Loi de finances pour 2014 (Suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances pour 2014.

Discussion générale (Suite)

M. Richard Yung .  - Toute une stratégie de redressement des finances publiques est à l'oeuvre dans ce projet. Après le collectif de juillet, le déficit a diminué l'an dernier ; un mouvement qui s'amplifiera en 2014.

L'effort de maîtrise du déficit est de 18 milliards, je le dis car j'ai entendu des contrevérités tout à l'heure. La Commission européenne l'a elle-même reconnu. Cet effort porte à 80 % sur des économies de dépenses, ce qui est inédit. Bref, le sérieux budgétaire est au rendez-vous, le Haut Conseil des finances publiques l'a souligné. Le commissaire Olli Rehn et le président Barroso le reconnaissent. Le projet de budget est « tout à fait digne de considération » a dit Bruxelles. Alors, oui, il y a eu des articles dans le Wall Street Journal et The Economist : ces journaux ont le French hashing pour fonds de commerce. Quant aux agences de notation, dont Mme Des Esgaulx parlait avec des trémolos dans la voix, leur avis ne vaut pas grand-chose : nous avons dû les mettre sous tutelle parce qu'elles sont juges et parties. Gardons plutôt à l'esprit l'avis de Bruxelles et du Haut Conseil. Cette dynamique de redressement ne doit pas en casser une autre, celle de la croissance. Le sérieux ne doit pas dériver en austérité dont M. Blanchard, économiste en chef du FMI, a montré l'effet récessif. La relance sera européenne ou ne sera pas, M. Germain a raison.

Je vois des raisons d'espérer.

L'Allemagne, lentement mais sûrement, change de pied. Et une politique de soutien à la croissance se fait jour en Europe, grâce à l'initiative franco-italienne. Bref, il y a des raisons d'espérer en Europe.

Notre avenir passe par les programmes d'investissements d'avenir. Les crédits du premier programme de 2010, seront bientôt consommés. Ceux du deuxième soutiendront l'innovation, la recherche et accéléreront la transition écologique et énergétique.

À l'Assemblée nationale certains députés, de mauvaise foi ?, souhaitaient intégrer ces 12 milliards dans le déficit 2014. Sauf que ces dépenses ont pour une grande partie vocation à créer des actifs.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Mais financés par de la dette !

M. Richard Yung.  - Le Gouvernement répondra. Reste que ces 12 milliards seront versés aux opérateurs de l'État et ne pèseront pas sur la dette : convertis en partie en actifs non consomptibles, ils seront stockés sur un compte au Trésor. Le reste est constitué de prêts et d'avances remboursables. Les modes de financements sont intelligents et variés. Les intérêts de l'État sont préservés. Je salue cette excellente initiative du Gouvernement pour faire de la France un pays volontariste et visionnaire. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Edmond Hervé .  - Monsieur le ministre, je préfère votre sincérité courageuse à certaines exigences passionnément oublieuses. Le Premier ministre a récemment fait l'annonce d'une remise à plat de notre système fiscal. C'est une excellente initiative, au moment où une partie de l'opinion verse dans l'irrationnel et le contradictoire. Notre système doit gagner en justice, en efficacité et en simplicité. Le temps fiscal, en France, est long. En 1990, j'avais voté la création d'une taxe départementale, réforme mort-née. Je plaide aujourd'hui pour la fusion entre l'impôt sur le revenu et la CSG.

Michel Bouvier, expert en droit fiscal, déplorait récemment le désarroi fiscal que rapportent toutes les enquêtes. Les jeunes, en particulier, consentent faiblement à l'impôt et légitiment l'exil fiscal. Ces personnes, simultanément, réclament davantage de services publics et de protection sociale. Les élus quant à eux réclament plus de subventions. On ne peut réduire, toutefois, le débat fiscal au « trop d'impôts !» libéral. Parlons justice fiscale et service des populations.

En 1990, la CSG a été adoptée dans des conditions particulières ; il s'en est fallu de peu qu'une motion de censure l'emporte. Son assiette s'est depuis élargie, et ses taux ont été multipliés. L'impôt sur le revenu, lui, n'est plus à sa place et de nombreuses mesures en ont réduit le poids. La fusion des deux fait son chemin. Nous débattrons sans doute du dilemme entre progressivité et proportionnalité.

J'en viens au pacte de confiance et de responsabilité, lancé en mars et dont un relevé détaillé a été fait en juillet 2013. Au Congrès des maires, le Premier ministre a insisté sur l'effort de péréquation. On n'aboutira pas sans révision des valeurs locatives. Des engagements forts ont été pris pour limiter l'inflation normative et préserver l'investissement des collectivités.

