SÉANCE

du mardi 22 octobre 2013

13e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Jean-Pierre Bel

Secrétaires : Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, Mme Marie-Noëlle Lienemann.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Accès au logement et urbanisme rénové

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.

Discussion générale

Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement .  - Je mesure la gravité du sujet et l'importance de notre travail commun. Les difficultés nous assaillent. La tentation du repli sur soi nous menace. Il nous faut répondre à la fois à la crise identitaire et sociale, en défendant nos valeurs républicaines, attaquées par le populisme et la dissolution de l'esprit de solidarité. Faire France ensemble, tel est l'objectif de notre République. La cohésion sociale, tel est l'objet de la loi Alur, saisissons cette chance, au nom d'une certaine idée de la République et de l'intérêt général. Ce qui se joue ici, c'est la situation de milliers de gens, qui veulent se loger dignement, mettre leur famille à l'abri. Nous avons un devoir de réussite. Départissons-nous des réflexes partisans, pour forger l'outil législatif adapté à l'urgence. La montée de l'extrémisme, que nous constatons dans toute l'Europe, doit être combattue par chacun, où qu'il se trouve. Telle est la tâche de l'action publique. J'espère que notre débat sera de qualité.

M. Roland Courteau.  - Nous l'espérons aussi.

Mme Cécile Duflot, ministre.  - Le marché ne peut, seul, répondre aux besoins collectifs de logement. Nous devons nous engager dans une voie nouvelle. La crise appelle le volontarisme de l'État, sans méconnaître les complexités de l'action publique : tels sont l'esprit et la lettre de ce projet de loi, pour favoriser l'accès au logement pour tous, sans exclure personne. Comme le disait l'abbé Pierre, quand la loi ne permet pas aux travailleurs de se loger, « ce n'est pas entreprendre une construction sans permis, c'est la loi qui est illégale ».

Notre texte rétablit le logement à sa juste place : celle d'un bien de première nécessité. L'encadrement des loyers est de bon sens. Ils ont augmenté dans certaines zones deux fois plus vite que les prix. Les Français dépensent de 26 % à 50 % de leur revenu pour se loger. Ce n'est ni acceptable ni soutenable. Nous avons entendu agir de façon pragmatique, en limitant les excès sans entrer dans une logique de prix administrés.

À l'Assemblée nationale, et à la commission des affaires économiques du Sénat, cette démarche a été confortée par la fixation d'un seuil au loyer médian minoré. Nous avons proposé que la référence soit fixée en fonction du loyer au mètre carré car ce sont dans les petites surfaces que les prix sont plus élevés.

C'est ensemble que nous aboutirons à un dispositif fonctionnel et pérenne.

La Garantie universelle des loyers (GUL), porte l'ambition d'ouvrir à terme un nouvel âge de la recherche du logement, en apaisant les relations entre propriétaires et locataires, en les pacifiant. Un tiers prendra en charge le défaut : ce seront des professionnels soumis à agrément. Il est essentiel d'adopter cette mesure de concorde et de progrès social. Nous osons faire reculer l'angoisse face à l'arbitraire. Songez aux jeunes, aux précaires, aux familles monoparentales, et à ceux que leur couleur de peau ou leur patronyme expose à la discrimination. La GUL luttera contre toutes les discriminations en recréant les conditions de la confiance.

Cette solution est le fruit de plusieurs années de réflexion. Elle fut recommandée par la Halde dès 2010. J'entends dire que les locataires seraient déresponsabilisés. C'est l'inverse puisque les rares locataires de mauvaise foi resteront redevables. Les propriétaires, eux, seront protégés. Il ne s'agit pas de créer une nouvelle administration. Le Gouvernement s'appuiera sur ceux qui savent faire, et qui ne sont pas nécessairement des agents publics. C'est une avancée législative majeure, qui ancre la justice dans la vie quotidienne. Dans quelques années, j'en suis convaincue, cette mesure fera partie du patrimoine républicain.

Favoriser l'accès au logement pour tous, c'est l'objectif de ce projet de loi. Il oriente la politique d'hébergement vers le logement et lutte contre les expulsions, mettant fin à la trop longue séparation entre logement d'une part et hébergement, accueil, insertion des personnes défavorisées d'autre part. Celles-ci seront accompagnées. L'insertion durable sera favorisée.

En améliorant les dispositions relatives à l'expulsion, nous luttons contre l'exclusion, dès lors que la perte du logement scelle la rupture des liens sociaux et familiaux. Je suis très attachée à ce que le projet de loi lutte contre les impayés le plus en amont possible. Les possibilités pour le juge d'accorder des délais ont été accrues. Le maintien du locataire de bonne foi est inscrit dans le projet de loi. La promotion de la co-construction et l'évaluation participative de la politique du logement sont au coeur de ce projet de loi.

Le Gouvernement conduit la politique de la Nation. Il est attentif aux hommes et aux femmes de ce pays, plutôt qu'à la seule rentabilité financière. Le logement est un bien de première nécessité, qui conditionne tout le reste. Un parcours résidentiel, c'est avant tout une trajectoire de vie, tout simplement !

La responsabilité des élus est de se saisir de ce projet de loi pour résoudre la crise du logement dans leurs territoires. L'État en prend sa part. Les premières ordonnances publiées depuis juillet lèvent les freins à la relance de la construction. Au-delà de l'urgence, ce projet de loi adopte des dispositions structurelles, avec détermination et courage ; rendons possible ce qui est souhaitable ! Cessons en revanche de consommer des terres agricoles. Nous donnons aux élus les moyens de cette politique, pour développer leur stratégie d'aménagement et de réhabilitation des centres anciens. L'État, au nom de l'égalité des territoires, intervient pour garantir le respect d'orientations stratégiques, pour optimiser la ressource foncière, dans le sens de la loi SRU, pour conforter la mission des acteurs locaux.

C'est un droit de l'urbanisme rénové que je vous présente. Trop longtemps, on a refusé de prendre la mesure de l'enjeu politique de l'urbanisme. Ces dernières années, les ménages se sont rués vers la périphérie des villes. L'urbanisation galopante n'est pas une fatalité. Tirons les leçons de l'intelligence écologique ! Les terres naturelles et agricoles sont un bien précieux à préserver et un bien commun. Je fais confiance aux élus pour définir les conditions de constructibilité sur leur territoire. Mettons un terme au coup par coup, pour faire le choix du long terme. Soyons ambitieux. Ce projet de loi en donne les moyens.

La ville durable verra le jour. Construisons plus et mieux, là où sont les besoins. Améliorons la sécurité juridique, la lisibilité des documents de planification, à chaque échelle du territoire. Tel est le rôle du PLU, qui traduira le Scot au niveau opérationnel, en organisant la maîtrise de l'espace urbain. L'ensemble des communes y seront associées. Nous en avons beaucoup discuté : l'aménagement durable passe par l'élaboration de documents d'urbanisme à l'échelon intercommunal.

M. Gérard Cornu.  - N'importe quoi ! Liberté pour les maires ! (Approbation sur les bancs UMP)

M. Charles Revet.  - Vous méconnaissez le terrain.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Allons !

Mme Cécile Duflot, ministre.  - Je voudrais vous en convaincre : l'efficacité impose que les décisions se prennent au plus près du terrain, l'intercommunalité coordonnant, sans se substituer aux communes. La mutualisation des moyens permet d'associer les expertises et de faire le choix de l'intelligence commune, mais aussi de garantir la solidarité entre collectivités.

M. Claude Dilain, rapporteur de la commission des affaires économiques.  - Bravo.

Mme Cécile Duflot, ministre.  - Oui, en aménageant de façon équitable et équilibrée nous garantirons à nos concitoyens un égal accès aux services publics et nous retrouverons leur confiance. Tous les maires qui sont passés au PLU intercommunal se félicitent de leur choix. (Exclamations sur les bancs du RDSE)

Je ne veux déposséder aucun élu de ses prérogatives. (Bravos et applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et CRC ; protestations à droite)

M. Gérard Cornu.  - Vous faites le contraire !

Mme Cécile Duflot, ministre.  - La volonté d'efficacité ne doit pas mettre en danger le niveau communal, celui de l'expression de la volonté des citoyens.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Une démocratie non bureaucratique !

Mme Cécile Duflot, ministre.  - Les maires conserveront leur prérogative pour les autorisations d'urbanisme.

M. François Grosdidier.  - Laissez la liberté aux maires !

M. Charles Revet.  - Faites-leur confiance.

Mme Cécile Duflot, ministre.  - Plus de 40 % des communes, essentiellement rurales ne sont couvertes par aucun document d'urbanisme.

M. Charles Revet.  - Vous savez pourquoi.

Mme Cécile Duflot, ministre.  - Le sujet mérite attention et précision ! En généralisant le PLU, nous donnons aux communes les moyens de mener une politique pour instaurer la confiance. Je fais le pari de la confiance ; ma méthode, c'est la conviction. J'ai confiance dans la responsabilité des élus locaux qui choisiront le mieux pour leur territoire.

Dans chaque EPCI, autour du PLU intercommunal, des échanges auront lieu, qui détermineront l'avenir du territoire.

Demain, l'intercommunalité sera la règle et non l'exception, mais les maires auront les moyens de faire respecter leur volonté. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes ; protestations à droite) L'amendement que vous avez adopté en commission des affaires économiques va dans ce sens.

Nous aurons une discussion féconde et, je le constate déjà, franche. (Rires à droite) Je remercie les rapporteurs qui ont travaillé sur ce projet de loi, et le président de la commission des affaires économiques qui a porté une attention particulière à ce débat. Nous passerons de longues heures ensemble. Ce projet de loi refuse le renoncement. Notre pays ne doit pas renoncer face à la crise du logement. Je vous remercie de donner à notre pays les moyens de l'affronter. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et sur quelques bancs CRC et du RDSE. Quelques protestations à droite)

M. Claude Dilain, rapporteur de la commission des affaires économiques .  - Ce projet de loi était attendu. Vous vous y étiez engagée, madame la ministre. Je vous remercie d'avoir tenu parole. Ce texte est ample et dense, ce que j'espère on ne vous reprochera pas sinon, on vous aurait fait le reproche de le « saucissonner ». Il répond à des lois anciennes. Il est équilibré. Il est déterminé : enfin, vous procurez des outils pour traiter le problème de l'insalubrité, des marchands de sommeil. (M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis : « très bien ! » ; Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis, applaudit)

La commission des affaires économiques a adopté le 9 octobre le projet de loi Alur après l'avoir sensiblement modifié après onze heures de réunion et l'examen de 339 amendements. Ce projet de loi constitue une nouvelle illustration de la priorité donnée par le Gouvernement à la question du logement. Dès le 1er août 2012 un décret luttait contre la spéculation. En octobre 2012, les plafonds du livret A étaient relevés, avant de l'être de nouveau en octobre 2013. Le foncier public a été mobilisé.

M. Philippe Dallier.  - Combien de terrains cédés ?

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Un nouveau dispositif fiscal dit « Duflot » a été mis en place par la loi de finances 2012.

La lettre d'engagement de novembre 2012 a renforcé les interventions de l'État en faveur du logement social. La liste est longue... je mentionne aussi la loi d'habilitation du 1er juillet 2013.

Ce projet de loi s'inscrit dans la continuité des initiatives prises depuis mai 2012. La commission des affaires économiques a désigné deux rapporteurs. Je me suis occupé des titres I et II, Claude Bérit-Débat des titres III et IV.

Le premier volet du titre premier réforme la loi du 6 juillet 1989, pour moderniser les rapports entre bailleurs et locataires. Il crée un contrat de location type, un modèle type d'état des lieux ; renforce les obligations des locataires en matière d'assurance ; réduit le délai de préavis à un mois pour les locations en « zones tendues » ; étend l'application de la loi de 1989 aux logements meublés résidences principales ; crée une sanction en cas de non-restitution de la garantie ; encadre l'évolution des loyers dans les zones tendues, où les loyers ne pourront être supérieurs de plus de 20 % au loyer médian de référence fixé par le préfet. Depuis vingt ans les loyers ont augmenté plus vite que les prix. Cette mesure n'aura pas d'effet inflationniste.

Les modifications apportées par les députés l'évitent. Les loyers sous le loyer médian minoré ne pourront être réévalués au-delà de ce seuil. La commission a introduit des dispositions complémentaires d'encadrement. Les députés ont adopté sept nouveaux articles relatifs à la location meublée de courte durée, particulièrement importante à Paris.

Le deuxième volet du titre premier instaure la GUL. La commission a introduit des précisions importantes. Les dispositifs antérieurs n'ont pas fonctionné. Le marché ne peut gérer un dispositif assurantiel de ce type. Certains estiment que ce dispositif est trop favorable aux locataires. Il n'en est rien. Nous déposons un amendement, prévoyant le recours de l'Agence de la GUL au Trésor public pour recouvrer, plus rapidement, certains impayés.

Le troisième volet du titre I, très attendu par les professionnels de l'immobilier, réforme la loi Hoguet. Il crée un conseil national de la transaction et de la gestion immobilière.

Le quatrième volet du titre premier prévient les expulsions, en traitant les impayés le plus en amont possible. La commission a amélioré la précision de ce dispositif.

Le cinquième volet facilite le parcours de l'hébergement au logement, en le rationnalisant et en renforçant le pilotage de l'État. Ce volet du projet de loi comporte plusieurs aspects sensibles. La commission a choisi le pragmatisme, entouré de garanties. Les CCAS pourraient voir leur charge de travail augmenter en raison des nouvelles règles de domiciliation.

Le dernier volet du titre premier concerne l'habitat participatif, peu développé en France : quelques centaines de logements contre des centaines de milliers dans les pays d'Europe du Nord. Cette « troisième voie » du logement peut beaucoup progresser dans notre pays. Ce projet de loi crée deux formes de sociétés d'habitat participatif, dont la commission a précisé l'encadrement de la valorisation des parts sociales pour éviter la spéculation.

Le titre II lutte contre l'habitat indigne et les copropriétés dégradées. J'y suis particulièrement attaché. Ces dispositions sont très attendues et consensuelles. Elles s'inspirent des propositions formulées par Dominique Braye et votre rapporteur.

La création d'un registre des syndicats de copropriétaires dissipera le « brouillard » actuel. L'interdiction pour un copropriétaire en impayé d'acquérir un autre lot renforce la lutte contre les marchands de sommeil. D'autres dispositions permettront aux collectivités territoriales d'intervenir efficacement.

Le fonds de prévoyance, préconisé par le rapport Braye, constitue une assurance contre la dégradation des copropriétés. Le seuil de 50 lots a été abaissé par la commission à 10 lots. Plus de 50 % des copropriétaires non-occupants n'ont pas d'assurance pour leurs lots. Nous luttons contre cette situation qui fragilise les copropriétés.

L'habitat indigne dans les zones tendues est combattu par l'article 41, qui unifie les polices spéciales en matière d'habitat au bénéfice des EPCI.

Les articles 42 et 43 bis C instaurent des peines complémentaires à l'encontre des marchands de sommeil.

L'Assemblée nationale a ajouté les articles 46 sexies A, septies et octies, qui instaurent un zonage où prévaut un régime de déclaration. La commission des affaires économiques a supprimé à mon initiative l'autorisation préalable de mise en location qui pourrait affaiblir la protection des locataires.

Beaucoup d'amendements ont été déposés. Je souhaite, par notre débat, enrichir ce projet de loi. (Applaudissements à gauche)

M. Claude Bérit-Débat, rapporteur de la commission des affaires économiques .  - Je rapporte les titres III et IV, que madame la ministre a présentés. La commission a peu modifié la version du titre III telle que votée par les députés. Nous avons confié le dispositif d'enregistrement des logements sociaux à un groupement d'intérêt public (GIP) nouveau. Nous préconisons que les communes et les bailleurs soient mobilisés. Je salue le travail de Marie-Noëlle Lienemann. À son initiative, nous avons adopté des amendements pratiques, concrets. Avec Mmes Blandin et Létard elle a présenté un amendement neutralisant les effets de la transformation de la Soginorpa, bailleur social du Nord-Pas-de-Calais, décidée en janvier dernier.

L'unification du contrôle des acteurs du logement social, sous l'égide de l'Agence nationale de contrôle du logement social a été validée par la commission, sous réserve de quelques ajustements.

Le projet de loi prévoyait d'étendre et de sécuriser au regard du droit européen les missions des bailleurs sociaux ; ne donnons pas à la Commission européenne des arguments pour remettre en cause leur régime spécial, attaqué par certains professionnels.

Le projet de loi soumet les sociétés d'économie mixte (SEM) à agrément, comme les organismes HLM. Les SEM réclament dans le même temps les mêmes droits, nous les leur accordons ; dans ces conditions, on ne saurait supprimer l'agrément, mais je proposerai que la signature d'une convention d'utilité sociale suffise.

Autre thème, le rattachement des offices publics de l'habitat aux intercommunalités. L'intercommunalité est l'échelle pertinente des politiques du logement ; les maires restent représentés dans les commissions d'attribution.

Nous avons facilité l'usufruit social, afin que les bailleurs sociaux puissent construire plus avec moins de capitaux, et jeté les bases juridiques du fonctionnement du dispositif de mutualisation entre organismes HLM. Avec pragmatisme, sans bouleversement, nous avons ainsi pris des mesures pour rendre la politique du logement plus efficace.

Le titre IV est relatif à la planification urbanistique et aux outils opérationnels d'aménagement. Le projet de loi prévoit le transfert automatique de la compétence PLU à l'intercommunalité. Beaucoup d'EPCI ont déjà compris l'utilité de ce transfert. Le PLUI ne dépouille pas les communes de leur compétence, au contraire, puisque les communes non couvertes par un document d'urbanisme perdent de facto leur compétence.

J'ai cependant entendu les inquiétudes. Le Sénat n'aurait pas voté en l'état le texte de l'Assemblée nationale. (MM. Jean-Jacques Mirassou, Yannick Vaugrenard et plusieurs de leurs collègues socialistes confirment) J'ai donc proposé de repousser ce transfert de trois ans, et surtout de créer une minorité de blocage d'un quart des communes représentant 10 % des habitants. Enfin, la commission a introduit une clause de revoyure. Mme la ministre a soutenu cette solution, qui a rallié de nombreux opposants. Mais nous devons tenir compte du vote très large de l'Assemblée nationale en faveur du transfert automatique. Plusieurs amendements ont été déposés qui renforcent encore le pouvoir des communes, au point qu'ils rendent parfois le dispositif moins favorable à l'intercommunalité que le droit actuel... Ne lâchons pas la proie pour l'ombre, mais recherchons un compromis avec les députés. J'espère que Mme la ministre soutiendra la position du Sénat au cours de la navette.

La commission a voulu soumettre toute superposition d'EPF d'État et locaux à l'autorisation des collectivités concernées : nous y reviendrons. Nous avons aussi voulu inclure clairement les cessions de parts de SCI dans le champ du droit de préemption.

Sur l'urbanisme commercial, les attentes du Sénat sont grandes, et la réforme ne saurait être introduite par petits bouts... Les dispositions introduites par les députés n'étaient pas satisfaisantes et manquaient d'ambition : j'ai proposé de les supprimer, afin d'y revenir plus globalement et plus sereinement.

De nombreux amendements concernent la construction en zone rurale. D'un côté, il faut encourager une consommation plus économe des espaces ruraux et agricoles ; de l'autre, éviter de mettre les campagnes sous cloche. Je proposerai, notamment pour la montagne, plusieurs adaptations importantes - dérogation à la règle de constructibilité limitée ou possibilité de changement de destination et d'extension limitée dans les zones agricoles de PLU.

Merci à Mme la ministre de son travail, de son écoute et de son soutien, notamment aux modifications que nous avons apportées à l'article 63. Encore une fois, je compte sur elle pour défendre ce compromis. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Je vous appelle avec enthousiasme à voter le projet de loi ainsi amendé. (Applaudissements à gauche)

présidence de M. Didier Guillaume,vice-président

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales .  - La commission des affaires sociales s'est saisie pour avis des dispositions relatives à la prévention des expulsions, à l'hébergement et à l'accès au logement, qui sont dans la continuité du plan adopté en janvier, je m'en réjouis. L'enjeu est de taille : accéder à un logement décent et indépendant, s'y maintenir durablement est un droit fondamental qui conditionne l'exercice de beaucoup d'autres droits. Songeons que 3,6 millions de personnes en France sont mal logées, et que 150 000 d'entre elles vivent dans la rue ou dans des structures d'hébergement... L'effort de construction ces dernières années n'a pas été à la hauteur des besoins - il a été surtout trop peu ciblé sur les logements les plus accessibles.

La refondation entamée en 2009 a montré ses limites. Le projet de loi organise une meilleure articulation entre les politiques du logement et de l'hébergement. Il s'agit tout d'abord de mieux anticiper les situations de rupture, en renforçant le rôle des Ccapex et la coordination avec les autres acteurs, préfet, organismes payeurs des aides au logement ou fonds de solidarité.

Le projet de loi rend plus effectif le Dalo en rendant les parcours plus fluides et en renforçant les pouvoirs des SIAO dont les moyens devront augmenter en conséquence. Une vision partagée de la demande et de l'offre disponible est la condition du bon fonctionnement des dispositifs d'accueil, d'hébergement et d'accompagnement.

Ce texte protège les droits des personnes en garantissant la participation de tous aux politiques conduites dans le sillage du huitième collège du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté.

La commission des affaires sociales a adopté 11 amendements, dont la plupart ont été repris et intégrés par la commission des affaires économiques. S'agissant du Dalo, les solutions d'accueil doivent être stables, pour permettre un accompagnement adapté. Nous avons voulu clarifier l'inconditionnalité de l'hébergement d'urgence, principe énoncé en 2009 dans la loi de lutte contre l'exclusion.

Les étrangers non communautaires en situation irrégulière pourront en outre se domicilier pour exercer leurs droits civils, par exemple pour se marier. Le droit en vigueur pénalisait ceux qui n'ont pas de domicile stable.

Nous n'avons en revanche pas trouvé d'accord avec la commission des affaires économiques sur le bail glissant, qu'à notre sens il fallait réserver aux personnes prioritaires au titre du droit à l'hébergement opposable, afin d'éviter toute exclusion. À l'initiative du groupe écologiste, l'Assemblée nationale a davantage encadré le dispositif afin que cette forme de bail ne soit qu'une option parmi d'autres et non une solution de facilité pour le relogement des prioritaires Dalo.

Le Dalo ne deviendra effectif que si nous nous mobilisons tous. Sur le logement accompagné pour les personnes en grande précarité, nous demandions un rapport au Gouvernement. Je comprends les préventions de la commission des affaires économiques, mais le problème est grave. Je suis convaincu que des solutions innovantes existent pour que chacun puisse avoir un toit, sans financement public démesuré.

Enfin, j'insiste sur l'importance dans l'accompagnement social. Les professionnels doivent se sentir encouragés. Un inventaire de l'offre existante pourrait être établi dans chaque département. Toutes les associations que j'ai entendues l'ont dit : ce projet de loi est porteur d'espoirs. Le logement ne doit plus être un facteur d'exclusion, mais la voie vers l'inclusion. (Applaudissements sur les bancs CRC, écologistes et socialistes)

M. Jean-Luc Fichet, rapporteur pour avis de la commission du développement durable .  - La commission du développement durable s'est saisie pour avis du titre IV, relatif aux règles d'urbanisme. Celles-ci ont un grand rôle à jouer pour l'aménagement de l'espace et son adaptation à la transition écologique.

La majorité de la commission, opposée à ce projet de loi, a rejeté par principe la plupart de mes amendements.

M. Gérard Longuet.  - Pas de chance...

M. Jean-Luc Fichet, rapporteur pour avis.  - J'en avais proposé quatre séries. La première concerne les Scot. Je me félicite que, grâce à la commission des affaires économiques, les délais de mise en conformité des PLU avec les Scot aient été revus.

À ma grande satisfaction, l'article introduit à l'Assemblée nationale sur les inter-Scot a été supprimé : évitons une inflation infernale.

La deuxième série concerne le PLUI. J'espère un compromis. Le transfert, à terme, est incontournable, mais il ne doit pas s'organiser sous contrainte, sauf à décourager et démobiliser les maires, surtout alors que les incitations de la loi Grenelle II n'ont pas encore produit tous leurs effets. Comme M. Bérit-Débat, j'avais proposé une minorité de blocage ; je n'ai pas été suivi mais je me réjouis que la commission des affaires économiques ait introduit un mécanisme similaire.

Ma troisième série d'amendements a connu un sort différent... Adoptés à l'unanimité par la commission, ils concernent l'urbanisme littoral. Une mission commune d'information travaille. La commission des affaires économiques a renvoyé leur discussion en séance publique. C'est dire leur importance au regard des difficultés d'application de la loi Littoral. Je propose une charte régionale d'aménagement, outil prescriptif des modalités d'application de cette loi, qui marque un retour à l'esprit initial. Le juge, par sa jurisprudence restrictive et peu cohérente, s'est substitué au législateur, et les gouvernements successifs se sont contentés de rustines. Il est temps de réagir. Ma proposition prévoit évidemment des garde-fous - par exemple le rôle d'arbitre du Conseil national de la mer. Comment comprendre qu'on puisse construire de nouveaux hameaux isolés dans les communes littorales, et qu'il soit impossible de combler les dents creuses dans les hameaux en zone rétro-littorale ? Là encore, mon amendement évite toute dérive.

Enfin, sur les sites et sols pollués, le dispositif actuel d'information et de réhabilitation doit être modernisé. La réhabilitation des friches est la condition de la densification urbaine. Avec les zones de vigilance dont je propose la création, l'information sera plus aisément accessible aux acquéreurs de terrains et aux aménageurs et mieux ciblée. Les responsabilités seront clarifiées. Il serait regrettable que le Parlement ne saisisse pas cette occasion. Le sujet est mûr et consensuel.

La commission du développement durable a émis un avis défavorable à l'adoption de ce projet de loi. J'y suis à titre personnel favorable. (Applaudissements à gauche)

M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - J'ai de la chance : chaque fois que je suis rapporteur, c'est sur un texte de Mme Duflot. (Sourires) La dernière fois, c'était sur l'ordonnance contre les recours pour excès de pouvoir abusif, cette fois-ci sur la loi qui la ratifie. J'y vois une prédestination...

Une autre habilitation nous est demandée pour simplifier le droit de l'urbanisme, augmenté de 960 pages par la loi Grenelle II... Il y faudra de la volonté et de l'audace...

Nous devons en outre être attentifs à la cohérence des textes qui nous sont soumis. Mme Lebranchu a déjà présenté la bande-annonce d'un texte sur les régions et les départements et le chef de filat pour début 2014, je m'en réjouis. On nous annonce aussi un texte porté par Mme Pinel ; l'urbanisme commercial mérite un débat à part. Il nous faudra encore veiller à la cohérence...

Il était plus que temps de donner une cohérence globale aux projets des collectivités locales, alors que 20 % du territoire seulement sont couverts par un Scot. J'apprécie l'équilibre trouvé. Le droit d'initiative et de veto des maires est préservé (M. François Grosdidier proteste vivement), nous avons toujours fonctionné ainsi au sein de la Communauté urbaine de Lille... Et les choses se passent bien dans un grand nombre de territoires. La minorité de blocage sécurise encore le dispositif.

L'articulation entre EPF d'État, actifs à l'échelle régionale, et EPF locaux, qui relèvent de l'échelle départementale, est nécessaire ; leur territorialisation sur l'ensemble de l'espace, dès lors qu'il y a accord sur les compétences, est bienvenue.

Sur la préemption, le projet de loi comble les deux trous du filet, les cessions de parts de SCI et les donations fictives. Sur les rapports entre propriétaires et bailleurs, Mme Duflot a de l'audace, toujours de l'audace, encore de l'audace... (Exclamations à droite) au risque de l'inconstitutionnalité... La commission des lois proposera quelques ajustements.

Pour le reste, ce texte est extrêmement important. Pour la première fois, on regarde en face cette réalité : les plus pauvres des plus pauvres habitent dans le parc privé. Il était plus que temps de s'attaquer à l'habitat indigne.

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Bravo !

M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis.  - Dans le parc privé des anciennes villes industrielles, de petites copropriétés concentrent l'essentiel des acticités des marchands de sommeil. Comme il était difficile d'exister aux côtés de Claude Dilain, (sourires) je me suis efforcé de fluidifier le dispositif pour n'exclure aucune copropriété dégradée. (Applaudissements à gauche et sur quelques bancs au centre)

M. François Calvet .  - Après avoir détricoté les mesures votées par la précédente majorité et augmenté les impôts des propriétaires bailleurs, voici que vous nous proposez un texte tentaculaire, au prétexte de combler la fracture résidentielle et de rétablir l'égalité d'accès au logement. Jusqu'à ce jour, vos efforts pour relancer la construction se sont révélés vains. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s'exclame) Entre mars 2012 et avril 2013, 336 000 logements seulement ont été mis en chantier, soit une baisse de 18 % ; le nombre de permis de construire recule dans les mêmes proportions. Et on ne construit pas là où sont les besoins. Les entreprises du bâtiment souffrent plus de la baisse de leur activité que de la concurrence des autoentrepreneurs... Vous vous attaquez aux conséquences de la tension, non à ses causes.

Vous proposez en réalité de gérer la pénurie au seul bénéfice des plus faibles. L'encadrement proposé des loyers rappelle la fixation par l'État du prix du pain, supprimée par Raymond Barre... Les boulangers ne pétrissaient alors que du pain médiocre. Il a fallu ensuite retrouver des savoir-faire...

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Vous nous roulez dans la farine !

M. Marc Daunis.  - Nous ne mangeons pas de ce pain-là ! (Sourires)

M. François Calvet.  - Vous faites fuir définitivement les investisseurs du secteur du logement (Vives protestations à gauche)

Mme Éliane Assassi.  - Où étiez-vous, ces cinq dernières années ?

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - C'est incroyable !

M. François Calvet.  - La régulation des prix entraîne toujours des effets pervers. Vous n'envisagez la France qu'à travers le prisme de l'Île-de-France. (M. François Grosdidier applaudit)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - N'importe quoi !

M. François Calvet.  - Tous les territoires ne sont pas dans la même situation que les zones tendues franciliennes. Dans les Pyrénées-Orientales, pour le prix d'un studio parisien, on peut s'offrir une grande maison avec piscine... Nous ne vivons pas dans le même monde que ceux qui nous gouvernent...

GUL, nouvel impôt pour la financer, nouvelles charges... Ce texte envoie un signal de défiance aux propriétaires. Et la confiance tardera à revenir. Le logement social ne saurait se substituer au parc privé. La loi SRU...

Mme Éliane Assassi.  - Vous ne la respectez pas !

M. François Calvet.  - ... ne suffit pas. Que va devenir la mixité sociale ? Comment les classes moyennes vont-elles se loger ? La GUL n'est que la généralisation obligatoire de deux dispositifs inefficaces, la source de nouvelles complexités pour les propriétaires et elle esquisse une sorte de « CMU logement ». Cette mesure est disproportionnée au regard des 2 % d'impayés. À moins que vous n'appauvrissiez tant les Français que les impayés explosent... De nouvelles charges vont peser sur les propriétaires, de même sur les locataires qui paient leur loyer...

Dans ce contexte bien sombre, nous sommes en revanche favorables à l'encadrement des professions immobilières et à certaines mesures proposées pour prévenir la dégradation des copropriétés et la précarisation sociale qui s'ensuit. De même, les mesures contre les marchands de sommeil devraient être efficaces, mais sans régler la situation des victimes.

Encore un nouvel établissement ! Ce Gouvernement aime créer de nouvelles structures et de nouveaux impôts. C'est un réflexe compulsif.

Dès lors que l'on confie aux CCI la délivrance des cartes professionnelles, pourquoi ne pas leur offrir aussi la gestion des répertoires ? Ce serait moins coûteux que de créer de nouvelles structures.

La tâche est si ample...

Sur la lutte contre les marchands de sommeil, aucune étude d'impact ne vient étayer vos propositions. En la matière, il est difficile de mener des actions pénales efficaces ; mieux vaut compter sur les actions de police administrative. Vous voulez confier aux EPCI de nombreuses responsabilités d'accueil et d'accompagnement sans prévoir de moyens. Le niveau d'investissement des intercommunalités est supérieur à celui de l'État. Vous comptez sur les collectivités locales pour financer, en organisant un véritable transfert de charges.

On ne peut qu'être inquiet, comme les Français, comme les propriétaires, alors que nos voisins allemands les protègent.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Ils régulent les loyers.

M. François Calvet.  - Où est le « choc de simplification » ? Vous renforcez l'inefficacité des dispositifs centrés sur l'aide à la personne, alors qu'il faut soutenir l'offre. Ce texte sème la défiance et l'incertitude, étouffe l'initiative. Selon l'adage, « quand le bâtiment va, tout va ». Avec vous, c'est l'inverse.

M. Marc Daunis.  - C'est tout en nuance !

M. François Calvet.  - Vu le peu de cas que la commission a fait de nos amendements, il est peu probable que le groupe UMP vote ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Daniel Dubois .  - Madame la ministre, vous avez lancé il y a dix-huit mois une fusée à trois étages. Vous nous présentez aujourd'hui le troisième mais je crains que votre fusée ne reste coincée dans sa rampe de lancement.

M. Marc Daunis.  - Image osée !

M. Daniel Dubois.  - Je suis pessimiste.

M. Charles Revet.  - Il y a de quoi.

M. Daniel Dubois.  - L'objectif de construction annuelle fixé par le président de la République ne sera pas atteint. En fait de 500 000, on n'ira pas plus loin que 320 000 à 330 000 logements.

M. Charles Revet.  - Sans doute moins !

M. Daniel Dubois.  - Le logement est une priorité des Français et pourtant, au premier trimestre de 2013, seulement 84 000 logements ont été mis en chantier sur le territoire.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Le problème a commencé sous la droite !

M. Daniel Dubois.  - Cela fait 11 % de moins qu'au premier trimestre 2012. Plus ça va et moins ça va. (Marques d'approbation à droite) L'opinion des Français est plus sévère que la mienne. Ils ont le sentiment que la situation s'aggrave.

Madame la ministre, vous présentez ce texte comme un compromis efficace. Il est injuste, déséquilibré, décourageant pour les investisseurs. Les locataires auront six mois pour s'opposer au niveau du loyer fixé dans le bail. C'est long. Est-ce équilibré ?

L'acquéreur ne pourra habiter le logement qu'il a acheté qu'à la fin du bail suivant et non à la fin du bail en cours. Équilibré, dites-vous ? Le propriétaire devra attendre 65 ans pour être autorisé à habiter son bien.

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Sous condition de ressources !

M. Daniel Dubois.  - Vous déséquilibrez la relation entre propriétaires et locataires.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Allons-y !

M. Daniel Dubois.  - Vous proposez des mesures impraticables, comme l'encadrement, qui entraînera des effets pervers. Les loyers de ceux qui sont dans la fourchette basse augmenteront, les contentieux exploseront. Les plus faibles seront mis en difficulté.

Le logement n'a pas besoin d'un corset, mais d'oxygène.

M. Charles Revet.  - Exactement !

M. Daniel Dubois.  - Votre dispositif est complexe et coûteux. Je salue néanmoins la volonté de trouver des solutions efficaces pour l'hébergement d'urgence.

Ce Gouvernement manque de confiance envers les élus. Une recentralisation de la compétence urbanisme est en cours. Faites confiance à l'initiative locale, aux maires ! La fronde monte dans les territoires. Notre rapporteur a changé le dispositif : il est encore pire. La minorité de blocage est tellement basse qu'elle sera sans cesse utilisée. Pourquoi ne pas laisser en place le dispositif actuel ?

L'article 58 aura des conséquences sur l'urbanisation.

M. le président.  - Concluez.

M. Daniel Dubois.  - Vous bloquez les initiatives des territoires, en calquant tout sur l'Île-de-France. Nous avons déposé des amendements ; nous nous prononcerons définitivement au vu de leur sort. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Mireille Schurch .  - L'accès au logement pour tous est au coeur de toutes les inquiétudes. Le logement est devenu un facteur de paupérisation, voire d'exclusion. La situation des locataires s'est dégradée. Ils sont 3 millions à consacrer plus de 35 % de leurs revenus à leur logement. Le quart des ménages les plus modestes ont un taux d'effort deux fois plus important que les ménages les plus aisés. Certes il y a des disparités géographiques mais le problème du logement ne concerne pas que les grandes métropoles : 11 % des ménages vivant dans des villes de moins de 100 000 habitants consacrent plus de la moitié de leurs revenus à leur logement.

Face au mal-logement, vous avez encadré l'évolution des loyers à la relocation et instauré un nouveau dispositif d'incitation fiscale qui se veut plus social que ses prédécesseurs, mais coûtera cher à la collectivité nationale au profit des investisseurs privés.

Nous savons bien que concilier les exigences des propriétaires, les besoins des locataires et la mission de justice sociale de l'État n'est pas chose aisée. Nous attendons beaucoup de ce troisième volet législatif. Nous saluons votre volontarisme. L'encadrement des loyers reconnaît l'existence d'un marché malade, qui méprise la dignité humaine, chasse les classes moyennes toujours plus loin des centres urbains. Les surcoûts de l'immobilier grèvent la croissance, augmentent les efforts des ménages et coûtent à la collectivité.

Les propriétaires modestes ne peuvent plus faire face à leurs devoirs. Nous saluons l'encadrement des professions immobilières et la moralisation des copropriétés.

Le maintien des APL en cas d'impayés est une bonne mesure. Nous nous félicitons de l'adoption en commission de l'amendement interdisant les expulsions manu militari. Il faut aller plus loin.

La loi Boutin n'est pas remise en cause, qui brade le patrimoine des logements sociaux. Vous proposez de définir un loyer médian, variable sur le territoire. Ce dispositif présente l'inconvénient de graver dans le marbre un état anormal du marché. Il risque en outre de pousser à la hausse les loyers bas. Le calcul doit prendre en compte les prix des loyers du parc public et exclure ceux des meublés et micro-logements. Le plafonnement à la relocation instauré par la loi de 1989 primera-t-il ? Nous proposons d'intégrer dans la loi le décret d'encadrement des loyers à la relocation.

Nous devons veiller à l'effectivité de l'encadrement des loyers. Les locataires, en zones tendues, ne feront guère valoir leurs droits, vu les difficultés de logement qui y prévalent.

Le Conseil constitutionnel ne tient pas pour absolu le droit de propriété ; il distingue entre privation de ce droit et limitation des conditions de son exercice. La Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen admet, dans son article XVII, une telle limitation, et 70 % des Français seraient favorables à un gel des loyers limité dans le temps. Les propriétaires privés possèdent un patrimoine moyen trois fois supérieur à celui de l'ensemble des ménages et les deux tiers d'entre eux ont un niveau de vie supérieur à celui de 80 % de la population. Dans ces conditions, un gel ne serait qu'une juste contribution à la solidarité nationale, après des années de cadeaux fiscaux.

Le problème principal demeure le renforcement de l'offre, ignoré par ce projet de loi. Quid de la promesse présidentielle de construire 500 000 logements par an ?

M. Philippe Dallier.  - Bonne question.

Mme Mireille Schurch.  - La garantie universelle des loyers est une bonne chose pour les petits propriétaires ; hélas, le projet de loi en renvoie l'application à beaucoup de décrets ultérieurs. Le dispositif est déséquilibré, puisque les propriétaires sont protégés, tandis que les locataires resteront redevables. Nous proposons du moins d'intégrer des représentants de locataires expérimentés dans le conseil d'administration de l'agence de la garantie universelle des loyers, et de supprimer les pénalités de retard, véritable « double peine ».

Nous craignons une stigmatisation des plus pauvres, puisque l'Inspection générale des finances recommande la création d'un fichier des baux pour écarter les mauvais payeurs. Le bailleur devra s'assurer que son locataire n'est pas inscrit à un fichier d'impayés... Ce fichage des pauvres à grande échelle, qui s'ajoute au « fichier positif » des crédits, nous paraît très dangereux.

Nous regrettons que les effets les plus dévastateurs de la loi Boutin ne soient pas remis en cause. Nous sommes convaincus que ce n'est pas le secteur privé qui nous sortira de la crise du logement. Les politiques à mettre en place doivent fluidifier l'existant, construire davantage, s'appuyer résolument sur le parc public. Ce projet de loi ne répond guère à la question foncière, déterminante.

Les réformes nécessaires de la fiscalité locale et la crise rendent difficile l'exercice du droit de préemption par les collectivités locales. Il faut créer de nouveaux outils fonciers, redéfinir le rôle des domaines, inscrire des mécanismes de lutte contre la spéculation dans la loi, sanctuariser des terroirs grâce à une agence nationale foncière, encadrer l'enrichissement sans cause, renforcer le droit de préemption.

Toute la politique du logement et d'utilisation des sols est confiée aux intercommunalités. Nous sommes opposés à ce dessaisissement des maires, marque de mépris envers ces élus.

M. François Grosdidier.  - Très juste !

M. Gérard Longuet.  - Très bien !

Mme Mireille Schurch.  - Nous déposerons des amendements pour consolider les pouvoirs des conseils municipaux dans ce domaine. (« Très bien ! » au centre et à droite) L'État doit soutenir les communes et rester le garant de l'égalité sur l'ensemble du territoire. Nos amendements maintiennent sa responsabilité sur le Dalo, les problèmes d'insertion et d'hébergement.

Ce projet de loi ne doit pas demeurer de simple affichage. La Commission européenne a engagé une guerre au logement social, en ouvrant ce front aux Pays-Bas. Nos amendements renforcent le droit au logement, qui n'est pas une marchandise, mais un bien essentiel pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs CRC ; Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit aussi)

M. Jacques Mézard .  - Comme l'emploi, l'éducation, la santé et la sécurité, le logement est une priorité, bien souvent un problème quotidien, accentué par la crise. Les loyers augmentent, ainsi que les prix du logement. On n'a pas anticipé les évolutions démographiques et sociétales. Il faut construire plus, d'urgence. Il y faut plus de liberté, plus de foncier. Ce n'est pas contradictoire avec plus d'État : à lui de planifier, de voir loin. Il ne l'a guère fait, en accumulant les dispositifs dont la vertu essentielle est de porter le nom du ministre qui les a présentés.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Pas moi !

M. Jacques Mézard.  - Notre pays souffre d'une fracture territoriale aggravée : on concentre toujours plus, on désertifie encore davantage.

Nous avons un impérieux besoin de simplification. Votre projet de loi simplifie un peu, mais laisse surtout des interrogations, en renvoyant les réponses à une machine réglementaire qui risque d'être bien compliquée. En un an, nous avons eu Duflot I, II, III et voici le n° IV ! Le succès n'est pas assuré, alors qu'on compte 300 000 mises en chantier, dont 160 000 en collectif. Vous avez sensibilisé les acteurs, après les maladresses du gouvernement précédent.

M. Claude Bérit-Débat, rapporteur.  - Eh oui.

M. Jacques Mézard.  - Il faut agir contre les maux de l'inflation normative et de la bureaucratie. Nous avons soutenu la loi d'habilitation, malgré nos réserves traditionnelles à l'encontre des ordonnances. Voici un projet de loi de 160 articles et 330 pages. La créativité des députés y est pour beaucoup, certes, mais enfin, quel choc de complexification, d'accréditations, d'autorisations en tous genres ! Nous avons déposé des amendements pour fluidifier tout cela. La commission a commencé, nous continuons.

Quant au rôle croissant - et souhaitable - des intercommunalités, il faut du temps, du dialogue entre les services et les intercommunalités. La commission des affaires économiques a adopté une solution d'accommodement. Nous voudrions aller plus loin, mais nous craignons de faire échouer ce compromis...

La garantie universelle des loyers présente un intérêt indéniable, tant pour les locataires que pour les propriétaires. Mais quid de son financement ? Comment mutualiser sans déresponsabiliser ? La question des impayés n'apparaît pas dans le projet de loi ! Nous attendons des précisions, ne pouvant voter ce texte en l'état.

S'il faut réguler les évolutions brutales des loyers, la complexité du système proposé me fait craindre des contentieux infinis. Cessons de présumer que tous les propriétaires sont cupides. Nous avons besoin d'eux !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

M. Jacques Mézard.  - L'encadrement des professions immobilières est une excellente chose. L'hébergement d'urgence pâtit du désengagement antérieur de l'État. Le projet de loi comporte des mesures indispensables à cet égard.

Il nous appartient de prendre des mesures exceptionnelles pour faire face à la crise du logement. On parle à juste titre du prix du foncier et l'on oublie de dire que le prix de la construction en France s'est considérablement accru et est devenu très supérieur à la moyenne européenne.

Nous nous déterminerons en fonction des débats et du sort réservé à nos amendements. (Applaudissements sur les bancs du RDSE et quelques bancs socialistes)

M. Jean Louis Masson .  - Je vote toujours librement...

M. François Grosdidier.  - Nous aussi !

M. Jean Louis Masson.  - ... en m'affranchissant des contraintes politiciennes.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Venez chez nous !

M. Jean Louis Masson.  - Ce texte est très mauvais, surtout sur le PLUI et les intercommunalités. Je voterai radicalement contre. (Sourires ironiques)

Si on leur enlève le PLU, les communes perdent la moitié de leurs attributions. Si vous voulez tuer les communes, dites-le ! Ce n'est pas l'apanage de la gauche !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Absolument !

M. Jean Louis Masson.  - M. Apparu l'avait suggéré. Je ne change pas de position, au motif que le Gouvernement a changé, contrairement à beaucoup ! J'étais contre, je reste contre. (Marques d'ironie à droite)

Pourquoi les gouvernements de droite et de gauche poussent-ils dans le même sens ? La position de la Fédération des maires ruraux est très claire, contrairement à celle de l'AMF, pilotée par des élus de grande ville, de droite et de gauche, qui imposent aux périphéries urbaines leur politique. Quand on a fini de lire la lettre de l'AMF, on ne sait pas ce qu'ils veulent. Au moins les maires ruraux disent-ils clairement qu'ils sont contre.

La rédaction de la commission des affaires économiques consiste à reculer pour mieux sauter : dans quatre ou cinq ans, les communes seront quand même dépouillées de leur pouvoir d'établir leur PLU. Ce n'est pas acceptable. Que chacun prenne une position claire : défendez les communes ou poussez à l'intercommunalité. Le débat est fondamental pour l'avenir des communes. J'ai signé la pétition des maires ruraux et les soutiens à fond.

M. Christophe-André Frassa.  - Ça sent les élections sénatoriales !

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Cette loi arrive à point nommé, comme troisième étape de la politique nouvelle du logement, grand défi républicain au service d'une vie harmonieuse de chacun et du développement durable.

« Oui, la France doit produire plus de logements » a justement déclaré le président de la République. Bien des dispositions ont été prises en ce sens. Le logement intermédiaire va être relancé grâce aux mesures fiscales annoncées et attendues. Il faut les concrétiser. Les terrains publics doivent être mis à disposition. On y est.

La part des revenus consacrée au logement devient insupportable et nuit à l'économie et à la croissance.

La mixité sociale, c'est la République dans la ville ; la ville durable est une nouvelle façon d'aménager le territoire. C'est un sujet sensible. La France doit réinventer l'aménagement du territoire. C'est un choix fondamental. On ne peut consommer tant de kilomètres carrés d'espaces naturels.

M. Roland Courteau et Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis.  - Très bien !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Il ne s'agit pas seulement du petit espace compris à l'intérieur du périphérique, mais bien de l'ensemble du territoire national, banlieues, grandes et petites villes, monde rural.

L'autonomie des collectivités locales doit être garantie, et aussi l'intégration républicaine. Nous ne sommes pas le pays des Bisounours : tout ce que font les collectivités locales n'est pas forcément parfait, non plus que tout ce que fait l'État. Dans la rédaction proposée par M. Bérit-Débat, rien ne se fera sans l'accord des maires.

M. François Grosdidier.  - C'est faux !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Des compromis doivent être trouvés, au service de l'intérêt général. On peut élaborer des PLU sectoriels.

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Bien sûr.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - La Fédération des maires ruraux a salué le compromis proposé par M. Bérit-Débat. Nous le soutenons et ferons en sorte qu'il soit retenu par l'Assemblée nationale. (Applaudissements à gauche)

Notre politique n'est hélas pas responsable du déficit de la construction, (protestations à droite) même s'il nous faudra mettre les bouchées doubles. La baisse de la construction en France date d'il y a trois ans... (Vives exclamations contradictoires à droite et à gauche)

M. Claude Bérit-Débat, rapporteur.  - C'est vrai !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous progressons très vite. Les investisseurs privés, quand vous avez arrêté leur perfusion, ont cessé leur engagement. Cela s'appelle du stop and go. Vous avez fait le stop, nous disons go et le faisons. (Exclamations à droite)

Nous approuvons la régulation. La comparaison avec le prix du pain est une caricature. Nous fixons deux bornes, comme en Allemagne - vous vantez toujours l'exemple allemand ! (On approuve sur plusieurs bancs socialistes) M. Sarkozy lui-même voulait que l'on puisse saisir les tribunaux si son loyer était trop supérieur au loyer médian ! (Exclamations)

Il s'agit bien d'adapter les loyers aux capacités contributives des Français dans la durée. Le marché n'est pas efficace. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Nous n'attaquons pas les petits propriétaires. (On le conteste à droite) Celui qui fait un placement de bon père de famille doit être distingué de celui qui spécule. (On le confirme à gauche)

Les investisseurs doivent voir leur rendement garanti, sans qu'il soit possible in fine de vendre à la découpe. L'incitation créée par le général de Gaulle a vécu, à cause de l'Europe... (Exclamations)

Sur la GUL, vous nous opposez les mêmes arguments que lors de la création de la sécurité sociale. (Protestations à droite)

M. François Grosdidier.  - C'est le général de Gaulle qui l'a créée.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Nous n'étions pas parlementaires en 1945 !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - « Ils iront tout le temps chez le médecin... » entendait-on à l'époque. Mutualiser les risques, ce n'est pas donner un blanc-seing aux mauvais payeurs, et c'est pourquoi nous soutiendrons la subrogation du Trésor public. On sait que les petits propriétaires hésitent à recourir au tribunal.

En cas d'impayés, il faut très vite réagir, actionner les fonds sociaux pour éviter tout dérapage.

MM. Claude Dilain, rapporteur, et Joël Labbé.  - Très bien !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Grâce à vous, madame la ministre, les impayés ne feront plus perdre les APL.

C'est une loi de mobilisation générale, pour traduire l'idée républicaine dans la vie quotidienne des Français. (Vifs applaudissements à gauche)

M. Joël Labbé .  - J'approuve tout ce que vient de dire Mme Lienemann à propos du logement. J'éviterai les sigles, incompréhensibles pour les Français. Si l'Alur peut avoir quelque allure, la GUL n'en a guère... Prenons garde à notre langage, si nous voulons être compris et entendus par les Français.

Je salue la méthode du Gouvernement ! Il a entendu tous les acteurs pour aboutir à ce texte vaste et cohérent, qui s'attaque à l'ensemble des problèmes du logement.

L'encadrement des loyers et la garantie universelle des loyers nous aideront, comme vous dites joliment, madame la ministre, à « faire France ensemble ». La solidarité est vitale, car la crise du logement s'aggrave : plus de 3 millions de mal-logés, des centaines de milliers de personnes sans logement.

La loi Dalo n'est guère applicable. Beaucoup en sont structurellement exclus.

À côté de l'habitat privé ou public hérités du XIXe siècle, des formules telles que la location-accession ou l'habitat alternatif ou participatif existent.

Délibérément, ces habitants choisissent un mode de logement conforme au principe de « sobriété heureuse » chère à Pierre Rabhi. Leur reconnaissance n'allait pas de soi. En Europe du Nord, des centaines de milliers sont concernés ; douze logements de ce genre devraient voir le jour dans ma commune - non sans difficulté. Heureusement, madame la ministre, votre projet de loi est là et facilitera les choses.

Ce texte fixe des objectifs chiffrés pour lutter contre la consommation de terres agricoles. Il devra s'articuler avec la loi d'avenir agricole. (M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis, confirme) D'où mon amendement n°481 qui ouvre la possibilité d'élaborer un projet agricole et alimentaire territorial dans le cadre du Scot. Nous sommes au coeur du sujet. L'alimentation n'est-elle pas un besoin primordial ? Au fil du temps, l'agriculture s'est isolée malgré elle de son territoire, au point d'en mourir : l'INVS a montré que les paysans étaient la catégorie professionnelle où le suicide est le plus fréquent. Comment admettre un système économique qui broie des vies paysannes ? Il faut réhabiliter le noble métier de paysan. Les citoyens réclament une meilleure connexion entre agriculture locale et alimentation, comme en témoigne le développement des circuits courts. Chez moi, ce projet existe, et si tout le monde est autour de la table, on peut avancer. La terre doit retrouver sa vocation nourricière, dont elle ne dévoie que depuis un demi-siècle.

Les Parcs naturels régionaux (PNR) sont des territoires riches mais fragiles. Ils démontrent la possibilité d'un projet de territoire exigeant. J'en sais quelque chose pour avoir porté le projet du Golfe du Morbihan. Leurs chartes devront garder toute leur force.

De l'ambition, il en faut pour changer les choses. Arrivant bientôt au terme de mon mandat de maire, j'étais d'abord très réservé sur le transfert des PLU aux intercommunalités. Mais la trop grande proximité, les groupes de pression...

M. Pierre-Yves Collombat.  - Il n'y en a pas dans les intercommunalités ? Pas de promoteurs ?

M. Joël Labbé.  - ... sont autant d'écueils. Les élus locaux seraient associés aux PLUI. Cependant, je comprends les réserves de beaucoup de nos collègues et le compromis de la commission me convient : ce sera un grand pas en avant.

M. Jean-Luc Fichet, rapporteur pour avis.  - Bravo !

M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis.  - Très bien !

M. Joël Labbé.  - J'ai toujours revendiqué ma propre liberté de pensée. (« Très bien ! » à droite) Au nom de la justice, de la cohésion, de la transition économique, écologique et sociale, nous voterons ce texte et nous serons des partenaires constructifs. Je défends avec force l'amendement - utopique ? - sur le projet agricole et alimentaire territorial, en espérant que cette fois, nous grillerons la politesse à tout le monde et qu'il sera adopté ! (Sourires et applaudissements à gauche)

Mme Élisabeth Lamure .  - Pour combattre l'étalement urbain, vous voulez renforcer les documents d'urbanisme. La solution réside dans une politique d'aménagement du territoire équilibrée. Faute d'autoriser un peu de construction à l'abord des villages, on continuera d'encourager l'exode rural.

Vous vous contentez de mesures administratives, d'imposer l'élaboration des documents d'urbanisme à une plus grande échelle, et de renforcer le contrôle de l'État. Une fois de plus, vous choisissez l'affrontement avec les élus locaux.

M. Roland Courteau.  - Allons !

Mme Élisabeth Lamure.  - Le maire deviendra simple spectateur des évolutions de son territoire.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - N'exagérez pas !

Mme Élisabeth Lamure.  - Le transfert obligatoire du PLU aux intercommunalités a suscité une levée de boucliers. Je n'y suis pas hostile par principe, mais c'est un signe de défiance à l'égard des maires, dont il faut respecter le choix. Les élections sénatoriales approchent, vous avez reculé en commission. (Protestations à gauche) Ainsi, les intercommunalités devront attendre trois ans pour savoir si, oui ou non, elles seront compétentes...

De même, sur les Scot, vous ignorez les particularismes locaux.

La mise à disposition d'ingénierie d'État pour l'instruction des autorisations d'urbanisme est remise en cause pour les communes situées dans une intercommunalité de plus de 10 000 habitants. Ce désengagement de l'État, tant dénoncé naguère, vous l'appliquez aujourd'hui sans état d'âme.

Le projet de loi, par son article 73, autorise à changer l'usage d'un bâtiment agricole d'intérêt patrimonial... à condition qu'il reste un bâtiment agricole. C'est incompréhensible.

L'article 65 prévoit de transformer en zones naturelles les zones à urbaniser qui n'auraient pas été construites au bout de neuf ans. Dans le contexte financier actuel, il aurait été préférable de poser tous les six ans la question de l'opportunité de réviser le PLU.

Le groupe UMP n'est pas opposé à la lutte contre l'artificialisation des sols mais vous y apportez une réponse technocratique et abstraite, déconnectée de la vie des petites collectivités où le document d'urbanisme à petite échelle est le moyen de marquer la singularité du territoire.

Encore une fois, les collectivités paieront le prix de votre surdité. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Valérie Létard .  - (M. Daniel Dubois applaudit) Après le projet de loi sur la libération du foncier public, voici le deuxième étage de la fusée. Ce projet de loi est ambitieux, c'est un texte fleuve. La révision constitutionnelle de 2008 a voulu faire de l'examen en commission une phase essentielle, mais la procédure est dévoyée, les groupes politiques font valoir leur positionnement et l'on examine des centaines d'amendements sans débat. J'avais essuyé les plâtres, comme secrétaire d'État, lors de la présentation de la loi Hôpital patients santé et territoires. Cette procédure n'est pas adaptée aux textes très longs. Mieux aurait valu créer une commission spéciale. Visiblement, vous n'apprenez pas des erreurs de vos prédécesseurs. Il faut vraiment s'interroger sur la programmation de notre ordre du jour...

M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis.  - Eh oui !

M. Gérard Longuet.  - Qui trop embrasse mal étreint.

Mme Valérie Létard.  - Le chapitre 5 du titre premier est particulièrement difficile. Les articles 14 et 21 se télescopent avec la réforme prochaine du droit d'asile, sujet d'actualité brûlante, alors même que la concertation se poursuit. N'eût-il pas mieux valu attendre qu'elle aboutisse ? Où est la cohérence ? De même sur l'urbanisme commercial.

Sur le titre premier, il faut trouver le juste équilibre entre les intérêts des propriétaires, des locataires et des professionnels. Je proposerai quelques assouplissements : la permission donnée aux professionnels de facturer la recherche d'un logement pour un locataire, si elle est fructueuse ; et, aux syndics, de ne pas créer un compte bancaire séparé du syndicat des copropriétaires, car cette obligation coûterait cher.

Les premières garanties des loyers étaient inefficaces, car non universelles. Nous proposerons une assurance obligatoire, une autorité indépendante fixant les curseurs, et un fonds de garantie, prenant en charge la sinistralité. L'État ne sera pas le garant ultime. Le système pourrait se mettre en place immédiatement : pour les jeunes et les chômeurs, il y a urgence.

Une expérimentation associant les acteurs de terrain est nécessaire au préalable.

Je suis favorable au PLUI, car convaincue que cette mutualisation s'imposera à terme. Mais la démarche doit être de co-construction. (M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis, approuve) Je suis prête à me ranger à la position de la commission, et suppose que le Gouvernement s'y tiendra.

Enfin, je me félicite de la réforme du droit de préemption, inspirée par la proposition de loi de notre collègue Maurey, adoptée au Sénat en 2011.

Espérons que ce projet de loi redonnera du dynamisme au secteur, et que le Gouvernement saura entendre le Sénat. Nous nous déterminerons en fonction des avancées obtenues. (Applaudissements sur les bancs socialistes et UDI-UC)

M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis.  - Remarquable !

M. Jean-Jacques Mirassou .  - Merci aux rapporteurs, qui ont fourni un effort conséquent pour que ce projet réponde aux besoins des citoyens et des territoires.

Merci à Mme la ministre de sa persévérance et de son écoute. Le texte de la commission, satisfaisant, peut sans doute être encore enrichi.

Il vient compléter deux lois déjà votées pour répondre à la crise du logement et s'articule autour de trois principes : protéger, réguler, innover.

La GUL servira les intérêts des locataires comme des propriétaires. De même, je salue la réforme du droit de la copropriété. On connaît le fléau des marchands de sommeil, qui logent des gens en situation précaire dans des conditions indignes. Et régulièrement des drames se produisent. En septembre 2012, un incendie dans un immeuble insalubre a fait deux morts en Seine-Saint-Denis.

M. Roland Courteau.  - Scandaleux !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Un propriétaire payant l'ISF louait des logements insalubres...

M. Claude Bérit-Débat, rapporteur.  - C'est scandaleux !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - ... et il est passé au tribunal aujourd'hui : le procureur a requis deux ans de prison avec sursis.

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Ce n'est pas assez.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Cela ne peut durer.

Le désormais fameux article 63 a déchaîné l'hostilité des maires ruraux, qui y ont vu une atteinte au principe de libre administration.

M. Bruno Sido.  - À raison !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Le transfert doit être un choix délibéré d'une commune, (nombreux applaudissements sur les bancs socialistes) même si nul ne conteste l'utilité du PLUI. Le contexte invite les maires à la vigilance.

L'amendement du rapporteur nous paraît satisfaisant. Madame Lamure, ne vous drapez pas dans la toge de la vertu, nous ne sommes pas seuls à nous préoccuper des sénatoriales ! (Rires et approbations sur les bancs socialistes) Grâce au rapporteur, les maires garderont leur liberté. C'est encore une fois la preuve de la plus-value apportée par le Sénat. (M. Claude Bérit-Débat, rapporteur, applaudit)

En l'état, ce projet de loi conforte les maires. Plus largement, il répond à une stratégie mûrement réfléchie. Nous vous soutiendrons, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Pierre-Yves Collombat .  - La solution à la crise du logement réside plutôt dans la construction de logements que dans le perfectionnement de la réglementation. Le Conseil d'État le dit, dans le langage plus diplomatique d'un rapport de 2009 : l'État a abandonné trop vite ses moyens de peser sur le coût des loyers et l'état du parc, n'ayant pas suffisamment songé à la gouvernance d'un marché dérégulé et décentralisé.

Renonçant donc à changer l'ordre des choses, on change la réglementation... Ce projet de loi aborde des sujets difficiles. Si nous pouvons débattre paisiblement, nous le devons aux rapporteurs, qui ont ôté le détonateur posé à l'article 63 par les amis du très chic « club PLUI », présidé par la ministre de l'aménagement et de l'égalité des territoires... Le peuple a parfois du mal à comprendre les avant-gardes, il faut dire que c'est lui qui paie les pots cassés.

On ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif, selon l'adage. À 15 h 59 il y avait déjà plus de 4 600 pétitions signées par des maires ruraux. L'élu rural, cet élu rustique, ressemble assez à un âne, animal modeste et utile aux pauvres, il est vrai...

Si l'intercommunalité était un lieu de consensus, où les pressions étaient absentes, comment expliquer que la plupart des EPCI soient présidés par des élus des communes-centres ? Que les plus acharnés à récupérer la compétence urbanisme sont les moins disposés à lutter pour la prévention des inondations ? C'est plus de pouvoir dans un cas, moins de problèmes dans l'autre.

Moins de lotissements, plus de yourtes : tel est l'esprit de ce projet de loi. Plus besoin de regarder TV5, il suffira d'ouvrir la fenêtre...

M. Joël Labbé.  - Un peu de respect pour les différences !

M. Pierre-Yves Collombat.  - La mise sous tutelle des communes des zones non denses ne fera qu'étendre la tache d'huile de l'étalement urbain.

Rien de durable ne se fera contre les élus locaux. Un passage en force serait une victoire à la Pyrrhus. J'ai cru comprendre que ce n'était pas votre intention, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, de l'UDI-UC et sur quelques bancs de l'UMP)

M. Jean-Claude Lenoir .  - Le prix des loyers... Gouvernement et majorité confondent les conséquences et les causes. Pourquoi les loyers sont-ils élevés ? Parce qu'il n'y a pas assez de logements proposés à ceux qui cherchent à se loger.

M. Marc Daunis.  - M. de La Palice n'aurait pas mieux dit !

M. Jean-Claude Lenoir.  - La réponse, c'est la construction ! On laisse entendre ici et là qu'il y aurait eu dans le passé un déficit de construction. Je vais vous citer des auteurs que vous ne pouvez pas récuser et d'abord M. Repentin...

M. Éric Doligé.  - Une référence...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Il disait en 2012, il est vrai avant les élections présidentielles, que 421 000 logements avaient été construits en 2011, et 368 000 en moyenne depuis 1997. (On s'amuse à droite) De 1997 à 2002, qui était au pouvoir ? On passe un peu vite sur cette période. Autre auteur, le rapporteur Claude Bérit-Débat, qui écrivait en septembre 2012, que le nombre de logements construits depuis 1997 se situait à seulement 75 % des besoins maximaux et relevait que le rythme de financement du logement social s'était accéléré de 2002 à 2012. Ce rapport 167 comporte des graphiques fort instructifs... Comparez les statistiques de construction de 2000, 40 000 logements sociaux, à 2010, 130 000. Les moyennes sont trompeuses. Elles camouflent les cinq années où vous étiez au pouvoir et n'avez pas assez construit.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Vous, vous avez démoli 40 000 logements !

M. Jean-Claude Lenoir.  - La GUL... Dispositif parfaitement inutile au regard du problème posé. Tous les propriétaires et locataires participeront à une collecte générale au profit de l'infime minorité qui ne paie pas et se croira autorisée à continuer. On imagine même de charger les trésoriers publics du recouvrement. Les élus n'effacent-ils pas les dettes dont le coût de recouvrement dépasse le montant ? Pour faire fonctionner la GUL, vous créez un bidule... avec force emplois à la clé. Cela me rappelle la fameuse proposition de loi de François Brottes...

M. Gérard Longuet.  - Ah !

M. Jean-Claude Lenoir.  - ... qui s'est ensablée au Conseil constitutionnel. (Marques d'ironie à droite)

Sur l'urbanisme, soyons sincères : je suis en train de réaliser un PLUI. L'aménagement de l'espace doit s'appuyer sur un outil. Pour moi, le PLU est le bon. J'en ai convaincu les élus.

M. Bruno Sido.  - Bravo.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Ce que nous n'acceptons pas, c'est que l'on décide ici, à Paris intra-muros que ce soit systématique et obligatoire. (« Très bien ! » à droite) Vous ne rendez pas service, à ceux qui, comme moi, sont convaincus des vertus des PLUI. (Approbation à droite) Je reconnais toutefois l'intérêt de la proposition du rapporteur.

M. Martial Bourquin.  - Merci de le reconnaître.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Mais il y aura une deuxième lecture.

M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis.  - En effet.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Que les responsables du texte de l'Assemblée nationale le corrigent... Rien ne serait pire que de voter ici une disposition qui vous exposerait, chers collègues socialistes, à une humiliation à l'Assemblée nationale... (Protestations sur les bancs socialistes)

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Argument spécieux.

M. Marc Daunis.  - Laisserons-nous les députés faire notre travail ?

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Hypocrisie !

M. Jean-Claude Lenoir.  - La possibilité de construire dans les hameaux et les villages de nos territoires ruraux. Nous avons là un vrai débat. Quoi qu'on en dise, l'administration est très présente et contraignante. Regardons où nous pouvons construire sans compromettre les exploitations agricoles.

Nous sommes à l'écoute des maires ruraux, des maires des villes petites et moyennes et nous partageons leur avis : ce texte ajoute à la complexité au moment où le Gouvernement plaide pour la simplification. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Pierre Jarlier .  - L'urbanisme est déterminant pour la politique du logement, la qualité du cadre de vie, la prise en compte des enjeux du développement durable. Il appartient aux élus d'être à l'initiative de la démarche de planification. Encore faut-il qu'ils disposent des moyens nécessaires et de la capacité à faire. Oui, il faut une nouvelle approche de l'urbanisme pour lutter contre la consommation excessive de terres agricoles et l'étalement urbain. Deux conditions sont indispensables : l'adhésion des élus qui ont en charge le droit des sols et le juste équilibre entre protection et développement des territoires.

Oui, l'approche intercommunale répondra aux enjeux de l'aménagement des espaces urbains, ruraux et périurbains, mais à partir d'un consensus : c'est la position claire de l'AMF. Les nouvelles communautés ou les communautés fusionnées après la promulgation de la loi doivent bénéficier aussi de la souplesse nécessaire.

Nous serons très vigilants sur le contenu du texte au retour de l'Assemblée nationale, en deuxième lecture. Le pire serait que le texte sorte du Sénat sans que la proposition de la commission soit adoptée. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Sur la période de transition, il faut veiller à ce que les communes comprises dans un EPCI qui ne prendra pas la compétence ne subissent pas un gel de leur développement. Les délais vont se cumuler. Il y a là une bombe à retardement qu'il faut désamorcer.

Préservons nos espaces naturels et agricoles mais ne sanctuarisons pas nos territoires ruraux. Il y a une vie dans nos campagnes. La ruralité est riche d'un patrimoine bâti, viabilisé mais souvent inutilisé, qui se prête bien à la réhabilitation et mérite d'être mis en valeur. C'est un moyen de lutter contre l'étalement. Le dynamisme de nos nombreuses communes rurales est en jeu. Il faut plus de souplesse dans le texte.

Je ne peux conclure sans évoquer les difficultés des centres anciens des villes petites et moyennes, qui offrent un potentiel d'accueil très important. Des politiques partenariales et contractualisées sont nécessaires. Je forme le voeu, madame la ministre, que votre projet de loi contribue à la reconquête de ces quartiers.

Le consensus sera indispensable pour développer l'offre de logements... et pour peser sur les choix de l'Assemblée nationale. (Applaudissements au centre ; Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Claude Dilain, rapporteur, applaudissent aussi)

M. Ronan Kerdraon .  - Ce texte majeur tombe à pic, alors que le nombre de mal-logés atteint un niveau insupportable. Il est ambitieux, son exposé des motifs en témoigne. Messieurs les rapporteurs, vous l'avez enrichi. Votre amendement de compromis sur le PLUI ne remet pas en cause son équilibre mais redonne confiance aux maires. Le Sénat est dans son rôle.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Absolument !

M. Ronan Kerdraon.  - Pourvu que ma voix porte jusqu'à l'Assemblée nationale ! (Exclamations à droite)

L'article 12 consacre le rôle et les missions des SIAO, qui deviennent pilotes des dispositifs d'accueil, d'hébergement et d'insertion par le logement. L'article 14 fusionne deux schémas, celui qui en résulte sera élaboré sous la responsabilité du préfet et du président du conseil général. Rappelons-nous de ce qui s'est passé à Clermont-Ferrand en septembre dernier où plusieurs dizaines de personnes, dont beaucoup d'enfants, se sont retrouvées du jour au lendemain à la rue, l'association en charge de leur hébergement ne pouvant plus payer les hôtels - certains en ont malgré tout accueilli une partie. Le rôle du préfet est renforcé à l'article 19. Nous avons en outre clarifié le principe d'inconditionnalité et affirmé à l'article 21 le droit à domiciliation des SDF. Je regrette que l'amendement à l'article 18 sur le bénéfice du bail glissant n'ait pas été adopté en commission des affaires économiques mais je comprends ses réserves.

La GUL est un dispositif utile, elle concerne l'ensemble du parc locatif privé, soit 6,5 millions de logements.

Ce texte mérite tout notre soutien. Il réoriente notre droit pour plusieurs années, en offrant un formidable outil de lutte contre les inégalités sociales et environnementales. Adoptons ce projet de loi avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

M. Philippe Dallier .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Alur... Ce texte porte mal son nom. Vous n'êtes pas la première à nous surprendre ainsi. Christine Boutin n'avait-elle pas baptisé son projet de loi de l'acronyme Molle - Mobilisation pour le logement et lutte contre l'exclusion ?

Les prévisions les plus pessimistes font état d'une division par deux du nombre de mises en chantier de construction de logements en 2014 par rapport à 2011. Avec le resserrement du crédit bancaire et l'imagination fiscale sans limite du Gouvernement, vous avez tous les ingrédients d'une crise qui pourrait s'aggraver et durer.

Entre tenants de l'offre et thuriféraires de la régulation stricte, il faut réaffirmer combien la confiance des acteurs est essentielle. En choisissant la régulation, Gouvernement et majorité prennent un double risque : décevoir les Français auxquels ils ont beaucoup promis, et mettre à mal la filière du bâtiment sans laquelle la croissance ne repartira pas.

Il est vrai qu'on a construit beaucoup, mais pas aux bons endroits et des logements de plus en plus petits, pour le plus grand profit d'investisseurs qui ont profité des niches fiscales - qui les en blâmeraient ? - pour des résultats... mitigés. En Seine-Saint-Denis, on trouve des petites surfaces à 20 ou 25 euros le mètre carré pour des appartements à la limite de la décence. Les loyers exorbitants ont souvent été rendu possibles par la solvabilisation des locataires grâce aux aides personnelles - qui coûtent si cher que le Gouvernement a décidé de les geler...

Pour remédier à la hausse des loyers, vous les encadrez. Il eût été plus efficace de moduler les aides personnelles en fonction de la qualité du logement et du montant du loyer et non pas seulement des seuls revenus des locataires, ce dont profitent certains propriétaires. Il fallait jouer le marché contre le marché, en tarissant la demande solvable qui répond à une offre de logements loués à un prix exorbitant.

De nouvelles dépenses, comme les observatoires locaux des loyers, sont mises à la charge des collectivités locales. Pourquoi ne pas utiliser mieux ce qui existe ?

Le calcul du loyer de référence est lourd d'effets pervers - baisse des loyers des appartements de standing et hausse des autres... Certes, il y a eu des améliorations à l'Assemblée nationale, mais cela en dit long sur les carences des services de l'État. Je ne voudrais pas être à la place des préfets !

Sur la GUL, les gouvernements précédents ont longtemps hésité... J'en sais quelque chose. La GLI et la GRL, entièrement à la charge des assureurs, ne nécessitaient pas de mettre en place une nouvelle structure publique. On aurait pu améliorer ces dispositifs, qui n'ont pas atteint leurs objectifs. Au lieu de cela, vous créez une usine à gaz.

On peut craindre la déresponsabilisation des locataires. Dans bien des domaines on affirme « Je paie, donc j'ai droit ». Attention aux effets que vous ne maîtrisez pas.

Si l'on ajoute à tout cela les inquiétudes que vous suscitez, la possibilité pour les départements de relever les DMTO et les hésitations en matière de taxation des plus-values, le Gouvernement prend le risque sérieux de détourner de l'immobilier les investisseurs dont nous avons tant besoin.

Les dispositions de lutte contre les marchands de sommeil et les copropriétés dégradées sont bonnes. Sur le Grand Paris, je reste sur ma faim...

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Oui.

M. Philippe Dallier.  - On en reparlera... (Applaudissements au centre et à droite)

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Certainement...

M. Marc Daunis .  - Voilà un texte important pour nos concitoyens, nos élus locaux, notre pays. Je m'en tiendrai à l'urbanisme.

Sur l'opposabilité des chartes des PNR à l'égard des Scot et des PLU, je présente un amendement que je suis prêt à rectifier, afin de résoudre les problèmes rencontrés dans notre territoire.

Sur les SEM, nous progressons, grâce au rapporteur ; je suis persuadé que nous arriverons à une bonne solution.

On peut prendre le problème des PLUI dans tous les sens, voyons la réalité : en l'état du droit, il peut être imposé à un tiers des communes représentant 50 % de la population ou à 50 % des communes représentant un tiers de la population... mes collègues de l'UMP ne peuvent ignorer qu'ils ont voté cette disposition...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Elle est très bien !

M. François Grosdidier.  - Pourquoi la changez-vous ?

M. Marc Daunis.  - De plus, la loi de 2010 impose l'intégration de toutes les communes du territoire national dans une intercommunalité. Des communes ont été contraintes à des mariages forcés...

M. Éric Doligé.  - Vous cassez la carte cantonale !

M. Marc Daunis.  - ... d'où la nécessité d'une protection : tel est le sens de la co-construction de ce projet intercommunal qu'est le PLUI qui sinon leur serait imposé. Vous vous arc-boutez sur la défense d'une fausse liberté. Un quart des communes représentant 10 % de la population seraient entendues si l'on suit le rapporteur ; l'Association des maires ruraux de France ne s'y est pas trompée : elle souhaite que cette garantie soit adoptée.

M. Claude Dilain, rapporteur.  - Bravo !

M. Marc Daunis.  - Le propos de M. Dubois est paradoxal. Il ne peut affirmer le coeur sur la main qu'il faut faire confiance aux maires et dénigrer cet amendement comme il l'a fait : qui bloquerait les PLUI, sinon les maires ?

M. le président.  - Il faut conclure !

M. Marc Daunis.  - Retrouvons un peu de sérénité, évitons les postures. Et ne nous en remettons pas à l'Assemblée nationale, sinon, à quoi servirait le Sénat ? Notre vote unanime aiderait la ministre à défendre notre position. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Grosdidier .  - Beaucoup de Français ont du mal à se loger. Dans beaucoup de régions, le logement est en crise. Communes et intercommunalités ont du mal à assouplir un marché trop tendu, corseté par la surréglementation. Or ce projet de loi en rajoute dans la complexité.

Le plus grave c'est l'affaire du PLUI. La coopération intercommunale s'est construite sur une intercommunalité de services, puis sur une intercommunalité de projets, en respectant le principe de subsidiarité. En imposant le PLUI, vous transformez la commune, cellule de base de la République, en simple section administrative réduite à gérer l'état civil. Nous voilà face à une intercommunalité de fusion.

Le débat sur les propositions de la commission Balladur a eu lieu et a été tranché. Nos 36 0000 communes sont un atout. Tant de maires, de conseillers municipaux se dévouent à leurs concitoyens, pour des indemnités dérisoires... La fusion les remplacerait par des fonctionnaires territoriaux éloignés des citoyens. L'ancienne majorité a maintenu les communes et généralisé l'intercommunalité. Le Gouvernement actuel vide insidieusement les communes de leur substance. Vous n'êtes pas la première, madame la ministre, à exhumer ce dossier des tiroirs de la DGUHC. Député, j'ai mené et gagné le combat à l'Assemblée nationale contre un amendement PLUI, avec le soutien de la majorité d'alors et des députés socialistes, unis hier pour pourfendre ce qu'ils adorent aujourd'hui : où est la cohérence ? (Protestations socialistes) Et voilà que l'increvable PLUI ressurgit ! (Mêmes mouvements)

On nous dit qu'il faut mieux répartir le logement social et lutter contre l'artificialisation des terres agricoles. Mais la répartition du logement social dépend de l'adhésion des communes, du coût du foncier, des quotas SRU, du PLH intercommunal et territorialisé par commune - qui fonctionne bien. La seule chose qui manque, c'est le financement de l'État. La lutte contre l'artificialisation des terres agricoles, le logement social sont de fallacieux prétextes. Sauf à imposer l'intercommunalité à l'échelle du Scot, l'intercommunalité n'est pas la bonne échelle pour fabriquer le PLU, qui est un travail de dentelle. L'EPCI est trop petit pour limiter l'artificialisation des terres agricoles et trop grand pour apprécier la subtilité de la dentelle. Le PLUI distancié...

M. Marc Daunis.  - Brechtien ?

M. François Grosdidier.  - ... serait un déni de démocratie.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - Vous l'avez créé !

M. Marc Daunis.  - Un peu de cohérence !

M. François Grosdidier.  - Autant fusionner les communes !

M. Marc Daunis.  - C'est Apocalypse Now !

M. François Grosdidier.  - Ceux qui rendent des comptes à nos concitoyens n'auront plus le pouvoir et ceux qui auront le pouvoir ne rendront plus de comptes aux citoyens.

M. Marc Daunis.  - Appelons M. Masson !

M. François Grosdidier.  - Les communes sont la cellule de base de la République. À travers la commune, c'est la République elle-même qui est sapée, au moment où la confiance s'effondre. Madame le bourreau, je ne veux pas de votre sursis de trois ans. Vive la commune, préservons-la ! (Applaudissements à droite ; exclamations socialistes)

M. Félix Desplan .  - Des immeubles dégradés, des sous-sols insalubres, des habitats de fortune, la violence : telle est la réalité antillaise que bien des Français ont découverte la semaine dernière à la faveur d'un voyage ministériel. Il faudrait construire 2 500 à 3 200 logements par an d'ici 2040 pour rattraper notre retard. En Guadeloupe, 3 300 ménages n'ont pas l'électricité, 4 700 n'ont ni salle de bains ni douche. Beaucoup de constructions réalisées hors de tout contrôle ne résisteraient pas aux séismes ni aux cyclones. L'habitat ultramarin nécessite un effort particulier.

Chez les Guadeloupéens, le désir d'accession à la propriété reste très vif pour des raisons historiques. Le secteur libre et intermédiaire y est atone. On assiste à une forte hausse du nombre de ménages et à une baisse de la taille des logements. Dans le même temps, les prix de l'immobilier sont élevés. Aux Antilles, comme à La Réunion, le foncier est rare ; des normes inadaptées aux tropiques accroissent les coûts.

Votre projet de loi, madame la ministre, est une chance pour lutter contre l'habitat indigne et les maux qui gangrènent nos territoires. Nous proposons de compléter les ajouts adoptés à l'Assemblée nationale à l'initiative des députés ultramarins.

Je comprends le souci de moderniser les documents d'urbanisme. En Guadeloupe, les zones d'habitats et d'activités et la répartition des populations sont très hétérogènes. Pour mettre en place un PLUI, le consensus est plus efficace que la contrainte. Nous, élus ultramarins, devons relever avant tout le défi d'offrir à nos concitoyens des logements décents alors que nos territoires connaissent plus que d'autres la vie chère, le chômage ou la destruction familiale. La question des moyens financiers est donc cruciale. Défiscalisation et subventions d'État sont indispensables à l'équilibre des opérations de logement social. Je me réjouis des dispositions prises dans le budget 2014 pour la LBU et la préservation des incitations fiscales.

Je soutiendrai ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques.  - La commission des affaires économiques se réunit jusqu'à 20 h 30 pour examiner les amendements.

La séance est suspendue à 19 h 30.

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.