Qualité des études d'impact

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi organique visant à améliorer la qualité des études d'impact des projets de loi.

Discussion générale

M. Franck Montaugé, auteur de la proposition de loi organique .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Les deux textes que le groupe socialiste vous propose cet après-midi répondent à l'objectif largement partagé d'améliorer la qualité de la loi.

La situation internationale nous oblige à repenser les normes, notamment au regard des enjeux du développement durable. Le rapport Stiglitz-Sen-Fitoussi, commandé par Nicolas Sarkozy, a ouvert la voie en 2009 en indiquant que la croissance n'était soutenable que si elle permettait de transmettre notre patrimoine aux générations futures. Ce patrimoine est économique, humain, social, naturel ; certains économistes ajoutent qu'il est aussi démocratique. Pour Jean-Paul Fitoussi, le bilan patrimonial, avec la dette publique et la dette privée, permet d'éclairer les choix politiques et budgétaires de la Nation.

Dans le même esprit, la loi du 13 avril 2015 portée par la députée écologiste Éva Sas a consacré de nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques. Selon le Premier ministre, cette dynamique a un sens politique profond : il s'agit de savoir ce que nous entendons par la croissance, le bien-être et le progrès. À le suivre, notre article premier n'était pas incongru.

Du reste, nos collègues Hervé Maurey, président de la commission du développement durable, et Jérôme Bignon, ne semblent pas penser autrement. En juillet dernier, lors de la table ronde sur les objectifs du développement durable, le premier s'interrogeait sur la façon dont les parlementaires pouvaient mieux appréhender ces objectifs dans la mise en oeuvre des différentes politiques publiques ; le second insistait sur la nécessité de territorialiser les indicateurs, d'y associer la société civile et, pour les commissions, de ne plus travailler en silo.

En 2011, l'OCDE a adopté la démarche « L'initiative du vivre mieux », autorisant des comparaisons internationales sur des thèmes aussi importants pour la qualité de vie qu'emplois et salaires, articulation entre vie professionnelle et vie privée, logement, qualité de l'environnement, état de santé, éducation et compétence, liens sociaux, engagement civique et gouvernance ou encore le bien-être subjectif. L'Union européenne a développé son propre modèle.

La profusion des indicateurs nuit à leur compréhension et à leur appropriation. Le PIB restera la référence tant que nous n'aurons pas mieux défini lesquels nous souhaitons prendre en compte. C'est ainsi que nous avons ouvert le chantier de la fabrique de la loi. Nous avons été rattrapés, si j'ose dire, par le projet de réforme constitutionnelle. Le président de la République a appelé à réserver du temps au contrôle et à l'évaluation. Le président du Sénat, en introduction du rapport Pillet, souhaite davantage investir cette mission, jusque-là parent pauvre de la Ve République. C'est précisément ce à quoi tendent les deux textes que je vous propose.

Le premier consiste à penser l'action publique au regard des objectifs de développement durable que notre pays a consacré dans l'accord de Paris issu de la COP21. Les nouveaux indicateurs de richesse de la loi Sas peuvent en être une traduction pertinente, qui est bien entendu perfectible. L'essentiel est de les prendre en compte, de nous y référer dans nos études d'impact et nos évaluations. Ce n'est pas contradictoire avec la volonté de la commission des lois d'insister sur l'indépendance des organismes chargés de réaliser les études d'impact. Pour notre part, nous tenons également à leur caractère pluraliste - c'est un principe de droit, non une lubie de circonstance. Nous approuvons les autres modifications introduites par la commission.

La France a donné la meilleure image d'elle-même lors de la COP21. À nous d'en tirer toutes les conséquences dans notre travail quotidien de législateur. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; Mme Marie Mercier applaudit également.)

M. le président.  - Je vous informe que le président du Sénat réunira la Conférence des présidents à 18 h 45, en salle 216.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur de la commission des lois .  - Notre collègue Franck Montaugé nous donne l'occasion de revenir sur l'étude d'impact que certains voyaient, lors des débats sur la révision constitutionnelle de 2008, comme une grande innovation quand d'autres, et j'étais de ceux-là, considéraient que l'impact de la loi est l'affaire du débat parlementaire - s'il est positif, on vote pour le texte ; négatif, on vote contre. Si les expertises peuvent être bénéfiques, il est difficile d'imaginer qu'elles contiendraient une vérité totalement objective qui surplomberait les divergences politiques. Pensez à une étude d'impact sur les OGM...

L'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 prévoit que le Gouvernement fera nécessairement appel à un organisme indépendant pour procéder à l'étude d'impact. Dans la pratique, le ministre, qui présente un projet de loi, demande à ses services de réaliser une étude d'impact ; laquelle montre naturellement que l'impact de la loi sera positif. En votant l'article 2, la commission des lois a choisi de rompre avec ce monolithisme - un ministre qui présente à la fois le projet de loi et l'étude d'impact. Cela crédibilisera l'expertise.

