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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Dépôt de rapports et d'un document

Demande d'inscription à l'ordre du jour

Projet de loi de finances pour 2015 (Suite)

Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Provisions

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis de la commission des lois

Mme Marie-France Beaufils

M. Jean-Claude Requier

M. Vincent Delahaye

M. Jean-François Husson

M. René Vandierendonck

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique

ARTICLE 32 État B (Mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »)

ARTICLE ADDITIONNEL

ARTICLE 32 État B (Mission « Provisions »)

ARTICLES ADDITIONNELS

Relations avec les collectivités territoriales

M. Charles Guené, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean Germain, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Jacqueline Gourault, rapporteure pour avis de la commission des lois

M. Christian Favier

M. Jacques Mézard

M. Vincent Capo-Canellas

M. Éric Doligé

M. Didier Marie

M. Bernard Fournier

M. Georges Patient

M. Daniel Laurent

M. Philippe Paul

M. Didier Mandelli

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale

ARTICLE 32 État B

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 58

ARTICLE 58

Mme Cécile Cukierman

Avis sur une nomination

Projet de loi de finances pour 2015 (Suite)

Aide publique au développement

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Henri de Raincourt, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Olivier Cadic

Mme Leila Aïchi

M. Michel Billout

M. Robert Hue

M. Bernard Fournier

Mme Claudine Lepage

M. Robert del Picchia

M. Charles Revet

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée du développement et de la francophonie

ARTICLE 32 État B Mission « Aide publique au développement »

Ordre du jour du mercredi 3 décembre 2014

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 2 décembre 2014

32e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Hervé Marseille, vice-président

Secrétaire : M. Philippe Nachbar.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Dépôt de rapports et d'un document

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur la mise en application de la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 ; le rapport sur la mise en application de la loi du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 ; le rapport sur la mise en application de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2014 ; le rapport sur la mise en application de la loi du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon.

M. le président du Sénat a en outre reçu de M. le Premier ministre la convention entre l'État et la Caisse des dépôts et consignations relative au programme d'investissements d'avenir, action « Fonds souverain de la propriété intellectuelle ».

Ces documents ont été transmis respectivement à la commission des finances pour les trois premiers, à la commission des affaires économiques pour le quatrième, à la commission des finances ainsi qu'à la commission de la culture pour le dernier.

Demande d'inscription à l'ordre du jour

M. le président.  - Par courrier en date de ce jour, Mme Éliane Assassi, présidente du groupe CRC, demande l'inscription, à l'ordre du jour de l'espace réservé à son groupe du jeudi 11 décembre 2014 après-midi, de la proposition de résolution relative à un moratoire sur la mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques issus de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages et des lois subséquentes, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution, en remplacement de la proposition de résolution n° 89.

Cette demande a été communiquée à M. le Premier ministre, en application de l'article 4 de la loi organique du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution et de l'article 50 ter de notre Règlement.

Cette proposition de résolution ne pourra être inscrite, au plus tôt, que 48 heures après cette demande.

Projet de loi de finances pour 2015 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l'Assemblée nationale.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances.  - A l'issue de l'examen de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », nous nous engagerons dans la discussion des crédits des relations avec les collectivités territoriales, prévu pour 1 h 30, et 3 heures pour les articles rattachés. Conformément aux règles prévues pour l'examen du budget, la discussion pourra être reportée samedi à14 h 30 si nous n'achevons pas l'examen des amendements en discussion aujourd'hui avant 20 heures, afin de ne pas décaler les autres discussions. Merci à nos collègues de s'y préparer, et à la ministre en particulier.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique.  - Nous prenons note et essaierons de nous organiser en conséquence.

Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Provisions

M. le président.  - Nous allons examiner les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Provisions ».

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Principale mission du pôle économique et financier de l'État, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » porte principalement sur les crédits de l'administration fiscale (DGFiP) et de l'administration des douanes (DGDDI), deux administrations de réseau, ainsi que sur les moyens alloués à plusieurs structures et politiques transversales qui relèvent de Bercy.

Les crédits de paiement demandés, 11,3 milliards d'euros, baissent de 174 millions d'euros, - 1,4 %, par rapport à 2014. La baisse est encore plus marquée en autorisations d'engagements, puisqu'elle atteint 277 millions d'euros, - 2,4 %. Comme les années précédentes, cette mission est fortement mise à contribution dans le cadre de l'effort de redressement des finances publiques.

La DGFiP qui représente à elle seule 73 % des crédits de la mission, fournit l'effort le plus important : ses crédits baissent de 112 millions d'euros sur un an sur un total de 8,2 milliards d'euros, soit une baisse de 1,3 %. Les économies reposent avant tout sur les dépenses de personnel, qui représentent 77 % des crédits de la mission. 2 400 suppressions de postes, dont 2 000 pour la seule DGFiP sont prévus. La mission arrive ainsi en second, après la mission « Défense » et ses 7 500 suppressions de postes, et largement devant toutes les autres, dans l'ordre des missions dont les effectifs baissent le plus.

D'importantes économies sont attendues des progrès de la dématérialisation des procédures : télé-déclaration de l'impôt sur le revenu ou de la TVA, dématérialisation des factures, télé-dédouanement... La déclaration fiscale simplifiée, annoncée par Thierry Mandon, lors du Conseil de la simplification du 30 octobre dernier, s'inscrit également dans cette logique. Toutefois, en attendant que la dématérialisation et la simplification diffusent tous leurs bienfaits, les dépenses de fonctionnement courant continuent à croître et les efforts nous semblent insuffisants à cet égard.

Ce sont bien les investissements qui constituent l'autre grande source d'économies pour 2015 : ils connaissent, en autorisations d'engagements, une baisse drastique de 29 % en un an, soit 89 millions d'euros, en raison de l'achèvement de grands programmes d'investissement, notamment de renouvellement des avions et des garde-côtes de la douane. C'est aussi un choix de facilité avec l'abandon de projets majeurs engagés ces dernières années : ainsi celui de l'opérateur national de paie, lancé en 2007 ; devant l'envolée des coûts et l'accumulation des problèmes techniques, il a été décidé d'y mettre fin le 10 mars 2014. Avant il y a eu Louvois, le logiciel de paie du ministère de la défense, ou le progiciel comptable Accord, remplacé à grand frais par Chorus en 2007.

Il y a eu aussi la suspension sine die de l'écotaxe, ou péage de transit poids lourds, annoncée le 9 octobre 2014. Cette suspension pose la question de l'avenir du centre de gestion installé à Metz. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Les administrations relevant de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » sont concernées au premier chef par la lutte contre la fraude fiscale, enjeu politique majeur.

Il serait important que la baisse des effectifs ne s'applique pas de façon uniforme à tous les services, afin que soient préservées nos capacités de contrôle fiscal.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Je m'interroge comme mon prédécesseur à cette tribune sur l'indemnisation d'Ecomouv, mais aussi sur les coûts liés au service de Metz. Je regrette le manque de courage collectif sur l'application d'une taxe adoptée à une large majorité.

La mission « Provisions » est une mission spécifique, dont les deux programmes sont destinés à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote de la loi de finances. Elle a été minorée par l'Assemblée nationale. Nous vous suggérons de préciser la doctrine d'emploi de cette dotation afin d'en circonscrire le recours au seul critère accidentel.

Conformément à une recommandation récurrente de la Cour des comptes et afin d'éviter toute confusion avec le terme de « provisions » emprunté à la comptabilité générale et répondant à une tout autre définition, nous vous proposons un amendement visant à modifier la dénomination de la mission au profit de l'intitulé « Crédits non répartis ».

Outre les budgets ministériels, la politique immobilière de l'État repose sur le programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État », rattaché à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », qui finance les travaux d'entretien lourd de l'État propriétaire. Il est doté de 166 millions d'euros en 2015, soit en légère baisse. La maintenance corrective sera moins dotée en 2015, au profit de la maintenance préventive, mais surtout des contrôles, audits et diagnostics qui la précèdent.

Second outil de la politique immobilière de l'État, le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » finance les travaux structurants de reconversion. Il est alimenté par une partie des produits de cession des immeubles de l'État, évalués à 521 millions d'euros pour 2015. C'est un objectif ambitieux, comparé notamment aux 470 millions d'euros prévus pour 2014, mais réaliste selon les services de France Domaine. On peut toutefois regretter que très peu d'éléments soient disponibles pour juger du bien-fondé d'un prix de cession et s'assurer, notamment, qu'un bel immeuble n'est pas cédé à vil prix pour produire des recettes immédiates.

Le taux de contribution du compte d'affectation spéciale au désendettement, qui devrait théoriquement atteindre 30 % du montant des cessions, ne sera l'année prochaine que de 16 %, du fait des exonérations proposées par l'article 22 dont bénéficient le ministère des affaires étrangères sur les biens situés à l'étranger, et surtout le ministère de la défense. Compte tenu des efforts demandés à ce dernier, cette dérogation paraît justifiée à la commission des finances, dans les circonstances actuelles.

Le reste des dépenses du compte d'affectation spéciale, soit 413 millions d'euros, finance les travaux de restructuration immobilière. Les crédits sont en baisse de 5,3 %, mais de fortes variations ne doivent pas surprendre, la plupart des projets s'étendant sur plusieurs années.

Certains arbitrages stratégiques pour la politique immobilière n'ont jamais été vraiment faits et ce n'est pas nouveau : la valorisation locative du patrimoine de l'État et de ses opérateurs pourrait souvent se révéler plus avantageuse qu'une cession en une fois. La stratégie de France Domaine est trop souvent guidée par des objectifs de court terme.

Quant à la politique immobilière des opérateurs, du reste défaillante, alors que nous avions demandé, dès 2009 à l'Assemblée nationale, à ce que le patrimoine immobilier des opérateurs soit évalué, aucune vision d'ensemble fiable n'est disponible à ce jour. La nouvelle génération de schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) et le « suivi renforcé » de certains opérateurs seront peut-être l'occasion d'améliorer les choses, mais le jaune budgétaire devrait, au moins, être rempli. Je sais que cela ne dépend pas que de vous, madame la ministre.

L'État se décharge de certains opérateurs sur la SOMAFIM au prix fort. Je présente un amendement visant à la dissoudre. Cet organisme a déjà fait l'objet de critiques de la part de la Cour des comptes et d'une condamnation de la cour de discipline budgétaire et financière.

Enfin, le pilotage du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » est soumis à des objectifs contradictoires. Comme vous le savez, la loi « Duflot » du 18 janvier 2013 autorise l'État à céder des terrains de son domaine privé avec une forte décote, pouvant aller jusqu'à 100 % lorsque ces terrains sont destinés à la construction de logements sociaux.

Je vous proposerai à titre personnel un amendement visant à minorer les dépenses immobilières accordées à chaque ministère d'un montant égal à la décote consentie. De cette manière, le budget général assumera bien, conformément à sa vocation, la politique en faveur du logement social.

Sous réserve de ces observations et amendements, je vous propose d'adopter ce budget.

M. Hugues Portelli, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - Notre commission donne un avis favorable sur ces budgets relatifs à la formation des fonctionnaires et à l'aide sociale, regroupés dans le programme 148.

Le gros du budget de formation est absorbé par les grands centres de formation comme l'ENA et les IRA. Leurs budgets sont maintenus, leur coopération est accentuée, notamment entre ENA et l'Institut national des études territoriales (INET), dont les conditions de recrutement par concours sont analogues.

L'aide sociale est maintenue, qui remplit des fonctions utiles, pour l'aide au logement, pour les crèches. Il y a une continuité entre le budget de 2015 et celui des années précédentes. Avis favorable, je le répète.

Mme Marie-France Beaufils .  - Les crédits de l'administration fiscale et de l'administration financière sont encore, cette année, touchés par une diminution des effectifs qui met en péril leurs missions essentielles, dont la collecte d'informations fiscales, le recouvrement des impôts et l'aide et le conseil aux collectivités territoriales. En 2015, 110 000 agents seront affectés aux services des finances publiques et de la douane, là où on en comptait 155 000 en 2011.

La fraude fiscale et sociale devrait nous amener à consentir une pause, pour sanctuariser le nombre d'agents opérant en matière fiscale et financière. La situation actuelle prive l'État de moyens financiers et les collectivités locales de conseils sur leur gestion, 1 000 trésoreries ayant été fermées.

On n'a cessé depuis vingt ou trente ans d'alléger la fiscalité des ménages les plus favorisés et des entreprises les plus importantes. Et pour quoi ? Pour une dette publique résultat de l'accumulation de moins-values de recettes et ce sont les familles modestes, les jeunes, les retraités et les chômeurs qui paient le prix. Le gel du point d'indice, mesure emblématique du gouvernement Fillon-Sarkozy, restera en vigueur jusqu'en 2017 : 5,4 millions de salariés dont le traitement est réduit, cela a aussi un impact direct sur les recettes de l'État, ainsi que sur la croissance de l'économie. Les économies réalisées sur les traitements et les pensions n'ont pas amélioré sensiblement les comptes publics. Nous voterons contre ces crédits sans hésitation, d'autant plus si certains amendements sont adoptés.

M. Jean-Claude Requier .  - Cette mission concerne un large spectre de l'action publique. Ses crédits s'inscrivent dans la perspective de réduction des dépenses publiques, de façon exemplaire, au premier rang desquels ceux de la DGFiP. Ce sont les dépenses de personnel qui diminuent le plus, comme l'an passé. Les administrations concernées poursuivent leur modernisation. Le numérique et la dématérialisation en sont les vecteurs, comme autant de sources d'économies. Je m'interroge comme les rapporteurs sur la baisse des crédits d'investissements il ne faut pas sacrifier une vision de moyen ou long terme.

La mobilisation des crédits de la lutte contre la grande fraude douanière pose question. De même, je m'interroge sur l'évolution des crédits destinés au contrôle fiscal des grandes entreprises, que la direction générale des douanes accompagne activement.

Le Gouvernement a fait de l'éducation nationale, de la sécurité et de la justice des priorités. La création de 10 601 postes dans ces administrations est compensée par la suppression de 11 800 autres, en particulier à la défense. Plusieurs amendements du rapporteur général relèvent du contreprojet de la majorité sénatoriale. Si l'on peut s'interroger sur le coût et l'impact sur l'absentéisme de la suppression du jour de carence par le dernier projet de loi de finances, porter ce délai à trois jours nous paraît disproportionné. Le ralentissement du Glissement vieillesse technicité (GVT) n'est pas opportun, d'autant que le point d'indice restera gelé.

Les sénateurs RDSE n'ont aucune opposition de principe sur la réforme de la fonction publique mais ne se retrouvent pas dans les amendements du rapporteur général.

J'en viens au compte d'affectation spécial « patrimoine immobilier ». Nos rapporteurs pointent le dilemme posé par la loi Duflot : l'État propriétaire souhaite vendre ses biens immobiliers au meilleur prix ; l'État stratège participer à la politique du logement.

Nous ne pourrons apporter notre soutien aux crédits modifiés par les amendements de la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. Vincent Delahaye .  - La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » contribue fortement à l'effort d'assainissement de nos finances publiques. C'est un véritable exemple de réduction de la dépense de 1,4 %, une économie réelle et non pas une « tendance », comme on l'entend trop souvent. Mais on peut faire mieux !

Les dépenses de personnel ont été sollicitées à hauteur de 1,2 %. On a rogné aussi sur l'investissement, sans réfléchir au fond sur le périmètre de la mission. Ainsi à la DGFiP, 30 % des effectifs sont en charge de la collecte de l'impôt sur le revenu. La retenue à la source permettrait de les redéployer. Il ne s'agit pas de remettre en cause le statut de la fonction publique ! Je proposerai de revenir au principe de non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.

Pourquoi avoir augmenté le nombre de postes au concours de l'ENA ? L'enseignement, la police et la justice sont des priorités. On coupe largement dans la défense nationale, mais pourquoi créer des postes d'administrateurs civils ?

L'ONP, c'est une somme considérable perdue, sans aucun résultat. M. le rapporteur général présentera un amendement sur le jour de carence. Il faut travailler à plus d'équité, faute de revoir le statut.

La mission « Provisions » fait apparaître des anomalies de gestion. Ces crédits sont plutôt utilisés comme variable d'ajustement de la gestion que comme outil pour faire face à l'imprévu.

En ce qui concerne la politique immobilière, la pratique de la cession à outrance, n'est pas de bonne administration. Vendre trop vite est absurde. Les facilités de gestion d'aujourd'hui -comme la location d'un hôtel particulier qui abrite la Cour de justice de la République pour 450 000 euros par an, ou le projet de nouveau ministère de la justice, le projet millénaire, avec un partenariat public-privé- creusent les déficits de demain. Ne suspendons pas le fonctionnement de nos services administratifs au paiement des loyers des immeubles où nous les installons. L'administration financière peut encore progresser vers l'efficience. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-François Husson .  - Outre nos réserves sur la gestion de la politique immobilière, nous regrettons que les dépenses de fonctionnement courant continuent à croître. Il convient de mieux évaluer le rapport coût-efficacité des logiciels de gestion de paie introduits dans l'administration, dont l'abandon coûte très cher, critique qui vaut pour tous les gouvernements, de droite comme de gauche.

La suspension sine die de l'écotaxe pose le problème des 130 douaniers qui étaient affectés à Metz au centre de gestion de sa mise en oeuvre. Pourquoi ne pas les affecter à la lutte contre la fraude sur internet ? Philippe Dallier, dans son rapport d'il y a un an sur le commerce en ligne, avait souligné l'importance d'une lutte renforcée contre cette fraude. Un redéploiement des effectifs entre les différents services des douanes concernés pourrait y pourvoir. Le manque à gagner en matière de TVA a été estimé par la commission européenne à 32 milliards d'euros pour la France, ce qui n'est pas rien.

J'ai déposé un amendement pour réduire le coût de la masse salariale de l'État, principal poste de dépenses, en ralentissant le GVT. Le rétablissement de trois jours de carence dans la fonction publique est une mesure d'équité avec le secteur privé.

Madame la ministre, vous nous rétorquez qu'il y a, dans le privé, recours à des assurances.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Oui, à 77 %.

M. Jean-François Husson.  - Mais un tiers des salariés du privé ne sont pas couverts. Cette couverture assurantielle ne concerne que les salariés en CDI et se traduit par une cotisation supplémentaire. Le jour de carence a un effet positif sur l'absentéisme. Il avait surtout un effet sur les arrêts d'une journée...

