Débat sur l'avenir de La Poste

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle le débat sur : « la situation et l'avenir de La Poste » (demande du groupe communiste républicain et citoyen).

M. Jean-Pierre Bosino, au nom du groupe communiste républicain et citoyen .  - Je regrette de voir les rangs de la droite si clairsemés...

M. Jean Desessard.  - Si c'était un bureau de poste, il serait déjà fermé ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Ou transféré dans une supérette !

M. Jean-Pierre Bosino.  - La dégradation du service postal touche désormais tout le territoire. Partout, les personnels, les élus, les usagers luttent. La direction prétend qu'il faut restructurer, pallier la baisse du courrier qui, selon Philippe Wahl, aura disparu d'ici quinze ans. Il y a dix ans déjà, on annonçait le passage au tout numérique... Nous ne nions pas la baisse du courrier, mais on est loin de la couverture numérique parfaite !

La couverture des zones blanches tarde à venir. Sans opérateur public, pas d'égal accès au réseau, pas de solidarité. La Poste organise les funérailles du service public, avec l'assentiment de l'État.

Tout est fait pour que les usagers ne viennent plus au bureau de poste : remplacement des agents par les machines, réduction de l'amplitude horaire, fermetures sauvages pendant l'été - même suppression des sièges ! Les gouvernements laissent faire.

Heureusement, les députés ont supprimé la dématérialisation de la propagande électorale prévue à l'article 52 du projet de loi de finances, qui aurait signifié une perte de 70 millions d'euros pour La Poste et un nouveau recul de la démocratie.

Conséquence des restructurations, les retards de courrier s'accumulent. C'est le cas dans ma ville de Montataire : rien en août, puis tout d'un coup, les premiers jours de septembre, avec jusqu'à 28 jours de retard ! Parfois, le courrier arrive au bon numéro, à la bonne rue... mais pas dans la bonne commune... Un cabinet d'huissier a même déposé plainte, car cela impactait son activité.

Le groupe propose de confier aux postiers toutes sortes de nouveaux services : faire passer le permis de conduire, livrer des pizzas, prendre soin des personnes âgées... Le PDG de La Poste se targue d'en faire la première entreprise de proximité humaine, oubliant que sa mission première est de distribuer correctement le courrier.

Un bureau de poste, dans la novlangue postale, est un « point de contact », mais le maillage territorial est remis en cause. L'aménagement du territoire est une des missions de service public confiées à La Poste depuis 2009. Or 46 % de ces « points de contact » sont des lieux autres que des bureaux de poste, généralement payés par les communes.

Comme ce fut le cas chez France Telecom, les restructurations permanentes ont des conséquences dramatiques sur les agents. Au moment où nous débattons, ils sont rassemblés devant le Sénat et trois syndicats ont appelé à la grève ce jour pour dénoncer les conditions de travail dégradées et les pressions sur les salariés.

Pas moins de huit cabinets d'expertise ont prévenu le PDG de La Poste et le Gouvernement de l'ampleur de la crise sociale et des effets délétères des réorganisations et des réductions d'effectifs. De 20 à 40 % des tournées sont intenables, les accidents se multiplient. Dans le Nord, une jeune femme victime d'un AVC sur son lieu de travail s'est vu intimer l'ordre de finir son travail avant qu'on n'appelle les secours... Sans parler des suicides de salariés.

À l'État de prendre ses responsabilités et de mettre fin à cette course à la rentabilité financière qui dégrade à la fois le service rendu aux usagers et les conditions de travail. Pensons La Poste de demain avec le personnel, les élus et les usagers, dans une vraie démarche participative. En 2009, deux millions de citoyens s'étaient prononcés dans une votation contre la loi Estrosi ; à l'époque, les socialistes étaient à nos côtés.

Il faut au préalable renégocier la directive européenne sur les services publics. François Hollande s'était engagé à faire adopter une directive sur la protection des services publics. Qu'en est-il ?