Les évaluations doivent prendre en compte non seulement des mesures quantitatives mais aussi des mesures qualitatives, M. Montaugé y tient beaucoup. Ces nouveaux indicateurs relèvent cependant davantage de l'application de la loi que du corpus législatif.

La commission des lois a retenu un amendement de Mme Lamure selon lequel les conséquences des projets de loi sur les collectivités territoriales et les entreprises figureront dans les études d'impact ainsi que trois amendements issus du groupe de travail Larcher, portant sur les moyens mis en oeuvre par le projet de loi, la simplification des normes et les délais dans lesquels la Conférence des présidents peut s'émouvoir de l'insuffisance d'une étude d'impact auprès du Conseil constitutionnel. C'est une manière d'avancer dans la réforme constitutionnelle qui, j'espère que vous y êtes sensible, Monsieur le Ministre, doit renforcer les pouvoirs du Parlement. (Sourires)

Enfin, nous avons introduit un amendement au sujet du Conseil national d'évaluation des normes. M. Richard avait suggéré de joindre les avis de ce conseil, que j'ai contribué à créer avec Jacqueline Gourault, aux projets de loi au même titre que les études d'impact. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Ces deux propositions de loi entendent améliorer les deux phases de la procédure législative, à l'aune des nouveaux indicateurs de richesse prévus par la loi du 13 avril 2015. Il s'agit d'informer différemment sur l'évaluation des politiques publiques.

Le premier texte est né d'une déception car les études d'impact définies dans la loi organique du 15 avril 2009 n'ont pas toujours été à la hauteur des attentes : elles sont parfois incomplètes, biaisées voire orientées. Le Sénat l'a relevé à plusieurs reprises notamment par la bouche de Jean-Jacques Hyest, actuel membre du Conseil constitutionnel, qui ne les a jamais tenues en haute estime.

Pour le Gouvernement, les études d'impact sont un stimulant pour améliorer la qualité de la loi. Ce texte fait écho à la proposition de loi organique déposée par Mme Lamure le 28 septembre 2017.

Si nous comprenons votre préoccupation, le Gouvernement est réservé. Le texte ne correspond pas aux orientations données par le président de la République dans le cadre de la révision constitutionnelle. La qualité de l'étude d'impact ne préjuge en rien de la qualité de la loi, et inversement. Le Conseil constitutionnel a toujours refusé, et à raison, de définir une bonne étude d'impact. Il a donné tort au Sénat sur la loi NOTRe, que le Sénat avait refusé d'inscrire à son ordre du jour au motif que l'étude d'impact était insuffisante. Le président de la République souhaite que le Parlement marche sur ses deux jambes : le vote et le contrôle. Priorité doit être donnée au renforcement de l'évaluation. Ainsi le Gouvernement passera-t-il moins de temps à convaincre et davantage à rendre des comptes. Enfin, une réserve juridique forte : faire de l'étude d'impact un diagnostic préalable par un organisme indépendant n'est pas conforme à l'article 39 de la Constitution.

Des raisons tant de principe que de calendrier expliquent l'avis défavorable du Gouvernement à cette proposition de loi organique.

Mme Maryse Carrère .  - Le comité présidé par M. Balladur recommandait en 2007 que les études d'impact conditionnent la recevabilité d'un projet de loi, à charge pour le Conseil constitutionnel de les contrôler. Dans la pratique, on s'est éloigné des principes définis lors de la révision constitutionnelle de 2008. La généralisation des études d'impact n'a pas produit les effets escomptés, à savoir une amélioration de la loi. Certains se souviennent de l'étude accompagnant la loi relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales en 2014 : ni les calculs retenus, ni le détail des options possibles, ni les raisons expliquant pourquoi certains découpages avaient été préférés à d'autres n'étaient expliqués. Dans d'autres cas, le lecteur est noyé sous les détails encyclopédiques.

L'avenir du parlementarisme en France dépend de l'aptitude des membres de nos assemblées à disposer de données agrégées à partir desquelles formuler des propositions réalistes, répondant aux attentes des citoyens constatées sur le terrain. D'où l'amendement de M. Requier visant à soumettre aux études d'impact les amendements substantiels déposés par le Gouvernement sur ses propres textes. La commission des lois l'a déclaré irrecevable - belle illustration à nos dépens de l'autorégulation dont nous sommes capables !

Nous sommes favorables à l'extension de la liste des informations devant figurer dans les études d'impact : données concernant les collectivités territoriales et les entreprises, données relatives aux moyens humains et informatiques nécessaires à la mise en oeuvre de nouvelles dispositions. En cas de création d'une nouvelle norme, l'étude d'impact précisera celles qui devront être supprimées ; c'est une bonne chose. Nous nous réjouissons de l'implication d'organismes indépendants dans les évaluations mais resterons vigilants sur leurs choix et la manière dont ils travaillent. L'allongement des délais de saisine du Conseil constitutionnel par la Conférence des présidents pourrait aussi aller dans le bon sens.