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Oui.

M. Jean-François Husson.  - ...qui avaient diminué de 43 % dans la fonction publique territoriale, selon une étude d'un assureur. Dans la fonction publique hospitalière, les absences ont baissé jusqu'à 40 % dans certains établissements.

Mais vous l'avez supprimé parce qu'il fallait faire accepter aux fonctionnaires le gel de leur rémunération pour la cinquième année consécutive.

C'est sous réserve de l'adoption de nos amendements que nous voterons ces crédits. (Applaudissements au centre et à droite)

M. René Vandierendonck .  - Le projet de loi de programmation des finances publiques 2014-2019 a fixé une trajectoire pour ramener le déficit sous la barre des 3 % en 2017 et tendre vers un équilibre structurel en 2019. Effort insuffisant ? Du jamais vu, jusqu'à preuve de contraire. La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » y contribue fortement. Le Gouvernement n'a pas hésité à confirmer la stabilisation des effectifs de la fonction publique d'État et le gel du point d'indice jusqu'en 2017.

Pour le groupe socialiste, les engagements sélectifs du président de la République pour l'éducation nationale, la sécurité et la justice sont bien tenus. En 2015, 9 421 postes seront créés dans l'enseignement, 405 dans la police et la gendarmerie et 600 dans la justice.

Contrepartie inévitable, d'autres missions perdent des emplois : la défense (on le déplore à droite), les finances, les comptes publics. Le nombre d'ETP baisse, au total, de 0,14 %.

Les dépenses d'action sociale -chèques vacances, Cesu, aide à la garde d'enfants...- repartent à la hausse, de 2,8 % ; elles s'établissent à 122,3 millions pour 2015. Elles contribuent à redresser le pouvoir d'achat des agents et de leurs familles par des mesures ciblées sur celles qui sont les plus en difficultés.

Madame le ministre, sans doute nous direz-vous enfin les incidences de la réforme territoriale sur les transferts de personnels de l'État vers les collectivités territoriales. Comme le rapport Malvy-Lambert l'indique, je suis convaincu qu'il y a des effets positifs à en attendre... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique .  - Oui, toutes ces administrations contribuent de manière exemplaire au redressement des comptes publics. Je ne vous dirai rien sur les incidences de la réforme territoriale, le ministère de l'agriculture a annoncé le transfert de la gestion des fonds structurels ; pour le reste, je ne peux avancer encore aucun chiffre. Il s'agit non plus de savoir « qui fait quoi », mais « qui ne fait plus quoi ». Nous y reviendrons bientôt.

2 400 ETP sont supprimés, soit une baisse de 1,8 % du plafond d'emploi. La baisse des dépenses atteint 60 millions hors dépenses de personnels. Celles-ci baissent de 62 millions hors pensions. Sur l'ENA, les IRA et d'autres établissements, il s'agit de rapprochements avec des modules communs. L'augmentation des postes répond aux demandes des administrations.

L'action sociale est bien ciblée, en effet. Nous avons tenu à maintenir ce petit budget destiné aux fonctionnaires modestes. Nous l'avons revu afin que des efforts spécifiques aident ceux qui en ont le plus besoin.

Sur les douanes, des économies ont été dégagées sur les procédures, comme pour l'ensemble des services de Bercy, grâce à la dématérialisation. Une réorganisation d'ensemble est en marche, après que tout le personnel aura été interrogé : réponses à la mi-décembre.

Pour lutter contre la fraude, des missions temporaires ont été confiées au personnel du centre de Metz. Sur l'ONP, nous avons attendu les conclusions d'une mission d'analyse qui a montré que nous ne pouvions le garder.

Sur le jour de carence, faites attention ! Si les grandes entreprises ont fait le choix d'une plus faible cotisation salariale pour les couvrir, ce n'est pas par philanthropie... Si vous voulez l'équité parfaite, offrez aux fonctionnaires les mêmes protections qu'aux salariés du privé. Les assureurs montrent que si l'on constate en effet une baisse des congés d'un jour, on observe aussi une recrudescence des congés plus longs et des accidents du travail.

Le pilotage de la politique immobilière a été intégré. Les documents budgétaires vous permettront de suivre les progrès accomplis : je m'engage à ce qu'il y ait une évaluation.

Oui, il y a eu un gel du point d'indice dans la fonction publique, mais nous avons choisi de revaloriser d'abord les petits salaires, les catégories C et B, qui représentent 58 % des effectifs dans la fonction publique territoriale.

Enfin, les crédits de la mission « Provision » concernent bien les dépenses accidentelles, ainsi que la réserve parlementaire, dont je ne doute pas que nous pourrons discuter avec entrain. (Sourires)

ARTICLE 32 État B (Mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »)

M. le président.  - Amendement n°II-50, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

Dont Titre 2

 

 

0

 

 

550 000 000

550 000 000

 

 

0

 

 

550 000 000

550 000 000

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières Dont Titre 2

0

0

0

0

Facilitation et sécurisation des échangesDont Titre 2

0

0

0

0

Entretien des bâtiments de l'État

0

0

0

0

Fonction publiqueDont Titre 2

0

0

0

0

TOTAL

0

550 000 000

0

550 000 000

SOLDE

- 550 000 000

- 550 000 000

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances.  - Cet amendement substantiel ralentit le GVT positif dans la fonction publique d'État en 2015. La maîtrise de la masse salariale de l'État est fondamentale pour l'assainissement de nos finances publiques.

Des mesures ont déjà été prises, gel du point d'indice ou mesures catégorielles, qui ont limité la progression naturelle de la masse salariale. Mais la Cour des comptes indique dans son rapport que « les promotions individuelles, qui sont à l'origine du GVT positif, constituent le vecteur le plus dynamique de l'augmentation de la masse salariale à hauteur d'environ 1 200 millions d'euros par an » -pour la seule fonction publique d'État. Cet amendement diminue de 550 millions les autorisations d'engagements et les crédits de paiements du programme 156.

Il ne s'agit pas de geler l'avancement mais de le ralentir. Le Gouvernement dispose de plusieurs moyens pour y parvenir, gel temporaire des mesures individuelles de changement d'échelon ou de grade par exemple. La mesure a vocation à s'appliquer au-delà de la fonction publique d'État ce que nous proposons est difficile, courageux, mais la situation budgétaire du pays l'exige.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Regardons bien les chiffres. La Cour des comptes souligne surtout la bonne maîtrise de la masse salariale en 2013 ; le Gouvernement poursuit ses efforts en 2015. On peut maintenir l'emploi public et avoir une gestion très rigoureuse.

Les fonctionnaires ont accepté de participer au redressement des comptes publics avec le gel du point d'indice depuis 2010. Peu de salariés du privé en font autant...

M. Gérard Longuet.  - Mais leurs entreprises sont en dépôt de bilan ! (M. Gilbert Bouchet renchérit)

M. Jean-François Husson.  - Et le chômage augmente !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - J'y suis tout aussi sensible que vous, croyez-moi. Nous discutons avec les organisations syndicales des parcours professionnels, des passerelles, de l'amélioration de la formation professionnelle, de l'allongement des carrières ; aujourd'hui, beaucoup de fonctionnaires atteignent le maximum à 40 ans, ce n'est pas satisfaisant. Geler le GVT n'est pas de bon augure pour ces grandes négociations qui n'ont pas eu lieu depuis trente ans.

M. Éric Bocquet.  - L'exposé des motifs de cet amendement et de celui du groupe UMP est intéressant. La nouvelle majorité manque d'inventivité, on sait le poids de la masse salariale dans le budget de l'État. Celui-ci paie chaque année 121 milliards d'euros en traitements mais les fonctionnaires paient des cotisations, consomment, bref sont facteurs de croissance.

Les fonctionnaires n'auraient pas assez payé leurs privilèges par le gel du point d'indice que l'on veuille encore ralentir leur progression de carrière ? Ralentir le GVT, c'est accepter que les gens soient payés en-deçà de leur valeur et de leur expérience. Il n'y a aucune convention collective, même la moins protectrice, qui ne prévoit expressément le reclassement régulier des salariés à un grade supérieur. 550 ou 775 millions d'économies, c'est 290 à 410 euros par an en moins pour les fonctionnaires. Une bonne chose pour la croissance, à n'en pas douter...

Et cela, de la part de ceux qui voudraient réduire l'ISF d'un milliard d'euros et qui ne s'offusquent pas des confortables retraites chapeau versées aux grands patrons !

Nous voterons contre ces amendements.

M. Vincent Delahaye.  - Nous ne sommes pas dans la situation des pays qui ont baissé le traitement des fonctionnaires de 10 % ou 20 %. Mais c'est un risque si nous n'anticipons pas. (Marques d'approbation sur les bancs UMP)

Il n'y a pas de vrai DRH dans la fonction publique ; dans le privé, il n'y a pas de garantie individuelle du pouvoir d'achat. Cette mesure ne bloque pas le GVT, elle le ralentit. Nous sommes au pied du mur. Prenons des dispositions supportables rapidement, pour ne pas nous retrouver demain contraints d'en prendre d'insupportables pour tout le monde. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean Germain.  - Tout le monde doit faire des économies, à son échelle. 550 millions, cela va peser sur plusieurs centaines de milliers de personnes. La nouvelle majorité veut faire 110 à 120 milliards d'euros d'économies ; il lui faudra en trouver encore dix fois plus... On a vu ce que les français pensaient de la suppression de l'ISF. Alors que les retraites chapeau atteignent des montants indécents, supprimer les possibilités d'avancement de carrière des fonctionnaires n'est pas un bon signe.

Toutes les politiques de restriction salariale ont montré leur inefficacité ; pour nourrir la croissance, nous avons besoin d'investissements mais aussi de consommation !

Ce n'est ni juste, ni le bon moment. Nous voterons contre ces amendements.

M. Michel Canevet.  - Faisons preuve de responsabilité. Tout cela est financé à crédit. Il importe de revenir le plus vite possible à l'équilibre. La croissance ne viendra pas par des dépenses supplémentaires mais par la baisse des charges des entreprises. Pensons aux cinq millions de Français sans emploi, qui attendent des mesures fortes. (Mme Marie-France Beaufils s'exclame)

Cessons d'imposer des charges nouvelles aux employeurs publics. Dans ma commune, la revalorisation des bas salaires, c'est deux points d'impôt ; la réforme des rythmes scolaires, huit points d'impôt ; la baisse de la DGF, un point d'impôt. Et l'on supprime les outils comme la journée de carence, qui avait démontré son bien-fondé. C'est ainsi que l'on creuse les déficits ! Vous faites l'inverse de ce qu'il faut faire ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - La grille de la fonction publique est sans doute obsolète... Nous avons le troisième déficit de la zone euro ; nous renonçons à nos engagements en matière de trajectoire de redressement ; nous aurons en 2015 un besoin de financement de 188 milliards d'euros... Dans ces conditions, et lorsque la masse salariale de la fonction publique représente 121 milliards, on ne peut pas ne pas regarder l'évolution du GVT. C'était une préconisation de la Cour des comptes. Il ne s'agit nullement de geler l'avancement, mais de ralentir son automaticité. Les élus locaux le savent, il est important de maîtriser le GVT

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Il faut attendre quatre ans pour bénéficier de la garantie individuelle du pouvoir d'achat. Je vous ferai parvenir un rapport qui montre la complexité du problème.

Je veux bien recevoir toutes les leçons du monde, mais ce Gouvernement n'est là que depuis deux ans et demi... Le rapport de la Cour des comptes, page 153, est très clair : « Les effectifs ont diminué plus que prévu malgré des départs à la retraite moins nombreux qu'anticipé. (...) L'exécution est tenue, en amélioration par rapport à l'année précédente». Nous avons fait mieux que prévu. J'ajoute que 40 des 123 milliards sont des pensions qui sont dues, quoi qu'il arrive.

Nous avons fait des efforts pour les catégories C et B, pensez aux personnes qui travaillent dans des Ehpad, il y a des métiers difficiles, durs dans la fonction publique.

Le nombre de fonctionnaires... Il faut raison garder. Je m'étonne du coût des rythmes scolaires dans votre commune, monsieur Canevet, d'autant que le fonds d'amorçage est devenu pérenne. La baisse des dépenses publiques est toujours récessive, disait le nouveau président de l'Association des maires de France, qui n'est pas de mon bord politique ; si cela vaut au niveau local, n'est-ce pas vrai au niveau national ? Il va falloir se mettre d'accord...

En France, hors défense, le taux d'encadrement de la fonction publique est de 72 équivalents temps plein (ETP) pour 1 000 habitants ; le Canada est à 100 ETP pour 1 000 habitants, la Suède à 140...

M. Michel Canevet.  - Nous avons 5 millions de fonctionnaires pour 60 millions d'habitants...

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Nous sommes en-deçà de la moyenne européenne.

M. Gérard Longuet.  - Vous parlez des seuls fonctionnaires de l'État...

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Vous pensez que les fonctionnaires sont responsables de nos déficits ; ce n'est pas le cas.

M. Jean-Paul Emorine.  - À gauche, on n'a pas pris conscience que nous n'avons plus de croissance et que le pays s'appauvrit.

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est l'état dans lequel vous nous l'avez laissé !

M. Jean-Paul Emorine.  - Nous avons le plus fort taux de prélèvements obligatoires et nos dépenses publiques représentent 57 % du PIB. L'écart avec l'Allemagne est de 10 à 11 points. 22 % de nos actifs sont des emplois publics contre 11 % en Allemagne. Nous avons 30 millions d'actifs, moins 5 millions de chômeurs et de précaires, et nous finançons nos 80 milliards de déficit à crédit.

Dans ma famille, il y a des fonctionnaires. Moi, j'étais éleveur. Vous inquiétez-vous autant pour l'éleveur qui souffre, pour l'artisan, pour l'employé qui a perdu son emploi ? Les fonctionnaires, eux, ont la garantie de l'emploi. Dans la période où nous vivons, c'est un avantage majeur ! (Applaudissements au centre et à droite)

À la demande des groupes UMP et CRC, l'amendement n°II-50 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°58 :

Nombre de votants3 29
Nombre de suffrages exprimés 329
Pour l'adoption 188
Contre 141

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements au centre et à droite)

M. le président.  - Amendement n°II-271, présenté par M. Husson et les membres du groupe UMP.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public localDont Titre 2

 

 

225 000 000225 000 000

 

 

225 000 000225 000 000

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières Dont Titre 2

 

 

 

 

Facilitation et sécurisation des échangesDont Titre 2

 

 

 

 

Entretien des bâtiments de l'État

 

 

 

 

Fonction publiqueDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

225 000 000

 

225 000 000

SOLDE

- 225 000 000

- 225 000 000

M. Jean-François Husson.  - Cet amendement va un peu plus loin que le précédent, en portant l'effort de six à douze mois. Il ne s'agit pas d'opposer salariés du privé et fonctionnaires mais d'appeler à l'effort de l'ensemble des actifs. La situation de l'emploi vous préoccupe ; mais loin de s'inverser comme il avait été promis, la courbe du chômage atteste que l'on compte 500 000 chômeurs de plus qu'en 2012. Cette mesure ne nous rendra pas populaires ; ce n'est pas notre objectif : nous prenons nos responsabilités, en conscience.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Le débat a déjà eu lieu. À titre personnel, je suis favorable à cet amendement. Il pose le débat sur l'inadéquation de la grille de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Avis défavorable. Les syndicats de la fonction publique sont responsables : ils ont accepté le gel du point, les suppressions de postes et consentent à discuter des parcours professionnels et des carrières. Je les salue. Je n'ai jamais entendu parler du GVT ces dix dernières années... Aller chercher toujours des économies sur le dos des fonctionnaires n'est pas de bonne politique.

Le chiffre de 57 % du PIB de dépenses de l'État, rabâché sur tous les plateaux télévisés par les think tanks libéraux est trompeur. Les dépenses de l'État, c'est 250 milliards d'euros ; celles des collectivités territoriales, 360 milliards d'euros ; et la protection sociale, 600 milliards. Le petit entrepreneur américain vous dira qu'il n'y a pas de protection sociale, qu'il forme ses salariés avant qu'ils soient embauchés par les grands groupes, qu'il doit avoir son propre moyen de transport parce l'action publique est défaillante. Souhaitez-vous remettre en cause l'ensemble de notre protection sociale, les retraites, l'assurance chômage ?

Moi, je n'ai aucun fonctionnaire dans ma famille, que des salariés du privé. Aucun ne m'a demandé la suppression du jour de carence des fonctionnaires !

Les fonctionnaires ne sont ni des feignants, ni des planqués, ni des privilégiés. Certes, il y a de hauts fonctionnaires bien payés. Mais il y a aussi des agents qui sont seuls, la nuit, auprès de 70 lits d'Ehpad pour 1 390 euros par mois ! Plus de la moitié des fonctionnaires sont de catégorie C. Et vous voudriez freiner leur progression de carrière ? À force de taper sur eux, de dire qu'ils sont responsables du déficit de la France, vous allez les démoraliser ; et s'ils sont démoralisés, ils rejoindront d'autres familles politiques... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-François Husson.  - Caricature ! Revalorisez donc les traitements des fonctionnaires, allez jusqu'au bout !

Mme Marie-France Beaufils.  - La France a fait le choix de développer les services publics pour répondre aux besoins de la société. Si vous ajoutez aux dépenses publiques des États-Unis les dépenses des ménages en assurances privées, la situation est comparable dans nos deux pays...

Les fonctionnaires contribuent au budget de l'État car ils payent des impôts et des cotisations sociales. Chaque fois que nous vous avons proposé d'alléger les dépenses publiques en revenant sur un certain nombre de niches, vous l'avez refusé. Quand accepterez-vous, par exemple, de supprimer les allégements fiscaux sur les dividendes ? J'ai rapporté hier la mission « Remboursements et dégrèvements », les impôts d'État sont allégés de 87,5 milliards ; il y a là des possibilités de résorber le déficit.

Nous avons tous besoin des fonctionnaires et nous mesurons au quotidien la qualité du service qu'ils rendent. Ne leur demandez pas d'endosser des responsabilités qui ne sont pas les leurs. La population a besoin d'eux. Regardez le niveau des retraites des agents de catégorie C : les cibler plutôt que ceux qui peuvent payer davantage est inacceptable. (Applaudissements sur les bancs CRC et socialistes)

M. Éric Doligé.  - Dire que nous accusons les fonctionnaires d'être responsables de tous nos maux est absurde. Sans doute certains sont-ils à plaindre mais moins tout de même que les chômeurs, qui ne sont pas plus responsables de leur situation.