Je suis un fervent partisan des relations contractuelles entre les différents niveaux de collectivités. Laurent Davezies, dans un récent article du Monde, soulignait que les six premières métropoles françaises étaient des locomotives, tirant de nombreux wagons de notre territoire grâce à leur production et leurs transferts.

Voilà les éléments objectifs qui doivent nous réunir car l'important en politique est de rendre visible, ce qui est vrai ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Serge Dassault .  - Malgré les multiples critiques de la Cour des comptes, de Bruxelles, de l'OCDE et la dégradation de notre note par Standard & Poor's, vous ne voulez rien entendre. Vous êtes toujours aussi serein et confiant dans une politique qui manifestement ne convient pas : le chômage progresse, la croissance ne redémarre pas. Le CICE et l'emploi aidé n'y changeront rien. Vous continuez de dénoncer l'héritage...

Mme Michèle André.  - Il pèse !

M. Serge Dassault.  - ... en refusant de voir la situation que vous créez. En économie, ce qui compte, ce n'est pas l'idéologie, la croyance, c'est l'efficacité.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très juste.

M. Serge Dassault.  - Tout le monde peut se tromper, prendre une mauvaise voie, il n'est pas trop tard pour changer. Quoique... Les manifestations de rue se multiplient, les jeunes diplômés s'en vont à l'étranger. Il ne restera bientôt plus que des fonctionnaires, des chômeurs et des retraités...(Sourires)

M. Serge Dassault.  - Laissez-moi vous donner des pistes prouvant « qu'une bonne politique n'est ni de gauche ni de droite, c'est celle qui marche », comme l'a dit Tony Blair.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - « Peu importe que le chat soit noir ou gris, pourvu qu'il attrape des souris », disait Deng Xiaoping !

M. Serge Dassault.  - Encouragez les entrepreneurs, moteurs de l'emploi et de la croissance, pourvu qu'ils puissent vendre leurs produits et ne pas être accablés de charges. Supprimez des impôts, réduisez les prélèvements obligatoires, plutôt que les augmenter sans arrêt, finissez-en avec le financement de l'État providence et les emplois aidés dans le secteur non marchand. Ce n'est pas à l'État de payer l'impôt à la place des contribuables, ce en quoi consistent les exonérations de charges liées aux 35 heures, sur lesquelles il faut revenir, car elles creusent le déficit budgétaire et dégradent les comptes des entreprises. Supprimez l'impôt sur les patrimoines, créé par François Mitterrand, mais que ni Jacques Chirac ni Nicolas Sarkozy n'ont aboli.

On pourrait faire comme la Russie ex-communiste : instaurer une flat tax sur tous les revenus à un taux unique de 13 %.

M. Albéric de Montgolfier.  - Génial ! (M. Philippe Marini, président de la commission des finances, le confirme)

M. Serge Dassault.  - Il faut absolument baisser le coût du travail, j'ai déposé une proposition de loi qui transfère les cotisations maladie et famille des salaires sur les frais généraux des entreprises, ce qui ne coûtera rien à l'État, supprimera le déficit de la sécurité sociale et allègera de 55 % les charges sur les salaires. Il faut accroître en outre la flexibilité du travail, créer des contrats de projets, et relever les seuils sociaux de 10 à 15 pour les artisans et de 50 à 75 pour les PME : les emplois créés seront bien plus nombreux que n'importe quels contrats d'avenir, immédiats et ne coûteront rien.

Il faut oser dire la vérité aux Français. Je vais vous donner la clé de la réussite : dire, comme Deng Xiaoping, « Enrichissez-vous » !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très Bien !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ce n'est pas Deng, c'est Guizot !

M. Serge Dassault.  - La richesse seule crée la richesse, supprimez- la et vous n'aurez que de la pauvreté. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Michel Berson .  - Globalement, la priorité donnée à la recherche a préservé le secteur des nécessaires régulations budgétaires. Avec des crédits à 14 milliards d'euros, ce budget est sanctuarisé. En revanche, les crédits fléchés vers le financement par projet alimentent les inquiétudes de la communauté scientifique.

La subvention effectivement versée à l'Agence nationale de la recherche (ANR) inscrite en loi de finances initiale pour 2012 était de 760 millions d'euros en 2012, 687 millions en 2013. Mais seuls 593 millions d'euros furent effectivement versés, après déduction de la réserve de précaution ; le repli sera encore plus marqué après le décret d'avance qui amputera les ressources de l'agence de 155 millions supplémentaires.

