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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Dépôt d'un document

Accord en CMP

Questions orales

Interdictions de stade et accès à la fonction publique

M. Alain Duran

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique

Conséquences pour la pêche de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne

M. Jean-François Rapin

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique

Appellations d'origine bugey-cerdon et clairette de Die

M. Patrick Chaize

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Arboriculture et brouettes de cueillette

Mme Patricia Morhet-Richaud

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Procédure de permis de construire pour les exploitations agricoles

M. Alain Vasselle

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Suspicion jetée sur la qualité sanitaire des produits alimentaires français

M. Gérard Bailly

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Situation des éleveurs de bovins allaitants

M. Philippe Mouiller

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Mesures de régulation aux fins de lutte contre les « déserts médicaux »

M. Louis-Jean de Nicolaÿ

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie

Statut des médecins de secours en montagne

M. Jean-Yves Roux

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie

Désertification médicale

M. Olivier Cigolotti

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie

Stage en PME pour les diplômés

M. Yannick Vaugrenard

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

École inclusive

M. Jean-Louis Tourenne

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Sportifs au baccalauréat

M. Yannick Vaugrenard, en remplacement de Mme Claudine Lepage

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Régénération des huiles noires

Mme Agnès Canayer

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Poste de police d'Oissel

M. Thierry Foucaud

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Accueil des enfants placés

M. Jean-Léonce Dupont

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes

Guides-conférenciers

Mme Gisèle Jourda

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes

Cartes nationales d'identité

M. Richard Yung, en remplacement de M. Jean-Yves Leconte 

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes

Couverture numérique du territoire en très haut débit

M. Daniel Gremillet

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation

Rémunération de l'innovation

M. Richard Yung

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation

Réforme du code minier

M. Daniel Reiner

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation

Accord transfrontalier entre la France et le Luxembourg en matière de fiscalité

M. Patrick Abate

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation

Dégradation du service de La Poste

Mme Marie-France Beaufils

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation

Conduite de tracteurs communaux

M. René Danesi

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation

Zones de revitalisation rurale

M. Jean-François Longeot

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales

Financement des groupements d'associations syndicales de propriétaires par les collectivités territoriales

M. Daniel Laurent

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales

Éloge funèbre de Louis Pinton

M. Gérard Larcher, président du Sénat

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

CDG Express (Conclusions de la CMP)

Discussion générale

M. Louis Nègre, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger

M. Jean Desessard

Mme Nicole Bonnefoy

Mme Éliane Assassi

M. Robert Hue

M. Vincent Capo-Canellas

M. Christian Manable

M. Matthias Fekl, ministre

Vote sur le texte élaboré par la CMP

Hommage aux victimes de l'attentat de Berlin

M. Gérard Larcher, président du Sénat

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Questions d'actualité

Autorités indépendantes et politique de la France

M. Pierre-Yves Collombat

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Oiseaux menacés

M. Ronan Dantec

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Revalorisation du SMIC

Mme Laurence Cohen

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Attentat de Berlin

M. Michel Boutant

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Pollution de l'air dans la vallée de l'Arve

M. Loïc Hervé

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Lutte contre le terrorisme

M. Bruno Retailleau

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Impôt sur le revenu

M. Vincent Éblé

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire

Bilan de la politique gouvernementale

M. Jean-François Rapin

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Politique économique du Gouvernement

Mme Élisabeth Lamure

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire

Grève des chauffeurs de VTC

M. Jean-Yves Roux

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Sapeurs-pompiers professionnels et volontaires (Procédure accélérée)

Discussion générale

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique

Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois

M. Roger Madec

Mme Éliane Assassi

Mme Hermeline Malherbe

M. Olivier Cigolotti

M. Jean Desessard

M. Cyril Pellevat

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 4

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 11

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Claude Requier

M. Guy-Dominique Kennel

M. Franck Montaugé

M. Claude Kern

M. Yves Daudigny

Mme Annick Girardin, ministre

CMP (Nominations)

Ordre du jour du mercredi 21 décembre 2016




SÉANCE

du mardi 20 décembre 2016

39e séance de la session ordinaire 2016-2017

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

Secrétaires : M. François Fortassin, M. Jean-Pierre Leleux.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Dépôt d'un document

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le tableau de programmation des mesures d'application de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

Acte est donné de ce document, qui a été transmis à la commission des lois.

Accord en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne est parvenue à un texte commun.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle vingt-six questions orales.

Interdictions de stade et accès à la fonction publique

M. Alain Duran .  - Ma question porte sur les éventuelles implications des mesures d'interdiction administrative ou judiciaire de stade pouvant être prises concernant des supporters de clubs sportifs.

J'ai été saisi du cas d'un supporter qui s'est vu retirer le bénéfice de la réussite à un concours de la fonction publique pour avoir par le passé fait l'objet de mesures d'interdiction administrative de stade, pour des faits sans violence, lesquelles n'ont pas été suivies d'une confirmation par l'autorité judiciaire.

L'article 5 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que : « nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire [...] si les mentions portées au bulletin n°2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l'exercice des fonctions ».

Le prononcé d'une ou plusieurs interdictions administratives ou judiciaires de stade est-il inscrit au casier judiciaire et ces sanctions sont-elles susceptibles d'interdire aux personnes concernées d'intégrer la fonction publique ?

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique .  - Le juge administratif rejette tout caractère automatique de refus d'accorder la qualité de fonctionnaire à une personne dont le bulletin n°2 du casier judiciaire est porteur d'une inscription : il fait application du principe de proportionnalité et juge au cas par cas. L'interdiction préventive de stade n'est pas priori susceptible de faire obstacle à la reconnaissance de la qualité de fonctionnaire; mais l'administration peut exiger, pour certaines fonctions et sous le contrôle du juge, une moralité irréprochable en se fondant sur des faits matériellement établis, même non inscrits au bulletin n°2. En l'absence de précisions sur les fonctions visées dans le cas que vous citez, je ne saurai vous en dire plus.

M. Alain Duran.  - Merci. Ce type de refus peut avoir des conséquences dramatiques pour nos jeunes.

Conséquences pour la pêche de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne

M. Jean-François Rapin .  - Ma question porte sur les conséquences pour la pêche en Manche et mer du Nord d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Depuis le résultat du référendum du 23 juin 2016, actant la volonté des Britanniques de sortir de l'Union européenne, les pêcheurs français, notamment ceux des Hauts-de-France, sont inquiets. Si l'Union européenne a des défauts et des lourdeurs bureaucratiques, elle a instauré la communautarisation des zones économiques exclusives de ses États membres, ainsi que la négociation des totaux admissibles de capture et quotas chaque année. La politique commune de la pêche fixe un cadre commun. Or la pêche régionale française est fortement dépendante des eaux anglaises : 60 % de l'activité de la flottille régionale se situe dans les eaux anglaises et même 80 % pour les navires hauturiers qui pêchent au large de l'Écosse.

Les négociations vont s'ouvrir, il importe de s'assurer que les intérêts des pêcheurs français seront défendus. Quid de l'accès des navires français aux eaux britanniques ? Quid de l'accès des produits britanniques au marché unique ? Quid des droits historiques des pêcheurs français, qui existent depuis la fin du XIXe siècle ?

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Vidalies. Nous partageons votre légitime inquiétude. Le peuple britannique s'est exprimé, son choix démocratique doit être respecté. Mais il peut avoir des implications importantes pour nombre de secteurs, dont la pêche.

Comme cela a été indiqué lors du dernier conseil interministériel de la mer, les intérêts de nos pêcheurs seront âprement défendus durant les négociations. Le Premier ministre l'a confirmé lors de sa déclaration de politique générale.

Pour l'heure, les demandes des Britanniques ne sont pas connues. On peut supposer qu'elles porteront sur l'accès à leur ZEE et aux zones de pêche traditionnelle situées dans leurs eaux territoriales, de même qu'à la répartition des quotas. Le Gouvernement, conscient que le Royaume-Uni est importateur de produits de la mer, reste pleinement mobilisé et vigilant pour défendre les intérêts des pêcheurs français.

M. Jean-François Rapin.  - Merci. Beaucoup de questions se posent encore. Je souhaite que le Parlement soit associé à ces négociations.

Appellations d'origine bugey-cerdon et clairette de Die

M. Patrick Chaize .  - Ma question porte sur l'appellation d'origine contrôlée (AOC) bugey-cerdon délivrée en 2009.

Dans l'Ain, des générations de producteurs bugistes représentés aujourd'hui par le syndicat des vins du Bugey, reconnu comme organisme de défense et de gestion, ont oeuvré pour faire reconnaître le vin effervescent bugey-cerdon méthode ancestrale.

Le bugey-cerdon représente 50 % de la production des vins du Bugey, pour un total de 15 000 hectolitres annuels. Il s'inscrit comme il se doit dans le cadre d'un cahier des charges très restrictif.

Il s'avère que la clairette de Die, vin rosé effervescent de la vallée de la Drôme, alors qu'il est historiquement blanc, a fait l'objet d'une AOC reconnue par l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), le 7 septembre 2016 et confirmée par arrêté en novembre.

Cette reconnaissance est étonnante en ce qu'elle concerne la création d'une catégorie jusque-là inexistante - nouvelle couleur de vin et nouveaux cépages au cahier des charges. Les quelques références historiques ne sauraient donner une légitimité à la clairette de Die rosé.

Cette situation est un non-sens. En effet, l'AOC bugey-cerdon a elle-même été reconnue sur la base d'us et coutumes, d'une notoriété dûment établie ainsi que d'une antériorité certaine dans sa propre région de production. La clairette de Die rosé va disposer d'un potentiel sans commune mesure avec la production de bugey-cerdon. La typicité du bugey-cerdon sera noyée dans une production plus importante et concurrencée par un vignoble voisin disposant de règles différentes. La décision de l'INAO suscite une inquiétude légitime, qui va casser la dynamique observée depuis plusieurs années.

Les viticulteurs bugistes et les élus de l'Ain sont pleinement mobilisés. Pouvez-vous me donner des explications sur cette décision, monsieur le ministre ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - L'INAO est composé de professionnels, qui décident des appellations en toute connaissance de cause. Ces sujets sont trop complexes pour que le ministre, aux pouvoirs limités en la matière, s'en mêle...

Un débat a eu lieu sur cette appellation, il a été tranché ; le ministre ne saurait désavouer les experts de l'INAO. L'appellation bugey est suffisamment solide...

M. Didier Guillaume.  - Mais oui !

M. Stéphane Le Foll, ministre.  - ...pour supporter la concurrence de la clairette de Die.

M. Didier Guillaume.  - Très bien !

M. Patrick Chaize.  - C'est vous qui signez l'arrêté ! En votre âme et conscience, ajouterais-je. Je vous ai écrit à ce sujet, vous ne m'avez pas répondu. Je suis inquiet pour tous les produits en AOC : cette décision valide la pratique de la copie !

M. Didier Guillaume.  - Mais non !

Arboriculture et brouettes de cueillette

Mme Patricia Morhet-Richaud .  - En France, la filière arboricole fruitière représente 6 % de la totalité des exploitants agricoles. Les exploitations produisant des fruits mobilisent 9 % de la main-d'oeuvre agricole et 27 % du salariat saisonnier. Plus de 70 % des exploitations fruitières sont pourvoyeurs d'emploi et les exploitations produisant des fruits à pépins sont celles qui emploient le plus de main-d'oeuvre ; le premier bassin de production est le sud-est.

Dans ce contexte, la prévention du risque de chute de hauteur est une problématique omniprésente qu'il convient d'aborder au regard de la réalité de l'arboriculture. La réglementation en vigueur prévoit de réaliser des travaux depuis un plan de travail conçu, installé et équipé de manière à garantir la sécurité des personnes, c'est-à-dire depuis une surface plane, horizontale et équipée de garde-corps ; l'utilisation d'échelles, escabeaux et marchepieds est proscrite. À ce jour, deux mesures dérogatoires peuvent être prises, mais la difficulté est que les travaux doivent s'effectuer sur une courte durée et qu'ils ne doivent pas être répétitifs.

Alors que la filière arboricole fruitière traverse une grave crise, l'obligation faite aux arboriculteurs de doubler le nombre de plateformes de relève, outre qu'elle est inadaptée à la réalité des vergers, ne serait pas sans conséquence financière. Le temps de cueillette en serait augmenté et le travail saisonnier mis à mal.

Je vous demande de suspendre cette mesure et d'être attentif à l'accompagnement des professionnels d'un secteur en grande difficulté.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Je mesure parfaitement la crise que traverse l'arboriculture, et suis dans le même temps très soucieux de prévenir les accidents du travail. En responsabilité, je ne saurai suspendre l'application des règles visant à limiter les chutes en hauteur, qui figurent dans le plan Sécurité au travail, même si des adaptations sont toujours possibles.

Mes services ont réalisé en mars 2015, en concertation avec les professionnels, un guide sur les règles de travail en hauteur, pour accompagner les arboriculteurs dans une démarche d'évaluation des risques et la mise en oeuvre de la réglementation. Toutes les situations concrètes de terrain sont prises en compte.

L'AFNOR travaille à son propre guide sur les adaptations techniques requises dans les vergers anciens. Voilà comment le ministère organise la satisfaction des deux objectifs que nous poursuivons.

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - Mme la ministre du travail a rencontré les arboriculteurs de mon département et promis une réponse rapide. Mais alors que la cueillette est terminée, nous l'attendons toujours.

Une norme européenne serait en projet. J'espère que le ministre est attentif à ce qu'elle n'ajoute pas des contraintes supplémentaires dans un secteur déjà en crise...

Procédure de permis de construire pour les exploitations agricoles

M. Alain Vasselle .  - Ma question porte sur la procédure de permis de construire pour les exploitations agricoles.

L'article L. 431-1 du code de l'urbanisme prévoit le recours obligatoire à un architecte pour établir le projet, dans l'instruction de la demande de permis de construire. L'exception prévue à l'article L. 431-3 concerne les exploitations agricoles qui modifient elles-mêmes une construction de faible importance, dont la surface maximale est fixée par décret. Depuis le décret du 29 décembre 2011, cette surface est fixée à 800 m², niveau beaucoup trop bas pour la profession agricole et notamment pour l'élevage.

Une révision des textes réglementaires paraît nécessaire. Le recours à un architecte augmente le coût des projets de 5 à 10 %, dans un contexte déjà peu propice à l'investissement. Il faudrait en outre rehausser le seuil de surface à 4 000 m².

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Avec les régions, nous avons mis en place le plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE). Les investissements étaient estimés à 200, 250 millions d'euros. Ils seront finalement de 400 millions d'euros... C'est dire que la règlementation n'est pas un frein. Nous pouvons certes discuter de la pertinence de certains seuils, car il y a probablement des choses à faire évoluer, mais ces normes restent utiles - elles existent d'ailleurs dans tous les pays européens. Et passer de 800 à 4 000 m², c'est prendre des risques pour les paysages...

M. Alain Vasselle.  - Je donne acte au Gouvernement de son soutien à l'investissement dans les bâtiments d'élevage. Vous savez bien pourtant que là où il y a des documents d'urbanisme, les règles s'imposent aux agriculteurs. Même si le seuil de 4 000 m² n'est pas atteint, il faudrait aller au-delà de 800 m². Idéalement, il faudrait supprimer tout seuil...

Suspicion jetée sur la qualité sanitaire des produits alimentaires français

M. Gérard Bailly .  - Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé. Certains médias dénigrent sans cesse la qualité des produits alimentaires français, créant ainsi la suspicion et de l'inquiétude dans l'esprit de nos concitoyens. Il ne se passe pas une semaine sans qu'ils n'évoquent un problème de santé publique qui serait lié à notre alimentation. On ne peut laisser dire n'importe quoi, surtout lorsque les propos tenus sont malveillants et faux. Tous les produits alimentaires ont été ou sont concernés : un jour le lait, un autre jour le pain ou les oeufs, le sucre, les crustacés ou certains fruits et légumes.

La critique se focalise depuis mai sur la viande, avec pêle-mêle les gaz entériques des bovins, les conditions d'abattage, le bien-être animal et désormais la consommation d'eau. Le Progrès de Lyon, édition du Jura du 15 mai 2016, indique qu'il faudrait 15 500 litres d'eau pour faire 1 kg de boeuf, c'est-à-dire 4 650 m3 d'eau par bovin... L'article affirmait aussi que 40 % des ressources en eau du pays seraient utilisées pour nourrir le bétail, affirmation totalement fausse et qui de surcroît ne tient pas compte du recyclage de l'eau.

Je déplore que les médias relaient autant de contre-vérités et suis convaincu que l'objectif est de pousser les Français à devenir végétariens voire végétaliens...

Toutes les mesures nécessaires doivent être prises face au découragement des éleveurs, qui se battent pour maintenir leurs exploitations et leurs modes d'exploitation et offrir aux consommateurs des produits de qualité et une nourriture saine. Sans eux, de grandes parties du territoire seraient des friches.

Le dénigrement injustifié doit cesser. J'interroge Mme la ministre de la santé : y-a-t-il un danger pour la santé à manger les produits français, et si tel est le cas, quels produits posent problème ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Non, il n'y a pas de problème à manger des produits français. Oui, nous avons valorisé l'origine France (M. Gérard Bailly en convient), à tel point que des investisseurs européens s'y intéressent.

Nous avons fait des progrès pour le bien-être animal, les conditions d'abattage ; la consommation des antibiotiques a baissé de plus de 20 %, davantage qu'escompté. Il faut le savoir. On introduit dans l'alimentation animale des éléments qui améliorent la santé humaine, comme le lin et les légumineuses qui augmentent la teneur de la viande en oméga 3 et en acides gras polyinsaturés.

La qualité des produits progresse. Ce qui ne tarit pas les critiques, parfois virulentes, c'est vrai, de la part le plus souvent de végans qui vivent leur choix comme un engagement militant. Mais il faut le dire, leur logique conduit à la fin de toute espèce de domestication animale. Cela aurait des conséquences radicales, dramatiques.

En attendant, la production et l'élevage français ont fait, font et continuent à faire des progrès. Il y a 70 000 ans, les chasseurs-cueilleurs cueillaient mais chassaient aussi...

M. Gérard Bailly.  - Ma question s'adressait en réalité plus à la ministre de la santé... J'aimerais qu'elle prenne position pour combattre la désinformation médiatique. À défaut, nous ne mangerons plus que du boeuf aux hormones venu d'outre-Atlantique... Je ne remets pas en question votre parole, vous le savez bien, monsieur le ministre.