Il faut lire l'intégralité des rapports de la Cour des comptes, dites-vous ; il vous faut aussi lire la situation du pays, qui est catastrophique.

Dans ma collectivité, j'ai 2 600 agents ; je sais que l'année prochaine ils seront 2 500, et 2 400 l'année suivante... Avec la baisse des dotations, nous serons contraints de réduire nos investissements et nous aurons des départs. Peut-être un peu moins de GVT et un peu plus de jours de carence nous permettront-ils de maintenir l'emploi. Ils sont aux 35 heures et ils ont onze semaines de congés payés ; dans quel autre pays, y en a-t-il autant ? Acceptons collectivement de faire des efforts.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je ne voterai pas cet amendement car je ne vois pas en quoi cette mesure nous sortira de la stagnation économique. Comment inciter les entreprises à investir, en réduisant la demande ? Je ne vois pas. L'investissement privé prendrait le relais ? Et comment, sans perspective de débouchés ?

Régler le blocage massif de notre économie, sachant que notre appareil productif tourne à 80 % d'après l'Insee, en chipotant sur quelques millions d'euros ? Ce n'est pas sérieux. Ce débat est irréel.

M. Michel Canevet.  - Les fonctionnaires sont nécessaires et de qualité, cessez de caricaturer nos propos. Mais financer nos dépenses de fonctionnement à crédit n'est pas sain car cela empêche d'appréhender l'avenir.

L'effort doit être collectif. Les salariés du privé en prennent leur part, et il ne s'agit ici que de ralentir la progression de carrière des fonctionnaires. Notre salut passera par l'exportation, donc par la compétitivité de nos entreprises, par un prix de revient des marchandises plus compétitif ! Faut-il rappeler le solde négatif de notre balance commerciale, 5 milliards d'euros par mois ?

Cela dit, nous considérons que l'effort a été fait avec l'amendement de la commission des finances. Nous ne voterons pas celui-ci.

M. Gérard Longuet.  - Les amendements posent une question majeure : la gestion des ressources humaines de l'État.

S'agissant des collectivités territoriales, l'optimisation de leurs moyens est facilitée par l'atomisation des employeurs. Il faut obliger les DRH des grandes administrations à mieux gérer leurs enveloppes. Nous n'attaquons pas les fonctionnaires, nous pensons que la gestion des ressources humaines manque d'imagination.

Le GVT est un problème. Le ministère de la défense avait trouvé une solution en engageant les hommes du rang par contrat, ce qui n'est pas sans perspective puisque la moitié des sous-officiers viennent des hommes du rang et la moitié des officiers, des sous-officiers.

La réponse se trouve dans une plus grande autonomie de gestion ; des corps différents se gèrent différemment. Pour l'heure, l'unicité du système dissémine les avantages d'une catégorie à toutes les autres. Depuis que la gendarmerie est sous l'autorité du ministère de l'intérieur, les policiers -qui peuvent se syndiquer- parlent aux gendarmes, ceux-ci aux autres militaires et, de proche en proche, les avantages des premiers s'étendent...

Nous avons le même nombre de fonctionnaires de l'État rapporté à la population totale que le Canada, dites-vous ; mais il faut comparer des choses comparables, en rapportant le nombre de fonctionnaires à la population active et là, la comparaison n'est pas à notre avantage : nous sommes à 52 % quand le Canada est à 40 %. L'effet sur la société est lourd quand le ratio se dégrade -c'est le cas en France.

M. Jean Germain.  - Personne ne conteste la nécessité de contenir les dépenses publiques, de stabiliser le nombre de fonctionnaires, ce qui est fait, me semble-t-il. Il s'agit ici du GVT, c'est-à-dire de la carrière. On a entendu récemment le nouveau responsable national de l'UMP remettre en cause le statut des fonctionnaires et prôner des CDD de cinq ans. Comprenez nos inquiétudes, nos interrogations...

Trop de fonctionnaires ? C'est la réponse populiste classique mais dit-on qu'il y a trop d'enseignants, de policiers, de pompiers, de magistrats, de gendarmes ? Non, il n'y en a jamais assez !

Bien sûr, il faut s'occuper du management de la fonction publique...

M. Gérard Longuet.  - Mais on ne le fait pas !

M. Jean Germain.  - ...décloisonner les corps, faire des passerelles, peut-être même entre fonction publique d'État et fonction publique territoriale.

Depuis vingt ans, l'amplitude des rémunérations s'est tassée. Qui n'est pas fonctionnaire à un parent, un enfant, un petit-enfant qui l'est. On commence à recruter en catégorie A au niveau du Smic. Plafonner en plus le GVT, c'est difficile. Il faut que les fonctionnaires continuent à fonctionner, avec enthousiasme. On ne peut leur dire en permanence qu'ils sont en surnombre, qu'ils sont des privilégiés ultra-protégés. Les policiers courent des risques, les enseignants aussi ! Cessez de considérer qu'ils vivent dans une bulle !

À la demande du groupe CRC, l'amendement n°II-271 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°59 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 287
Pour l'adoption 146
Contre 141

Le Sénat a adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-51, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

Dont Titre 2

 

 

0

 

 

200 000 000

200 000 000

 

 

0

 

 

200 000 000

200 000 000

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières Dont Titre 2

0

0

0

0

Facilitation et sécurisation des échangesDont Titre 2

0

0

0

0

Entretien des bâtiments de l'État

0

0

0

0

Fonction publiqueDont Titre 2

0

0

0

0

TOTAL

0

200 000 000

0

200 000 000

SOLDE

- 200 000 000

- 200 000 000

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - L'explication vaudra aussi pour l'amendement n°II-52.

L'efficacité du jour de carence, instauré dans la loi de finances pour 2012 et supprimé l'an dernier, est démontrée. Selon l'Insee, il a considérablement réduit l'absentéisme, notamment dans la fonction publique hospitalière. L'économie a été chiffrée à 164 millions d'euros sur une année pour les trois fonctions publiques.

Deuxième argument, l'équité entre le secteur privé et le public. Certes, des conventions collectives prévoient une prise en charge mais cela ne concerne en général que des salariés en CDI, qui payent une cotisation pour cette protection. Une clinique privée n'a pas de protection au titre du jour de carence, contrairement à l'hôpital. Il y a d'autres avantages dans la fonction publique d'État, à commencer par la garantie de l'emploi. La suppression du jour de carence était à la fois inéquitable et inefficace. D'où notre proposition d'instaurer trois jours de carence dans la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Avis défavorable. J'ai une autre analyse des chiffres. Pour la fonction publique d'État, il y a eu un léger effet sur les enseignants et dans la fonction publique hospitalière mais à zéro virgule epsilon près, les chiffres sont identiques.

En outre, selon l'étude de l'Insee à laquelle vous vous référez, la baisse de l'absentéisme a été « compensée » par la hausse des congés de plus longue durée, des accidents du travail et des maladies professionnelles. Les consultations médicales ont augmenté, et l'arrêt est alors automatiquement de trois jours. Couplé à l'augmentation des franchises, le jour de carence c'est 80 euros en tout -plus la garde des enfants. Le réflexe, c'est un arrêt plus long. Les fonctionnaires ne s'amusent pas à être absents tout le temps. Il y a plus d'absences dans les cliniques, comme dans les hôpitaux ou le BTP. Bref, partout où le travail est difficile...

Dès qu'on commence à comparer avec le privé, les assureurs, dont Safaxis qui est à l'origine de l'étude que vous avez citée, vont trouver un marché pour développer l'assurance privée !

Mme Marie-France Beaufils.  - Bien sûr !

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - La protection sociale privée, est-ce que la dépense publique doit l'encourager ? Ne rajoutons pas au sentiment d'indignité des Français...

Mme Marie-France Beaufils.  - Très bien !

M. Michel Canevet.  - Le groupe UDI votera cet amendement car il rejoint un principe d'égalité -mot qui figure dans la devise de la République. Il n'y a pas de raison que certains soient exemptés des jours de carence que d'autres supportent. L'instauration de la journée de carence a fait ses preuves : en 2012, on a constaté 43 % d'absentéisme en moins dans la fonction publique hospitalière, 40 % dans la fonction publique territoriale. Les directeurs d'hôpitaux ont salué la mesure. Aux employeurs, le cas échéant, de souscrire une assurance pour couvrir ce type de risque. Tout ce qui va dans le sens d'un ticket modérateur nous convient.

Mme Marie-France Beaufils.  - Mme la ministre a bien montré en quoi votre proposition n'avait rien d'équitable. Regardez donc les arrêts de plus longue durée, les accidents du travail !

Une fois de plus, on se trompe de réponse. Dans la fonction publique d'État, comme dans la fonction publique territoriale, on sait que les arrêts de travail sont liés à de vraies raisons. L'âge moyen des agents a augmenté, cela a des conséquences.

M. Alain Houpert.  - À en croire la ministre, on pourrait croire que le travail est dangereux !

L'amendement n°II-51 est adopté.

Les crédits de la mission ainsi modifiés sont adoptés.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°II-52, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

I.  -  Après l'article 55

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Hormis les cas de congé de longue maladie, de congé de longue durée ou si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, les agents publics civils et militaires en congé de maladie, ainsi que les salariés dont l'indemnisation du congé de maladie n'est pas assurée par un régime obligatoire de sécurité sociale, ne perçoivent pas leur rémunération au titre des trois premiers jours de ce congé.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Il a été défendu.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-52 est adopté, et devient un article additionnel.

ARTICLE 32 État B (Mission « Provisions »)

M. le président.  - Amendement n°II-49, présenté par M. Bouvard, au nom de la commission des finances.

Rédiger ainsi l'intitulé de la mission « Provisions » :

« Crédits non répartis »

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.  - Cet amendement modifie l'intitulé de la mission « Provisions » afin d'éviter toute confusion avec le terme de « provisions » emprunté à la comptabilité générale et répondant à une autre définition.

Il rebaptise la mission « Crédits non répartis », puisque cette non répartition priori des crédits composant les deux dotations constitue leur caractéristique commune. C'est une remarque récurrente de la Cour des comptes.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Le Gouvernement soutient cet amendement de qualité.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances.  - C'est la première fois que le Sénat débat d'un amendement proposant de changer le nom d'une mission.

Cet amendement respecte le cadre fixé par le législateur organique. En effet, l'article 7 de la Lolf prévoit que seul le Gouvernement peut créer une mission et l'Assemblée nationale a ainsi estimé, en 2012, que le changement de nom reviendrait à créer une mission : elle s'est donc refusée à le faire. Je n'ai pas conclu dans le même sens car l'existence même de cette mission est prévue par l'article 7-I de la Lolf : « Une mission spécifique regroupe les crédits des pouvoirs publics, chacun d'entre eux faisant l'objet d'une ou de plusieurs dotations. De même, une mission regroupe les crédits des deux dotations suivantes : premièrement, une dotation pour dépenses accidentelles, destinée à faire face à des calamités, et pour dépenses imprévisibles ; deuxièmement, une dotation pour mesures générales en matière de rémunérations dont la répartition par programme ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits ».

En deuxième lieu, dans le cas d'une mission ordinaire, il faut distinguer entre le changement d'intitulé masquant un changement de périmètre -qui serait susceptible de tomber sous le coup de l'article 40 de la Constitution et des articles 7 et 47 de la Lolf, et les amendements n'ayant qu'une portée sémantique, comme celui-ci. Je l'ai donc jugé recevable. (Applaudissements)

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Très bien.

L'amendement n°II-49 est adopté.

Les crédits de la mission « Crédits non répartis » sont adoptés.

Les crédits du compte spécial sont adoptés.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°II-48, présenté par M. Bouvard, au nom de la commission.

I.  -  Après l'article 64

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 47 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'État procède à l'aliénation d'un terrain de son domaine privé à un prix inférieur à sa valeur vénale en application de l'article L. 3211-7 du code générale de la propriété des personnes publiques, les dépenses d'investissement et de fonctionnement prévues aux a et b du 2° du présent article affectées au ministère occupant de ce terrain sont réduites d'un montant égal à la différence entre le prix de cession effectif et la valeur vénale de ce terrain. »

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Gestion du patrimoine immobilier de l'État

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.  - Dans un souci de respect de la Lolf, il s'agit de tirer les conséquences de loi Duflot du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement qui autorise l'État à céder des terrains de son domaine privé à un prix inférieur à leur valeur vénale. La décote peut atteindre 100 % pour la construction de logements sociaux. L'objectif est légitime et la finalité des logements sociaux n'est pas en cause, mais la politique de cessions décotées ne correspond pas à la vocation du CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », qui est de moderniser le parc immobilier de l'État et de contribuer à son désendettement.

En conséquence, le présent amendement minore d'un montant égal à la décote consentie les dépenses immobilières affectées au ministère qui aura cédé les biens décotés.

Ainsi, ce sont bien les différents ministères -et donc le budget général de l'État- qui assumeront, d'un point de vue budgétaire, les crédits consacrés à la politique en faveur du logement social.

Une soixantaine de dossiers sont en cours d'instruction. En 2014, trois terrains ont fait l'objet d'un acte de cession définitif au 1er septembre : la caserne Martin à Caen, d'une valeur vénale de 4,3 millions d'euros, cédée pour 3,1 millions d'euros, en vue de la construction de 157 logements ; un terrain de 10 600 m² au sein de la ZAC Flaubert à Grenoble, d'une valeur vénale de 3,7 millions d'euros, cédée pour 1 million d'euros, en vue de la construction de 151 logements, et l'ancien commissariat de Saint-Malo, d'une valeur vénale de 1 million d'euros, cédée pour 120 000 euros.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Avis défavorable. La limitation de la capacité à dépendre du ministre cédant est déjà assurée par le principe d'antériorité de la recette sur la dépense, en vertu de la Lolf. Les différents ministères assumeront, du point de vue budgétaire, la moindre recette liée à la décote. Avec votre amendement, ils l'assumeraient deux fois, d'abord en percevant une recette moindre, puis lors de la délégation des crédits à chaque ministère. Retrait ? Sinon rejet, avec regret.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.  - Le sujet est techniquement complexe. Dans la pratique, la réfaction n'est pas directement corrélée à l'enveloppe de chacun des ministères. Je le retire mais le sujet reste à examiner.

L'amendement n°II-48 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-276 rectifié, présenté par M. Bouvard.

Après l'article 64

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 141 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 est abrogé.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Gestion du patrimoine immobilier de l'État

M. Michel Bouvard.  - Vieux sujet, madame la ministre... Je précise d'emblée que ce n'est pas votre majorité qui a créé la Sovafim. Cet amendement met fin à la possibilité, pour l'État, de céder ses actifs immobiliers à la Sovafim en vue de leur valorisation par celle-ci. Cet amendement s'inscrit dans la perspective d'une dissolution prochaine de la Sovafim, qui est une demande récurrente de la Cour des comptes, notamment dans son rapport public annuel 2011.

Cette recommandation n'avait pas alors été suivie par les pouvoirs publics qui, considérant que cette société était à même de remplir plusieurs tâches spécifiques en rapport avec la politique immobilière de l'État, l'avaient jugée prématurée et avaient renvoyé au bilan stratégique 2009-2011, puis à l'élaboration d'un plan de développement 2011-2015.

Dans son rapport 2014, la Cour constate que « la mission initiale de la société, commercialiser les actifs immobiliers devenus inutiles de RFF qui lui avaient été transférés, est aujourd'hui quasiment achevée ». La Cour souligne également que « l'évolution de son activité traduit les difficultés persistantes de son positionnement, dans un contexte où la politique immobilière de l'État a été elle-même évolutive ». Enfin, elle souligne que « la Sovafim n'est pas parvenue à élargir son activité de cession d'actifs immobiliers d'origine publique : les tentatives de diversification de ses partenaires n'ont guère eu de résultats ; les relations avec les ministères sont malaisées et certains dossiers mal engagés ».

Nous connaissons, les uns et les autres, les errances de la Sovafim -l'îlot Saint-Germain, l'Hôtel de la marine, la Défense, etc. À l'évidence, le modèle économique ne tourne pas, la Sovafim ne fait pas l'affaire. Elle a en outre fait l'objet d'une condamnation le 17 juin 2014 de la Cour de discipline budgétaire et financière, pour plusieurs manquements sur plusieurs dossiers.

Même si l'État est actionnaire à 100 % de cette SA, nous ne pouvons décider par nous-mêmes de la suppression de la Sovafim, d'où cet amendement.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - J'entends vos arguments : à croire que plus c'est privé, moins ça marche... Mais une grosse restructuration des locaux du Premier ministre est actuellement en cours. Les travaux vont débuter et il me semble difficile de vous donner satisfaction aujourd'hui. Je m'engage à ce qu'une vraie étude soit conduite à partir de votre question, pertinente. Retrait ?

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances.  - La commission des finances n'a pas examiné cet amendement présenté à titre personnel par son auteur. Je rejoins la ministre : retrait, devant l'engagement de la ministre ?

M. Michel Bouvard.  - Malgré cet engagement, je préfère maintenir l'amendement. Il ne prend effet qu'en 2016. Surtout, il empêche de nouveaux transferts, sans faire obstacle à la restructuration des locaux du Premier ministre. La navette pourra rectifier le tir, s'il apparaissait qu'il perturbe des opérations en cours. Mais cela fait longtemps que le Parlement tire la sonnette d'alarme sur ce sujet. Il faut cesser de nourrir cette structure inutile.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Oui, il est temps de mettre fin à cette bizarrerie administrative et financière que constitue la Sovafim, d'autant que celle-ci peut en outre être utilisée pour dessaisir les collectivités territoriales de leur droit de priorité. Le mécanisme et la société relèvent du paranormal.

L'amendement n°II-276 rectifié est adopté.

Relations avec les collectivités territoriales

M. Charles Guené, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Cette mission, dotée de 2,7 milliards d'euros de crédit, représente moins de 3 % des concours de l'État aux collectivités territoriales. La majeure partie de ces concours sont des prélèvements sur recettes, comme la DGF, et relèvent de la première partie de la loi de finances. La mission recouvre essentiellement les dotations générales de décentralisation en compensation de transfert de compétences et certaines dotations d'investissement, dotation de la politique de la ville ou dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). La commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission modifiés par son amendement et d'adopter le compte d'affectation spécial sans modification.

Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit une baisse de 11 milliards d'euros des concours de l'État aux collectivités territoriales, dont 3,67 milliards en 2015 ; le Sénat a choisi de minorer cette baisse de 1,4 milliard d'euros, pour tenir compte des dépenses imposées aux collectivités territoriales par l'État et du coût de la réforme des rythmes scolaires. Nous craignons en effet que les collectivités territoriales rognent sur leurs projets d'investissements et sur les services offerts à nos concitoyens.

Les autres mesures du projet de loi de finances pour 2015 sont essentiellement destinées à corriger à la marge les effets de la baisse des dotations. Le Gouvernement, conscient des conséquences désastreuses de ses mesures, augmente la péréquation verticale de 228 millions d'euros, portée à 327 millions d'euros par les députés, financée essentiellement par les collectivités ! La commission vous proposera de ralentir la montée en puissance du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) et de diviser par deux la hausse prévue en 2015.

La diversité justifie la solidarité, mais à l'heure où les ressources se raréfient, la péréquation doit voir son efficacité évaluée. Il serait difficile ici, sans visibilité, de modifier les critères. Le Gouvernement a annoncé son intention de réformer la DGF l'année prochaine. Cela ne suffira pas. Comment garantir un système plus juste alors que la révision des bases locatives est au point mort ? Pouvez-vous préciser les annonces récentes du Premier ministre, une hausse de 200 millions d'euros de la DETR et des fonds destinés aux maires bâtisseurs ? Comment ces mesures seront-elles financées ?

M. Jean Germain, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Face à l'effort sans précédent qui est demandé aux collectivités territoriales, il faut se montrer responsable et cohérent, mais aussi entendre les inquiétudes qui s'expriment. La nouvelle majorité sénatoriale a choisi de minorer de 40 % l'effort demandé par le Gouvernement aux collectivités territoriales : je peux le comprendre, mais ce n'est guère cohérent avec les propositions faites au niveau national par des personnalités influentes...

Il est vrai que la baisse des dotations inquiète.

M. Henri de Raincourt.  - C'est sûr !

M. Jean Germain, rapporteur spécial.  - Nous aurions préféré un étalement sur quatre ans. Le risque est que les collectivités territoriales réduisent leurs investissements. Le projet de loi NOTRe entretient le flou pour certaines collectivités, il est temps de clarifier les choses.

Nous soutenons la hausse de la péréquation verticale, et son rythme de progression doublé, afin d'aider les collectivités territoriales les plus vulnérables à passer le cap difficile de 2015. Je me réjouis des annonces du Premier ministre, 200 millions pour la DETR et maintien des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). Pouvez-vous nous en dire plus sur les 100 millions pour les maires bâtisseurs ?

Je regrette que le Gouvernement n'ait pas suivi le Sénat sur les « petites taxes », à l'article 8, car leur suppression envoie un signal très négatif aux collectivités territoriales. La surtaxe à la taxe d'habitation, par exemple, ne sera plus automatique mais devra être décidée par les organes délibérants. C'est de bonne politique !

Les amendements de la commission des finances visent notamment à garantir aux communes qui bénéficient de la fraction bourg-centre de la DSR qu'elles continueront à en bénéficier après 2017. Nous revenons également sur la diminution de 1 million d'euros des crédits de la mission, votée par les députés. C'est symbolique mais les considérations psychologiques ne sont pas à négliger !

Nous vous proposons d'adopter sans modification les crédits de la mission et du compte spécial.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteure pour avis de la commission des lois .  - Je vous présente les conclusions du riche débat en commission des lois. Elle prend note que les collectivités territoriales seraient soumises à un effort inédit de contribution à la réduction des finances publiques, de 11 milliards d'euros entre 2015 et 2017, après un gel des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales entre 2011 et 2013 et un prélèvement de recettes de 1,5 milliard en 2014. Ce qui se combine avec la réforme de la taxe professionnelle qui a grevé le dynamisme de l'impôt économique.

La dette locale représente moins de 10 % de la dette publique totale, sachant qu'elle est liée à la politique d'investissements des collectivités, puisqu'elles ont l'obligation de voter des budgets en équilibre.

L'État participe-t-il à cet effort à la hauteur de la dette publique dont il est à l'origine ?

M. Philippe Dallier.  - La réponse est non !

Mme Jacqueline Gourault, rapporteure pour avis.  - En effet, nous en doutons, mais nous vous demanderons, madame la ministre, des précisions.

La montée des dépenses sociales, la prolifération des normes, les nouveaux règlements scolaires ont des conséquences dramatiques sur les collectivités territoriales, en particulier les communes de plus de 10 000 habitants, comme l'a montré le rapport de M. Dallier.

On comprend que les collectivités locales sont encouragées à moins dépenser. Elles exercent toutefois des compétences qui leur sont dévolues par la loi et investissent. De quelles alternatives disposent-elles pour continuer à investir ? Diminuer les services rendus à la population ? Diminuer les dépenses de personnel ? Certaines le font, madame la ministre, vous le savez.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Oui.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteure pour avis.  - La mutualisation n'est pas un vain mot mais elle a ses limites. Madame la ministre, il faut préciser où vous pensez que nous avons davantage d'économies à faire.

De la réforme territoriale voulue par le président de la République, nous débattrons bientôt. Les ressources ne sont pas à la hauteur des transferts de compétences économiques que vous voulez opérer vers les régions, alors que l'autonomie fiscale n'a cessé de régresser au profit des dotations de l'État.

La commission des lois a donné un avis défavorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements au centre et sur quelques bancs à droite)

M. Christian Favier .  - Cette mission ne recouvre qu'une infime partie des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, 2,7 milliards d'euros en autorisations d'engagements, soit moins de 3 % des 101 milliards d'euros de transferts financiers de l'État en faveur des collectivités territoriales. Cette modicité ne l'empêche pas de baisser, de 1 % tout de même, à évaluer au regard de l'évolution de son périmètre.

J'ai en mémoire le débat sur le projet de loi de finances 2012 élaboré par le gouvernement Fillon alors que, venant d'être élu sénateur, je dénonçai une réduction spectaculaire de 80 % des aides aux collectivités territoriales fragilisées par des événements météo exceptionnels, hélas toujours d'actualité. Voyez la baisse du programme 122 !

Depuis lors, les gouvernements ont changé mais les budgets continuent à baisser. Après deux ans de gel des dotations, nous venons de vivre, en 2014, une première baisse de 1,5 milliard, puis trois années s'annoncent de baisse de 3,7 milliards par an, qui s'ajoutent aux contraintes accumulées depuis des décennies. À ce rythme, 28 milliards d'euros auront été soustraits aux collectivités territoriales en 2017...

Depuis plus de dix ans, en effet, bien des mesures ont placé les collectivités territoriales dans la tourmente : transfert du RSA, de l'APCH, des routes, des personnels des collèges et lycées... La tâche des élus n'a jamais été aussi difficile, dans une situation économique et sociale dégradée. Le chômage, la précarité, le ralentissement économique et la désindustrialisation ont affecté les capacités d'intervention de nos collectivités territoriales, alors que la demande sociale explose. Je tiens à saluer leur engagement, alors que certains n'ont de cesse de critiquer leur gestion, avec des accents populistes. Les élus locaux font des efforts de maîtrise financière et ne sont en rien responsables de la dette de notre pays, puisqu'ils n'empruntent que pour investir. Pour le RSA, près de 50 milliards d'euros ont dû être dégagés sur leur propre budget, alors que les gouvernements ont allégé la fiscalité des entreprises et des particuliers, créé moult niches fiscales au service d'intérêts particuliers. Les collectivités territoriales, leurs élus, n'ont pas de leçon de bonne gestion à recevoir. Elles seront contraintes de réduire leurs investissements et les services à la population, en augmentant les impôts et les tarifs des services publics locaux.

Nous, élus communistes, refusons ce désengagement, cette spirale du déclin. Nous ne voterons pas le budget de cette mission. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jacques Mézard .  - On ne peut aborder les relations de l'État avec les collectivités territoriales sans évoquer la baisse des dotations de l'État tout d'abord.

Jacqueline Gourault a rappelé le travail que nous avons réalisé avec Charles Guené et Philippe Dallier, qui montre que les conséquences seront bien plus importantes que ne l'a dit l'exécutif. On revient plus de dix ans en arrière. Des collectivités seront en situation de double déficit. Madame la ministre, comment le Gouvernement fera-t-il face à cette impasse financière de certaines collectivités territoriales ?

Nous pouvons comprendre l'objectif de la réduction des dépenses de fonctionnement, mais il revient à l'État de faire preuve de cohérence et de cesser d'imposer des transferts de compétences et de charges toujours plus lourds. Ainsi, la suppression, compréhensible, de la journée de carence alourdit les charges des collectivités territoriales.

Les dotations de l'État sont distribuées en vertu d'un système devenu illisible, d'une complexité exceptionnelle -tant que nous pouvons encore cumuler un mandat local et un mandat national, nous sommes bien placés pour le savoir. Il eût fallu commencer par la réforme de la fiscalité locale et de la dotation de l'État, madame la ministre ! C'est une question de clarté et de justice.

La péréquation est la conséquence d'un système de ressources des collectivités territoriales injuste, contraire à toute politique d'aménagement du territoire -mais existe-t-elle encore ? Les intérêts divergent, nous le voyons à la lecture de certain amendement.

Personne ne peut nier les disparités considérables qui existent, qui n'ont été corrigées que très partiellement par la péréquation horizontale et verticale. Nous ne pouvons, à ce propos, cautionner le ralentissement du FPIC.

Sur l'articulation de ce budget avec les réformes territoriales engagées, il n'y a aucune cohérence entre les finances locales, les concours de l'État et ces réformes.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Ce n'est pas gentil.

M. Jacques Mézard.  - Il n'y a aucune logique. L'État doit modifier sa politique. Nous ne pouvons accepter de voter cette mission. (Applaudissements sur les bancs RDSE, au centre et à droite)

M. Vincent Capo-Canellas .  - La baisse des dotations de l'État inaugure une nouvelle ère de l'histoire des finances publiques locales. Nous devons compenser avec toujours plus d'ingéniosité, face à la rareté de l'argent public local. Les bouleversements de la carte territoriale et des compétences appelaient une profonde réforme de la DGF, annoncée à l'automne 2013. L'État impose des efforts d'économies considérables, en baissant ses dotations.

Le rapporteur général a défini un nouvel équilibre à l'article 9 afin de compenser les transferts de charges et les coûts induits par les nouvelles normes imposées par l'État depuis deux ans, y compris les nouveaux rythmes scolaires.

Nous avons identifié un risque sur les taux d'imposition et un autre sur les investissements.  Nous avons fixé l'équité comme principe directeur de toute réforme ; équité entre territoires, entre collectivités territoriales.

D'où ce débat approfondi sur la péréquation horizontale, après le débat de la semaine dernière sur la péréquation verticale. Le groupe UDI-UC y est favorable. Tout de même, les nouvelles règles ne sont pas sans influence. Certaines collectivités font face à un redoutable effet de ciseaux : c'est la quadrature du cercle ! Il faut composer, faire avec, alors que la baisse des dotations est durement ressentie. C'est cette équation particulièrement difficile que le Sénat devra examiner et résoudre pour sortir de l'aporie financière, dans le contexte actuel d'incertitude.

La péréquation, de contribution qu'elle devait être, devient parfois une simple sanction...

D'importantes évolutions interviennent dans les compétences, qui compliquent l'accès à la péréquation. Il faut mener une réflexion, parallèle à la réforme de la DGF, sur les critères d'éligibilité.

Je salue le travail de la commission des finances et de la commission des lois. Nous avons un intérêt collectif à ne pas voter ce budget dans son état actuel. Le groupe UDI-UC appelle à dépasser les clivages traditionnels entre petites et grandes communes, Ile-de-France -où je suis maire de banlieue et où les situations sont contrastées- et autres régions, collectivités prospères et celles qui le sont moins. J'espère que nous arriverons au consensus sur le lissage de la montée en puissance du FPIC. Cela me parait prudent. Définissons un calendrier de travail pour les prochains mois, en respectant l'équité entre les territoires. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

M. Éric Doligé .  - Le chômage progresse, la compétitivité décline, la dette augmente et l'État ne peut plus redresser la situation.

Voix à droite.  - Comme d'habitude !

M. Éric Doligé.  - Le Gouvernement a annoncé 50 milliards d'économies, à ventiler entre éducation, santé et collectivités territoriales. L'économie la plus facile est celle que vous imposez aux collectivités territoriales, qui ne maîtrisent plus leurs recettes, qui passent par la case État. On appellerait cela, dans un autre contexte, du racket.

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - Oh !

M. Éric Doligé.  - Oui, vous étranglez les collectivités, leurs investissements vont s'effondrer. Toutes les études le montrent et nous connaissons les réalités du terrain. La courbe du chômage n'est pas près de s'inverser, avec les faillites dans le secteur du BTP qui ne manqueront pas de suivre.

Vous avez instauré un système pervers d'augmentation des DMTO, en annonçant que ce n'était pas un impôt nouveau, que cela ne se verrait pas. Je peux vous garantir que cela se voit et que les ménages le ressentent.

Dans mon département, la sommes des DMTO perçus ne couvre que 27 % du taux d'accroissement du reste à charge pour les dépenses sociales.

La péréquation devrait s'appuyer sur de véritables critères de bonne gestion. Où en est-on sur les CPER ? En raison du retard pris, les préfets poussent les départements à des co-financements.

Cette mission, qui porte le beau titre de « Relations avec les collectivités territoriales », devrait vous interpeller, alors que les communes ont signé 13 000 pétitions.

Nous acceptons 2,5 milliards de baisse, nous ne pouvons accepter 3,7 milliards même si nous voulons participer à l'effort national. Nous regrettons les mauvaises relations établies avec les collectivités territoriales. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Marylise Lebranchu, ministre.  - D'où tenez-vous cela ?

M. Didier Marie .  - La situation économique de la France est fragile, nous le savons. L'effort de maîtrise de la dépense est important, équitable et nécessaire. Nous sommes responsables. Certains ici voudraient qu'il soit plus important : on voudrait le doubler, le tripler au total, sans que cela touche les collectivités territoriales ? Allons ! Personne n'y croit...

Le Gouvernement a choisi le sérieux et la justice ; l'effort est significatif, certes, mais les ressources fiscales des collectivités bénéficient de l'évolution positive des bases. (Mme Cécile Cukierman proteste)

Le Gouvernement propose, en cette période difficile, de soulager les collectivités les plus fragiles par une augmentation de la péréquation. Nous étions nombreux à demander que le FCTVA soit sorti de l'enveloppe normée globale. C'est fait et c'est une bonne nouvelle. Les bases fiscales seront revalorisées de 0,9 %, soit 500 millions d'euros, alors que l'inflation est faible : autre bonne nouvelle. Le fonds de péréquation pour les rythmes scolaires est pérennisé : bonne nouvelle à nouveau.

M. Antoine Lefèvre.  - Tout va bien, alors !

M. Didier Marie.  - Monsieur le secrétaire d'État, quelles suites entendez-vous donner à l'amendement de M. Pupponi à l'Assemblée nationale, auquel je suis favorable, relatif à la DSU ? Nous connaissons la fragilité économique et sociale des communes concernées. Elles ont besoin de la solidarité nationale.

Les règles de répartition du FPIC doivent être assouplies. Quelles sont vos intentions pour les améliorer, monsieur le secrétaire d'État ?

Dans mon département, de nombreuses communes seraient pénalisées, dont le FDPTP représente une part importante des ressources.

Christian Eckert a dit, au Congrès des maires, que la DGF est non seulement injuste mais aussi illisible et totalement déresponsabilisante. Sa refonte totale est nécessaire pour la clarté et l'équité. Le Gouvernement y est prêt, nous aussi : quel sera le calendrier ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Bernard Fournier .  - Trop fort et trop brutal, voilà comment je qualifierai d'emblée ce budget. Certes, la discipline budgétaire s'impose, mais cette réduction des concours de l'État aux collectivités territoriales est sans précédent. Vous connaissez les chiffres. 70 % de l'investissement public vient des collectivités territoriales. Cette baisse aura des conséquences importantes sur l'emploi et l'activité des territoires. Récemment les maires de France ont lancé un cri d'alarme. La baisse des dotations ralentira le développement économique, qui va stagner puis se contracter inéluctablement. Selon certaines estimations, l'investissement public pourrait se contracter de 20 % ! Le BTP a déjà perdu 30 000 emplois en deux ans. Les infrastructures, les routes, les crèches sont menacées.

Je suis inquiet quand j'entends dire que la baisse des ressources des collectivités serait compensée par une évolution positive des recettes fiscales. Après que le Gouvernement a parlé de ras-le-bol fiscal et que le président de la République a annoncé qu'il n'y aurait plus de nouvelle hausse d'impôt d'ici la fin de son mandat, est-ce à dire que le Gouvernement invite les collectivités territoriales à augmenter les impôts locaux ?

M. Michel Canevet.  - Eh oui !

M. Bernard Fournier.  - Quant à la réforme des rythmes scolaires, elle conduit à son tour à l'impasse financière. L'État impose des dépenses nouvelles qui doivent être compensées. C'est pourquoi je voterai l'amendement présenté pour minorer de 1,2 milliard d'euros la baisse des dépenses de 3,7 milliards et je ne voterai pas ce budget. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Georges Patient .  - Devant le silence sur les relations avec les collectivités territoriales d'outre-mer, il nous appartient, à nous, ultra-marins, de le rompre, fut-ce dans l'espace si restreint qui nous est dévolu.

Vous avez voulu une France diverse, l'article 73 de la Constitution prévoit une adaptation législative, encore faut-il en tenir compte et ce n'est pas le cas actuellement.

Dans le domaine des finances locales, un zeste de droit commun cohabite avec des exceptions, justifiées par des « spécificités » renvoyant à une comparaison avec la situation des collectivités de métropole et non par des « caractéristiques et contraintes particulières », selon la lettre de la Constitution, qui renvoient aux réalités de terrain, outre-mer. C'est une façon de refuser de voir la réalité : le PIB ou l'IDH est bien moindre dans les outremers qu'en métropole. Il en résulte une double, voire une triple peine. Pour la dotation de base des communes de Guyane, on applique intégralement le droit commun... Les fonctionnaires de l'Insee refusent d'aller recenser la population dispersée, car ce serait dangereux. On n'applique pas même l'extrapolation pratiquée en métropole pour les gens du voyage !

