement du territoire.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Outre que cet amendement est de nature réglementaire, il ne présente guère de lien avec le projet de loi. Sans doute est-ce un amendement d'appel... Retrait ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - C'est un amendement très intéressant, je ne dis pas intéressé. M. Vall est cosignataire ; à ma connaissance, il n'y a pas de maison d'arrêt dans le Gers et tout s'y passe bien. Je répondrai à M. Mézard. Retrait ?

M. Jacques Mézard.  - Temporaire !

L'amendement n°146 rectifié est retiré.

Article 16

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Le budget affecté à l'aide juridictionnelle est très insuffisant. L'accès au droit est pourtant une priorité. Le mécontentement gronde dans les barreaux. La question de la rétribution des avocats est un point de tension. Il convient de les rémunérer plus justement et de prévoir le financement de toute extension de l'aide juridictionnelle. L'étude d'impact publiée n'est pas satisfaisante.

M. le président.  - Amendement n°61, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Après l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - La loi assure une implication équitable entre les avocats des missions éligibles à l'aide juridictionnelle. Une participation effective et équitable de tous les avocats est assurée soit par la prise en charge de dossiers éligibles à l'aide juridictionnelle, soit par une participation financière volontaire. Cette participation, répartie entre les avocats prenant en charge des dossiers éligibles à l'aide juridictionnelle, alimente un fonds autonome.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - L'aide juridictionnelle n'est pas une priorité de l'État. Le régime repose sur la bonne volonté de la profession. Il faut améliorer le taux horaire de référence, via un fonds dédié. Il faut par ailleurs une répartition plus équitable au sein de la profession.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - La question du financement de l'aide juridictionnelle est complexe. En 2010, la totalité des crédits étaient consommés dès octobre ! Le Sénat s'est penché sur la question avec le rapport du Luart. Les pistes sont nombreuses.

Le présent projet de loi n'est pas le véhicule adapté. La question doit faire l'objet d'une concertation avec la profession. Retrait, sinon rejet. Monsieur le garde des sceaux, toutes les conséquences financières de cette réforme concernant l'aide juridictionnelle ont-elles été évaluées ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Retrait, sinon rejet. La réforme de la garde à vue aura un coût important : il va falloir porter le financement de l'aide juridictionnelle de 15 à 80 millions. Seule une loi de finances peut traiter de cette question.

J'ai commencé à rencontrer les représentants des avocats ; il faudra faire de vrais efforts pour que chacun puisse être défendu correctement.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - J'espère que le Gouvernement se penchera sur le sujet et que nous pourrons bientôt en débattre.

L'amendement n°61 est retiré.

L'article 16 est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°62, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le juge judiciaire peut soulever d'office l'ensemble des vices qui affectent la procédure de placement et de déroulement de la garde à vue.

II. - Constitue une nullité faisant nécessairement grief à la personne placée en garde à vue notamment :

1° La méconnaissance des dispositions relatives aux conditions de placement en garde à vue et l'absence de proportionnalité dans leur mise en oeuvre ;

2° Le retard ou l'absence de notification ou de la mise en oeuvre des droits en garde à vue ;

3° La mise en oeuvre disproportionnée des fouilles et des mesures de sécurité ;

4° Le non-respect de la dignité humaine, notamment en ce qui concerne les conditions matérielles de la garde à vue ;

5° Le non-respect des dispositions de la Convention européenne des Droits de l'Homme.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous précisons la liste des nullités qui font nécessairement grief. L'effectivité des dispositions du projet de loi en dépend.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - L'article 102 du code de procédure pénale et la jurisprudence constante de la Cour de cassation suffisent. Attention à la tentation de l'exhaustivité... Défavorable.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n° 62 n'est pas adopté.

L'article 17 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°162, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code des douanes de Mayotte est ainsi modifié :

1° L'intitulé du paragraphe 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre XI est complété par les mots : « et retenue douanière » ;

2° Le 3 de l'article 193 est abrogé ;

3° Le paragraphe 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre XI est complété par dix articles 193-1 à 193-10 ainsi rédigés :

« Art. 193-1. - Les agents des douanes ne peuvent procéder à l'arrestation et au placement en retenue douanière d'une personne qu'en cas de flagrant délit douanier puni d'une peine d'emprisonnement et lorsque cette mesure est justifiée par les nécessités de l'enquête douanière.

« Art. 193-2. - La durée de la retenue douanière ne peut excéder vingt-quatre heures.

« Toutefois, la retenue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République, si les nécessités de l'enquête douanière le justifient.

« L'autorisation est accordée dans les conditions prévues au II de l'article 63 du code de procédure pénale.

« Art. 193-3. - Dès le début de la retenue douanière, le procureur de la République dans le ressort duquel est constaté le flagrant délit en est informé par tout moyen.

« Il est avisé de la qualification des faits qui a été notifiée à la personne. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues à l'article 193-6.

« Si la mesure doit être exécutée dans un autre ressort que celui du procureur de la République où l'infraction a été constatée, ce dernier en est informé.

« Art. 193-4. - La retenue douanière s'exécute sous le contrôle du procureur de la République qui assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne retenue.

« Il peut se transporter sur les lieux pour vérifier les modalités de la retenue et se faire communiquer les procès-verbaux et registres prévus à cet effet.

« Art. 193-5. - La personne placée en retenue douanière bénéficie du droit de faire prévenir un proche et son employeur, d'être examinée par un médecin et de l'assistance d'un avocat dans les conditions et sous les réserves définies aux articles 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4, 63-4-1, 63-4-2, 63-4-3 et 63-4-4 du code de procédure pénale. Les attributions conférées à l'officier de police judiciaire par les articles 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4-2 et 63-4-3 du même code sont exercées par un agent des douanes.

« Lorsque la personne est retenue pour un délit douanier mentionné au dernier alinéa de l'article 282 ou à l'article 283 du présent code ou pour un délit connexe à une infraction mentionnée à l'article 706-73 du code de procédure pénale, l'intervention de l'avocat peut être différée dans les conditions prévues aux sixième à huitième alinéas de l'article 706-88 du même code. 

« Art. 193-6. - La personne placée en retenue douanière est immédiatement informée par un agent des douanes, dans les conditions prévues à l'article 63-1 du code de procédure pénale :

« 1° De son placement en retenue ainsi que de la durée de la mesure et de la prolongation dont celle-ci peut faire l'objet ;

« 2° De la nature et de la date présumée de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre ;

« 3° Du fait qu'elle bénéficie des droits énoncés à l'article 193-5 du présent code ;

« 4° Du fait qu'elle a le choix, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

« Mention de l'information donnée en application du présent article est portée au procès-verbal et émargée par la personne retenue. En cas de refus d'émargement, il en est fait mention.

« Art. 193-7. - Les articles 63-5 et 63-6 et le premier alinéa de l'article 63-7 du code de procédure pénale sont applicables en cas de retenue douanière.

« Les mesures de sécurité mentionnées à l'article 63-6 du même code sont limitativement énumérées par arrêté du ministre chargé des douanes.

« Les attributions conférées à l'officier de police judiciaire par l'article 63-7 du même code sont exercées par un agent des douanes.

« Art. 193-8. - Le procès-verbal de retenue douanière est rédigé conformément au I de l'article 64 du code de procédure pénale.

« Figurent également sur un registre spécial tenu, éventuellement sous forme dématérialisée, dans les locaux de douane susceptibles de recevoir une personne retenue, les mentions prévues au premier alinéa du II du même article 64.

« Art. 193-9. - À l'issue de la retenue douanière, le procureur de la République peut ordonner que la personne retenue soit présentée devant lui, un officier de police judiciaire ou un agent des douanes habilité en application de l'article 28-1 du code de procédure pénale ou qu'elle soit remise en liberté.

« Lorsque les personnes retenues sont placées en garde à vue au terme de la retenue, la durée de celle-ci s'impute sur la durée de la garde à vue.

« Art. 193-10. - En cas de flagrant délit douanier commis par un mineur, la retenue douanière se déroule dans les conditions prévues à l'article 4 de l'ordonnance n°45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. »

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Cet amendement procède à l'intégration formelle des dispositions modifiant la retenue douanière dans l'ordonnance du 12 octobre 1992 relative au code des douanes applicable à Mayotte.

M. le président.  - Sous-amendement n°173 à l'amendement n°162 du Gouvernement, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission.

Alinéa 15 de l'amendement n° 162

1° Première phrase

Remplacer les mots :

un proche et son employeur

par les mots :

un proche ou son curateur ou son tuteur, de faire prévenir son employeur

2° Après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Lorsque la personne placée en retenue douanière est de nationalité étrangère, elle peut faire contacter les autorités consulaires de son pays.

Le sous-amendement n°173, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'amendement n°162, sous-amendé, est adopté ; l'article additionnel est inséré.

Article 18

M. le président.  - Amendement n°180, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les dispositions de la présente loi sont applicables aux mesures de garde à vue prises à compter de son entrée en vigueur.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - A titre personnel, favorable.