Le groupe RDSE est favorable à cette proposition de loi organique qui est un premier débat sur la voie de la réforme constitutionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Daniel Gremillet .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je rends hommage à l'auteur de cette proposition de loi organique. Il n'imaginait sans doute pas le contexte politique dans lequel il aurait à défendre son texte. Je salue le rapporteur et la commission des lois qui ont enrichi son texte.

Dans un avis du 8 mars 2017, le Conseil d'État constatait que les études d'impact lui étaient transmises très tardivement, qu'elles ne servaient souvent qu'à justifier la réforme décidée, qu'elles n'étaient jamais confrontées aux destinataires de la norme à l'exception des collectivités territoriales et que leur champ était souvent insuffisant. Le jugement était sévère.

Selon le Conseil national d'évaluation des normes, les obligations imposées par la loi sur la transition énergétique et pour la croissance verte ont coûté 4,41 milliards d'euros aux collectivités territoriales. L'amendement du rapporteur est important pour les collectivités territoriales, trop souvent abandonnées.

Autre axe important, la simplification. Les normes supprimées doivent être de la même dimension que celles qui sont créées. Je salue le travail de la délégation sénatoriale aux entreprises. Il est indispensable d'évaluer les coûts pour les entreprises si nous voulons qu'elles se développent.

Quel travail législatif voulons-nous pour demain ? Alors qu'une réforme constitutionnelle est annoncée, les signaux qui émanent de l'exécutif sont fort préoccupants. Le projet de restriction du droit d'amendement qui fait aujourd'hui la une est inacceptable.

Je crois au courage politique et à l'action des parlementaires. À rebours du discours populiste selon lequel le temps parlementaire serait inutile et trop long, j'estime que le débat parlementaire est fondamental pour faire des choix structurants pour l'avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur certains bancs des groupes SOCR et RDSE ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)

M. Alain Richard .  - L'instauration de l'étude d'impact préalable au dépôt d'un projet de loi était à nos yeux un excellent apport de la révision constitutionnelle de 2008. Sept ans après, il n'est pas injustifié d'envisager en renforcer la qualité ou la précision.

L'étude d'impact a été un progrès ; elle offre des outils d'analyse utiles au législateur. Observons toutefois que la masse pléthorique d'informations apportées ne permet que difficilement de cibler celles qui sont réellement pertinentes, et le temps consacré par le parlementaire moyen à la lecture d'une étude d'impact d'une centaine de pages n'est pas toujours à la hauteur de son contenu.

Cette proposition de loi part d'une bonne intention mais certaines mentions paraissent quelque peu superfétatoires. La loi organique de 2009 dit déjà que doivent être évaluées les conséquences sur chaque catégorie d'administration publique et chaque catégorie de personnes physiques et morales, ce qui inclut collectivités territoriales et entreprises. De même, elle prévoit déjà l'évaluation des conséquences sur l'emploi public. La proposition de loi organique a donc un aspect inflationniste.

L'obligation de faire réaliser une partie de l'étude d'impact par un organisme extérieur à l'État me parait en outre être très discutable et peu motivée. Le Gouvernement peut déjà demander une analyse à un organisme indépendant - en sus du Conseil d'État. En faire une obligation remettrait en cause le fait que l'étude d'impact est partie prenante du projet de loi, donc de l'entière responsabilité du Gouvernement. C'est en outre suggérer que l'évaluation serait plus rigoureuse venant d'un organisme extérieur que du service public...

Le Conseil d'État exerce déjà une vigilante surveillance, certes informelle, sur la qualité des études d'impact, et alerte le Gouvernement s'il les juge insuffisantes. En outre, la Conférence des présidents de chaque chambre a le pouvoir souverain de demander une nouvelle étude d'impact.

Malgré des dispositions utiles, la proposition de loi organique est exagérément complexe et surtout prématurée au regard de la révision constitutionnelle à venir. Remettons son examen à plus tard. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Quand on se rappelle avec quelle désinvolture le Conseil constitutionnel a validé l'étude d'impact accompagnant le projet de redécoupage régional, on constate que les prétendues avancées de la réforme constitutionnelle de 2018 ont surtout fait du sur place...

La proposition de loi initiale de M. Montaugé a rétréci au lavage de la commission des lois, comme tant d'autres. (Sourires) Pourtant, la prise en compte de l'impact qualitatif d'un projet de loi au regard des indicateurs de richesse définis par la loi Sas du 13 avril 2015 - indicateurs d'inégalités, de qualité de vie, de développement durable - était bienvenue. Cela aurait été bien utile lors de l'examen de la loi NOTRe, qui a généré gagnants et perdants - surtout les petites communes rurales. Rappelons que le PIB n'intègre pas les activités non marchandes, mais bientôt le trafic de drogue !

Autre point positif : que les études d'impact ne soient plus mitonnées par les services de l'État, juges et parties, mais confiées à des organismes indépendants et pluralistes. J'ai déposé un amendement pour que ces derniers saisissent les commissions parlementaires saisies au fond des points qu'elles souhaitent voir aborder - car les études d'impact répondent rarement aux interrogations des parlementaires. On y trouve surtout ce que l'on ne cherche pas.

M. Roland Courteau.  - En effet !

M. Pierre-Yves Collombat.  - En revanche, je ne vois pas bien l'intérêt d'un Conseil parlementaire d'évaluation des politiques publiques et du bien-être composé de dix-huit députés et dix-huit sénateurs, accompagnés d'un comité scientifique pléthorique...

Le groupe CRCE soutiendra la motion de renvoi en commission.

Nous soutiendrons en revanche le rétablissement de l'article premier de la proposition de loi organique, étrangement supprimé en commission, et la réaffirmation du caractère public des organismes indépendants chargés des études d'impact. Être à la merci du marché ne semble pas la meilleure garantie d'indépendance.

L'amendement de M. Requier a été jugé irrecevable au regard d'une interprétation fort extensive de l'article 45 de la Constitution. Il y a urgence à renforcer le pouvoir du Parlement : à lui de commencer !

Je regrette que la commission des lois ait transformé une proposition de loi organique simple, claire et utile en un texte trop compliqué pour survivre à la navette, mais peut-être était-ce le but ?

M. Philippe Bonnecarrère .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Une question préalable, si j'ose dire, est posée : la proposition de loi organique telle qu'elle résulte des travaux de la commission anticipe-t-elle la future révision constitutionnelle ?

La commission des lois a substantiellement fait évoluer le texte en intégrant dans l'étude d'impact l'évaluation des conséquences sur les collectivités territoriales et les entreprises ainsi que des moyens humains, financiers, informatiques nécessaires ; le bilan des normes créées ; le recours à des organismes indépendants. Enfin, elle a intégré la proposition n°18 du groupe de travail sénatorial sur la révision constitutionnelle, s'agissant de la Conférence des présidents.

Ces propositions recueillent l'agrément du groupe centriste, mais la question demeure : faut-il mener ce débat aujourd'hui, ou l'intégrer dans celui, plus large, qui devrait nous être proposé ?

Une question n'est pas posée : celle de l'intégration de la démocratie participative. Il existe dans la société française une large aspiration à ce que notre démocratie soit plus participative, pour une meilleure complémentarité avec la démocratie représentative, ce qu'Henri Cabanel et moi avions appelé, dans notre rapport, une démocratie « coopérative ». Les modalités numériques - le civic tech - faciliteraient l'expression des citoyens : réactivation du droit de pétition devant les chambres du Parlement, tombé en désuétude, consultations numériques ou conférences de consensus et autres panels citoyens.

La question des études d'impact peut être vue comme plus générale et mérite, à ce titre, d'être retravaillée par notre assemblée. Toutefois, j'admets que les propositions de ce texte sont de bon aloi. C'est pourquoi le groupe UC le soutiendra. Notre regard est toutefois dirigé vers la probable réforme des institutions, dont nous sommes nombreux à souhaiter la réussite. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur certains bancs du groupe SOCR, ainsi que sur le banc de la commission.)

M. Alain Marc .  - Depuis 2008, obligation est faite au Gouvernement d'éclairer, en principe, le Parlement sur les raisons de légiférer, les options alternatives et les conséquences envisagées d'un projet de loi. La proposition de loi organique initiale prévoyait que les études d'impact comportent une évaluation qualitative de l'impact au regard des nouveaux indicateurs de richesse et que les conséquences de la future loi soient analysées par des organismes publics indépendants et pluralistes.

Le président de la République, le 3 juillet 2017, a annoncé une révision constitutionnelle - qui sera l'occasion d'évoquer les études d'impact.

L'obligation d'information du Parlement date de la loi organique du 15 avril 2009. C'est une incontestable avancée mais la pratique des études d'impact s'est révélée décevante. La proposition de loi organique est l'occasion d'introduire des propositions formulées en 2018 par le groupe de travail sénatorial sur la révision constitutionnelle.

Je me réjouis que la commission des lois ait relevé, à l'unanimité, le niveau d'exigence vis-à-vis des études d'impact. Celles-ci, réalisées notamment par des organismes indépendants pour plus d'objectivité, devront comporter une évaluation des conséquences en termes de moyens humains, budgétaires et informatiques, et des coûts spécifiques des normes pour les collectivités territoriales et les entreprises. Les études d'impact devront également indiquer quelles normes sont supprimées, joignant l'avis du Conseil national d'évaluation des normes.

La Conférence des présidents de la première assemblée saisie aura trente jours, contre dix actuellement, pour évaluer la qualité de l'étude d'impact et saisir le Conseil constitutionnel, le cas échéant.

Le groupe Les Indépendants votera en faveur de la proposition de loi organique. (Applaudissements sur le banc de la commission)

M. Éric Kerrouche .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Il n'aura échappé à personne, sauf peut-être au Gouvernement, que c'est dans cet hémicycle que se fait la loi. Cela appelle un niveau d'exigence et de responsabilité permanent. L'objectivation de nos décisions passe par un certain nombre d'outils visant à confronter des points de vue pluralistes : auditions, rapports, etc. L'émotion, l'air du temps ne devraient pas avoir droit de cité.

Pour à la fois renforcer la qualité de la loi et limiter l'inflation législative, la révision constitutionnelle de juillet 2008 et la loi organique de janvier 2009 ont imposé l'étude d'impact, dont le rôle est d'éclairer le Parlement. Toutefois, l'utilité, le contenu et l'honnêteté dans l'élaboration des études d'impact ont été mis en cause - tantôt pure formalité, tantôt justification a posteriori.

Cette proposition de loi organique vise à améliorer leur qualité et garantir leur indépendance. Franck Montaugé veut des études d'impact qui répondent réellement à leur objectif. Je le remercie de son travail.

Il n'est plus possible de se fonder uniquement sur le PIB, qui conditionne notre façon d'observer le monde et donc les politiques publiques. C'est un indicateur indispensable mais qui n'est plus suffisant. Les Nations Unies, l'OCDE, la commission Stiglitz-Sen-Fitoussi ou encore France Stratégie estiment qu'il faut d'autres mesures du progrès social : une approche pluraliste, à critères multiples, s'impose. Développons des indicateurs alternatifs au PIB qui prennent en compte les enjeux sociaux et environnementaux.

M. Montaugé propose d'intégrer les nouveaux indicateurs de richesse issus de la loi Sas de 2015. Édouard Philippe, dans son éditorial du rapport Sas de 2017, estime que ces dix indicateurs sont un outil unique, un constat sans appel de l'évolution de notre société.

Nous regrettons que l'article premier de la proposition de loi organique ait été supprimé par la commission des lois et soutiendrons l'amendement qui le rétablit, profitant de ce que le droit d'amendement existe encore ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOCR ; M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)

Il faut recourir à des organismes indépendants pour garantir l'objectivité de l'étude d'impact : celle-ci ne peut être rédigée par ceux qui rédigent le projet de loi ! Nous tenons à des organismes publics, ne serait-ce que pour mettre en valeur notre recherche publique, mais la position consensuelle trouvée par le rapporteur est intéressante.

Enfin, l'intégration des propositions issues du groupe de travail sénatorial sur la révision constitutionnelle est bienvenue.

Simplification, évaluation des coûts induits pour les collectivités et les entreprises, prolongation du délai dont dispose la Conférence des présidents pour saisir le Conseil constitutionnel : autant d'objectifs que nous partageons et qui enrichiront notre culture de l'évaluation.

M. le ministre et Alain Richard nous disent qu'il faut attendre de délibérer sur ces sujets, puisqu'il y aura bientôt une réforme constitutionnelle...

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - C'est le contraire !

M. Éric Kerrouche.  - Connaissant l'amour immodéré du président de la République pour le Parlement, nous devrions voter incessamment... tant que nous le pouvons encore ! (Sourires ; applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; Mme Maryse Carrère applaudit également.)

M. Didier Mandelli .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La proposition de loi organique vise à améliorer la qualité des études d'impact - louable objectif. En effet, les études d'impact n'ont que peu ou pas de poids pour l'examen des projets de loi et sont souvent incomplètes. On l'a constaté lors de l'examen de la loi NOTRe en 2014 : la Conférence des présidents avait décidé le retrait du texte de l'ordre du jour au vu des lacunes de l'étude d'impact, dénoncées par plusieurs groupes, mais le Conseil constitutionnel, saisi par le Premier ministre, avait jugé que le projet de loi avait été présenté dans les conditions conformes à la loi et s'était dit impuissant à juger la qualité de l'étude d'impact...

Une modification de la loi organique s'impose pour que l'étude d'impact comporte des indicateurs précis.

Au regard de ces critiques, la commission des lois a modifié en profondeur le texte proposé pour en faire un texte de simplification des normes, alors leur nombre ne cesse d'augmenter et que le Premier ministre dit vouloir en supprimer deux pour toute nouvelle norme créée.

Il est de notre intérêt de revoir en profondeur la réalisation des études d'impact. Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, nous avons un formidable outil à notre disposition pour améliorer le travail parlementaire. Nous devons nous en saisir. Je saisis l'occasion de souligner le rôle essentiel, dans l'équilibre de nos institutions, d'un Parlement fort. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur le banc de la commission)

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Exactement !

Mme Patricia Morhet-Richaud .  - Qui trop embrasse, mal étreint. Le législateur a complexifié les normes, multiplié les dispositifs et imposé des études d'impact. Or celles-ci sont très loin de l'outil d'aide à la décision imaginé en 2009.

Loin de combattre l'inflation législative, elles n'apportent rien au débat parlementaire. Les délais sont trop contraints, les conséquences financières ne sont pas abordées... Pourquoi dans ce cas en étendre le champ et en élargir le contenu ?

À travers les collectivités territoriales et les entreprises, ce sont les Français qui supportent le coût de l'inflation normative. Les obligations réglementaires et administratives sont une charge en termes d'emploi, un fardeau qui pèse lourd dans la balance commerciale, comme l'a souligné le rapport Lamure-Cadic « Simplifier efficacement pour libérer les entreprises ».