Le mouvement se poursuit avec une dotation effective de 564 millions dans le budget pour 2014. Pas moins de 30 % de baisse en deux ans, on ne peut que le déplorer : comment l'agence fera-t-elle face à ses engagements pluriannuels sans transfert des crédits sur projets vers les crédits récurrents ?

Notre agence enregistre de beaux taux de succès, même s'ils sont inférieurs à ceux des autres agences européennes et des programmes européens. Cette baisse, qui découragera les équipes, frappera les programmes non thématiques, dits blancs, qui représentent 30 % des recherches en laboratoire. La priorité donnée aux crédits récurrents est un choix que la France fait, seule, en Europe. Il serait souhaitable, pour les années qui viennent, de rétablir l'indicateur 2.1 du programme 172, supprimé du programme annuel de performance 2013, et qui mesure précisément l'évolution de la part respective des financements sur projets et des financements récurrents dans les programmes de recherches. Certes, il y a les investissements d'avenir ; ils représentent cependant seulement 15 % des crédits publics alloués à la recherche.

Il y a de quoi s'étonner de cette réduction des crédits de l'ANR et de s'interroger sur sa place dans le financement de la recherche. La loi de 2005 qui la créait prévoyait la conclusion d'une convention d'objectifs et de moyens ; il est temps d'y venir et de clarifier les choses. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué .  - Merci à tous les orateurs de leur contribution à ce débat. Aux sénatrices et sénateurs de la majorité, j'apprécie votre soutien. Aux sénatrices et sénateurs de l'opposition, je m'attendais à vos propos : ils étaient parfaitement conformes à ceux que j'ai entendus à l'Assemblée nationale.

Je suis prêt à ne pas invoquer l'héritage, comme me l'a demandé M. Arthuis, à condition qu'on n'occulte pas le fait que nous sommes arrivés au pouvoir il y a dix-huit mois. On ne peut pas nous reprocher ce que d'autres n'ont pas fait en dix ans.

Sur la dépense publique, voilà que l'opposition considère qu'il faudrait la baisser de manière drastique. Elle a augmenté de 170 milliards entre 2007 et 2012, soit de 1,7 %, après une augmentation de 2,3 % entre 2002 et 2007. Elle ne progresse plus que de 0,4 % : nous avons divisé son rythme de progression par cinq en dix-huit mois ! Que n'avez-vous donc fait ?

M. Francis Delattre.  - Nous n'étions pas tous ministres !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Donneur de leçons ! Vous n'acceptez pas que l'opposition s'exprime !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est grandement souhaitable pour la démocratie. Rien ne me chagrinerait plus que de susciter votre irritation, monsieur Marini ! Souffrez néanmoins que je rappelle les faits et les chiffres.

L'évolution tendancielle de la baisse ? M. Baroin et Mme Pécresse s'y référaient déjà, la Cour des comptes et la Commission européenne la reconnaissent comme l'alpha et l'oméga de la bonne gestion. Nos 15 milliards d'économie, en un an seulement, soit 5 milliards de plus que les 10 milliards qu'ils projetaient d'atteindre en trois ans, ne seraient pas réellement une économie ?

Parlons du déficit : quand il passe de 5,3 % à 4,8 %, puis à 4,1 %, avec un objectif de 3,6 % pour l'année suivante, s'envole-t-il ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il diminue moins que prévu !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est exact. Il faut toutefois tenir compte de l'impact de la moindre croissance. D'autant que le déficit structurel s'est dégradé de deux points de PIB sous les gouvernements que vous souteniez. Le Gouvernement ne se satisfait évidemment pas de ces résultats. Nous devons faire mieux et plus. Notre effort structurel sera de 1,3 % en 2012, de 1,7 % en 2013 et de 1 % en 2014.

M. Francis Delattre.  - L'arithmétique est claire !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Autre argument, nous réaliserions des économies seulement sur le dos des collectivités territoriales. Et les économies sur les opérateurs de l'État, avec 2 500 postes supprimés depuis le début du quinquennat, alors qu'ils avaient augmenté de 15 % sous le précédent, les interventions de l'État et la rationalisation de l'action publique. Nous demandons un effort important aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d'euros, c'est exact. Votre programme se chiffrait à 10 milliards d'euros...