Situation des éleveurs de bovins allaitants

M. Philippe Mouiller .  - Ma question porte sur la situation économique désastreuse des éleveurs de bovins allaitants. Ces races et ces savoir-faire, qui constituent l'exemple le plus avancé du « made in France », sont aujourd'hui en péril.

Il y a les effets collatéraux de la crise laitière mais aussi la surtransposition des directives européennes et la prolifération des normes. Je regrette à cet égard que la proposition de loi du Sénat n'ait pas été mise à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

L'élevage allaitant, les territoires, les races et les savoir-faire millénaires servent de monnaie d'échange de la politique étrangère de la France. Les conséquences de la position de notre pays à l'égard de la Russie ne doivent plus être supportées par l'agriculture et les éleveurs français. Les restrictions à l'exportation de bovins vers la Turquie relèvent davantage d'une question de géopolitique que d'une question sanitaire.

La France doit porter une stratégie concrète à l'export, une stratégie offensive. Accompagner les professionnels doit être une priorité de l'État. Et le comité export convoqué en urgence - il ne s'est pas réuni depuis octobre 2015. On ne peut laisser la main aux seuls opérateurs industriels.

Le temps est compté. Quelles mesures entendez-vous prendre ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - La création de la plateforme export procède de mon initiative, mais le ministre ne peut pas exporter à la place des exportateurs...

C'est moi, encore, qui ai rouvert le marché turc, après la visite officielle du président de la République et nous continuons à travailler pour ouvrir les marchés algérien et égyptien, et signer des contrats sanitaires à cette fin. À chaque fois que nous le pouvons, nous aidons...

Les normes sont sans doute un problème, mais lesquelles pourraient compenser un différentiel de compétitivité de 20 % à 25 % ? Dire « il suffit de... », c'est préparer des lendemains difficiles...

Les abattages de vaches laitières ont été régulés, nous travaillons à restructurer la filière, mais le ministre ne peut se substituer aux producteurs...

M. Philippe Mouiller.  - En matière d'agriculture, l'anticipation et la stratégie sont fondamentales. On ne peut se contenter de créer un outil comme la plateforme export, il faut aussi accompagner les éleveurs. La refonte de la carte des zones défavorisées ajoute des difficultés aux difficultés dans les Deux-Sèvres. Quant aux normes, il suffit de constater la complexité ajoutée par l'administration dans la surtransposition des normes européennes pour voir que votre discours selon lequel on ne peut rien faire tient du fatalisme... (M. Loïc Hervé applaudit)

Mesures de régulation aux fins de lutte contre les « déserts médicaux »

M. Louis-Jean de Nicolaÿ .  - Il n'y a jamais eu autant de médecins en France, et pourtant les déserts médicaux en campagne et en zone périurbaine se développent ; 49 % des Sarthois, par exemple, ont vu leur accès géographique aux médecins généralistes reculer, et plus encore pour les spécialistes : 84 % pour les pédiatres, 75 % pour les ophtalmologues, 73 % pour les gynécologues.

Le 25 août 2016, une nouvelle convention entre médecins et sécurité sociale a été signée, qui comprend de nouvelles mesures pour les zones sous dotées, cependant incitatives. Le contrat d'engagement de service public ou le statut de praticien territorial de médecine générale n'ont pas permis d'inverser la tendance. Quant à la mise en place des maisons de santé pluridisciplinaires (MSP), elle est coûteuse et met en lumière les divergences d'approches entre élus et professionnels de santé.

Augmenter le numerus clausus reste une solution à long terme au regard du temps de formation ; et hypothétique, puisqu'on n'est pas assuré que l'installation se fera en zone sous-dotée. Le conventionnement sélectif, le recours aux retraités, ont été envisagés et votés au Sénat lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale ; il est dommage que ces pistes n'aient pas été reprises.

Quel est votre avis concernant la mise en place de mesures concrètes de régulation en complément de l'arsenal incitatif existant : par exemple, la revalorisation substantielle des aides que prévoit la convention médicale dans ses options « démographie » et « santé-solidarité territoriale » dans les zonages déterminés par les agences régionales de santé (ARS) mais aussi dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) en y allégeant les conditions ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie .  - Votre inquiétude est légitime. Le problème n'est pas nouveau... Le Gouvernement défend une ambition claire : inciter les jeunes médecins à s'installer dans les zones sous-denses et y sécuriser la pratique des généralistes ; 665 praticiens territoriaux en médecine générale se sont déjà installés, 1 750 étudiants ont signé un contrat d'engagement de service public, et notre pays compte désormais 830 maisons de santé pluridisciplinaires (MSP).La formation a été revue et le nombre de maîtres de stage universitaires augmenté. Mme la ministre de la santé fera prochainement le bilan du pacte territoire santé.

Une restriction à la liberté d'installation serait contre-productive. Un quart des diplômés ne s'inscrivent pas à l'Ordre. On risquerait une médecine à deux vitesses. La démographie médicale est un sujet complexe ; il faut refuser les mirages du court-termisme et réformer en profondeur.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ.  - Certains territoires souffrent plus que d'autres. Si les mesures générales suffisent pour d'autres territoires, ils sont insuffisants pour les Pays de la Loire, par exemple. De l'incitation, il va falloir passer à la contrainte.

Statut des médecins de secours en montagne

M. Jean-Yves Roux .  - Ma question porte sur les médecins embarqués dans les hélicoptères de secours en montagne.

En effet, 150 médecins sont mobilisés pour assurer la sécurité et la santé des personnes, dans des conditions très dangereuses. Le lieu est souvent difficile d'accès. En montagne, la distance d'un SMUR est en moyenne de 45 minutes par hélicoptère. Or certains médecins, qui ne bénéficient pas du statut de fonctionnaires, ne bénéficient pas de la bonification des points de retraite en compensation de la dangerosité, alors que tous remplissent les missions de la même façon. En application de la loi du 4 mars 2002, cette disposition s'applique à l'ensemble des civils et militaires embarqués. Comment faire en sorte que tous ces médecins bénéficient effectivement des mêmes droits à la retraite ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie .  - Les statuts des intervenants des équipes de secours sont différents, c'est vrai, et cela entraîne des différences de rémunération et d'avantages de retraite. Mais les comparaisons nécessitent de prendre en compte toutes les caractéristiques.

Certains avantages familiaux peuvent être plus intéressants dans le régime général, par exemple. La différence ne se limite pas à la retraite ; ainsi la rémunération peut être différente, avec des coefficients différents pour les services aériens.

M. Jean-Yves Roux.  - Le nombre de médecins concernés est très faible. Une prise en compte de la pénibilité et des particularités territoriales serait bienvenue...

Désertification médicale

M. Olivier Cigolotti .  - Les déserts médicaux et les refus de soin sont en hausse. Jusqu'à un tiers des Français ont des difficultés d'accès géographique à trois spécialités - pédiatrie, gynécologie, ophtalmologie - et un quart aux médecins généralistes. Au tarif de la sécurité sociale, ce sont plus de huit Français sur dix qui manquent de gynécologues et d'ophtalmologistes. Pis, l'offre au tarif opposable pour ces trois spécialités s'est réduite depuis 2012 pour plus d'un Français sur deux.

La première cause est géographique. Malgré les mesures incitatives, la répartition géographique des professionnels de santé s'est dégradée. En quatre ans, 27 % des Français ont vu leur accès aux généralistes reculer. La deuxième cause est liée aux tarifs : les dépassements d'honoraires ont continué à croître depuis 2012. En Haute-Loire, l'accès aux soins d'un spécialiste sans dépassement d'honoraires est difficile ou en situation de désert médical.

Pour mieux répartir les médecins sur le territoire, un conventionnement sélectif doit être mis en place. La mutuelle ne peut remplacer l'action publique. Madame la ministre, que faites-vous pour garantir un égal accès aux soins ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie .  - Ne vous en déplaise, les dépassements n'ont pas augmenté depuis 2012, après vingt ans de hausse ininterrompue. Ils ont au contraire diminué de deux points ! Le contrat d'accès aux soins a été rebaptisé « option pratique tarifaire maîtrisée ».

Avec votre proposition, il y aurait une minorité de médecins conventionnés et une majorité de médecins qui ne le seraient pas. Autant dire une médecine du riche, rapide, et une médecine du pauvre soumise à des délais inacceptables.

Dans la Haute-Loire, nous avons obtenu l'installation de trois médecins généralistes et de sept médecins de SAMU.

M. Olivier Cigolotti.  - Les collectivités territoriales font des efforts importants pour installer des maisons de santé pluridisciplinaires. Les mesures incitatives ont trouvé leurs limites. Il va falloir passer à des mesures coercitives pour mailler le territoire.

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

Stage en PME pour les diplômés

M. Yannick Vaugrenard .  - Je propose de rendre obligatoire un stage dans une petite et moyenne entreprise (PME) pour les élèves des grandes écoles.

Les PME embauchent moins de jeunes diplômés que les grandes entreprises. Pourtant, de nombreuses études montrent l'importance de ces profils pour leur développement et donc pour la croissance. Même les PME les plus dynamiques peinent à recruter des jeunes diplômés. En Allemagne, le niveau moyen d'encadrement des PME et entreprises de taille intermédiaire est bien meilleur, notamment parce que les jeunes diplômés s'y orientent naturellement. La Grande-Bretagne a mis en place des programmes particuliers associant grandes universités et PME.

Trop souvent, les étudiants des grandes écoles intègrent des grandes entreprises, publiques ou privées, ce qui ne donne pas une réelle image de la vie économique de notre pays. Nos entrepreneurs seraient preneurs et la BPI s'intéresse à ce sujet. Elle pourrait être un facilitateur. Quelle est votre position sur cette proposition ?

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Votre constat est juste : les PME auraient intérêt à bénéficier de l'expertise des diplômés des grandes écoles, mais aussi des diplômés de masters et des docteurs de l'Université. En vous appuyant sur des expériences étrangères, vous proposez un stage obligatoire. Je ne suis pas sûr d'aller aussi loin. Il faudrait que le tissu des PME françaises y soit prêt or ce n'est pas la tradition française. Enfin, cela heurterait le principe d'autonomie des écoles dans l'organisation de leur scolarité. En revanche, les conventions industrielles de formation par la recherche contribuent à créer ce lien. Nous pourrions travailler ensemble autour d'un rapport sur ce sujet.

M. Yannick Vaugrenard.  - Je suis satisfait que nous soyons d'accord sur le constat. Je prends bonne note de votre proposition. Nous pourrions toutefois expérimenter. Les représentants de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, avec qui j'en ai parlé, sont d'accord. Nous pâtissons, sur le plan économique, de l'ignorance du monde économique où sont nos grands décideurs. Expérimentons et évaluons.

École inclusive

M. Jean-Louis Tourenne .  - Le Gouvernement a inscrit comme objectif prioritaire l'intégration des personnes en situation de handicap. À l'école, de gros efforts ont été réalisés. Mais la question n'est pas seulement l'inclusion, c'est aussi la réussite, ce qui nécessite des moyens humains. C'est ce qui a été fait, avec les auxiliaires de vie scolaire, notamment. Ceux-ci ne sauraient toutefois être des personnes en contrat d'insertion, sans formation et sans accompagnement. Combien d'entre eux sont formés ? Quels sont les besoins ?

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Les auxiliaires de vie scolaire jouent un rôle primordial, en effet. Le décret du 27 juin 2014 a consacré leur statut et leurs carrières, en prévoyant, au bout de six ans, une intégration dans le corps des assistants d'éducation, précisé par la circulaire du 8 juillet 2014.

Lors de la dernière conférence nationale du handicap, le président de la République a annoncé la création de 32 000 postes d'accompagnants des élèves en situation de handicap sur cinq ans par transformation de 56 000 emplois. En 2016, 6 400 emplois temps plein ont ainsi été créés, auxquels s'ajoutent 1 351 emplois pour la rentrée scolaire 2017 prévus au projet de loi de finances pour 2017.

Ces personnels suivent un module de formation de 60 heures sur leur temps de travail et pourront bénéficier d'une validation des acquis de l'expérience.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Merci pour la qualité de votre réponse. Les efforts du Gouvernement sont impressionnants. Mais apparaissent de nouveaux handicaps cognitifs qui n'étaient pas décelés, tels que dyscalculie, dyslexie, dysorthographie. Les élèves qui en souffrent pourraient pourtant tout à fait suivre des études. Or les écoles, sans une formation spécifique, ne peuvent les prendre en charge. C'est un gâchis d'intelligence.

Sportifs au baccalauréat

M. Yannick Vaugrenard, en remplacement de Mme Claudine Lepage .  - Mme Claudine Lepage, absente, m'a demandé de poser sa question à Mme la ministre de l'Éducation nationale.

L'article L. 331-6 du code de l'éducation indique que les établissements scolaires du second degré permettent, selon des formules adaptées, la préparation des élèves en vue de la pratique sportive d'excellence. Cette disposition est censée s'appliquer aux établissements scolaires français à l'étranger. Malheureusement, malgré le loi du 27 novembre 2015 visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels, il est toujours aussi difficile pour les élèves membres du réseau d'enseignement français à l'étranger de bénéficier du statut de sportif de haut niveau et de s'inscrire à l'option sport de haut niveau au baccalauréat.

Un dispositif ne pourrait-il être mis en place entre le ministère de l'Éducation nationale, les établissements français de l'étranger et les postes diplomatiques afin de faciliter la signature de conventions entre les clubs sportifs locaux de haut niveau et les établissements scolaires ? Les élèves français de l'étranger doivent, eux aussi pouvoir bénéficier réellement du statut de sportif de haut niveau.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Merci à Mme Lepage de sa question très précise, qui appelle une réponse précise. La note interministérielle du 30 avril 2014 définit le champ concerné et les modalités de déroulement des études en France et à l'étranger. De nombreux dispositifs d'aide existent, avec dispense de la partie physique de l'épreuve d'EPS, notamment. Ceux qui étudient à l'étranger en bénéficient de droit.

Ceux qui pratiqueraient dans un club étranger auraient besoin d'une convention entre ce club et la fédération française du sport concerné.

M. Yannick Vaugrenard.  - Mme Lepage propose une autre solution : une délégation au conseiller de coopération culturelle ou au chef d'établissement.

Régénération des huiles noires

Mme Agnès Canayer .  - Malheureusement en France, la filière de régénération des huiles noires est remise en cause.

En effet, le 8 août 2016 a été pris un arrêté modifiant l'arrêté du 28 janvier 1999 relatif aux conditions de ramassage des huiles usagées. La gratuité de la collecte est temporairement suspendue sur le territoire métropolitain. Cette disposition a un double impact, économique et écologique.

Les deux seules usines de régénération d'huiles noires sont installées en Seine-Maritime. Les garages ne les approvisionnent plus et l'une des deux a dû cesser le travail.

Une question écrite de Gérard Bailly n'a pas reçu de réponse satisfaisante. Rien n'est prévu pour remplacer le soutien de l'Ademe à la filière. Comment le Gouvernement entend-il soutenir cette filière ?

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Plus compétente que moi en la matière, Mme Royal m'a chargé de vous répondre.

L'arrêté du 8 août était très attendu ; il réduit les incertitudes et devrait augmenter les quantités ramassées. La charte d'engagement signée le 29 septembre 2016 prévoit l'orientation prioritaire des huiles usagées vers la régénération.

La collecte payante n'est pas satisfaisante, car cela peut inciter certains à déverser les huiles dans le milieu naturel, malgré l'interdiction, plutôt que de payer un ramasseur agréé. Plusieurs pistes ont été identifiées : évolution de la TGAP, ou mise en place d'une filière de responsabilité élargie aux producteurs.

Mme Agnès Canayer.  - Il y a urgence à intervenir. Cette filière se détourne aujourd'hui vers les usines italiennes et allemandes, bien mieux soutenues.

Poste de police d'Oissel

M. Thierry Foucaud .  - Le poste de police d'Oissel qui dépend du commissariat de Saint-Étienne-du-Rouvray et de la zone de sécurité publique Rouen-Elbeuf, devait normalement fonctionner avec un effectif de quatre policiers, ce qui est peu pour une commune de 12 000 habitants. Or ce bureau connaît depuis quelque temps des dysfonctionnements dus à une insuffisance d'effectifs chronique.

En novembre 2015, il avait d'ailleurs été purement et simplement fermé ! Depuis, suite à l'intervention du maire, le poste est ouvert mais seulement le mardi et le jeudi matin, privant les habitants de la commune d'un service de sécurité à proximité.

Alors qu'aucune amélioration de la situation n'a été constatée, M. Cazeneuve s'est rendu le 17 novembre 2016 à Elbeuf où il a souligné à juste titre à cette occasion « le courage des policiers qui sont intervenus à Saint-Étienne-du-Rouvray dans un territoire qui a été durement éprouvé par le terrorisme ». Il a également annoncé la venue d'adjoints de sécurité et de gradés et gardiens de la paix en Seine-Maritime supplémentaires. Le poste d'Oissel en profitera-t-il ?

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - 9 000 postes de policiers ont été créés pendant le quinquennat. Le Premier ministre a annoncé la venue de quinze gardiens et gradés en plus pour la circonscription de Rouen dès ce printemps.

Dans le département, les effectifs passeront de 2682 agents fin novembre à 2720 fin mai La seule sécurité publique bénéficiera de 39 agents supplémentaires. La ville d'Oissel dispose d'un bureau qui compte trois policiers. Il sera maintenu dans la réorganisation prochaine ; il sera même renforcé d'un agent. Certes, ses horaires sont une contrainte. Mais la sécurité d'Oissel est assurée par une patrouille de seize policiers et trois auxiliaires de sécurité de Saint-Étienne-du-Rouvray, mais aussi par la brigade anticriminalité de Rouen, qui compte 50 policiers.

M. Thierry Foucaud.  - Ma question portait sur l'ouverture le matin et l'après-midi, et toute la semaine, du poste de police. Dans une ville comme celle-ci, il faut renforcer la sécurité.

Accueil des enfants placés

M. Jean-Léonce Dupont .  - De 5 000 dans les années 1970, le nombre d'enfants confiés est passé dans le Calvados à 2 250, ce qui est supérieur de 15 % à la moyenne nationale.

Le système est totalement saturé. La maison départementale de l'enfance et de la famille ne peut plus remplir son rôle d'accueil d'urgence et plus aucune place n'est disponible. Cent vingt décisions de placement ne sont pas exécutées, avec tous les risques de mise en jeu de la responsabilité pénale que cela implique.

Pourquoi ? Le manque cruel de places en institut médico-éducatif, en instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques, la fermeture de ces établissements les week-ends et vacances font qu'entre 80 et 100 enfants relevant du médico-social sont confiés au département par défaut.

La prise en charge des mineurs non accompagnés et des mineurs isolés étrangers est de plus en plus difficile. Au rythme de leur arrivée, il faudra réaliser l'instruction de 500 primo-demandes de mineurs non accompagnés ou supposés en 2016. Ces jeunes, quand ils sont reconnus mineurs et pendant la procédure d'évaluation, prennent des places à la maison départementale de l'enfance et de la famille et dans les maisons d'enfants à caractère social. Outre leur coût - six millions d'euros - ces prises en charge en constante augmentation paralysent notre dispositif de protection de l'enfance.

Cette prise en charge relève de la politique migratoire, compétence de l'État ; les services départementaux du Calvados ne sont pas équipés pour assurer une mission d'évaluation de la minorité. Pour le moins, toute la période relative à la phase d'investigation et d'évaluation de la minorité devrait être prise en charge par l'État et non pas seulement les cinq premiers jours.

Une batterie de mesures a été mise en place pour faire face à cette asphyxie de notre dispositif de protection de l'enfance, mais le problème reste entier.

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes .  - J'ai porté la loi du 14 mars 2016 pour la protection de l'enfance, inspirée de la proposition de loi sénatoriale de Mmes Dini et Meunier. Elle fait évoluer la philosophie de la protection de l'enfance.

J'invite les départements et les juges pour enfants à utiliser les dispositifs comme les tiers de confiance ou ceux relatifs à la sortie des jeunes majeurs : conventions entre départements et préfectures pour l'obtention de titres de séjour pour pouvoir travailler, entre autres.

Sept à huit professionnels doivent parfois se succéder... Il faut donc mettre tout le monde autour de la table pour rationaliser ce qui peut l'être. La cellule de répartition organise la péréquation pour l'accueil des mineurs non accompagnés. L'État devrait y participer.

Les mineurs de Calais sont actuellement pris en charge par des centres spécifiques et seront progressivement orientés vers des dispositifs de droit commun.

M. Jean-Léonce Dupont.  - Je sais bien le travail que vous avez mené, madame la ministre. Mais vous devez prendre conscience que ce système est si embolisé que des mesures de coordination ne suffiront pas. Dans le Calvados, le nombre de décisions de justice est supérieur à la moyenne, les jeunes handicapés sont orientés à tort vers nos établissements.

Ayez conscience du désespoir des travailleurs sociaux devant l'inutilité apparente de leurs efforts : à peine un cas est-il résolu qu'il s'en présente dix nouveaux...

En cinq ans, la dépense départementale est passée de 1,5 million d'euros à plus de 6 millions d'euros et on m'en annonce 7 pour l'année prochaine. Ce, dans un contexte que l'on dit pudiquement « contraint » et qui est en réalité très difficile pour la collectivité départementale qui a en charge la solidarité nationale.

Guides-conférenciers

Mme Gisèle Jourda .  - Nous sommes nombreux à alerter le Gouvernement sur la situation des guides-conférenciers. Le Gouvernement nous a entendus et a accepté les amendements que nous avions déposés lors de la loi Patrimoine. Mais cela, c'était avant la réunion interministérielle, pendant laquelle a été présenté aux syndicats un projet d'arrêté qui élargit l'attribution de la carte professionnelle à toute personne disposant d'un master et une expérience professionnelle minimale de six mois cumulés sur cinq ans. Cela crée une distorsion de concurrence, alors que la qualification des professionnels était une priorité. Quel gâchis !

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes .  - Ce projet d'arrêté avait suscité des inquiétudes. Il a été depuis amélioré, en durcissant les exigences, passant de la licence au master, et en augmentant l'expérience professionnelle requise. Les syndicats en sont convenus.

Cela garantit la qualité du service tout en offrant une troisième voie à des personnes qualifiées, qui ne représente en aucun cas une menace, mais permettra une meilleure présence sur tout le territoire.

Mme Gisèle Jourda.  - Cette troisième voie doit être regardée avec vigilance car des collectivités peuvent être tentées par la facilité, au détriment de la qualité.

Il ne faudrait pas qu'elle s'avère être une concurrence déloyale pour des jeunes qui se sont engagés dans cette voie et ont pour débouché exclusif d'assurer les visites guidées à un haut niveau.

Cartes nationales d'identité

M. le président.  - M. Yung va suppléer M. Leconte, bloqué par Uber.

M. Richard Yung, en remplacement de M. Jean-Yves Leconte  .  - Non, par des autocars.

L'allongement de la durée de validité des cartes nationales d'identité sans qu'aucune mention ne soit portée sur les cartes pose un véritable problème de reconnaissance de ces titres dans certains États. C'est ainsi que le gouvernement belge a récemment signifié qu'il ne reconnaissait plus l'allongement de dix à quinze ans de la validité des cartes nationales d'identité, décidé en 2013 par les autorités françaises.

Prise au titre de la « simplification » - en fait, une simple mesure d'économie budgétaire - cette décision instaure un décalage entre les validités réelle et faciale d'une carte d'identité. Pour les Français qui n'ont pas de passeport, cela crée des difficultés ou des blocages lors de passages de frontières, contrôles d'identité, enregistrements dans les hôtels ou les compagnies aériennes, ou lors de démarches administratives dans un pays de l'Union européenne.

Avec la décision de la Belgique, les autorités françaises ne peuvent plus prétendre que nos partenaires reconnaissent tous cet allongement.

En outre, le refus par les autorités françaises de renouveler une carte d'apparence périmée, constitue une atteinte à la liberté de circulation au sein de l'Union européenne.

Combien de cartes d'identité en circulation ne sont pas reconnues par d'autres États et en particulier par les autorités belges ? Quel est le risque que cette décision conduise d'autres pays à prendre les mêmes positions ? A-t-on, prévu de sensibiliser les Français se rendant en Belgique ?

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes .  - Veuillez excuser le ministre de l'intérieur. Le décret du 18 décembre 2013, entré en vigueur le 1er janvier 2014, a étendu la durée de validité des cartes sécurisées de dix à quinze ans. Cela a réduit de 30 % le nombre de renouvellement ; 7 millions de personnes sont titulaires d'une carte d'identité prorogée ; la moitié aurait un passeport valide.

Les cartes d'identité prorogées sont prises en compte au niveau européen par l'annexe de l'accord du 13 décembre 1957, qui a été modifiée. Cependant, des difficultés persistent en Belgique et en Norvège qui ont manifesté explicitement leur refus des cartes d'identité facialement périmées. Le ministère de l'intérieur travaille avec le ministère des affaires étrangères pour que le site de celui-ci informe les voyageurs potentiels. Sur ce même site, les voyageurs peuvent également télécharger un document, traduit en plusieurs langues, attestant de la décision française de prolonger les cartes d'identité. En toute hypothèse, le site du ministère des affaires étrangères recommande de se munir d'un passeport valide, document de voyage de droit commun.

Enfin, des instructions ont été données aux préfectures ainsi qu'aux consulats pour procéder au renouvellement des titres facialement périmées des voyageurs comptant se rendre dans un pays acceptant les cartes d'identité et ne possédant pas de passeport.

M. Richard Yung.  - Merci de ces précisions. Un document téléchargé sur le site du ministère des affaires étrangères n'a guère de valeur pour le responsable de la police aux frontières...

J'espère que les instructions données aux préfectures seront suivie d'effet : j'ai eu moi-même une expérience négative en Indre-et-Loire quand j'ai voulu faire renouveler ma carte facialement périmée. Heureusement que j'ai un passeport !

M. le président.  - À Orly, notre carte d'identité de parlementaire n'est plus valable ! C'est un comble, quand on sait les efforts qu'il faut fournir pour arriver dans cette Haute Assemblée !

Couverture numérique du territoire en très haut débit

M. Daniel Gremillet .  - Lors de la discussion du volet « investissement » de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, le Gouvernement a expliqué que son premier objectif était de couvrir tous les territoires en 2G d'ici au 31 décembre 2016 et en 3G d'ici à la fin du premier semestre 2017. Il prenait l'engagement de définir les projets de convention qui devaient être finalisés dans les deux mois et de mettre en place un mécanisme permettant à l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) de sanctionner les opérateurs qui ne respecteraient pas leurs engagements.

Le 16 avril 2015, l'engagement en faveur des zones blanches « imparfaitement mesurées » a été renouvelé, à travers un cofinancement de l'État et des collectivités territoriales et le bénéfice du fonds national pour la société numérique.

Le 24 avril 2015, les patrons des quatre grands opérateurs de télécommunications français ont été reçus pour faire le point sur le plan France Très haut débit, qui vise à une couverture intégrale du territoire d'ici à 2022 avec 20 milliards d'euros d'investissements répartis entre acteurs privés et collectivités territoriales.

Or un an après, les citoyens des territoires ruraux rencontrent au quotidien des difficultés de connexion, de débit, de coûts exorbitants d'accès.

Alors que les dotations de l'État diminuent drastiquement, il est inquiétant que revienne encore aux collectivités territoriales la charge d'investir dans le développement du très haut débit. Ce sont les territoires les plus pauvres qui doivent financer !

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - En 2012, le président de la République a lancé le plan France Très haut débit : 3,3 milliards d'euros en provenance de l'État, autant des collectivités territoriales, plus de 10 milliards des opérateurs privés pour un total de 20 milliards d'euros. Au Royaume-Uni, c'est seulement 500 millions d'euros... C'est dire l'ambition de ce plan, qui doit faire de la France le pays le mieux connecté d'Europe à l'horizon 2020. Il y a urgence, c'est vrai. Les objectifs de 50 % de réalisation d'ici fin 2017 auront été atteints dès la fin de cette année, mais c'est encore trop lent ; nous faisons tout pour accélérer les choses. Le plan public finance uniquement le déploiement dans les zones rurales - les zones urbaines étant laissées à la concurrence entre acteurs privés. Là encore, la France se distingue par ce choix.

Sur la couverture mobile, rien n'avait été fait avant 2012, rien ! L'urgence absolue était de résorber les zones blanches ; ce sera le cas fin 2017. Nous avons prévu des projets de convention et donné à l'Arcep le pouvoir de sanctionner les opérateurs si leurs engagements ne sont pas tenus. J'ai lancé, la semaine dernière, le plan France Mobile qui complète le plan France Très haut débit. Son principe est innovant : ce sont les élus locaux qui identifieront les besoins et les zones grises à couvrir prioritairement.

M. Daniel Gremillet.  - Les territoires ruraux décrochent. Pour répondre aux appels d'offre, entrepreneurs et artisans doivent utiliser des procédures entièrement dématérialisées ! Idem pour les agriculteurs qui doivent remplir leur déclaration PAC sur internet depuis 2016.

Ce sont bien les collectivités territoriales et, donc, les contribuables locaux qui financent la couverture numérique. Le département des Vosges y consacrent plus de 19 milliards d'euros, la grande région 20 milliards d'euros. Les territoires les plus reculés ne peuvent pas attendre 2022. Quel jeune couple, quel entrepreneur s'installerait aujourd'hui dans une zone sans couverture numérique ?

Rémunération de l'innovation

M. Richard Yung .  - L'Institut des ingénieurs électriciens et électroniciens (IEEE) est une association professionnelle américaine à but non lucratif qui joue un rôle majeur dans l'établissement des normes internationales dans le domaine des télécommunications. Elle a récemment modifié ses règles de fonctionnement dans un sens favorable aux grandes multinationales américaines, notamment les GAFA, dont l'objectif est de réduire le pouvoir de négociation des titulaires de brevets essentiels à l'application d'une norme (BEN).

Les nouvelles règles, qui réduisent les royalties versées aux détenteurs de BEN, font en particulier peser des risques sur les entreprises innovantes françaises. Le niveau moyen de redevance passerait de 15 % à 4 %.

En avril dernier, le Gouvernement m'avait indiqué s'efforcer de protéger l'effectivité des droits des détenteurs de brevets. Un Conseil « Industrie » s'est réuni. Selon la Commission européenne, ces règles pourraient violer l'accord de l'OMC.

Sept mois plus tard, quel bilan tirez-vous des initiatives prises pour prévenir la contagion des règles américaines et garantir une rémunération équitable de l'innovation ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Pour les acteurs privés à l'origine des développements technologiques, la contribution collective à la normalisation améliore le retour sur investissement, grâce à une diffusion plus large de l'innovation. En contrepartie, les organismes de normalisation exigent des détenteurs de BEN l'engagement de concéder des licences d'exploitation à des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires.

Les nouvelles règles américaines, outre qu'elles prévoient un mode de calcul des redevances défavorable, mettent en cause l'exercice du pouvoir d'injonction par les détenteurs de BEN afin d'interdire la vente de produits contrefaits. Elles vont à l'encontre de l'esprit du projet européen de marché unique numérique en favorisant le développement d'écosystèmes fermés au sein desquels le consommateur doit prendre lui-même en charge le coût des interactions.

La position française a été communiquée à la Commission européenne : les droits des détenteurs doivent être garantis alors que s'amorce la révision de la directive sur la propriété intellectuelle. La Commission en a pris acte et rappelé l'importance d'une politique de propriété intellectuelle équilibrée. Elle a annoncé, dans une communication récente sur le passage des entreprises au numérique, une concertation avec les parties prenantes concernées.

Le Comité européen de normalisation s'est déclaré, dès septembre, opposé à toute initiative modifiant le prix des licences dans un sens défavorable aux détenteurs de BEN.

Pour ma part, je lancerai une mission sur la propriété intellectuelle qui prendra en compte ce volet et en parlerai au président de l'Arcep qui doit prendre la tête de l'organisme coiffant les régulateurs européen l'an prochain.

M. Richard Yung.  - Merci. Je me félicite de la position du Gouvernement. La dimension européenne est la bonne pour résister au modèle américain.

Réforme du code minier

M. Daniel Reiner .  - Annoncée en 2012 par le Premier ministre, discutée dès 2011, la réforme du code minier semble en panne alors qu'elle est absolument nécessaire.

Les élus appellent à une meilleure répartition des redevances minières, les associations de préservation de l'environnement à une mise en conformité avec la charte de l'environnement et les industriels à des procédures simplifiées et plus rapides.

À la suite du rapport de la mission de préfiguration, en décembre 2013, le Gouvernement a transmis un premier avant-projet de loi à l'ensemble des acteurs, suivi d'un second qui reprenait certaines de leurs propositions. C'était il y a plus d'un an, en juin 2015 : depuis, rien.

Les projets stagnent et les industriels s'inquiètent. Pour mener à bien un dossier d'extraction, il faut une lisibilité sur plusieurs années. Cette attente n'est pas un signe positif envoyé aux associations de protection de l'environnement. En résumé, les industriels doutent, les élus patientent et les associations désespèrent.

Il est dommage que le rapport Tuot, qui proposait l'établissement d'un schéma national des mines, le groupement momentané d'intérêt, la création du Haut Conseil des mines ou la répartition des redevances minières avec les collectivités territoriales, ne donne lieu à aucune avancée concrète. Il est dommage également que la mobilisation constructive des acteurs de la filière minière se heurte à de la mauvaise volonté.

Il serait dommage, enfin, de laisser penser que les mines sont un vestige d'un passé glorieux alors que de nombreux projets d'extraction pourraient voir le jour.

Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce dossier ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Veuillez excuser M. Sirugue. La réforme du code minier est bien un objectif du Gouvernement. A cause des attentats, les priorités ont été revues, et le projet de loi n'a pas pu être présenté au Parlement.

En accord avec Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable de l'Assemblée nationale, les principes novateurs de l'avant-projet de loi ont été repris dans une proposition de loi, qui a été déposée le 23 novembre 2016. Le texte reprend, entre autres, le principe d'une évaluation environnementale stratégique pour les titres miniers, des procédures renforcées d'information et la création d'un Haut Conseil des mines. Son examen à l'Assemblée nationale est prévu fin janvier 2017 ; il sera transmis au Sénat début février.

M. Daniel Reiner.  - Le dossier a progressé, je m'en réjouis. La proposition de loi de l'Assemblée nationale reprend des mesures intéressantes du rapport Tuot. Je regrette toutefois ce temps perdu alors que la réforme était consensuelle. J'espère qu'elle aboutira avant la fin de la mandature.

Accord transfrontalier entre la France et le Luxembourg en matière de fiscalité

M. Patrick Abate .  - La convention fiscale entre le Luxembourg et la France date de 1958. Depuis, le nombre de travailleurs frontaliers atteint presque 90 000 et sera de 130 000 dans cinq ans. Il se développe un espace transfrontalier que dessine I'EPA Alzette-Belval dans le cadre d'une OIN côté français, et le Grand Projet Esch-Belval côté luxembourgeois. Tout cela ne sera pérenne qu'à condition d'une répartition plus équitable des charges et des ressources des deux côtés de la frontière. L'exemple de l'accord fiscal entre la France et le canton de Genève est parlant : c'est une manne financière qui permet aux communes limitrophes de développer des projets qui profitent à tous, dans une démarche gagnant-gagnant.

J'ai interpelé M. Désir et M. Eckert. La réponse a été bien tardive, trois jours après la conférence intergouvernementale du 21 novembre... Le gouvernement luxembourgeois aurait opposé une fin de non-recevoir à l'inscription de cette question à l'ordre du jour.

Comment le Gouvernement compte-t-il essayer de convaincre nos voisins de l'intérêt mutuel de cette discussion ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - La convention fiscale entre la France et le Luxembourg date de 1958 ; elle ne prévoit pas, contrairement à nos conventions avec la Belgique, l'Allemagne ou encore la Suisse, de clause spécifique concernant les travailleurs frontaliers.

C'est donc un cas à part. Le Luxembourg a mis en place ce type de régime avec un seul de ses voisins et ne souhaite pas renégocier notre accord bilatéral. Le projet a été abordé lors de la dernière conférence intergouvernementale. Le Gouvernement français défend le co-financement de projets menés sur notre territoire. Cette démarche a porté ses fruits : la ligne à grande vitesse Grand Est, le contournement de Villerupt, l'autoroute A 321 bis, les parkings relais dans les villes frontalières françaises... C'est cette approche pragmatique, projet par projet, qui l'emporte avec nos voisins luxembourgeois.

M. Patrick Abate.  - Vous avez cité des financements communs d'infrastructures, on pourrait d'ailleurs ajouter à la liste l'installation des postes frontières de contrôle, à l'initiative exclusive du Luxembourg... L'enjeu est ailleurs. Les frontaliers, qui utilisent les services publics français, créent une richesse au Luxembourg qui ne profite pas à notre territoire. Sans cette équité, les grands projets transfrontaliers ne seront pas pérennes. Pourquoi ne pas confier cette manne financière à un organisme indépendant, comme la Caisse des dépôts et consignations, pour garantir le financement de projets mutuels ? Nous ne sommes pas des pique-assiettes. On ne peut pas se contenter de la réponse des Luxembourgeois : ils participent au financement d'infrastructures, nous aussi !

Dégradation du service de La Poste

Mme Marie-France Beaufils .  - En Indre-et-Loire, les bureaux de poste ont disparu des villages. Même des villes, comme Tours, ne sont plus épargnées ; plus de bureaux dans les quartiers ! Le conseil municipal a voté hier à l'unanimité contre les fermetures. Le nombre des bureaux de plein exercice est de 9 000 seulement, les employés sont de moins en moins des postiers ; les fonctionnaires ne représentent plus que 45 % des effectifs. La mobilisation est forte ; on l'a vu devant le Sénat le 8 décembre, mais aussi à Tours, Vouvray et Montlouis. En trois ans, 21 000 postes ont été supprimés alors que La Poste a touché plus de 1 milliard d'euros de CICE.

Les agents n'en peuvent plus : dégradation de l'état de santé, suicides - on en décompterait jusqu'à cinquante cette année ! Cela rappelle la triste situation de France Telecom...

Nombre de territoires deviennent des déserts, sans services publics. On abonde le fonds de péréquation de La Poste de 4 millions, mais qui serviront, à 35 %, à fermer des bureaux de poste !

Il faut moderniser La Poste, oui, mais pas contre les agents et les habitants. Je demande solennellement au Gouvernement d'intervenir pour que cesse cette dégradation organisée du service postal.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - M. Sirugue m'a chargée de vous répondre en son nom. Vous avez dépeint un tableau sombre et humain ; la réponse sera sèche et technocratique mais je suis certaine que le ministre souhaitera s'entretenir avec vous de ces sujets graves.

Le Gouvernement est attaché à assurer un maillage territorial le plus dense possible, dans un contexte de concurrence, de baisse drastique du volume du courrier et de la fréquentation des guichets : moins 6 % en 2015. Priorité est donnée aux points de contact les plus fragiles, pour adapter le réseau aux attentes.

Il a fallu un effort financier accru : le fonds postal national de péréquation a été abondé en conséquence de plus de 12 millions d'euros pour atteindre 522 millions d'euros sur trois ans, contre 510 millions d'euros durant la période triennale précédente.

La commission départementale de présence postale territoriale se prononce après un diagnostic partagé. Dans votre département, on compte 220 points de contact - 97 bureaux, 86 agences, 37 relais poste - pour 600 000 habitants : 98,9 % de la population est à moins de cinq kilomètres et moins de vingt minutes d'un point de contact. Ce chiffre peut choquer ceux qui vivent au quotidien l'éloignement de leur bureau de poste. Pour autant, quand on effectue des comparaisons européennes, la densité du maillage territorial en France est une réalité.

La Poste continue à assurer un service de haut niveau, atteignant quatorze des quinze objectifs de qualité assignés par l'État et contrôlés par l'Arcep. Le 30 novembre dernier, un comité de suivi du contrat État-Poste a été l'occasion, pour M. Sirugue, de rappeler son attachement à la poursuite d'un dialogue social de qualité et de saluer l'ouverture de négociations sur les métiers et les conditions de travail des facteurs.

Mme Marie-France Beaufils.  - Je l'ai dit à Philippe Wahl, la qualité de la distribution du courrier se dégrade. C'est la conséquence de l'allongement des temps de parcours des postiers. La fréquentation des guichets diminue ? C'est la conséquence du recours aux automates ! Il faut raisonner globalement, et non activité par activité.

La dégradation des conditions de santé des personnels est très préoccupante : je lance une alerte. L'État qui assure une forme de tutelle de ce grand service public qu'est La Poste doit se montrer très attentif.

Conduite de tracteurs communaux

M. René Danesi .  - L'article 27 de la loi Macron issu d'un amendement sénatorial a modifié l'article L. 221-2 du code de la route, qui permet à toute personne titulaire d'un permis B de conduire tous les véhicules et appareils agricoles ou forestiers dont la vitesse n'excède pas 40 km à l'heure, ainsi que les véhicules qui peuvent y être assimilés. Cette dernière expression « véhicules qui peuvent y être assimilés » s'applique-t-elle également aux tracteurs appartenant aux communes ou exclusivement à ceux d'une exploitation agricole ou forestière ? À défaut, les agents communaux qui conduiraient un tracteur communal seraient obligés de posséder le permis de conduire correspondant à la catégorie du véhicule. L'AMF en fait une interprétation restrictive.

Nombre de collectivités locales possèdent des tracteurs pour le déblaiement ou le déneigement ; peuvent-elles faire conduire leurs tracteurs par leurs employés uniquement détenteurs du permis B ?

La question est certes technique, je n'ai d'autre choix que de vous la poser aujourd'hui quand mes deux questions écrites du 3 décembre 2015 et du 28 avril 2016 sont restées sans réponse.

Il nous faut une réponse claire. Si elle est évasive ou alambiquée, nous devrons de nouveau légiférer.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - La réponse de M. Le Roux sera technique et précise. Le conducteur, selon la catégorie de véhicule conduit, doit être en possession du permis adéquat. Pour un tracteur, la catégorie est définie en fonction du poids total en charge du véhicule et de sa remorque éventuelle.

Une dérogation est prévue pour les conducteurs attachés à une exploitation agricole ou forestière que la loi Macron a étendue aux véhicules T, C, R et S dès lors que la vitesse n'excède pas 40 km à heure. Seul un conducteur attaché à une exploitation agricole ou forestière, à une entreprise de travaux agricoles ou à une coopérative d'utilisation de matériel agricole est autorisé à conduire ces véhicules sans permis de conduire à partir de 16 ans.

Les conducteurs qui travaillent pour une collectivité doivent être titulaires d'un permis B. Inutile de légiférer de nouveau, donc.

M. René Danesi.  - Merci pour cette réponse claire.

Zones de revitalisation rurale

M. Jean-François Longeot .  - Les effets combinés de la loi NOTRe et de la loi de finances rectificative pour 2015 vont conduire des communes à perdre leur classement en ZRR alors que leurs caractéristiques n'auront pas changé. Cela risque d'avoir un impact négatif sur l'activité ainsi que sur l'attractivité économique de ces communes accentuant la fracture que les ZRR tentaient justement de réduire.

Les ZRR ont été créées pour soutenir le développement économique des territoires ruraux en compensant par des exonérations les obstacles logistiques tels que l'éloignement ou l'accès difficile à de nombreux services.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour ne pas laisser ces territoires face à une désertification des entreprises désormais inévitable ?

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales .  - Veuillez excuser M. Baylet, en déplacement en Corse. Les ZRR visent à compenser le manque d'attractivité de certaines communes. La réforme que vous évoquez fait suite au rapport des députés Calmette et Vigier, et vise à mieux cibler les communes qui en ont le plus besoin.

Le nombre de collectivités classées restera globalement le même : 14 000 ; le Gouvernement y a veillé.

Le ministère a demandé à ses services de faire connaître la nouvelle carte au plus vite, en début d'année prochaine.

Pour les collectivités sortant du classement, l'exonération d'impôt sur les sociétés dont bénéficient les entreprises installées courra jusqu'au 31 juillet 2025, comme cela était convenu.

Ce Gouvernement a beaucoup fait pour la ruralité : sans détailler les 104 mesures qu'il a prises, citons les 12,6 millions d'euros pour le maintien des stations-services ou l'action pour l'ouverture de 1 000 maisons de services publics, seront maintenus ou encore la prime d'aménagement du territoire qui a permis de soutenir 29 projets en 2016.

De plus, la DETR atteindra 1 milliard et 216 millions d'euros seront consacrés aux contrats de ruralité.

M. Jean-François Longeot.  - Merci pour cette réponse. Je n'ignorais pas que les exonérations d'impôt sur les sociétés seraient prolongées, mais qu'en sera-t-il pour les entreprises qui souhaitaient s'installer dans les territoires ? Il ne faudrait pas changer si souvent les règles qui s'appliquent à nos petites communes rurales. Et je ne parle pas des chefs-lieux de cantons, qui perdent leur statut et leur financement.

Financement des groupements d'associations syndicales de propriétaires par les collectivités territoriales

M. Daniel Laurent .  - Les associations syndicales de propriétaires jouent un rôle très important sur nos territoires, particulièrement en Charente-Maritime couvert de plus de 1 000 000 hectares de marais. Les interventions d'entretien et d'aménagement nécessitent d'importants moyens. L'Union des Marais de la Charente-Maritime, syndicat mixte ouvert qui fédère plus de 250 adhérents, apporte conseils et assistance autour des questions de l'eau et de la protection contre les inondations.

La loi Maptam rend obligatoire le transfert au bloc communal, à compter du 1er janvier 2018, la compétence Gemapi. Les missions des associations syndicales de propriétaires sur leur périmètre et dans le cadre de leurs statuts ont, quant à elles, été préservées. Une disposition favorable aux associations syndicales de propriétaires a été introduite à l'article 94 de la loi NOTRe. Cependant, il faudrait offrir aux groupements des associations syndicales la possibilité de continuer à bénéficier d'un accompagnement financier des départements et des régions. Pouvez-vous préciser la position du ministère sur ce sujet ?

Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales .  - La loi NOTRe a clarifié la répartition des compétences en supprimant la clause générale de compétence pour les départements et les régions. La faculté de financer les associations syndicales de propriétaires sera réservée, à partir du 1er janvier 2018, aux communes et EPCI qui auront la compétence Gemapi.

Régions et départements pourront continuer à soutenir financièrement les actions des associations syndicales de propriétaires dans le domaine de l'eau, à condition qu'elles ne portent pas sur le champ de la compétence Gemapi.

La loi NOTRe autorise les départements, pour des raisons de solidarité territoriale et lorsque l'initiative privée est défaillante ou absente, à soutenir les opérations d'investissement des associations syndicales. Les dépenses de fonctionnement sont exclues.

M. Daniel Laurent.  - Ces associations sont très importantes là où il y a des marais. Leurs dépenses de fonctionnement recouvrent, entre autres, des actions d'entretien. Si l'entretien n'est pas réalisé par les associations syndicales, par qui le sera-t-il ?

La séance est suspendue à 12 h 45.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 30.

Éloge funèbre de Louis Pinton

M. Gérard Larcher, président du Sénat .  - (Mmes et MM. les sénateurs et les ministres se lèvent)

C'est avec une grande tristesse que j'accomplis une nouvelle fois devant vous le devoir qui revient au président de notre assemblée de saluer solennellement la mémoire d'un collègue.

Vous vous souvenez de la stupeur qui nous a saisis, le 17 novembre dernier, lorsqu'au moment des questions d'actualité au Gouvernement nous avons appris la disparition brutale de Louis Pinton.

Avec Louis Pinton, c'est une figure majeure de la vie politique de l'Indre au cours de ces dernières décennies et un sénateur de la République estimé de tous qui nous a quittés.

C'est au nom du Sénat que j'ai prononcé, le 24 novembre, l'éloge de Louis Pinton en l'église Saint-André de Châteauroux où nous lui avons rendu hommage en présence de plusieurs d'entre vous, notamment Mme la présidente Jacqueline Gourault, nos collègues Catherine Deroche, Rémy Pointereau, Éric Doligé, et bien sûr le sénateur de l'Indre Jean-François Mayet et Mme Frédérique Gerbaud, sa suppléante, qui nous a désormais rejoints dans cet hémicycle.

Cet adieu émouvant au milieu des siens, au milieu de très nombreux maires en écharpe tricolore, au côté de son successeur au conseil départemental et de ses collègues conseillers départementaux, dans cette terre, au coeur du Berry, qui lui était si chère et qu'il avait si fidèlement servie, devait trouver son écho au Palais du Luxembourg. C'est ce qui nous réunit aujourd'hui.

Louis Pinton était particulièrement attaché au Sénat de la République où il avait succédé à Daniel Bernardet le 22 novembre 2007. Il croyait profondément au rôle de notre assemblée, au point de renoncer en janvier dernier à la présidence du conseil départemental de l'Indre à laquelle il s'était voué sans compter depuis 1998.

Né à Bonnat dans la Creuse, terre où il repose désormais, Louis Pinton avait accompli ses études secondaires aux lycées de Guéret et de Périgueux et au collège Sainte-Barbe à Paris, avant de se former, pour accomplir sa vocation de vétérinaire, à l'école nationale vétérinaire de Toulouse. II commença à exercer en milieu rural à Argenton-sur-Creuse en 1974 avant de s'installer en 1980 à Orsennes, dans ce département de l'Indre qu'il n'allait plus quitter.

Moins de trois ans plus tard, Louis Pinton devint maire d'Orsennes, fonction qu'il occupera durant trois mandats successifs.

C'est en 1998 que Louis Pinton, qui avait été élu conseiller générai en 1992, a succédé à la tête de l'assemblée départementale à Daniel Bernardet, qu'il avait connu dès les années 1970, qui fut en quelque sorte son guide en politique, et auquel le liait une très sincère amitié.

Louis Pinton, comme Daniel Bernardet, était profondément lié aux élus locaux et à son territoire. Il avait conservé de l'exercice de sa profession de vétérinaire en milieu rural un sens du contact et une parfaite connaissance des territoires, dont il porta ici la parole avec force. II se voulait d'abord homme de terroir ce qui n'excluait en rien la force de ses convictions.

Louis Pinton préférait la sincérité vraie entre les hommes et les femmes. II savait écouter, sa courtoisie et sa discrétion allant de pair avec une autorité naturelle qu'il mettait au service de ses mandats pour les accomplir avec rigueur.

Louis Pinton présida durant dix-huit ans aux destinées du conseil général, puis du conseil départemental, avec cette rigueur que j'évoquais, ce qui passait par une gestion des deniers publics à la fois exigeante et généreuse.

Il fit ainsi de l'Indre - ce qui n'est pas rien en cette période - le département le moins endetté de France, cette maîtrise de la dépense publique n'empêchant pas une politique d'investissements dynamique dans le domaine des transports, de l'éducation, de l'environnement et du numérique. Louis Pinton voulait faire de l'Indre un département attractif, au coeur de ce Berry qui est l'un des plus vieux terroirs agricoles de notre pays.

L'Indre s'est aussi fixé pour objectif, sous sa direction, une politique sociale active à laquelle il était particulièrement attaché. J'ai eu ainsi le bonheur d'inaugurer à ses côtés, le 18 septembre 2015, après une très belle assemblée générale des maires, une réalisation originale du département qui illustre la générosité et l'attachement de Louis Pinton à la réinsertion sociale : la ferme thérapeutique de l'établissement public départemental Blanche de Fontarce a pour vocation d'accueillir notamment de jeunes adultes en difficulté sociale et psychologique et en chemin de réinsertion. Ce fut un moment particulièrement chaleureux et très personnel, dont je me souviens avec émotion et je sais par les témoignages reçus très récemment, d'accueillants comme d'accueillis, que cette émotion a été partagée.

Lorsqu'il prit l'initiative, en janvier, d'anticiper l'application de la loi sur l'exercice des mandats en décidant de quitter la présidence du conseil départemental, Louis Pinton pouvait légitimement dresser un vrai bilan de son action à la tête du département de l'Indre.

Louis Pinton était depuis neuf ans un sénateur attentif et estimé. II fut depuis 2007 un de ces élus qui font la richesse du Sénat, un défenseur infatigable et vigilant des intérêts de son département et du territoire, tout en exprimant, toujours avec conviction et détermination, sa vision des sujets engageant l'avenir du pays.

Je le revois ici, au haut de cet hémicycle, au côté de Jean-François Mayet, le regard attentif, le cheveu blanc en brosse et qui suivait les débats. Lui, le réservé, s'exclamait parfois - et sa voix portait ! - quand il entendait ce qui lui paraissait le contraire de la vérité. Car son exigence, c'était la vérité !

Membre du groupe Les Républicains, Louis Pinton participa, tout au long de son mandat sénatorial, aux travaux de la commission des affaires sociales qu'il éclairait de ses compétences d'élu de terrain. II était aussi membre de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et participait en connaisseur aux travaux des groupes d'études, notamment de l'élevage.

La pondération de Louis Pinton n'empêchait pas la force dans l'expression de ses convictions. Je me souviens de sa position vigoureuse lors des débats récents sur la déchéance de nationalité qu'il considérait, je cite : « comme un débat stérile qui détourne l'attention du seul objectif valable dans les circonstances actuelles, à savoir la lutte intensive contre le terrorisme ». Les évènements d'hier nous rappellent ces propos.

Mes chers collègues, Louis Pinton a consacré l'essentiel de sa vie publique à ses mandats d'élu local et de parlementaire. II était un élu exemplaire et une personnalité très attachante.

Je venais de le charger d'une mission sur les modes de gestion des collectivités territoriales en ces temps de rareté financière - qui vont durer. Notre métier commun de vétérinaire nous avait construit un mode de raisonnement : l'observation pour poser un diagnostic, l'analyse pour poser un pronostic, la décision pour engager un traitement. Des vertus utiles dans la vie publique ! Louis Pinton avait en fait une grande sensibilité cachée sous une carapace parfois un peu rugueuse. C'était un humaniste.

À nos collègues du groupe Les Républicains et à ceux de la commission des affaires sociales, j'exprime à nouveau toute notre sympathie.

Je souhaite aussi redire à sa famille, à ses enfants, à Jean-François Mayet, à Frédérique Gerbaud, et à tous leurs proches, les condoléances sincères et attristées de chacun des membres du Sénat de la République, ainsi que la part personnelle que je prends à leur peine.

La mémoire de Louis Pinton restera bien vivante.

Je laisse à présent la parole à M. André Vallini, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, en remerciant de sa présence M. Michel Sapin, qui n'est pas étranger à ce département de l'Indre.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - C'est avec beaucoup de tristesse que j'ai appris, le 17 novembre dernier, que Louis Pinton nous avait quittés brutalement, à seulement 68 ans. Élu de l'Indre pendant près de vingt-cinq ans, cet homme travailleur, jovial, accessible, a consacré toute son énergie à son territoire du Berry. Il avait toujours la volonté d'aider ses concitoyens.

Élu rural par excellence, homme de terrain proche des habitants et estimé par eux, grand connaisseur du monde agricole, féru de chasse, attaché à la présence des services publics, Louis Pinton s'est engagé pour le développement des infrastructures ferroviaires de son département, contre la désertification médicale, mais aussi pour l'extension du haut débit, puis du très haut débit dans les villes mais aussi dans les campagnes de l'Indre.

Dans son mandat de sénateur, auquel il avait décidé de se consacrer pleinement il y a quelques mois, il a poursuivi son combat au service des territoires ruraux. Lutter contre la fracture territoriale, y compris numérique, par une politique volontariste d'aménagement du territoire tout en conservant une fiscalité locale modérée, cela répondait chez lui à une conviction profonde.

Louis Pinton laisse un Sénat endeuillé, un territoire attristé mais transformé et prêt à affronter l'avenir.

À ses proches, à ses amis et collaborateurs, j'adresse au nom du Gouvernement, avec Michel Sapin qui est à mes côtés, nos condoléances les plus attristées. (Mmes et MM. les sénateurs et les ministres observent un moment de recueillement)

M. le président.  - Avant de suspendre la séance par respect pour la mémoire de Louis Pinton, je vous annonce - car nous avons vécu des semaines terribles - que je prononcerai l'éloge funèbre de Michel Houel le mardi 10 janvier à 14 h 30, et celui de Jean-Claude Frécon le mardi 24 janvier à 14 h 30.

La séance est suspendue à 14 h 50.

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

La séance reprend à 15 heures.

CDG Express (Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle.

Discussion générale

M. Louis Nègre, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - La CMP est parvenue le 30 novembre à un accord sur ce projet de loi qui marque un élan nouveau dans l'histoire chaotique du CDG Express. Comme beaucoup de grands chantiers d'infrastructures en France, ce projet s'était enlisé depuis une dizaine d'années ; il fallait agir dans l'urgence car il n'y a pas d'autre option crédible pour absorber la croissance à venir de Roissy et répondre aux besoins des voyageurs dans une démarche de développement durable - sans compter la candidature de Paris aux jeux Olympiques et aux manifestations suivantes. Sénat et Assemblée nationale se sont prononcés sans ambiguïté pour ce projet d'intérêt général.

Sur le montage juridique, similaire à celui du Grand Paris Express - séparation de la construction et de l'exploitation - il n'y a pas eu de débat. Je me félicite que l'exploitation fasse l'objet d'une mise en concurrence, cela compense l'attribution de gré à gré de la construction de l'infrastructure à une société de projet filiale de SNCF Réseau et d'ADP... Le Sénat avait sécurisé l'entrée éventuelle de la CDC au capital de la société et repoussé le délai permettant le recours à la procédure d'extrême urgence pour les expropriations. La CMP a retenu ces dispositions.

Nous avions exprimé quelques inquiétudes au regard de l'impact du projet pour les usagers du RER B, en dépit de l'enveloppe de 125 millions d'euros. Des perturbations sont inévitables au cours des travaux, puis ensuite. Il faudra veiller à respecter les besoins des voyageurs du quotidien.

Le schéma de financement est resté flou jusqu'au dernier moment. Il faudra 1,4 milliard d'euros aux conditions économiques de 2014 pour construire la ligne, 285 millions d'euros pour le matériel roulant et les équipements - en fait sans doute plus au fil du temps. L'exception exceptionnelle à la règle d'or sur l'endettement de SNCF Réseau me paraissait inacceptable. Des améliorations ont finalement été apportées au texte par la CMP sur proposition du rapporteur de l'Assemblée nationale : avis préalable de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) pour tout projet d'investissement - montant fixé aujourd'hui par décret à 200 millions d'euros - et rémunération de SNCF Réseau, notamment pour les capitaux investis. C'est l'esprit de ce que le Sénat avait voté en parlant d'une « rentabilité suffisante ». Républicain, je respecte cette décision...

Monsieur le ministre, vous avez annoncé 400 millions d'euros de fonds propres répartis entre SNCF réseau, ADP et, avez-vous dit, « probablement » la Caisse des dépôts - c'est nouveau -, plus une avance remboursable de 100 millions d'euros d'ADP. Je me félicite que cette dernière solution, que j'avais proposée, ait été retenue : c'est la preuve qu'une dérogation à la règle d'or n'était peut-être pas indispensable...

Je regrette en revanche l'augmentation de 40 % de 1 euro à 1,40 euro du montant de la taxe sur les compagnies aériennes. C'est la solution de facilité. Il était au moins indispensable de la repousser à la date d'entrée en service de l'infrastructure. Le Gouvernement est resté sourd aux appels, y compris de sa majorité, qui demandaient une remise à plat de la taxe ou l'affectation du surplus de recettes qui résulte de l'écrêtement.

Sur le volet financier, nous aurions pu faire beaucoup mieux. Je redoute déjà le jour où SNCF Réseau sera appelé à recapitaliser la société de projet... Il faudra rester attentif à la dette de la SNCF.

Je me réjouis cependant de l'engagement de ce projet important pour l'Île-de-France. Le Parlement aura su oeuvrer rapidement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Vidalies.

M. Jean Desessard.  - Une panne de RER ?

M. Matthias Fekl, ministre.  - Le CDG Express est indispensable pour mieux relier Paris à son principal aéroport. Fin 2023, depuis l'aéroport, on pourra rejoindre directement la gare de l'Est en vingt minutes. Le projet, qui conjugue attractivité économique et développement durable, sera un argument de poids pour les candidatures de Paris aux jeux Olympiques et paralympiques et l'Exposition universelle.

Ce projet est complémentaire du Grand Paris Express et des transports du quotidien, qui bénéficient eux-aussi d'investissements, à commencer par le RER B, la ligne K du Transilien et le TER Picardie.

Le projet de loi donne à ce projet et à son montage juridique des fondements législatifs. Une filiale de SNCF Réseau et d'ADP se verra confier la conception, la construction, le financement et l'entretien de la ligne, et un opérateur ferroviaire désigné par appel d'offres son exploitation, selon les mêmes modalités que pour le Grand Paris Express.

Les ressources tirées de la billetterie ne suffiront pas ; le Gouvernement a donc proposé, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, une taxe sur les seuls voyageurs aériens de Paris Charles-de-Gaulle, à compter de l'entrée en service de la ligne et avec un plafond de 1,40 euros.

Le Gouvernement salue l'accord en CMP. Grâce à un amendement sénatorial, les conditions de la contribution financière de SNCF Réseau ont été précisées. Je remercie le rapporteur Louis Nègre de son travail.

Le Gouvernement soutient donc pleinement le texte qui résulte des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Vincent Capo-Canellas applaudit également)

M. Jean Desessard .  - Grâce à ce projet de loi, touristes et acteurs économiques pourront, en 2023, rejoindre la capitale depuis l'aéroport Charles-de-Gaulle en 20 minutes. Le RER B, la ligne la plus fréquentée d'Europe avec 900 000 passagers/jour, ne correspondait pas, dit-on, aux standards de qualité.

M. Philippe Dallier.  - C'est le moins qu'on puisse dire !

M. Jean Desessard.  - Les écologistes ont trois objections. La dégradation de la ligne du RER B...

M. Roger Karoutchi.  - Pas seulement elle !

M. Jean Desessard.  - ...d'abord, malgré le plan de rénovation de 600 millions annoncé il y a quelque temps. L'état des rames est déplorable, les pannes et les retards fréquents.

M. Jean-Pierre Bosino.  - C'est un euphémisme !

M. Jean Desessard.  - Et on nous propose un investissement de 1,7 milliard pour transporter 20 000 voyageurs quotidiens... Toutes les études montrent que des travaux structurels très importants doivent être réalisés sur la ligne - on l'a vu récemment, les caténaires lâchent dès que la fréquentation augmente...

Le coût de l'aller simple en CDG Express, 24 euros, et le fait qu'il ne sera pas couvert pas le pass Navigo, le rendra inaccessible pour beaucoup. Le report du RER B sur le CDG Express est estimé à seulement 6 %. On crée ainsi un système à deux vitesses. Il y avait les deux classes dans le métro, il y aura les lignes de première et de deuxième classe.

M. Philippe Dallier.  - C'est la lutte des classes !

M. Jean Desessard.  - Dans les autres capitales européennes, rejoindre l'aéroport coûte beaucoup moins cher : 3 euros à Berlin, 14 euros à Rome, 8,5 euros à Bruxelles, soit des prix plus proches de celui du RER B actuel.

Pire, les 152 rames du CDG Express qui circuleront chaque jour, non seulement ne bénéficieront pas aux habitants de la Seine-Saint-Denis mais seront pour eux sources de nuisances visuelles et sonores. Et elles partageront une partie des voies avec le RER B - de nouveaux retards en perspective... Sans compter que le projet semble redondant avec la future ligne 17 du Grand Paris Express...

Le montage financier reste opaque. J'aimerais être sûr qu'un système de transports aussi inégalitaire ne sera pas financé sur fonds publics...

Les débats ne nous ont pas rassurés. Vous l'avez compris, le groupe écologiste ne soutient pas le projet. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et communiste républicain et citoyen)

Mme Nicole Bonnefoy .  - L'aéroport Charles-de-Gaulle, premier de France, deuxième d'Europe, est la principale porte d'entrée dans notre pays. Pourtant, ses trois voies d'accès routières et ferroviaires sont congestionnées, avec des temps de trajet jusqu'au centre de Paris pouvant aller jusqu'à une heure trente. Pour le confort des voyageurs, pour l'image de notre pays, il est indispensable que nous nous dotions d'une ligne ferroviaire rapide entre la capitale et l'aéroport.

L'enjeu économique est considérable avec les candidatures de Paris aux jeux Olympiques et à l'Exposition universelle et notre objectif d'accueillir 100 millions de touristes par an à l'horizon 2020. L'amélioration de la qualité de l'accueil est un des axes de travail, sachant que nous avons perdu un million de touristes de janvier à août de cette année.

N'opposons pas ce mode de transport aux transports du quotidien : ils sont complémentaires et le CDG Express délestera en partie les autres lignes et le transport routier.

Je me félicite donc de l'accord en CMP, et je remercie le Gouvernement d'avoir entendu nos préventions sur le montage financier initialement envisagé. Il importe d'ici 2024 d'aider nos compagnies aériennes à résorber leur déficit de compétitivité. Le CDG Express est une bonne nouvelle pour celles-ci, pour le secteur touristique et l'attractivité de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Éliane Assassi .  - Le projet du CDG Express, inutile et coûteux, est même une provocation pour les usagers du RER B, qui viennent encore de subir les effets du lâchage de caténaires datant de... 1946.

Avec un billet facturé à 24 euros, la majorité des Franciliens ne pourront se payer le trajet en CDG Express. Pour un habitant de Drancy, il faudra 35 minutes pour rejoindre l'aéroport Charles-de-Gaulle en empruntant la nouvelle ligne - 15 minutes jusqu'à la gare du Nord, puis 20 minutes en CDG Express, pour 24 euros - alors qu'il faut 25 minutes en RER B avec le pass Navigo !

Il ne faudrait pas opposer les projets ? Où sont les financements des infrastructures du quotidien ?

Mme Nicole Bricq.  - Ils sont inscrits !

Mme Éliane Assassi.  - Où est le pacte d'actionnaires pour le doublement du tunnel de Châtelet ? La région et l'État se renvoient la balle...

Des transports du quotidien de qualité sont indispensables à notre candidature aux jeux Olympiques. Un métro neuf automatique entre la capitale et l'aéroport, ce n'est pas un projet d'intérêt général : ces transports à deux vitesses selon les moyens financiers des usagers, ne correspondent pas à notre conception des services publics et constituent une violation des droits fondamentaux, parmi lesquels figure le droit à la mobilité. C'est le rôle de l'impôt que de redistribuer : la commission d'enquête exigeait une grille de circulation qui garantisse l'absence d'impact sur les transports existants.

Nous n'en disposons pas. Nous restons donc opposés à ce projet.

La loi de finances rectificative prévoit une taxe de 1,40 euros par billet, mais elle est trop tardive pour financer le projet. Tous les partenaires sont publics. Devrait-il entrer dans la règle d'or ? Un compromis a été trouvé. Mais nous contestons cette règle : la reprise de la dette par l'État est bien plus urgente.

La préservation des terres agricoles est un objectif important. Or ce projet en consommera 25 hectares à Mitry-Mory, et je ne parle pas du rognage du parc de la Poudrerie, en zone Natura 2000, ni de l'environnement des riverains de la porte de la Chapelle qui va se dégrader.

Pourquoi investir autant alors que ce projet est redondant avec la nouvelle ligne 17 du Grand Paris Express qui va relier Pleyel à Roissy ?

Pourquoi persévérer dans un projet qui n'est pas accepté par les populations ? En effet, lors de l'enquête publique de cet été, seulement 9 % des 705 avis déposés étaient favorables. Tous les élus dont les territoires sont concernés se prononcent contre cette liaison.

Fiabilité, ponctualité, qualité et confort ne doivent être un luxe réservé aux seuls passagers de l'aérien mais rester les attributs du service public pour tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; M. Jean Desessard applaudit également)

M. Robert Hue .  - Depuis 1974, l'aéroport Charles-de-Gaulle est devenu le deuxième d'Europe. Avec Orly, il est la porte d'entrée vers d'autres destinations françaises. Il a donc un caractère stratégique. Le tourisme représente 7,3 % de notre PIB. La France reste la première destination touristique et Paris a présenté sa candidature aux jeux Olympiques de 2024 et à l'Exposition universelle de 2025.

Il est urgent de fixer le cadre juridique de cette ligne, dont l'utilité n'est plus à prouver. Dans un contexte de hausse permanente du trafic du RER B, le report modal est une bonne chose. Mais deux inconnues persistantes et regrettables demeurent : l'impact sur le RER B compte tenu que le même tronçon serait utilisé par les deux services, ainsi que le financement.

Nous connaissons tous les incidents quotidiens d'un réseau victime d'un sous-investissement chronique.

Quant au prix de 24 euros, il est excessivement élevé : il sera plus intéressant pour une famille de prendre un taxi et les plus patients prendront le RER B. C'est pourquoi il faut donner la priorité au financement des transports du quotidien...

Il nous faut être le plus clair possible sur le financement. La règle d'or a été écartée au motif que le projet serait rentable, ce qui a inquiété le Sénat et les compagnies aériennes ; 100 millions d'euros d'avance remboursable de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) s'y sont ajoutés.

Tout en étant conscient de ces inconnues et de ces lacunes, le groupe RDSE votera les conclusions de la CMP, afin que la loi voie le jour rapidement.

M. Vincent Capo-Canellas .  - Le Sénat a choisi, samedi, de voter conforme la disposition de la loi de finances rectificative qui permettra au projet du CDG Express de se concrétiser enfin - il était temps, sachant que notre pays est montré du doigt dans le monde entier pour la difficulté d'accès de sa capitale depuis son aéroport principal.

Les amendements de Louis Nègre, sur la durée des expropriations notamment, ont été retenus en CMP, ce qui a permis de sortir par le haut du débat financier.

Cela ne pourra qu'être utile au transport aérien, qui vit des moments difficiles. Merci au rapporteur Louis Nègre également pour son apport sur la règle d'or, grâce auquel le consensus a pu s'établir. (M. Antoine Lefèvre et M. Mathias Fekl, ministre, confirment) Rares sont les rapporteurs qui défendent à ce point l'intérêt général.

Tout n'est pas réglé pour autant : les transports du quotidien devront être l'objet d'un soin tout particulier, notamment le RER B. Il faudra faire preuve de la même inventivité sur ces sujets.

La ligne 17 ne sera pas en concurrence avec le CDG Express, direct en vingt minutes, puisqu'un changement à Pleyel sera nécessaire, et qu'il y aura ensuite neuf stations pour rejoindre Roissy par ce moyen.

Louis Nègre nous l'a bien dit, il faudra surmonter des handicaps, l'interdiction notamment du financement public. Après le montage, désormais arrêté, il faudra faire en sorte que des financements bancaires puissent être mobilisés. L'écrêtement de la taxe de solidarité, qui abondait le budget de l'État, a été supprimé par l'Assemblée nationale ; il faudra aussi trouver des mesures de compétitivité pour les compagnies. (Applaudissements au centre)

M. Christian Manable .  - Des anciennes régions françaises, Amiens, était la seule capitale à ne pas être reliée par le TGV.

La liaison Picardie-Roissy est stratégique pour les Hauts de France. C'est le noeud international des liaisons rapides, mais aussi le coeur d'une zone d'activités très importante débouchant sur le sud de la Picardie et le Val d'Oise. Il faut donc en parler. Étudions l'opportunité de ce barreau Creil-Roissy et examinons son impact sur les liaisons avec Paris intramuros.

Le CDG Express peut-il être une nouvelle entrée dans Paris pour les passagers venus de Picardie, soulageant ainsi le RER B ? Ces questions n'ont, à ma connaissance, pas été traitées par l'enquête publique.

Pourtant, un barreau pourrait relier Creil à la gare de TGV, sans compter les autres avantages.

Au nom du collectif d'élus picards que je préside, je demande que cette question soit étudiée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Yves Daudigny.  - Bravo pour la Picardie !

M. Matthias Fekl, ministre .  - Selon les conclusions de l'enquête en date du 16 décembre, les trois incidents indépendants des 6 et 7 décembre sur les voies du RER B ne sont pas imputables à un défaut de maintenance... (Exclamations incrédules sur plusieurs bancs)

Mme Éliane Assassi.  - Il faut changer les caténaires, c'est tout !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Ils datent de 1946 !

M. Matthias Fekl, ministre.  - Le projet CDG Express ne doit rien enlever aux trains du quotidien qui restent la priorité du Gouvernement. Cet engagement prend la forme de traductions financières concrètes. Nous enregistrons d'ailleurs des gains de ponctualité : nous prévoyons 1 milliard d'euros pour ces infrastructures et 1,5 milliard pour le renouvellement des rames. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

La discussion générale est close.

Vote sur le texte élaboré par la CMP

M. le président.  - En application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction issue de la CMP.

Le projet de loi est définitivement adopté.

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.

Hommage aux victimes de l'attentat de Berlin

M. Gérard Larcher, président du Sénat .  - (Mmes et MM. les sénateurs et les ministres se lèvent) Berlin a été frappé hier par une terrible attaque meurtrière, dont le caractère terroriste a été confirmé par la Chancelière Angela Merkel.

Le bilan humain est très lourd : 12 personnes ont trouvé la mort, on compte 48 blessés.

Au nom du Sénat de la République française, je présente mes sincères condoléances au peuple et au gouvernement allemand. Après Paris, Bruxelles, Ankara, Nice, cette attaque nous rappelle que le terrorisme ne connaît pas de frontière. Il menace nos valeurs de liberté, de tolérance, nos traditions. Les marchés de Noël sont chers à la culture allemande et alsacienne, au coeur de l'Europe. Ces événements nous rappellent à nos devoirs de vigilance, d'unité et de détermination.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre .  - L'Allemagne a été frappée au coeur hier soir par un attentat terroriste qui, comme tous les actes terroristes, se caractérise par sa violence, son abjection et sa lâcheté.

Au nom du Gouvernement français, je veux dire toute la solidarité de notre nation rassemblée, témoigner au gouvernement allemand notre compassion et réaffirmer notre détermination à agir avec lui pour lutter avec la plus grande fermeté contre le terrorisme.

Quand la France pleurait ses morts, la chancelière allemande est venue à Paris, à nos côtés, pour nous dire que, dans l'épreuve, nous étions frères, que rien ne pourrait nous détourner dans la guerre contre le terrorisme.

Aujourd'hui, nous devons au Gouvernement allemand cette présence, cette fraternité. La relation franco-allemande doit être plus forte qu'elle ne l'a jamais été pour lutter contre le terrorisme et mieux protéger le continent européen : Frontex, interconnexion des fichiers, lutte contre le trafic d'armes, nous progressons dans tous ces domaines.

Les frontières entre la France et l'Allemagne, auxquelles les guerres que nous nous sommes menés les uns contre les autres, renvoient à une histoire lointaine : désormais, lorsque le malheur frappe, lorsque l'essentiel est en jeu, nous sommes un pays, un seul, la France et l'Allemagne, en Europe, pour défendre les valeurs de solidarité et de fraternité qui sont celles des pères de l'Union européenne.

M. le président.  - Je vous invite à observer un moment de recueillement, en hommage aux victimes de cette tragédie et en solidarité avec nos amis allemands. (Mmes et MM. les sénateurs et les membres du Gouvernement observent un moment de silence)

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Autorités indépendantes et politique de la France

M. Pierre-Yves Collombat .  - Après les paroles de M. le Premier ministre, mes propos paraîtront peut-être un peu légers. Pourtant, à y regarder de plus près, tout se tient.

Il y a quelques jours, le gouverneur de la Banque de France, M. François Villeroy de Galhau, s'est invité dans la campagne présidentielle en affirmant que l'accélération de la croissance ne pourrait venir d'une politique de relance budgétaire et que ce serait bercer d'illusions les électeurs que de le laisser croire.

Est-ce son rôle de monter sur les tréteaux électoraux ? Est-ce à lui de dire quels programmes économiques seraient bons pour la France et ceux qui ne le seraient pas ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RDSE et sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre .  - Une parole d'une autorité éminente exige une réponse d'une précision absolue.

Selon l'article 20 de la Constitution, le Gouvernement conduit la politique de la Nation. C'est lui qui définit la politique budgétaire et économique de la France, dans un cadre européen qui le lie à ses partenaires sans annihiler sa capacité à déterminer le chemin qu'il souhaite suivre.

Notre politique est claire. La poursuite de l'assainissement des comptes publics, d'abord. Lors des débats sur le projet de loi de finances pour 2017, l'opposition sénatoriale a déploré que la réduction des déficits ne fût pas suffisamment rapide. Soit, nous l'avons menée en prenant garde de ne pas mettre en cause les objectifs de croissance. Cela ne signifie pas, pour autant, que le déficit ait augmenté. Il est passé de 5 % à 3 % ; celui de la sécurité sociale (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), pour être plus précis, celui du régime général, de 17 milliards à 400 millions d'euros. Grâce aux efforts considérables consentis pour les entreprises, dont 40 milliards d'euros de CICE, le taux de marges des entreprises s'est rétabli de deux points, l'investissement industriel a augmenté de 3,4 % et plus de 240 000 emplois industriels ont été créés au cours des dix-huit derniers mois. (Même mouvement) Nous poursuivrons ces efforts, pour redresser l'économie de ce pays.

Cette réponse rassurera tous ceux qui expriment publiquement de nobles pensées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et sur quelques bancs du groupe RDSE)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je suis rassuré, c'est le Gouvernement qui mène la politique économique de la France. Mais ce n'était pas ma question ! (Rires et applaudissements au centre et à droite)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre.  - C'est ma réponse !

M. Pierre-Yves Collombat.  - De plus en plus, des autorités sans légitimité démocratique s'arrogent le droit de dire ce qu'il faut faire ou ne pas faire aux représentants du peuple et au peuple. Pour elles, point de salut hors de la politique de restriction que la France mène depuis tant d'années avec le succès que l'on connaît. Pour paraphraser Clemenceau, je dirai que l'économie est trop importante pour en laisser la direction aux financiers ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RDSE et sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Oiseaux menacés

M. Ronan Dantec .  - Chaque année est actualisée la liste des espèces d'oiseaux menacés (Exclamations amusées à droite) On en dénombre 1 460 en 2016, soit 13% de l'avifaune mondiale. En France, onze nouvelles espèces sont désormais menacées et quatorze sont en danger critique d'extinction, comme le râle de Lafresnaye ou le martin-chasseur des Gambier.

La loi pour la reconquête de la biodiversité prévoit l'élaboration de plans nationaux d'action avant le 1er janvier 2020. Six mois après son adoption, où en sommes-nous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste)

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Les plans d'action poursuivent quatre objectifs : suivi des populations, restauration de leur habitat, information des acteurs et du public, intégration de l'objectif de prévention dans les activités humaines et les politiques publiques. Il en existe une soixantaine portant sur 200 espèces, d'autres sont en préparation, par exemple, pour le milan royal et le vautour fauve. (Murmures de curiosité teintée d'ironie à droite) Une première tranche sera lancée dès 2017. L'État les finance, en coordination avec les collectivités territoriales et l'Europe.

Voyez que le Gouvernement fait tout pour assurer la survie des espèces menacées. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain, M. Alain Bertrand applaudit également)

M. Ronan Dantec.  - Je note qu'un flou subsiste sur le calendrier. Vous n'avez cité, monsieur le ministre, que des espèces métropolitaines. Or les espèces ultramarines doivent aussi faire l'objet de plans.

À mes collègues, les actions pour les batraciens menacés dans le Nord de la France pâtissent de la baisse des subventions aux associations environnementales dans des régions tenues par la droite ! C'est pourtant un enjeu de biodiversité. (Exclamations à droite ; applaudissements sur les bancs du groupe écologiste)

Revalorisation du SMIC

Mme Laurence Cohen .  - Madame El Khomri, à la veille de Noël, pourquoi refusez-vous d'augmenter le SMIC, au contraire de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne ou de l'Espagne ? Une augmentation mécanique de neuf centimes du SMIC horaire est lamentable. Le dernier coup de pouce remonte à juillet 2012, soit au lendemain de l'élection de François Hollande. Comment pouvez-vous justifier une telle position ?

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Hier, devant la commission nationale de la convention collective et après avoir consulté les partenaires sociaux, j'ai effectivement annoncé une revalorisation légale du SMIC, soit 0,93 centimes, telle que la préconisait le groupe d'experts.

Le Gouvernement a privilégié d'autres voies pour les travailleurs les plus précaires : il a activé le levier fiscal, avec la baisse massive des impôts pour cinq millions de foyers dès janvier prochain, et la prime d'activité, qui donne plus de pouvoir d'achat aux plus modestes, parmi lesquels 1,6 million de personnes au SMIC.

Nous n'avons pas voulu faire peser cette hausse de pouvoir d'achat sur les entreprises, 45 % de ces salariés au Smic travaillent dans des PME.

La prime d'activité représente 165 euros par mois pour un célibataire, l'équivalent d'un treizième mois ; pour un parent isolé, 300 euros par mois. Son taux de recours, de 60 %, doit être amélioré ; j'en ai conscience mais il est meilleur que celui du RSA activité, qui atteint seulement 30 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Laurence Cohen.  - Comme d'habitude, comme lorsque vous avez cassé le droit du travail, vous répondez à côté. Décidément, vous vivez dans un autre monde.

Avec 1 153 euros par mois, comment se loger, se nourrir, éduquer ses enfants, prendre des loisirs et se déplacer ? Les rémunérations des dirigeants du CAC 40 galopent... (Protestations à droite)

Mme Éliane Assassi.  - Et oui !

Mme Laurence Cohen.  - ... et progressent à un niveau aussi indécent que votre refus d'augmenter le Smic.

Un conseil : mettez fin aux dispositifs inefficaces tels que le CICE et luttez contre l'évasion fiscale. Vous aurez de quoi augmenter le SMIC jusqu'à 1 400 euros nets par mois, puis 1 700 euros. Voilà ce qui serait une vraie politique de gauche et sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Attentat de Berlin

M. Michel Boutant .  - L'attentat d'hier soir à Berlin inspire horreur et tristesse. Après Madrid, Londres, Bruxelles, Nice, Ankara, Djakarta et d'autres, c'est un marché de Noël qui a été frappé. Pendant l'Avent, quand on attend la lumière, c'est l'obscurantisme qui a frappé.

Nous savons les mesures que vous avez prises, monsieur le Premier ministre, quand vous étiez à l'Intérieur après les attentats de novembre 2015 et de janvier 2016 : Vigipirate, opération Sentinelle, création d'une garde nationale. Ces mesures permettront-elles à toutes les manifestations prévues pour les fêtes de se tenir ou faut-il les annuler ? Quand l'Europe de l'Ouest est particulièrement dans le viseur des terroristes, le travail de coopération entre les services de renseignement des pays européens vous semble-t-il sincèrement et efficacement organisé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre .  - Le niveau de menace est très élevé, en effet ; le constat doit être lucide. Cela se traduit par l'accroissement des activités des services de renseignement : en 2016, se sont 430 personnes qui ont été interpellées et judiciarisées, dix-sept attentats qui ont été évités, alors qu'il n'y en avait qu'un seul en 2013, et trois en 2014. Rendons hommage à nos services de renseignement de leur travail, de même qu'aux forces de sécurité intérieure.

Que faut-il faire aujourd'hui ? Nous devons approfondir ces efforts. Les lois antiterroristes votées nous donnent des outils : interdiction de sortie du territoire, interdiction de retour pour les personnes possédant la bi-nationalité ayant fréquenté un théâtre d'opération terroriste, fermeture des sites djihadistes, création d'une incrimination pour entreprise individuelle de terrorisme afin de viser la menace endogène.

Avec l'Allemagne, nous avons fait aboutir le PNR, engagé la réforme du code Schengen et, particulièrement, son article 7-2, fait monter en puissance Frontex, demandé aux forces de sécurité d'alimenter le système d'information Schengen, connecté les fichiers criminels... Bref, nous avons multiplié les initiatives au plan européen. Il faut aller plus loin, car l'Europe, loin d'être un problème, est la solution dans la lutte contre le terrorisme.

Des instructions, dont une circulaire hier du ministre de l'intérieur, ont été données depuis des mois pour que la mobilisation soit totale en cette période de fin d'année : 70 unités de force mobile protègent les frontières et les grands événements comme les marchés de Noël. J'ai demandé au ministre de l'intérieur de rappeler que la vigilance des préfets de zone, des préfets de région et des collectivités territoriales doit être absolue pour assurer la protection de nos concitoyens. Notre mobilisation est totale, on ne nous pardonnerait pas qu'il en soit autrement, mais elle ne garantit pas le risque zéro. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, écologiste et RDSE)

Pollution de l'air dans la vallée de l'Arve

M. Loïc Hervé .  - Madame la ministre Marisol Touraine, la vallée de l'Arve en Haute-Savoie suffoque et étouffe, victime de la pollution de l'air. Depuis des jours, les enfants sont interdits de toute activité sportive, ne peuvent sortir en récréation. Les élus locaux, mis en cause, ne savent que faire. Je lance un cri d'alarme : il faut déclarer l'état d'urgence contre la pollution de l'air, un plan Marshall pour cartographier la pollution due aux moyens de chauffage individuel, privilégier les transports propres et accompagner les entreprises...

Voix sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen.  - La loi Macron !

M. Loïc Hervé.  - Qu'entend faire le Gouvernement ? Il faut une initiative interministérielle pour agir sur le logement, le transport et l'industrie afin d'éviter une crise sanitaire majeure. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC)

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - La pollution de l'air a de graves effets sur la santé, vous avez raison : elle causerait 7 millions de décès prématurés dans le monde chaque année, 40 000 en France.

La vallée de l'Arve connaît régulièrement des pics de pollution. Les autorités sanitaires régionales, en alerte, ont émis des recommandations. Le plan élaboré pour votre vallée prévoit de réduire la vitesse de circulation l'hiver ; en cas de pic, est interdit le passage des poids lourds les plus polluants ; des normes particulières existent pour les installations de combustion, de chauffage notamment. Certaines collectivités territoriales aident les particuliers à s'équiper de modes de chauffage propres. (Marques d'impatience à droite) Lutter contre la pollution est un combat exigeant, citoyen et collectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Loïc Hervé.  - Je n'ai rien appris de votre réponse ! J'attendais de Mme Touraine des réponses concrètes à la crise actuelle. Vous ne mesurez pas la colère de la population. Elle se retourne contre l'État et les élus. Il faut agir ! (Vifs applaudissements au centre et à droite)

M. le président.  - Il faut conclure...

Lutte contre le terrorisme

M. Bruno Retailleau .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) À mon tour, et au nom du groupe Les Républicains, je veux dire notre émotion et notre solidarité avec le peuple allemand. Aujourd'hui, nous nous sentons tous un peu berlinois.

La barbarie du terrorisme, surgie d'une nuit sans âge, a encore frappé. Ces crimes nous rappellent que la violence, implacable, est mondiale et totale. Mondiale parce qu'on a dénombré 550 attentats cette année, soit trois par jour, et des milliers de victimes. Totale parce que la guerre se mène sur deux fronts : un front extérieur et un front intérieur. Je rends hommage à nos soldats comme à nos forces de sécurité.

Chaque fois, un symbole est frappé : un marché de Noël, notre fête nationale, mais aussi, avec l'assassinat d'un prêtre, nos racines spirituelles. (Murmures à gauche)

Demain, Raqqa sera, je l'espère, reprise à l'État islamique. Des dizaines de Français embrigadés dans ses rangs reviendront dans notre pays. Qu'entendez-vous faire, monsieur le Premier ministre, pour protéger les Français ? (Applaudissements à droite)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre .  - Merci pour ces mots de solidarité avec le peuple allemand.

Toutes nos forces ont été jetées dans la bataille : en Irak et en Syrie au sein de la coalition, mais aussi hors de la coalition, quand nos valeurs sont mises en cause, comme au Mali. Je rends hommage à nos soldats. À travers eux, s'exprime la détermination de la France à gagner la guerre contre le terrorisme.

Nous sommes confrontés à la barbarie, à la volonté de détruire ce qu'est l'Europe : la liberté, la fraternité, le plaisir d'être ensemble dans la tolérance. Une seule réponse : la fermeté absolue, celle qui nous a conduits à fermer une vingtaine de lieux de cultes, à expulser 80 personnes qui portent une parole contraire à ce qui nous rassemble, à fermer des sites terroristes et à engager avec le réseau RAN un travail de retrait de la Toile de la propagande pernicieuse du terrorisme.

Si nous avons augmenté les effectifs des forces de sécurité de 9 000 postes, les moyens matériels de 18 %, si nous avons adopté des textes tels que la loi sur le renseignement ou encore l'état d'urgence, avec votre soutien, c'est que nous mesurions la nécessité de réarmer la République et de nous rassembler.

Car nous devons nous rassembler quand l'essentiel est en jeu. Les forces de sécurité sont déployées sur le territoire national pour que les Français puissent continuer à vivre comme ils aiment à le faire. La France doit rester la France.

Les terroristes s'attaquent à la belle idée de la République, à la laïcité, c'est-à-dire la liberté de croire et de ne pas croire, d'exercer librement sa croyance, qui suppose de reconnaître pour transcendantales les valeurs républicaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE). À ceux qui veulent semer la division, nous devons opposer la force de l'humanisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE ; M. Christophe Béchu applaudit également)

Impôt sur le revenu

M. Vincent Éblé .  - Sous le quinquennat du président Sarkozy, la politique du gouvernement Fillon a fait augmenter la dette de 600 millions d'euros, soit 40 %. Depuis 2012, nous travaillons à l'assainissement budgétaire : le déficit est à son plus bas niveau depuis 2008. Pour autant, les efforts consentis n'ont de sens que si l'ensemble des Français, et notamment les classes moyennes, bénéficient de leurs fruits. En 2014, nous avons baissé l'impôt sur le revenu de 1 milliard d'euros pour les contribuables en bas de barème, puis supprimé la première tranche en 2015. Au total, près de 9,4 millions de foyers fiscaux ont vu leur contribution fiscale allégée par rapport à 2013.

L'an prochain, près de 7 millions de foyers fiscaux verront leur impôt sur le revenu allégé. L'impôt d'un couple au smic avec deux enfants baissera de 300 euros.

M. Philippe Dallier.  - C'est Noël !

M. Vincent Éblé.  - Pouvez-vous nous donner des précisions sur cette baisse de l'impôt sur le revenu ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire .  - L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi de finances pour 2017 qui prévoit une nouvelle baisse de l'impôt sur le revenu de 1 milliard en 2017 au profit des ménages modestes. Au total, les baisses accordées par le Gouvernement atteignent 6 milliards d'euros, soit 1 milliard de plus par rapport à ce qui était prévu dans le pacte de responsabilité. Le gain moyen est de 200 euros pour les contribuables les plus modestes et ce, dès janvier 2017, et non à la fin de l'été. Chaque mensualité ou tiers provisionnel sera diminué de 20 % dès janvier.

M. Didier Guillaume.  - Très bien.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État.  - Tout sera fait pour limiter les régularisations en fin d'année. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; marques d'ironie à droite)

M. François Bonhomme.  - Merci M. Hollande !

Bilan de la politique gouvernementale

M. Jean-François Rapin .  - Ce que l'on retiendra de ce quinquennat, c'est, malgré des discours à l'apparence généreuse, une casse sociale sans précédent.

M. Alain Gournac.  - Eh oui !

M. Jean-François Rapin.  - Par son niveau de chômage, la France est passée du 14e rang au 22e rang en Europe. Notre école est l'une des plus inégalitaires. La République a abandonné les campagnes. Dans certains territoires que l'on appelle pudiquement des « zones de non-droit » se déchaîne la violence. Ce sont les plus faibles qui subissent les résultats de votre politique calamiteuse : le chômage et la violence au quotidien. N'est-il pas temps d'en prendre conscience ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre .  - À entendre une question aussi nuancée, on se dit que nous sommes décidément en période électorale...

Je m'en tiens, moi, à une exigence de pondération. Que nous n'ayons pas tout réussi, sans doute, mais de là à avoir tout raté... Pourquoi ne vous être pas inquiétés de l'état de l'école quand vous y supprimiez 80 000 emplois ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Pourquoi ne pas reconnaître que les recrutements auxquels nous avons procédé produisent leurs fruits, comme le montre l'enquête, notamment dans des territoires comme la Seine-Saint-Denis ? Vous nous donnez envie de vous renvoyer à votre bilan... (On renchérit sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) Pourquoi ne pas reconnaître que nous avons créé 9 000 emplois dans la police et la gendarmerie quand vous en aviez supprimé 13 000 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; exclamations à droite) Pourquoi ne pas reconnaître que, grâce à notre politique, les entreprises ont retrouvé leurs marges d'avant la crise ! (Mêmes mouvements)

M. Jacques Grosperrin.  - Ça va mieux !

M. François Bonhomme.  - Pourquoi le président ne se représente-t-il pas, alors ?

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre.  - Je pourrais continuer à égrener les exemples, mais je suis un bon garçon : comme je vois que je vous contrarie, je m'arrêterai là. (Applaudissements vifs et prolongés sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-François Rapin.  - Heureux pour vous que vous ayez encore un auditoire... Vous dites qu'il faut réformer sans détruire, or vous avez détruit sans réformer ! (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Encore une fois, j'appelle chacun au respect du temps de parole. Je vous préviens : je sévirai en janvier ! (Sourires)

Politique économique du Gouvernement

Mme Élisabeth Lamure .  - Monsieur le ministre de l'économie et des finances, l'Insee vient d'annoncer que la croissance ne serait que de 1,2 % cette année, contre 1,7 % en moyenne dans la zone euro et 1,9 % en Allemagne. Notre niveau de prélèvements obligatoires atteint 44,5 % du PIB en 2016, la dette bientôt 100 % du PIB. Pourquoi des pays comme l'Allemagne, l'Espagne ou l'Irlande ont-ils pu juguler le chômage ? Monsieur le ministre, êtes-vous conscient de l'échec de votre politique ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire .  - La situation économique s'améliore (On encourage la secrétaire d'État sur les bancs du groupe socialiste et républicain) et vous devriez vous en réjouir.

La croissance, cette année, se situera entre 1,2 % et 1,5 %. Les dernières enquêtes de conjoncture annoncent une croissance trimestrielle de 0,4 à 0,5 % l'an prochain. La reprise du marché immobilier se confirme. Surtout, 180 000 emplois ont été créés cette année dans le secteur marchand, ce qui nous a fait retrouver un niveau d'emplois marchands inconnu depuis 2009.

M. François Bonhomme.  - Et les 60 000 chômeurs de plus ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État.  - Il est donc faux de dire que l'économie française décroche. Si notre croissance n'est aujourd'hui pas aussi forte que celle des pays que vous avez cités, c'est que nous avons mieux résisté au plus fort de la crise. Depuis le début des années 2000, notre PIB a autant augmenté que celui de l'Allemagne.

M. Philippe Dallier.  - Depuis 2012, c'est moins vrai !

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État.  - Nous récoltons maintenant les fruits de notre politique équilibrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Lamure.  - Votre réponse, peu convaincante, dissimule mal que vous êtes à l'origine du décrochage de notre pays. Ce quinquennat fait mal à la France ! (Applaudissements à droite)

Grève des chauffeurs de VTC

M. Jean-Yves Roux .  - Les chauffeurs de plateformes de VTC, en grève, témoignent aujourd'hui de leurs conditions de travail. Les chants des sirènes des débuts se sont révélés trompeurs...

Un mouvement se développe depuis plusieurs jours, vous avez proposé une médiation. Preuve que l'État ne veut pas empêcher le secteur de vivre, preuve aussi que la puissance publique est utile pour promouvoir le dialogue social et organiser un secteur en expansion. Où en sont les négociations avec les plateformes ? Quel signal le Gouvernement entend-il donner pour que les chauffeurs aient des conditions de travail décentes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre .  - Le développement de l'économie numérique est une chance pour notre économie : 30 000 entreprises ont été créées cette année, soit 5 % de plus que l'an dernier et un milliard d'euros de fonds privés a été investi dans ce secteur, preuve de son dynamisme. Mais numérisation ne peut rimer avec dérégulation, recul de la protection sociale et mépris des salariés. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et écologiste)

Les chauffeurs de VTC, si nous n'approuvons pas leurs actions violentes, expriment des revendications qui méritent d'être entendues. M. Vidalies a réuni hier l'ensemble des parties, nous espérons aboutir à un bon compromis d'ici janvier. La plateforme doit savoir que le Gouvernement est déterminé.

La proposition de loi Grandguillaume crée les conditions d'une concurrence plus équitable et règle un certain nombre de questions, dont celle de la formation. Le refus absolu des modes modernes d'exploitation est une priorité ; c'est pourquoi nous pesons pour la renégociation de la directive européenne de 1996 relative au travail détaché. Sur la protection sociale, sur la protection des travailleurs, le Gouvernement sera intraitable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Jean Desessard, Mme Hermeline Malherbe, M. Jean-Claude Requier applaudissent également)

La séance est suspendue à 17 h 50.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

La séance reprend à 18 heures.

Sapeurs-pompiers professionnels et volontaires (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires.

Discussion générale

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique .  - Les événements de Berlin rappellent la nécessité d'un haut niveau de sécurité civile dans nos démocraties en guerre contre le terrorisme. Cette proposition de loi consolide notre modèle en répondant à des attentes anciennes de nos sapeurs-pompiers. C'est l'occasion de dire la reconnaissance de la Nation à ces hommes et à ces femmes qui sont souvent en première ligne, pour beaucoup des volontaires, qui incarnent les valeurs de solidarité et de fraternité.

Les sapeurs-pompiers assurent une intervention toutes les sept secondes, un Français sur trois compose le 18 au moins une fois dans l'année. Le Gouvernement rend hommage à ceux qui sont morts en service, Vincent Gérard, Bruno Collard, Boris Gemet et Jérémy Beier, comme à ceux qui ont été blessés, et assure leurs proches du soutien indéfectible de la Nation.

Ce texte consensuel n'aurait pu aboutir sans l'engagement de votre rapporteure Catherine Troendlé et celui de son homologue à l'Assemblée nationale.

Cette proposition de loi comporte deux réformes importantes. D'abord, l'évolution du régime de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) destinée aux sapeurs-pompiers volontaires (SPV) justifiant de vingt années de services. Nous passons d'un système par capitalisation à un système par flux budgétaires directs, sans modification des modalités de calcul ni des conditions d'éligibilité. L'État s'engage à hauteur de 50 %. Les économies de gestion attendues sont importantes, 35 millions pour les collectivités territoriales. L'État réinvestira au service de la sécurité civile les 32 millions qu'il affectait jusqu'ici à la PFR, afin notamment de financer une nouvelle dotation d'investissements, à hauteur de 25 millions d'euros en 2017. L'État continuera de garantir un service civil de qualité sur tout le territoire.

La deuxième réforme concerne les carrières de sapeurs-pompiers professionnels (SPP). Ils se voient promettre depuis quinze ans la création d'une catégorie A+. La polyvalence des directeurs et directeurs-adjoints, leur disponibilité n'étaient jusqu'ici pas reconnues. Ils peuvent désormais effectuer des mobilités dans les corps des administrateurs civils, des sous-préfets, et dans des inspections générales. Les 19 textes réglementaires ont été validés par les instances représentatives.

D'autres dispositions du texte corrigent des situations devenues au fil du temps problématiques ; est par exemple enfin supprimée l'interdiction faite à certains militaires retraités de poursuivre leur engagement de sapeur-pompier volontaire.

Le texte n'épuise pas le sujet mais fait un pas important et très attendu. Plusieurs amendements ont été déposés, qui méritent d'être analysés ; mais au regard des délais, je vous invite à voter le texte conforme pour que la loi soit rapidement promulguée.

Le Gouvernement soutient sans réserve cette proposition de loi. Je sais que vous aurez à coeur d'exprimer aux sapeurs-pompiers la reconnaissance de la Nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; M. Claude Kern applaudit aussi)

Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois .  - Présidente du groupe d'amitié France-Allemagne, je veux dire notre solidarité aux victimes de l'attentat de Berlin et à tout le peuple allemand.

L'originalité et la force de notre modèle de service civil tiennent à sa dualité, avec 40 800 sapeurs-pompiers professionnels relevant de la fonction publique territoriale et 193 000 volontaires. Ces derniers représentent ainsi les quatre cinquièmes des effectifs.

Les sapeurs-pompiers réalisent 4,3 millions d'interventions par an. Mais les vocations reculent, notamment à cause de la fermeture de casernes et de la reconnaissance insuffisante des sapeurs-pompiers. Nous fêtons le quarantième anniversaire de l'ouverture aux femmes des sapeurs-pompiers mais celles-ci restent sous-représentées, à 17 %, malgré des progrès auxquels nous avons contribué.

Cette proposition de loi réforme d'abord la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) qui a remplacé depuis 2005 l'allocation de vétérance. Le dispositif doit impérativement être adopté avant fin 2016, le contrat d'assurance étant échu depuis le 31 décembre 2015. Actuellement, la gestion financière du PFR coûte 6,5 millions d'euros par an, c'est beaucoup. En outre, les dépenses de protection sont appelées à croître. C'est ce qui a conduit à la conclusion d'un pacte le 6 avril 2016, entre l'Assemblée des départements de France (ADF), l'Association des maires de France (AMF), la Conférence nationale des services d'incendie et de secours (CNSIS), le Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires (CNSPV), la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF) et l'État. On passe ainsi d'un système par capitalisation à un système par flux budgétaire, sans remise en cause des droits des sapeurs-pompiers volontaires. Le contrôle de la gestion de la PFR est réformé, avec la présence de droit d'un représentant du ministère de l'intérieur au conseil d'administration de l'Association nationale pour la prestation de fidélisation et de reconnaissance (APFR) et la transmission d'un rapport annuel par celle-ci.

L'autre volet du texte est relatif aux carrières des officiers sapeurs-pompiers. Le coeur de la réforme réside en la fonctionnalisation des emplois de directeur et directeur-adjoint des SDIS et la création d'un cadre d'emploi de catégorie A+. Il faut y ajouter la suppression de l'interdiction pour les anciens militaires bénéficiaires d'une pension afférente au grade supérieur, de souscrire un engagement de pompier volontaire, ce qui était une demande de longue date.

L'article 14 crée une dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS, redéployant les économies tirées de la réforme de la PFR.

Les premières mesures de mutualisation devraient, selon M. Collombat et moi-même, être poursuivies par la mutualisation physique des plateformes d'appel 15-18.

Je tiens à remercier M. Jean Paul Bacquet, député et président du CNSPV, ainsi que le colonel Eric Faure et tous nos collègues députés et sénateurs qui ont accepté d'ouvrir un chantier plus large l'an prochain pour la promotion du volontariat.

Le Sénat n'est pas une chambre d'enregistrement ; mais il lui faut voter ce texte conforme, car la réforme de la PFR doit aboutir avant la fin de l'année.

Je veux, pour finir, rendre un hommage vibrant à tous les sapeurs-pompiers. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. Roger Madec .  - Le régime précédent étant devenu caduc depuis fin 2015, il nous faut adopter aujourd'hui une réforme de la PFR avec entrée en vigueur rétroactive au 1er janvier 2016. Merci à Mme la rapporteure d'avoir su élaborer avec son homologue de l'Assemblée nationale un texte consensuel.

L'engagement quotidien des pompiers au service des Français n'est plus à démontrer. La création du premier bataillon de sapeurs-pompiers remonte à 1811. Au XIXe siècle, de nombreuses lois se sont succédées, jusqu'à celle de 1996 qui a départementalisé les services d'incendie et de secours. Aujourd'hui, nos soldats du feu sont épuisés, les effectifs baissent tandis que les interventions se multiplient. Le nombre de sapeurs-pompiers volontaires est en baisse constante, comme l'a confirmé le rapport Collombat-Troendlé. Des mesures ont été prises et leur nombre a augmenté de 1 000 depuis 2014 - je pense aux sections de jeunes, aux cadets de la sécurité civile ou au développement du service civique dans les SDIS.

Cette proposition de loi préserve notre modèle de sécurité civile et l'implication des collectivités territoriales tout en s'attaquant à la crise des vocations. L'engagement comme sapeur-pompier volontaire deviendra, en particulier, plus attractive pour les anciens militaires, qui pourront cumuler leur pension de retraite avec l'indemnisation.

Le texte crée aussi une catégorie A+ pour les officiers. La création d'une inspection générale est également bienvenue.

Il faudra aussi répondre aux difficultés des sapeurs-pompiers volontaires, qui peinent à concilier leur engagement avec leur vie professionnelle. Le manque de moyens d'investissement des SDIS freine, quant à lui, le nécessaire renouvellement du matériel.

Cette proposition de loi, modeste, n'en est pas moins une avancée remarquable, que le groupe socialiste et républicain soutient. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Éliane Assassi .  - Ce texte fait consensus. Saluons ces hommes et ces femmes qui ont joué un rôle premier dans l'immense élan de solidarité qui a fait suite aux drames de 2015 et 2016. Leur humanité et leur dévouement sont reconnus de tous. Cette unanimité devrait être un moteur pour l'amélioration de leur statut.

La création de la nouvelle PFR, fondée sur la répartition et non plus sur la capitalisation, était urgente. Les autres dispositions ne nous semblent pas préjudiciables au bon fonctionnement de notre système de sécurité civile.

Mais celui-ci est menacé, les manifestations du mois dernier en témoignent. Il faut en prendre la mesure. La modèle français fonctionne sur un schéma départementalisé. Cela explique que 82 % des centres de secours soient sous l'autorité des départements. Passés de 207 000 à 193 700, les volontaires assument 70 % des interventions qui sont elles-mêmes passées de 3,6 millions en 2004 à 4,45 millions en 2015. Or ils ne représentent que 15 % de la masse salariale des SDIS et ont de plus en plus de difficulté à concilier leur vie professionnelle ou familiale et leurs missions.

De plus, entre 2002 et 2015, 1 700 centres ont fermé, en particulier en milieu rural, ce qui augmente les périmètres d'intervention au détriment de la qualité du service et des conditions de travail et de santé du personnel. La sécurité civile subit les mêmes politiques d'austérité que les autres services publics.

Les inégalités territoriales se creusent avec des budgets par habitant qui vont du simple au double selon les départements. Les SDIS sont mobilisés, en remplacement du SAMU par exemple. Confrontés à la misère sociale et à la vétusté de leurs équipements, 40 % des volontaires s'arrêtent après cinq ans d'engagement.

La situation actuelle ne fait qu'ajouter à leurs tâches : évacuation des camps de migrants, attentats, et cela ne risque pas de changer - sans moyens supplémentaires... La dotation de soutien à l'investissement prévue à l'article 14 dissimule en réalité un redéploiement de crédits, tandis que le fonds d'aide à l'investissement des SDIS a été mis en extinction.

Interrogeons-nous sur la viabilité de ce système, qui repose sur les départements - dont les investissements baissent - et sur le volontariat - qu'il faut valoriser.

Nous voterons cette proposition de loi, mais de gros progrès sont encore à faire pour pallier les inégalités territoriales et assurer des conditions de travail décentes à ces hommes et à ces femmes qui veillent sur nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes communiste républicain et citoyen et écologiste)

Mme Catherine Troendlé, rapporteure.  - Très bien !

Mme Hermeline Malherbe .  - La force de notre système réside dans son caractère mixte, qui reste toujours sous la menace de l'Europe libérale... Les sapeurs-pompiers assument leurs missions parfois au péril de leur vie, comme on l'a vu dans les incendies l'été dernier. Je les remercie chaleureusement, comme tous les membres du groupe RDSE et veux leur témoigner notre reconnaissance.

La célébration de la Sainte-Barbe, patronne des pompiers, nous rappelle les valeurs de courage et d'abnégation des pompiers, corps formé dès la fin du Moyen Âge dans le Roussillon, lorsque Louis Raymond de Saint-Sauveur les dota de 120 sceaux de cuir cerclés d'osier.

Les pompiers sont aujourd'hui mieux équipés, mieux protégés, disposent de centres d'appel et de dispositifs de communication interne plus performants. Leurs interventions en sont facilitées mais elles évoluent avec notre société.

Cette proposition a été adoptée conforme par la commission des lois du Sénat, et je tiens à saluer l'engagement de Catherine Troendlé et celui de Pierre-Yves Collombat, que je salue.

Le nouveau dispositif de PFR, à la gestion clarifiée, apportera de la lisibilité aux financeurs comme aux sapeurs-pompiers volontaires. La revalorisation plus souple et plus régulière de l'indemnité de vacation est bienvenue, de même que l'intégration du temps de service comme volontaire dans le compte personnel d'activité.

Le deuxième volet concerne les sapeurs-pompiers professionnels ; il crée des emplois fonctionnels de directeur et directeur adjoint de SDIS et un nouveau cadre d'emploi dans la catégorie A+. Cela complète le dispositif réglementaire de revalorisation de la grille indiciaire des sapeurs-pompiers.

Cette proposition de loi ne recueille aucune opposition. Mais ce débat me permet de soulever des questions connexes... Il nous faut faire plus pour rassurer les employeurs des sapeurs-pompiers volontaires ; nous avons besoin, au-delà des 25 mesures annoncées en octobre 2013, d'un élan citoyen pour atteindre l'objectif des 200 000 sapeurs-pompiers volontaires en 2017, alors que le nombre d'intervention de secours à personnes et de départs de feu ne cessent d'augmenter. Chacun loue les pompiers et leur devise républicaine « Courage et dévouement » ; si nous voulons pérenniser le système, nous devons trouver de nouvelles sources de financements des SDIS, pourquoi pas nationales, avec un nouvel équilibre entre département et bloc communal. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; M. Jean Desessard et Mme Catherine Troendlé, rapporteure, applaudissent aussi)

M. Olivier Cigolotti .  - Avec une pensée pour nos amis allemands, nous parlons des sapeurs-pompiers, qui sont en première ligne en cas d'attentats.

Le modèle français est unique. Nos sapeurs-pompiers représentent l'une des plus grandes forces associatives de France avec 247 000 adhérents, 12 200 interventions par jour. Par leur courage, leur engagement volontaire et désintéressé, ils incarnent les valeurs de notre République. Nous devons leur témoigner toute notre reconnaissance.

Or les effectifs des sapeurs-pompiers volontaires n'ont cessé de diminuer ces dernières années. Le volontariat est une forme moderne d'engagement à laquelle les jeunes sont particulièrement sensibles - les demande d'intégration dans la réserve militaire se multiplient. C'est tout notre système de secours qui est mis en danger par le manque de volontaires, notamment dans les zones rurales où les sapeurs-pompiers sont souvent la seule solution. 750 casernes ont fermé en moins de six ans - le maillage est pourtant nécessaire à l'efficacité du service public. Cette situation ne plaide pas pour le recrutement et diminue notre capacité à réagir à des situations exceptionnelles. La priorité doit être de favoriser le volontariat, dans les zones rurales notamment.

Cette proposition de loi propose des réformes simples et efficaces, dont celle de l'indemnité de fin de service ou PFR, qui apporte une rente complémentaire aux sapeurs-pompiers volontaires ayant rempli vingt ans de services - que la proposition de loi veut réduire à quinze ans. Cette réforme préserve les intérêts des sapeurs-pompiers volontaires. La participation de l'État, fixée par décret, servira à soutenir des projets innovants.

Je salue encore la possibilité donnée aux anciens militaires de continuer leur engagement.

La revalorisation des carrières des sapeurs-pompiers professionnels de catégorie A, avec la création d'emplois fonctionnels de directeur et directeur adjoint de SDIS est une autre avancée, de même que la possibilité d'inscrire au compte d'engagement citoyen les années de services faites en tant que sapeur-pompier volontaires Pour remplir les engagements pris à Tours, des amendements ont été adoptés : un rapport au Parlement permettra dans les trois ans d'évaluer le coût de l'abaissement à quinze ans du seuil d'éligibilité à la PFR et de la revalorisation de 10 % des rentes existantes.

Avec Cyril Pellevat et une centaine de nos collègues, nous aurions aimé un texte plus complet. Mais cette proposition de loi est positive. Notre groupe la votera sans réserve. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean Desessard .  - Nous examinons en urgence une proposition de loi sur les pompiers. Mon discours ressemblera à celui des orateurs précédents... Mais il ne déplaira pas aux sapeurs-pompiers, car il s'agit de les féliciter et de les remercier pour leur travail social exceptionnel !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Les paroles c'est bien, mais les actes, c'est mieux !

M. Jean Desessard.  - Il est de la responsabilité des parlementaires de s'assurer que leur mission ne manque de rien. Cela suppose d'enrayer la baisse des effectifs des sapeurs-pompiers volontaires, de résorber les zones blanches dans le maillage territorial et de lutter contre le sous-investissement dans les SDIS. Le pacte signé entre l'État, les élus et les représentants des sapeurs-pompiers trouve sa traduction législative dans ce texte, avec notamment la création de la nouvelle PFR financée de manière pérenne par les SDIS et une aide financière de l'État.

Les sources de financement de l'ancienne PFR, créée par la loi du 13 août 2004, se sont taries le 31 décembre 2015. Nous nous félicitons que les sapeurs-pompiers volontaires n'aient plus à cotiser, comme de la prise en compte de l'activité volontaire dans le compte personnel ou de la possibilité ouverte aux anciens militaires de s'engager en conservant leur pension.

Un bémol toutefois : la gestion de l'association de la PFR. La transparence n'est pas toujours au rendez-vous - nous invitons le Gouvernement à nous indiquer comment il compte l'assurer.

La création d'emplois fonctionnels revalorisera les carrières et remédiera au problème récurrent de la vacance des postes de direction dans les SDIS.

Le groupe écologiste votera en faveur de ce texte (applaudissements), issu d'un large compromis. Espérons qu'il contribue à encourager des vocations dont notre pays est si fier. (Applaudissements)

M. Cyril Pellevat .  - Je veux saluer la présence parmi nous du colonel Éric Faure, président de la Fédération Nationale des sapeurs-pompiers de France ; j'ai une pensée pour son remarquable secrétaire-général haut-savoyard. (M. Loïc Hervé le confirme)

Cette proposition de loi modifie le statut des sapeurs-pompiers pour remédier aux difficultés de gestion du corps, géré de manière centralisée quoique dépendant des départements.

Le rapport d'information Troendlé-Collombat a révélé que notre modèle de sécurité civile était remis en cause par la diminution des effectifs, l'apparition de zones blanches dans le maillage territorial et la faiblesse de l'investissement dans les SDIS.

Ce texte crée une catégorie d'emplois de direction de catégorie A+, ainsi que des emplois fonctionnels pour les officiers supérieurs, afin de valoriser les sapeurs-pompiers professionnels et de favoriser la mobilité au sein du corps.

La nouvelle indemnité de fin de service, dite prestation de fidélisation et de reconnaissance, améliore les droits des sapeurs-pompiers volontaires ; elle résulte des propositions d'un groupe de travail de l'ADF, concrétisées par le pacte signé en avril 2013.

Ce texte simplifie également les conditions de revalorisation des indemnités des sapeurs-pompiers volontaires. Je soutenais à cet égard les amendements d'Alain Marc, mais leur retrait semble s'imposer, pour que le texte soit voté définitivement au plus vite...

M. Alain Marc.  - Ah ? (Sourires au centre et à droite)

M. Olivier Cigolotti.  - Eh ! (Même mouvement)

M. Cyril Pellevat.  - Je suis favorable à un allègement général des cotisations patronales pour les entreprises employant des sapeurs-pompiers volontaires, afin de récompenser celles qui encouragent leurs salariés à mener à bien leur engagement et à inciter d'autres employeurs à recruter des sapeurs-pompiers volontaires.

J'ai déposé avec Olivier Cigolotti une proposition de loi destinée à faciliter ces recrutements.

Les conditions d'avancement des sous-officiers sapeurs-pompiers professionnels, en l'espèce d'accès au grade d'adjudant, restent un problème. Pour quitter la caserne, tout véhicule doit être dirigé par un chef d'agrès. Or dans les petits centres de zones rurales, les chefs d'agrès sont pour beaucoup des volontaires, titulaires du grade de sergent. Selon le patron des sapeurs-pompiers de mon département, avec cette réforme il faudrait au minimum douze ans pour atteindre le grade d'adjudant, soit plus que la durée moyenne d'engagement des volontaires. Allez-vous, madame la ministre, tenter de remédier au risque de pénurie de chefs d'agrès ? Allez-vous réduire la durée d'accession au grade d'adjudant ? Ou adopter un moratoire permettant à tous les chefs d'agrès sergents, d'être nommés adjudants ?

Je veux enfin dire toute notre reconnaissance aux sapeurs-pompiers, parfois victimes d'incivilités. Je pense tout particulièrement aux trois sapeurs-pompiers de la Roche-sur-Foron, dans mon département, agressés récemment.

Cette proposition de loi transpartisane est consensuelle et attendue par les sapeurs-pompiers. Il y a urgence à adopter la réforme de la prestation de fidélité et de reconnaissance. Le groupe Les Républicains la votera. (Applaudissements à droite et au centre)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier A est adopté.

L'article premier est adopté, de même que les articles 2, 2 bis, 3 et 4.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par MM. A. Marc et Magras, Mme Cayeux, MM. Fouché, Doligé, Pellevat, Soilihi, Chasseing, B. Fournier, Masclet, Longuet, Vasselle, G. Bailly et Calvet, Mme Deromedi, M. de Raincourt, Mmes Morhet-Richaud et Hummel et MM. Dufaut, Laménie, Carle, Morisset et Vogel.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Tout fonctionnaire, qu'il soit d'État ou territorial, sapeur-pompier volontaire actif, faisant une demande de mutation liée à l'exercice de son activité bénévole de sapeur-pompier volontaire, bénéficie d'une prise en compte prioritaire de sa demande de mutation.

M. Alain Marc.  - Je salue Éric Faure, directeur du SDIS de l'Aveyron, qui réalise un travail essentiel. Nous avons beaucoup de volontaires et chez nous, cela ne se passe pas trop mal. Je ne sais si la PFR sera suffisante dans sa version actuelle. Nous devons aller plus loin pour les sapeurs-pompiers volontaires, si nous souhaitons limiter l'érosion des effectifs. En matière de retraite, par exemple, un effort peut être fait en accordant des trimestres supplémentaires.

Cela étant dit, je retire cet amendement d'appel et les suivants... (Applaudissements à droite et au centre)

L'amendement n°3 rectifié est retiré, de même que l'amendement n°4 rectifié bis.

L'article 4 bis est adopté.

L'amendement n°5 rectifié bis est retiré.

L'article 5 est adopté, de même que les articles 6, 7, 8, 9, 10 et 11.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 11

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par MM. Antiste, Cornano, Karam, Desplan et J. Gillot.

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le 2° de l'article L. 1424-24-5 est complété par les mots : « et des représentants des personnels administratifs et techniques spécialisés » ;

2° Le troisième alinéa de l'article L. 1424-31 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elle comprend également des représentants des personnels administratifs et techniques spécialisés. »

M. Maurice Antiste.  - Je crois pressentir le sort qui devra être réservé à cet amendement, (sourires) puisque ce texte doit absolument être adopté avant le 31 décembre 2016 afin de ne pas remettre en cause la prestation de fidélité et de reconnaissance du personnel des services d'incendie et de secours (SDIS) de France.

Je tiens néanmoins à le présenter car les personnels administratifs, techniques et spécialisés (PATS) exercent des missions d'appui essentielles. Or ils n'ont pas de droit de vote au conseil d'administration des SDIS (CASDIS) ni au sein des commissions administratives et techniques (CATSIS). Cet amendement, sans coût budgétaire, vise simplement à les reconnaître. Notez qu'une majorité sont des femmes : ce serait un moyen d'encourager la parité.

M. le président.  - Amendement identique n°2 rectifié bis, présenté par Mme Des Esgaulx et MM. B. Fournier et D. Laurent.

M. Bernard Fournier.  - Les personnels administratifs et techniques spécialisés - PATS - qui oeuvrent quotidiennement au sein des SDIS ne siègent ni à leur commission administrative et technique - CATSIS - ni à leur conseil d'administration - CASDIS - où siègent entre autres les personnels élus à la CATSIS. Le présent amendement vise à reconnaître la place essentielle de ces personnels dans les missions des SDIS.

Mme Catherine Troendlé, rapporteur.  - Sur le fond, je n'ai rien contre, mais il faudrait l'examiner dans un autre texte. Le lien avec l'objet du texte est ténu, il faudrait mieux évaluer l'impact de cet amendement sur la composition de ces instances. De plus, mon expérience à la Confédération nationale des SDIS m'a enseigné que cet amendement n'était pas consensuel... Retrait ?

Mme Annick Girardin, ministre.  - Les PATS sont au nombre de 11 263 en 2015, dont 10 800 titulaires, soit 4,8 % des effectifs. Je rejoins le rapporteur : ce point mérite d'être discuté dans un cadre plus large, après une réflexion plus approfondie. Retrait, de sorte que nous restions sur la belle unanimité qui a été celle de la discussion générale ?

M. Maurice Antiste.  - Soit, il n'y a pas le feu, (Sourires) et j'ai retenu la sourde promesse d'y revenir... Je le retire.

M. Bernard Fournier.  - De même.

Les amendements identiques nos1 rectifié bis et 2 rectifié bis sont retirés.

L'article 12 est adopté, de même que l'article 12 bis.

L'article 13 demeure supprimé.

L'article 14 est adopté.

Interventions sur l'ensemble

M. Jean-Claude Requier .  - Ce texte tombe au bon moment, le jour de la Sainte-Barbe ! J'étais à Cahors samedi et j'ai pu la fêter dignement... sans rester aux quatre ou cinq banquets, fort heureusement. (Marques d'amusement) Il témoigne de l'hommage et de la reconnaissance que nous devons aux sapeurs-pompiers. Je me réjouis que le colonel Faure soit présent parmi nous - ses fonctions peuvent mener loin, puisque son prédécesseur est devenu préfet du Cantal puis du Jura ! Je voterai ce texte avec satisfaction.

M. Guy-Dominique Kennel .  - Président d'un SDIS pendant plusieurs décennies, je veux rectifier certains points : le montant des investissements d'abord, 50 millions de francs jadis, 80 millions d'euros désormais ! On ne peut donc déplorer qu'il n'y ait pas d'investissements...

Ensuite, la PFR est importante : 2,5 millions d'euros par an jusqu'à présent dans le département du Bas-Rhin, sans aucun retour sur investissements. Je me réjouis de la solution trouvée ; 13 millions d'euros versés pour les vacations des sapeurs-pompiers volontaires, ce n'est pas rien non plus.

L'État ne fait qu'imposer des règles sans apporter aucun financement et les préfets gardent la maîtrise opérationnelle de ces missions au détriment des directeurs de SDIS.

Une clarification serait souhaitable. Soit l'État devrait participer financièrement, soit il faudrait faire correspondre le payeur et le décideur...

Enfin, je regrette que l'on n'ait pas fait représenter les personnels administratifs et techniques aux instances représentatives.

Le texte est un premier pas intéressant, mais ce n'est qu'un premier pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC)

M. Franck Montaugé .  - Je veux remercier les députés socialistes à l'origine de ce remarquable travail.

M. le président.  - S'ils ne l'avaient pas été, socialistes, leur travail ne l'aurait pas été moins... (Rires)

M. Franck Montaugé.  - Certes, mais permettez-moi, en l'occurrence, de le souligner ! Je veux saluer les sapeurs-pompiers du Gers, qui font un travail remarquable, ainsi que les PATS, qui jouent un rôle essentiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Claude Kern .  - Cette proposition de loi était très attendue, mais de nombreuses questions restent en suspens. Nous avons bien compris l'urgence de la voter conforme.

Les sapeurs-pompiers volontaires participent aussi à la vie des petites communes rurales, où l'amicale des sapeurs-pompiers est souvent la seule association.

Je voterai cette proposition de loi, même si elle ne règle pas tous les problèmes. (Applaudissements au centre ; M. Jean Desessard applaudit aussi)

M. Yves Daudigny .  - Je veux à mon tour saluer les sapeurs-pompiers de l'Aisne. Je me réjouis que nous concrétisions les engagements pris pour les sapeurs-pompiers et que nous pérennisions notre modèle de service civil.

Témoignons notre gratitude à ces femmes et ces hommes qui assurent notre sécurité avec courage et dévouement. Reconnaître leur abnégation n'est que justice.

M. le président .  - Il y a aussi un SDIS dans les Bouches-du-Rhône...Je veux à mon tour saluer leur efficacité, mais aussi celle des 2 400 marins-pompiers de la deuxième ville de France, avec 860 000 habitants... (Applaudissements au centre et à droite)

M. Guy-Dominique Kennel.  - Payés par l'État...

M. le président.  - ... Lorsque l'un d'eux tombe au feu, la couleur du sang est la même, qu'il s'agisse du SDIS ou des marins-pompiers, lesquels coûtent beaucoup plus cher à la ville de Marseille que ce que mentionnait notre collègue pour le Bas-Rhin... (Sourires et applaudissements sur divers bancs)

La proposition de loi est adoptée.

Mme Annick Girardin, ministre .  - Merci à tous pour ce travail consensuel. Je veux remercier Jean-Paul Baquet, rapporteur de cette proposition de loi à l'Assemblée nationale. Veuillez excuser M. Le Roux, parti pour la Vendée ce matin où un drame routier s'est produit.

Nous reconnaissons tous les sapeurs-pompiers : le Gouvernement se trouve toujours à leurs côtés et se réjouit de l'entrée en vigueur prochaine de ce texte très attendu. Le ministre de l'Intérieur répondra précisément aux questions qui ont été posées. (Applaudissements)

CMP (Nominations)

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de réunion d'une commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain.

En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du jeudi 15 décembre prennent effet.

Prochaine séance demain, mercredi 21 décembre 2016 à 14 h 30.

La séance est levée à 19 h 35.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du mercredi 21 décembre 2016

Séance publique

À 14 h 30 et le soir

Présidence : Mme Françoise Cartron, vice-présidente Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente

Secrétaire : M. Christian Cambon

1. Cinq conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié :

- Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse concernant la modernisation et l'exploitation de la ligne ferroviaire d'Annemasse à Genève (n°847, 2015-2016).

Rapport de M. Cédric Perrin, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°223, 2016-2017).

Texte de la commission (n°225, 2016-2017).

- Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative aux travaux et au cofinancement par la Suisse de l'opération de réactivation du trafic ferroviaire sur la ligne Belfort-Delle ainsi qu'à l'exploitation de la ligne Belfort-Delle-Delémont (n°154, 2016-2017).

Rapport de M. Cédric Perrin, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°223, 2016-2017)

Texte de la commission (n° 224, 2016-2017).

- Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'extradition signée le 2 mai 2007 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'État des Émirats arabes unis (n°448, 2014-2015).

Rapport de Mme Nathalie Goulet, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°200, 2016-2017).

Texte de la commission (n° 201, 2016-2017).

- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l'avenant portant première modification à l'entente en matière de sécurité sociale du 17 décembre 2003 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec et de l'avenant portant seconde modification au protocole d'entente du 19 décembre 1998 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération (n°135, 2016-2017).

Rapport de Mme Hélène Conway-Mouret, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°226, 2016-2017).

Texte de la commission (n°227, 2016-2017).

- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Tadjikistan relatif à la construction d'une tour de contrôle sur l'aéroport de Douchanbé (n°136, 2016-2017).

Rapport de M. Jacques Gautier, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n°198, 2016-2017).

Texte de la commission (n° 199, 2016-2017).

2. Nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2016 (n°208, 2016-2017).

3. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant les ordonnances n°2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et n°2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d'habitation et simplifiant le dispositif de mise en oeuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services (n°16, 2016-2017)

Rapport de M. Martial Bourquin, fait au nom de la commission des affaires économiques (n°189, 2016-2017).

Texte de la commission (n°190, 2016-2017).

4. Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes (n°169, 2016-2017).

Rapport de MM. Jean-François Rapin, sénateur et Laurent Grandguillaume, député, fait au nom de la commission mixte paritaire (n°168, 2016-2017).

5. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne (n°245, 2016-2017).

Rapport de M. Cyril Pellevat, sénateur, Mmes Bernadette Laclais et Annie Genevard, députées, fait au nom de la commission mixte paritaire (n°244, 2016-2017).