Il est louable d'évaluer priori le projet de loi mais il faut aussi imposer une évaluation a posteriori, au-delà du contrôle formel, pour plus de pragmatisme. Dans un monde qui évolue aussi rapidement, il faut évaluer les politiques mises en oeuvre sans esprit partisan, à l'aide d'éléments factuels.

Je suis réservée sur la pertinence de ce texte. À l'heure où les Français réclament de la simplification et de la lisibilité, il est temps d'améliorer l'efficience des études d'impact. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Lamure, M. Adnot, Mme Berthet, MM. Bouchet, Cadic et Canevet, Mme Deromedi, MM. Forissier, Kennel, Labbé et D. Laurent, Mme Loisier, M. Meurant, Mme Morhet-Richaud et MM. Nougein, Paul, Pierre et Vaspart.

Avant l'article 1er A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article 8 de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, après le mot : « loi », sont insérés les mots : « et les critères d'évaluation de son efficacité au regard de ceux-ci ».

Mme Élisabeth Lamure.  - Sur le fondement de notre rapport « Simplifier efficacement pour libérer les entreprises », cosigné avec Olivier Cadic, la Délégation aux entreprises a déposé une proposition de loi organique relative aux études d'impact.

L'étude d'impact ex ante d'un projet de loi doit non seulement définir les objectifs du texte mais aussi les critères de l'évaluation de son efficacité au regard de ces objectifs, afin de rendre possible une évaluation rigoureuse de la loi ex post.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - Cet amendement porte sur l'évaluation de la loi, dont traite la prochaine proposition de loi. Retrait ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Retrait ou avis défavorable. En outre, il est compliqué de définir des critères d'évaluation sur un texte appelé à connaitre des évolutions au cours de la navette parlementaire.

Mme Élisabeth Lamure.  - Si on part du principe que lorsque c'est compliqué, on ne fait rien, on n'avancera jamais ! (Marques d'approbation) On ne peut se passer d'une évaluation chiffrée des conséquences de la loi. Je retire l'amendement puisqu'il a peu de chances de prospérer, mais à regret.

L'amendement n°9 est retiré.

L'article premier A est adopté.

ARTICLE PREMIER (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le huitième alinéa de l'article 8 de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - l'évaluation qualitative de l'impact des dispositions envisagées au regard des nouveaux indicateurs de richesse créés par la loi n°2015-411 du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques ; ».

M. Franck Montaugé.  - Je regrette que la commission des lois, en supprimant cet article, ait négligé la question de la pertinence des indicateurs utilisés dans les études d'impact. La commission Stiglitz a relancé le débat sur les indicateurs de richesse ; l'Union européenne, l'OCDE, l'ONU, avec ses dix-sept objectifs de développement durable, ont élaboré leurs propres indicateurs de richesse au-delà du PIB.

Comment articuler les objectifs de développement durable, auxquels la France a souscrit, et l'évaluation des politiques publiques ? En réintroduisant l'article premier de la proposition de loi initiale, qui reprend les indicateurs de richesse issus de la loi Sas. Les objectifs de développement durable ne doivent pas être déconnectés de notre travail de législation et d'évaluation. Tel est mon credo.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - Cet amendement est contraire à la position de la commission. L'intérêt des critères qualitatifs - qualité de vie, développement durable, égalité - est indéniable, mais il est préférable de les inscrire dans les textes d'application plutôt que dans le corpus législatif. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

M. Éric Kerrouche.  - Le groupe socialiste soutiendra cet amendement. On ne peut avoir comme seul prisme de lecture le PIB, indicateur daté qui néglige des dimensions essentielles, qu'il s'agisse de développement durable ou d'inégalités sociales.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Malgré ma sympathie pour l'auteur de l'amendement, je suis obligé de dire que nous ne pourrions voter ce texte si cet amendement était adopté.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Au moins c'est clair ! Le problème n'est pas métaphysique mais très concret. Songeons à la réforme territoriale. Toute la question était : quel effet sur l'égalité - ou l'inégalité - entre les collectivités territoriales ? Les inconvénients constatés auraient pu être atténués si nous avions été mieux informés des conséquences possibles...

Les critères dont nous disposons pour juger doivent être pertinents. Nous sommes noyés sous les informations, sauf celles dont nous aurions besoin. J'appelle à soutenir cet amendement.

L'amendement n°1 rectifié n'est pas adopté.

L'article premier demeure supprimé.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLE PREMIER TER

Mme Élisabeth Lamure .  - Cet article dispose que pour toute norme supplémentaire, l'étude d'impact propose une norme à abroger. La délégation aux entreprises s'en réjouit. Au cours de ses multiples rencontres avec les entreprises, elle ne cesse d'être saisie du problème de la lourdeur et de l'instabilité des normes. Le temps passé à gérer la complexité normative est autant de temps perdu pour la conquête de nouveaux marchés. L'OCDE en a estimé le coût à 60 milliards d'euros. La France est classée 115e sur 138 pays pour la complexité normative !