Au titre de la dotation super?ciaire, la Guyane ne perçoit que 1,44 euro par habitant, alors que toutes les communes de métropole perçoivent 3,22 euros et les communes de montagne, en raison de leurs « contraintes », 5,37 euros.

Bref, on applique le droit commun outre-mer quand il est nous défavorable, pas quand il est favorable. Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà...

Philippe Seguin l'avait bien vu. Se focaliser sur les recettes est réducteur. Les outremers font face à des charges beaucoup plus élevées qu'en métropole, en raison d'une situation économique et sociale beaucoup plus tendue qu'en métropole et de leur environnement.

Mon rapport rendu en septembre 2014, à la demande du président de la République et de trois ministres, contient 41 propositions pour mieux partager les efforts et adapter les dotations aux réalités locales. Elles sont en cours d'analyse, paraît-il. Espérons qu'elles ne le resteront pas éternellement. J'y reviendrai.

Nous voulons être associés aux groupes de travail qui préparent la réforme de la DGF et de la fiscalité locale comme à toutes les instances compétentes en finances locales. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Daniel Laurent .  - Ce budget s'inscrit dans un contexte de rigueur sans précédent. S'il est légitime que les collectivités territoriales prennent leur part de la maîtrise des dépenses publiques, encore faut-il que l'État cesse de leur imposer de nouvelles charges et compétences non compensées. Les collectivités prennent largement leur part.

Saluons le travail du Sénat, qui a atténué la baisse des recettes en provenance de l'État de 1,4 milliard d'euros en première partie de loi de finances. Quant à la péréquation horizontale, la hausse de 230 millions d'euros a été revue à la baisse par la commission des finances. Nous n'avons de cesse de le rappeler : les collectivités locales contribuent à l'investissement public pour plus de 70 %.

Éric Doligé l'a évoqué, la Banque postale a montré que l'investissement des collectivités locales baisse comme jamais depuis la décentralisation. La pression fiscale locale ne pourra qu'augmenter. Les élus sont d'autant plus inquiets qu'ils ont prévu d'investir. Il nous faudra anticiper pour répondre aux demandes de nos concitoyens, en assurant une péréquation équitable. Je ne voterai pas les crédits de cette mission. (Applaudissements à droite)

M. Philippe Paul .  - Je veux évoquer la situation des communes qui sont loin d'être privilégiées mais contribuent au FPIC. Les finances de Douarnenez, dont je suis maire, sont fragilisées. Au cours de mon dernier mandat, je n'ai pas souhaité augmenter les impôts locaux car les taux y sont déjà proches de la limite supérieure de sa strate et la population y est modeste, comme en atteste un revenu fiscal par foyer inférieur à la moyenne départementale et une proportion de foyers imposables à l'impôt sur le revenu inférieure de 7 points à la moyenne nationale. Or, nous contribuons au FPIC, au motif du « potentiel financier agrégé » de notre petite commune. Soit. Mais, en 2015, le prélèvement sera proche de 250 000 euros, soit trois fois plus qu'il y a deux ans ! Nous sommes très favorables à la péréquation. Encore faut-il que le mécanisme mis en oeuvre soit juste. Là, c'est la double peine...

Je vous demande, monsieur le ministre, de réfléchir et de revenir sur les débats que provoque ce fonds et de rechercher des solutions équitables pour les petites communes comme la mienne, qui ne cessent de faire des efforts pour redresser leurs finances fragiles et pourtant sont pénalisées par un mécanisme aussi brutal dans son application qu'il est généreux dans son principe. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Didier Mandelli .  - En 2014, l'investissement des collectivités a chuté de 7,4 %. En 2013, il progressait de 4,8 %. Pour les communes de moins de 5 000 habitants, la demande de prêts a baissé de 20 %. Cette chute est la plus forte depuis trente ans. Les collectivités territoriales seront privées dès 2015 de 3,7 milliards d'euros, ce que dénoncent les élus. François Baroin, président de l'Association des maires de France, a alerté contre les risques majeurs de cette situation pour les collectivités territoriales, qui ne pourront plus s'autofinancer. L'ARF dénonce deux poids deux mesures dans le traitement des collectivités locales. L'ACF, quant à elle, appelle à la soutenabilité de l'effort et alerte sur le risque récessif pour l'investissement public. 10 à 15 % des communes et départements seront dans une situation très difficile l'année prochaine.

La relance est menacée. L'emploi local, dépendant des commandes des collectivités territoriales, en souffrira inévitablement. En Vendée, 750 emplois sont directement menacés dans le BTP, qui s'ajoutent aux 450 déjà supprimés... C'est une spirale négative, avec de moindres recettes fiscales à la clé.

Mise en place des rythmes scolaires, transferts de charges nouvelles, revalorisation des catégories C : comment les collectivités territoriales s'en sortiront-elles ? Elles n'auront d'autres choix que d'augmenter les impôts locaux. Les 500 000 élus, qui sont les fantassins de notre République, sont ébranlés et doutent. Quelle occasion manquée... (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - L'effort de redressement des comptes publics prévoit 50 milliards d'économies sur trois ans. Tous les acteurs publics en prendront leur part. Le niveau des dotations aux collectivités territoriales baissera de 11 milliards, répartis entre communes, départements et régions.

Cet effort est important, le Gouvernement ne le sous-estime pas. Mais il est juste : les collectivités territoriales contribuent à hauteur de leur poids dans la dépense publique. Il correspond à 1,6 % des recettes totales des collectivités territoriales en 2013 : ce n'est pas neutre, mais ce n'est pas l'étranglement que certains dénoncent. En contrepartie, la péréquation est renforcée pour les communes et les départements -son rythme d'augmentation est doublé.

La revalorisation de 0,9 % des bases fiscales abondera les budgets des collectivités territoriales de 1 milliard supplémentaire. Le produit de la CVAE augmente de 2,7 %. Les mesures touchant le FCTVA abondera les budgets de 192 millions au total -dont 166 millions grâce à la sortie de l'enveloppe normée de l'augmentation 2015.

Le Gouvernement propose en outre de pérenniser la possibilité offerte aux départements d'augmenter les DMTO : ce sera 130 millions d'euros de plus ; la revalorisation du barème de la taxe de séjour rapportera 150 millions d'euros aux communes.

L'Observatoire des finances locales évalue à 58 milliards d'euros l'effort d'investissement des collectivités territoriales en 2013. La tendance est à la hausse depuis 2011. Cet effort est essentiellement communal et sensible au cycle électoral : il pourrait donc baisser de 9 % en 2014 et de 4 % en 2015... Phénomène classique depuis des décennies.

Le Gouvernement soutient néanmoins l'investissement local avec les la suppression de la réfaction de 0,9 point, pour 26 millions ou la prise en charge de l'évolution du FCTVA hors enveloppe normée. Le Premier ministre a, en outre, annoncé 200 millions supplémentaires pour le DETR, plus 100 millions d'aide aux maires bâtisseurs, soit 2 000 euros de plus par logement créé. Avec la pérennisation du fonds de 400 millions au-delà de 2015-2016, la prise en charge des activités périscolaires représentera 50 euros par élève, conditionnée par la signature d'un plan éducatif territorial.

La réforme de la DGF interviendra en projet de loi de finances pour 2016. En 2015, la DGF est simplifiée pour améliorer la clarté et l'équité de sa répartition. La contribution de chaque commune sera plafonnée à 3 % de la dotation forfaitaire. Pour les départements, l'écrêtement sur une assiette plus large permettra de mieux répartir l'effort.

La réforme de la DGF sera préparée en 2015 ; elle s'appuiera sur les travaux d'une mission parlementaire. La DGF sera plus lisible, plus prévisible et plus juste.

Monsieur Patient, pourquoi ne pas étudier, au sein du CFL, l'idée d'introduire de la péréquation dans la répartition de la quote-part DSU-DSR outre-mer ? La remise du rapport sur le FPIC sera l'occasion d'examiner cette répartition et ses effets par rapport à un traitement de l'outre-mer de droit commun. La proposition d'un taux variable de la redevance des mines en fonction des cours de l'or mérite examen en relation avec le ministère de l'écologie. La baisse de la DGF pour les régions d'outre-mer est ramenée à 0,61 % de leurs recettes totales contre 1,91 % pour les régions de métropole. Les crédits de la DETR sont majorés de 200 millions. Le budget du ministère des outre-mer progresse de 7,6 % sur le triennal. Le taux du CICE est majoré outre-mer et les crédits d'État au titre des CPER augmentent de 180 millions.

L'effort demandé aux collectivités territoriales est important, nous le mesurons tous. Je sais les élus en alerte, je sais que vous êtes tous sollicités par les élus locaux. Le Gouvernement est attentif à vos préoccupations. L'effort de redressement s'impose à tous. Les choses bougent déjà, grâce à l'inventivité des élus : je pense aux mutualisations entre le Loiret, l'Eure-et-Loir et le Loir-et-Cher, entre la Drôme et l'Ardèche, ou encore aux communes nouvelles, chères à M. Mercier.

Le Gouvernement salue les efforts de rigueur et de maîtrise de la dépense des élus locaux. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La séance, suspendue à 18 h 45, est reprise à 18 h 55.

ARTICLE 32 État B

M. le président.  - Amendement n°II-287, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

 

 

210 767 132

 

 

 

46 167 132

 

Concours spécifiques et administration

 

67 729

 

 

67 729

 

TOTAL

 210 834 861

46 234 861

SOLDE

+ 210 834 861

+ 46 234 861

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Cet amendement procède à plusieurs corrections des compensations versées aux collectivités territoriales, notamment d'outre-mer, dans le cadre des transferts de compétences et de services. Le Gouvernement souhaite soutenir l'investissement local, notamment dans les zones rurales. Il majore ainsi la DETR, conformément à l'engagement du Premier ministre, avec une ouverture de 200 millions d'euros d'autorisations d'engagements et de 35,4 millions d'euros de crédits de paiements supplémentaires.

M. Jean Germain, rapporteur spécial.  - Avis favorable à cet amendement qui traduit l'engagement du Premier ministre d'augmenter la DETR de 200 millions d'euros.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Cet argent est pris sur le FDPTP, n'est-ce pas ?

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Non, nous sommes hors enveloppe normée. C'est une taxation interministérielle, comme disent les spécialistes...

M. Pierre Jarlier.  - C'est une bonne nouvelle pour le secteur rural dès lors que cette somme n'est pas prélevée sur d'autres dotations. Cela encouragera l'investissement et répondra aux attentes des élus. Je voterai cet amendement.

L'amendement n°II-287 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-58, présenté par M. Guené, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

 

 

 

 

Concours spécifiques et administration

1 000 000

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000 

 

1 000 000 

 

SOLDE

+ 1 000 000

+ 1 000 000

M. Charles Guené.  - Cet amendement revient sur la baisse de 1 million d'euros des crédits des travaux divers d'intérêt local, votée à l'Assemblée nationale, qui s'ajoute à la réduction déjà considérable des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Cette minoration de 1 million gage des dépenses nouvelles votées par les députés. L'imputation sur les TDIL est justifiée par les moindres besoins anticipés en 2015.

L'amendement n°II-58 est adopté.

Les crédits de la mission sont adoptés.

Les crédits du compte spécial sont adoptés.

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 58

M. le président.  - Amendement n°II-249 rectifié, présenté par MM. Dallier et del Picchia, Mme Duranton, MM. Grosperrin et Houpert, Mme Hummel, MM. Husson, Laufoaulu et Lefèvre, Mme Lopez et MM. Mandelli, Milon et Panunzi.

Avant l'article 58

Insérer un article ainsi rédigé :

La première phrase du dernier alinéa de l'article L. 2334-18-2 du code général des collectivités territoriales est supprimée.

M. Philippe Dallier.  - Cet amendement est à somme nulle. Depuis la réforme de 2009, la progression de la DSU est ciblée sur les 250 communes les plus pauvres. Pour les autres, la DSU est indexée sur l'inflation si l'on est en haut du tableau, figée si l'on est en bas. Or les communes peuvent gagner de la population, construire du logement social. Pour le calcul de la DSU base, l'amendement prend en compte le montant qui correspond au classement de la commune selon l'indice synthétique. Il faut sortir ces communes de la glaciation.

M. Charles Guené, rapporteur spécial.  - La réforme de la DGF aura lieu l'an prochain. Nous avons préféré ne pas donner suite aux amendements dont l'impact n'est pas évalué. Dans ce cas précis toutefois, avis de sagesse.

M. Philippe Dallier.  - Positive ?

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Votre souci de mieux répartir la DSU de base est légitime. Mais vous revenez sur les modalités de répartition de la DSU, qui faisaient consensus, et sans l'avis du CFL. 245 communes de plus de 10 000 habitants bénéficient de la garantie de non-baisse de la DSU, vous risquez de modifier leur attribution. La question que vous soulevez sera étudiée dans le cadre de la réforme de la DGF.

M. Philippe Dallier.  - La garantie de non-baisse est en réalité une certitude de non-hausse ! Les communes éligibles à la DSU base contributrices au FPIC voient leur DSU bloquée. Ce n'est pas justifiable. Je souhaite que le Gouvernement regarde la question de près d'ici la CMP. La DSU base est le seul mécanisme de péréquation ayant été figé. Cela pénalise de nombreuses communes, pas seulement en Seine-Saint-Denis : c'est aussi un problème à Bagnères-de-Bigorre !

L'amendement II-249 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 58

Mme Cécile Cukierman .  - Après les votes de la majorité sénatoriale, la minoration des dotations aux collectivités territoriales est moins importante que prévue, d'environ 1 milliard. Malgré les 13 000 pétitions votées par les conseils municipaux, la majorité en a admis le principe. La pilule est un peu moins amère mais il faut tout de même l'avaler...

Les amendements présentés ont pour seul point commun de limiter la casse. D'aucuns défendent les communes rurales, d'autres la DSU, d'autres encore les communes guyanaises... Pour celles-ci, le plafonnement de la dotation superficiaire doit être abandonné.

Quelle place pour les communes rurales ? Quelle prise en compte des caractéristiques géographiques et démographiques, qu'il s'agisse de la montagne ou de l'outre-mer ? Quid des bourgs ruraux qui ne seront plus chef-lieu de canton ? Il fallait voter pour le maintien de la dotation forfaitaire de 2014 en euros courants. Je regrette que cela n'ait pas été fait.

Des pistes restent à explorer, de nouveaux outils de péréquation à trouver. La disparition de la taxe professionnelle n'a pas réglé les inégalités entre entreprises devant l'impôt. Sans impôt économique suffisamment efficace et juste, il n'y aura pas de réelle autonomie des collectivités locales. Donnons du temps au temps, d'autant qu'une mission parlementaire va être constituée.

M. le président.  - Amendement n°II-277, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Cécile Cukierman.  - Je l'ai défendu.

M. Charles Guené, rapporteur spécial.  - Je salue la position constante du groupe CRC... Cet amendement est incompatible avec la position de la commission des finances. Avis défavorable.

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Cet amendement pénaliserait l'ensemble des collectivités territoriales. Les communes nouvelles ne bénéficieraient plus de la garantie du maintien de la dotation forfaitaire, ce qui découragerait les rapprochements...

Mme Cécile Cukierman.  - C'est vrai.

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Aucune dotation de péréquation ne pourrait plus augmenter. Enfin, le soutien apporté aux régions d'outre-mer et à la collectivité de Corse serait supprimé.

Mme Cécile Cukierman.  - Certes, mais ne nous accusez pas d'arracher le pansement sur les plaies que vous avez-vous-mêmes ouvertes ! Le financement des collectivités territoriales est à repenser dans son ensemble.

M. René-Paul Savary.  - Je veux dire mon mécontentement d'élu local. Les baisses de dotation sont contreproductives : les collectivités les plus grasses pourront faire des économies mais les plus rigoureuses, celles qui ont déjà comprimé leurs charges de fonctionnement, supprimé du personnel, seront pénalisées. Cela se traduira par une chute de leur épargne brute et donc de l'investissement. Même si elles ne sont pas fortement endettées, leur épargne nette ne leur permet plus de déduire leur amortissement.

Les baisses de dotation sont aussi provocatrices : on force les collectivités territoriales à apporter un financement pour pouvoir signer les contrats de projets, où on leur fait payer des compétences de l'État, les routes nationales ou l'enseignement supérieur.

Elles sont enfin inflationnistes sur le plan fiscal, puisque les collectivités territoriales seront contraintes, in fine, à augmenter les impôts locaux -et on les montrera du doigt.

Je ne voterai pas pour autant la suppression de l'article.

L'amendement n°II-277 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-178 rectifié ter, présenté par MM. Houpert, Chaize, del Picchia, Pellevat et Panunzi, Mme Imbert, MM. B. Fournier, Laufoaulu, Vogel, Morisset, Milon, Joyandet, Reichardt, G. Bailly et Lenoir, Mme Loisier, MM. Cambon et Lefèvre, Mme Deromedi, M. Longuet et Mme Giudicelli.

I.  -  Alinéas 5 et 11

Remplacer les mots :

par un montant compris entre 64,46 € et 128,93 € par habitant en fonction croissante de la population de la commune

par les mots :

par un montant par habitant égal quelle que soit la population de la commune

II.  -  Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au second alinéa du 1° du I de l'article L. 2334-7, les mots : « par un montant de 64,46 euros par habitant à 128,93 euros par habitant en fonction croissante de la population de la commune » sont remplacés par les mots : « par un montant par habitant égal quelle que soit la population de la commune » ;

M. Alain Houpert.  - Cet amendement de justice territoriale propose un même montant de DGF par habitant pour toutes les communes. La progressivité de la DGF ne fait qu'accentuer les inégalités, laissant les communes les moins peuplées seules face à la multiplication des charges publiques et au désengagement de l'État. Une commune peuplée amortit facilement ses investissements, ce n'est pas le cas d'une commune moins peuplée.

Cet amendement se fonde sur la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ainsi que sur le respect du principe de non-discrimination inscrit dans le traité de Lisbonne. Autre principe fondateur de notre République : l'égalité des chances, qui vaut entre les habitants de toutes les communes et fait également partie des principes protégés par le droit européen.