L'amendement n°180 est adopté.

L'article 18, modifié, est adopté.

Seconde délibération

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - En application de l'article 43-4 du Règlement du Sénat, je demande une seconde délibération sur l'article 7 du projet de loi.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Il y a en effet une incohérence dans ce que nous avons voté à l'article 7 : avis favorable.

La seconde délibération est ordonnée.

M. le président.  - Amendement n°A-1, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 5

Remplacer les mots :

l'officier de police judiciaire à débuter l'audition

par les mots :

sur demande de l'officier de police judiciaire, que l'audition débute

II. - Alinéa 6

Remplacer les mots : 

l'officier de police judiciaire peut être autorisé, par décision écrite et motivée prise, selon les distinctions prévues par l'alinéa suivant, par le procureur de la République ou par le juge des libertés et de la détention, à différer la présence de l'avocat lors des auditions

par les mots : 

sur demande de l'officier de police judiciaire, le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention, selon les distinctions prévues par l'alinéa suivant, peut autoriser, par décision écrite et motivée, le report de présence de l'avocat lors des auditions

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Seul un officier de police judiciaire peut placer une personne en garde à vue. Il est évident que c'est l'OPJ qui dirige l'enquête mais il peut être assisté d'un APJ qui peut auditionner, sous la responsabilité et le contrôle de l'OPJ. Il y a 163 000 APJ, contre 53 000 OPJ.

En revanche, l'OPJ seul peut demander le report de l'avocat au procureur de la République. Il faut réécrire l'article en ce sens.

M. François Zocchetto, rapporteur.  - Je porte la responsabilité de cette seconde délibération avec M. Mézard... Supprimer les termes « APJ » prêtait à confusion. L'amendement du Gouvernement rappelle sans ambiguïté que seul l'OPJ place en garde à vue mais ne méconnaît pas que l'APJ peut mener les auditions. En tout état de cause, tout est soumis au procureur de la République. A titre personnel, favorable.

M. Jacques Mézard.  - Il ne faudrait pas que l'on modifie le rôle des APJ, qui ne peuvent réaliser que certains actes, sous le contrôle des APJ. Je lis dans l'objet de l'amendement que c'est « la pratique courante » que les APJ auditionnent les gardés à vue dans le cadre de l'article 20 du code. Attention !

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Seules les paroles que je prononce devant le Sénat m'engagent. L'OPJ est le patron, secondé par l'APJ. Les choses sont claires.

L'amendement n°A-1 est adopté.

Vote sur l'ensemble

M. Alain Anziani.  - Cette réforme vous a été imposée d'abord par la Cour européenne des droits de l'homme puis, surtout, par le Conseil constitutionnel, enfin par la jurisprudence de la Cour de cassation. Mais vous réformez a minima : deux pas en avant, un en arrière, comme un danseur de tango...

Nous déplorons l'insuffisance du pouvoir du juge judiciaire. Il fallait des seuils de déclenchement de la garde à vue bien plus élevés. Un suspect doit disposer de droits. Or, il n'aura pas droit à un avocat...

A l'heure du vote, nous regardons les deux plateaux de la balance.

Sur l'un, les points positifs : présence de l'avocat, pas de garde à vue sans peine d'emprisonnement encourue.

Dans l'autre plateau, il y a l'inconstitutionnalité et l'inconventionnalité de ce texte. Au surplus, il y a le risque d'une garde à vue à deux vitesses : une pour les riches, une pour les pauvres. Pendant des années, nous avons combattu pour la présence de l'avocat ; pendant des années, vous nous l'avez refusée : nous ne pouvons voter contre. Nous nous abstiendrons donc.

Mme Alima Boumediene-Thiery.  - La majorité s'obstine à confier au procureur le contrôle de la garde à vue. Sans une véritable réforme du parquet, il n'y aura pas de refonte de la garde à vue. Le texte est frileux : la personne gardée à vue ne pourra pas bénéficier pleinement de l'assistance d'un avocat.

Encore une fois, la France s'isole, en choisissant d'aller contre la Convention européenne des droits de l'homme et en adoptant des mesures inapplicables.

Hélas, nos débats n'ont pas permis de revenir sur cette réforme a minima. D'où l'abstention négative des sénateurs Verts, en espérant que nous déclencherons une dynamique de changement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Cette réforme sous contrainte est loin de ce que nous espérions. Un beau jour, vous serez bien obligés de confier la garde à vue au juge des libertés et de la détention ! Si vous vouliez réduire le nombre de gardes à vue, il fallait réserver celle-ci aux infractions punies de trois ans au moins d'emprisonnement. Vous n'avez eu de cesse de créer des dérogations. Le garde des sceaux a même tenté de réduire de deux à une heure le délai laissé à l'avocat pour atteindre le lieu de la garde à vue ! Cela montre bien que tout cela ne vous plait pas... Enfin, sans moyens supplémentaires, la réforme restera théorique.

Nous sommes donc dans l'embarras. Je note également qu'aucun de nos amendements n'a été accepté. (M. Michel Mercier, garde des sceaux, le conteste) En tout cas, ceux qui l'ont été ne mangeaient pas de pain ! Au risque de ne pas être compris, et en attendant de voir le texte dont nous débattrons en seconde lecture, le groupe CRC s'abstiendra. (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Mézard.  - Le groupe RDSE, à l'unanimité, s'abstiendra. Cette abstention, ni négative, ni positive, sanctionne le fait que cette avancée -la présence de l'avocat- était rendue obligatoire par les décisions du Conseil constitutionnel, de la Cour de cassation et de la Cour de Strasbourg. Résultat, vous avez avancé à reculons. Ce texte sera appliqué plus facilement dans les métropoles que dans les territoires ruraux. Je vous rappelle que le Gouvernement voulait ne laisser qu'une heure à l'avocat pour arriver !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - C'était la volonté de certains...

M. Jacques Mézard.  - C'était un amendement du Gouvernement ! Et vous ne ferez pas l'économie d'un débat sur le statut du parquet. En refusant nos amendements sur le JLD, vous créez de l'insécurité juridique. Enfin, le moyen de limiter le nombre de gardes à vue était de les limiter aux infractions punies d'au moins trois ans d'emprisonnement.

Pour conclure, vous n'êtes pas allés au bout du chemin. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yves Détraigne.  - Ce projet de loi, sans être parfait, a été enrichi par le débat parlementaire : l'audition libre, tant décriée, a disparu ; la personne gardée à vue aura droit à un avocat ; le respect de la dignité de la personne est inscrit dans la loi. Peut-être serons-nous amenés à compléter ce texte dans quelques années. Mais le mieux est parfois l'ennemi du bien... Faisons confiance aux OPJ pour utiliser au mieux cette nouvelle procédure, créatrice de droits.

Le Gouvernement devra dégager les moyens nécessaires pour que la réforme s'applique de manière uniforme sur le territoire ; les barreaux devront s'organiser. Nous en jugerons dans quelques mois. Dans l'immédiat, le groupe UC votera ce texte qui représente une avancée importante. (Applaudissements à droite et au centre)

M. François Pillet.  - Ce texte est un exercice aussi difficile que celui de rendre la justice... Cette réforme apporte des garanties au gardé à vue -on lui notifie qu'il a le droit de garder le silence- et à l'avocat. Il met fin à la solitude du gardé à vue, qui provoquait des ravages. Nous n'échapperons pas à une refonte totale de notre procédure pénale. Un jour, peut-être, voterons-nous la création du juge de l'enquête et des libertés, à la fois Maigret et Salomon.

Dernier point, l'égalité des armes avec les droits accordés aux victimes. Seul cet aspect peut susciter l'adhésion de l'opinion populaire à cette réforme. Les deux plateaux de la justice sont également garnis ; le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements au centre et à droite)

L'ensemble du projet de loi est adopté, les groupes CRC, socialiste et RDSE s'abstenant.

M. Michel Mercier, garde des sceaux.  - Merci aux présidents de séance, à la commission des lois et aux sénateurs qui ont fait vivre ce débat. Ce texte n'est pas du marbre ; il évoluera à mesure que change la société. Tout ceux qui me connaissent savent que je ne travaille certainement pas sous contrainte ! (Applaudissements à droite et au centre)

Question prioritaire de constitutionnalité

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 8 mars 2011, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité.

Prochaine séance demain, mercredi 9 mars 2011, à 14 heures 30.

La séance est levée à 20 heures 55.

René-André Fabre,

Directeur

Direction des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du mercredi 9 mars 2011

Séance publique

A 14 HEURES 30 ET, ÉVENTUELLEMENT, LE SOIR

1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques.

Rapport de Mme Colette Giudicelli, rapporteur pour le Sénat (n°318, 2010-2011).

Texte de la commission (n°319, 2010-2011).

2. Suite de la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (n°65 rectifié, 2010-2011).

Rapport de M. Alain Milon, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°294, 2010-2011).

Texte de la commission (n°295, 2010-2011).