Nous avons adopté l'an passé, à la délégation aux entreprises, un rapport d'information sur la simplification des normes, pour libérer les entreprises - et proposé qu'une loi organique introduise la simplification dans les études d'impact législatives, et qu'une loi constitutionnelle introduise l'obligation de compenser toute nouvelle charge pour les entreprises, par la suppression d'une charge équivalente.

Cet article va dans le même sens, je m'en réjouis. Cependant, avec mes collègues de la délégation aux entreprises, je présenterai un amendement pour vérifier que la charge financière de la norme abrogée, pour les entreprises et les collectivités territoriales, l'emporte sur celle de la norme créée. Nos voisins allemands ont ainsi pu économiser 14 milliards en cinq ans.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mme Lamure, M. Adnot, Mme Berthet, MM. Bouchet, Cadic et Canevet, Mme Deromedi, MM. Forissier, Kennel, Labbé et D. Laurent, Mme Loisier, M. Meurant, Mme Morhet-Richaud et MM. Nougein, Paul, Pierre et Vaspart.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, ainsi que les économies de charges en résultant, en particulier pour les collectivités territoriales et les entreprises

Mme Élisabeth Lamure.  - C'est le principe dont je viens de parler, il faut s'assurer que la charge financière engendrée par les normes nouvellement créées soit inférieure à la charge financière représentée par les normes supprimées en contrepartie.

Le 12 janvier 2016, nous avions adopté une proposition de loi constitutionnelle exigeant déjà que toute mesure législative ou réglementaire ayant pour effet de créer ou d'aggraver une charge pour les collectivités territoriales, soit compensée par la suppression de mesures représentant une charge équivalente ou par une enveloppe financière.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - La commission a estimé cet amendement redondant avec la notion de « coûts et bénéfices », d'où son avis défavorable. Mais à titre personnel, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Retrait : l'article 8 de la loi organique de 2009 suffit. Vous proposez des dispositions trop contraignantes.

M. Jean-Pierre Grand.  - Avec la réforme constitutionnelle que le Gouvernement s'apprête à déposer, Monsieur le Ministre, nous n'aurions pas d'autre choix que de nous en tenir au texte de la commission, alors même que, vous le voyez, le rapporteur peut être d'un avis contraire et que le débat peut, chacun y donnant son avis, ouvrir sur des positions nouvelles. Ici, l'amendement a prospéré, cela nous montre ce qu'il est important de faire et de ne pas défaire ! (Applaudissements sur tous les bancs)

Mme Élisabeth Lamure.  - Je ne retire pas mon amendement, il est utile car la suppression d'une norme en compensation d'une norme nouvelle n'a guère de sens si leur impact financier n'est pas équivalent...

L'amendement n°10 est adopté.

L'article premier ter, modifié, est adopté.

ARTICLE 2

M. Franck Montaugé .  - Cet article prévoyait initialement que les études d'impact devaient être produites par des organismes publics ; c'est cela même qui garantit l'indépendance. L'OFCE a été créé début 1980 pour renforcer l'indépendance de l'expertise, alors exclusivement aux mains de l'administration. Le rapport de René Lenoir et Baudoin Prot, rédigé en 1979 à la demande de Valéry Giscard d'Estaing, a joué un rôle important pour la démocratisation de l'expertise et a conduit également à la création de l'OFCE et de l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES) - leur mission, utile, est de mettre au service du débat public les fruits de la rigueur scientifique et de l'indépendance universitaire.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Collombat.

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

« Ces évaluations sont réalisées par des organismes publics indépendants et pluralistes comprenant notamment le Conseil économique, social et environnemental, l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'Institut national de la statistique et des études économiques.

« Ces organismes publics indépendants préalablement au commencement de leurs travaux, consultent les commissions saisies au fond à l'Assemblée nationale et au Sénat des points et des sujets que ces dernières souhaitent nécessairement voir traiter dans l'étude d'impact.

« Pour réaliser ces évaluations, l'Assemblée nationale et le Sénat peuvent désigner des universitaires et des personnes qualifiées en fonction de leur compétence par rapport aux domaines du projet de loi. Le mode de désignation des universitaires et des personnes qualifiées est déterminé par le règlement de chaque assemblée. 

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je précise dans cet amendement que les évaluations sont réalisées par des organismes publics, indépendants et pluralistes ; que les commissions législatives des assemblées sont consultées sur les sujets qu'elles souhaitent voir traitées par l'étude d'impact - c'est la pertinence qui compte, pas la masse d'information ! - et que les deux assemblées désignent les personnalités qualifiées qui seront chargées de l'évaluation.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

organismes

insérer le mot :

publics

M. Franck Montaugé.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2, première phrase

Compléter cette première phrase par les mots :

et pluralistes

M. Franck Montaugé.  - Il est défendu.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - Sans cacher ma sympathie pour l'amendement n°2 de M. Montaugé, je me dois de vous exprimer l'avis défavorable de la commission.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Argumentation imparable !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Ces amendements touchent à l'élaboration de la loi, pas à sa présentation - ce qui les rend inconstitutionnels...