M. le président.  - Amendement n°II-273 rectifié ter, présenté par MM. Jarlier et Kern, Mmes N. Goulet et Gatel et MM. Guerriau, Maurey, Luche et Namy.

Alinéa 10

Remplacer cet alinéa par dix alinéas ainsi rédigés :

3° L'article L. 2334-7 est ainsi modifié :

a) Le 1° du I est ainsi modifié :

- après les mots : « en fonction croissante de la population de la commune », la fin du second alinéa est supprimée ;

- sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :

« Cette dotation de base est, pour chaque commune, le produit de sa population, déterminée en application de l'article L. 2334-2, par une somme de 60 euros pour l'année 2005 et par un coefficient a, dont la valeur varie en fonction de la population dans les conditions suivantes :

« 1° Si la population est inférieure ou égale à 500 habitants, a = 1,15 ;

« 2° Si la population est supérieure à 500 habitants et inférieure à 200 000 habitants, a = 1,15 + 0,38431089 x log (population/500) ;

« 3° Si la population est égale ou supérieure à 200 000 habitants, a = 2.

« Pour le calcul de la dotation proportionnelle à la superficie prévue au 2° de l'article L. 2334-7, la superficie prise en compte est la superficie cadastrée et non cadastrée "hors eaux" et le classement des communes en zone de montagne s'apprécie au 1er janvier de l'année au titre de laquelle la dotation forfaitaire est versée.

« Ces dispositions sont applicables aux communes de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon et aux circonscriptions territoriales des îles Wallis et Futuna. »

b) Il est complété par un III ainsi rédigé :

M. Pierre Jarlier.  - Cet amendement élève au rang législatif les dispositions du CGCT établissant la formule de calcul de la répartition de la dotation de base de la DGF.

Il diminue en outre l'écart entre grandes et petites communes. Ces dernières n'ont pas les ressources nécessaires pour compenser les baisses de dotation. Avec l'amendement, l'écart deviendrait 1,15 à 2 au lieu de 1 à 2. Le Premier ministre, au Congrès des maires de France, s'est ému des écarts de richesses entre communes. Cet amendement va dans son sens.

M. Charles Guené, rapporteur spécial.  - Mettre en débat la question de l'égalité de traitement entre communes urbaines et rurales pourrait m'être sympathique. La commission des finances s'est intéressée à ces questions au cours d'un cycle d'auditions. L'écart actuel est fondé sur l'étude économétrique de 2004 et tient compte des charges de centralité des communes les plus peuplées. Mais les paramètres ont sans doute varié.

Il existe certes des charges de centralité, mais l'écart de 1 à 2 est-il pertinent ? Nous y reviendrons dans le cadre de la réforme de la DGF. Retrait en attendant d'approfondir le débat ? Une partie du montant de la DGF cette année est cristallisée, ce qui prive de portée la mesure proposée. L'amendement de M. Jarlier a la particularité de modifier plusieurs critères, mais il s'applique à des dotations dont les montants sont cristallisés par le présent projet de loi de finances et n'aura donc pas non plus d'effet en 2015. Retrait.

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Ces deux amendements s'inspirent de la même philosophie. Le Gouvernement partage votre souhait de réduire les écarts de DGF par habitant entre grandes villes et petites communes rurales. Le Premier ministre l'a redit devant le Congrès des maires. Mais cette question complexe ne peut être traitée ainsi, par amendement, sans consultation préalable du CFL. Le projet de loi de finances pour 2016 sera le véhicule adapté.

Les écarts sont de plus en plus critiqués. Cependant, une différenciation est justifiée. Des travaux économétriques ont montré que les charges des communes croissaient avec leur population, avec notamment les charges de centralité.

Enfin, les communes rurales contribuent moins à l'effort de redressement des comptes publics que les communes urbaines : 57 euros par habitant au-delà de 20 000 habitants, 6 euros en deçà. Supprimer le montant différencié par habitant sans le remplacer par quoi que ce soit se traduirait par une perte nette de DGF pour l'ensemble des communes.

Monsieur Jarlier, le Gouvernement partage votre souhait de réduire les inégalités entre collectivités locales mais votre proposition n'est pas la voie la plus pertinente. Attendons la réforme globale de la DGF, qui occupera en 2015 le Gouvernement, le Parlement et le CFL. Le Premier ministre a, en outre, annoncé une majoration de la DETR, de 200 millions d'euros, qui bénéficiera aux centres-bourgs, et la création d'une mission parlementaire sur la réforme de la DGF. Retrait ?

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je voterai ces amendements : c'est une demande ancienne de l'Association des maires ruraux de France. C'est un plaisir sans cesse renouvelé de voir avec quelle aisance les rapporteurs et les ministres procèdent pour contourner une question. C'est toujours une très bonne question, mais ce n'est jamais le bon moment, ni le lieu et une étude est en cours. Bref : circulez, il n'y a rien à voir ! L'argument des charges de centralité est amusant, car lorsque nous discutons d'intercommunalité, les mêmes interlocuteurs nous disent « réunissez vos communes, fusionnez, vous ferez des économies d'échelle ! ». Avec la DGF, pas d'économies d'échelles mais des charges de centralité...

Franchement, comment peut-on dire que les malheureuses dotations de péréquation dont bénéficient les communes rurales équilibrent l'injustice majeure qu'est le mode de répartition de la DGF, injustice aggravée par le mode de calcul des contributions au FPIC ? On aboutit à des aberrations totales. C'est se moquer du monde !

M. Alain Houpert.  - Nous sommes dans la religion du chiffre.

M. Bruno Sido.  - C'est la commission des finances...

M. Alain Houpert.  - Nous sommes au Sénat ; nous sommes les élus des territoires, qui nous regardent. Or, 80 % du territoire français est rural.

M. Bruno Sido.  - Au moins.

M. Alain Houpert.  - Que risque-t-on à adopter nos amendements ? Ce faisant, nous remettrons l'église au milieu du village. Nous verrons dans la navette. Mon amendement traduit le principe républicain de l'égalité. Un rapport de 1 à 2, c'est scandaleux. Le moment d'agir est venu. Nous sommes au XXIe siècle, face au défi du numérique. La ruralité devra assurer le maillage territorial par la fibre optique ; les grandes villes ne paient pas, elles, pour accéder aux nouvelles technologies. Les communes à faible population n'auraient pas de charges de centralité ? Le coût réel de ces dernières leur est refacturé ! La DGF et le FPIC, c'est la péréquation à l'envers.

Dans les territoires ruraux, on ne sait plus qui est la commune riche et qui est la commune pauvre. Nos grands électeurs ont dénoncé le FPIC à 80 %. La Haute assemblée se doit d'élever le débat, et ne risque rien à taper du poing sur la table. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Paul Emorine.  - J'ai été maire d'un chef-lieu de canton avant la décentralisation : alors, on pouvait parler de centralité. Mais avec l'intercommunalité, les choses ont changé : la piscine d'une petite commune est devenue une charge intercommunale. Il faudra y réfléchir car centralité ne veut plus rien dire.

M. Bruno Sido.  - Très bien.

M. René-Paul Savary.  - Le Premier ministre annonce une hausse de 200 millions de la DETR. Très bien, mais le moment n'est-il pas venu de confier cette DETR aux départements, de simplifier ? (MM. Bruno Sido et Éric Doligé approuvent) Joignez l'acte aux paroles. Les élus locaux ne seront pas ingrats : ils continueront d'inviter les sous-préfets -voire le préfet, quand il nous fait l'honneur de venir- aux inaugurations. Mais avec un seul payeur, on simplifierait bien des tâches.

M. Pierre Jarlier.  - J'entends bien que cette question sera abordée dans la réforme de la DGF. D'ailleurs, ce qui vaut pour les communes vaut encore plus pour les intercommunalités...

En 2015, les plus petites communes seront les plus touchées par la baisse des dotations car celles-ci sont une forte part de leurs ressources. Si nous bougeons légèrement le curseur, nous les aiderons à faire face aux efforts qui leur sont imposés afin qu'elles puissent continuer à investir -ou simplement à assurer leurs charges fixes !

Je maintiens donc mon amendement.

M. Claude Raynal.  - Ce débat est sérieux, légitime ; il faut qu'il soit tranché. Les exemples avancés ne m'ont pas convaincu -il y a des budgets annexes...

Les communes ex-rurales devenues urbaines, qui ont toujours la DGF rurale, sont aussi concernées. Il faudra revenir sur le sujet, travailler très sérieusement, au CFL, avec des simulations. Mieux vaut retirer ces amendements.

M. Michel Bouvard.  - La hiérarchie des dotations de DGF est ancienne et complexe, avec de nombreuses composantes, ajoutées au fil des ans. Le Gouvernement a raison de dire qu'il faut remettre le système à plat. Dans la ruralité, les exigences de services à la population sont les mêmes que dans les zones urbaines. Il faut toutefois un minimum de simulations, d'analyses, d'autant que les communes rurales sont un ensemble très hétérogène. Je pense par exemple à celles qui sont le support d'activités touristiques, où l'habitat est peu dense et qui supportent les charges d'entreprises touristiques. Que le Gouvernement s'engage cependant sur un calendrier précis, pour que cela ne se finisse pas comme la grande réforme fiscale annoncée naguère ou la révision des bases, que l'on attend toujours.

Je ne voterai pas ces amendements.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Ils ont le mérite d'indiquer une direction, avec clarté, franchise et dynamisme.

Le Gouvernement annonce une réforme générale de la DGF, il lui faudra des principes directeurs. M. Houpert propose une égalité stricte -au détriment peut-être de l'équité. Les charges de centralité, qui reposent sur des calculs ésotériques, sont peut-être à revoir. De là à les supprimer totalement, c'est aller un peu vite en besogne : j'invite le Sénat à faire preuve de sagesse...

M. Michel Mercier.  - Ces amendements traitent d'un vrai problème, que nous vivons tous les jours sur le terrain. Malgré tout le respect que j'ai pour le CFL, je rappelle que ce n'est pas lui qui fait la loi ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

Michel Bouvard.  - Exact

M. Philippe Dallier.  - Bravo !

M. Michel Mercier.  - Ce sont des amendements d'appel, la situation étant trop complexe pour être résolue si vite. Dans ma longue carrière de parlementaire, j'ai déjà voté deux réformes de la DGF. Quand j'étais rapporteur spécial, à la place de M. Guené, j'ai fait voter sans doute une trentaine d'amendements compliquant encore les choses. Si quelqu'un prétend pouvoir expliquer la DGF en deux phrases, il faut l'enfermer d'urgence ! (Rires)

Les écarts sont indéniables. J'ai bien envie de voter ces amendements, qui seront un vrai appel pour le Gouvernement. Sinon, rien ne sera fait avant qu'on ait fini de compter les arbres ! (Sourires)

Le Gouvernement doit prendre de vrais engagements pour réduire les écarts entre communes. Évitons l'émiettement des dotations de l'État, favorisons le regroupement des communes. Mais n'écartons pas les propositions de nos collègues, les problèmes sont trop criants aujourd'hui. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Charles Guené, rapporteur spécial.  - Si la commission des finances propose un retrait, c'est avant tout pour des raisons techniques. Tels qu'ils sont rédigés, ces amendements ne fonctionnent pas. Les dotations de base en 2015 sont cristallisées, je l'ai dit, les mesures proposées n'auraient pas d'application pratique.

En 2015, on réforme la DGF, avec une évaluation des mécanismes de péréquation en septembre. Si nous constatons, fin 2015, que rien n'a avancé, notre réaction sera différente...

Si ces amendements sont d'appel, ils sont pertinents : le rapport de 1 à 2 est inacceptable mais il faut aussi tenir compte des charges des uns et des autres. Les services au public coûtent plus cher dans la ruralité qu'en zone urbaine, on le sait.

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Je partage ces propos. Le Gouvernement n'a pas exprimé d'opposition à ces amendements, dont il demande le retrait. Il y a une nuance ! (Rires à droite)

M. Jean-Paul Emorine.  - Une politesse !

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - La discussion a été très intéressante. Le Gouvernement prend l'engagement de réformer totalement la DGF d'ici le projet de loi de finances 2016, avec le Parlement et le CFL.

L'amendement n°II-178 rectifié ter est adopté.

M. Bruno Sido.  - Bravo ! Historique !

L'amendement n°II-273 rectifié ter devient sans objet.

M. le président.  - L'examen des crédits de la présente mission se poursuivra samedi 6 décembre.

Avis sur une nomination

M. le président.  - La commission des affaires sociales, lors de sa réunion du 2 décembre 2014, a émis un vote favorable (24 voix pour, 5 bulletins blancs) à la nomination de M. Jean-Claude Ameisen aux fonctions de président du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et la santé.

La séance est suspendue à 20 h 5.

présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente

La séance reprend à 22 h 5.

Projet de loi de finances pour 2015 (Suite)

Aide publique au développement

Mme la présidente.  - Nous reprenons la suite de l'examen du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l'Assemblée nationale. Nous allons examiner les crédits de la mission « Aide publique au développement ».

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - 2,8 milliards d'euros en crédits de paiements sont demandés au titre de la mission « Aide publique au développement » et 1,5 milliard au titre du compte de concours « Prêts des États étrangers ».

Après deux années de baisses importantes, liées à la crise de 2008 et aux turbulences de la zone euro, l'aide internationale a atteint en 2013 son plus haut niveau historique, à 135 milliards de dollars environ. Dix-sept des vingt-huit pays du Comité d'aide au développement de l'OCDE ont augmenté leur aide ; onze l'ont diminuée.

En volume, les États-Unis demeurent le premier pays contributeur, devant le Royaume-Uni, qui conforte sa deuxième place, et l'Allemagne. La France recule d'un rang, en cinquième position, derrière le Japon, avec 11,4 milliards de dollars. Au regard du revenu national brut (RNB), les cinq premiers pays donateurs sont la Norvège, la Suède, le Luxembourg, le Danemark et le Royaume-Uni, qui sont les seuls à respecter l'engagement de consacrer 0,7 % du RNB à l'aide au développement. Avec 0,41 %, la France passe de la dixième à la onzième place.

Les crédits de la mission « Aide publique au développement » représentent environ un tiers de notre effort en faveur du développement, auquel contribuent également les missions « Recherche et enseignement supérieur », « Action extérieure de l'État » et « Immigration, asile et intégration ». S'y ajoutent les prêts, la taxe sur les billets d'avion et la taxe sur les transactions financières, ainsi que l'aide transitant par le budget communautaire.

L'aide de la France diminue depuis le maximum atteint en 2010. Selon les prévisions, la baisse se prolonge en 2014, avant un rebond en 2015 et une stabilisation autour de 9,3 milliards d'euros. Ces prévisions pèchent toutefois par optimisme, comme l'exécution des budgets passés le montre.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 prévoit une diminution de 7,3 % des crédits de paiements de la mission en 2017 par rapport à 2014, soit une baisse de 214 millions d'euros. Le plafond 2017 sera de 20 % inférieur au plafond 2011, soit une baisse de 650 millions d'euros. Sur la période 2015-2017, c'est la septième mission dont les crédits baissent le plus.

Cette baisse des crédits est toutefois partiellement compensée par la hausse de 92 millions d'euros du produit des taxes affectées. Ainsi, la diminution réelle des moyens de l'aide publique au développement serait en réalité de 120 millions d'euros, soit 4,2 %.

Certes, les taxes affectées ont été présentées comme des moyens supplémentaires. Le Royaume-Uni a sanctuarisé cette politique et est parvenu à respecter l'objectif de 0,7 %. Reste que la baisse des crédits demeure relativement maîtrisée.

Les crédits de paiements de la mission s'élèvent, en 2015, à 2,82 milliards d'euros, en baisse de 2,9 % ou 83,3 millions d'euros par rapport à 2014. Cette diminution s'explique notamment par la baisse de 50,9 millions d'euros des annulations de dette sur le programme 110. Les économies sur les dépenses de personnel -4,4 millions d'euros-, sur les dispositifs de coopération bilatérale -7 millions d'euros- et la fin des actions menées dans le cadre de la politique de co-développement -8,5 millions d'euros- compensent la hausse de la contribution au Fonds européen de développement -22,9 millions d'euros.

Les dispositifs de coopération multilatérale du programme 209 voient leurs crédits baisser de 32,4 millions d'euros, baisse en grande partie compensée par une hausse du projet de la taxe sur les transactions financières. L'Assemblée nationale a transféré 37 millions du programme 110 au programme 109. Nous y reviendrons.

Les députés ont également minoré de 11 millions d'euros les crédits du programme 109. Des crédits ont, enfin, été fléchés vers la lutte contre le virus Ebola.

Les crédits de paiements du compte de concours financier « Prêts à des États étrangers », qui retrace des opérations relatives aux prêts accordés aux pays en développement et à la Grèce depuis 2010, sont stables.

L'article 3 du projet de loi de finances rectificative pour 2014 transforme la Réserve Pays Émergents (RPE) en outils d'aide à l'exportation sans aucun objectif de développement. Je souhaite que le Gouvernement nous donne davantage d'explications sur cette évolution.

L'Agence française de développement (AFD) reçoit des subventions pour financer des projets sous forme de dons : ces crédits sont stables en autorisations d'engagements et en très légère baisse en crédits de paiements. Elle intervient également dans les États étrangers en accordant des prêts, plus ou moins concessionnels. Lorsqu'elle se finance aux conditions du marché, l'Agence réduit le taux d'intérêt proposé grâce aux bonifications que lui accorde l'État, qui représentent 178 millions d'euros en crédits de paiements en 2015. La hausse de 8 millions d'euros en autorisations d'engagements s'explique par l'engagement présidentiel d'augmenter les financements de l'AFD en Afrique sur la période 2014-2018.

L'AFD finance également la concessionnalité de ses prêts grâce à la ressource à condition spéciale (RCS), qui prend la forme d'un prêt de l'État à des termes préférentiels. Ses crédits augmentent en autorisations d'engagements en raison d'un prêt de 430 millions d'euros de la France à la Banque mondiale, géré par l'AFD. Les bonifications et la RCS contribuent à l'aide publique au développement de la France en 2015 à hauteur de 1 845 millions d'euros.