M. Albéric de Montgolfier.  - 200 millions d'euros !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - 200 millions, c'est ce que vous avez fait, 10 milliards, ce que vous vouliez faire. 

Nous avons veillé à répartir cet effort d'1,5 milliard d'euros selon les capacités de chacun : 56 % pour les communes, 37 % pour les départements et le reste pour les régions. À la demande des départements, nous avons transféré 827 millions d'euros de frais de gestion aux départements pour qu'ils fassent face à leurs dépenses de solidarité et gardent leur capacité d'investissement.

L'économie en dépenses de fonctionnement n'est pas néfaste, monsieur Bocquet. Elle n'érode pas leur capacité d'investissement, bien au contraire. Je le sais pour avoir été maire, réalisé une fusion qui a entraîné 20 % d'économies sur le fonctionnement, pour investir comme jamais auparavant dans des équipements publics. Toute dépense publique n'est pas bonne en soi, quelle que soit sa nature...

M. Aymeri de Montesquiou.  - Très Bien !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - La mauvaise dépense, qui peut compromettre notre modèle social, ne doit pas chasser la bonne, voilà ce qui doit guider notre action.

J'en viens à l'évolution des prélèvements obligatoires. Aux théoriciens du matraquage fiscal, qui furent virtuoses en maniement de la matraque, je rappelle que nous avons subi 20 milliards d'euros supplémentaires en 2011, 21 milliards en 2012. Cette année, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 0,5 %. Dans le budget que je vous présente, ils n'augmentent plus que de 0,15 % en 2013.

M. Albéric de Montgolfier.  - Cela se cumule !

M. Francis Delattre.  - En effet !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Ce n'est pas un argument.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Les Français ne le perçoivent pas comme ça, car l'affaire est complexe, comprenez-les !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - En réalité, si l'on exclut la lutte contre la fraude fiscale, pour deux milliards d'euros, les prélèvements supplémentaires n'augmentent que de 0,05 %, soit un milliard.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est parfait, donc.

M. Francis Delattre.  - Tout va bien !

M. Albéric de Montgolfier.  - Et la fiscalisation des heures supplémentaires ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Je conclurai par la compétitivité.

M. Francis Delattre.  - En la matière, il y a tout à faire !

M. Jean-Pierre Caffet. - Quel aveu !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Précisément ! En dix ans, il ne s'est rien passé. Nous allégeons les charges des entreprises de 20 milliards à travers le CICE. Cela aurait coûté beaucoup plus avec la TVA sociale.

M. Francis Delattre.  - Quels sont les résultats ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Tout va bien, vous dis-je !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - J'ai répondu à plusieurs reprises à des questions au Gouvernement, vous connaissez parfaitement les chiffres.

M. Francis Delattre.  - Lesquels ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Les prélèvements sur les entreprises par-delà le CICE baisseront de 2 milliards d'euros par rapport à l'an passé. Les entreprises le reconnaissent. A-t-on fait mieux sous le précédent quinquennat ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - La taxe professionnelle ! 7 milliards d'euros !

M. Albéric de Montgolfier.  - Les heures supplémentaires !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Et ce n'est pas fini : réforme des jeunes entreprises innovantes, de l'assurance vie, des plus-values mobilières, programme d'investissements d'avenir de 12 milliards d'euros, qui contribuent aux fonds propres des entreprises...

Quant au pouvoir d'achat des ménages, la hausse du RSA de 2 % au-delà du smic, la décote renforcée, le dégel du barème, les 150 000 à 200 000 jeunes en contrats de génération et contrats d'avenir, les tarifs sociaux de l'énergie pour 400 millions d'euros, l'élargissement de la CMU qui bénéficiera à 750 000 personnes, les 55 000 boursiers supplémentaires... Qui peut dire que ce ne sont pas des mesures de pouvoir d'achat ?

M. Francis Delattre.  - Et les 9 millions de salariés qui voient leurs heures supplémentaires fiscalisées ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - J'espère que vous serez nombreux à voter ce budget ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Albéric de Montgolfier.  - Vous allez être déçu !

La discussion générale est close.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je demande une brève suspension de séance pour réunir la commission.

La séance, suspendue à 19 h 40, reprend à 19 h 50.

Renvoi en commission

Mme la présidente.  - Motion n°I-359 présenté par M. de Legge et les membres du groupe UMP.

En application de l'article 44, alinéa 5 du Règlement du Sénat, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des finances, le projet de loi de finances pour 2014, adopté par l'Assemblée nationale (n°155, 2013-2014)

M. Dominique de Legge .  - Si nous présentons cette motion, cela ne signifie pas que notre rapporteur général, dont nous connaissons la qualité du travail, ait failli : en toute bonne volonté, on ne peut pas faire du bon avec du mauvais. Monsieur le ministre, vous parlez avec aisance, mais vos actes sont aux antipodes de vos propos : vous avez augmenté la pression fiscale de 45 milliards d'euros depuis 2012, au point d'aboutir à un ras-le-bol fiscal, dixit M. Moscovici lui-même. L'annonce récente d'une remise à plat complète de la fiscalité par le Premier ministre démontre l'impréparation qui gouverne votre politique.

Ce budget persiste dans l'erreur : hausse de la TVA et des cotisations vieillesse, baisse du plafond du quotient familial, suppression de la déduction pour enfant scolarisé, rétablie in extremis devant la bronca qu'elle a suscitée au sein même de votre majorité, suppression des avantages fiscaux sur les mutuelles dont profitent 76 % des salariés, soit une hausse d'un milliard d'euros, durcissement de la déductibilité des intérêts d'emprunt, taxation supplémentaire des entreprises de 2,5 milliards d'euros via l'IS. Où est la pause fiscale ?

On attend toujours votre loi sur les familles, leur sort est réglé au détour de cette loi de finances ; ce ne sont pas les plus aisés que vous touchez.

Quant aux entreprises, le CICE est inefficace. Nous proposerons de le supprimer pour rétablir la TVA sociale.

Quant à la baisse de la dépense publique, c'est un leurre. Là où nous supprimions des emplois, les dépenses de solidarité dérapent. Les objectifs affichés ne sont qu'un vaste écran de fumée.

Il est d'autant plus nécessaire de revoir la copie qu'elle est un brouillon. Nous naviguons en pleine impréparation, au gré de volte-face qui provoquent un véritable tournis fiscal.

Un sentiment justifié par des rétropédalages nombreux : sur l'écotaxe, la fiscalité de l'épargne, l'EBE, la TVA... c'est un tournis fiscal. Le budget a effacé la trace de ces volte-face. Où sont les 370 millions annoncés mardi par le Premier ministre pour financer la réforme des rythmes scolaires en 2014 ?

Les recettes sont moindres que prévu : moins 2,6 milliards pour l'impôt sur le revenu, moins 3,8 pour l'impôt sur les sociétés, moins 5,6 pour la TVA. Le manque à gagner de 11 milliards. Ces chiffres, je les tire de l'excellent rapport de M. Marc.

Le budget est insincère. Vous devez à nos concitoyens un budget lisible fondé sur des objectifs clairs. C'est pourquoi nous demandons le renvoi en commission.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - La commission a rejeté cette motion. Il n'y a pas lieu de produire un rapport différent de celui que nous avons adopté il y a quelques jours.

Vous contestez d'abord l'effort fait en matière de dépenses. Or il est plus important qu'auparavant. M. de Legge réclame des économies plus considérables : les dépenses publiques ont pourtant augmenté de 1,6 % par an entre 2007 et 2012.

Ensuite, vous déplorez la hausse des prélèvements obligatoires. Or ils sont stabilisés dans la trajectoire des finances publiques jusqu'en 2017. Hors produit de la lutte contre la fraude fiscale, cette hausse est limitée à 0,05 % du PIB.

Enfin, la baisse des recettes nécessiterait de réviser le budget, dites-vous. C'est techniquement difficile : je devrais revenir devant vous, toutes affaires cessantes, pour vous présenter un texte nouveau sur le fondement de simulations économétriques plus approfondies... Les prévisions qui fondent ce projet de loi de finances ont été validées par tous les organismes nationaux et internationaux qui les ont étudiées.

Je préconise, par conséquent, le rejet de cette motion.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Quelle déception !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Mon avis est identique. La Commission européenne a donné son avis sur nos efforts en dépenses, le Haut Conseil des finances publiques les a jugés crédibles.

La situation des prélèvements obligatoires suscite des contestations. Ils n'augmentent pourtant que de 0,05 %. Ce qui compte, c'est la réalité, non le détournement du débat à des fins politiciennes en vue de créer la confusion.

À la demande du groupe UMP, la motion n°I-359 est mise aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin n° 68 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 327
Pour l'adoption 139
Contre 188

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente.  - Je vous rappelle que 537 amendements ont été déposés sur la première partie.

Prochaine séance demain, vendredi 22 novembre 2013, à 10 h 30.

La séance est levée à 21 h 15.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques