Mandat des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger(Deuxième lecture)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à proroger le mandat des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE).

M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - L'AFE représente nos compatriotes établis hors de France. Ses 155 membres élus sont renouvelés par moitié tous les trois ans. Le prochain scrutin dans les circonscriptions Europe et Asie est prévu pour juin 2012 ; nos compatriotes seront appelés à la même date à voter à la présidentielle et, pour la première fois, éliront des députés dans onze circonscriptions législatives. Ce cumul d'élections soumises à des règles différentes risque de perturber le déroulement des scrutins ; la sécurité juridique de chacun d'eux pourrait être menacée, notamment en matière de financement des campagnes électorales.

Les électeurs pâtiraient de cette complexité. Le report d'un an de l'élection à l'AFE paraît donc utile ; celle-ci s'est largement exprimée en faveur de cette solution, que la proposition de loi de M. del Picchia prévoit.

L'Assemblée nationale l'a étendu au renouvellement des personnalités qualifiées afin de faire coïncider le mandat des membres nommés et des membres élus. Le Gouvernement approuve cette réforme et souhaite l'adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois.  - Ce texte remédie à la difficulté posée par la succession, en 2012, de trois élections : présidentielle, législatives et renouvellement de l'AFE. D'où ce report, dont le Sénat a lui-même fait l'expérience en d'autres temps. La commission des lois a préféré cette solution à celle proposée par M. Cointat -la concomitance du premier tour des législatives avec l'élection des conseillers à l'AFE.

La coordination opérée par les députés est opportune. La commission des lois vous propose d'adopter ce texte conforme.

Mme Claudine Lepage.  - Cette deuxième lecture ne doit pas poser plus de difficulté que la première. L'ajout de l'Assemblée nationale concernant la prolongation parallèle du mandat des personnalités qualifiées est bienvenu.

L'objectif de ce texte est que les scrutins prévus en 2012 se déroulent à l'étranger dans les meilleures conditions. Pour la première fois, les 2,3 millions de Français établis hors de France éliront onze députés. Gare à la déception si ces premières élections législatives devaient être un échec. N'imaginons pas une abstention de 50 % ! Or les moyens financiers du réseau consulaire sont notoirement insuffisants -et la RGPP n'a rien arrangé ! La configuration des circonscriptions, proprement gigantesques, complique encore la tâche, notamment l'acheminement du matériel électoral. L'abstention est traditionnellement importante à l'étranger : il faut parfois effectuer des milliers de kilomètres pour remplir son devoir électoral.

La modification du calendrier électoral s'imposait donc. La solution retenue est la plus raisonnable. Le couplage des élections à l'AFE avec les législatives ne résout pas le problème d'organisation et n'est pas gage de participation accrue. Les faire coïncider l'élection des conseillers territoriaux, en 2014, encourrait la censure constitutionnelle car le report serait alors de plus de deux ans... Et la coïncidence ne serait que momentanée.

Il faut encore développer la démocratie de proximité pour nos compatriotes de l'étranger. Les élus de l'AFE font un travail remarquable mais ne sont pas assez écoutés. L'AFE doit devenir un organe délibérant, doté de compétences exclusives. La réflexion doit se poursuivre sur ce sujet essentiel.

Nous voterons la proposition de loi, que l'AFE a approuvée quasi unanimement. (Applaudissements)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Cette proposition de loi est consensuelle. L'AFE a approuvé le principe du report d'un an du mandat de ses membres. L'Assemblée nationale n'a apporté qu'une coordination, bienvenue, que la commission des lois a entérinée ; le RDSE votera ce texte, comme en première lecture.

Les Français de l'étranger seront dorénavant représentés à l'Assemblée nationale, comme ils le sont à la Haute assemblée depuis 1946. Leurs intérêts seront mieux défendus, même si le mandat parlementaire n'est pas impératif ; leurs onze députés représenteront, bien entendu, la Nation tout entière.

On a vu les difficultés qu'engendrerait l'organisation de cinq tours de scrutin en quelques semaines, surtout avec la restriction des crédits du ministère des affaires étrangères.

C'est aussi la crainte de l'abstention qui a motivé la proposition de loi del Picchia : le taux de participation aux élections à l'AFE n'est que de 20 %... Il faudrait un effort de communication.

La prolongation d'un mandat électoral d'une assemblée doit obéir à des conditions constitutionnelles strictes. Elles sont remplies ; nous voterons donc ce texte. (Applaudissements)

M. Robert del Picchia.  - Je remercie le groupe UMP d'avoir trouvé une place dans son ordre du jour réservé pour le vote de ce texte à la fois simple et important, qui vise à éviter un bogue électoral en 2012.

Les députés ont été d'accord avec les sénateurs. Mais je regrette qu'ils nous aient contraints à une deuxième lecture, qui n'avait rien d'indispensable. L'existence de personnalités qualifiées dans une assemblée élue au suffrage universel est discutable... mais passons.

Reste que la loi de 1982 prévoit, dans son article premier, que le renouvellement de ces personnalités qualifiées est concomitant avec celui des élus. La modification apportée par les députés est donc inutile. Ah ! s'il y avait eu des députés français de l'étranger ! Nous n'aurions pas eu à faire cette seconde lecture inutile. (Sourires)

Merci de nous aider par votre vote à accomplir notre tâche ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Louis Duvernois.  - Il est bon, dans les milieux politico-administratifs, de souligner l'utilité des 2,3 millions de Français établis à l'étranger -même si peu d'actes s'en ensuivent.

L'adoption de cette proposition de loi est aussi l'occasion de rappeler l'importance pour la Nation des Français de l'étranger.

Chacun ici sait que les conseillers de l'AFE élisent les sénateurs qui représentent nos compatriotes expatriés.

Cette proposition évitera un bogue électoral entre le 22 avril et le 17 juin 2012, avec l'élection présidentielle et les législatives. Les élections à l'AFE nécessiteront l'ouverture de 734 bureaux de vote, et donc une lourde ingénierie administrative. On ne peut imposer cinq scrutins en deux mois à nos concitoyens établis à l'étranger.

L'élection de onze députés, en sus des douze sénateurs représentants les Français de l'étranger, est une perspective que le parlement doit d'ores et déjà intégrer dans sa réflexion. Un grand pays comme le nôtre doit saisir l'apport démocratique d'une composante de la nation établie à l'étranger, qui n'est pas faite que d'exilés fiscaux ou de double nationaux profiteurs -comme je l'ai écrit récemment dans la revue des anciens élèves de l'ENA ; il s'agit au contraire d'une grande richesse pour notre pays.

Cette proposition de loi, nous devons la voter ! (Applaudissements au centre et à droite)

La discussion générale est close.

L'article premier est adopté, ainsi que l'article 2.

La proposition de loi est définitivement adoptée.