L'AFD doit respecter des ratios bancaires qui limitent sa capacité à prendre de nouveaux engagements dans de nombreux pays, tels que le Maroc. Le renforcement de ses fonds propres passera par une diminution du dividende versé à l'État, par une amélioration de son résultat net et, enfin, par la conversion d'une partie de la RCS en véritables fonds propres, à hauteur de 840 millions d'euros. En définitive, les moyens de l'AFD sont préservés, voire légèrement renforcés, en phase avec les objectifs qui lui ont été fixés dans le contrat d'objectifs et de moyens pour les années 2014-2016, qui prévoit une progression de 9 % de ses engagements en trois ans.

Au titre des crédits de l'aide humanitaire, le président de la République a annoncé un effort financier de 100 millions d'euros pour lutter contre Ebola, dont 20 millions d'euros immédiatement disponibles provenant de redéploiements de crédits en fin de gestion 2014, le solde étant inscrit sur le budget 2014.

Le fonds de solidarité prioritaire (FSP) voit ses crédits baisser de 10 %, passant de 50 à 45 millions d'euros en autorisations d'engagements.

J'en viens au traitement de la dette des pays en développement. Les crédits 2015 sont relativement stables, sauf pour les annulations de dette bilatérale, en diminution de 50 millions d'euros environ en crédits de paiements.

S'agissant de l'aide multilatérale, l'aide économique et financière y occupe une place prépondérante : il s'agit essentiellement de reconstituer différents fonds multilatéraux. Le Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme (FMLSTP) perçoit 187 millions d'euros, complétés par 173 millions d'euros du Fonds de solidarité pour le développement, à partir des taxes affectées. La contribution de la France au FMLSTP est donc maintenue à 360 millions d'euros, la baisse de 30 millions d'euros étant entièrement compensée.

La mission « Aide publique au développement » porte les crédits de la contribution française au Fonds européen de développement (FED), principal instrument de l'aide européenne aux pays de la zone Afrique, Caraïbes et Pacifique. Pour cet outil hors budget communautaire, la France a obtenu une diminution de sa clé de répartition mais le montant global du FED étant en hausse, notre contribution l'est aussi.

Enfin, les crédits de personnel baissent de 2,1 % en 2015, soit une économie de 4,4 millions d'euros.

La commission des finances vous propose, dans sa sagesse, d'adopter sans modification les crédits de la mission et du compte de concours financier. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

Mme Françoise Laborde.  - Très bien.

M. Henri de Raincourt, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Le Parlement a débattu pour la première fois cette année d'une loi-cadre sur la politique internationale. Le Sénat y a été pour beaucoup.

Le monde change rapidement. De nombreux pays peuvent à présent être considérés comme développés, de sorte que le centre de gravité du monde se déplace vers l'Asie. Toutefois, les inégalités internes s'accroissent partout. Nous devons par conséquent poursuivre notre action en matière d'aide publique au développement. Les classes moyennes et le nombre de pauvres progressent de concert, ce qui semble paradoxal. La focalisation de la Conférence Paris 2015 sur le développement durable ne doit pas faire oublier le nécessaire soutien aux services de base aux populations des pays en développement. La population mondiale devrait atteindre 9 milliards d'habitants en 2050.

En Afrique, elle doublera pour atteindre 2 milliards de personnes. Pour réussir la transition démographique, il faudra soutenir l'éducation, la santé, les services publics. 800 millions de personnes souffrent de malnutrition, 2 milliards de carences en micro-nutriments. Les dernières émeutes de la faim datent de 2007-2008 -autant dire hier ! Avec l'envolée des cours des matières premières, elles peuvent très bien se reproduire demain.

63 % des Français soutiennent l'engagement de la France pour le développement. La mission « Aide publique au développement » suit pourtant une tendance peu favorable. La situation est certes exceptionnelle ; les mesures de restriction de l'aide publique au développement devraient l'être aussi.

L'article 3 du projet de loi de finances rectificative élargit la RPE exagérément, la transformant en soutien général aux exportations, au risque de diluer son utilité pour le développement. Ne substituons pas les financements innovants aux crédits budgétaires : ils doivent venir en complément. Sinon, ce serait trop facile !

Je regrette enfin que la taxe de solidarité sur les billets d'avion subisse un écrêtement de 12 millions d'euros. La France brouille ainsi son message. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Alain Joyandet.  - Excellent !

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Le Gouvernement a réalisé depuis 2012 des efforts importants quant aux financements innovants consacrés au développement.

Le 1er avril dernier, il a augmenté les tarifs de la taxe de solidarité sur les billets d'avion de 12,7 % afin de rattraper l'inflation accumulée, alors que ces tarifs n'avaient pas évolué depuis 2006. Il a également concrétisé, dès août 2012, un projet ancien : la taxe sur les transactions financières, dont le plafond a progressé sensiblement et sera porté à 160 millions à compter de 2016. La taxe de solidarité sur les billets d'avion rapportera 25 millions d'euros de plus en 2016, celle sur les transactions financières, 40 millions de plus.

La ligne relative aux annulations de dette diminue fortement parce que le nombre de pays surendettés diminue, ce qui est une bonne chose.

Un débat récurrent oppose bilatéral et multilatéral, qui tend à diluer l'action de la France. Avec mon co-rapporteur, nous travaillerons davantage sur cette question l'année prochaine. Il faut en tout cas rationaliser les organisations multilatérales pour éviter les redondances : au moment où la communauté internationale va s'engager dans le fonds pour le climat, il faut éviter de doublonner avec des organisations existantes.

Le Gouvernement a décidé de préserver au maximum les crédits de la mission. Les députés ont augmenté les crédits relatifs aux dons-projets. N'opposons pas dons et prêts, les deux instruments sont complémentaires.

La programmation des finances publiques devrait engager le Gouvernement à lancer des réformes structurelles ; comme le rapprochement des réseaux à l'étranger du ministère de l'économie et du ministère des affaires étrangères.

Je veux enfin saluer l'action de la France dans le secteur de la santé -la lutte contre Ebola en témoigne. Je salue également le rôle du service de santé des armées.

Si l'on considère, avec André Maurois, que les pays ont l'âge de leurs finances, le financement de l'aide publique au développement a atteint l'âge adulte. La commission des affaires étrangères a donné un avis favorable aux crédits de la mission.

M. Olivier Cadic .  - Nous sommes devant un paradoxe : l'aide publique au développement est l'une des missions les plus sollicitées au titre du redressement de nos finances publiques. Charité bien ordonnée commence par soi-même ? Ces crédits ne devraient pas être une variable d'ajustement ; l'aide au développement est une nécessité absolue...

L'Afrique est un levier de croissance pour l'Europe et la France. Je rends hommage à l'action de Jean-Louis Borloo pour l'énergie en Afrique. « L'Afrique est en panne faute d'électricité, dit-il. L'obscurité appelle l'obscurantisme. L'absence d'énergie nourrit le chaos et la pauvreté. Ou l'Afrique sera la terre des drames du XXIe siècle ou elle sera le moteur de notre croissance. Va-t-on dresser des murailles entre nos deux continents pour empêcher l'arrivée des réfugiés climatiques et des enfants de la grande pauvreté ? » La Méditerranée est devenue un théâtre de drames. Pouvons-nous dépenser sans compter pour notre propre protection sociale sans assumer nos responsabilités envers notre prochain, qui vit dans le dénuement ?

Nous avons atteint un pic historique en 2013, avec 134,8 milliards de dollars consacrés à l'aide publique au développement au niveau mondial ; mais la contribution française, elle, diminue.

La France doit affronter deux défis pour maintenir son rang. D'abord, miser sur les financements innovants -taxe sur les billets d'avion et les transactions financières. L'idée est de dégager des ressources stables et complémentaires, non de les substituer aux crédits budgétaires.

Les recettes affectées au financement de cette aide sont dynamiques : 100 millions d'euros du produit de la taxe sur les transactions financières ont été affectés à l'aide publique au développement l'année dernière. Mais il ne faut pas que l'État se défausse de ses responsabilités.

Second défi : la gestion de la réduction de la dépense. Les crédits baissent de 214 millions d'euros en 2015. Les moyens de l'AFD sont toutefois préservés, une agence française d'expertise technique internationale (Afeti), est créée ; c'est une bonne idée : elle donnera plus de visibilité à notre aide technique et fera réaliser des économies.

Un mot sur le ciblage des dépenses d'intervention. Je rejoins Montesquieu pour qui le « doux commerce favorise les échanges entre les peuples ». Encore faut-il que l'aide soit bien ciblée : le Brésil ou le Mexique sont-ils encore des pays en développement ? Faut-il encore aider la Chine et l'Inde ? Une évaluation poussée doit être engagée pour identifier les pays qui en ont le plus besoin.

Le Royaume-Uni a sanctuarisé ses dépenses d'APD et respecte l'objectif des 0,7 %. L'Italie a fait de même. Ces pays subissent la crise comme nous mais tiennent leurs engagements. L'APD exige un large consensus. Le groupe UDI-UC votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

Mme Leila Aïchi .  - L'aide publique au développement voit son enveloppe diminuer de 2,9 % en 2015. Les écologistes s'inquiètent de la continuité de cette baisse. Nous restons loin de l'objectif de 0,7 % du PIB. Le drame sanitaire de l'Afrique nous rappelle pourtant notre responsabilité. Toutes les trois heures, l'équivalent du nombre de victimes du 11 septembre meurent de faim dans le monde. Rationalisation n'est point synonyme d'abandon.

Les moyens de l'AFD sont sanctuarisés. Elle est même exonérée de tout type de contrôle de sa gestion. Or, selon l'ONG Eurodad, un grand nombre d'intermédiaires de l'APD sont basés dans les paradis fiscaux : 400 millions d'aide destinés aux pays en développement y auraient été injectés. Que faites-vous pour mettre fin à ce scandale, madame la ministre ?

Les écologistes saluent le transfert de 35 millions de crédits de l'AFD à la coopération bilatérale, essentielle pour la prévention des conflits et la reconstruction. Or, le fonds de solidarité prioritaire voit ses ressources baisser depuis 2010, en contradiction avec le principe de partenariats différenciés.

Laurent Fabius l'a dit : il s'agit maintenant de gagner la paix au Mali. Il faut un apaisement politique, économique et social. Le tout-sécuritaire ne fonctionne pas.

L'impératif environnemental dans l'aide au développement a été souligné à de nombreuses reprises par le groupe écologiste. Les ravages de la course aux matières premières ou de l'accaparement des terres ne sont plus à démontrer. Je me réjouis de la reconnaissance de pays en grande difficulté climatique. Dans le cadre de la COP 21, nous devons être ambitieux. Quelles seront les objectifs que vous porterez, madame la ministre ?

En mai dernier, nous regrettions l'absence d'un volet budgétaire dans la loi organique et de programmation. Ce budget n'est pas en adéquation avec nos principes en matière d'APD. Nous nous abstiendrons donc.

M. Michel Billout .  - Cette mission témoigne du décalage entre les paroles et les actes. Pour la cinquième année consécutive, les crédits de l'APD diminuent. Les 140 ONG rassemblées au sein de Coordination Sud ont relevé que notre engagement était en-deçà de la moyenne mondiale. Sur le quinquennat, la baisse pourrait atteindre 20 %. Résultat : l'objectif de 0,7 % du RNB ne sera pas atteint. Le seuil de 0,5 % avait été atteint en 2010. Nous serons, en 2016 et 2017, à 0,49 %. Notre effort a faibli ; nous ne sommes plus que le cinquième bailleur mondial, alors que nous étions le deuxième dans les années 90.

Cet abandon est patent aussi dans le domaine de la francophonie : la contribution de la France à l'OIF a diminué de moitié en quatre ans.

Ce budget traduit bien la politique d'austérité de ce gouvernement. En 2016-2017, les crédits de l'APD seront treize fois plus touchés que ceux du budget général. La TTF et la Taxe Chirac sur les billets d'avion avaient vocation à constituer des recettes exceptionnelles ; elles sont pérennisées et se substituent aux crédits...

La part des dons aux pays ne cesse de diminuer. Comment respecter alors le principe des priorités géographiques ? En 2014, chacun des seize pays pauvres prioritaires n'aura reçu que 10 millions d'euros de l'AFD ! Cela traduit une conception étroitement mercantile de l'APD ; elle entache l'image de notre pays. L'OCDE a estimé que cette attitude marginalisait notre pays au sein de la communauté internationale qui cible la lutte contre la pauvreté.

Nous donnons le mauvais exemple à la veille des conférences de Paris sur le climat et d'Addis Abeba sur le financement du développement.

Le groupe CRC votera contre ces crédits. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Henri de Raincourt s'en désole)

M. Robert Hue .  - Nous mesurons les enjeux de l'aide publique au développement : réduction de la pauvreté alimentaire, sanitaire, éducative, et j'ajouterai institutionnelle. À l'aube du XXIe siècle, trop de pays sont en proie à des régimes autoritaires ou au terrorisme.

Cinquante ans après les grandes luttes pour l'indépendance, beaucoup reste à faire pour remplir les objectifs du millénaire pour le développement. L'aide publique au développement doit plus que jamais être encouragée. 2013 marquait un rebond, avec une hausse de l'aide des pays du comité d'aide au développement de 6,1 %. Mais la France a relâché ses efforts. Nous consacrions 0,4 % de notre RNB à l'aide au développement en 2013, en recul par rapport à 2012.

Nous devons adopter une trajectoire précise. En juin dernier, nous avons défini de grandes orientations dans la loi de programmation. Des priorités ont été identifiées, dont l'Afrique subsaharienne. Je partage ce choix : le Mali, le Libéria, la Sierra Leone, la Guinée figurent parmi les États les moins développés dans le classement de l'Indice pour le développement humain. Cette région est de plus ravagée par des drames sanitaires, comme l'épidémie d'Ebola. À combien s'élèvent les crédits dédiés, madame la ministre ?

L'aide publique au développement est-elle conforme aux engagements décidés en faveur de l'Afrique par le comité interministériel au développement ?

Attention à ne pas réduire la part consacrée à l'Afrique subsaharienne. Avec 9,3 milliards d'euros pour cette région, et 2,1 milliards pour l'Afrique du nord, l'aide de l'AFD augmente. C'est une bonne chose mais les prêts ont la part belle par rapport aux dons. Les dix-sept pays prioritaires sont-ils les principaux récipiendaires de l'aide au développement ? Je l'espère car le continent africain est central pour le destin de la France et de l'Europe. L'Afrique doit être considérée comme une chance.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial.  - Très bien.

M. Robert Hue.  - Tout en donnant un avis favorable à cette mission, je souhaite que l'aide publique au développement ne soit pas pénalisée, tant les enjeux sont majeurs, en particulier de l'autre côté de la Méditerranée. (Applaudissements sur les bancs RDSE)

M. Bernard Fournier .  - Nous constatons le fossé entre notre engagement de consacrer 0,7 % de notre RNB à l'aide publique au développement et la réalité. Le Royaume-Uni, pourtant, y est parvenu. Notre renoncement est d'autant plus honteux que la loi d'orientation et de programmation réaffirmait cet objectif.

Las, Bruno Le Roux propose de supprimer la taxe sur ces billets d'avion, qui finance la lutte contre le Sida -domaine où la France est pionnière, pour la transformer en taxe sur le système bancaire. La taxe sur les billets d'avion est pourtant indolore. Le Gouvernement a néanmoins décidé de la plafonner.

Il est regrettable que la France, qui a mis en place une taxe sur les transactions financières bien plus légère qu'au Royaume-Uni, fasse pression pour l'alléger encore...

Avec un plafonnement à 100 millions, le transfert d'une part de la taxe sur les billets d'avion fléchée à l'aide publique au développement est mensonger. Les financements innovants ne compenseront jamais le tarissement des crédits, qui auront baissé de 20 % entre 2011 et 2017.

Sommes-nous prêts à nous impliquer politiquement pour aider les pays en développement à lutter contre la corruption, à assainir leur système fiscal ? Une part croissante de l'aide publique au développement française est consacrée aux prêts, au détriment des dons. Or les pays les moins avancés ne peuvent y recourir ; les prêts sont en outre inadaptés pour des projets dans l'éducation, la santé ou le droit des femmes.

Je regrette que le Gouvernement revienne par amendement sur le vote unanime des députés limitant la baisse des crédits du fonds de solidarité prioritaire. Quel sera l'impact sur le programme 100 000 professeurs pour l'Afrique, qui répond aux objectifs de l'APD et de la francophonie ?

Seuls 10 % des engagements de l'AFD ont été consacrés à la santé ou à l'éducation en 2013. L'épidémie Ebola démontre pourtant combien il est essentiel de favoriser la prévention. Résultat, il en coûtera des milliards pour enrayer la pandémie. Si nous étions intervenus plus précocement, nous aurions pu sauver des milliers de vies en renforçant le système de santé.

Enfin, j'insiste sur l'importance d'investir pour l'éducation des femmes.

Mme Michèle André.  - Très bien.

M. Bernard Fournier.  - Il y a toutefois des avancées, comme la création de l'Agence française d'expertise technique internationale. Malgré ses réserves, le groupe UMP votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Claudine Lepage .  - L'APD prend toute sa part dans la réduction des déficits publics -peut-être un peu trop... À l'heure où le monde est traversé de crises sécuritaires, sanitaires ou environnementales, les pays développés n'ont-ils pas, plus que jamais, la responsabilité d'aider les plus pauvres ? Le Portugal ou le Canada réduisent aussi leur APD. Le Royaume-Uni, l'Italie ou la Norvège, en revanche, l'augmentent. Nous n'atteindrons pas l'objectif de 0,7 % de RNB. Cependant, la France reste un acteur incontournable de l'aide au développement, cinquième contributeur mondial. L'AFD voit d'ailleurs ses moyens confirmés et ses fonds propres renforcés. L'adoption, en juillet 2014, de la loi d'orientation et de programmation montre l'attachement de la France à cet outil.

La baisse des crédits nous oblige à envisager autrement l'APD en termes de financement, d'efficacité, de transparence et de stratégie. De nouvelles sources de financement ont été identifiées : la TTF, affectée à hauteur de 25 % et non plus de 15 %, rapportera 140 millions en 2015 ; s'y ajoute la taxe sur les billets d'avion, pour 210 millions. Leur apport n'est pas négligeable, mais elles ne doivent toutefois pas se substituer aux crédits budgétaires de l'APD.

Avec les restrictions budgétaires, le renforcement de la gestion de l'aide est indispensable. L'efficacité de l'aide est aussi importante que son volume. C'est une condition pour conserver le soutien des populations des pays contributeurs : 68 % des Français souhaitent l'augmentation ou le maintien du budget de l'APD, il faut conserver ce soutien précieux.

Deuxième axe d'amélioration : la transparence. Le lancement d'un site internet est un premier pas pour améliorer la traçabilité des fonds destinés aux pays prioritaires. La traçabilité des aides dans le domaine de l'eau et de l'assainissement est insuffisante : on ignore, par exemple, ce que sont devenus les 40 millions destinés à cette fin à la Banque africaine de développement.

La question de la stratégie est incontournable. Ciblons mieux les pays qui bénéficient de notre aide, seize pays prioritaires toucheront 50 % de l'aide ; 85 % de l'effort financier seront orientés vers l'Afrique subsaharienne et la Méditerranée. L'aide française au développement doit bénéficier en priorité aux pays africains francophones, historiquement liés à la France. Avec la poussée démographique de l'Afrique, c'est un investissement pour l'avenir.

La santé doit être une priorité. Le Fonds mondial contre le Sida, la tuberculose et le paludisme recevra 300 millions d'euros jusqu'en 2016. La France a débloqué 100 millions d'euros en urgence pour lutter contre le virus Ebola. Sur quelle mission ces crédits seront-ils pris ?

M. Robert Hue.  - Bonne question !

Mme Claudine Lepage.  - L'éducation, au coeur des enjeux de développement, est une priorité de l'APD. En 2013, sur 215 millions de dons-projets, 53 millions y étaient consacrés.

La France contribue au Fonds vert, pour aider les pays en développement à lutter contre le réchauffement climatique.

L'Europe est confrontée à un flux migratoire de plus en plus important. Les migrants sont prêts à prendre tous les risques pour fuir la guerre et la misère. Or, la réponse est trop souvent uniquement sécuritaire -pour preuve, l'opération Triton, en Méditerranée, qui a remplacé Mare Nostrum. C'est par la coopération et le développement que l'on agira efficacement et qu'on fera baisser sur le long terme l'immigration clandestine.

Un mot sur le Mali et la Centrafrique. La France doit consacrer une part de ses financements à l'accompagnement des États dans la phase de reconstruction et de stabilisation post-crise.

Le groupe socialiste votera bien sûr ces crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Robert del Picchia .  - Je ne vais pas vous ressortir tous les chiffres, vous les avez entendus. Je partage l'essentiel de ce qui a été dit. On ne peut pas m'accuser de ne pas vous soutenir, madame la ministre. Nous avons été deux membres de mon groupe à voter pour la loi d'orientation et de programmation...

Bravo à l'APD, même si l'on voudrait toujours plus. En la matière, on fait ce qu'on peut...

Une question : notre aide justifie-t-elle que certains pays concernés oublient leurs dettes envers nos ressortissants ? De nombreux Français aujourd'hui retraités ont effectué une partie de leur carrière en Afrique. Un exemple -il y en a d'autres- : Djibouti ne verse pas les pensions à nos compatriotes. En 2007, j'avais fait adopter un amendement ayant pour effet de suspendre la signature d'un accord-cadre avec le Congo jusqu'au déblocage d'arriérés de pensions pour environ 500 Français. À l'époque, j'avais reçu le soutien de tous les groupes du Sénat.

Le ministère a dû agir et la situation s'est débloquée. Je vous demande donc d'intervenir, madame la ministre, auprès des ambassadeurs des pays défaillants pour que les cas individuels soient réglés. Ces retraités sont contraints de quémander les minima sociaux. C'est intolérable.

La CNAV refuse en outre le cumul des conventions bilatérales, malgré un arrêt de la Cour d'appel qui n'a pas été contesté en cassation. C'est incompréhensible et très préjudiciable pour nos ressortissants. C'est un frein manifeste à l'expatriation.

Je veux bien voter votre budget, mais j'aimerais vraiment que vous vous engagiez à intervenir, madame la ministre. Cela a marché une fois. Je peux vous communiquer la liste des pays concernés. Fort de votre engagement, je voterai ce budget.

M. Charles Revet .  - « On ne peut tolérer que la Méditerranée devienne un grand cimetière » a dit le pape François dans son magnifique discours devant le Parlement européen.

Les médias se font régulièrement l'écho des drames de ces migrants désespérés, qui s'entassent dans de vieilles embarcations pour tenter de rejoindre l'Europe. Il y a aujourd'hui un milliard d'habitants en Afrique ; ils seront deux milliards en 2050. L'Europe est au premier chef concernée, et la France en particulier, compte tenu de son passé colonial et de sa présence dans de nombreux pays africains. Notre attentisme est irresponsable et inquiétant. Il faut engager une vraie politique de coopération et de développement, accélérer et renforcer notre intervention. Les projets de coopération des collectivités territoriales et des associations sont nombreux et utiles mais insuffisants. L'Afrique a le potentiel suffisant pour assurer ses besoins alimentaires, mais il est inexploité. J'ai fait mon service militaire en Algérie, je me souviens des plantations d'orangers, des champs de blé, des vignes... Sans faire l'apologie de cette époque, on peut regretter que cela se soit perdu.

Des responsables sénégalais m'avaient dit leur crainte d'émeutes de la faim dans leur pays, à cause d'une pénurie de riz. Ce qu'ils attendaient de la France, c'était de l'aide pour développer ces cultures. La terre de leur pays peut produire deux fois de quoi satisfaire les besoins de la population. C'est à cela que nous devrions nous engager. Les difficultés alimentaires sont un terreau propice pour les agitateurs, voire les terroristes.

Revoyons nos modalités d'intervention. La France a la confiance des pays en développement ; nous avons le devoir d'aider les populations, notamment en les accompagnant pour ce qui touche les questions alimentaires. 2050, c'est demain. Il y a urgence à agir. (Applaudissements sur les bancs UMP et au centre)

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée du développement et de la francophonie .  - Je vous ai entendus, votre attachement à l'aide publique au développement, votre implication. Merci de vos encouragements.

Je rentre d'un tour de France à l'occasion de la semaine de la solidarité internationale, j'ai rencontré des acteurs, engagés et responsables, qui ont tous rappelé l'importance de l'engagement de la France. Notre pays doit être fier de son effort de solidarité et le poursuivre.

Ce budget, économe des deniers publics, préserve nos marges de manoeuvre sur le terrain. Il traduit les engagements de la loi d'orientation et de programmation, et reste à la hauteur des ambitions de la France. Dans un contexte contraint, le budget de l'aide publique au développement, avec une enveloppe de 2,8 milliards, baisse de 1,5 %, si on intègre les financements innovants, domaine dans lequel la France est pionnière. La taxe sur les billets d'avion a été revalorisée, elle n'est pas menacée. Nous sommes le seul pays d'Europe à avoir mis en place la taxe sur les transactions financières ; nous oeuvrons pour que nos partenaires nous rejoignent. D'autres ressources sont à l'étude, telles que les dons par SMS ou le tri solidaire. Tous ces outils mettent la mondialisation à contribution.

Ce budget contribue à nos actions en matière sanitaire ou environnementale. Le Fonds vert atteint 9,5 milliards de dollars; il accompagne les pays les plus vulnérables.

La France n'a pas à rougir de son effort de solidarité, au contraire. L'ADP contribue à notre rayonnement, à notre influence. La France reste un acteur incontournable de l'aide au développement.

Avec 0,41 % de son RNB consacré à l'APD, soit 8,54 milliards d'euros en 2013, la France reste largement au-dessus de la moyenne mondiale, qui est de 0,3 %. La trajectoire redevient ascendante dès 2015. L'enjeu est important, dans le contexte des discussions internationales ; je vous tiendrai informés de leur évolution.

Ce budget est construit sur des choix clairs et assumés. Les dons-projets sont maintenus à hauteur de 333 millions. Le FSP 100 000 professeurs pour l'Afrique sera mis en oeuvre comme prévu. Cette ligne est essentielle, elle ne doit pas être opposée aux prêts. Chaque outil a son intérêt, selon les pays, selon les projets.

Nous conservons des moyens pour répondre à l'urgence, qu'il s'agisse de l'aide alimentaire -à hauteur de 37 millions d'euros- ou de l'aide post-crise -22 milliards d'euros. Les ONG sont confortées dans leur mission.

L'AFD reçoit 840 millions sur trois ans pour renforcer ses fonds propres et augmenter son action sur nos priorités. J'assume mon rôle de tutelle avec vigilance.

L'aide aux ONG est confirmée, comme les crédits de la coopération décentralisée. La place des collectivités territoriales doit être reconnue.

Être plus concentré, c'est être plus fort sur le terrain, mieux mobiliser nos partenaires. Le ciblage géographique est amélioré, nous avons défini seize pays pauvres prioritaires qui reçoivent 50 % des subventions. Nous mettons l'accent sur l'Afrique subsaharienne et les pays francophones : quinze de ces seize sont francophones. Parmi les priorités sectorielles, la santé. Le plan français de riposte à Ebola atteint plus de 100 millions d'euros. J'ai inauguré le premier centre français en Guinée forestière, où une jeune fille de treize ans a été guérie. La France honore ses engagements. Mais nous n'agissons pas seul. Comme l'a dit le coordonnateur guinéen pour Ebola, c'est ensemble que nous vaincrons Ebola.

Plusieurs outils sont mis en oeuvre pour organiser la riposte : les fonds d'urgence, l'AFD, l'aide alimentaire, les contrats de désendettement et de développement. Une crise alimentaire s'annonce à partir de mars 2015 si nous n'agissons pas. Il faut aussi aider les enfants orphelins et isolés. 40 millions d'euros du programme 209 ont été spécifiquement dégagés.

L'effort en matière de santé passe aussi par les fonds verticaux, le Fonds mondial, Unitaid, entre autres.

Deuxième priorité, le climat, priorité diplomatique de 2015. 1 milliard de dollars pour le Fonds vert, je l'ai dit, dont 489 millions de dollars de dons et des prêts à taux zéro pour 285 millions de dollars.

Autre priorité transversale, la jeunesse. Elle recouvre la santé, l'accès à l'emploi, l'éducation, notamment des femmes. C'est en offrant à cette jeunesse une vision, un avenir que nous répondrons à l'enjeu de la mobilité.

Si les Français restent solidaires à 63 %, ils sont plus exigeants en termes d'utilisation des deniers publics. Nous rationaliserons nos actions, avec la création de l'Afeti qui regroupera six agences. Nous renforçons l'articulation entre aide bilatérale et multilatérale. La France demeure le deuxième contributeur au sein du FED. Deux exemples de l'effet de levier du multilatéral : les fonds de soutien à la Centrafrique et de lutte contre le virus Ebola.

Les Français exigent plus de transparence. Un site internet ouvert permet à chacun de suivre les actions et projets que nous menons, au Mali notamment. La création de l'Observatoire que vous avez souhaité répond aussi à cet impératif. Il est important de mobiliser les populations. Oui, madame Aïchi, l'AFD doit être plus transparente.

En 2015, nous adopterons les objectifs de développement durable, en remplacement des objectifs du Millénaire, qui ont vocation à s'appliquer à tous les pays. Tous sont incités à lutter contre la pauvreté, les inégalités et le dérèglement climatique. Une hausse de 4° de la température de la planète réduirait à néant tous les progrès intervenus contre la mortalité des enfants de moins de cinq ans. Nous n'avons pas le choix, les populations l'exigent, elles se sont saisies de ces questions.

Il nous faut travailler en partenariat avec les entreprises pour relever ces grands défis. Oui, nous devons être innovants, renforcer les ressources propres, lutter contre les paradis fiscaux, encourager l'implication du secteur privé.

Oui, monsieur del Picchia, la question des retraites est un sujet important. Je m'engage à parler de ce problème à Mme Touraine et à l'évoquer avec les ambassadeurs. Je vous invite à venir me rencontrer pour m'en dire davantage. (M. Robert del Picchia remercie) Députée de l'outre-mer, j'ai travaillé sur le cas des Français retraités des Nouvelles-Hébrides.

La RPE est à la fois un instrument de commerce extérieur et de développement, qu'il n'y ait pas de malentendu. Le changement de nom n'entraîne pas la suppression des projets à destination des pays émergents.

Je vous invite à dépasser nos divergences pour mettre en oeuvre cette politique de solidarité dont nous pouvons être fiers. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

ARTICLE 32 État B Mission « Aide publique au développement »

Mme la présidente.  - Amendement n°II-284, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

35 000 000

 

35 000 000

 

Solidarité à l'égard des pays en développementDont Titre 2

 

35 000 000

 

35 000 000

TOTAL

35 000 000

35 000 000

35 000 000

35 000 000

SOLDE

0

0

 

Mme Annick Girardin, secrétaire d'État.  - Lors des débats à l'Assemblée nationale, un montant de 35 millions d'euros en autorisations d'engagements et crédits de paiements a été transféré du programme 110 au programme 209, dans un contexte d'inquiétude sur le financement de la lutte contre l'épidémie d'Ebola et sur la base d'une analyse incomplète des impacts de ce changement de répartition. L'objectif était d'accroître la part des dons par rapport à celles des prêts.

Or ce transfert est juridiquement impossible ; en outre, la baisse de 35 millions d'euros ne pourrait s'imputer que sur les aides budgétaires globales, qui sont des dons et non des prêts. Ensuite, cela aurait fait baisser l'APD de la France de 400 millions d'euros, car les prêts AFD ont un fort effet de levier. Les bonifications bénéficient à 85 % aux pays africains.

Enfin, s'agissant de la lutte contre Ebola, le Gouvernement a dégagé une première enveloppe de 30 millions d'euros dans le cadre de la fin de gestion 2014 pour la construction des centres de traitement en Guinée ; en 2015, une enveloppe de 40 millions d'euros a été dégagée pour en assurer le fonctionnement et couvrir le plan de riposte.

Le Gouvernement vous demande de revenir sur le vote de l'Assemblée nationale.

Mme Fabienne Keller, rapporteure spéciale de la commission des finances.  - La commission ne s'est pas formellement réunie, mais j'émets, en accord avec M. Collin, co-rapporteur, un avis défavorable.

Le transfert voté à l'Assemblée nationale correspondait au souhait de rappeler l'importance des dons dans notre politique d'APD, notamment en direction des pays les plus pauvres. Or malgré la diminution de 35 millions d'euros, vous avez décidé en deuxième délibération un rabot supplémentaire de 11 millions d'euros...

Le décret d'avance de fin novembre a annulé 228 millions en autorisations d'engagements sur le programme 110. Cela aura un effet mécanique sur les crédits de paiements nécessaires en 2015. Il y a donc des marges de manoeuvre. Pour toutes ces raisons, avis défavorable.

L'amendement n°II-284 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission sont adoptés.

Les crédits du compte spécial « Prêts à des États étrangers » sont adoptés.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 3 décembre, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit quinze.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du mercredi 3 décembre 2014

Séance publique

À 9 h 30, à 14 h 30 et le soir

Présidence : Mme Isabelle Debré, vice-présidente Mme Françoise Cartron, vice-présidente

M. Claude Bérit-Débat, vice-président

M. Jean-Pierre Caffet, vice-président

Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

Secrétaires : Mme Valérie Létard - Mme Colette Melot

- Suite du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l'Assemblée nationale (n° 107, 2014-2015)

Examen des missions :

Recherche et enseignement supérieur

- MM. Philippe Adnot et Michel Berson, rapporteurs spéciaux (rapport n°108, tome 3, annexe 24)

- Mme Valérie Létard, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques (avis n°109, tome 6)

- M. Jacques Grosperrin et Mme Dominique Gillot, rapporteurs pour avis de la commission de la culture (avis n°112, tome 5)

- Mme Geneviève Jean, rapporteure pour avis de la commission du développement durable (avis n°113, tome 8)

Politique des territoires (+ article 57 ter)

. compte spécial : financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale

- MM. Pierre Jarlier et Daniel Raoul, rapporteur spécial (rapport n°108, tome 3, annexe 22)

- Mme Annie Guillemot, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques (avis n°109, tome 8)

- M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission du développement durable (avis n°113, tome 7)

Égalité des territoires et logement (+ articles 52 à 54)

- M. Philippe Dallier, rapporteur spécial (rapport n°108, tome 3, annexe 12)

- Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques (avis n°109, tome 7)

- M. Jean-Marie Morisset, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n°111, tome 3)

Défense

. compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunication de l'État

- M. Dominique de Legge, rapporteur spécial (rapport n°108, tome 3, annexe 8)

- MM. André Trillard et Jeanny Lorgeoux, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n°110, tome 5)

- M. Yves Pozzo di Borgo et Mme Michelle Demessine, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n°110, tome 6)

- MM. Robert del Picchia et Gilbert Roger, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n°110, tome 7)

- MM. Jacques Gautier, Xavier Pintat et Daniel Reiner, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (avis n°110, tome 8)

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°58 sur l'amendement n°II-50, présenté par M. Albéric de Montgolfier au nom de la commission des finances, à l'article 32 (crédits de la mission) (État B) du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l'Assemblée nationale.

Résultats du scrutin

Nombre de votants :329

Suffrages exprimés :329

Pour :188

Contre :141

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques*

Groupe UMP (143)

Pour : 142

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe socialiste (112)

Contre : 111

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Todeschini, membre du Gouvernement

Groupe UDI-UC (42)

Pour : 42

Groupe CRC (18)

Contre : 18

Groupe RDSE (13)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 12

Groupe écologiste (10)

N'ont pas pris part au vote : 10

Sénateurs non-inscrits (9)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 6 - MM. Michel Amiel, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n°59 sur l'amendement n°II-271, présenté par M. Jean-François Husson et les membres du groupe UMP, à l'article 32 (crédits de la mission) (État B) du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l'Assemblée nationale.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :329

Suffrages exprimés :287

Pour :146

Contre :141

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (143)

Pour : 142

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe socialiste (112)

Contre : 111

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Todeschini, membre du Gouvernement

Groupe UDI-UC (42)

Abstentions : 42

Groupe CRC (18)

Contre : 18

Groupe RDSE (13)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 12

Groupe écologiste (10)

N'ont pas pris part au vote : 10

Sénateurs non-inscrits (9)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 6 - MM. Michel Amiel, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier