Questions d'actualité

Mme la présidente.  - Merci d'excuser le Président Gérard Larcher, retenu à Cahors à l'occasion de la Conférence nationale des territoires.

L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Prison de Valence

M. Gilbert Bouchet .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Il y a un an, une mutinerie à la prison de Valence m'avait conduit à interpeler le ministre, qui avait promis au personnel des travaux de rénovation et la mise en place du binôme.

Le 30 novembre, j'ai rencontré sur place un personnel inquiet pour sa sécurité. Les travaux n'ont pas commencé et le travail en binôme, grâce auquel l'année a été plus tranquille, est en passe d'être supprimé par votre Gouvernement. Un seul agent par étage, ce n'est pas acceptable.

Les leçons du passé ont déjà été oubliées. Le budget pour 2018 est un très mauvais signal. La situation difficile de cette prison impose de donner à la justice et au personnel pénitentiaire des moyens pour travailler en toute sécurité. Quelles sont les intentions concrètes du Gouvernement ? Pourquoi renoncer au binôme ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Le centre pénitentiaire de Valence, géré en partenariat public-privé, a subi des dégradations importantes à la suite des incidents de novembre 2016. Les frais de remise en l'état sont estimés à 1,7 million d'euros. Les travaux vont commencer très rapidement, début 2018, et seront achevés en août.

En termes de ressources humaines, la situation de l'établissement est favorable puisque le taux de couverture y est de 103 %, au-dessus de la cible. Il n'est pas destiné à évoluer. Il n'y a pas de surpopulation carcérale, le taux d'occupation étant de 106 % dans le quartier d'arrêt, avec 350 prisonniers pour 344 places, et de 77 % en quartier central.

Le budget de la justice pour 2018 est tout à fait satisfaisant, en hausse de 4 %, avec des créations d'emploi importantes. Il n'y a donc pas d'inquiétude à avoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Gilbert Bouchet.  - Le candidat Macron avait promis 15 000 places ; les 26 millions d'euros inscrits au budget 2018 ne permettront que d'en créer 10 000. Les crédits de rénovation des prisons chutent de 23 % ; aucun crédit n'est prévu pour résorber les vacances de postes ; les crédits dédiés à l'aménagement des peines baissent eux aussi... La réalité des chiffres est moins rassurante que vos propos ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Cantines scolaires

M. Jean-François Longeot .  - Le tribunal administratif de Besançon vient d'obliger la Ville à accepter à la cantine un élève de primaire qui avait été refusé faute de place. Cette décision s'appuie sur une disposition de la loi Égalité et citoyenneté, dont nous avions dénoncé les effets pervers.

Les collectivités qui proposent un service de restauration devront en élargir l'accès à tous les enfants scolarisés, sans compensation des surcoûts d'aménagement et des frais de personnel. Certaines communes, notamment rurales, risquent du coup de ne plus proposer de cantine, obligeant les familles à trouver des solutions alternatives, avec le risque d'augmenter le coût du repas pour les familles et donc les inégalités. Faisons plutôt confiance aux élus locaux !

Comment le Gouvernement compte-t-il accompagner les familles et les communes pour éviter que les effets pervers ne l'emportent sur les bonnes intentions initiales ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - L'enfer est pavé de bonnes intentions. Le Conseil constitutionnel avait déjà été saisi de cet article qui précise que l'inscription à la cantine, quand elle existe, est de plein droit pour tous les enfants scolarisés, sans discrimination. En revanche, les communes ne sont pas obligées de créer des cantines qui restent un service public facultatif.

C'est ce qui a fondé le jugement du tribunal administratif de Besançon. La loi n'impose pas la création d'une cantine mais d'en garantir l'accès à tous les enfants dès lors qu'elle existe, ce qui suppose de proportionner le service à cette fin. Si l'on veut changer les pratiques, il faudra revoir l'écriture de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Jean-François Longeot.  - L'effet pervers est évident : là où il n'y a pas de cantines, les collectivités territoriales n'en créeront pas ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, Les Républicains et Les Indépendants)

Avenir de la zone euro

M. Robert Navarro .  - La semaine dernière, la Commission européenne a fait des propositions essentielles pour l'avenir de l'Europe. Saluons l'action européenne du président de la République et du ministre des finances : en restaurant la crédibilité française, ils ont permis que l'Europe évolue, et la Commission a repris les propositions françaises pour une convergence par le haut.

L'histoire de l'euro, c'est la fable des Trois Petits Cochons qui construisent chacun leur maison. La première maison, en paille, c'est le traité de Maastricht en 1992. Idée excellente, et nous devons ici saluer François Mitterrand, mais la maison de paille ne résiste pas à la crise de 2008.

La deuxième maison, en bois, c'est le Mécanisme européen de stabilité (MES) et l'Union bancaire pour lesquels il faut saluer Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. (« Ah ! » à droite). Mais, dans l'urgence de la crise, elle se révèle bien fragile.

La troisième maison, en brique, c'est le cadre proposé par la Commission européenne grâce aux initiatives prises par la France à Athènes et à la Sorbonne, et nous devons saluer ici Emmanuel Macron. (Exclamations amusées) Quelle place souhaitez-vous donner à la représentation nationale dans cette maison commune ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Merci pour cette question imagée qui atteste bien la volonté de doter l'Union européenne d'institutions toujours plus solides pour faire face aux vents contraires.

Le 26 septembre à la Sorbonne, le président de la République a fait des propositions pour que l'Europe aille de l'avant. Nous remercions la Commission pour sa contribution, dont le Conseil européen débattra demain. Achèvement de l'Union bancaire, intégration économique renforcée, convergence fiscale et sociale, capacité budgétaire à mener des projets communs : l'Europe doit être concrète, pour créer de l'emploi et de la croissance.

Les parlements nationaux devront pouvoir contrôler ces évolutions, pour que les peuples y soient associés. Mme Nathalie Loiseau reviendra s'exprimer devant vous la semaine prochaine. Je reviens de l'OMC avec le président Bizet : nous avons bien vu l'importance d'une Union européenne forte ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Dotations aux collectivités territoriales

Mme Mireille Jouve .  - Le 4 décembre 2017, devant le corps préfectoral, le ministre de l'intérieur a loué les vertus de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), affirmant que ces dotations étaient préservées. La réalité est plus contrastée. Sur l'exercice 2017, un décret du 1er décembre est venu annuler 48 millions d'euros sur l'enveloppe DSIL, après un décret de juillet qui avait déjà amputé ces crédits de 216 millions d'euros, au prétexte de sous-consommation. Ce n'est pas le ressenti sur le terrain : au contraire, nombre de demandes de subventions sont rejetées.

Ces annulations de crédits ne sont pas acceptables. Le Gouvernement s'engage-t-il à accroître la transparence dans la gestion de ces dotations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Veuillez excuser M. le ministre d'État, actuellement à Cahors.

Le décret d'avance est soumis à l'autorisation du Parlement. Votre commission des finances avait émis un avis favorable, estimant que la consommation des crédits de la DSIL était décevante : 30 % seulement des crédits fin octobre, à 96,5 millions d'euros. Contrairement à celle de cet été, l'annulation ne touche que les crédits de paiement, pas les projets engagés.

Mme Sophie Primas.  - Ce n'est pas vrai !

M. Gérald Darmanin, ministre.  - Environ 75 millions d'euros de crédits ont été inscrits au projet de loi de finances rectificative pour les territoires à énergie positive, 100 millions d'euros pour les départements, 50 millions pour l'outre-mer : au total, ce sont plus de 200 millions d'euros qui seront consacrés aux collectivités territoriales.

Nous publierons sur le site du ministère de l'intérieur la liste des dossiers retenus pour la DSIL et la DETR : la transparence sera totale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Situation de l'audiovisuel public

M. Pierre Laurent .  - En quelques semaines, le président de la République et le Gouvernement viennent de déclencher deux salves brutales contre l'audiovisuel public.

La première : une coupe drastique de 50 millions dans le budget de France Télévisions, soutenue avec zèle par la droite sénatoriale, à réaliser en trois mois. Vous plongez l'entreprise dans une nouvelle crise, dont attestent la grève des personnels et le vote d'une motion de défiance par les sociétés de journalistes.

La seconde salve est venue du président de la République, qui, lors d'une réunion à l'Élysée, a tiré à boulets rouges sur l'audiovisuel public, qualifié de « honte de la République ».

