Débat sur le marché du médicament et des produits de santé

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur le marché du médicament et des produits de santé.

M. Gilbert Barbier, au nom du groupe RDSE .  - La France consomme trop de médicaments, et mal : hypertenseurs, anxiolytiques notamment. Cela pourrait être l'indicateur d'une bonne prise en charge des patients. Hélas, il n'en est rien. Les prescriptions sans justification, voire contradictoires, sont particulièrement prévalentes chez les personnes vulnérables, à commencer par les personnes âgées. Les octogénaires ne consommeraient pas moins de dix médicaments par jour. L'impact sanitaire et économique de cette situation est sévère : 100 000 personnes hospitalisées pour une pathologie iatrogène et un coût global de 10 milliards d'euros pour l'assurance maladie.

Pourquoi cette exception française ? A cause de l'organisation de notre système de soins et de notre structure de prescription et de remboursement. De l'Igas à la Cour des comptes, en passant par mon rapport sur le médicament, de 2006, tout le monde en est d'accord et le dit depuis des années. Bien sûr, les choses ont changé depuis la révélation du scandale du Mediator. Nous devons pourtant faire le point parce que nos concitoyens, après cette affaire, celle des prothèses PIP et des anticoagulants, se demandent à qui ils peuvent faire confiance.

L'adage « primum non nocere » retrouve une nouvelle jeunesse. Aujourd'hui, il est de bon ton de critiquer le médecin qui veut toujours prescrire, les agences trop peu indépendantes, voire les patients toujours avides de consommer. On entend même se développer de douteux discours sur des produits dont les bienfaits sont pourtant reconnus.

Peut-être suis-je, de manière plus épidermique, agacé par le lobby anti-vaccin -particulièrement présent en France-, étant élu de la ville de Pasteur quand j'entends insinuer que le chien qui a mordu le petit Joseph Meister n'avait peut-être pas la rage... Pourchassons les charlatans et les adeptes des thérapies déviationnistes que le rapport de M. Mézard a mis au jour. Il faut être sans pitié pour les fraudeurs et les usurpateurs, et que les autorités sanitaires fassent preuve de réactivité. Trop souvent, elles tardent à énoncer les bons usages, à démentir ou à interdire. Ce qui ne peut qu'inquiéter les patients.

Voyez ce qui s'est passé pour le diabète de type II et les anticoagulants oraux. Après avoir publié son Guide des 4 000 médicaments utiles et inutiles, le professeur Even, dans La vérité sur le cholestérol, dénonce l'usage des statines, provoquant une vive polémique, et la réponse d'une dizaine de sociétés savantes qu'il a, par avance, discréditées après avoir écrit que les cardiologues sont convaincus par la berceuse que leur dispensent les firmes pharmaceutiques au fil des congrès où elles les transportent par charters entiers....

Difficile pour les patients de s'y retrouver : ils prennent leurs cachets et, pendant ce temps-là, les autorités sanitaires restent discrètes.

Je passerai sur la pilule de troisième génération pour citer l'autre exemple éclairant des coupe-faim. Quelle cacophonie !

Mme Nathalie Goulet.  - Ah !

M. Gilbert Barbier, au nom du groupe RDSE.  - Ne vous méprenez pas, je ne mets pas en cause les autorités sanitaires ; je regrette simplement qu'on n'ait pas profité de l'affaire Mediator pour revoir notre architecture institutionnelle. Nous avons une Agence nationale de sécurité du médicament qui garantit la sécurité du produit de santé depuis l'autorisation de mise sur le marché jusqu'à la surveillance, une Haute autorité de santé qui évalue les médicaments au vu du service médical rendu en vue du remboursement, un Comité économique des produits de santé qui négocie le prix du médicament avec les industriels et, enfin, l'Uncam qui évalue le remboursement, sachant que le ministre décide en dernière instance. Si je ne dénonce pas, comme l'avait fait le professeur Escande en 1998, un système géré par des technocrates qui, même s'ils sont médecins, ne sont jamais au chevet d'un malade, je déplore sa complexité, la dilution des responsabilités et des réactions tardives et peu lisibles. Le rapport Grall va dans le même sens. Mieux vaudrait, par exemple, comme je le préconise depuis 2006, une haute autorité de santé recentrée sur ses missions globales, sans s'occuper de l'évaluation de l'efficacité et de la sécurité des médicaments. Je ne nie pas qu'il y ait des avancées : depuis le 25 septembre, la Haute autorité de santé a reçu sa feuille de route, selon la formule à la mode.

L'augmentation des missions de l'Agence de sécurité des médicaments impose qu'on accroisse ses moyens.

En ce qui concerne la valeur ajoutée thérapeutique, un médicament ne peut être un peu mieux que rien. Il faut en convaincre nos partenaires européens.

Ma dernière exigence concerne la délivrance d'informations claires aux professionnels et aux patients.

Madame la ministre, merci de nous éclaire sur tous ces points.

Mme Nathalie Goulet .  - Je ne suis pas médecin ni expert mais, comme tout un chacun, une malade en puissance. « Les antibiotiques, ce n'est pas automatique », soit. Cependant, un Français n'a pas le sentiment de se soigner s'il ne prend pas de médicaments. Ce n'est un secret pour personne ; on prescrit trop : 100 000 tonnes de médicaments achetés en France, dont un quart termine à la poubelle. Un coût de 40 milliards d'euros annuel, à comparer au déficit de la sécurité sociale qui est de 81 milliards d'euros.

Si le Sénat avait le bonheur de discuter de la deuxième partie du PLFSS, j'insisterais, pour ma part, sur la prévention. Eh oui ! La prévention a des vertus qu'on ne peut ignorer dans la lutte contre l'obésité, pandémie qui touche un milliard d'hommes qui creusent leur tombe avec leur fourchette. Pensez que 50 % des praticiens qui prescrivent des médicaments contre le cholestérol n'ont jamais mis leurs patients au régime et ne leur ont jamais demandé de faire du sport ! Quelle sera la place de la prévention dans la prochaine loi de santé publique annoncée pour 2014 ? L'organisation de notre système du médicament a été dénoncée lors de l'affaire du Mediator qui, à dire vrai, n'était qu'une redite de l'affaire du Vioxx en 2006. Il s'est ensuivi un texte qui a révisé notre architecture sanitaire dans le bon sens. Le projet de loi Sauvé, sur la prévention des conflits d'intérêt, n'a pas abouti, c'est dommage. J'avais déposé des amendements au projet de loi sur la transparence de la vie publique, que notre Haute assemblée n'a -hélas- pas adopté. Allez-vous, madame la ministre, reprendre les dispositions sur le conflit d'intérêt dans la prochaine loi de santé publique ?

Concernant les baisses de prix du médicament, on a enregistré une diminution, en 2012, de 0,8 %, qui n'est pas négligeable.

Le ministère travaille sur le conditionnement des médicaments à l'unité, qui fonctionne bien aux États-Unis, dans un système très différent, comme en Suède. Encore une fois, j'espère avec force que le Sénat discutera de la deuxième partie du PLFSS. Venant d'un département touché par l'amiante, vice-présidente de la mission commune d'information sur le Mediator, je défends l'action de groupe en matière de santé. Il est plus que temps de mettre à l'ordre du jour l'excellente proposition de loi du groupe RDSE, qui porte le n°484. Pour conclure, le médicament regarde tout le monde, y compris les modestes membres de la commission des affaires étrangères dont je suis. Je soutiens votre politique, qui me semble frappée au coin du bon sens !

Mme Laurence Cohen .  - Après les nombreux rapports produits par notre Haute assemblée, nous débattons aujourd'hui du marché du médicament. Le choix des mots n'est pas anodin : le médicament est un marché, et fort juteux. Mme Véronique Vasseur, médecin chef de l'hôpital Saint-Antoine, l'a dénoncé récemment. Quelques chiffres. En 2012, le marché mondial du médicament représentait 856 milliards de dollars de chiffre d'affaires, contre 200 milliards en 1990. La France est le deuxième marché européen derrière l'Allemagne.

Sanofi enregistre des milliards de bénéfices, et supprime des milliers d'emplois. Vous le savez, notre groupe défend l'interdiction des licenciements boursiers. La financiarisation doit céder la place à la recherche, à la production et à la distribution de médicaments et de vaccins. Nous prônons la création d'un pôle public du médicament, qui est un bien commun universel. La puissance publique doit reprendre la main.

Lors de l'examen du projet de loi sur la sécurité sanitaire du médicament, en 2011, la gauche -et Mme Pasquet en tête- s'était battue pour introduire le principe de responsabilité sans faute du fabricant de médicaments dans un article 17.En transposant la directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux, le gouvernement de l'époque avait choisi d'introduire une exonération de cette responsabilité, alors qu'il n'y était pas obligé. De ce fait, les victimes ne peuvent être indemnisées. D'où l'initiative du Sénat, que la majorité de droite de l'Assemblée nationale annula ensuite.

Les nombreux scandales sanitaires, du distilbène aux pilules de quatrième génération, doivent nous inciter à retenir ce principe de responsabilité sans faute. Madame la ministre, l'inscrirez-vous dans votre loi ?

M. Yves Daudigny .  - Je remercie le groupe RDSE d'avoir proposé ce débat, particulièrement opportun avant l'examen du PLFSS.

La consommation de médicaments représente 525 euros par habitant et par an. Pour la première fois, la valeur remboursable a reculé en 2012. Le volume et le prix des médicaments consommés en France sont plus élevés qu'ailleurs. Nous nous situons au sixième rang mondial, bien au-dessus de la moyenne de l'OCDE.

Madame la ministre, restons attentifs à l'évolution des dépenses liées aux dispositifs médicaux.

J'ai déposé un rapport relatif au médicament générique. Les personnes âgées de 75 ans ou plus consomment en moyenne sept molécules médicamenteuses minimum, pour une dépense moyenne de 940 euros par an. Nous faisons face à un problème de comportement des prescripteurs et des patients. Les médicaments ne sont pas anodins. Nous devons, au nom de la santé publique, en améliorer le bon usage. C'est pourquoi j'ai proposé de nouvelles campagnes de communication. Celles sur les antibiotiques ont eu un effet réel sur la consommation. Il faut agir dès la prescription.

Il s'agit de moins prescrire et de mieux prescrire. Les visiteurs médicaux orientent les prescripteurs vers les médicaments nouveaux et onéreux. Les génériques, qui sont des médicaments comme les autres, ont une marge de progression importante. Les statines sont un cas d'école : la seule molécule non génériquée est la plus prescrite en France !

Les résultats thérapeutiques ne sont pas meilleurs dans notre pays. J'ai cité, dans mon rapport sur la MEC, « un péché originel » : la France a choisi de fonder le développement des génériques sur la substitution. Ce dispositif mine la confiance des patients envers le praticien.

M. Philippe Leroy.  - Très bien.

M. Yves Daudigny.  - Le coût moyen des traitements est anormalement élevé en France, en raison des prescriptions hospitalières fournies à bas coût et qui orientent ensuite la consommation en ville.

La nouvelle convention entre assurance maladie et pharmacies, en 2012, prévoit la modification du mode de rémunération des pharmaciens mais les négociations n'avancent guère : comptez-vous les accélérer ?

La production de médicaments se mondialise. Il faut contrôler les médicaments et leurs matières premières : pourquoi ne pas mutualiser les contrôles avec nos partenaires européens pour multiplier les inspections en Inde et en Chine ?

Ne pouvait-on mutualiser les efforts de contrôle, pour multiplier les inspecteurs en Inde et en Chine ?

La maîtrise des dépenses d'assurance maladie repose sur les patients. Ce système atteint ses limites, s'il n'est pas relayé de manière structurelle par des appels à changer les comportements. Avançons vers de telles réponses structurelles, madame la ministre. (Applaudissements)

Mme Françoise Laborde .  - L'affaire du Furosémide, fondée sur une erreur rarissime de conditionnement, a relancé la suspicion à l'encontre du générique. Son marché s'essouffle en France après avoir connu une forte croissance. Les pouvoirs publics se sont appuyés sur les pharmacies d'officine, auxquelles ont été octroyés des droits de substitution. En Haute-Garonne, les résultats sont encourageants.

La Cpam 31 a lancé une nouvelle campagne de communication axée sur le coût, moins cher. Mais gare à ne pas entretenir une polémique sur des médicaments qui seraient low cost. Il faut un maximum de transparence et d'information pour assurer à la population que les génériques ne sont pas des médicaments au rabais.

Depuis le 12 juillet 2013, les pharmacies françaises peuvent commercialiser sur internet 4 000 médicaments sans ordonnance. Il semble que la mise en oeuvre de cette disposition soit confuse. Des sites illégaux ont été créés. Des produits contrefaits ou interdits en France circulent. Le ministère doit faire preuve de la plus grande vigilance. La contraception d'urgence peut-être être vendue sur Internet ? Le risque n'est pas mince, ne serait-ce que de retard de livraison.

Le détournement de certains médicaments, comme le Subutex, me préoccupe. Prescrit avec succès sur ordonnance sécurisée dans le traitement substitutif des pharmacodépendances majeures aux opiacés, ce médicament est aussi utilisé par certains dans un but qui est loin d'être thérapeutique.

Le Parlement européen semble devoir refuser que la cigarette électronique soit considérée comme un médicament. Quelle est votre position ? (Applaudissements sur les bancs RDSE)

Mme Aline Archimbaud .  - Je remercie le groupe RDSE pour ce débat. Aux États-Unis et en Europe, les résultats de plus de la moitié des essais cliniques ne sont jamais publiés. Une étude a quatre fois plus de chances d'être publiée lorsqu'elle confirme l'hypothèse initiale. Au nom du secret commercial, certaines firmes s'arrogent abusivement le droit de ne pas publier certains résultats. A l'inverse, elles multiplient volontiers les publications d'études favorables. C'est ainsi que les firmes gèrent la recherche ! Parfois, elles recourent à l'intimidation, voire à la neutralisation de chercheurs indépendants.

Trop d'autorisations de mise sur le marché se fondent uniquement sur des essais cliniques réalisés en comparaison avec les placebos et non avec le traitement de référence, au mépris de l'éthique.

Trop souvent, les firmes s'opposent à l'accès des chercheurs et des agences à des données, en raison de leur supposée confidentialité. Nous attendons une recherche plus indépendante et libérée des contraintes commerciales.

Les eurodéputés de la commission de l'environnement ont adopté un rapport tendant à renforcer les exigences de transparence. S'ils sont suivis en séance plénière, le nouveau règlement européen sera un progrès. A l'heure où il est beaucoup question de transparence, j'espère que la France la défendra sur son sol.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. Philippe Leroy .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Alain Milon, dont mon intervention reflétera, en grande partie, le point de vue. Après m'être réjoui de la qualité du débat, je veux rappeler, après d'autres, que les Français sont de gros consommateurs de médicaments, pour 500 euros en moyenne chaque année. Les entreprises du médicament emploient quelque 100 000 personnes. N'attaquons pas ce secteur d'excellence. Associons plutôt l'ensemble des professionnels de santé à la sécurité sanitaire.

L'affaire du Mediator a conduit à renforcer notre arsenal législatif, avec la loi Bertrand de 2011. La quasi-totalité de ses décrets d'application ayant été pris, nous pouvons en tirer un bilan. Ses trois objectifs, la lutte contre le conflit d'intérêt, l'aménagement de notre paysage institutionnel et la consolidation de nos mécanismes de contrôle, ont été atteints. Avec un Sunshine Act à la française, nous avons clarifié les liens entre l'industrie du médicament et les professionnels de santé. L'agence nationale de sécurité du médicament doit absolument coopérer avec l'agence européenne et les ARS. Les autorisations de mise sur le marché sont désormais réévaluées tous les cinq ans. Depuis 2011, elles ont été reconsidérées pour 58 médicaments. Comment, madame la ministre, améliorer l'information du Parlement sur les programmes de réévaluation ?

Soyons vigilants afin que ne se reproduise pas le drame du Mediator, prescrit à 70 % hors autorisation de mise sur le marché en 2008. Comment renforcer les contrôles sur les prescriptions hors autorisation de mise sur le marché ?

La surconsommation, inutile, coûte cher à la sécurité sociale. La France est l'un des pays où la prescription est la plus forte. Sensibilisons les Français à un usage modéré.

Il est tout de même problématique qu'un pharmacien puisse délivrer un autre médicament que celui prescrit par le médecin. D'autant que, placé sous contrôle de l'agence du médicament, il est soumis à des sanctions. Les logiques économiques propres au marché du médicament sont de plus en plus complexes. Il serait utile qu'une plus grande transparence règne dans ce business. Je m'étonne de l'ampleur de la responsabilité laissée aux pharmaciens, qui soulève des questions éthiques. A qui se fier ? La comparaison entre un médicament et son générique ne garantit pas toujours une similitude absolue.

Qu'est-ce, au juste, que la « bioéquivalence » ? Cette incertitude n'a rien de rassurant pour le patient. Il existe un décalage sérieux entre la composition chimique d'un médicament et celle de son générique. Les différences avec le princeps peuvent porter sur les substances actives et sur les excipients. Les expertises devraient être multipliées. Un médicament princeps suscite parfois quelques dizaines de génériques. Pour quelle nécessité ? Cela ne semble guère sérieux. Je ne mets pas en doute la nécessité de faire des économies, encore faut-il s'entourer d'un maximum de garanties.

Quant à la vente en ligne de médicaments, elle envoie un mauvais signal. Les ventes sur internet nécessitent un encadrement strict. Quelles sont les mesures prises en ce sens par le Gouvernement ?

Les logiciels d'aide à la prescription destinés aux médecins doivent être aussi encadrés.

Les PLFSS se traduisent par de l'instabilité fiscale pour l'industrie pharmaceutique mais nous y reviendrons bientôt.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé .  - Je salue à mon tour l'initiative de M. Barbier. Le médicament préoccupe beaucoup les Français. C'est l'occasion de dresser un bilan. La question centrale est celle de la confiance, ébranlée par des crises sanitaires successives qui renvoient, au reste, à des situations bien différentes. Celle du Mediator ne peut servir d'unique grille de lecture. La responsabilité des pouvoirs publics est de garantir la sécurité, la transparence, l'accès aux produits innovants.

Madame Goulet, la question de la prévention trouvera toute sa place dans le projet de loi de santé publique que je vous présenterai l'an prochain, en lien avec l'organisation de notre système de soins. Il faut aller plus loin que la loi de décembre 2011.

L'an dernier, nous avons affronté plus de 170 ruptures de stocks de médicaments dits indispensables. C'est anormal. J'ai pris des décisions pour sécuriser l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. J'ai instauré un comité de pilotage interdisciplinaire afin de lutter efficacement contre les ruptures de stocks, ce qui impliquera des mesures législatives mais aussi des dispositifs d'alerte européens. Grâce à nos liens avec l'Italie, nous avons pu pallier certaines carences.

La traçabilité des matières premières suppose des contrôles renforcés, quand plus de 80 % d'entre elles viennent de pays extérieurs à l'Union européenne. Cela suppose un effort européen. La France est le seul État membre à y consacrer une équipe d'inspecteurs.

L'achat en ligne est de plus en plus utilisé. Il doit effectivement être régulé et contrôlé. On ne peut admettre que circulent facilement des produits contrefaits ou falsifiés. J'ai mis en place des garde-fous, en m'appuyant sur notre réseau d'officines, en ajoutant des règles à celles de la directive européenne. Les médicaments ne doivent être achetés qu'à des sites labellisés par le ministère, adossés à une pharmacie physique. Les actions en justice sont engagées contre les contrevenants.

Ratifions la convention internationale, renforçons les mécanismes de vigilance, vérifions que les médicaments consommés le sont à bon escient. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) effectue des réévaluations périodiques des produits anciens. Elle a retiré le Diane 35 et réévalué 110 médicaments. Il y a eu 11 suspensions de commercialisation. J'ai demandé un plan de réorganisation de la pharmacovigilance, afin de mettre en place un système plus simple -d'abord pour les professionnels de santé- et plus réactif, dès l'an prochain, fondé sur l'utilisation réelle des produits de santé, laquelle peut dépasser le cadre de l'autorisation de mise sur le marché.

Je faciliterai l'accès sécurisé aux bases de données. Les dispositifs médicaux, notamment implantables, seront également concernés par le renforcement de notre dispositif de vigilance. Cela ne va pas de soi au niveau européen. J'instaurerai la traçabilité des dispositifs médicaux. Le paysage institutionnel doit être rendu plus lisible et plus réactif.

Deuxième pilier de ma politique, le bon usage des produits et leur juste prescription au meilleur prix.

Les Français consomment, encore et toujours, trop de médicaments ; c'est une de nos caractéristiques. De même que les professionnels de santé ont tendance à prescrire le dernier médicament mis sur le marché, même lorsque sa nouveauté n'apporte rien au patient. Cela a un coût significatif pour la sécurité sociale. La règle doit être claire : il faut, au moment de la prescription, tenir compte du service médical rendu et du prix.

Cela m'amène au générique, qui n'est pas un médicament low cost. Voilà bien un débat franco-français. Toutes les règles concernant les génériques sont internationales ! Que le pharmacien joue un grand rôle de par son pouvoir de substitution du médicament ne signifie en rien, monsieur Leroy, qu'il se confondrait avec le médecin. Nous avons tous vu des pharmaciens appeler le médecin pour demander conseil ou précision. J'ajoute qu'à la différence des pharmaciens, les médecins raisonnent selon la marque et non selon les molécules, ce qui les amène à prescrire souvent le princeps. S'ils y tiennent, ils peuvent préciser sur l'ordonnance que le médicament indiqué est non substituable.

Troisième pilier de notre politique, une information fiable, gratuite et transparente sur le médicament. Notre base www.medicaments.gouv.fr rencontre un grand succès quinze jours après son lancement. Elle préfigure le grand service public d'information en santé. L'accès à l'information pour tous, c'est aussi la transparence sur les essais cliniques. La France défend cette position à Bruxelles.

Je confirme à Mme Goulet que l'action de groupe trouvera sa place dans la loi de santé publique que je présenterai en 2014.

Quatrième pilier, la transparence de la décision publique. Le décret Sunshine Act va plus loin que ce qui était prévu : tous les avantages devront être publiés sur un site qui ouvrira en avril 2014 et pour lequel la collecte des informations débutera dans quelques semaines.

Enfin, une politique du médicament passe aussi par le soutien à l'innovation, n'oublions pas notre industrie pharmaceutique. Je veux dire la volonté qui est la mienne et celle du Gouvernement de défendre et valoriser l'innovation. Elle n'est en rien contradictoire avec notre ambition de mieux réguler et contrôler le médicament. Merci de votre soutien. (Applaudissements)