M. Alain Marc.  - Cela me gêne que seuls des organismes publics évaluent. Mon expérience à l'éducation nationale montre que l'évaluation interne n'a rien pu contre le recul dans les classements internationaux...

M. Éric Kerrouche.  - Nous disposons d'un appareil de recherche publique à niveau mondial. Valorisons-le !

L'amendement n°7 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos2 rectifié et 3 rectifié.

L'article 2 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Grand.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 8 de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les versions des projets de lois transmis au Conseil d'État, y compris, le cas échéant, celles des saisines rectificatives et l'avis de celui-ci ou, lorsque le Gouvernement estime que des motifs impérieux d'intérêt général s'opposent à sa publication intégrale, une note en synthétisant les principales observations sont joints à l'étude d'impact. »

M. Jean-Pierre Grand.  - En vertu de l'article 39 de la Constitution, le Conseil d'État est obligatoirement saisi de tous les projets de loi, avant leur adoption par le Conseil des ministres et leur dépôt devant le Parlement.

Si le Gouvernement n'est pas tenu de suivre l'avis du Conseil d'État, le Gouvernement modifie bien souvent son texte en fonction de cet avis, ce qui complexifie le travail parlementaire.

Cet amendement propose donc que les versions des projets de loi et les éventuelles saisines rectificatives soient jointes à l'étude d'impact, ainsi que l'avis du Conseil d'État, qui est rendu public depuis la fin du précédent quinquennat.

J'avais proposé de nous saisir de cette proposition de loi, pour modifier d'autres aspects de l'organisation de nos travaux, la commission m'a fait savoir, hélas, que mes amendements étaient irrecevables. En quelques mots, sans remettre en cause le droit d'amendement, j'estime que le Gouvernement devrait être soumis aux mêmes délais que les parlementaires. Il devrait par ailleurs être astreint à l'obligation d'une étude d'impact pour ses amendements.

Nous en débattrons lors de l'examen de la révision constitutionnelle.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Grand.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 8 de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'avis du Conseil d'État ou, lorsque le Gouvernement estime que des motifs impérieux d'intérêt général s'opposent à sa publication intégrale, une note en synthétisant les principales observations est joint à l'étude d'impact. »

M. Jean-Pierre Grand.  - Il est défendu.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - Avis défavorable. L'avant-projet soumis au Conseil d'État n'a pas à être publié. Ce qui engage le Gouvernement, c'est le projet de loi qu'il dépose, pas les moutures préalables ; elles ont certes de l'intérêt, de même que les brouillons des romans pour ceux qui étudient la littérature, mais elles ne sont pas à leur place dans l'étude d'impact.

Faut-il publier l'avis du Conseil d'État ? Le débat est légitime, mais, ici encore, il me semble que cet avis n'a pas sa place dans l'étude d'impact.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Même avis sur les avant-projets. Les avis du Conseil d'État sont des documents administratifs ; les publier serait trahir le secret de la délibération du Gouvernement. En revanche, conformément à la déclaration du président de la République du 20 janvier 2015, ils sont intégralement rendus publics dès qu'ils ont été délibérés en Conseil des ministres, sauf les projets de loi de finances, projet de loi de financement de la sécurité sociale, ordonnances et ratifications de conventions internationales.

Les amendements nos4 et 5 sont retirés.

L'article 3 est adopté.

M. Jean-Claude Requier.  - J'avais déposé un amendement mettant à égalité le Sénat et le Gouvernement, en rendant l'étude d'impact obligatoire pour les amendements. Mais la commission des lois l'a déclaré irrecevable.

Je voterai toutefois ce projet de loi qui va dans le bon sens.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Cet amendement rejoignait une aspiration qui nous est commune. Des textes examinés en première lecture au Sénat prennent parfois un volume inattendu à l'Assemblée nationale, avec l'introduction d'amendements qui viennent trop souvent du Gouvernement - je pense par exemple à la loi sur la justice du XXIe siècle.

Quand l'urgence est déclarée, il n'y a pas de deuxième lecture. En CMP, comment savoir ce qu'aurait voté le Sénat ?

L'absence de règles restreignant les amendements en deuxième lecture est une remise en cause sournoise et insidieuse du bicamérisme.

La seule manière d'y remédier, c'est que la Constitution exige que les mesures nouvelles introduites par la deuxième chambre saisie, doivent obligatoirement être examinées par la première chambre avant la CMP ! (Applaudissements sur tous les bancs)

Mme Sophie Joissains.  - Très bien !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Nous aurions bien suivi nos collègues sur ce texte intéressant, mais il est devenu très insuffisant. Nous nous abstiendrons.

La proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public de droit.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°67 :

Nombre de votants 324
Nombre de suffrages exprimés 309
Pour l'adoption 309
Contre 0

Le Sénat a adopté.