À quoi jouez-vous en pariant sur la déstabilisation du service public de l'audiovisuel, sur la division et la mise en concurrence ? Quand le président de la République et le Gouvernement entendent-ils parler clair sur l'avenir qu'ils lui réservent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur certains bancs du groupe SOCR.)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Veuillez excuser le Premier ministre et les treize ministres qui ont accompagné le président Larcher à Cahors. (Rires)

Au-delà de l'accessoire, allons à l'essentiel. Comment croire qu'une société ayant un budget de 3,5 milliards d'euros - soit plus que le ministère de la culture - ne pourrait économiser 50 millions ? C'est révélateur d'un mal plus profond.

Chacun ici est attaché au maintien du service public de l'audiovisuel. Ses défis : reconquérir la jeunesse, investir dans la transformation numérique, dans des contenus de qualité...

M. David Assouline.  - Même chose pour le privé !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État.  - ... tout en jouant la carte locale, en faisant vivre les territoires.

On peut considérer que tout va bien, ou alors essayer d'améliorer les choses. La qualité du service public de l'audiovisuel n'est pas au niveau. Mme Nyssen réunit l'ensemble des dirigeants des sociétés pour évoquer avec eux les projets de réforme que le Gouvernement proposera dans quelques semaines. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

M. Pierre Laurent.  - Vos propos ne me rassurent pas. Cette économie de 50 millions n'est pas la première que l'on demande. Au lieu de sauver le service public de l'audiovisuel, vous en faites une cible. Personne ne veut le statu quo. Toute la télévision française est menacée, avec la révolution numérique, la révolution des usages, les appétits des GAFA. L'audiovisuel public aura besoin de moyens supplémentaires : l'austérité le tuera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Négociations sur le climat

Mme Martine Filleul .  - Mardi se tenait le sommet de la finance verte, que nous saluons. Les engagements de l'accord de Paris doivent se traduire par des actes, donc des investissements - or ceux-ci manquent cruellement, avec le retrait des États-Unis qui laisse un manque de 2 milliards de dollars pour le Fonds vert.

Les rares propositions nouvelles reposent uniquement sur la bonne volonté d'acteurs privés. Or les États les plus développés devraient prendre leur part vis-à-vis des plus vulnérables. L'Afrique souffre fortement du réchauffement climatique, alors qu'elle n'est responsable que de 4 % des émissions de gaz à effet de serre.

La France va certes porter l'aide à l'adaptation des pays du Sud de 1,2 milliard à 1,5 milliard d'euros, mais la taxe européenne sur les transactions financières, rejetée cet été, aurait permis de récolter 22 milliards d'euros... La Banque mondiale ne financera plus les énergies fossiles ; pourquoi la Caisse des dépôts et consignations(CDC) ne fait-elle pas de même ? Le Gouvernement prévoit-il des mesures complémentaires, notamment financières ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Je ne verserai pas dans l'autosatisfaction car la situation en Afrique exige que l'on fasse beaucoup plus. Le One Planet Summit, avec ses douze engagements, change d'échelle avec l'implication de fonds souverains ou de la Banque mondiale. La France s'est engagée à consacrer 1,5 milliard d'euros à l'adaptation en 2020 ; une aide de 30 millions d'euros a été votée pour lutter contre la dégradation des sols au Sahel.

Notre engagement à porter l'aide publique au développement à 0,5 % du RNB en 2022 augmentera mécaniquement les financements pour le climat. L'AFD a désormais comme mandat la mise en oeuvre de l'accord de Paris ; la BPI et la CDC n'aideront plus les énergies fossiles.

Mieux d'argent, c'est aussi la réorientation des flux financiers, grâce à la mobilisation des acteurs, publics et privés. Les engagements chinois, américains et européens sur le prix du carbone vont dans le bon sens ; les Chinois vont créer le plus grand marché carbone au monde.

Enfin, plus d'argent à l'avenir pour l'Afrique, lorsque l'Union européenne se dotera d'une taxe sur les transactions financières ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, LaREM, SOCR)

Concessions hydroélectriques des vallées du Lot et de la Truyère

M. Alain Marc .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) La Commission européenne met en demeure la France d'attribuer les concessions à d'autres opérateurs qu'EDF. La loi du 17 août 2015 a autorisé la prolongation des concessions pour réaliser des investissements.

Plusieurs projets dans les vallées du Lot et de la Truyère sont prêts, ils seraient très bénéfiques aux collectivités territoriales. Ces concessions sont stratégiques, l'ensemble joue un rôle clé dans la régulation électrique nationale. EDF a réalisé 50 millions d'euros d'investissements en Aveyron, nos territoires en ont besoin.

Alors que notre pays doit relever le défi de la transition énergétique, le Gouvernement compte-t-il renouveler la concession des vallées du Lot et de la Truyère ? Quand aura-t-on une réponse définitive ?

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Mon plan Climat affiche des ambitions élevées. L'hydroélectrique est la première source d'énergie renouvelable. Le Gouvernement veut appliquer la loi de 2015 dans le respect du droit européen. Cela peut prendre trois formes : le renouvellement des concessions ; la prolongation des concessions à condition d'investissements ; la constitution de sociétés d'économie mixte avec les collectivités territoriales. Le Gouvernement soutient ces investissements. Ces projets doivent être compatibles avec le droit national et européen. Nous travaillons avec Mme Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la concurrence. Nous espérons que ces investissements se réaliseront, avec un partage équitable des bénéfices. Voyez, nous cherchons une issue favorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants)

Limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes (I)

M. Michel Raison .  - Ma question concerne la sécurité routière, sujet grave. J'ai reçu récemment Emmanuel Barbe, le délégué interministériel à la sécurité routière. Les causes d'accident sont multiples et se conjuguent, ce qui rend la prévention difficile.

Le Gouvernement envisage de réduire la vitesse sur les routes sans séparateur à 80 km/h, dès le mois de janvier, mais on ne peut pas se contenter du précepte : « chi va piano, va sano » (Sourires)

Bancs à droite.  - Qui va payer ?

M. Michel Raison.  - Une expérimentation a été conduite sur un tronçon de 70 kilomètres, pendant deux ans : quelles en sont les conclusions ? Et si vous comptez instaurer cette nouvelle limitation, comment allez-vous l'expliquer d'ici là à nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Le 14 juillet 2002, le président Jacques Chirac déclarait trois causes nationales : la lutte contre le handicap, le cancer et le nombre de tués sur la route. À la fin de son mandat, la vie de près de 8 000 personnes a été sauvée et 100 000 personnes avaient évité des accidents aux conséquences physiques permanentes. Mais il a fallu faire preuve de courage politique face à ceux qui refusaient de baisser la vitesse. C'était déjà le même débat en 1974 avec la ceinture de sécurité à l'avant, contestée au nom de la liberté. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)

Une vitesse de 80 km/h sur les routes est-ce une limitation excessive ? Non. La mortalité sur les routes augmente depuis 2014 : +2,3 % en 2015, +0,5 % en 2016. Nous travaillons avec les collectivités territoriales. Il faut le courage de ne pas faiblir - car c'est bien sur les routes à double sens sans protection que surviennent la moitié des accidents mortels.

M. Michel Raison.  - Il faut certes des mesures énergiques, mais il faut aussi de la pédagogie, sinon cela sera contre-productif. Je ne suis pas partisan du laxisme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains).

Limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes (II)

M. Jean-Claude Luche .  - Ma question porte sur le même sujet que la précédente : preuve que le sujet est majeur ! Dans nos départements ruraux, bien de nos trajets sont très longs. Nous n'avons pas de TGV, ni d'autoroutes à 110 kilomètres/heure ou à 130 kilomètres/heure, mais seulement des routes départementales, que les conseils départementaux s'efforcent d'entretenir, pour le confort et la sécurité de tous. Il ne faudrait pas que nous aboutissions à une France à deux vitesses (Sourires) Bien souvent, nous prenons des risques en doublant des véhicules à 50 kilomètres/heure, à 70 kilomètres/heure. Nous devons toujours être vigilants sur le téléphone, l'alcool, et autres... Tout ceci nous fait dire que la réduction de la vitesse maximale à 80 kilomètres/heure, ce n'est peut-être pas la priorité ! Monsieur le Ministre, ne faites pas n'importe quoi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; plusieurs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - Près de 3 500 personnes ont trouvé la mort sur la route cette année. En Aveyron, c'est vingt personnes depuis le début de l'année. Ce sont aussi 72 000 blessés. Qui s'est rendu dans un service de grands accidentés, connaît la souffrance que cela produit.

Depuis 2014, la mortalité routière est en hausse. Dans ce domaine, seules les mesures de rupture ont des effets, c'est-à-dire celles qui visent un changement de comportements.

Enfant, mes parents ne se souciaient guère de la ceinture à l'arrière. Aujourd'hui, tout le monde s'en préoccupe avant même de démarrer.

Le Premier ministre, qui a dit sa position personnelle pour la limitation à 80 kilomètres/heure, réunira un conseil interministériel en janvier. Le secrétaire d'État Christophe Castaner a indiqué que 300 à 400 vies pourraient être épargnées cette année. Qui n'y est pas sensible ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; MM. Jean-Pierre Sueur et Bernard Lalande applaudissent aussi.)

Unités laïcité

Mme Josiane Costes .  - Dans le Val-de-Marne, le 9 décembre, Jean-Michel Blanquer a installé une unité laïcité au rectorat de Créteil. Il a annoncé leur généralisation en 2018. On ne peut que s'en féliciter, tant les enseignants se sentent parfois seuls face à des réactions d'élèves portant atteinte au principe de laïcité. Elles viendront en aide aux enseignants, je suppose. Quand et comment pourront-elles intervenir dans les établissements scolaires ? Quel sera leur lien avec les référents laïcité déjà en place dans les rectorats ? Quelle sera leur composition ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM).

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement .  - En ne reconnaissant aucune religion officielle, la République protège la liberté de croire ou de ne pas croire. L'école a pour fonction de protéger nos enfants de toute emprise, qu'elle soit religieuse, politique ou économique. Depuis une trentaine d'années, les remises en cause de la laïcité se multiplient. La réponse doit être claire et sereine. Cela passe par le soutien aux acteurs de l'éducation. C'est pourquoi le ministre a créé un Conseil des sages de la laïcité composé de chefs d'établissement, de psychologues, de juristes et de spécialistes du numérique. Des équipes opérationnelles agiront à travers la prévention, en recensant exhaustivement les atteintes à la laïcité, et à travers l'action, par des déplacements rapides sur place en cas d'atteinte grave à la laïcité. Leur efficacité sera évaluée car nous sommes très attachés à la laïcité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM ; MM. Jean-Pierre Sueur et Bernard Lalande applaudissent également.)

Mme Josiane Costes.  - Les professeurs se sentent parfois très déstabilisés, aucun ne doit se sentir seul. Je retiens que le chef d'établissement pourra alerter les équipes dédiées, pour une action qui interviendra rapidement, c'est un progrès. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RDSE et LaREM)

Circulaire sur le recensement des migrants en centre d'accueil d'urgence

Mme Sylvie Robert .  - Le président de la République a déclaré qu'il ne voulait plus voir d'hommes et de femmes vivre dans la rue et que la première bataille, c'était de loger tout le monde dignement. La France a toujours été une terre d'asile : Chagall, Nabokov, Noureev, mais également tant d'anonymes ont été accueillis avec pour seule boussole la liberté.

Cette dignité, c'est celle qui dérive de l'humanisme le plus élémentaire ; et il est de notre responsabilité collective de faire perdurer la tradition française en matière d'asile, qui fait la fierté et la richesse de notre pays, tout en l'adaptant aux réalités contemporaines du monde. En un mot, conjuguer humanisme et réalisme.

Cet équilibre a été rompu la semaine dernière lorsque, avec les associations, vous avez évoqué un traitement administratif des demandeurs d'asile au sein des centres d'hébergement. Vous ne pouvez remettre en cause l'inconditionnalité de l'accueil en centre d'accueil d'urgence, inscrite dans le code de l'action sociale et des familles.

Il faut renouer le dialogue avec les associations. Que contient la circulaire créant des équipes mobiles chargées du traitement administratif des migrants en centre d'accueil d'urgence ? Ne craignez-vous pas que la circulaire ne produise des effets contraires au but recherché par le président de la République ? Enfin, gardons à l'esprit que l'asile est aussi une question européenne et internationale. (Applaudissements à gauche).

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Le Gouvernement souhaite créer des équipes mobiles avec des agents des préfectures et de l'Office français des protections des réfugiés et apatrides (Ofpra) pour examiner la situation des migrants.

Il ne s'agit pas de faire un tri entre des personnes. Le principe d'inconditionnalité de l'accueil n'est pas remis en cause, il exige que tout sans abri accède à un hébergement d'urgence.

Cependant, l'hébergement ne donne pas le droit de rester sur le territoire.

Les migrants en situation irrégulière ont vocation à quitter le territoire. L'accès au centre d'hébergement ne vaut pas titre de séjour et certaines personnes qui y sont logées pourraient avoir accès à un autre logement. Notre tradition nous impose d'accueillir les demandeurs d'asile et les réfugiés. Il n'est pas demandé aux travailleurs sociaux de faire le travail de l'État. En revanche, il est difficile qu'ils fassent obstacle à l'application de la loi.

Les préfets doivent trouver le bon équilibre pour trouver des solutions adaptées, en lien avec les associations, afin de retrouver un équilibre entre humanisme et pragmatisme.

Problèmes techniques à la gare Montparnasse

M. Gérard Cornu .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) En l'absence de Mme Borne, ma question s'adresse à Nicolas Hulot. La gare Montparnasse (Exclamations à droite) est le symbole de la modernité. Mais, patatras ! Elle est devenue un cauchemar, avec trois jours de pagaille en juillet, puis une journée de panne complète. Même les feuilles d'automne sont causes de retard des TER, puis sur les TGV. Des annonces ont été faites, la ministre a reçu les dirigeants de la SNCF, mais les usagers, excédés, veulent du concret.

À l'aube de l'ouverture à la concurrence, l'État actionnaire doit jouer son rôle. Que compte faire le Gouvernement ? Quel est son projet pour la SNCF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Mme Borne est effectivement avec le Premier ministre et le Président Larcher. J'utilise la gare Montparnasse une fois par semaine : je connais ces problèmes, et comprends l'agacement des usagers.

Un plan de remplacement a permis de réduire les nuisances. Nous avons adressé à Patrick Jeantet, le président de SNCF Réseau, une lettre pour mettre en place une nouvelle organisation des grands travaux - il nous rendra ses résultats fin janvier. Les conclusions de la mission confiée à Jean-Cyril Spinetta seront connues elles aussi dans le même délai. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Agressions de pompiers

Mme Isabelle Raimond-Pavero .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les agressions de sapeurs-pompiers sont en hausse : 2 280 plaintes déposées en 2016, 17,6 % de plus qu'en 2015 ! La violence dont ils sont victimes est intolérable : ils sont caillassés, frappés, pris dans des embuscades - et des médecins connaissent le même sort.

Ces situations traduisent la montée en puissance de la violence gratuite qui n'a d'autre but que de défier tout ce qui représente une autorité, et d'abord l'autorité de l'État ; une telle violence exige une réponse déterminée. Des mesures ont été prises, comme la coordination des interventions des services de secours avec les forces de sécurité, ou l'anonymat du dépôt de plainte. Mais il faut aller plus loin : que compte faire le Gouvernement pour défendre les pompiers et rétablir l'État de droit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Nous ne pouvons qu'entendre votre question. Les agressions contre les forces de secours et d'assistance mettent en cause les valeurs de la République, on l'a vu lors des agressions lâches et inacceptables de Nîmes, de Vénissieux et d'ailleurs. Vous avez raison de mentionner aussi les médecins.

La semaine dernière, les auteurs d'une agression à coup de marteau sur des sapeurs-pompiers ont été condamnés à 18, 15 et 10 mois de prison ferme, assortis pour les deux premiers de mandat de dépôt.

Gérard Collomb a demandé à tous les préfets de revoir les modes d'action des forces de l'ordre pour qu'elles accompagnent autant que possible les sapeurs-pompiers. Mmes Belloubet et Gourault sont également mobilisées pour mieux protéger nos forces de protection civile. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Isabelle Raimond-Pavero.  - Une chaîne police-justice implacable doit répondre à ces situations - mais les crédits de la mission « Sécurité », que le Sénat a repoussés, n'augure rien de bon. Le nouveau monde devra se faire attendre longtemps, je le crains. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

La séance, suspendue à 16 h 5, reprend à 18 h 30.