Payer pour un point de contact ou voir La Poste quitter la commune... On enferme les maires dans un choix qui n'en est pas un. Nous regrettons que l'Association des maires de France ait signé le nouveau contrat de présence postale ; seuls les maires communistes ont voté contre, fidèles à leurs principes. Partout, des élus manifestent.

La Poste parle clients, rentabilité financière. Parlons plutôt rentabilité sociale. Assez de discours, passons aux actes. Longtemps notre fierté, La Poste doit être placée sous protection citoyenne : nous appelons nos concitoyens à refuser toute nouvelle fermeture et suppression d'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; M. Jean Desessard applaudit également, ainsi que Mme Delphine Bataille)

M. Joël Guerriau .  - La Poste, société anonyme depuis 2010, doit s'adapter au changement des modes de vie pour développer un service public de qualité. Pour préserver son rôle dans l'aménagement du territoire, elle doit d'abord faire évoluer ses missions en milieu rural, où les besoins de présence postale sont accrus. Le troisième contrat de présence territoriale postale s'achève ; le prochain devra garantir la mission d'aménagement du territoire de La Poste. Avec ses 17 000 points de contact, la Poste est l'un des derniers services publics sur l'ensemble du territoire. Le lien poste-mairie est essentiel. Les mutualisations de locaux et de services se multiplient, ainsi que les maisons de services au public, depuis 2010.

Le développement des ventes sur internet favorise l'activité d'acheminement des colis. L'allongement de la durée de vie, l'éclatement des familles, la tendance à l'individualisme conduisent à de nouvelles formes d'isolement et La Poste a un rôle crucial à jouer contre cela.

M. Jean Desessard.  - Absolument.

M. Joël Guerriau.  - Dans les petites communes qui perdent leurs commerces de proximité, les facteurs, qui ont un capital confiance, peuvent remplir de nouvelles missions auprès des plus fragiles par la présence humaine qu'ils apportent.

Depuis son virage numérique de 2015, La Poste offre désormais un large bouquet de services numériques. Les nouveaux services doivent s'adapter aux nouveaux usages ; ils doivent apporter une plus-value. Le facteur apporte informations et conseils. La concurrence l'a compris. La Poste peut aussi proposer des panels de services aux collectivités locales, en s'adaptant aux contextes locaux.

En Loire-Atlantique, nous avons réfléchi avec les responsables de La Poste au portage de proximité - de livres, par exemple, ou de médicaments - à la vigie, à la collecte et au recyclage d'objets, à la collecte d'informations.

Pour faire accepter ces évolutions, il faut accompagner le personnel de manière fine, éviter les changements brutaux, développer la formation professionnelle.

Les élus sont particulièrement vigilants sur les horaires d'ouverture, notamment en zone rurale. Nous sommes attachés au rôle de La Poste en matière de relations humaines. Ces évolutions sont le prix à payer pour maintenir un service de proximité, mais quel plus beau défi ?

Ce que l'avenir vous promet, La Poste s'engage à vous l'apporter, dit le slogan !

M. Jean Desessard .  - Merci à mes collègues du groupe CRC d'avoir voulu ce débat. La droite, absente, ne s'intéresse sans doute pas à La Poste...

M. Jean-Pierre Bosino.  - C'est un euphémisme !

M. Jean Desessard.  - Pourtant ce sujet concerne tous les territoires, de Paris au Maine-et-Loire. Le mouvement auquel nous assistons nous inquiète, pour l'avenir du service public et pour celui des agents. Les écologistes souscrivent au principe de mutabilité et d'adaptation du service postal face aux évolutions des technologies et des besoins. La baisse du courrier papier, la hausse des ventes sur internet sont indéniables.

Nous comprenons la logique des maisons de services au public. Mais nous sommes sceptiques quant à l'installation de points relais dans des commerces. Quid de la confidentialité du courrier ? De la confusion entre consommation et service public ? Dans le cadre du service « Veiller sur mes parents », les facteurs se rendent auprès des personnes âgées ; c'est bien, mais encore faut-il être libre des impératifs de rentabilité pour être véritablement au service des gens. La tendance impulsée par le conseil d'administration de La Poste est à la fermeture des bureaux non rentables - alors que La Poste bénéficie d'abattements fiscaux pour assurer sa présence sur tout le territoire... (Approbation sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

L'État, actionnaire majoritaire, doit être garant de la notion de service public.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien.

M. Jean Desessard.  - L'évolution ne doit pas se faire dans le sens du démantèlement.

Les fermetures ont des conséquences pour les agents, avec le non-remplacement de 20 000 départs alors même que La Poste a reçu 900 millions de CICE...

Mme Éliane Assassi.  - Et voilà !

M. Jean Desessard.  - Neuf facteurs se sont suicidés ces dernières années, cinq ont tenté de le faire sur leur lieu de travail. Le taux d'absentéisme est élevé. Pour le CHS, le climat social est délétère, la situation est alarmante.

La santé et le bien-être des agents ne sauraient être des variables d'ajustement.

Le service public était au coeur du programme du Conseil national de la résistance (CNR). Dans un contexte de crise structurelle qui creuse les inégalités, de société fracturée, les services publics sont le patrimoine de ceux qui n'en ont pas ! C'est notre devoir de les préserver. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Depuis que la droite a ouvert la brèche en transformant La Poste en société anonyme, la situation a empiré. Quelle sera la prochaine étape ? La privatisation ?

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Jean Desessard.  - La situation de La Poste nous appelle à demander des états généraux du service postal pour définir, avec toutes les parties prenantes, les contours du service public de demain. (Applaudissements nourris sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Delphine Bataille .  - Merci au groupe CRC d'avoir initié ce débat sur une des entreprises préférées des Français. La Poste, ce sont 250 000 employés, c'est le premier réseau commercial de proximité avec 17 000 points de contact, qui en font le réseau postal le plus dense d'Europe. C'est aussi un facteur de cohésion et de lien social, et un acteur du développement territorial.

Depuis une dizaine d'années, La Poste est confrontée à la concurrence, au développement numérique, à une baisse du volume de courrier distribué. Le groupe a revu à la baisse son maillage territorial : il ne reste que 9 000 bureaux de poste. Beaucoup ont été fermés en zone rurale, remplacés par de simples relais ou entièrement automatisés, les amplitudes horaires réduites.

« Bougez avec La Poste », disait le slogan. Cela bouge tellement que les services se réduisent comme peau de chagrin à force de restructurations.

Le traitement du Hainaut-Cambrésis est symptomatique. Les fermetures de bureau, la réduction des amplitudes horaires, prises sans concertation, pénalisent les plus fragiles, qui ont besoin de l'aide du guichetier. Dans la commune où a grandi Pierre Mauroy, le bureau de poste a été vendu pour être remplacé par une agence postale communale... Les élus locaux veulent des garanties sur la pérennité de l'engagement et de l'accompagnement financier. Dans une commune voisine, le maire a exercé son droit de préemption pour racheter le bureau de poste, mais l'ouverture sera limitée au strict minimum.

En zone rurale, il est vital de renforcer le lien social. Le facteur rendait de nombreux services. Or tout est aujourd'hui payant, même le portage de médicaments. Dans des territoires déjà fragilisés, le sentiment d'abandon est terrible. Cela alimente le vote antirépublicain. On supprime des bureaux de poste comme les liaisons ferroviaires en arguant de la baisse de fréquentation... Mais les horaires sont déjà réduits au minimum, pour décourager les usagers ! (On acquiesce sur les bancs sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Réduire le service public postal, c'est faire progresser le désert.

Le contrat de présence postale 2014-2016 prévoyait des mutualisations, en concertation avec les maires. Lors du premier comité interministériel aux ruralités, le Gouvernement avait décidé d'accélérer le déploiement annoncé de mille maisons de service public. Un fonds inter-opérateurs a été ouvert ; l'objectif sera-t-il atteint en fin d'année ? Monsieur le ministre, pouvez-vous rassurer les élus, qui s'inquiètent du nouveau contrat de présence postale ?

La Poste a supprimé 7 000 emplois en 2015, près de 50 000 depuis 2008. Les conditions de travail se dégradent, plusieurs cabinets d'experts ont sonné l'alarme. Dans le Nord, une jeune femme victime d'un AVC a porté plainte, accusant les responsables de son centre de distribution de non-assistance à personne en danger. Les syndicats appellent à une grève. Le Gouvernement va-t-il demander à ce que les méthodes de management de la direction soient revues ?

Les résultats du groupe s'améliorent, mais la Cour des comptes pousse à accélérer les réformes, à revoir le service postal universel, estimant que certains facteurs sont sous-occupés. Son analyse pose problème, car elle risque d'aggraver la situation des plus fragiles dans les territoires ruraux. Comment comptez-vous préserver ce service public essentiel ? À quand l'étude d'impact sur le développement du numérique et ses effets sur le volume de courrier distribué ? La Poste va-t-elle enfin prendre en compte les revendications des agents dits reclassés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen)

M. Stéphane Ravier .  - « Nous avons confié notre petit trésor aux seuls gens qui n'égarent jamais rien. Aux employés de cette administration que le monde entier nous envie, j'ai nommé les PTT ». Voilà ce que disait le « Dabe » interprété par Jean Gabin dans Le Cave se rebiffe. Oui, le monde nous enviait La Poste, avant la casse organisée par les technocrates de Bruxelles. La Poste est l'exemple parfait de la destruction organisée du service public par l'Union européenne au nom du dogme de la concurrence.

La privatisation et l'ouverture à la concurrence ont dégradé le service. Hausse des tarifs, fermeture de bureaux ont accru les inégalités d'accès au service public. Lorsque la rentabilité prend le pas sur le service, lorsque l'usager devient un client, la France des oubliés trinque.

Trinquent également les agents de La Poste qui ont du mal à remplir des objectifs chiffrés, alors qu'ils s'étaient engagés pour une politique du service ; ce qui est vrai pour les postiers l'est aussi pour les policiers

Cette privatisation larvée, qui a commencé sous Michel Rocard par la scission des PTT entre La Poste et France Télécom, a-t-elle améliorée le service aux usagers ? Non. Les agents sont-ils plus épanouis ? À l'évidence, non. Qui a gagné ? Quelques financiers peut-être, les idéologues de la concurrence sûrement. Seul le patriotisme économique garantira l'égalité et la continuité territoriales en permettant au service public d'assurer sa mission. Et voilà qu'un ancien Premier ministre devenu candidat à la présidence de la République annonce 500 000 suppressions de postes dans la fonction publique...

Il est temps de restaurer un service public hérité de siècles d'histoire, pour qu'il remplisse sa mission au bénéfice de tous les Français.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Le contrat de présence postale 2017-2019 vient d'être signé par le bureau de l'AMF ; les élus communistes ont voté contre. Dans les Hauts-de-Seine, il se traduit par la fermeture de dix bureaux de poste et des partenariats avec des supermarchés. À Bagneux, un bureau pourtant situé dans un quartier politique de la ville va fermer... On passe à un réseau dominé par les partenariats. Certes, le nombre de points de contact demeure inchangé, mais sous ce nom cohabitent huit types de lieux différents, comme maison de services au public, facteur-guichetier, agence communale ou encore espace de co-working nomade !

Le transfert de charges a un coût. Ainsi de la suppression des postes restantes, transférées aux mairies ou CCAS, sans parler des annonces de location d'une boîte aux lettres pour 200 euros par mois ! Confidentialité et confiance vont de pair. Les facteurs sont assermentés, responsables financièrement des plis et colis. Dans une supérette, plus de tiers de confiance.

Les réactions aux annonces de fermetures témoignent de l'attachement des élus et des usagers ; les pétitions se multiplient. À Tours, les comités de quartier ont réagi à la suppression annoncée de plusieurs bureaux. On ne peut appliquer aveuglément un critère purement comptable, un bureau pour 20 000 habitants, quand il s'agit d'un service public de proximité.

Que dire des relations avec les élus ? La réponse que j'ai reçue du directeur départemental de La Poste témoigne d'un mépris certain. Le contrat de présence postale 2017-2019 remplace l'accord préalable du conseil municipal à toute fermeture par un simple avis du maire, faisant ainsi sauter un verrou démocratique. C'est grave.

L'AMF a obtenu que le fonds de péréquation soit abondé de 4 millions - mais 35 % de ce fonds, soit 50 millions d'euros, sert à fermer des bureaux et alimente la grande distribution qui accueille les points de contact !

Envoyer seul depuis chez soi un colis d'1 kilo coûtera 13,50 euros, contre 7,50 euros au bureau de poste. La rentabilité de l'activité courrier va s'en trouver améliorée ! C'est d'ailleurs la branche service-courriers-colis qui offre la meilleure « performance opérationnelle ».

Alors que La Poste a perçu 900 millions de CICE en trois ans, elle a supprimé 21 000 emplois, multiplié les CDD et augmenté la sous-traitance... Cadences infernales, burn out, suicides, les conditions de travail sont effroyables.

Que deviendra l'accès universel au service postal universel quand il sera tributaire de contrats signés avec les collectivités ? Mise sous surveillance citoyenne, états généraux de La Poste, nous disons : banco ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; M. Jean Desessard et Mme Delphine Bataille applaudissent également)

M. Jacques Mézard .  - Ce débat met en lumière des revendications qui remontent des syndicats et du terrain. La situation de La Poste suscite l'inquiétude de nos citoyens, notamment dans les territoires ruraux. Dans mon département, de plus en plus mal desservi par le train, par la route, par son seul avion, on se demande qui nous distribuera le courrier...

Certes, il faut savoir entendre les évolutions technologiques et sociologiques, et le rôle de La Poste aujourd'hui ne peut pas être ce qu'il était il y a dix ans, ni ce qu'il sera dans dix ans. Il convient d'accompagner ces évolutions, de les anticiper, pour vivre ces mutations sans crainte du lendemain.

Il y a de moins en moins de courrier. À juste titre, le PDG de La Poste recherche des solutions positives, pour lui conserver une mission de service public.

En 2009, notre groupe s'était majoritairement opposé à la transformation de La Poste en société anonyme et avait insisté pour qu'elle continue à assumer les missions de service public que lui confie la loi du 2 juillet 1990.

Il ne s'agit pas de refuser les mutations. Mais comment faire ? L'inquiétude des agents est forte : il faut leur donner de l'espoir, les sortir de situations d'emploi précaire.

La Poste a un atout : sa présence. La Banque postale aussi, qu'il convient de développer pour conforter les autres volets et services de La Poste - d'autant plus que le Crédit agricole, lui, se retire.

Souvent, pour les personnes âgées qui vivent dans nos communes rurales, le lien avec l'extérieur, c'est le facteur. Réfléchissons aux moyens de maintenir ce lien social tout en faisant évoluer les activités de La Poste.

L'ossature de notre pays ne saurait être compromise par le règne de l'immédiateté. La décentralisation sans l'aménagement du territoire, je n'en veux pas. Il faut la concilier avec le maintien sur tout le territoire du service public garanti par l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Philippe Kaltenbach .  - Sur tous les bancs, nous sommes inquiets, sauf peut-être sur ceux, vides, du groupe Les Républicains, dont le candidat veut supprimer 500 000 emplois de fonctionnaires.

M. Jean Desessard.  - La Poste est une société anonyme...

M. Philippe Kaltenbach.  - Il y reste beaucoup de fonctionnaires. Les agents expriment une véritable souffrance au travail. Je n'ai pas envie de revivre les suicides en cascade que nous avons connus à France Télécom. Nous sommes collectivement responsables, et je compte sur le Gouvernement pour favoriser le dialogue social, car on ne fait pas évoluer une entreprise contre ses salariés.

Même en zone urbaine dense, La Poste se désengage. Elle veut supprimer douze bureaux dans les Hauts-de-Seine, y compris dans les quartiers où l'habitat social est important. C'est se tirer une balle dans le pied. Les banlieusards ont droit à des services publics de qualité ! Ailleurs, les horaires sont réduits... La qualité du service s'en ressent fortement. Nous connaissons l'engagement du Gouvernement, et avons besoin d'une voix forte et d'une réponse précise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie .  - Merci au groupe CRC d'avoir pris l'initiative de ce débat. Nous ne pouvons ignorer les alertes lancées par le personnel de La Poste, les usagers, les élus locaux. En même temps, il faut tenir un discours de vérité. Nous sommes très attachés aux quatre missions du service public de La Poste, mais vous l'avez dit, nous sommes confrontés à des évolutions. C'est ce que j'ai dit le 30 novembre au Comité de suivi de haut niveau du contrat de présence.

Deux questions se posent : la couverture territoriale et la situation du personnel. La Poste est confrontée plus que d'autres à des chocs technologiques, de comportement, de consommation, avec la baisse considérable du volume de courrier, 6 % par an et cela s'accélère, ce qui représente 600 millions d'euros de ressources en moins. Les 250 000 postiers le savent.

M. Thierry Foucaud.  - Nous aussi !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - Attention à ne pas véhiculer une image si dégradée de La Poste qu'elle ne corresponde pas à la réalité. (Protestations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Élu local, je sais que la diminution des horaires n'explique pas la baisse du courrier. Regardez autour de vous, combien de gens ne vont plus guère au bureau de poste parce que le service est rendu par d'autres voies !

Mme Éliane Assassi.   - On nous sert les mêmes arguments à propos de la SNCF !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - La formation des postiers est indispensable : elle a concerné 80 % d'entre eux cette année. Bien sûr, des tournées se sont alourdies. Bien sûr, il y a des problèmes. Mais qu'il s'agisse d'un service public ne signifie pas que rien ne doive évoluer !

Mme Éliane Assassi.  - Personne n'a dit cela !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - C'est ce que j'ai entendu...

M. Thierry Foucaud.  - Pas de nous !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - L'État accompagne cette mutation. La Poste consacre 300 millions d'euros par an à la formation, autant que le CICE qu'elle perçoit.

Quant au dialogue social, cinq accords nationaux ont été conclus depuis le début de l'année, onze l'an passé. L'État veille à ce que les problèmes locaux soient pris en compte.

L'AMF a elle-même adopté ce matin le contrat de présence postale.

M. Jean-Pierre Bosino.  - C'est bien regrettable !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - Sur les horaires d'été, La Poste a donné des réponses. La participation financière de l'État au fonds postal de péréquation passe de 510 à 520 millions d'euros.

Le précédent contrat était tourné principalement vers les zones rurales, c'est un fait, mais ce n'est pas le cas du nouveau, les quartiers de la politique de la ville y sont intégrés.

Il faut donc tenir compte des messages adressés, et faire des propositions pour maintenir les missions de service public de La Poste.

M. Jean-Pierre Bosino.  - Nous en faisons.

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État. - L'inclusion bancaire d'abord : la Banque postale est essentielle pour les plus défavorisés. L'acheminement de la presse est aussi une mission de service public. Comment tirer parti de l'atout de proximité de La Poste pour développer d'autres services ? Les services aux particuliers proposés vont dans le bon sens. (Mouvements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Le suivi assuré par l'État comprend des objectifs qualitatifs. Un critère n'est pas rempli, la vitesse d'acheminement du courrier à j+2, sur lequel il faut encore progresser.

Pour répondre à la problématique à laquelle La Poste et ses agents sont confrontés, il faut d'abord un contrat avec l'État et les communes. Nous avons apporté des réponses, notamment financières. Nous soutenons aussi l'idée que les métiers doivent évoluer.

M. Thierry Foucaud.  - Cinq fois que vous le dites !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - Parce que c'est cela la réponse ! Une concertation est en cours avec les agents, qui doit bientôt aboutir à des propositions concrètes.

Voilà la voie pour préserver le service public auquel nous sommes attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Thierry Foucaud.  - Baratin !

M. Alain Gournac.  - C'était bien mauvais...