Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement, retransmises en direct sur France 3, Public Sénat et le site internet du Sénat.

J'appelle chacun au respect d'une des valeurs du Sénat, le respect des uns et des autres - et du temps de parole. La Conférence des présidents a rappelé que la réplique ne saurait être une nouvelle question.

Vote britannique et position de la France

M. Olivier Cadic .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

En ce moment même, les Britanniques font un choix décisif pour leur destin, et pour notre destin commun : quitter l'Union européenne ou y rester.

L'Histoire se joue sous nos yeux. Demain, quelle que soit l'issue du scrutin, l'Union européenne ne pourra plus être la même. Il faudra alors remettre en marche la première puissance économique du monde.

Historiquement, la France a vocation à participer à la redéfinition de l'Europe. Ensemble, les Européens sont plus forts, mais aujourd'hui, nous sommes nombreux à nous demander où est l'Europe, et où est la France.

Que souhaite le Gouvernement ? (Applaudissements au centre et sur plusieurs bancs à droite)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Les citoyens britanniques sont en train de voter. Respectons le scrutin en cours car c'est un choix souverain qu'ils expriment.

La France souhaite que le Royaume-Uni reste dans l'Union européenne ; c'est son intérêt, c'est celui de l'Europe.

Quelle que soit la décision du peuple britannique, la France continuera à défendre une conception ambitieuse du projet européen. En matière économique, de citoyenneté, de sécurité, nos défis sont communs, nous devons les relever ensemble.

Le président de la République rencontrera Mme Merkel au lendemain du référendum, avant le prochain sommet européen.

La France et l'Allemagne doivent marcher main dans la main, répondre ensemble aux grandes crises, comme elles l'ont fait dans la crise ukrainienne, grâce à l'initiative du président de la République d'organiser une réunion au format Normandie, avec MM. Porochenko et Poutine. Face à la crise syrienne, à la crise des migrants en Méditerranée, nous répondrons à nouveau présents ensemble au rendez-vous de la construction européenne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Olivier Cadic.  - Je prends acte de votre réponse mais je ne distingue pas de cap. L'UDI suit le sien, celui du fédéralisme, socle véritable d'un projet partagé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC)

Maintien de l'ordre public

M. Roger Karoutchi .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Harassées, épuisées, engagées sur plusieurs fronts à la fois, nos forces de sécurité sont à bout : état d'urgence, protection des sites sensibles, Euro de football, manifestations, casseurs et leur cortège de dégradations... Les Français non plus n'en peuvent plus, parce qu'ils subissent la violence ou la voient à la télévision. (Applaudissements à droite)

La palinodie de ces derniers jours sur la manifestation d'aujourd'hui, tantôt interdite, tantôt autorisée, statique ou dynamique, selon un parcours raccourci ou circulaire, n'a pas rassuré les Français.

Monsieur le ministre de l'intérieur, je ne doute pas de votre sens aigu de l'ordre républicain.

Mais les Français ne se contentent plus de mots ou d'attitudes. Il faut faire en sorte, grâce à un plan pour l'ordre public, que les forces de l'ordre se sentent à nouveau motivées et que les Français se sentent à nouveau dans un État de droit. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur .  - C'est ce que nous faisons ! Nous avons créé 9 000 postes supplémentaires, quand 15 unités de forces mobiles, 13 000 emplois avaient été supprimés avant 2012. (Protestations à droite)

M. Jérôme Bignon.  - Ce n'est pas vrai !

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Nous augmentons de 17 % les effectifs de la police et de la gendarmerie. Des mesures catégorielles ont été prises pour 850 millions d'euros et les équipements de nos forces ont été renforcés.

La liberté de manifester a été garantie. Mais des violences extrêmement graves ont été commises lors des manifestations du 14 juin ; en conséquence, 1 800 casseurs ont été interpellés ; le président de la République et le Premier ministre m'ont demandé d'engager la discussion avec les organisations syndicales afin que de telles violences ne se reproduisent pas.

Les conditions de sécurité n'étant pas garanties, et les propositions que j'avais faites pour qu'elles le soient n'ayant pas été acceptées, j'ai moi-même pris l'initiative d'interdire celle d'aujourd'hui. Les syndicats, qui avaient demandé à me rencontrer, ont ensuite accepté ce qu'ils refusaient la veille, afin de permettre le bon déroulement de la manifestation. Dans ces conditions, celle-ci a pu être autorisée, dans le respect des principes républicains qui inspirent constamment notre action : usage proportionné de la force, intransigeance et fermeté face aux casseurs et respect de la liberté de manifester. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE)

M. Didier Guillaume.  - C'est très clair !

M. Roger Karoutchi.  - J'entends bien. Reste que chacun a le sentiment que l'État n'a plus d'autorité et ne parvient pas à rétablir l'ordre républicain ! (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)

Crise laitière

M. Yvon Collin .  - Voilà un an que le marché du lait est confronté à une surproduction, à cause de la fin des quotas laitiers, de la contraction de la demande mondiale, et de l'embargo russe. Ces éleveurs souffrent, en dépit des plans d'aide et leur situation financière est de plus en plus instable. Ils ont fait des efforts pour moderniser leur exploitation, mais avec un lait à 26 cents le litre, il ne leur est plus possible de gagner leur vie, voire de survivre. Pourtant les autres maillons de la chaîne voient leurs marges s'accroître.

Le Gouvernement n'a pas ménagé ses efforts mais il faut persévérer. Quelles propositions ferez-vous au Conseil des ministres européen ? Comment convaincre les pays du Nord ? Ne faudrait-il pas à court ou moyen terme rétablir les quotas laitiers ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Le niveau des prix, que vous avez cité, met en difficulté de nombreuses exploitations laitières. À cause de la fin des quotas, la production a explosé et en juin, 220 000 tonnes de poudre de lait sont déjà stockées. Il faut donc maîtriser la production. La France a fait des propositions, avec l'appui de la Pologne et désormais de l'Allemagne, qui a bougé, et c'est très important, dans ce format que l'on nomme « triangle de Weimar ». Je vous annonce que j'ai rencontré ce matin même le ministre de l'agriculture de Bavière, grand land producteur de lait : c'est une nouveauté, l'Allemagne et ses Länder sont sur la même ligne que la France et plaide, elle aussi, pour une maîtrise de la production. Ce serait une victoire majeure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; Mme Corinne Bouchoux applaudit aussi)

Réforme du doctorat

Mme Corinne Bouchoux .  - L'arrêté du 25 mai 2016 relatif au doctorat a réintroduit le débat sur la délivrance de ce diplôme par la validation des acquis de l'expérience (VAE). Cette possibilité, offerte par la loi du 17 janvier 2002 suscite l'inquiétude de certains universitaires, docteurs et doctorants.

À l'étranger, nos diplômés issus des grandes écoles, qui ne rencontrent guère de problème pour trouver un emploi en France, peinent parfois à faire valoir leurs compétences, car seul le titre de docteur y est reconnu. Mais pouvez-vous, monsieur le ministre, dissiper les craintes exprimées par les chercheurs, qui ne voudraient pas faire face à une concurrence que l'on peut qualifier de déloyale et nous dire où en est votre politique pour améliorer l'employabilité des docteurs, notamment par l'accès à certains corps de la fonction publique, prévu par la loi de 2013 ? Pourra-t-on, comme on l'entend, devenir docteur sans activité de recherche ? Oui au rapprochement entre l'université et les grandes écoles pourvu qu'il ne lèse personne.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Oui, la réforme du doctorat a fait l'objet d'un arrêté, publié, et un décret est en cours de préparation sur ce dernier point.

Nos docteurs ne sont pas reconnus à leur juste valeur. Nous rendons plus exigeante la formation doctorale, développons les cotutelles internationales et améliorons l'insertion professionnelle des docteurs par la définition de référentiels communs.

Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) a adopté la réforme du doctorat à une large majorité, ce qui est peu fréquent et témoigne de l'acceptation de la réforme.

Les commentaires relatifs à la VAE témoignent du peu d'esprit scientifique de certains...La soutenance de thèse sera soumise aux mêmes conditions. Les dossiers seront examinés par une commission d'universitaires. Il ne s'agit en aucun cas de délivrer des diplômes au rabais.

Il ne s'agit en outre que d'une poignée de cas, - 0,4 % des thèses soit 15 cas par an sur 4 000 ! - nous ne bradons aucunement le diplôme.

Enfin, nous avons ouvert des corps comme l'Igas et l'IGAENR ou le Corps des mines aux docteurs et nous poursuivons dans cette voie, ouverte par la loi de 2013, avec la ministre de la fonction publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Corinne Bouchoux.  - Votre réponse est rassurante. Si la réforme est si marginale, sans doute devons-nous communiquer davantage et mieux pour dissiper les craintes.

Des étudiants de l'ENA docteurs, comme on les y incite, serait une bonne idée, mais leur faire suivre un cursus doctoral à l'université à Paris, par exemple, serait plus intelligent et coûterait moins cher...

(M. Joël Labbé applaudit)

Loi Travail (I)

Mme Annie David .  - La mobilisation contre la loi Travail ne cesse de s'amplifier, encore aujourd'hui, mais le Gouvernement s'obstine. Il est même revenu sur le droit de manifester... Aucun infléchissement n'a suivi la rencontre de Mme El Khomri et des représentants de l'intersyndicale. Pourquoi ce silence ?

Les syndicats ne sont pas responsables de la fatigue des forces de l'ordre, ni des violences des casseurs, c'est votre obstination qui en est la cause. Quand suspendrez-vous le débat parlementaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; mouvements à droite)

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - (Exclamations à droite) N'en doutez pas, le Gouvernement ira jusqu'au bout pour que ce texte soit adopté d'ici la fin juillet.

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Ça, c'est la position d'aujourd'hui !

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Je veux que notre pays soit armé pour faire face à la concurrence internationale. Je n'accepte pas le niveau de chômage ni la dualité du marché du travail, ni la précarité.

Ce projet de loi comprend de nombreuses avancées. Curieuse proposition de suspendre un débat en cours ici même ! Vous ne dites mot du CPA, de la lutte contre la fraude au détachement, du droit à la déconnexion. Nous défendons aussi la négociation dans l'entreprise, l'échelon pertinent.

La majorité sénatoriale a beaucoup déséquilibré le texte.

M. Éric Doligé.  - Amélioré !

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Suppression des 35 heures, entre autres, mais aussi de la généralisation de la garantie Jeunes : voilà le projet de la droite !

Les syndicats qui contestent le texte ont manifesté leur opinion à des nombreuses reprises, et continuent en ce moment même, à Paris et en province...

M. Philippe Dallier.  - Ils tournent en rond ! (Sourires à droite)

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - D'autres syndicats l'approuvent au contraire.

J'aimerais vous entendre condamner les violences au lieu d'en faire endosser la responsabilité au Gouvernement. Cette condamnation a bien tardé quand on s'est attaqué, la semaine dernière, à l'hôpital Necker pour les enfants malades. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et républicain, au centre et à droite)

Nous irons jusqu'au bout. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Didier Guillaume.  - Très bien !

Mme Annie David.  - Je regrette que vous n'écoutiez pas nos propositions : deux avis favorables, peut-être, sur nos 400 amendements !

Vos amalgames, monsieur le Premier ministre, sont détestables. Oui, le CPA, la lutte contre la fraude au détachement sont positifs.

Mais l'inversion de la hiérarchie des normes, la lutte contre l'ordre public social sont catastrophiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Politique économique et budgétaire

M. Jacques Chiron .  - Selon les experts, la croissance sera de 1,6 % en 2016. Le chômage commence à baisser. L'embellie n'est donc pas un feu de paille, contrairement à ce que certains ont affirmé. (On s'esclaffe à droite) Les entreprises recommencent à investir, signe de leur confiance retrouvée. Le Gouvernement a tenu son pari et a su tout à la fois redresser les finances publiques et moderniser notre économie, sans sacrifier notre modèle social.

Consolidation du crédit d'impôt-recherche, (Exclamations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen) CICE, suramortissement, pacte de responsabilité : toutes ces mesures structurelles ont naturellement mis du temps à produire leurs effets. (Marques d'ironie à droite) Mais les résultats sont là. Nous disposons ainsi de marges de manoeuvres qui n'existaient pas en 2012. Dès 2014, des baisses d'impôts ont bénéficié aux neuf millions de Français les plus modestes.

Quelles seront les grandes orientations économiques et budgétaires pour la fin du quinquennat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics .  - Ce sont bien des experts indépendants qui constatent que la situation économique de la France s'améliore. (Exclamations à droite) La croissance est portée d'abord par la consommation des ménages : grâce aux baisses d'impôts, le pouvoir d'achat a augmenté, même si beaucoup de ménages sont encore en difficulté. D'autre part, l'investissement des entreprises a repris, entraînant une reprise des créations d'emplois, plus de 100 000 cette année.

La situation internationale est certes favorable avec un bas prix du pétrole mais ces résultats ne sont pas le fruit du hasard, ils sont avant tout ceux de notre politique. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et RDSE)

Crise sociale

M. Vincent Capo-Canellas .  - L'heure n'est plus de revenir sur les annonces curieuses sur le dispositif d'encadrement de la manifestation de cet après-midi.

Première question que cette affaire pose : celle de l'ordre public. Nos forces de l'ordre, de qualité, sont fatiguées, employées sur tous les fronts. Nous leur redisons notre confiance. (Applaudissements sur les bancs à droite) Mais la chaîne de commandement n'est pas claire.

M. Didier Guillaume.  - Qu'en savez-vous ?

M. Vincent Capo-Canellas.  - Comment redonner confiance aux forces de l'ordre dans le Gouvernement ?

Deuxième leçon à en tirer : le dialogue social n'est pas apaisé dans notre pays. Il nous reste du chemin à parcourir pour devenir un pays réformable. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - M. Cazeneuve et Mme El Khomri auraient pu vous répondre à deux voix...

Nous sommes conscients de l'état de fatigue de nos forces de sécurité. C'est pourquoi, dès 2012, nous avons augmenté leurs moyens, humains et techniques. Corriger ce qui a été défait sous le quinquennat précédent, cela demande du temps... Nous avons créé près de 10 000 postes supplémentaires.

Nous faisons face à une menace terroriste, tout en sécurisant l'Euro de football, qui pour l'heure se passe bien.

Le commandement ? Il est là, à sa place, et il est efficace. La police assure une mission difficile, délicate. Les ordres du ministre de l'intérieur sont particulièrement clairs : interpeller, protéger, prévenir les désordres.

Le problème des groupuscules d'ultragauche...

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - À quand des dissolutions ?

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Nous recourons à cette arme lorsque c'est nécessaire - contre les mouvements musulmans radicaux par exemple. Encore faut-il qu'existe une structure que l'on puisse dissoudre.

Nous promouvons le dialogue social. Je regrette d'ailleurs de n'avoir pas suffisamment salué la volonté de réforme de la CFDT sur la réforme des retraites lorsque nous étions dans l'opposition. (Mme Marie-Noëlle Lienemann se récrie) D'ailleurs, nous ne sommes pas revenus sur cette réforme. Quand on est dans l'opposition, on doit se comporter comme si l'on était déjà au pouvoir. (Applaudissements sur la plupart des bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Claude Lenoir.  - C'est ce que nous faisons !

Loi Travail (II)

M. Alain Joyandet .  - C'est aujourd'hui la quatorzième manifestation contre la loi Travail. La majorité se divise. Normal, puisque les électeurs de François Hollande se sentent trompés. Vous fuyez le débat à l'Assemblée nationale, la rue prend le relais. Et quel revirement de dernière minute sur l'autorisation de la manifestation d'aujourd'hui ! On ne peut pas laisser le pays ainsi ; quel est votre plan pour le sortir de cette situation ?

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - J'étais ministre de l'intérieur quant ont eu lieu de nombreuses manifestations contre le mariage pour tous, avec des violences en marge de ces manifestations. (Exclamations à droite) notamment de la part des groupes d'extrême droite.

M. François Grosdidier.  - Ce n'était pas l'état d'urgence !

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Tout le monde s'accordait alors pour permettre aux manifestations de se dérouler, et au débat parlementaire de se poursuivre.

Il n'y a pas de « plan », comme vous dites. Dans une démocratie, chacun doit pouvoir s'exprimer, manifester, dans le respect de chacun. Ce projet de loi ira jusqu'au bout de son parcours, chacun prend ses responsabilités. (Applaudissements sur la plupart des bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Alain Joyandet.  - Le mariage pour tous, vous l'aviez annoncé, pas la loi Travail. Vous deviez vous attaquer à la finance, vous vous en prenez aux travailleurs. Beaucoup de nos concitoyens sont à la peine, les Français normaux se font du souci pour leurs enfants, ils n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois, ils ne savent pas où vous emmenez le pays. Il n'y a plus que les Bleus pour redorer notre blason ! (Applaudissements à droite ainsi que sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Politique de santé 

M. Yves Daudigny .  - Mme Touraine a annoncé un plan pour l'hôpital de 2 milliards d'euros sur cinq ans, dans la continuité des réformes déjà engagées depuis 2012.

Les Français doivent choisir le système de protection sociale qu'ils souhaitent, savoir s'il les protégera ou non. Ils doivent lire la proposition de loi de la droite, discutée le 14 juin à l'Assemblée nationale : sur la prévention, rien ; sur la coordination des structures de prise en charge, rien ; sur l'innovation, rien ; sur les droits des patients, rien. En revanche, s'il s'agit de défaire, réduire, supprimer, c'est oui, oui, oui. Cette proposition de loi est la quintessence d'une politique qui nous a laissé 30 milliards d'euros de déficits sociaux.

En 2012, une rupture profonde s'est opérée. À la logique de l'efficience et de la mise en concurrence s'est substituée celle de la solidarité et de l'excellence. Redressement des comptes sociaux, réduction du reste à charge, consolidation du service public hospitalier, financement et organisation repensés : chacun peut constater les résultats de la politique suivie. L'excellence de notre système de soins est reconnue.

Pourriez-vous nous rappeler le détail des mesures qui viennent d'être annoncées ?

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé .  - Vous avez bien fait de rappeler des vérités trop oubliées. (Exclamations à droite). Depuis quelque temps, on voit éclore des projets alternatifs qui nous rappellent un passé pas si lointain : augmenter les franchises et les forfaits non remboursés, diminuer de 3 % le remboursement de la Sécurité sociale. On parle aussi de « revoir la carte hospitalière », ce qui signifie en français supprimer purement et simplement les hôpitaux de proximité.

Comment économiser 100 milliards d'euros sans toucher à l'hôpital public ? En 2016, à l'inverse, nous consacrons 1,3 milliard de plus à l'hôpital. Nous avons recruté 30 000 personnes dans les hôpitaux et avons investi massivement pour les moderniser. Les résultats sont là. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Brexit

Mme Pascale Gruny .  - Les Britanniques se prononcent en ce moment sur leur maintien dans l'Union européenne. Les conséquences d'un Brexit seraient, à n'en pas douter, négatives pour l'Europe. Mais ne nous y trompons pas, c'est l'ensemble du continent qui est frappé par la défiance contre Bruxelles.

Quelle que soit l'issue du scrutin, il faudra relancer les projets européens, apporter des réponses politiques. Voilà des mois que François Hollande annonce un partenariat franco-allemand, sans que rien ne vienne. La France est-elle en mesure de faire à ses partenaires des propositions de relance pour un second souffle ? (Applaudissements à droite)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - À nouveau, laissons les Britanniques, souverains, se prononcer. Je répète que le Gouvernement souhaite le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne.

La France a été un acteur majeur de toutes les grandes étapes de la construction européenne : CECA, marché commun, PAC, accords de Schengen, monnaie unique... La France a toujours été à l'initiative, même dans les projets les moins populaires, comme la défense. C'est le président de la République qui a le premier activé l'article 42-7 du traité de Lisbonne pour que nos voisins interviennent à nos côtés en Irak, Syrie, au Mali. C'est la France qui promeut l'assouplissement du pacte de stabilité, la relance en Europe et la voie de la croissance, à travers le plan Juncker. Sa voix doit être entendue et elle le sera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Pascale Gruny.  - Oui, la France a toujours été pionnière. Mais, depuis 2012 on ne l'entend plus. Et chaque fois que vous avez été aux manettes, il y a eu croissance de l'Union européenne, sauf chez nous. Nous avons besoin d'une France forte à nouveau ! (Applaudissements à droite)

Aéroport de Notre-Dame-des-Landes (I)

M. Yannick Vaugrenard .  - Dimanche, en Loire-Atlantique, les électeurs diront s'ils souhaitent le transfert de l'aéroport de Nantes-Atlantique à Notre-Dame-des-Landes. Ils devront dire aussi leur conception de la démocratie et de l'État de droit : une infime minorité de zadistes doit-elle imposer sa loi ?

Oui, ce projet créera des emplois. Il est adapté à la hausse du trafic aérien. Il s'accompagnera de mesures environnementales et agricoles exceptionnelles. Il y a dix ans, on nous annonçait quasiment la disparition du transport aérien avec une explosion du prix du kérosène

Nous assurez-vous que le vote des électeurs sera respecté ? Les habitants de Loire-Atlantique attendent une ligne claire. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et républicain ainsi que sur quelques bancs à droite et au centre)

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - Je connais votre attachement au projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Vos arguments parlent d'eux-mêmes. La consultation des habitants de Loire-Atlantique tranchera démocratiquement un débat qui dure depuis longtemps. Si le non l'emporte, le projet sera abandonné. Si c'est le oui, les travaux commenceront dès l'automne. Tous ceux qui occupent illégalement cet espace devront l'évacuer : c'est ainsi que l'autorité de l'État se fait respecter. (Applaudissements sur la plupart des bancs du groupe socialiste et républicain)

Aéroport de Notre-Dame-des-Landes (II)

M. André Trillard .  - Le 11 février, le président de la République annonçait le référendum local sur l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Ultime péripétie d'un dossier lancé dans les années soixante. Cette consultation est une preuve de faiblesse d'un gouvernement, otage des Verts.

Quelle décision prendrez-vous sitôt le résultat connu ? (Applaudissements à droite)

M. le président.  - M. le Premier ministre est à la tâche aujourd'hui !

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - Pas qu'aujourd'hui, et c'est une tâche exaltante même si je n'entends pas que des compliments. (Sourires)

Le référendum aura lieu dimanche. Je ne doute pas que ce projet, soutenu par tous les acteurs institutionnels et économiques, corresponde aux intérêts et développement de la région. Aux électeurs de trancher cependant. Ils ont eu tous les éléments d'information grâce au travail remarquable de la commission nationale du débat public. Leur choix sera souverain. Il ne faut pas craindre la voix du peuple.

Si le non l'emporte, le projet est abandonné. Si c'est le oui, les procédures pour la mise en route des travaux seront lancées et, dès le lendemain, ceux qui occupent illégalement le terrain seront évacués. (Applaudissements sur la plupart des bancs du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur quelques bancs à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Très bien !

M. André Trillard.  - Il est temps de rétablir l'ordre ! Plus de 150 décisions de justice ont été rendues en faveur du projet, aucune à son encontre. Il est temps de mettre fin à l'insécurité qui sévit à Notre-Dame-des-Landes et jusqu'au centre de Nantes. Écoutons les 116 maires, représentant 85 % de la population du département, qui soutiennent le projet. La saturation de l'aéroport actuel lui a fait refuser 250 vols l'an dernier. Donnons enfin au Grand Ouest, situé à la périphérie de l'Europe, les moyens de se développer. (Applaudissements sur de nombreux bancs)

Chevauchements entre intercommunalité et département

M. Jean Louis Masson .  - Une personnalité éminente vient de rappeler que depuis dix ans, la politique menée vise à remplacer les communes et les départements par de grandes intercommunalités et de grandes régions. La loi NOTRe en est le dernier avatar, avec la DGF territoriale. J'ai voté contre, car je défends les communes et la gestion de proximité en milieu rural. Mais je ne me fais guère d'illusions....

Il faut à tout le moins un minimum de cohérence dans les découpages. Comment accepter que des intercommunalités soient sur deux départements ? Les intercommunalités ayant un rôle primordial de gestion quotidienne, il faudrait au moins ajuster les limites départementales à celles des nouvelles intercommunalités. Est-ce là la voie que suit le Gouvernement ?

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales .  - La loi n'exclut pas que des intercommunalités soient sur deux département, voire, comme cela se produit, sur trois départements et deux régions. Plusieurs projets de création de nouvelles intercommunalités sont soumis à la validation des conseillers municipaux et des conseillers communautaires pour un périmètre transdépartemental.

Les intercommunalités ne sont pas des collectivités territoriales de plein exercice. À la différence des communes nouvelles, le code général des collectivités territoriales ne prévoit pas de modification des frontières des départements en cas de création d'une intercommunalité. Je reste à votre disposition pour évoquer toutes les souplesses dont peuvent bénéficier les intercommunalités transdépartementales. 

Je vous rappelle que la loi NOTRe a préservé les communes, seul échelon disposant de la clause générale de compétence. Pour l'instant, la piste de la DGF territorialisée n'a pas été retenue. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean Louis Masson.  - Il y a quand même un problème de cohérence, que vous faites semblant d'ignorer. Une intercommunalité qui s'étend sur deux départements, c'est déjà bizarre, sur deux régions, c'est carrément saugrenu. J'espérais dans votre réponse une solution, pas un rappel des dispositions du code général des collectivités territoriales, que je connais aussi bien que vous !