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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Missions communes d'information (Candidatures)

Conseillers départementaux (Deuxième lecture)

Discussion générale commune

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois

M. Jean-Jacques Hyest

Mme Éliane Assassi

M. Jean-Léonce Dupont

M. Jacques Mézard

Mme Hélène Lipietz

M. Philippe Adnot

M. Philippe Kaltenbach

M. Gérard Larcher

Mme Bernadette Bourzai

M. Hervé Maurey

M. Bruno Sido

M. Claude Domeizel

M. Georges Labazée

M. Manuel Valls, ministre

Missions communes d'information (Nominations)

Avis sur une nomination

Saisine du Conseil constitutionnel

Conseillers départementaux (Deuxième lecture - Suite)

Discussion des articles du projet de loi

Article premier

Article premier bis

M. Pierre-Yves Collombat

Article additionnel

Article 2

M. Christian Namy

M. Jean Boyer

M. Pierre-Yves Collombat

M. Vincent Eblé

M. Didier Guillaume

M. Jean-Jacques Mirassou

M. Bruno Retailleau

M. Yves Krattinger

M. Éric Doligé

Mme Muguette Dini

M. Gérard Miquel

M. Christian Favier

Question prioritaire de constitutionnalité

Conseillers départementaux (Deuxième lecture - Suite)

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

Article 2 (Suite)

M. Jean-Claude Lenoir

M. Michel Boutant

M. Claude Domeizel

M. Gérard Roche

M. Gérard Bailly

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois

Missions communes d'information (Candidatures)

Conseillers départementaux (Deuxième lecture)

Discussion générale commune

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois

M. Jean-Jacques Hyest

Mme Éliane Assassi

M. Jean-Léonce Dupont

M. Jacques Mézard

Mme Hélène Lipietz

M. Philippe Adnot

M. Philippe Kaltenbach




SÉANCE

du mercredi 13 mars 2013

69e séance de la session ordinaire 2012-2013

présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. Jean-François Humbert.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Missions communes d'information (Candidatures)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la désignation des 27 membres de la mission commune d'information sur l'action extérieure de la France en matière de recherche et de développement, créée à l'initiative du groupe écologiste en application de son droit de tirage, et de la mission commune d'information sur la filière viande en France et en Europe : élevage, abattage et distribution, créée à l'initiative du groupe UDI-UC en application de son droit de tirage.

En application de l'article 8, alinéas 3 à 11, de notre Règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été affichées. Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.

Conseillers départementaux (Deuxième lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral, et du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers intercommunaux et des conseillers départementaux.

Discussion générale commune

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur .  - Il y a deux mois, j'étais ici, devant vous -il neigeait déjà...-, pour présenter une étape importante pour nos institutions, celle de l'approfondissement et de la modernisation de la démocratie dans nos territoires.

Aujourd'hui, je soumets à nouveau à votre examen ces deux projets de loi, dans un esprit de dialogue et avec la volonté, autant que faire se peut, d'arriver à un consensus. Une question se pose à tous les groupes : le Sénat participera-t-il à la définition de nouvelles règles pour les élections locales ? La première lecture fut finalement un rendez-vous manqué. C'est dire que nos responsabilités sont grandes aujourd'hui : ne feignons pas d'ignorer que la crise de notre système représentatif conduit les électeurs à douter de la capacité de ceux qui les représentent à entendre leurs attentes et à répondre à leurs préoccupations. Nous avons le devoir impérieux de renforcer nos institutions et de restaurer la confiance, essentielle pour le bon fonctionnement de la démocratie, essentielle aussi pour la prémunir contre les populismes qui toujours se nourrissent de ses faiblesses.

La belle mission d'élu du peuple, c'est assumer une part du présent et de ce que sera l'avenir. Les élus sont l'expression de la volonté générale, la vitalité de la démocratie. Pour autant, des voix s'élèvent parfois pour les mettre en cause, pour dire qu'ils coûtent cher et sont trop nombreux. Comment ne pas vouloir répondre à ces critiques ? Et la meilleure manière de le faire, c'est de consolider le lien précieux qui unit les citoyens avec leurs représentants. C'est précisément ce que vise le texte.

Le premier rendez-vous a été manqué, je l'ai dit. Je vous propose de réussir celui d'aujourd'hui. C'est dans cet esprit que j'aborde notre discussion. Ici, au Sénat, il y a un peu plus d'un an, a été adoptée une proposition de loi abrogeant le conseiller territorial. En octobre, c'est encore au Sénat que se sont tenus les états généraux de la démocratie territoriale. A l'issue de cette phase de concertation et de dialogue, le président de la République a fixé les grands principes de la prochaine étape de la décentralisation.

Au fil des lois de décentralisation, la culture de la démocratie locale s'est progressivement affirmée dans nos territoires, faite de dialogue, de concertation et de proximité ; elle s'appuie sur les élus locaux. Ce fut une conquête majeure de la République. Le département y occupe une place importante...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Absolument !

M. Manuel Valls, ministre.  - ...qui incarne la diversité de nos territoires. La réforme de 2010 instaurant le conseiller territoriale confondait deux échelons, la région et le département, qui ne répondent pas aux mêmes logiques de fonctionnement ni n'ont les mêmes perspectives d'action. (Marques d'approbation sur les bancs socialistes) Or la démocratie locale a besoin de transparence, c'est ce qui fait sa force et sa pertinence.

La démocratie locale, c'est améliorer l'information de nos concitoyens et mieux les associer au processus de décision, c'est établir des échanges réguliers entre les élus et les territoires. Le conseiller territorial éloignait l'élu des citoyens ; en outre, le mode de scrutin était très défavorable à la parité. Il y avait là une régression.

Son abrogation s'imposait donc, mais il fallait en même temps proposer une autre solution ; elle ne pouvait être qu'un approfondissement. On ne peut, dans la France d'aujourd'hui, élire les conseillers généraux sur la base d'une carte cantonale qui, pour les deux tiers, remonte à 1801. Comment ignorer que depuis, la répartition démographique a évolué ? Voilà qui nous renvoie au principe constitutionnel de l'égalité devant le suffrage. Quelle égalité quand le rapport, au sein d'un même département, du canton le moins peuplé au canton le plus peuplé, est de un pour quarante-sept ? Quand dans 88 départements, ce rapport est supérieur à un pour cinq ?

De tels écarts ne sont plus acceptables : ils impliquent que les choix de certains citoyens pèsent moins que d'autres. Un redécoupage de la carte cantonale s'imposait. Remodeler n'est jamais chose aisée. Nous avons opté pour une règle simple : l'écart entre la population d'un canton et la moyenne départementale ne pourra dépasser 20 % -c'est celui qu'a retenu le Conseil constitutionnel pour le redécoupage des circonscriptions législatives, celui aussi qu'a préconisé le Conseil d'État. Si le scrutin binominal est accepté, nous aurons un débat sur le sujet...

M. Jean-Claude Lenoir.  - C'est du chantage !

M. Manuel Valls, ministre.  - Qui peut imaginer, dans la France d'aujourd'hui, un mode de scrutin départemental qui ne soit pas paritaire ?

M. Didier Guillaume.  - Personne !

M. Manuel Valls, ministre.  - La parité a progressé partout, dans les régions, dans les municipalités, au Parlement, au gouvernement. Le département fait figure d'exception. Dans chaque canton, le Gouvernement propose que soient élus solidairement deux candidats de sexe différent et que l'obligation de parité soit étendue aux exécutifs départementaux -95 % des présidents des conseils généraux sont aujourd'hui des hommes.

Qui peut penser que, dans la France d'aujourd'hui, les responsables des intercommunalités, structures que nos concitoyens connaissent bien désormais, ne soient pas élus directement par les électeurs ? C'est l'objectif du système de fléchage. Ceux qui siègeront aux assemblées intercommunales seront désignés sur la même liste que les conseillers municipaux ; l'échelon municipal est préservé tandis qu'une plus grande lisibilité est apportée aux électeurs.

Qui peut penser enfin qu'on laisse encore s'appliquer dans des communes raturage et panachage ? L'Assemblée nationale a abaissé le seuil à 500 habitants pour l'application de la proportionnelle -le Gouvernement comme le Sénat avaient retenu un seuil de 1 000 habitants.

Égalité devant le suffrage, parité, démocratisation de l'intercommunalité, tels sont les objectifs de ce projet de loi. Nous pouvons encore débattre de ces sujets, mais sans dévier des grandes orientations fixées par le président de la République. Nous avons une grande ambition pour la démocratie locale. Le Gouvernement est prêt à des compromis mais pas à se compromettre.

L'Assemblée nationale a fourni, comme le Sénat, un travail important. Elle a enrichi le texte, a apporté des avancées. Son texte satisfait le Gouvernement. Les travaux de votre commission des lois s'en éloignent à bien des égards, mais je redis ma volonté de dialogue constructif avec tous les groupes du Sénat ; je souhaite parvenir à un texte qui vous engage et permette à la Haute assemblée d'apporter sa contribution à la réforme.

Certains points sont fondamentaux aux yeux du Gouvernement. Le mode de scrutin binominal est le seul moyen de concilier parité et ancrage territorial. (Exclamations à droite)

La proportionnelle ne permet pas l'ancrage territorial, le retour en arrière ne permet pas la parité. Si on veut et la parité et l'ancrage territorial, il faut voter le scrutin binominal. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Éliane Assassi.  - Et le pluralisme ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Le scrutin majoritaire à deux tours n'empêche pas le pluralisme -voyez le Parlement. Il s'agit de garantir la parité.

Mme Éliane Assassi.  - Ne nous faites pas la leçon sur la parité ! Surtout pas vous !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je ne me le permettrai pas, madame la présidente ! Votre organisation politique anime deux départements après des élections au scrutin majoritaire. Mais sachez que le Gouvernement n'acceptera pas la proportionnelle pour les départements. (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur certains bancs à droite et au centre) Le département a besoin d'élus ancrés dans sa réalité ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'élection par fléchage des délégués communautaires est un autre point essentiel, comme l'est la modification du calendrier électoral.

Sur ces quelques points, le Gouvernement veillera à ce que le texte ne soit pas dénaturé et qu'il demeure compatible avec la jurisprudence constitutionnelle, d'où les amendements du Gouvernement au texte élaboré par votre commission des lois.

Le champ des débats reste cependant très large et je suis notamment sensible aux amendements qui tendent à garantir une bonne représentation des territoires ruraux.

M. Alain Fouché.  - Nous y sommes très attentifs !

M. Manuel Valls, ministre.  - Le découpage des cantons nécessite des critères précis ; si chacun s'engage sur le scrutin binominal, nous pourrons avancer intelligemment sur le sujet.

Vous connaissez maintenant les données du débat. Pour que nos échanges soient fructueux, chacun doit dire clairement ce qu'il veut, quels sont ses projets pour nos collectivités. Il ne servirait à rien qu'une seule partie fasse des compromis. Un accord se construit ensemble. Le Gouvernement y est prêt. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois .  - Nous sommes à nouveau saisis de ces deux projets de loi, le Sénat ayant rejeté le 18 janvier le projet de loi ordinaire et adopté à l'unanimité le projet de loi organique. Le scrutin binominal n'est pas parvenu à rassembler, dans notre assemblée, une majorité. L'Assemblée nationale a voté les deux textes le 26 février et les a enrichis toute en en conservant l'architecture générale.

Le 19 décembre, la commission des lois, outre des améliorations rédactionnelles, avait adopté quelques novations, dont celle due à notre collègue Collombat inversant le principe traditionnel en cas d'égalité des suffrages ; en séance publique, le Sénat avait supprimé l'article 2 sur le scrutin binominal, ce qui avait entraîné le rejet de nombreuses dispositions de coordination puis de la totalité du texte, bien que plusieurs articles aient été adoptés après modification.

S'agissant du remodelage de la carte cantonale, le Sénat avait supprimé les articles 3 et 23, inquiet de la représentation des territoires faiblement peuplés. J'avais déposé un amendement, adopté à l'unanimité, qui proposait d'élargir les dérogations aux principes de remodelage à l'équilibre de l'aménagement du territoire et au nombre des communes, dérogations qui auraient été fixées par un décret en Conseil d'État.

Le Sénat s'en était tenu au seuil d'application de la proportionnelle de 1 000 habitants ; les modalités de candidature et de vote dans les communes de moins de 1 000 habitants ont été complétées pour préciser les modalités de publicité des candidatures et interdire à un candidat de l'être dans plus d'une circonscription électorale. A l'initiative de sa commission des lois, le Sénat avait complété le projet de loi organique pour aligner le mandat municipal pris en compte au titre de la limitation du cumul des mandats sur le seuil de 1 000 habitants. La commission avait enfin diminué de deux unités l'effectif des conseils municipaux dans les communes de moins de 500 habitants -en séance, dans celles de 500 à 999 habitants- tout en maintenant un nombre inchangé de délégués sénatoriaux.

J'avais également proposé d'élargir le champ de la dérogation à la règle des plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne démographique du département. Le Sénat avait fixé à 1 000 le seuil pour la proportionnelle aux municipales et complété le projet de loi organique pour ce qui concerne le cumul des mandats.

S'agissant du fléchage des délégués intercommunaux, le Sénat avait assoupli le dispositif gouvernemental du stockage en tête de liste des candidats fléchés ; dans les communes de 1 000 habitants et plus, il avait limité la faculté de flécher à une partie de la liste seulement. La vacance de siège serait pourvue par le suivant de liste. Le Sénat a enfin réglé le cas de la section électorale qui ne se verrait attribuer aucun délégué au sein de l'intercommunalité : l'élection du ou des délégués s'effectuerait alors dans la commune comme s'il n'y avait pas de sectionnement.

L'Assemblée nationale a retenu l'architecture générale du texte. Elle a adopté l'ensemble des dispositions relatives au nouveau mode de scrutin et abrogé le conseiller territorial. Elle a apporté plusieurs améliorations aux articles premier bis, qui réaffirme le rôle du département comme garant de la solidarité sociale et de la solidarité territoriale, 5 bis, 6 bis, 7 bis et 8. Sur le remodelage de la carte cantonale, l'Assemblée nationale a repris l'amendement que le Gouvernement avait déposé en séance publique au Sénat à l'article 3, relatif au nombre des cantons ; 52 cantons au total seraient ajoutés au nombre proposé par le texte initial. L'Assemblée nationale a repris et complété l'amendement que j'avais déposé, et qui avait été adopté à l'unanimité par le Sénat, relatif aux dérogations aux principes généraux du remodelage.

L'Assemblée nationale a complété le dispositif consacré au régime électoral municipal ; elle a étendu le scrutin proportionnel aux communes de 500 habitants, généralisé l'obligation de déclaration de candidature et précisé les mesures de publicité des candidatures. L'article 25 bis réintègre le contentieux municipal dans le droit commun. L'article 18 bis diminue de deux unités l'effectif des conseils municipaux des communes de moins de 3 500 habitants en conservant parallèlement le même nombre d'électeurs sénatoriaux.

L'Assemblée nationale a ajusté le volet intercommunal, qualifié les membres des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre de « conseiller intercommunal », organisé les conséquences d'une suppression, d'une dissolution ou de l'annulation de l'élection d'un conseil municipal sur la composition et le fonctionnement de l'organe délibérant de l'EPCI à fiscalité propre, revu les modalités d'attribution des sièges aux sections électorales de moins de 1 000 habitants ; légalisé le tableau de la municipalité, complété les inéligibilités frappant le mandat municipal, étendu le régime d'incompatibilité entourant le mandat de conseiller intercommunal, retouché enfin les règles de composition des conseils communautaires.

L'Assemblée nationale a enfin adopté des mesures ponctuelles, qui ne sont pas toutes de nature électorale, aux articles 19 bis, 20 ter, 21 A, 21 B et 20 septies.

Tout en approuvant diverses dispositions votées par les députés, la commission des lois a maintenu sa position de première lecture sur les principes fondamentaux du texte, tout en adoptant des modifications substantielles : à l'article 5, elle a rétabli le principe selon lequel, en cas d'égalité de suffrages entre deux binômes, celui qui comporte le candidat le plus jeune est élu ; à l'article 7, elle a abrogé l'article L. 209 du code électoral ; à l'article 9, elle a prévu l'organisation d'une élection partielle en cas de vacance d'un siège de conseiller départemental dans un canton ; elle a élargi le second critère régissant le remodelage de la carte cantonale et porté l'écart entre la population d'un canton et la population moyenne des cantons du même département à 30 % ; elle a précisé les dérogations aux principes régissant le redécoupage de la carte cantonale.

Sur le volet communal, la commission a rétabli le seuil de 1 000 habitants pour l'application du scrutin municipal proportionnel et limité la réduction de l'effectif de deux unités des conseils municipaux aux seules communes de moins de 100 habitants.

Sur le volet intercommunal, elle a retenu la qualification de conseiller communautaire, qui reflète mieux les « coopératives de projets » chères au père de la loi de 1999, notre collègue Jean-Pierre Chevènement. Elle a supprimé le lien de dépendance du mandat municipal ou d'arrondissement au sort du mandat intercommunal, rétabli l'assouplissement des modalités du fléchage dans les communes de 1 000 habitants, repris -en matière de sectionnement- le mécanisme voté par le Sénat en première lecture, simplifié le régime des vacances au conseil de l'intercommunalité, simplifié les dispositions relatives à l'exécutif d'un EPCI à fiscalité propre résultant d'une fusion. Elle a également écarté l'extension du régime de composition et de désignation des EPCI à fiscalité propre au syndicat d'agglomération nouvelle et supprimé la dérogation expérimentale aux critères démographiques de création d'une communauté d'agglomération ainsi que l'application des dispositions du projet de loi à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française.

La réforme renforcera la légitimité des élus et autorisera une plus grande diversité dans la composition des assemblées délibérantes.

La commission des lois soumet au Sénat le texte qu'elle a établi pour le projet de loi organique et le projet de loi. Avec le président Sueur et plusieurs membres de la commission, je souhaite apporter notre pierre à ce texte. Nous allons franchir une dernière étape, peut-être essentielle pour le Sénat dans son rôle de représentant des collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur plusieurs bancs du groupe du RDSE)

M. Jean-Jacques Hyest .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) L'Assemblée nationale a adopté ce projet de loi, à une très courte majorité, dans une version très proche de celle du Gouvernement, alors que le Sénat l'avait rejeté faute d'avoir dégagé une majorité sur le binôme, système baroque s'il en est. En matière de droit électoral, on croyait avoir tout tenté -eh bien non, il y aura aussi le système Valls ! (Exclamations amusées à droite) Ce mode de scrutin pose plus de problèmes qu'il n'en résout. On aura des cantons très vastes -où sera la proximité ?- et la solidarité entre les deux candidats du binôme s'évanouira dès l'élection faite. (Exclamations et marques de dénégation sur les bancs socialistes)

Si l'on s'en tient au seul critère démographique, les conseillers départementaux ne représenteront plus que les grandes villes et délaisseront les territoires ruraux. Nous aboutirons au même déficit que pour les conseils régionaux, dont le mode de scrutin favorise incontestablement le monde urbain. (Applaudissements à droite)

Après avoir dénoncé les défauts du conseiller territorial, qui était pourtant une tentative courageuse, beaucoup d'élus vont s'apercevoir que votre solution n'est pas la bonne.

M. Didier Guillaume.  - C'est la meilleure !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Si elle est si formidable, pourquoi ne pas l'appliquer aux députés ? (« Chiche ! » sur les bancs socialistes)

M. Manuel Valls, ministre.  - Ne nous donnez pas des idées ! (Sourires)

M. Jean-Jacques Hyest.  - Nous sommes cependant réalistes et savons que l'Assemblée nationale reviendra à son texte ; nous essaierons de limiter les défauts de ce système. Le Conseil d'État a donné son avis, le Conseil constitutionnel aussi. La carte cantonale doit être revue ; si les représentants des départements doivent être élus sur une base démographique, il ne faut pas négliger la représentation des territoires.

Nous désapprouvons le report des élections départementales. Nous ne comprenons pas l'intérêt d'abaisser le seuil à 10 % des électeurs inscrits pour se maintenir au deuxième tour -sauf à vouloir favoriser les triangulaires. La commission des lois a souhaité les éviter.

La diminution des membres de conseillers municipaux pour les communes de moins de 500 habitants est proposée ; l'extension au-delà de 3 500 inquiète. L'Association des maires de France s'étant ralliée au seuil de 1 000 habitants pour la proportionnelle, ne balayez pas d'un revers de main l'opinion des élus, exprimée à l'occasion des états généraux de la démocratie locale.

Le conseiller communautaire : ne s'agit-il pas d'effacer la commune au profit de l'intercommunalité ? (On se récrie à gauche) Les mêmes souhaitent l'effacement du département, mais nous en discuterons lors de l'examen du projet de loi sur la décentralisation -que l'on nous annonce sans cesse. (Nouvelles exclamations sur les bancs socialistes)

L'article 20 apporte une certaine souplesse à la désignation des délégués des communes à l'intercommunalité.

Soucieux de la responsabilité du Sénat, nous voulons marquer les points de consensus sans renoncer à notre opposition au texte.

M. David Assouline.  - Fromage et dessert !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Écoutez les autres au lieu de m'agresser ! (Applaudissements à droite) Le Gouvernement a des visées électoralistes, c'est évident.

Nous verrons bien si à l'issue de nos débats, les positions du Sénat seront confortées sur certains points, ce qui sera de toute façon bénéfique pour la démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et UMP)

Mme Éliane Assassi .  - Lors de la première lecture de ce texte, je déplorais le très bref délai que nous avions eu pour examiner ce projet de loi. En deuxième lecture, les choses ne se sont pas améliorées : la commission a terminé l'examen des amendements extérieurs il y a deux heures à peine. Ce sont des conditions très limites. M. le ministre veut aller vite -sans prendre le temps d'écouter ceux qui, comme nous, sont pourtant animés d'un esprit constructif. Nous étions d'accord sur plusieurs articles, nous n'avons pas changé d'avis. Sur les points de désaccord, nous avons fait des propositions. Nous nous sommes abstenus sur l'ensemble pour laisser le temps à la navette de trouver un accord. Il n'en a rien été.

Vous connaissez notre attachement à la proportionnelle -traditionnellement soutenue par l'ensemble de la gauche.

Quelle n'a pas été notre surprise de vous entendre dire que ce mode de scrutin ne fait pas partie de notre culture -alors qu'il existe dans deux élections sur trois, y compris pour les sénatoriales.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Mitterrand l'avait mis en place en 1986 !

Mme Éliane Assassi.  - Ce mode de scrutin progresse dans l'opinion, et dans cet hémicycle. Différents amendements de tous bords proposaient des variantes autour de ce mode de représentation, qui respecte le pluralisme et la parité, binôme républicain auxquels nous sommes très attachés.

La représentation des territoires ruraux ? Au niveau départemental, une liste de candidats devra être représentative pour rassembler les voix. La représentation des territoires est possible avec la proportionnelle ; nous avons proposé une solution de repli avec une proportionnelle corrective pour rééquilibrer les écarts.

Mais le Gouvernement ne veut pas de proportionnelle, préférant renforcer le bipartisme dans la vie politique. Le binôme assurera bien la parité mais il fera reculer le pluralisme sans garantir la représentation des territoires. Les cantons seront d'une telle taille qu'on ne pourra plus parler de proximité. (« Bravo ! » et applaudissements à droite et au centre) Dans les territoires ruraux surtout, les élus seront très éloignés des électeurs. Revoyez donc ce système, qui fera de l'élection départementale un anachronisme quand les autres scrutins font la part belle à la proportionnelle -elle devrait ainsi progresser au Sénat. Il faudra expliquer cette contradiction aux électeurs.

Autre point de désaccord : le nouveau mode de désignation des délégués communautaires, qui reprend la proposition de la commission Balladur. Vous allez creuser l'écart entre communes et intercommunalités. Loin d'être une avancée démocratique, c'est un détournement démocratique, qui vise à faire disparaître la commune et met à mal le département. Nous sommes passés de la commune au bloc communal. Demain, on parlera du bloc « local », intégrant le département. C'est déjà le cas avec les métropoles...

M. Louis Nègre.  - La commune se porte bien dans la métropole !

Mme Éliane Assassi.  - 2020, c'est le terme que vous fixez pour l'extinction de la commune telle que nous la connaissons aujourd'hui.

M. Éric Doligé.  - C'est vrai.

Mme Éliane Assassi.  - Ne parlez-vous pas d'intégration dans l'intercommunalité ? Certains, dans la majorité, voudraient même accélérer le mouvement : les écologistes, ainsi que le président Sueur. Le centre et la droite sont favorables à cette mesure, qui prolonge la loi de 2010 : au moins sont-ils cohérents.

M. Henri de Raincourt.  - Merci !

Mme Éliane Assassi.  - Nous, nous continuons à demander l'abrogation de la loi de M. Sarkozy. Les élus locaux n'en veulent pas -c'est d'ailleurs ce qui a expliqué le basculement à gauche de notre assemblée. Or le Sénat reste sourd à leurs demandes.

Enfin, l'abaissement du seuil du scrutin de liste aux municipales à 500 habitants, comme l'a décidé l'Assemblée nationale, nous convient. Pourquoi cette frilosité de la chambre représentant les collectivités locales, pourquoi favoriser le tir aux pigeons ? Nous ne soutiendrons pas votre texte, monsieur le ministre... sauf coup de théâtre.

Notre désaccord est profond sur deux points essentiels du projet.

Notre abstention en première lecture était d'ouverture : j'avais ouvert les portes, les fenêtres, la porte de la cave... en vain. Nous ne pourrons que voter contre votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit aussi)

M. Jean-Léonce Dupont .  - « Les Hollandais ne pensent qu'à ça », titre un hebdomadaire. L'objectif, c'est la réélection de François Hollande en 2017.

Ce texte consacre les déséquilibres entre territoires urbains et territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et UMP)

Le Gouvernement fait croire à une grande concertation avec les élus locaux mais présente un texte conforme aux intérêts d'un seul parti. Malgré quelques avancées réelles, je suis inquiet des conséquences du redécoupage de la carte électorale et du mode de scrutin retenu. Certes, il est créatif, comme l'étaient les 35 heures : mais il s'agit d'une créativité que personne ne nous envie, que personne ne copie... (Applaudissements sur les bancs UMP)

De fait, le scrutin binominal n'a aucun équivalent à l'étranger. Comment fonctionnera ce couple imposé ? Je redoute une compétition entre chacun de ses membres...

M. Jean-Jacques Mirassou.  - De l'émulation !

M. Jean-Léonce Dupont.  - ...et surtout des fractures dans la représentation des territoires. Un basculement va s'opérer, avec un affaiblissement de la représentation des territoires ruraux.

M. François Patriat.  - C'est faux ! Il fallait prendre en compte la démographie !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Dans le Calvados, les cantons redécoupés devront réunir trois à quatre cantons actuels.

Le conseil général est le premier partenaire des communes, des PME. Le canton est un espace de vie. L'approche arithmétique ne peut être le seul critère : avec Hervé Maurey, nous proposons un scrutin mixte, scrutin majoritaire dans les zones rurales et proportionnel à un tour dans les villes.

M. Alain Fouché.  - Très bien formulé !

M. François Patriat.  - Magouilles !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Il garantirait le respect des territoires ruraux et la juste représentation des territoires urbains, assurerait des majorités stables et renforcerait la parité.

Le nouvel article premier bis, voté à l'initiative du groupe UDI de l'Assemblée nationale, marque une avancée : il réaffirme que le canton représente la population, mais aussi le territoire. Je souhaite qu'il soit adopté sans modification. De même, l'article 23 élargit les cas de dérogations. J'espère que le Sénat prendra mieux en compte la cohérence territoriale, l'ancrage territorial des élus dans leur circonscription.

Au final, je demeure hostile à ce texte lourd de conséquences pour les territoires et je déplore les calculs politiciens qui l'ont motivé. (Protestations sur les bancs socialistes)

Les motivations du Gouvernement me paraissent plus électoralistes que motivées par l'intérêt général et le souci de la démocratie... (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jacques Mézard .  - Ce texte nous revient de l'Assemblée nationale comme une rose dont la tige est plus chargée d'épines que le texte initial.

M. Henri de Raincourt.  - C'est le parti socialiste !

M. Jacques Mézard.  - A l'activisme des députés s'est ajouté le fait que le Sénat n'avait pas voté l'article 2, prenant ainsi le risque de renoncer à ce qui lui donne tout son sens : le Sénat a -encore- pour mission de représenter les collectivités territoriales. On ne peut reprocher au Gouvernement d'avoir déposé un texte revenant sur le conseiller territorial, comme il l'avait promis, à la satisfaction implicite de nombre de ceux qui en avaient accepté la création, d'autant que le Conseil d'État appelait à rectifier les écarts de représentation. L'enterrement du conseiller territorial fut célébré dans la joie ; la naissance du conseiller départemental avec inquiétude...

M. Bruno Sido.  - Dans la douleur !

M. Jacques Mézard.  - ...avec l'apparition de deux faux jumeaux de sexe opposé. Le plus simple eût été de remodeler les cantons pour remédier aux déséquilibres démographiques.

M. Bruno Sido.  - C'est vrai !

M. Jacques Mézard.  - Mais cela ne résout pas le problème de la parité. Cela dit, la recherche d'une parité arithmétique n'est pas forcément la solution : après le binôme à la tête d'un groupe parlementaire, à quand le binôme à la présidence de la République ? (Applaudissements et « Bravos ! » sur les bancs UMP)

La proportionnelle, vous l'avez heureusement écartée. Les futurs élus seraient choisis dans les sections des partis, on le sait. (Mêmes mouvements) Voyez les élections régionales  : les électeurs choisissent la tête de liste, qui présidera le conseil régional. Mais dans les départements, ils ne connaissent pas les conseillers régionaux. Et je ne parlerai pas des européennes, de la confiscation du pouvoir par quelques apparatchiks que l'on ne reverra plus dans leur circonscription... Vous auriez pu introduire la proportionnelle en ville, et conserver le système actuel dans les campagnes, ce qui aurait eu un coût pour le parti majoritaire : on préfère toujours partager le bien d'autrui plutôt que le sien...

Après avoir éliminé la proportionnelle départementale, il fallait un autre système : le binôme s'est imposé, sans que l'on sache d'ailleurs qui a accouché de cette idée géniale. Le seul système possible, dites-vous. M. Collombat a démontré le contraire. Le binôme passera en force à l'Assemblée nationale, dans un garde-à-vous impressionnant, typique de la Ve République. (Mêmes mouvements et applaudissements à droite)

Exception française qui doit faire date ? « Depuis que la France rayonne, je me demande comment le monde entier n'est pas mort d'insolation », avait dit un jour Jean-François Revel. (Rires à droite)

Ce projet de loi est ressenti dans nos départements ruraux comme un facteur de déséquilibre et d'inégalité supplémentaire.

Mme Cécile Cukierman.  - C'est vrai !

M. Jacques Mézard.  - Il s'agit d'une nouvelle étape dans la fracture territoriale, après la lamentable péréquation départementale, la refonte de la carte scolaire, la suppression de sous-préfectures, le retrait des services publics et les ravages d'une RGPP aveugle...

M. Bruno Retailleau.  - La MAP !

M. Jacques Mézard.  - ...et demain, avec le redécoupage, la suppression de chefs lieux de cantons -mais on ne sait pas ce que c'est à Paris. La France rurale, inquiète de la création du conseiller territorial, l'avait exprimé lors des élections sénatoriales de 2011 ; elle l'exprimera demain pour le binôme. (« Très bien ! » et applaudissements à droite) Elle constate l'abandon, depuis longtemps, de toute politique d'aménagement du territoire.

Comme le gouvernement précédent, ce gouvernement refuse de dire quel avenir il entend réserver au département : l'évaporation balladurienne ? une recomposition ? Il doit le faire savoir. Le président de la République dit faire confiance au Sénat pour réécrire le projet de loi de Mme Lebranchu. Voulez-vous faire confiance aussi à notre assemblée pour réécrire le projet de loi binôme et, demain, le projet de loi sur le non-cumul ? (Applaudissements et sourires à droite)

Il faut revenir sur la règle des + 20 % pour le découpage des cantons. Seul un système - 30 %/+ 30 % évitera la création de cantons gigantesques, ne permettant plus la représentation de la population. Un canton au sein d'une grande ville n'a rien à voir avec un canton de montagne.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - C'est vrai !

M. Jacques Mézard.  - Je regrette que l'article 40 ait frappé nos amendements sur le redécoupage des cantons.

Nous refusons la bipolarisation, la mesure réservant le deuxième tour aux deux premiers.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La commission est revenue dessus ce matin.

M. Jacques Mézard.  - Je salue l'évolution de la commission au fil des heures...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission.  - C'est la preuve qu'elle écoute.

M. Jacques Mézard.  - Quel intérêt de diminuer le nombre de conseillers municipaux bénévoles, éléments d'un indispensable lien social ? (Applaudissements sur les bancs UMP)

Enfin, nous voulons un fléchage des délégués intercommunautaires le plus libre et le plus simple possible.

Il est des orientations qui nous inquiètent. Notre groupe s'interroge et émettra des votes divers selon ses sensibilités.

Monsieur le ministre, nous partageons votre vision de la République : je comprends que le vote du Sénat ne vous satisfasse pas mais nous ne nous exprimons pas contre vous, dont nous saluons l'action, mais en faveur d'une conception de la République que les réformes ne doivent pas fragiliser mais conforter. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, au centre et à droite ; M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, applaudit aussi)

Mme Hélène Lipietz .  - Un nouveau marathon sénatorial se prépare. J'espère que le débat sera plus respectueux que le précédent : nos futures collègues dans les conseils départementaux ne seront pas des gadgets mais des politiques ; elles auront les défauts mais aussi les qualités des hommes !

Un regret : que le texte présenté à l'Assemblée nationale n'ait pas été celui du Sénat. Certes, les écologistes ont contribué à son rejet, mais pas plus que les autres.

Aucun compromis n'a été possible, entre oppositions tranchées et absence d'écoute du Gouvernement.

Nous avions acté le renversement du privilège de l'âge -l'Assemblée nationale est revenue dessus, à ma grande surprise. La politique est faite pour l'avenir ! Mais on préfère s'accrocher au bras de son fauteuil que laisser la place à la jeunesse... Ce n'est pas le bon véhicule législatif, dit l'Assemblée nationale. Renoncement, lâcheté ou conservatisme ?

Nous avons innové, mettant fin à la légende d'un Sénat conservateur. L'âge ne doit être que le deuxième critère, après l'expérience. Sur ce point, je proposerai des amendements de coordination.

L'Assemblée nationale a été moins conservatrice sur le seuil de la proportionnelle pour les municipales, qu'elle a abaissé à 500.

Le scrutin binominal n'a qu'un seul mérite : celui de la parité. Mais la parité n'est pas un gadget. Un élu cantonal sur deux va perdre son mandat sans avoir démérité, c'est vrai et je le plains. Mais combien de femmes n'ont pas eu accès, depuis 1945, à des postes éligibles, sinon comme suppléantes ou dans des cantons ingagnables ?

Les écologistes proposent pas moins de quatre manières différentes d'introduire la proportionnelle pour l'élection des conseillers départementaux, et deux pour l'élection des conseillers municipaux.

Cela devrait plaire aux socialistes, puisqu'il s'agit de la proposition n°48 du programme du président de la République. Introduisons une toute petite dose de proportionnelle -un peu, beaucoup, passionnément- pour permettre à nos concitoyens de croire à la puissance de leur vote.

Les écologistes veulent des intercommunalités pleinement démocratiques, élues directement. Il faut inventer la France de demain, où les communes demeureront la base de la vie sociale et les intercommunalités seront les porteuses de la cohérence territoriale. Cette loi nous invite à passer au XXIsiècle : sachons aller de l'avant. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Philippe Adnot .  - La France va mal. (On confirme à droite) Il faut se concentrer sur l'essentiel. Ce texte est-il essentiel pour résoudre nos problèmes ? (On le conteste à droite) Je pense que le binôme ne mérite pas toutes les critiques dont il fait l'objet. Quand on est élu sur un territoire, ce n'est pas pour gérer le canton mais le département.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - C'est tout à fait vrai.

M. Philippe Adnot.  - Par contre, faut-il organiser notre société sur l'exigence de moitié d'hommes et moitié de femmes ? Jusqu'où faut-il aller ? Faudra-t-il 50 % d'hommes chez les assistantes sociales ? Jusqu'où allons-nous pousser le bouchon ? Je proposerai, pour ma part, de conserver le système actuel dans les zones rurales et la proportionnelle dans les territoires urbains.

Je vous rappelle que la loi précédente proposait déjà le redécoupage, la fusion de petits cantons, et donc la suppression de chefs-lieux , la règle du plus 20 % moins 20 %. L'essentiel, c'est d'obtenir plus 30 moins 30. Le texte de la commission me satisfait ; je souhaite qu'il soit retenu. De même, il faut porter le seuil de 500 à 1 000, pour les municipales.

En résumé, ma préférence va au scrutin mixte. Votons cet amendement, qui serait une base de discussion avec l'Assemblée nationale. S'il n'est pas adopté, je voterai néanmoins ce texte, avec le plus 30 moins 30. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes et UMP)

M. Philippe Kaltenbach .  - Espérons que le Sénat ne rendra pas à nouveau copie blanche à l'occasion de cette seconde lecture. Certains des apports du Sénat en première lecture ont été réinsérés à l'Assemblée nationale : les exceptions à la règle des plus ou moins 20 %, la déclaration de candidature obligatoire.

Enfin, il y aura un minimum de quinze cantons dans les départements de plus de 500 000 habitants. L'Assemblée nationale a donc repris certains amendements du Sénat. Est-ce suffisant ? Non.

Comment accepter que le Sénat rejette un texte d'une telle importante ? Je forme le voeu que nous parvenions à son adoption car nous savons quelles seraient les conséquences d'un tel rejet : une feuille blanche en CMP. Cette perspective n'aurait rien de réjouissant, alors que le Sénat représente les collectivités locales.

Le Gouvernement est ouvert au dialogue, nous a dit M. le ministre. Le texte est équilibré et il répond à des principes que nous partageons. Le conseiller territorial ne pouvait être défendu et j'ai le sentiment qu'à droite, on se satisfait de sa suppression.

M. Henri de Raincourt.  - Vous supposez...

M. Philippe Kaltenbach.  - J'ai aussi entendu qu'il ne fallait pas retoucher à la carte électorale. Depuis 1801, il y a eu des évolutions ! Le découpage est obligatoire. Faisons-le de la façon la plus cohérente possible, avec des règles claires, pour qu'on ne puisse pas parler de charcutage.

En première lecture, il y a eu des échanges regrettables sur la parité. Sachons dépasser les invectives pour aller à l'essentiel, donc le scrutin binominal, pour parvenir à la parité.

Soyons à l'écoute des débats qui se sont déroulés en commission des lois, dont je salue, à cette occasion, le président et le rapporteur. Le groupe socialiste est disposé à voter des amendements pour en faciliter l'adoption in fine par le Sénat. Le Gouvernement a proposé une marge de + 20 % pour le tunnel de canton. Le groupe socialiste est prêt à élargir ce tunnel à 30 %. Nous sommes également prêts à amender l'article sur le fléchage, afin qu'il ne soit pas réservé au début de la liste. Pour être admis au deuxième tour des élections départementales, nous proposerons un seuil de 12,5 % plutôt que de réserver cet accès aux deux premiers du premier tour. Enfin, pour la proportionnelle, nous préférons remonter à 1 000 habitants.

Pour aller en CMP en position de force, il faut bien évidemment que ce texte soit voté par le Sénat. Le ministre a rappelé qu'il était ouvert au débat mais que la modernisation de la vie locale était nécessaire. J'espère que nous recueillerons une majorité pour que le débat se poursuive en CMP. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard Larcher .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Le mode de scrutin binominal est une mauvaise idée, que nous savons rejetée dans tout le territoire. (On le confirme à droite) M. Hyest le disait, cette idée est saugrenue, elle n'a aucun équivalent dans le monde. Je partage certes l'objectif de parité. Avec le binôme, on n'en est plus à l'obligation de moyens : le résultat est garanti. (M. Michel Delebarre, rapporteur, le confirme) Cet objectif a certes valeur constitutionnelle mais ce n'est pas le seul. Le respect du pluralisme et la garantie de représentation du territoire n'a pas moins de valeur.

Les grandes victimes de votre binôme, ce sont les territoires ruraux, au nom du seul intérêt démographique ! (Applaudissements à droite) La vitalité, la représentation des territoires sont en cause.

M. Jean Bizet.  - Très juste !

M. Alain Fauconnier.  - Et avec le conseiller territorial ?

M. Gérard Larcher.  - Le deuxième excédent de notre commerce extérieur, ce sont les territoires ruraux qui l'apportent, avec l'agroalimentaire. (Applaudissements à droite)

Certains cantons ruraux seront noyés dans de vastes territoires. Je pense aux Cévennes et au Gard. Le nombre de chefs-lieux de canton va être divisé par deux, et donc autant de centres de vie.

Mme Coutelle, présidente socialiste de la délégation au droit des femmes à l'Assemblée nationale, a dit que ce mode de scrutin la choque énormément et la heurte profondément : « Le message que je reçois en tant que femme politique, c'est : vous n'êtes pas capable d'y arriver toute seule donc il faut des couples ! » Elle juge humiliant ce « dévoiement de la parité » et ajoute : « Je n'ai pas envie, si je devais me présenter au conseil général, d'aller chercher un homme ». Voilà ce que dit notre collègue ! (Applaudissements à droite)

Depuis neuf mois, il n'y a pas de conseil des ministres où des projets électoraux ne soient présentés. On oublie l'essentiel : la compétitivité, l'emploi, à propos de quoi le conseil des ministres décide ce matin de légiférer par ordonnance. (Applaudissements à droite)

M. Manuel Valls, ministre.  - D'où tenez-vous cela ? Vous y étiez ?

M. Gérard Larcher.  - Cela dit, je reconnais que le texte de la commission des lois présente des avancées non négligeables : la suppression des triangulaires, une plus grande souplesse pour le découpage des cantons, un seuil de 1 000 habitants pour la proportionnelle aux municipales ; enfin le fléchage élargi pour les délégués aux intercommunalités -terme que je préfère, avec M. Hyest, car il ne s'agit pas que les communes disparaissent.

Nous sommes face à un dilemme. Si nous rejetons l'ensemble du texte, nous condamnons le Sénat à s'en remettre entièrement à l'Assemblée nationale. (On le confirme à gauche) J'y verrai un affaiblissement de plus du Sénat. (Mêmes mouvements)

Alors que faire ? Rejet ou vote d'un texte partiellement mauvais ? Tout dépendra de la qualité de nos travaux jusqu'à la commission mixte paritaire. Il ne faudra pas gommer les territoires ruraux, qui sont aussi l'identité et la force de la France. (Applaudissements à droite)

Mme Bernadette Bourzai .  - J'ai vivement regretté le rejet de ces textes par le Sénat en première lecture, moyennant quoi nous devons examiner le texte issu de l'Assemblée nationale, certes enrichi par notre commission des lois. Je souhaite que le Sénat pèse, lors de la CMP, sur le contenu de la loi.

L'objectif de parité a été maintenu, c'est une bonne chose. M. Gérard Larcher a cité les propos personnels de Mme la présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale ; ils n'engagent qu'elle. Je vous rappelle que c'est notre délégation aux droits des femmes qui avait proposé le binôme, et l'avait adopté à l'unanimité. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Ce scrutin fera progresser la parité dans les départements, tout en maintenant l'ancrage territorial des élus. Je salue cette logique d'ensemble, fondement de la représentation paritaire. Il reste deux places à conquérir : la parité à l'Assemblée nationale et au Sénat. C'est un combat de longue haleine...

J'en arrive au remodelage des cantons. Nous voulions, en première lecture, avoir une représentation juste des zones rurales, d'où des dérogations au principe de plus ou moins 20 % pour éviter des cantons trop étendus. Il est bon que l'on aille jusqu'à 30 %. C'est très important pour les départements montagneux.

Je voterai avec conviction ce texte qui fait progresser la démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Hervé Maurey .  - C'est la première fois qu'un texte aussi important pour les collectivités territoriales n'est pas adopté par l'assemblée qui les représente. Et l'Assemblée nationale ne l'a voté qu'à une très courte majorité. C'est aussi la première fois que l'on change une législation concernant des élections moins d'un an avant celles-ci. Et ce n'est que le premier texte d'une série modifiant tous les modes de scrutin. A chaque fois, le ministre de l'intérieur invoque des arguments différents. Il nous dit cette fois vouloir éviter la proportionnelle et nous fait l'éloge du scrutin majoritaire qui « permet le pluralisme ». Pourquoi alors vouloir conserver la proportionnelle pour les régionales et l'étendre pour les sénatoriales ? Le vrai est que vous ne pensez qu'à échapper à la sanction populaire.

Nos concitoyens sont bien loin de ces préoccupations là : nous avons dépassé la barre de 10 % de chômeurs, 25 % des jeunes sont au chômage, l'objectif de 3 % de déficit ne sera pas tenu, l'insécurité augmente...

Ce texte ne nous convient pas car c'est un mauvais coup porté à la ruralité, sous couvert de parité. Est-ce le seul moyen d'échapper à la proportionnelle ? Non, un scrutin mixte est possible, assorti de sanctions financières pour les partis qui ne respecteraient pas la parité. Le texte de l'Assemblée nationale ressemble à s'y méprendre à celui du Gouvernement, sauf pour le seuil de 500 habitants.

M. Manuel Valls, ministre.  - C'est l'Assemblée nationale qui l'a voulu...

M. Hervé Maurey.  - Le nombre de conseillers municipaux est réduit pour les communes de moins de 3 500 habitants. La commission des lois est revenue sur ces deux points et propose un tunnel de plus ou moins 30 %. Je suis désagréablement surpris par l'amendement du Gouvernement sur ce point. Nous espérons que nos amendements seront retenus et que nous pourrons adopter ce texte. Il serait regrettable qu'un texte sur les collectivités territoriales ne soit pas voté par le Sénat. Vous semblez oublier que vous n'avez pas la majorité absolue au Sénat, monsieur le ministre.

Pourquoi ne pas engager un vrai dialogue ? Vous êtes prêt à des compromis, dites-vous, sauf sur l'important ! Nous abordons ce texte avec fermeté mais sans arrière-pensées politiciennes. La balle est dans votre camp. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

M. Manuel Valls, ministre.  - Prenez vos responsabilités.

M. Bruno Sido .  - (Applaudissements à droite) Le scrutin binominal éloignera les élus des électeurs. Je salue le travail de la commission des lois, qui a apporté diverses améliorations. L'augmentation du seuil de 20 à 30 % est l'espoir de plus de souplesse ; je proposerai d'aller jusqu'à 40 %.

Deuxième amélioration : le remodelage de la carte électorale sera plus équilibré et permettrait de respecter les territoires ruraux, car la proximité doit rester adossée aux élections départementales. L'acte III de la décentralisation aurait dû venir avant ce projet de loi.

Si j'approuve l'amendement sur le maintien de deux candidats seulement au deuxième tour, je regrette que ce projet de loi maintienne le binôme, source d'incompréhension et de complexité. Son seul avantage est d'introduire une stricte parité sans en passer par la proportionnelle. Il risque de fragiliser la stabilité politique des instances départementales. Aucun mode de scrutin ne combine toutes les qualités.

Nous ne sommes pas hostiles à un rééquilibrage démographique des cantons dont le tracé date, pour la plupart, de 1801. L'activité du conseil général s'organise autour des populations, mais aussi des territoires. Chaque conseiller est le représentant de ses électeurs mais aussi de son canton.

Les améliorations de la commission des lois sont réelles, mais nous ne pouvons accepter que les zones rurales s'effacent au profit des territoires urbains. Évitons que l'écart démographique soit une règle d'airain. C'est pourquoi nous ne pouvons soutenir ce projet de loi, à moins que soit abandonné le caractère binominal de scrutin. (Applaudissements à droite)

M. Claude Domeizel .  - Ce n'est pas seulement le mode électoral qui est en cause mais l'obligation qui nous est faite de procéder à un découpage électoral.

Je suis farouchement opposé à la proportionnelle au niveau départemental qui est contraire à l'objectif d'ancrage territorial. Dans mon département, elle se traduirait par une surreprésentation de la vallée principale, puisque les têtes de liste en viendraient forcément. L'arrière-pays, soit 70 % du territoire du département, ne seraient plus représentés dans l'assemblée départementale. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes)

Nous considérons tous qu'il faut estomper les disparités démographiques entre les cantons. La marge de 20 % n'est pas adéquate. C'est pourquoi je souscris à la proposition de la commission des lois, qui apporte de la cohérence sans risquer les foudres du Conseil constitutionnel.

Sur les élections municipales, les élus que j'ai pu rencontrés sont partagés. Le maintien du nombre de conseillers actuels poserait le moins de difficultés : pourquoi remettre en cause ce qui donne satisfaction ? Pour la proportionnelle, le seuil de 1 000 habitants me semble préférable. En dessous, l'effet de ce mode de scrutin est quasiment nul pour favoriser la représentation de l'opposition.

On ne parle pas assez de l'exigence d'information. Les candidats, les électeurs doivent connaître les nouvelles modalités prévues pour ces élections car la bonne participation de nos concitoyens est conditionnée à une bonne connaissance des règles de base. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Georges Labazée .  - Nous arrivons au terme d'un débat qui nous a passionnés. Quel sera le rôle des conseillers départementaux ? N'opposons pas la France rurale à la France urbaine. Nous sommes passés de l'époque des équipements fondamentaux -eau, électricité, téléphone- à celle de l'aménagement des espaces -zones d'activité économique, aménagements fonciers, grandes infrastructures. Depuis dix ans, c'est la notion de développement qui prime : l'économie et l'emploi, les services à la population, le cadre de vie, le logement.

Il n'y a pas de développement si les habitants n'ont pas le sentiment d'appartenir à un territoire, voilà le défi des futurs élus départementaux. Leur rôle s'exercera à des échelles démographiques différentes, d'autant que les cantons actuels ne correspondent pas à la réalité. Gaston Defferre avait posé le principe de non-tutelle d'une collectivité sur une autre. Je me suis penché sur les interventions de parlementaires portant sur l'assistanat subi par certaines collectivités ; c'est instructif... Je n'ai toujours pas compris le débat sur le seuil à partir duquel on deviendrait un citoyen libre et indépendant plutôt qu'un citoyen vassalisé. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Manuel Valls, ministre .  - J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos des uns et des autres. Je salue le travail de la commission des lois, notamment celui de son président et de son rapporteur. Je remercie M. Kaltenbach pour le soutien du groupe socialiste.

MM. Hyest et Larcher ont appelé au réalisme. Que les choses soient claires : je suis prêt au dialogue mais il y a des points fondamentaux, dont le mode de scrutin départemental, qui ne sont pas négociables. C'est au cours de cette deuxième lecture que se décide l'avenir de ce texte. Après la CMP, il sera trop tard. Si le Sénat vote ce texte, l'Assemblée nationale en tiendra compte mais si tel n'est pas le cas, il sera ensuite difficile de faire évoluer les choses. N'y voyez aucune menace ni même un conseil mais une simple constatation.

Ce texte a été déposé en premier lieu au Sénat.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Vous en aviez l'obligation.

M. Manuel Valls, ministre.  - Vous l'avez rejeté, l'Assemblée nationale a imposé sa marque. Courte majorité ? Cela reste une majorité : c'est grâce au scrutin majoritaire, aux institutions de la Ve République, que la gauche peut gouverner.

C'est sous votre présidence du Sénat, monsieur Larcher, que la Délégation aux droits des femmes du Sénat a proposé le scrutin binominal, à l'unanimité ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard Larcher.  - Je n'y suis pour rien ! (Sourires)

M. Manuel Valls, ministre.  - Ce n'est pas la proposition Valls mais la proposition André ! Je ne dépose donc pas de brevet...

Le département, c'est une population et des territoires. J'ai accepté, à l'Assemblée nationale, un amendement de M. Sauvadet qui va précisément dans ce sens, je le dis à MM. Maurey et Dupont. Le projet du Gouvernement assure la représentation des territoires.

Il y a des modes de scrutin différents selon les collectivités, en effet. C'est une particularité française. On ne peut pas en même temps louer la diversité des territoires et vouloir tout uniformiser. (Applaudissements sur les bancs socialistes) C'était d'ailleurs un des défauts du conseiller territorial...

Le conseil des ministres de ce matin aurait décidé de légiférer par ordonnances ? C'est faux !

M. Gérard Larcher.  - Ah !

M. Manuel Valls, ministre.  - Le président de la République a évoqué hier, à Dijon, les blocages de la société française et les moyens de les lever, sur la question du logement entre autres. D'autres gouvernements ont usé des ordonnances. Lorsque le problème se posera, le débat aura lieu.

M. Gérard Larcher.  - Nous verrons !

M. Manuel Valls, ministre.  - La porte-parole du Gouvernement s'est exprimée sur le sujet de façon générale.

M. Adnot a apporté son soutien sous conditions au scrutin binominal et rappelé à raison que les conseillers généraux ne géraient pas les cantons mais participaient aux délibérations des assemblées départementales.

Pour certains, il ne fallait toucher à rien, ni au mode de scrutin, ni aux cantons actuels, ni même au renouvellement par moitié. Nous avons fait le choix de la clarté, avec le renouvellement intégral, le choix de la parité et du redécoupage -que l'instauration du conseiller territorial aurait de toute façon rendu nécessaire. L'essentiel est de créer le cadre le plus juste possible ; un décret sera soumis au Conseil d'État pour chaque département.

Monsieur Mézard, le découpage cantonal a toujours été effectué par voie réglementaire : l'article 34 de la Constitution dit que la loi fixe les règles concernant le régime électoral des assemblées locales. Vous avez défendu les territoires ruraux, bien mis à mal par la RGPP, et vous vous inquiétez inutilement du sort des sous-préfectures ; vous savez les engagements que j'ai pris. Nous partageons la même conception de la République, même s'il n'y a pas de roses sans épines, comme vous l'avez dit. J'espère vous convaincre.

J'espère aussi convaincre Mme Assassi. Nous poursuivrons le débat sur le scrutin majoritaire, même si notre désaccord est acté. Nous partageons, avec Mme Lipietz, l'engagement de la parité ; le Gouvernement écoute tous les groupes de sa majorité.

Le conseil des ministres a fait un choix, le Sénat puis l'Assemblée nationale ont voté. Le scrutin binominal sera adopté, MM. Gérard Larcher et Jean-Jacques Hyest l'ont reconnu. Je souhaite que le Sénat porte pleinement ce texte, construise une majorité.

M. Sido propose 40 %. Discutons d'abord des 30 %...

M. Éric Doligé.  - Qui peut le plus peut le moins !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je suis ouvert sur ce débat, nous pouvons avancer, mais c'est lié au scrutin binominal !

M. Bruno Sido.  - Nous avons compris !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je suis également ouvert sur le seuil pour le deuxième tour, même s'il faut garantir la pluralité de représentation. Enfin, M. Domeizel a eu raison de souligner qu'il faut une large information sur ces sujets.

Vous représentez la diversité de notre pays. Je regrette toujours que l'on oppose territoires urbains et territoires ruraux. C'est pourquoi je suis contre le scrutin mixte : réserver la proportionnelle et la parité aux territoires urbains, c'est considérer les territoires ruraux comme incapables d'accompagner les évolutions de la société française ! (Applaudissements sur les bancs socialistes) Avançons ensemble pour assurer la représentation la plus juste de tous les territoires. Dialogue, ouverture, volonté de construire le meilleur texte possible sans renoncer aux objectifs initiaux, tel est l'esprit du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur plusieurs bancs du groupe RDSE)

La discussion générale est close.

La séance est suspendue à 17 h 45.

présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président

La séance reprend à 18 h 35.

Missions communes d'information (Nominations)

M. le président.  - Les groupes ont présenté leurs candidatures pour les missions communes d'information sur l'action extérieure de la France en matière de recherche et de développement et sur la filière viande en France et en Europe : élevage, abattage et distribution.

La présidence n'ayant reçu aucune opposition, je proclame M. Philippe Adnot, Mme Kalliopi Ango-Ela, M. Michel Berson, Mme Corinne Bouchoux, MM. Jacques Chiron, Yvon Collin, Marc Daunis, Mmes Michelle Demessine, Marie-Annick Duchêne, Josette Durrieu, Joëlle Garriaud-Maylam, Brigitte Gonthier-Maurin, Christiane Kammermann, Fabienne Keller, MM. Jean-Yves Leconte, Jacques Legendre, Mmes Claudine Lepage, Valérie Létard, M. Rachel Mazuir, Mmes Colette Mélot, Catherine Morin-Desailly, MM. Robert Navarro, Bernard Piras, Christian Poncelet, Mme Sophie Primas, MM. Henri de Raincourt, André Trillard membres de la mission commune d'information sur l'action extérieure de la France en matière de recherche et de développement et MM. Gérard Bailly, René Beaumont, Claude Bérit-Débat, Mme Bernadette Bourzai, MM. Michel Boutant, Gérard César, Mme Laurence Cohen, MM. Roland Courteau, André Dulait, Mme Anne Emery-Dumas, MM. Alain Fauconnier, Jean-Luc Fichet, François Fortassin, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Benoît Huré, Jean-François Husson, Georges Labazée, Joël Labbé, Mme Elisabeth Lamure, MM. Jean-Jacques Lasserre, Gérard Le Cam, Jean-Claude Lenoir, Jean-Jacques Mirassou, Mme Renée Nicoux, MM. Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Charles Revet membres de la mission commune d'information sur la filière viande en France et en Europe : élevage, abattage et distribution.

Avis sur une nomination

M. le président.  - La commission du développement durable a donné un avis favorable à la nomination de M. Christian Leyrit à la présidence de la Commission nationale du débat public.

Saisine du Conseil constitutionnel

M. le président.  - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu'il a été saisi ce jour, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs et députés, d'une demande d'examen de conformité à la Constitution de la loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre.

Conseillers départementaux (Deuxième lecture - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral, et du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers intercommunaux et des conseillers départementaux.

Discussion des articles du projet de loi

Article premier

M. le président.  - Amendement n°164, présenté par M. Sido.

Supprimer cet article.

M. Bruno Sido.  - Les départements ont été créés avant la République elle-même. Nos concitoyens savent donc de quoi il est question quand on parle des conseils généraux. L'acte III de la décentralisation marginalise les départements. Va-t-on les supprimer après avoir effacé leur nom ? Ce changement d'appellation va coûter cher.

M. Claude Bérit-Débat.  - Et le conseiller territorial ?

M. Bruno Sido.  - Sa création ne mettait pas fin au conseil général.

Enfin, pourquoi, alors, ne pas parler du conseil communal ? (Exclamations sur les bancs socialistes)

M. Claude Bérit-Débat.  - Blabla !

M. Bruno Sido.  - Plus grave encore : la situation économique de la France étant ce qu'elle est, pourquoi passer notre temps à débattre de lois, certes importantes, mais le chômage ? Va-t-on le traiter par ordonnances en laissant le Parlement discuter, au prix de longues suspensions de séance ? (Mêmes mouvements)

M. le président.  - Amendement identique n°243 rectifié, présenté par MM. de Montgolfier, Houel, Savin, Pointereau, Lefèvre, Grignon, Doligé, Charon et Pierre, Mlle Joissains, MM. Bizet, Ferrand, Milon et Chauveau et Mme Des Esgaulx.

M. Albéric de Montgolfier.  - Les Français n'attendent pas le changement de dénomination des conseillers généraux. De plus, nous allons prochainement examiner l'acte III de la décentralisation. Attendons d'en savoir plus, surtout sur la suppression de la clause de compétence générale... (Exclamations sur les bancs socialistes)

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Inutile de rouvrir le débat sur les points d'accord. Cette modification de langage, déjà votée par le Sénat, est, à mon sens, un instrument important de communication. Rejet.

M. Manuel Valls, ministre.  - Pour gagner du temps, ce que tout le monde souhaite, allons à l'essentiel et n'engagez pas de faux procès à propos des suspensions de séance : on peut avoir à mener d'autres activités qui intéressent les Français.

La suppression du conseiller territorial nous oblige à vous présenter un nouveau projet de loi. Avis défavorable.

M. Claude Domeizel.  - Une anecdote : mon petit-fils m'a demandé pourquoi on disait conseil régional et conseil général. Je n'ai pas réussi à le lui expliquer.

Si cet amendement était adopté, je pourrais lui dire : à cause de M. Sido. (Sourires)

M. Éric Doligé.  - Le conseil général a déjà disparu, si j'en crois les propos de M. Sueur rapportés par Le Figaro. « Nous avons besoin de métropoles fortes et de communautés fortes » a-t-il déclaré, en ajoutant « la réduction du budget des collectivités locales demandée par le Gouvernement est nécessaire ». Les départements sont déjà asphyxiés !

M. Philippe Adnot.  - Il existe déjà une dizaine d'organismes d'État qui s'appellent « conseil départemental de ». Il faudrait les supprimer pour en réserver l'exclusivité aux futurs conseils départementaux.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Je félicite M. Doligé pour l'attention avec laquelle il lit Le Figaro. Je me suis effectivement exprimé, j'ai même été filmé. Vous retrouverez donc facilement la version intégrale de mes propos, que voici : « Il faut des régions fortes, des métropoles et des communautés fortes, dans le respect des communes et des départements ». (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Didier Guillaume.  - Parfait !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Que M. Doligé se rassure, nous partageons la même passion pour le département du Loiret.

M. Didier Guillaume.  - ...et des départements en général !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous avons besoin de régions fortes. Nous devons aller vers des communautés fortes, dans le respect des prérogatives des départements et des communes.

M. Éric Doligé.  - C'était important de le dire !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - En 1991, je défendais au Sénat une loi qui créait les communautés de communes. J'estimais que ces communautés étaient nécessaires et indispensables pour les 37 700 communes françaises. Indispensables parce que les communes pourraient, avec ces communautés, faire ce qu'elles ne pouvaient pas faire seules !

Les amendements nos164 et 243 rectifié ne sont pas adoptés.

L'article premier est adopté.

Article premier bis

M. Pierre-Yves Collombat .  - L'Assemblée nationale a précisé que le département représentait la population et le territoire qui le composent. Ce qui est plus fâcheux est que le projet de loi ignore superbement ce qu'il proclame sous forme de principe.

Un territoire, ce n'est pas une surface euclidienne plane où tous les points se valent. Il y a des territoires, des lieux où les gens vivent. Au lieu de ça, le grand charcutier électoral s'en tiendra à un chiffre : plus au moins 20 %, ou 30%, par rapport à la moyenne démographique. Les exceptions de portée limitée de l'article 23 n'y changeront rien.

Les conseillers départementaux ruraux seront moins identifiables qu'à l'heure actuelle. La Corrèze aurait eu 15 conseillers territoriaux, donc 15 conseillers généraux ; elle en aura deux au mieux. Idem pour les Alpes-de-Haute-Provence. Il y a de quoi faire de l'urticaire. Je ne sais quel est le grand stratège qui a inventé le scrutin binominal mais, après m'être battu contre le conseiller territorial, je dois reconnaître que celui-ci était moins calamiteux que le projet actuel. Quand on va passer aux travaux pratiques, on va voir le problème. Il est encore temps de réagir avant qu'il ne soit trop tard mais je prêche dans le désert ! (Applaudissements à droite)

L'amendement n°71 rectifié est retiré.

L'article premier bis est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°177 rectifié, présenté par M. Maurey, Mmes Morin-Desailly et Férat et MM. de Montesquiou, Guerriau, J.L. Dupont, Namy, Tandonnet, Marseille, Merceron et Capo-Canellas.

Avant l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La loi n°88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :

1° Les trois derniers alinéas de l'article 8 sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Ce montant est divisé en trois fractions :

« 1° Une première fraction destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats aux élections à l'Assemblée nationale, équivalente au quart du montant des crédits visés au premier alinéa ;

« 2° Une deuxième fraction destinée au financement des partis et groupements en fonction de leurs résultats aux élections aux conseils départementaux, équivalente au quart du montant des crédits visés au premier alinéa ;

« 3° Une troisième fraction spécifiquement destinée au financement des partis et groupements représentés au Parlement, équivalente à la moitié du montant des crédits visés au premier alinéa. » ;

2° L'article 9 est ainsi modifié :

a) Après le cinquième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« La deuxième fraction de ces aides est attribuée aux partis et groupements politiques bénéficiaires de la première fraction visée ci-dessus.

« La répartition est effectuée proportionnellement au nombre de suffrages obtenus au premier tour lors du plus récent renouvellement des conseils départementaux par chacun des partis et groupements en cause. Il n'est pas tenu compte des suffrages obtenus par les candidats déclarés inéligibles au titre de l'article L.O. 128 du code électoral.

« En vue de la répartition prévue aux alinéas précédents, les candidats à l'élection des conseillers départementaux indiquent, s'il y a lieu, dans leur déclaration de candidature, le parti ou groupement politique auquel ils se rattachent. Ce parti ou groupement peut être choisi sur une liste établie par arrêté du ministre de l'intérieur publié au Journal officiel de la République française au plus tard le cinquième vendredi précédant le jour du scrutin, ou en dehors de cette liste. La liste comprend l'ensemble des partis ou groupements politiques qui ont déposé au ministère de l'intérieur au plus tard à dix-huit heures le sixième vendredi précédant le jour du scrutin une demande en vue de bénéficier de la deuxième fraction des aides prévues à l'article 8. » ;

b) Au sixième alinéa, le mot : « seconde » est remplacé par le mot : « troisième ».

3° L'article 9-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque, pour un parti ou un groupement politique, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ayant déclaré se rattacher à ce parti ou groupement, lors du dernier renouvellement des conseils départementaux, conformément au huitième alinéa de l'article 9, dépasse 2 % du nombre total de ces candidats, le montant de la deuxième fraction qui lui est attribué en application des articles 8 et 9 est diminué d'un pourcentage égal aux trois quarts de cet écart rapporté au nombre total de ces candidats. »

M. Hervé Maurey.  - Nous ne sommes pas favorables au scrutin binominal. Nous refusons d'entrer dans la logique du Gouvernement, d'où cet amendement et d'autres.

Il faut accompagner le scrutin uninominal, avec redécoupage, par un dispositif favorisant la parité.

Ainsi, cet amendement propose, à enveloppe constante, de créer une nouvelle fraction de crédits pour le financement des partis et groupements politiques. Celle-ci vient directement se substituer à la moitié de la première fraction liée aux résultats des élections législatives. Ces deux fractions représenteront ainsi chacune un quart des crédits globaux. La dernière fraction liée au nombre de parlementaires élus et se déclarant rattachés à tel ou tel parti politique n'est pas modifiée ; elle représentera toujours la moitié des crédits.

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Monsieur Maurey, assumez, au moins ! Certes, vous êtes centriste, de droite ! Vous voulez le maintien du scrutin actuel tout en acceptant le principe du redécoupage. Ce scrutin empêche la parité. Si l'on veut la parité intégrale, il y a deux modes de scrutin possibles : la proportionnelle ou le binominat. Les autres types de scrutins ne peuvent que favoriser la parité, sans l'atteindre. Avis défavorable.

M. Gérard Longuet.  - Une fois n'est pas coutume : je ne suis pas de l'avis de M. Maurey. Associer aux élections territoriales un système de financement des partis politiques entraîne une confusion. Vous proposez d'étendre le financement qui prévaut pour les élections législatives alors que dans le cas de la représentation territoriale, il s'agit de représenter des territoires, pas des voix.

Nous aurions sans doute dû faire comme la monarchie de Louis-Philippe qui, en 1840, avait réduit le nombre des cantons de 1801. Aujourd'hui, nous devons prendre en compte la diversité démographique.

Si nous l'acceptons, c'est que nous ne pas faisons de l'élu départemental un élu strictement politique mais du territoire et du cadre de vie.

M. Hervé Maurey.  - J'ai été stupéfait par l'agressivité de M. le ministre. (M. Emmanuel Valls, ministre, se récrie) Vous vous en êtes pris aux centristes. J'ai dit qu'il fallait procéder à un redécoupage mais en tenant compte de la dimension territoriale et pas seulement démographique.

Si demain, nous avons des cantons avec 80 communes, il s'agira de circonscriptions, ce qui n'est pas la même chose. Oui, il faut tendre vers la parité ; vous voulez l'atteindra immédiatement en sacrifiant la ruralité.

Je n'ai pas saisi en quoi M. Longuet n'était pas de mon avis : je suis d'accord avec tout ce qu'il a dit. (Rires)

L'amendement n°177 rectifié n'est pas adopté.

Article 2

M. Christian Namy .  - Ce projet de loi méconnaît la réalité des élus locaux. Certes, ce scrutin donnera bonne conscience et fait penser que le lien entre l'élu et le territoire sera maintenu.

Avec le redécoupage et ce mode de scrutin, il y aura de très grands cantons et les élus ne pourront plus le représenter correctement. On n'a jamais vu deux directeurs à la tête de la même entreprise ou deux ministres de l'intérieur ! Pourquoi deux élus pour un même canton ? Je demande donc la suppression de cet article.

M. Jean Boyer .  - Les centristes se succèdent. J'ai voté la création du conseiller territorial. Quel nom donnera-t-on aux cantons ?

M. Bruno Sido.  - C'est un vrai sujet !

M. Jean Boyer.  - Ce binôme, comment vivra-t-il ? Comment croire qu'avec deux têtes, cela puisse fonctionner ?

Une novation ? Mais pour innover, il faut avoir de l'expérience ! Nous représentons le terrain, pas seulement la population.

Les cantons de demain compteront de 3 500 à 70 000 habitants. Nous sommes tous différents mais croyez-vous que de telles différences soient acceptables ? (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et à droite)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Cet article est incontestablement le plus important et le moins consensuel, inutilement non consensuel. Le mode de scrutin binominal est si original que personne n'en a voulu jusqu'à présent.

Le souci de la parité ? Cette idée est née au Sénat, lors de la discussion sur le conseiller territorial, et c'était M. Charles Gautier qui l'avait présentée. Mme Michèle André a proposé ce mode de scrutin à la Délégation aux droits des femmes, mais il s'agissait d'apporter un correctif au mode de scrutin proposé par le gouvernement de l'époque pour l'élection du conseiller territorial.

Ici, on remet tout sur la table et on pourrait trouver d'autres moyens pour parvenir à la parité. Je signale que les cantons n'ont pas si mal voté la dernière fois ; peut-être réagiront-ils différemment à l'avenir... Il y a des différences d'appréciation entre ce que pensait la Délégation ici et l'Assemblée nationale.

Comment assurer un ancrage de la parité ? La proportionnelle, c'était un moyen de concilier les deux objectifs. Le ministre répète qu'il n'y a pas d'alternative.

M. Roland Courteau.  - Parce que c'est vrai !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Mais non !. Si l'on avait pris la peine d'y réfléchir, on serait parvenu à quelque chose.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Il faudrait nous expliquer !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Bien sûr, vous êtes dans votre rôle, le doigt sur la couture du pantalon. C'est la logique de la Ve République mais ce n'est pas ce qu'elle nous a apporté de mieux. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC).

M. Vincent Eblé .  - Les critiques les plus vives portent sur les conséquences d'un nécessaire redécoupage.

M. Bruno Sido.  - Il n'a rien compris !

M. Vincent Eblé.  - La carte des cantons doit être redessinée. Le futur conseiller départemental ne pourrait pas assurer la représentation de son canton ? Mais le conseiller territorial y serait-il mieux parvenu alors qu'il siégeait à la fois au conseil général et au conseil régional ?

Au Sénat, nous sommes élus pour l'ensemble du département et nous exerçons nos responsabilités sans difficulté majeure. La distinction urbain-rural regroupe une différenciation sociologique, et donc politique. La proportionnelle en ville, le scrutin majoritaire en zone rurale, c'est un marché de dupe : je reste majoritaire là où je domine et je partage là où je suis en minorité, dans les villes. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Un vrai hold-up !

La diversité des modes d'élection, c'est la richesse de notre République décentralisée ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Didier Guillaume .  - J'ai entendu exprimer des craintes, sur la ruralité et sur le mode de scrutin.

Nous voulons que les territoires puissent continuer à être représentés, par les conseillers départementaux.

Bien sûr qu'il y a d'autres priorités, et nous avons lancé le pacte pour la croissance et l'emploi, la banque publique d'investissements, les contrats génération, les emplois d'avenir et nous luttons contre le chômage. Vous pouvez nous rejoindre.

Vous dites que la ruralité va être mise à mal. Mais c'est tout l'inverse que nous faisons ! Si le conseiller territorial avait été mis en place, le nombre d'élus locaux aurait été diminué par deux. J'ai combattu la mise en cause du nombre des élus qui fait le lit de la démagogie et du populisme. Nous avons besoin de représentants territoriaux. Quel mode de scrutin ? Nous sommes opposés au scrutin proportionnel car c'est le règne des apparatchiks ! (Mme Éliane Assassi s'exclame)

Un binôme ? Dans les départements à la proportionnelle et au scrutin uninominal, les élus s'entendent.

Avec le binôme, nous essayons de concilier la proximité et la parité. Je salue la commission pour son travail et je remercie M. le ministre pour son écoute. Je suis favorable à ce que le seuil de 20 % passe à 30 %. Vos craintes sur la ruralité ne seraient alors plus fondées.

Quel mode de scrutin voulons-nous ? Maintenir celui en place ? Difficile si nous voulons que la parité s'impose. Ce mode de scrutin est unique au monde, dites-vous. Mais dans les pays européens, c'est la proportionnelle à un tour qui prévaut, et nous n'en voulons précisément pas pour préserver le lien avec le territoire.

Le scrutin binominal fera passer les départements dans l'ère de la modernité. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Mirassou .  - Nous sommes, tout comme vous, des défenseurs de la ruralité mais je vous soupçonne, chers collègues de l'opposition, de nourrir quelques arrière-pensées.

Une politique départementale ne doit pas être la juxtaposition des politiques cantonales.

Vous avez une vision passéiste du département. Le binôme favorisera la parité ; sa légitimité, c'est le passage par le suffrage universel.

Tournons-nous vers l'avenir, vers des conseils départementaux de proximité et paritaires.

J'ai peur que vous ne soyez en train de nous rejouer la partie de football d'hier soir, alors que vous savez comment le Barça l'a emporté.

M. Bruno Retailleau .  - La République s'enrichirait à mesure de la diversité de ses modes de scrutin ? Si tel était le cas, la France serait assise sur un tas d'or !

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Mais elle l'est !

M. Bruno Retailleau.  - Nous avons deux craintes. La première touche au principe même. N'employons pas ce mot de modernité, que l'on convoque à tout propos. La représentativité est indivisible et je crains qu'elle ne soit affaiblie par ce binôme qui, par nature, la divise. Certains tandems seront forts, d'autres non. L'autre crainte, c'est la conséquence : ce nouveau mode de scrutin vous donne les moyens de redécouper les cantons et d'enjamber les limites des circonscriptions. Il faut nous rassurer sur ces points.

Si par malheur cet article était adopté, la section cantonale proposée par M. Sido en première lecture clarifierait les choses et nous rassurerait ; il faudrait porter la toise à 30 % pour mieux respecter la ruralité. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Frédérique Espagnac.  - Nous sommes d'accord.

M. Yves Krattinger .  - Trois questions se posent : l'égalité devant le suffrage, l'équilibre des territoires et le respect de la parité. Examinons les questions dans l'ordre : le découpage actuel des cantons est inacceptable avec des écarts de un à quarante-sept ! (M. Michel Delebarre, rapporteur, le confirme) Nous sommes tous d'accord. Faut-il des cantons identiques ? Non, nous en sommes d'accord aussi et voulons tenir compte au mieux des spécificités des territoires, dans le respect de la Constitution. Le ministre a fait une ouverture avec des possibilités de dérogations. Et voici maintenant une ouverture supplémentaire en portant l'écart admissible à 30 %. Jusque-là, donc, nous sommes d'accord, même si personne n'a envie de tenir les ciseaux et de revêtir le tablier du grand charcutier.

Avec les conseillers territoriaux, nous aurions eu 2 000 cantons ; avec ce texte, il y aura 2 000 cantons et deux élus là où il ne devait y avoir qu'un seul conseiller territorial, avec deux missions. Ce que propose le Gouvernement va donc dans le bon sens.

En fin de compte, le débat porte sur la parité et, surtout, sur les peurs que certains ont...

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Yves Krattinger.  - ...de perdre leur siège car ils seront deux au lieu de six sur un territoire avec peu d'habitants. Avec le conseiller territorial, il n'y en avait plus qu'un ? Certes, mais nous étions six hommes ! La parité, c'est par là où nous avons fauté (Mme Frédérique Espagnac s'exclame) parce que nous n'avons pas été capables de faire élire des femmes. Avec ce texte, nous avons l'occasion d'entrer dans la modernité. Dans quelques temps, quand il y aura autant de femmes que d'hommes dans tous les conseils généraux, ceux qui l'auront fait en seront fiers. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Éric Doligé .  - Je me ferai le porte-parole des présidents de conseils généraux.

M. Didier Guillaume.  - De certains !

M. Éric Doligé.  - Le 6 février, nous étions soixante-dix réunis, dont sans doute une cinquantaine de la majorité. Je parle de la tonalité d'ensemble. Un de vos collègues de la façade atlantique a dit : « Avec Sarko, on croyait avoir atteint le fond ; c'est pire avec Hollande ». (Exclamations sur les bancs socialistes) D'autres parlent de « machine infernale », de « machine à claques » pour le scrutin binominal, ajoutant que c'était pire que « Sarko » ! (Exclamations prolongées sur les mêmes bancs)

Chers collègues, vous nous avez donc mis en difficulté sur le conseiller territorial...

M. Vincent Eblé.  - Ce que vous dites est faux ! L'Assemblée des départements de France a donné un avis favorable à ce texte.

M. Éric Doligé.  - Je comprends que cela vous gêne ! (Protestations à gauche) Sur l'accessibilité, dans le texte de simplification des normes (nouvelles exclamations), vous avez dit le contraire de ce que propose Mme Campion dans son excellent rapport, qui prône le report de quatre à sept ans des normes d'accessibilité.

M. Vincent Eblé.  - Vous faites parler les absents ! Scandaleux !

Mme Éliane Assassi.  - Apparatchik !

Mme Muguette Dini .  - Qui a eu cette idée folle du binôme ? M. le ministre l'a dit : Mme André, présidente de la Délégation sénatoriale aux droits des femmes. Mais cette proposition concernait les législatives, à l'origine. Ensuite, nous l'avons évoquée à propos du conseiller territorial. Moi qui me bats pour la parité depuis trente ans, je proposais plutôt un bulletin paritaire : celui ou celle qui remportait le plus de voix était titulaire, l'autre suppléant(e). En peu de temps, on serait parvenu à une parité totale.

J'avais voté contre la création d'un suppléant de l'autre sexe. Fallait-il assassiner 2 600 conseillers généraux pour que les femmes arrivent aux responsabilités ? Aujourd'hui, je suis contre le binôme. Certes, il assurera la parité mais posera d'innombrables problèmes pratiques dans les conseils généraux. Je vous le dis, monsieur le ministre, le binôme n'est pas la solution. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gérard Miquel .  - A mes collègues qui ont voté le conseiller territorial, je veux rappeler une réalité. Le Lot aurait compté quinze conseillers territoriaux ; avec quinze cantons, il aura trente conseillers départementaux, à quoi s'ajouteront nos six conseillers régionaux. Au lieu des quinze conseillers territoriaux, nous aurons trente six élus. En quoi met-on à mal la ruralité ?

Je suis totalement opposé à la proportionnelle pour ce type d'élection. Elle favorise ceux qui ne sont pas capables de se faire élire au scrutin uninominal et que l'on ne voit guère ensuite.

Les départements ont deux siècles d'existence, il faut redorer leur blason avec le binôme qui garantit la parité et la proximité avec le territoire. Élus dans des cantons plus vastes, les conseillers départementaux auront une vision plus large. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Christian Favier .  - Nous n'avons pas déposé d'amendement de suppression de cet article. Notre ambition est de favoriser la parité mais aussi le pluralisme, l'un va de pair avec l'autre. A la différence de la proportionnelle, le binôme n'y répond pas. Certaines femmes en déduiraient qu'elles devraient être systématiquement accompagnées d'homme pour gagner leur place en politique. (Protestations sur les bancs socialistes) Je vous renvoie aux déclarations de la présidente de la Délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale.

Le mode de scrutin régional devrait nous servir d'exemple, nous avons fait des propositions en ce sens en première lecture.

Le lien avec le territoire ? Un conseil général gère des budgets parfois de plus de 1 milliard d'euros, pour les transports, pour les personnes âgées, pour l'emploi, pour la solidarité, que sais-je encore... Pourquoi devrait-il se cantonner, sans mauvais jeu de mot, à son quartier ? L'horizon de son action doit être le département tout entier.

La séance est suspendue à 20 heures.

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

La séance reprend à 22 heures.

Question prioritaire de constitutionnalité

Mme la présidente.  - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 13 mars, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil d'État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques.

Conseillers départementaux (Deuxième lecture - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral, et du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers intercommunaux et des conseillers départementaux.

Discussion des articles du projet de loi (Suite)

Article 2 (Suite)

M. Jean-Claude Lenoir .  - (« Ah ! » à gauche) Un système électoral repose sur deux principes, l'équité et l'efficacité. Depuis quelques années, on y a ajouté la parité. La révision de la Constitution voulue par Jacques Chirac disait qu'il fallait non un partage strict des responsabilités politiques mais l'égalité des chances entre hommes et femmes dans l'accès au mandat.

Pour moi, équité se conjugue avec proximité ; avec le système que vous proposez, celle-ci ne sera pas au rendez-vous. Le nombre de cantons sera divisé par trois en zone rurale. Un de nos collègues socialistes disait que son département comptait trente six cantons et en aurait compté vingt-cinq avec le conseiller territorial.

M. Claude Bérit-Débat.  - Non, quinze.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Avec ce texte, il en comptera dix-huit... Les gros cantons ruraux que vous allez fabriquer rompront avec le principe de la proximité. Le monde rural pèse aujourd'hui plus lourd que le monde urbain ; mais après tout, cela contrebalance d'autres forces... Quoi que vous en disiez, le système actuel lui était plus favorable.

L'efficacité, maintenant. Je veux fustiger (exclamations à gauche) le système que vous inventez.

Le conseiller territorial a été vilipendé, défiguré, lors de campagnes d'ailleurs assez fructueuses... Mais il semble avoir repris quelques couleurs dans cette assemblée, cet après-midi. (Marques de dénégation sur les bancs socialistes)

M. Claude Bérit-Débat.  - Au contraire !

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'était « moins pire »...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Avez-vous entendu beaucoup de personnes dire que le scrutin binominal était la bonne solution pour représenter le monde rural ? Je n'ai entendu que des quolibets. Vous de même, je suppose, dans les cellules que vous fréquentez...

Mme Éliane Assassi.  - Les cellules, c'est au parti communiste, et elles ont disparu !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Votre système est rocambolesque, grandguignolesque ; il frise le ridicule ! (Applaudissements à droite ; exclamations sur les bancs socialistes)

M. Michel Boutant .  - Je regrette l'absence de M. Doligé car je voulais revenir sur son intervention. J'étais présent à la réunion du 6 février dernier de l'Association des départements de France et notre collègue a voulu faire croire que les propos tenus alors l'avaient été sur ce projet de loi. Or nous discutions du premier document de travail, que nous découvrions, de la ministre de la décentralisation, texte qui appelait en effet un certain nombre de remarques.

Un mot sur le binôme. Nous sommes un certain nombre ici à être élus en binôme dans les départements et je n'ai pas noté de divergences profondes entre les sénateurs représentant ces départements. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Claude Domeizel .  - Tout est question de présentation, ai-je appris depuis longtemps... Il y a ici six à huit sénateurs élus en binôme sur les mêmes listes, un homme et une femme.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Ça n'a rien à voir !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Un binôme, c'est deux !

M. Claude Domeizel.  - Il en est de même pour les élections municipales à la proportionnelle lorsqu'une liste n'a que deux élus. Ce n'est pas aussi abominable qu'on veut bien le dire.

Peut-être aurait-il fallu, monsieur le ministre, ne pas parler de binômes mais de scrutin de liste à quatre candidats où seraient élus les deux premiers de liste arrivés en tête...

M. Gérard Roche .  - A cette allure, on n'est pas prêt de voir de la fumée blanche au-dessus du Sénat. (Sourires)

Les départements sont une collectivité particulière ; dans le monde rural, c'est la collectivité de proximité par excellence. Ce qui justifie que son mode d'élection fasse l'objet d'une réflexion approfondie. Depuis longtemps, nous sommes confrontés à deux tendances : il y a les partisans de la proportionnelle intégrale et ceux de l'élection territoriale. Personne n'a le monopole de la ruralité.

Mme Frédérique Espagnac.  - Vous non plus !

M. Gérard Roche.  - Il faut harmoniser les populations dans les circonscriptions, régler le problème de la parité et répartir les compétences entre les départements et les régions.

Avec le conseiller territorial, on réglait la question des compétences et de la proximité, mais pas la parité ; avec votre système, on règle la parité et la dimension des circonscriptions, mais pas la question des compétences... Nous sommes donc face à un blocage, la proportionnelle étant défendue par peu d'entre nous.

Je serais prêt à m'abstenir sur cet article, à condition que le tunnel soit fixé à 30 %, que le deuxième tour ne soit accessible qu'à partir de 12,5 % des suffrages et qu'on en reste au seuil de 1 000 habitants pour l'application du scrutin de liste.

M. Gérard Bailly .  - Nos concitoyens identifient mal leurs élus et connaissent mal les compétences des différentes collectivités. Ce sera certainement encore plus difficile si nous avons, sur le même territoire, deux conseillers départementaux plus deux suppléants...

Quand il y a un problème sur une route départementale ou dans un collège, quand il y a un problème de transport scolaire, un problème social, on appelle le conseiller général. Demain, nos compétences seront-elles bien identifiées ? Je n'en suis pas sûr.

En outre, les cantons seront plus étendus, d'où une moindre proximité avec les élus. Les élus départementaux ne risquent-ils pas de délaisser davantage les petites communes ?

Je défends les conseillers territoriaux : nous aurions eu vingt-sept conseillers territoriaux au lieu de neuf dans mon département du Jura. Je suis conseiller général et conseiller régional, combien ai-je vu de dossiers traités en double ? (Marques d'impatience sur les bancs socialistes)

Le tunnel des 20 % est trop resserré ; avec 30 %, un accord serait possible, même si le binôme n'est pas une bonne chose. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois .  - Je sens comme une peur de la nouveauté, du changement finalement. (Exclamations à droite)

Il y aura plusieurs élus sur le même territoire ? Quelle affaire ! Il y en a dans les régions, les communes, au Sénat, à l'Assemblée nationale ! Je salue mes collègues qui défendent la proportionnelle, leur position est claire et simple. En revanche, ceux qui veulent un ancrage local et en même temps entendent respecter la Constitution qui impose la parité...

M. Bruno Sido.  - Qui impose qu'elle soit favorisée !

M. André Reichardt.  - Ce n'est pas la même chose !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - ...ceux-là, que proposent-ils ? Rien. On a imaginé des pénalités financières, mais ça ne marche pas ! Alors quoi d'autre ?

Dans un quotidien régional, j'ai lu un article dans lequel un personnage important disait que cette réforme marquait la mort des départements. Mais croyez-vous que le fait qu'il y ait autant de femmes que d'hommes dans les conseils départementaux, ce soit la mort des départements ? Mais dans ce cas, les villes de plus de 3 500 habitants sont mortes, les régions aussi ! Avez-vous donc quelque chose à proposer ?

M. Rémy Pointereau.  - Oui !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - M. Collombat propose une proportionnelle infra-départementale, c'est cohérent ; ailleurs je ne vois guère de cohérence. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme la présidente.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Supprimer cet article.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Je ne suis conseiller régional que depuis trente-trois ans et j'ai vu l'évolution de la démographie. Le redécoupage des cantons était nécessaire. Mais avec celui qu'on nous propose, on aura des arrondissements de 130 communes, presque autant que dans une circonscription législative. Un député et un conseiller général, ce n'est pas la même chose !

Avec le binôme, il y a un problème juridique. Si un membre du binôme décède et qu'il n'a pas de remplaçant, comment fait-on pour maintenir la parité dès lors qu'on ne pourra organiser d'élection ? Le siège restera vacant cinq ans si le décès a lieu en début de mandat. (Exclamations et marques de dénégation sur les bancs socialistes) On n'a jamais vu ça !

Le binôme sera voté, c'est évident, mais nous devons réaffirmer notre opposition à cette bizarrerie juridique, surtout quand l'acte III de la décentralisation va modifier les compétences des départements.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°147, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe UDI-UC.

M. Hervé Maurey.  - Beaucoup a été dit sur le mode de scrutin binominal, ubuesque et néfaste. Ubuesque parce que, pour reprendre une expression triviale, on n'a jamais vu deux crocodiles dans le même marigot...

Mme Éliane Assassi.  - Merci pour l'image !

M. Hervé Maurey.  - Néfaste parce qu'avec le redécoupage, il portera un mauvais coup à la ruralité.

Ce système est critiqué, et pas seulement par la droite. Je rencontre des hommes et des femmes qui sont interpellés, le mot est mesuré, par ce mode de scrutin bizarre. M. Krattinger a dit qu'il y avait sans doute une inquiétude au sujet du redécoupage. Certes, les cantons ont besoin d'être redécoupés mais là, on nous propose de refaire toute la carte cantonale en divisant leur nombre par deux. On va supprimer de nombreux chefs lieux de canton, avec des conséquences financières à la clé. Enfin, le canton ne devra plus respecter les limites des circonscriptions, et il n'est même plus envisagé qu'ils correspondent à des bassins de vie ou à des intercommunalités. D'où l'inquiétude légitime des élus. C'est la porte ouverte à tout -au fait du prince.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°205 rectifié, présenté par MM. Collombat, Barbier, C. Bourquin, Plancade et Tropeano.

M. Pierre-Yves Collombat.  - M. Mézard et moi-même avons été suffisamment explicites. L'amendement est défendu.

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Le contexte est tout à fait particulier. A Rome, les cardinaux se sont réunis pour choisir un pape.

Mme Nathalie Goulet.  - C'est fait ! Il est argentin !

M. André Reichardt.  - Ce n'est pas un binôme !

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Chose extraordinaire, ils ont réussi. A Paris, les sénateurs échouent à faire progresser ce texte. Je n'en tire aucune leçon mais je constate...

Nous voulons donner un nouveau souffle au conseil départemental, nous sommes tous d'accord pour avancer dans le sens de la parité. Reconnaissons que celle-ci n'a guère progressé dans l'histoire des départements...

Mme Éliane Assassi.  - C'est vrai.

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Quand on cherche un nouveau mode scrutin qui réponde à ces exigences, on n'a pas beaucoup de choix : la proportionnelle ou la solution prônée par le Gouvernement. Sur ces trois amendements, ma position est délicate : à titre personnel, partisan de la proposition gouvernementale, j'y suis défavorable ; au nom de la commission, je dois leur donner un avis favorable. Disant cela, je retrouve le chemin de Rome. (Sourires) J'en arrête là pour ne pas céder davantage à la coupable tentation du sacrifice. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. André Reichardt.  - Monseigneur Delebarre ! (Sourires)

M. Manuel Valls, ministre.  - Ministre des cultes, mon devoir est de le dire : nous arrivons à un moment de vérité. Le conseiller territorial a été supprimé (« Hélas ! » à droite), il n'y a pas de majorité à l'Assemblée nationale ni au Sénat pour son maintien. Il n'y a pas non plus de majorité pour la proportionnelle dans les départements, quel que soit la solution retenue, départementale ou fondée sur les intercommunalités -ce serait d'ailleurs dévoyer celles-ci...

M. Pierre-Yves Collombat.  - Ah bon ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Certains disent connaître le terrain mais ici, quel que soit sa couleur politique, personne n'a à donner de leçon sur la capacité des autres à représenter les territoires. Comme, de toute façon, il faut redécouper, il faudra le faire avec le sens de la mesure, de l'équité et de l'intérêt général, dans le respect des règles constitutionnelles.

Sans majorité, ni pour le conseiller territorial ni pour la proportionnelle, et si la parité s'impose, le système binominal s'impose. Quand il entrera dans les moeurs, il faudra l'expliquer, bien sûr. Le scrutin binominal permet la proximité et la parité. J'entends dire qu'on ne peut imposer la parité ; mais dans les scrutins de liste, elle s'impose... Vous avez vu le résultat avec le système des suppléants : en 2011, la parité a régressé ! Qui peut croire qu'elle progressera avec le système actuel ? Qu'il y aurait d'un coup un changement ?

Il faut que les choses soient claires. Le vote qui va suivre est important pour la suite de nos débats et ceux de l'Assemblée nationale. En rejetant cet article, chacun prendra ses responsabilités. Je sais qu'il y a des postures politiques, mais il serait dommage que le Sénat ne porte pas cette réforme, ce scrutin sera une véritable révolution de la représentation des territoires et de la parité.

Je resterai ouvert pendant le débat sur deux éléments : la possibilité d'aller vers 30 % pour le tunnel et le seuil de qualification pour le deuxième tour.

M. André Reichardt.  - C'était important.

M. Manuel Valls, ministre.  - Si ce sont des points qui permettent un accord, le Gouvernement ne s'y opposera pas. Dans beaucoup de départements, les travaux du Sénat comme de l'Assemblée nationale l'ont montré, les 30 % autoriseront une représentation plus juste et plus équilibrée des territoires.

Non, ce texte ne remet pas en cause la représentation des territoires ruraux ! (Applaudissements sur les bancs socialistes) Je vous invite à réfléchir. Le Sénat s'apprête à rejeter un article alors que le Gouvernement est prêt à renforcer les liens entre les élus et les citoyens. Les deux élus feront campagne ensemble, ils seront élus ensemble, ils seront capables de défendre ensemble les intérêts de leur territoire, qui seront d'ailleurs mieux défendus par un homme et une femme. Ce sera ça, le changement ! Et le Sénat s'apprêterait à le refuser ? Il a l'occasion d'être profondément moderne ! Travaillons ensemble à cette modernité.

Pour le redécoupage, le Conseil d'État sera saisi pour chaque département et chaque conseil général donnera son avis.

M. Didier Guillaume.  - C'est nouveau !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je respecterai ces avis. Mais ne comparons pas avec les législatives, le dernier découpage n'a pas donné satisfaction à tout le monde...

Jusqu'à la CMP, le Gouvernement sera à l'écoute. Il serait regrettable que le Sénat ne porte pas lui-même ce texte alors qu'il représente les collectivités territoriales. Je dis enfin à la majorité qu'elle peut se retrouver, au-delà de ses différences, autour de la représentation des territoires et de la parité. Que chacun prenne ses responsabilités. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard Miquel.  - Nous sommes habitués ici aux postures politiques mais je veux rappeler les déclarations d'un certain nombre de nos collègues de droite. Le 10 juillet 2012, devant le bureau de l'ADF, M. Doligé s'est déclaré favorable au binôme à condition que le redécoupage cantonal ne défavorise pas le monde rural ; M. Sido disait, le même jour, « le temps est compté pour se positionner ».

Qu'avez-vous fait de vos collègues femmes, messieurs de l'UMP ? Peut-être ont-elles fui l'hémicycle pour éviter d'entendre des propos à connotation machiste sur la parité ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

On nous a démontré que le mode de scrutin binomal ne mettra pas à mal la représentation des collectivités rurales.

M. Alain Fouché.  - Mais si !

M. Gérard Miquel.  - Le Sénat s'honorerait à continuer à débattre. Si vous voulez les 30 %, vous ne devez pas voter la suppression !

M. Rémy Pointereau.  - Avec quelles garanties ?

M. Gérard Miquel.  - Celles que M. le ministre vous a données !

M. Rémy Pointereau.  - L'intérêt des collectivités territoriales, ce n'est pas du marchandage !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je ne peux accepter sans rien dire les propos de M. le ministre. J'ai combattu pied à pied le conseiller territorial, c'était une calamité. J'ai pris mes responsabilités, je les prendrai encore : le mode de scrutin qu'on nous propose n'est pas bon. S'il n'y avait pas d'autre choix, je l'aurais accepté, mais ce n'est pas le cas. Quand vous dites, monsieur le ministre, que l'on dévoierait l'intercommunalité en la prenant comme circonscription, de qui se moque-t-on ? Dévoie-t-on la commune avec les délégués qui élisent les sénateurs ? On aurait pu partir des intercommunalités, ce qui aurait permis de les articuler avec le département. Je suis persuadé qu'on y viendra. On avait l'occasion de donner un contenu concret aux circonscriptions, à taille humaine, avec, sur ces bases, la proportionnelle qui règle le problème de la parité. Mais on ne le fait pas parce que la décision est déjà prise. Je ne suis pas là pour négocier 20 % ou 30 %. Je prends mes responsabilités et on verra la suite.

M. Marc Laménie.  - Je soutiendrai les amendements de suppression de l'article 2 pour une raison : je ne suis pas convaincu, je dirais, par le binôme. Nous avons actuellement un système de suppléants, des cantons à taille humaine. En 1998, j'ai été élu d'un canton des Ardennes, le plus petit de tous, 2 000 habitants ; on me disait déjà qu'il était voué à la disparition... Pourtant, nous avons notre rôle à jouer, nous faisons vivre la ruralité. Dans mon arrondissement, il restera peut-être deux cantons de plus de 60 communes chacun... Je suis sceptique sur la gouvernance, comme on dit, du binôme.

M. Jean-René Lecerf.  - Le travail en séance publique m'apparaît toujours caricatural par rapport à la discussion en commission. Monsieur Miquel, sur la parité, il n'y a pas les bons d'un côté et de l'autre les méchants : mon amendement qui prévoyait la parité entre les fonctions de président et de premier vice-président avait été rejeté en première lecture, la commission l'a accepté en deuxième. Notre vision de la parité est qualitative, elle n'est pas seulement mathématique.

Comme les collègues de l'UMP, je suis hostile au binôme. Si le binôme voit le jour, j'irai expliquer dans mon département pourquoi j'y étais opposé -comme les membres de la majorité actuelle l'auraient fait si l'élection présidentielle avait eu un autre résultat et si le conseiller territorial avait prospéré. Pourtant, je ne voterai pas les amendements de suppression. Nous avons tous défendu la proximité et la ruralité. L'élargissement du tunnel à 30 % est une avancée notable, le retour au seuil de 12,5 % évitera de placer le Front national en arbitre au gré de ses caprices. De la souplesse doit être introduite dans le fléchage des conseillers communautaires...

A quoi serviront le travail partenarial de la commission des lois, les innombrables avancées qu'il a permis, notamment sur les modalités du découpage électoral, si l'article 2 est rejeté ? Si le Sénat se trouve dans l'incapacité d'affronter la CMP dans un rapport de force égalitaire ?

Je veux, enfin, défendre l'institution sénatoriale.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. Jean-René Lecerf.  - Le Sénat peut-il se laver les mains de ce texte qui touche aux collectivités territoriales et laisser tout pouvoir à l'Assemblée nationale ? Que deviendrait le bicamérisme ?

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Tout à fait !

M. Jean-René Lecerf.  - Il n'y a pas de plan B. Alors, même si je partage au mot près les arguments de M. Hyest, je suis convaincu qu'il faut repousser les amendements de suppression.

Mme Éliane Assassi.  - Cela n'étonnera personne, nous ne voterons pas les amendements de suppression. Nous ne voulons pas faire le deuil d'un débat sur l'article 2 ni des réponses du ministre sur nos amendements. On ne peut pas faire grief aux élus communistes de ne pas porter haut la défense de la parité. Nous sommes pour la proportionnelle intégrale, mais nous pouvons entendre que la France n'est pas mûre... Nous avons d'ailleurs déposé un amendement de repli proposant un scrutin mixte.

Nous nous déterminerons en toute responsabilité sur l'article 2. Beaucoup d'élus s'interrogent. Que le Gouvernement entende tous ceux qui composent sa majorité !

M. Bruno Sido.  - Sans dramatiser la situation, l'heure est grave. M. Sueur exagère, nous avons fait des propositions.

Si le redécoupage des cantons est nécessaire, c'est grâce au conseiller territorial. C'est une obligation pour rétablir l'égalité devant le suffrage. Finalement, nous sommes responsables, et nous l'assumons, de ce redécoupage. Pourquoi ne pas l'avoir fait avant et partout ? En Haute-Marne, il a été fait il y a une vingtaine d'années, pourquoi pas ailleurs ? Nous ne devrions pas être fiers d'une telle inertie.

La parité est incontestablement une belle idée. Comment réagirions-nous aujourd'hui si le général de Gaulle venait devant le Sénat défendre le vote des femmes ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Le général de Gaulle ne serait pas venu au Sénat...

M. Bruno Sido.  - La parité va dans le sens de l'histoire ; ne pas la soutenir est ringard. Le scrutin binominal est peut-être un mal nécessaire pour en venir à la parité. Pour l'atténuer, ce mal, je propose un amendement qui établit des sections.

Rejeter cet article 2 serait rééditer l'échec de la première lecture : huit jours de discours et de débats pour rien, ou presque. Personnellement, je ne prendrai pas part au vote. Le ministre, s'il a le goût des discours électrisants, ce qui est le défaut de ses qualités, a fait des propositions intéressantes qui prospèreront à l'Assemblée nationale. Je lui fais confiance et ma confiance serait plus grande s'il réitérait ses engagements... (Sourires)

M. André Reichardt.  - Je réaffirme ma position de première lecture. Le nouveau mode de scrutin aboutit à une sous-représentation des territoires, notamment ruraux. Il faut que les électeurs sachent à quoi ils participent. Le portage de projet va être fragilisé.

La parité, brandie en étendard, masque des réalités moins aimables : un redécoupage à votre guise dans l'espoir de triompher aux élections. Vous allez porter atteinte à l'équilibre de la République (Exclamations à gauche) Difficulté à porter les projets, éloignement des citoyens, risque de triangulaires, voire de quadrangulaires : ce mode de scrutin baroque, bon pour la parité, sera au détriment du pluralisme en favorisant le bipartisme car là où il y avait deux élus de sensibilités différentes, il y en aura deux du même parti.

Pour la défense des collectivités territoriales, votons non !

M. Dominique de Legge.  - Pour passer un accord, il faut des conditions... En vous entendant, monsieur le ministre, j'ai eu l'impression que vous posiez comme préalable au compromis l'adoption de l'article 2. Pourquoi ne pas avoir demandé la réserve ? Parce que je n'ai pas confiance sur le sort de ce texte à l'Assemblée nationale, je voterai les amendements de suppression.

M. Philippe Adnot.  - Si nous votons les amendements de suppression, la discussion s'arrêtera et les députés feront ce qu'ils voudront.

Vois ne faites pas confiance au ministre ? Vous avez peut-être raison mais le pire serait de voter ces amendements de suppression ; en y renonçant, vous permettrez d'en faire adopter d'autres et de soumettre un texte aux députés. L'attitude de M. Sido, dont on sait la fidélité envers l'UMP, est courageuse.

La défense du milieu rural, ce n'est pas s'enfoncer la tête dans le sable en se figeant dans des attitudes politiciennes ; c'est l'adoption du plus 30 % et moins 30 %.

Dans mon département, où les cantons, comptent en moyenne 9 000 habitants, cela fera toute la différence. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Je m'exprimerai en tant que président de la commission des lois. Nous avions bien travaillé en commission : deux réunions et 117 amendements adoptés émanant de tous les groupes. Il est des moments, dans les débats, où des convergences sont possibles. Pardon à M. Sido si j'ai tenu des propos maladroits à son encontre. Au fond, le sens du vote qui va intervenir est le suivant : veut-on accorder du crédit au travail de la commission et au Sénat qui représente les collectivités territoriales. ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Monsieur de Legge, ne mettez pas en cause ma bonne foi. Lors de la première lecture, j'avais dit au Sénat qu'il se ferait mieux entendre à l'Assemblée nationale s'il votait le texte. Je dis ce soir la même chose. Ce n'est pas faire du chantage, c'est la réalité de la procédure parlementaire. Cela ne changera rien aux engagements que j'ai pris : le passage du tunnel de 20 à 30 %, le seuil de 12,5 % des inscrits pour être au second tour et le seuil de 1 000 habitants pour la proportionnelle. Reste que ces engagements sont tous trois liés au binôme, qu'il faut voter, et je n'oublie pas les propositions de Mme Assassi.

A la demande du groupe UMP, les amendements identiques nos21 rectifié, 147 et 205 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 328
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 161
Contre 167

Le Sénat n'a pas adopté.

(Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

Mme la présidente.  - Amendement n°275, présenté par M. Sido.

I. - Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 191. - Il est créé dans chaque canton deux sections. 

II. - En conséquence, alinéa 2

Supprimer la référence :

Art. L. 191. -

M. Bruno Sido.  - Deux sections par canton donneront au conseiller départemental une assise territoriale . L'adoption de cet amendement amortirait le choc culturel du scrutin binominal.

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Je comprends le souci de M. Sido mais la commission ne le partage pas car elle veut laisser au binôme la liberté de s'organiser. L'avis est défavorable.

M. Manuel Valls, ministre.  - Le projet de loi prévoit la solidarité devant le suffrage au sein du binôme, ce qui interdit la création de sections. Donc, rejet.

L'amendement n°275 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°178 rectifié, présenté par M. Maurey, Mmes Morin-Desailly et Férat et MM. de Montesquiou, Guerriau, J.L. Dupont, Tandonnet, Marseille, Capo-Canellas et Merceron.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 191.  - Les électeurs de chaque canton élisent un conseiller départemental au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. »

M. Hervé Maurey.  - Cet amendement maintient le mode de scrutin actuel des conseillers généraux : le scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Il était assorti d'un renforcement des pénalités financières en cas de non-respect de la parité. M. Sueur le jugeant inefficace, la logique voudrait qu'il propose la suppression de cette disposition pour les élections législatives...

Mme la présidente.  - Amendement n°72, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 191.  - Les conseillers départementaux sont élus à la proportionnelle intégrale sur une seule circonscription électorale, à partir de listes de candidats comportant autant de noms qu'il y a de sièges à pourvoir et composées alternativement d'un candidat de chaque sexe. »

M. Michel Le Scouarnec.  - Cet article 2 avait été rejeté en première lecture. L'exigence impérieuse de la parité ne doit pas être satisfaite au détriment du pluralisme ; parité et pluralisme forment un seul et même binôme républicain. Il ne s'agit nullement d'élire je ne sais quel apparatchik...

Mme Nathalie Goulet.  - C'est déjà fait !

M. Michel Le Scouarnec.  - C'est pourquoi nous proposons la proportionnelle. Trop d'abstentions ont été constatées ces dernières années ; la division par deux du nombre de cantons éloignera l'élu de l'électeur, de toute façon.

Mme la présidente.  - Amendement n°115, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 191.  - Les conseillers départementaux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. »

Mme Hélène Lipietz.  - Je propose le scrutin de liste proportionnelle, paritaire avec une prime majoritaire de 25 %. Le conseiller départemental sera un élu de terrain, il pourra se déplacer dans tout le département.

Mme la présidente.  - Amendement n°60 rectifié bis, présenté par MM. Savin, Milon et de Montgolfier.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par douze alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 191. - Le nombre de conseillers départementaux est égal, pour chaque département, aux deux tiers du nombre de conseillers généraux existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair.

« Le nombre de conseillers départementaux dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à quinze.

« Les conseillers départementaux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation.

« Le département se divise en autant de circonscriptions électorales qu'il y a d'arrondissements. Le nombre de sièges par arrondissement départemental est réparti en fonction des deux tiers du nombre de conseillers généraux existant au 1er janvier 2013 dans cet arrondissement.

« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du neuvième alinéa.

« Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour.

« Pour se présenter pour le second tour, il faut avoir obtenu 10 % des suffrages exprimés au premier tour.

« Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur. En cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du neuvième alinéa.

« Les listes qui n'ont pas obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges.

« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus.

« Les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation sur la liste.

« Lorsque le département est composé d'un seul arrondissement, les sièges sont attribués dans le ressort de la circonscription départementale selon les mêmes règles. »

M. Michel Savin.  - Je suis minoritaire dans mon groupe puisque cet amendement intègre la représentation à la proportionnelle dans l'élection des conseillers départementaux tout en maintenant la parité et une représentation territoriale du département par arrondissement.

Concernant le redécoupage, ma proposition maintiendra certains cantons. Enfin, et ce n'est pas démagogique, elle réduira d'un tiers le nombre d'élus.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

Mme la présidente.  - Amendement n°106, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 191.  - Les conseillers départementaux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. Chaque liste est constituée de quatre sections. »

Mme Hélène Lipietz.  - La proportionnelle ne produit pas des élus « hors sol ».

Mercredi 13 mars 2013

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Sommaire

Missions communes d'information (Candidatures)1

Conseillers départementaux (Deuxième lecture)1

Discussion générale commune1

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur1

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois3

M. Jean-Jacques Hyest4

Mme Éliane Assassi4

M. Jean-Léonce Dupont4

M. Jacques Mézard4

Mme Hélène Lipietz4

M. Philippe Adnot4

M. Philippe Kaltenbach4

SÉANCE

du mercredi 13 mars 2013

69e séance de la session ordinaire 2012-2013

présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. Jean-François Humbert.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Missions communes d'information (Candidatures)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la désignation des 27 membres de la mission commune d'information sur l'action extérieure de la France en matière de recherche et de développement, créée à l'initiative du groupe écologiste en application de son droit de tirage, et de la mission commune d'information sur la filière viande en France et en Europe : élevage, abattage et distribution, créée à l'initiative du groupe UDI-UC en application de son droit de tirage.

En application de l'article 8, alinéas 3 à 11, de notre Règlement, les listes des candidats présentés par les groupes ont été affichées. Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.

Conseillers départementaux (Deuxième lecture)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral, et du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers intercommunaux et des conseillers départementaux.

Discussion générale commune

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur .  - Il y a deux mois, j'étais ici, devant vous -il neigeait déjà...-, pour présenter une étape importante pour nos institutions, celle de l'approfondissement et de la modernisation de la démocratie dans nos territoires.

Aujourd'hui, je soumets à nouveau à votre examen ces deux projets de loi, dans un esprit de dialogue et avec la volonté, autant que faire se peut, d'arriver à un consensus. Une question se pose à tous les groupes : le Sénat participera-t-il à la définition de nouvelles règles pour les élections locales ? La première lecture fut finalement un rendez-vous manqué. C'est dire que nos responsabilités sont grandes aujourd'hui : ne feignons pas d'ignorer que la crise de notre système représentatif conduit les électeurs à douter de la capacité de ceux qui les représentent à entendre leurs attentes et à répondre à leurs préoccupations. Nous avons le devoir impérieux de renforcer nos institutions et de restaurer la confiance, essentielle pour le bon fonctionnement de la démocratie, essentielle aussi pour la prémunir contre les populismes qui toujours se nourrissent de ses faiblesses.

La belle mission d'élu du peuple, c'est assumer une part du présent et de ce que sera l'avenir. Les élus sont l'expression de la volonté générale, la vitalité de la démocratie. Pour autant, des voix s'élèvent parfois pour les mettre en cause, pour dire qu'ils coûtent cher et sont trop nombreux. Comment ne pas vouloir répondre à ces critiques ? Et la meilleure manière de le faire, c'est de consolider le lien précieux qui unit les citoyens avec leurs représentants. C'est précisément ce que vise le texte.

Le premier rendez-vous a été manqué, je l'ai dit. Je vous propose de réussir celui d'aujourd'hui. C'est dans cet esprit que j'aborde notre discussion. Ici, au Sénat, il y a un peu plus d'un an, a été adoptée une proposition de loi abrogeant le conseiller territorial. En octobre, c'est encore au Sénat que se sont tenus les états généraux de la démocratie territoriale. A l'issue de cette phase de concertation et de dialogue, le président de la République a fixé les grands principes de la prochaine étape de la décentralisation.

Au fil des lois de décentralisation, la culture de la démocratie locale s'est progressivement affirmée dans nos territoires, faite de dialogue, de concertation et de proximité ; elle s'appuie sur les élus locaux. Ce fut une conquête majeure de la République. Le département y occupe une place importante...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Absolument !

M. Manuel Valls, ministre.  - ...qui incarne la diversité de nos territoires. La réforme de 2010 instaurant le conseiller territoriale confondait deux échelons, la région et le département, qui ne répondent pas aux mêmes logiques de fonctionnement ni n'ont les mêmes perspectives d'action. (Marques d'approbation sur les bancs socialistes) Or la démocratie locale a besoin de transparence, c'est ce qui fait sa force et sa pertinence.

La démocratie locale, c'est améliorer l'information de nos concitoyens et mieux les associer au processus de décision, c'est établir des échanges réguliers entre les élus et les territoires. Le conseiller territorial éloignait l'élu des citoyens ; en outre, le mode de scrutin était très défavorable à la parité. Il y avait là une régression.

Son abrogation s'imposait donc, mais il fallait en même temps proposer une autre solution ; elle ne pouvait être qu'un approfondissement. On ne peut, dans la France d'aujourd'hui, élire les conseillers généraux sur la base d'une carte cantonale qui, pour les deux tiers, remonte à 1801. Comment ignorer que depuis, la répartition démographique a évolué ? Voilà qui nous renvoie au principe constitutionnel de l'égalité devant le suffrage. Quelle égalité quand le rapport, au sein d'un même département, du canton le moins peuplé au canton le plus peuplé, est de un pour quarante-sept ? Quand dans 88 départements, ce rapport est supérieur à un pour cinq ?

De tels écarts ne sont plus acceptables : ils impliquent que les choix de certains citoyens pèsent moins que d'autres. Un redécoupage de la carte cantonale s'imposait. Remodeler n'est jamais chose aisée. Nous avons opté pour une règle simple : l'écart entre la population d'un canton et la moyenne départementale ne pourra dépasser 20 % -c'est celui qu'a retenu le Conseil constitutionnel pour le redécoupage des circonscriptions législatives, celui aussi qu'a préconisé le Conseil d'État. Si le scrutin binominal est accepté, nous aurons un débat sur le sujet...

M. Jean-Claude Lenoir.  - C'est du chantage !

M. Manuel Valls, ministre.  - Qui peut imaginer, dans la France d'aujourd'hui, un mode de scrutin départemental qui ne soit pas paritaire ?

M. Didier Guillaume.  - Personne !

M. Manuel Valls, ministre.  - La parité a progressé partout, dans les régions, dans les municipalités, au Parlement, au gouvernement. Le département fait figure d'exception. Dans chaque canton, le Gouvernement propose que soient élus solidairement deux candidats de sexe différent et que l'obligation de parité soit étendue aux exécutifs départementaux -95 % des présidents des conseils généraux sont aujourd'hui des hommes.

Qui peut penser que, dans la France d'aujourd'hui, les responsables des intercommunalités, structures que nos concitoyens connaissent bien désormais, ne soient pas élus directement par les électeurs ? C'est l'objectif du système de fléchage. Ceux qui siègeront aux assemblées intercommunales seront désignés sur la même liste que les conseillers municipaux ; l'échelon municipal est préservé tandis qu'une plus grande lisibilité est apportée aux électeurs.

Qui peut penser enfin qu'on laisse encore s'appliquer dans des communes raturage et panachage ? L'Assemblée nationale a abaissé le seuil à 500 habitants pour l'application de la proportionnelle -le Gouvernement comme le Sénat avaient retenu un seuil de 1 000 habitants.

Égalité devant le suffrage, parité, démocratisation de l'intercommunalité, tels sont les objectifs de ce projet de loi. Nous pouvons encore débattre de ces sujets, mais sans dévier des grandes orientations fixées par le président de la République. Nous avons une grande ambition pour la démocratie locale. Le Gouvernement est prêt à des compromis mais pas à se compromettre.

L'Assemblée nationale a fourni, comme le Sénat, un travail important. Elle a enrichi le texte, a apporté des avancées. Son texte satisfait le Gouvernement. Les travaux de votre commission des lois s'en éloignent à bien des égards, mais je redis ma volonté de dialogue constructif avec tous les groupes du Sénat ; je souhaite parvenir à un texte qui vous engage et permette à la Haute assemblée d'apporter sa contribution à la réforme.

Certains points sont fondamentaux aux yeux du Gouvernement. Le mode de scrutin binominal est le seul moyen de concilier parité et ancrage territorial. (Exclamations à droite)

La proportionnelle ne permet pas l'ancrage territorial, le retour en arrière ne permet pas la parité. Si on veut et la parité et l'ancrage territorial, il faut voter le scrutin binominal. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Éliane Assassi.  - Et le pluralisme ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Le scrutin majoritaire à deux tours n'empêche pas le pluralisme -voyez le Parlement. Il s'agit de garantir la parité.

Mme Éliane Assassi.  - Ne nous faites pas la leçon sur la parité ! Surtout pas vous !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je ne me le permettrai pas, madame la présidente ! Votre organisation politique anime deux départements après des élections au scrutin majoritaire. Mais sachez que le Gouvernement n'acceptera pas la proportionnelle pour les départements. (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur certains bancs à droite et au centre) Le département a besoin d'élus ancrés dans sa réalité ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'élection par fléchage des délégués communautaires est un autre point essentiel, comme l'est la modification du calendrier électoral.

Sur ces quelques points, le Gouvernement veillera à ce que le texte ne soit pas dénaturé et qu'il demeure compatible avec la jurisprudence constitutionnelle, d'où les amendements du Gouvernement au texte élaboré par votre commission des lois.

Le champ des débats reste cependant très large et je suis notamment sensible aux amendements qui tendent à garantir une bonne représentation des territoires ruraux.

M. Alain Fouché.  - Nous y sommes très attentifs !

M. Manuel Valls, ministre.  - Le découpage des cantons nécessite des critères précis ; si chacun s'engage sur le scrutin binominal, nous pourrons avancer intelligemment sur le sujet.

Vous connaissez maintenant les données du débat. Pour que nos échanges soient fructueux, chacun doit dire clairement ce qu'il veut, quels sont ses projets pour nos collectivités. Il ne servirait à rien qu'une seule partie fasse des compromis. Un accord se construit ensemble. Le Gouvernement y est prêt. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois .  - Nous sommes à nouveau saisis de ces deux projets de loi, le Sénat ayant rejeté le 18 janvier le projet de loi ordinaire et adopté à l'unanimité le projet de loi organique. Le scrutin binominal n'est pas parvenu à rassembler, dans notre assemblée, une majorité. L'Assemblée nationale a voté les deux textes le 26 février et les a enrichis toute en en conservant l'architecture générale.

Le 19 décembre, la commission des lois, outre des améliorations rédactionnelles, avait adopté quelques novations, dont celle due à notre collègue Collombat inversant le principe traditionnel en cas d'égalité des suffrages ; en séance publique, le Sénat avait supprimé l'article 2 sur le scrutin binominal, ce qui avait entraîné le rejet de nombreuses dispositions de coordination puis de la totalité du texte, bien que plusieurs articles aient été adoptés après modification.

S'agissant du remodelage de la carte cantonale, le Sénat avait supprimé les articles 3 et 23, inquiet de la représentation des territoires faiblement peuplés. J'avais déposé un amendement, adopté à l'unanimité, qui proposait d'élargir les dérogations aux principes de remodelage à l'équilibre de l'aménagement du territoire et au nombre des communes, dérogations qui auraient été fixées par un décret en Conseil d'État.

Le Sénat s'en était tenu au seuil d'application de la proportionnelle de 1 000 habitants ; les modalités de candidature et de vote dans les communes de moins de 1 000 habitants ont été complétées pour préciser les modalités de publicité des candidatures et interdire à un candidat de l'être dans plus d'une circonscription électorale. A l'initiative de sa commission des lois, le Sénat avait complété le projet de loi organique pour aligner le mandat municipal pris en compte au titre de la limitation du cumul des mandats sur le seuil de 1 000 habitants. La commission avait enfin diminué de deux unités l'effectif des conseils municipaux dans les communes de moins de 500 habitants -en séance, dans celles de 500 à 999 habitants- tout en maintenant un nombre inchangé de délégués sénatoriaux.

J'avais également proposé d'élargir le champ de la dérogation à la règle des plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne démographique du département. Le Sénat avait fixé à 1 000 le seuil pour la proportionnelle aux municipales et complété le projet de loi organique pour ce qui concerne le cumul des mandats.

S'agissant du fléchage des délégués intercommunaux, le Sénat avait assoupli le dispositif gouvernemental du stockage en tête de liste des candidats fléchés ; dans les communes de 1 000 habitants et plus, il avait limité la faculté de flécher à une partie de la liste seulement. La vacance de siège serait pourvue par le suivant de liste. Le Sénat a enfin réglé le cas de la section électorale qui ne se verrait attribuer aucun délégué au sein de l'intercommunalité : l'élection du ou des délégués s'effectuerait alors dans la commune comme s'il n'y avait pas de sectionnement.

L'Assemblée nationale a retenu l'architecture générale du texte. Elle a adopté l'ensemble des dispositions relatives au nouveau mode de scrutin et abrogé le conseiller territorial. Elle a apporté plusieurs améliorations aux articles premier bis, qui réaffirme le rôle du département comme garant de la solidarité sociale et de la solidarité territoriale, 5 bis, 6 bis, 7 bis et 8. Sur le remodelage de la carte cantonale, l'Assemblée nationale a repris l'amendement que le Gouvernement avait déposé en séance publique au Sénat à l'article 3, relatif au nombre des cantons ; 52 cantons au total seraient ajoutés au nombre proposé par le texte initial. L'Assemblée nationale a repris et complété l'amendement que j'avais déposé, et qui avait été adopté à l'unanimité par le Sénat, relatif aux dérogations aux principes généraux du remodelage.

L'Assemblée nationale a complété le dispositif consacré au régime électoral municipal ; elle a étendu le scrutin proportionnel aux communes de 500 habitants, généralisé l'obligation de déclaration de candidature et précisé les mesures de publicité des candidatures. L'article 25 bis réintègre le contentieux municipal dans le droit commun. L'article 18 bis diminue de deux unités l'effectif des conseils municipaux des communes de moins de 3 500 habitants en conservant parallèlement le même nombre d'électeurs sénatoriaux.

L'Assemblée nationale a ajusté le volet intercommunal, qualifié les membres des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre de « conseiller intercommunal », organisé les conséquences d'une suppression, d'une dissolution ou de l'annulation de l'élection d'un conseil municipal sur la composition et le fonctionnement de l'organe délibérant de l'EPCI à fiscalité propre, revu les modalités d'attribution des sièges aux sections électorales de moins de 1 000 habitants ; légalisé le tableau de la municipalité, complété les inéligibilités frappant le mandat municipal, étendu le régime d'incompatibilité entourant le mandat de conseiller intercommunal, retouché enfin les règles de composition des conseils communautaires.

L'Assemblée nationale a enfin adopté des mesures ponctuelles, qui ne sont pas toutes de nature électorale, aux articles 19 bis, 20 ter, 21 A, 21 B et 20 septies.

Tout en approuvant diverses dispositions votées par les députés, la commission des lois a maintenu sa position de première lecture sur les principes fondamentaux du texte, tout en adoptant des modifications substantielles : à l'article 5, elle a rétabli le principe selon lequel, en cas d'égalité de suffrages entre deux binômes, celui qui comporte le candidat le plus jeune est élu ; à l'article 7, elle a abrogé l'article L. 209 du code électoral ; à l'article 9, elle a prévu l'organisation d'une élection partielle en cas de vacance d'un siège de conseiller départemental dans un canton ; elle a élargi le second critère régissant le remodelage de la carte cantonale et porté l'écart entre la population d'un canton et la population moyenne des cantons du même département à 30 % ; elle a précisé les dérogations aux principes régissant le redécoupage de la carte cantonale.

Sur le volet communal, la commission a rétabli le seuil de 1 000 habitants pour l'application du scrutin municipal proportionnel et limité la réduction de l'effectif de deux unités des conseils municipaux aux seules communes de moins de 100 habitants.

Sur le volet intercommunal, elle a retenu la qualification de conseiller communautaire, qui reflète mieux les « coopératives de projets » chères au père de la loi de 1999, notre collègue Jean-Pierre Chevènement. Elle a supprimé le lien de dépendance du mandat municipal ou d'arrondissement au sort du mandat intercommunal, rétabli l'assouplissement des modalités du fléchage dans les communes de 1 000 habitants, repris -en matière de sectionnement- le mécanisme voté par le Sénat en première lecture, simplifié le régime des vacances au conseil de l'intercommunalité, simplifié les dispositions relatives à l'exécutif d'un EPCI à fiscalité propre résultant d'une fusion. Elle a également écarté l'extension du régime de composition et de désignation des EPCI à fiscalité propre au syndicat d'agglomération nouvelle et supprimé la dérogation expérimentale aux critères démographiques de création d'une communauté d'agglomération ainsi que l'application des dispositions du projet de loi à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française.

La réforme renforcera la légitimité des élus et autorisera une plus grande diversité dans la composition des assemblées délibérantes.

La commission des lois soumet au Sénat le texte qu'elle a établi pour le projet de loi organique et le projet de loi. Avec le président Sueur et plusieurs membres de la commission, je souhaite apporter notre pierre à ce texte. Nous allons franchir une dernière étape, peut-être essentielle pour le Sénat dans son rôle de représentant des collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs socialistes et sur plusieurs bancs du groupe du RDSE)

M. Jean-Jacques Hyest .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) L'Assemblée nationale a adopté ce projet de loi, à une très courte majorité, dans une version très proche de celle du Gouvernement, alors que le Sénat l'avait rejeté faute d'avoir dégagé une majorité sur le binôme, système baroque s'il en est. En matière de droit électoral, on croyait avoir tout tenté -eh bien non, il y aura aussi le système Valls ! (Exclamations amusées à droite) Ce mode de scrutin pose plus de problèmes qu'il n'en résout. On aura des cantons très vastes -où sera la proximité ?- et la solidarité entre les deux candidats du binôme s'évanouira dès l'élection faite. (Exclamations et marques de dénégation sur les bancs socialistes)

Si l'on s'en tient au seul critère démographique, les conseillers départementaux ne représenteront plus que les grandes villes et délaisseront les territoires ruraux. Nous aboutirons au même déficit que pour les conseils régionaux, dont le mode de scrutin favorise incontestablement le monde urbain. (Applaudissements à droite)

Après avoir dénoncé les défauts du conseiller territorial, qui était pourtant une tentative courageuse, beaucoup d'élus vont s'apercevoir que votre solution n'est pas la bonne.

M. Didier Guillaume.  - C'est la meilleure !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Si elle est si formidable, pourquoi ne pas l'appliquer aux députés ? (« Chiche ! » sur les bancs socialistes)

M. Manuel Valls, ministre.  - Ne nous donnez pas des idées ! (Sourires)

M. Jean-Jacques Hyest.  - Nous sommes cependant réalistes et savons que l'Assemblée nationale reviendra à son texte ; nous essaierons de limiter les défauts de ce système. Le Conseil d'État a donné son avis, le Conseil constitutionnel aussi. La carte cantonale doit être revue ; si les représentants des départements doivent être élus sur une base démographique, il ne faut pas négliger la représentation des territoires.

Nous désapprouvons le report des élections départementales. Nous ne comprenons pas l'intérêt d'abaisser le seuil à 10 % des électeurs inscrits pour se maintenir au deuxième tour -sauf à vouloir favoriser les triangulaires. La commission des lois a souhaité les éviter.

La diminution des membres de conseillers municipaux pour les communes de moins de 500 habitants est proposée ; l'extension au-delà de 3 500 inquiète. L'Association des maires de France s'étant ralliée au seuil de 1 000 habitants pour la proportionnelle, ne balayez pas d'un revers de main l'opinion des élus, exprimée à l'occasion des états généraux de la démocratie locale.

Le conseiller communautaire : ne s'agit-il pas d'effacer la commune au profit de l'intercommunalité ? (On se récrie à gauche) Les mêmes souhaitent l'effacement du département, mais nous en discuterons lors de l'examen du projet de loi sur la décentralisation -que l'on nous annonce sans cesse. (Nouvelles exclamations sur les bancs socialistes)

L'article 20 apporte une certaine souplesse à la désignation des délégués des communes à l'intercommunalité.

Soucieux de la responsabilité du Sénat, nous voulons marquer les points de consensus sans renoncer à notre opposition au texte.

M. David Assouline.  - Fromage et dessert !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Écoutez les autres au lieu de m'agresser ! (Applaudissements à droite) Le Gouvernement a des visées électoralistes, c'est évident.

Nous verrons bien si à l'issue de nos débats, les positions du Sénat seront confortées sur certains points, ce qui sera de toute façon bénéfique pour la démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et UMP)

Mme Éliane Assassi .  - Lors de la première lecture de ce texte, je déplorais le très bref délai que nous avions eu pour examiner ce projet de loi. En deuxième lecture, les choses ne se sont pas améliorées : la commission a terminé l'examen des amendements extérieurs il y a deux heures à peine. Ce sont des conditions très limites. M. le ministre veut aller vite -sans prendre le temps d'écouter ceux qui, comme nous, sont pourtant animés d'un esprit constructif. Nous étions d'accord sur plusieurs articles, nous n'avons pas changé d'avis. Sur les points de désaccord, nous avons fait des propositions. Nous nous sommes abstenus sur l'ensemble pour laisser le temps à la navette de trouver un accord. Il n'en a rien été.

Vous connaissez notre attachement à la proportionnelle -traditionnellement soutenue par l'ensemble de la gauche.

Quelle n'a pas été notre surprise de vous entendre dire que ce mode de scrutin ne fait pas partie de notre culture -alors qu'il existe dans deux élections sur trois, y compris pour les sénatoriales.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Mitterrand l'avait mis en place en 1986 !

Mme Éliane Assassi.  - Ce mode de scrutin progresse dans l'opinion, et dans cet hémicycle. Différents amendements de tous bords proposaient des variantes autour de ce mode de représentation, qui respecte le pluralisme et la parité, binôme républicain auxquels nous sommes très attachés.

La représentation des territoires ruraux ? Au niveau départemental, une liste de candidats devra être représentative pour rassembler les voix. La représentation des territoires est possible avec la proportionnelle ; nous avons proposé une solution de repli avec une proportionnelle corrective pour rééquilibrer les écarts.

Mais le Gouvernement ne veut pas de proportionnelle, préférant renforcer le bipartisme dans la vie politique. Le binôme assurera bien la parité mais il fera reculer le pluralisme sans garantir la représentation des territoires. Les cantons seront d'une telle taille qu'on ne pourra plus parler de proximité. (« Bravo ! » et applaudissements à droite et au centre) Dans les territoires ruraux surtout, les élus seront très éloignés des électeurs. Revoyez donc ce système, qui fera de l'élection départementale un anachronisme quand les autres scrutins font la part belle à la proportionnelle -elle devrait ainsi progresser au Sénat. Il faudra expliquer cette contradiction aux électeurs.

Autre point de désaccord : le nouveau mode de désignation des délégués communautaires, qui reprend la proposition de la commission Balladur. Vous allez creuser l'écart entre communes et intercommunalités. Loin d'être une avancée démocratique, c'est un détournement démocratique, qui vise à faire disparaître la commune et met à mal le département. Nous sommes passés de la commune au bloc communal. Demain, on parlera du bloc « local », intégrant le département. C'est déjà le cas avec les métropoles...

M. Louis Nègre.  - La commune se porte bien dans la métropole !

Mme Éliane Assassi.  - 2020, c'est le terme que vous fixez pour l'extinction de la commune telle que nous la connaissons aujourd'hui.

M. Éric Doligé.  - C'est vrai.

Mme Éliane Assassi.  - Ne parlez-vous pas d'intégration dans l'intercommunalité ? Certains, dans la majorité, voudraient même accélérer le mouvement : les écologistes, ainsi que le président Sueur. Le centre et la droite sont favorables à cette mesure, qui prolonge la loi de 2010 : au moins sont-ils cohérents.

M. Henri de Raincourt.  - Merci !

Mme Éliane Assassi.  - Nous, nous continuons à demander l'abrogation de la loi de M. Sarkozy. Les élus locaux n'en veulent pas -c'est d'ailleurs ce qui a expliqué le basculement à gauche de notre assemblée. Or le Sénat reste sourd à leurs demandes.

Enfin, l'abaissement du seuil du scrutin de liste aux municipales à 500 habitants, comme l'a décidé l'Assemblée nationale, nous convient. Pourquoi cette frilosité de la chambre représentant les collectivités locales, pourquoi favoriser le tir aux pigeons ? Nous ne soutiendrons pas votre texte, monsieur le ministre... sauf coup de théâtre.

Notre désaccord est profond sur deux points essentiels du projet.

Notre abstention en première lecture était d'ouverture : j'avais ouvert les portes, les fenêtres, la porte de la cave... en vain. Nous ne pourrons que voter contre votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit aussi)

M. Jean-Léonce Dupont .  - « Les Hollandais ne pensent qu'à ça », titre un hebdomadaire. L'objectif, c'est la réélection de François Hollande en 2017.

Ce texte consacre les déséquilibres entre territoires urbains et territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et UMP)

Le Gouvernement fait croire à une grande concertation avec les élus locaux mais présente un texte conforme aux intérêts d'un seul parti. Malgré quelques avancées réelles, je suis inquiet des conséquences du redécoupage de la carte électorale et du mode de scrutin retenu. Certes, il est créatif, comme l'étaient les 35 heures : mais il s'agit d'une créativité que personne ne nous envie, que personne ne copie... (Applaudissements sur les bancs UMP)

De fait, le scrutin binominal n'a aucun équivalent à l'étranger. Comment fonctionnera ce couple imposé ? Je redoute une compétition entre chacun de ses membres...

M. Jean-Jacques Mirassou.  - De l'émulation !

M. Jean-Léonce Dupont.  - ...et surtout des fractures dans la représentation des territoires. Un basculement va s'opérer, avec un affaiblissement de la représentation des territoires ruraux.

M. François Patriat.  - C'est faux ! Il fallait prendre en compte la démographie !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Dans le Calvados, les cantons redécoupés devront réunir trois à quatre cantons actuels.

Le conseil général est le premier partenaire des communes, des PME. Le canton est un espace de vie. L'approche arithmétique ne peut être le seul critère : avec Hervé Maurey, nous proposons un scrutin mixte, scrutin majoritaire dans les zones rurales et proportionnel à un tour dans les villes.

M. Alain Fouché.  - Très bien formulé !

M. François Patriat.  - Magouilles !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Il garantirait le respect des territoires ruraux et la juste représentation des territoires urbains, assurerait des majorités stables et renforcerait la parité.

Le nouvel article premier bis, voté à l'initiative du groupe UDI de l'Assemblée nationale, marque une avancée : il réaffirme que le canton représente la population, mais aussi le territoire. Je souhaite qu'il soit adopté sans modification. De même, l'article 23 élargit les cas de dérogations. J'espère que le Sénat prendra mieux en compte la cohérence territoriale, l'ancrage territorial des élus dans leur circonscription.

Au final, je demeure hostile à ce texte lourd de conséquences pour les territoires et je déplore les calculs politiciens qui l'ont motivé. (Protestations sur les bancs socialistes)

Les motivations du Gouvernement me paraissent plus électoralistes que motivées par l'intérêt général et le souci de la démocratie... (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jacques Mézard .  - Ce texte nous revient de l'Assemblée nationale comme une rose dont la tige est plus chargée d'épines que le texte initial.

M. Henri de Raincourt.  - C'est le parti socialiste !

M. Jacques Mézard.  - A l'activisme des députés s'est ajouté le fait que le Sénat n'avait pas voté l'article 2, prenant ainsi le risque de renoncer à ce qui lui donne tout son sens : le Sénat a -encore- pour mission de représenter les collectivités territoriales. On ne peut reprocher au Gouvernement d'avoir déposé un texte revenant sur le conseiller territorial, comme il l'avait promis, à la satisfaction implicite de nombre de ceux qui en avaient accepté la création, d'autant que le Conseil d'État appelait à rectifier les écarts de représentation. L'enterrement du conseiller territorial fut célébré dans la joie ; la naissance du conseiller départemental avec inquiétude...

M. Bruno Sido.  - Dans la douleur !

M. Jacques Mézard.  - ...avec l'apparition de deux faux jumeaux de sexe opposé. Le plus simple eût été de remodeler les cantons pour remédier aux déséquilibres démographiques.

M. Bruno Sido.  - C'est vrai !

M. Jacques Mézard.  - Mais cela ne résout pas le problème de la parité. Cela dit, la recherche d'une parité arithmétique n'est pas forcément la solution : après le binôme à la tête d'un groupe parlementaire, à quand le binôme à la présidence de la République ? (Applaudissements et « Bravos ! » sur les bancs UMP)

La proportionnelle, vous l'avez heureusement écartée. Les futurs élus seraient choisis dans les sections des partis, on le sait. (Mêmes mouvements) Voyez les élections régionales  : les électeurs choisissent la tête de liste, qui présidera le conseil régional. Mais dans les départements, ils ne connaissent pas les conseillers régionaux. Et je ne parlerai pas des européennes, de la confiscation du pouvoir par quelques apparatchiks que l'on ne reverra plus dans leur circonscription... Vous auriez pu introduire la proportionnelle en ville, et conserver le système actuel dans les campagnes, ce qui aurait eu un coût pour le parti majoritaire : on préfère toujours partager le bien d'autrui plutôt que le sien...

Après avoir éliminé la proportionnelle départementale, il fallait un autre système : le binôme s'est imposé, sans que l'on sache d'ailleurs qui a accouché de cette idée géniale. Le seul système possible, dites-vous. M. Collombat a démontré le contraire. Le binôme passera en force à l'Assemblée nationale, dans un garde-à-vous impressionnant, typique de la Ve République. (Mêmes mouvements et applaudissements à droite)

Exception française qui doit faire date ? « Depuis que la France rayonne, je me demande comment le monde entier n'est pas mort d'insolation », avait dit un jour Jean-François Revel. (Rires à droite)

Ce projet de loi est ressenti dans nos départements ruraux comme un facteur de déséquilibre et d'inégalité supplémentaire.

Mme Cécile Cukierman.  - C'est vrai !

M. Jacques Mézard.  - Il s'agit d'une nouvelle étape dans la fracture territoriale, après la lamentable péréquation départementale, la refonte de la carte scolaire, la suppression de sous-préfectures, le retrait des services publics et les ravages d'une RGPP aveugle...

M. Bruno Retailleau.  - La MAP !

M. Jacques Mézard.  - ...et demain, avec le redécoupage, la suppression de chefs lieux de cantons -mais on ne sait pas ce que c'est à Paris. La France rurale, inquiète de la création du conseiller territorial, l'avait exprimé lors des élections sénatoriales de 2011 ; elle l'exprimera demain pour le binôme. (« Très bien ! » et applaudissements à droite) Elle constate l'abandon, depuis longtemps, de toute politique d'aménagement du territoire.

Comme le gouvernement précédent, ce gouvernement refuse de dire quel avenir il entend réserver au département : l'évaporation balladurienne ? une recomposition ? Il doit le faire savoir. Le président de la République dit faire confiance au Sénat pour réécrire le projet de loi de Mme Lebranchu. Voulez-vous faire confiance aussi à notre assemblée pour réécrire le projet de loi binôme et, demain, le projet de loi sur le non-cumul ? (Applaudissements et sourires à droite)

Il faut revenir sur la règle des + 20 % pour le découpage des cantons. Seul un système - 30 %/+ 30 % évitera la création de cantons gigantesques, ne permettant plus la représentation de la population. Un canton au sein d'une grande ville n'a rien à voir avec un canton de montagne.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - C'est vrai !

M. Jacques Mézard.  - Je regrette que l'article 40 ait frappé nos amendements sur le redécoupage des cantons.

Nous refusons la bipolarisation, la mesure réservant le deuxième tour aux deux premiers.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La commission est revenue dessus ce matin.

M. Jacques Mézard.  - Je salue l'évolution de la commission au fil des heures...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission.  - C'est la preuve qu'elle écoute.

M. Jacques Mézard.  - Quel intérêt de diminuer le nombre de conseillers municipaux bénévoles, éléments d'un indispensable lien social ? (Applaudissements sur les bancs UMP)

Enfin, nous voulons un fléchage des délégués intercommunautaires le plus libre et le plus simple possible.

Il est des orientations qui nous inquiètent. Notre groupe s'interroge et émettra des votes divers selon ses sensibilités.

Monsieur le ministre, nous partageons votre vision de la République : je comprends que le vote du Sénat ne vous satisfasse pas mais nous ne nous exprimons pas contre vous, dont nous saluons l'action, mais en faveur d'une conception de la République que les réformes ne doivent pas fragiliser mais conforter. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, au centre et à droite ; M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, applaudit aussi)

Mme Hélène Lipietz .  - Un nouveau marathon sénatorial se prépare. J'espère que le débat sera plus respectueux que le précédent : nos futures collègues dans les conseils départementaux ne seront pas des gadgets mais des politiques ; elles auront les défauts mais aussi les qualités des hommes !

Un regret : que le texte présenté à l'Assemblée nationale n'ait pas été celui du Sénat. Certes, les écologistes ont contribué à son rejet, mais pas plus que les autres.

Aucun compromis n'a été possible, entre oppositions tranchées et absence d'écoute du Gouvernement.

Nous avions acté le renversement du privilège de l'âge -l'Assemblée nationale est revenue dessus, à ma grande surprise. La politique est faite pour l'avenir ! Mais on préfère s'accrocher au bras de son fauteuil que laisser la place à la jeunesse... Ce n'est pas le bon véhicule législatif, dit l'Assemblée nationale. Renoncement, lâcheté ou conservatisme ?

Nous avons innové, mettant fin à la légende d'un Sénat conservateur. L'âge ne doit être que le deuxième critère, après l'expérience. Sur ce point, je proposerai des amendements de coordination.

L'Assemblée nationale a été moins conservatrice sur le seuil de la proportionnelle pour les municipales, qu'elle a abaissé à 500.

Le scrutin binominal n'a qu'un seul mérite : celui de la parité. Mais la parité n'est pas un gadget. Un élu cantonal sur deux va perdre son mandat sans avoir démérité, c'est vrai et je le plains. Mais combien de femmes n'ont pas eu accès, depuis 1945, à des postes éligibles, sinon comme suppléantes ou dans des cantons ingagnables ?

Les écologistes proposent pas moins de quatre manières différentes d'introduire la proportionnelle pour l'élection des conseillers départementaux, et deux pour l'élection des conseillers municipaux.

Cela devrait plaire aux socialistes, puisqu'il s'agit de la proposition n°48 du programme du président de la République. Introduisons une toute petite dose de proportionnelle -un peu, beaucoup, passionnément- pour permettre à nos concitoyens de croire à la puissance de leur vote.

Les écologistes veulent des intercommunalités pleinement démocratiques, élues directement. Il faut inventer la France de demain, où les communes demeureront la base de la vie sociale et les intercommunalités seront les porteuses de la cohérence territoriale. Cette loi nous invite à passer au XXIsiècle : sachons aller de l'avant. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Philippe Adnot .  - La France va mal. (On confirme à droite) Il faut se concentrer sur l'essentiel. Ce texte est-il essentiel pour résoudre nos problèmes ? (On le conteste à droite) Je pense que le binôme ne mérite pas toutes les critiques dont il fait l'objet. Quand on est élu sur un territoire, ce n'est pas pour gérer le canton mais le département.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - C'est tout à fait vrai.

M. Philippe Adnot.  - Par contre, faut-il organiser notre société sur l'exigence de moitié d'hommes et moitié de femmes ? Jusqu'où faut-il aller ? Faudra-t-il 50 % d'hommes chez les assistantes sociales ? Jusqu'où allons-nous pousser le bouchon ? Je proposerai, pour ma part, de conserver le système actuel dans les zones rurales et la proportionnelle dans les territoires urbains.

Je vous rappelle que la loi précédente proposait déjà le redécoupage, la fusion de petits cantons, et donc la suppression de chefs-lieux , la règle du plus 20 % moins 20 %. L'essentiel, c'est d'obtenir plus 30 moins 30. Le texte de la commission me satisfait ; je souhaite qu'il soit retenu. De même, il faut porter le seuil de 500 à 1 000, pour les municipales.

En résumé, ma préférence va au scrutin mixte. Votons cet amendement, qui serait une base de discussion avec l'Assemblée nationale. S'il n'est pas adopté, je voterai néanmoins ce texte, avec le plus 30 moins 30. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes et UMP)

M. Philippe Kaltenbach .  - Espérons que le Sénat ne rendra pas à nouveau copie blanche à l'occasion de cette seconde lecture. Certains des apports du Sénat en première lecture ont été réinsérés à l'Assemblée nationale : les exceptions à la règle des plus ou moins 20 %, la déclaration de candidature obligatoire.

1

Mme la présidente.  - Amendement n°206 rectifié, présenté par MM. Collombat, Mézard, Alfonsi et C. Bourquin, Mme Laborde et MM. Plancade, Tropeano, Collin, Vall et Vendasi.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par huit alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 191.  - Les conseillers départementaux sont élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours, dans des sections délimitées sur la base des intercommunalités prévues au schéma départemental de la coopération intercommunale ou créées sur son fondement. Chaque liste qui comporte autant de noms que de sièges à pourvoir, est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. Pour être élue au premier tour, la liste arrivée en tête doit avoir obtenu la majorité absolue et 25 % du nombre des électeurs inscrits. Les listes présentes au premier tour peuvent fusionner entre les deux tours. Peuvent figurer au second tour les listes ayant obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour.

« Les listes n'ayant pas obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges.

« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus jeune des candidats susceptibles d'être proclamés élus.

« Lorsque la taille des intercommunalités est inférieure au tiers du quotient population départementale sur nombre de conseillers départementaux, ces intercommunalités sont regroupées pour former une section dont la population est au moins égale à ce quotient. Les communes appartenant à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre interdépartementale forment une section lorsque leur taille est supérieure au tiers du quotient défini ci-dessus. Dans le cas contraire, elles sont regroupées avec une intercommunalité limitrophe pour former une section.

« Le nombre de conseillers départementaux est identique à celui des conseillers généraux au moment de l'adoption de la présente loi ou augmenté d'une unité quand le nombre de conseillers généraux est pair. En outre, des modifications mineures peuvent y être apportées pour tenir compte de l'évolution de la population du département

« Les sièges sont attribués aux sections électorales selon la règle suivante :

« 1° Chaque section se voit attribuer un siège ;

« 2° Le reste des sièges est réparti, à la plus forte moyenne, entre les sections dont la population est au moins égale au quotient population départementale sur nombre de conseillers départementaux. La population à prendre en compte est celle desdites sections et le nombre de sièges concernés, ceux restant à distribuer. »

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je ne veux pas aggraver mon cas. (Sourires) L'amendement est défendu.

Mme la présidente.  - Amendement n°11 rectifié bis, présenté par MM. Pointereau, Cornu, Bizet, Béchu, Bécot et Bourdin, Mme Bruguière, MM. Carle, Cardoux et de Legge, Mme Deroche et MM. Doligé, Doublet, Grignon, Milon, Magras, Pierre, Pillet, Trillard, D. Laurent, de Montgolfier, Grosdidier, Dulait, Houel, César, Adnot et Laménie.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 191.  -  Les communes du département membres d'un même établissement public de coopération intercommunale de plus de 50 000 habitants forment un canton élisant au moins deux membres du conseil départemental.

« Chaque autre canton du département élit un membre du conseil départemental. »

M. Rémy Pointereau.  - Je propose un scrutin mixte : dans les cantons ruraux, le maintien du scrutin majoritaire à deux tours et dans les cantons urbains, à la proportionnelle.

Ainsi, nous conserverions la proximité, la ruralité et le pluralisme. (On s'amuse sur les bancs socialistes)

En ville, on ne connaît pas les conseillers généraux...

M. Rémy Pointereau.  - Il n'y a pas de risque d'inconstitutionnalité. Nous avons discuté de ce scrutin mixte avec M. Collombat et dans le rapport Belot. Puisqu'il n'y a pas de majorité pour la proportionnelle, le conseiller territorial, le retour à un scrutin majoritaire à deux tours, retenons cette proposition consensuelle pour sortir de l'impasse.

Mme la présidente.  - Amendement n°73, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe CRC.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 191. - Le conseil départemental est composé d'élus représentant chaque canton du département et d'élus issus de  listes départementales. Ces élus sur listes représentent 30 % de l'assemblée départementale. »

Mme Cécile Cukierman.  - Amendement de repli, comme en première lecture. Le scrutin uninominal écrase le pluralisme. D'où cet amendement sur le scrutin de liste à la proportionnelle pour 30 % des conseillers départementaux.

D'une manière générale, certains élus, quel que soit le mode de scrutin, se comporteront toujours comme des notables locaux. D'autres se battront avec acharnement pour exercer leur mandat au plus près des habitants, même si le gouvernement précédent avait tout fait pour dénigrer leur image. Sénatrice d'un canton de 3 500 habitants, je ne crois pas être un apparatchik. Ce sont les convictions qui comptent. Au fond, c'est de la démocratie locale qu'il s'agit.

Mme la présidente.  - Amendement n°104, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 191.  - Dans les départements où les sénateurs sont élus au scrutin majoritaire, les électeurs de chaque canton du département élisent au conseil départemental deux membres de sexe différent, qui se présentent en binôme de candidats dont les noms sont ordonnés dans l'ordre alphabétique sur tout bulletin de vote imprimé à l'occasion de l'élection.

« Dans les départements où les sénateurs sont élus au scrutin de liste, les conseillers départementaux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. »

Mme Hélène Lipietz.  - Troisième proposition : un mode de scrutin proportionnel à deux tours, dans les départements où les sénateurs sont déjà élus au scrutin de liste. Vous le voyez, il existe bien des alternatives.

Mme la présidente.  - Amendement n°130 rectifié ter, présenté par M. Dubois, Mme Férat et MM. Roche et Guerriau.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par huit alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 191.  - Chaque canton du département élit un membre au conseil départemental à l'exception des unités urbaines de plus de 100 000 habitants.

« Dans ces unités urbaines, le nombre de sièges à pourvoir correspond au nombre de cantons au 1er janvier 2013.

« Les conseillers départementaux sont élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours. Chaque liste comporte autant de noms que de sièges à pourvoir. Elle est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe.

« Pour être élue au premier tour, la liste arrivée en tête doit avoir obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés et le quart du nombre des électeurs inscrits.

« Les listes présentes au premier tour et dont le résultat est supérieur à 5 % des suffrages exprimés, peuvent fusionner entre les deux tours.

« Peuvent figurer au second tour, les listes ayant obtenu au moins 12,5 % du nombre des électeurs inscrits au premier tour.

« A l'issue du tour de scrutin où l'élection est acquise, les sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation à la plus forte moyenne.

« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus jeune des candidats susceptible d'être proclamé élu. »

M. Gérard Roche.  - Nous proposons la proportionnelle dans les villes et un scrutin uninominal dans les zones rurales.

Mme la présidente.  - Amendement n°179 rectifié, présenté par M. Maurey, Mmes Morin-Desailly et Férat et MM. de Montesquiou, Guerriau, J.L. Dupont, Détraigne, Tandonnet, Capo-Canellas, Merceron, Jarlier et Amoudry.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 191. -  Les cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux sont de deux natures :

« 1° Les cantons urbains où les conseillers départementaux sont élus sur des listes à la représentation proportionnelle au plus fort reste à deux tours ;

« 2° Les cantons hors agglomération où les conseillers départementaux sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. ».

« Un décret en Conseil d'État précise la définition du caractère urbain ou rural  d'un canton. »

M. Hervé Maurey.  - Cet amendement est proche du précédent.

Pour maintenir la proximité dans les cantons ruraux, il faut en rester au scrutin uninominal. En revanche, le scrutin de liste à la proportionnelle dans les villes fera progresser la parité.

Enfin, le mode de scrutin mixte ne pose pas de problème de constitutionnalité, d'éminents spécialistes nous l'ont affirmé.

Mme la présidente.  - Amendement n°207 rectifié, présenté par MM. Collombat, Alfonsi, Barbier, C. Bourquin, Chevènement et Requier.

Alinéa 2

Remplacer le mot :

canton

par le mot :

section

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le découpage doit s'accompagner d'un changement de l'appellation du canton.

Mme la présidente.  - Amendement n°18, présenté par MM. J. Boyer et Roche.

Alinéa 2

Après le mot :

différent

insérer les mots :

issus de communes différentes, originaires d'une ancienne structure élective cantonale différente, 

M. Jean Boyer.  - Cet amendement évite la surreprésentation d'une commune au sein d'un canton. Il s'agit aussi de veiller au bon équilibre des territoires en préservant notamment les bourgs-centres des anciens cantons.

Mme la présidente.  - Amendement n°7 rectifié ter, présenté par MM. Namy et Merceron.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

dont les noms sont ordonnés dans l'ordre alphabétique sur tout bulletin de vote imprimé à l'occasion de l'élection

M. Christian Namy.  - Les candidats doivent avoir la possibilité de présenter leur binôme comme ils le souhaitent.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°166, présenté par M. Sido.

M. Bruno Sido.  - Cet amendement laisse le choix de l'ordre de présentation des deux candidats du binôme sur le bulletin de vote. Donnons de la souplesse.

Mme la présidente.  - Amendement n°49 rectifié, présenté par M. Hyest et les membres du groupe UMP.

Alinéa 2

Après le mot :

candidats

insérer les mots :

, représentant chacun l'une des sections du canton,

M. Jean-Jacques Hyest.  - Comme l'a dit M. Sido, la création des sections cantonales clarifiera les responsabilités respectives du binôme : elle défend la ruralité, elle garantit l'enracinement des candidats et elle évite leur concurrence.

Mme la présidente.  - Amendement n°195 rectifié bis, présenté par MM. Dallier, Huré, de Legge et Gilles, Mme Primas, MM. Cambon et Gaillard, Mlle Joissains, Mme Lamure, M. Bourdin, Mmes Bruguière et Procaccia et MM. Houel, Pierre, Ferrand, Bas, Cléach, Grignon, Béchu, Sido, Lefèvre, Doligé, P. André, Charon, Cardoux, Legendre, Pillet, P. Dominati, Bordier, Dulait, Magras, Savin, Beaumont, B. Fournier, Couderc et Laménie.

Alinéa 2

Après le mot :

noms

insérer les mots :

, ainsi que ceux des personnes appelées à les remplacer comme conseiller départemental dans le cas prévu à l'article L. 221,

M. Philippe Dallier.  - Le nom des remplaçants doit figurer sur le bulletin de vote.

Mme la présidente.  - Amendement n°89, présenté par M. Lecerf.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots : 

et représentent chacun une des deux sections du canton

M. Jean-René Lecerf.  - La création des sections, gage de proximité, évitera d'interminables débats pour savoir qui fait quoi, par exemple pour déterminer qui représentera le département au conseil d'administration d'un collège.

Mme la présidente.  - Amendement n°116, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Au sein de chaque département, 20 % des conseillers départementaux sont élus au scrutin de liste paritaire à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. »

Mme Hélène Lipietz.  - Encore une proposition : celle préconisée par la commission Jospin.

Mme la présidente.  - Vu l'heure tardive, il est plus raisonnable d'entendre l'avis de M. le rapporteur et de M. le ministre demain matin.

Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 14 mars 2013, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit dix.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du jeudi 14 mars 2013

Séance publique

A 9 heures 30

1. Suite de la deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral et du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'élection des conseillers municipaux, des conseillers intercommunaux et des conseillers départementaux

Rapport de M. Michel Delebarre, fait au nom de la commission des lois (n°404, 2012-2013)

Textes de la commission (nos405 rect. et 406 rect., 2012-2013)

A 15 heures

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

A 16 heures 15 et le soir

3. Suite de l'ordre du jour du matin.