Projet de loi de finances pour 2022 (Nouvelle lecture)

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, pour 2022.

Discussion générale

M. Olivier Dussopt, ministre délégué, chargé des comptes publics .  - L'Assemblée nationale a adopté en nouvelle lecture le projet de loi de finances pour 2022, rejeté par votre assemblée en première lecture au terme de l'examen de la première partie.

Ce texte concrétise les engagements pris par le Président de la République, notamment en termes de préparation de l'avenir et de réarmement des ministères régaliens.

M. Jérôme Bascher.  - Et d'augmentation des déficits...

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.  - Les investissements prévus visent à rendre notre économie plus compétitive.

L'Assemblée nationale a adopté des mesures nouvelles importantes. Elle a ainsi donné la possibilité au Gouvernement de déroger aux recommandations de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) sur les tarifs, afin d'améliorer le bouclier tarifaire. Elle a abondé de 150 millions d'euros le fonds de réassurance des professionnels du tourisme, et de la même somme le budget consacré à la sécurité dans les aéroports. Elle a fait de l'État le garant en dernier ressort en cas de déficit des Jeux Olympiques de Paris 2024, puisque la dimension de l'événement dépasse évidemment le rayonnement de la ville.

Avec le financement des nouvelles mesures, mais aussi l'intégration de nouvelles hypothèses macroéconomiques à l'article liminaire, dont la hausse du taux de croissance à 6,25 %, le projet de loi de finances (PLF) fixe le déficit prévisionnel pour 2021 à 8,2 %, avec l'objectif de le ramener à 5 % en 2022.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce n'est pas une surprise : la commission mixte paritaire réunie le 1er décembre n'a pas pu établir de texte. Les points de vue entre les deux assemblées sont irréconciliables.

Le rejet du texte par le Sénat en première lecture a montré notre opposition marquée à un budget dont les déficits ne résultent pas uniquement de la crise mais traduisent des choix gouvernementaux auxquels nous nous opposons.

À un budget incomplet a succédé un budget de campagne qui préempte dangereusement l'avenir.

Du plan d'investissement « France 2030 » de 34 milliards d'euros au contrat d'engagement jeune, il y en a pour tout le monde !

Le Gouvernement ne maîtrise pas les dépenses hors relance et urgence. Les dépenses primaires des administrations publiques sont supérieures de 60 milliards à la trajectoire pluriannuelle. Il n'y a aucun effort de maîtrise des dépenses, mais une dérive coupable et assumée des comptes publics. Alors que ce sont les efforts d'aujourd'hui qui font les marges de manoeuvre de demain, la capacité de la prochaine majorité gouvernementale est obérée.

On ne va pas vers le désendettement de la France...

Le projet transmis au Sénat compte 222 articles dont 8 supprimés et 7 additionnels. En première lecture, pas moins de 166 articles additionnels avaient été introduits par amendement. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale sont-elles de nature à changer la position du Sénat ? Au-delà de modifications rédactionnelles ou de coordination, 47 articles ont fait l'objet de rectification au fond.

Le bouclier tarifaire inclut dans le PLF est une nouvelle mesure de court terme, un palliatif d'urgence contre la hausse du prix de l'électricité. Il s'ajoute au chèque énergie, à l'indemnité inflation, au bouclier fiscal pour l'électricité et au bouclier tarifaire pour le gaz. La mesure pourrait coûter jusqu'à 12 milliards d'euros, soit plus que la recette de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE). Cela sera récupéré sur les factures à partir de février 2023. Je suis très sceptique : je ne vois pas comment les consommateurs pourraient échapper aux difficultés lors du rattrapage. Ce palliatif ponctuel est aléatoire et dangereux. Il n'y a pas de stratégie pour anticiper les tensions.

L'Assemblée nationale a répondu en partie aux apports du Sénat. En matière de services à la personne, elle a exclu la télésurveillance de l'exigence d'inclusion dans une offre globale de soins aux personnes âgées ou atteintes d'une pathologie chronique. C'est une bonne mesure, mais son application sera difficile.

Au total, le déficit est prévu à 153,8 milliards d'euros, en légère amélioration, ce qui s'explique par une hausse des recettes. Le plafond de dépenses du budget général a été rehaussé à hauteur de 300 millions d'euros et celui des dépenses des comptes spéciaux de 200 millions d'euros.

Le besoin de financement de l'État pour 2022 s'établit à 297,6 milliards d'euros contre 302,5 milliards d'euros dans le projet de loi de finances adopté en première lecture par l'Assemblée nationale. Outre la diminution du déficit budgétaire, cette réduction s'explique par la baisse du montant estimé au titre de l'amortissement de la dette à moyen et long termes.

Le texte en nouvelle lecture ne voit ni ses équilibres ni ses orientations modifiés. C'est pourquoi la commission des finances propose au Sénat de confirmer son opposition en adoptant la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Vincent Capo-Canellas et Philippe Folliot applaudissent également.)

Mme le président.  - Je salue notre nouvelle collègue, Amel Gacquerre, sénatrice du Pas-de-Calais (celle-ci se lève), qui remplace Catherine Fournier et siège au sein du groupe UC. Je lui souhaite la bienvenue au Sénat. (Applaudissements)

M. Rémi Féraud .  - Après un examen tronqué en première lecture et une CMP non conclusive, nous reprenons la discussion du PLF pour 2022. Le groupe SER regrette le choix de la majorité de ne pas examiner chaque mission. Le manque de respect du Gouvernement vis-à-vis du Parlement ne le justifiait pas.

Qu'avons-nous eu à la place ? Des débats, formels, qui n'ont pas suscité une forte motivation dans les rangs de la majorité... Je suis pourtant sûr que nos collègues Les Républicains avaient des propositions à faire ! Leur désormais candidate propose de faire 76 milliards d'euros d'économies, de baisser encore davantage les impôts de production, de supprimer 150 000 postes de fonctionnaires. Nous aurions bien voulu savoir dans quelles dépenses ils entendent couper... Quel dommage ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Nous aurions pu savoir s'il y avait vraiment une différence entre le groupe Les Républicains et le Gouvernement.

Avec la fin brutale du quoi qu'il en coûte, ce budget renoue avec la politique libérale menée depuis 2017, sans effet sur le pouvoir d'achat ni sur la préparation de l'avenir. Il acte les illusions perdues de la justice sociale, entérine l'explosion des inégalités de revenus et de patrimoine. Plus aucun économiste ne donne crédit à la théorie du ruissellement ! Ce sont les illusions perdues du volontarisme écologique. Le budget de la transition est bien insuffisant et les aides aux entreprises, non conditionnées, sont mal calibrées et mal ciblées !

En matière de pouvoir d'achat, les mesures ne sont pas à la hauteur des besoins alors que les revendications sociales couvent.

Ce sont enfin les illusions perdues de la jeunesse, qui aura été la sacrifiée de la crise. Le revenu d'engagement annoncé est remplacé par des contrats d'engagement au compte-gouttes.

Impéritie, injustice fiscale, insuffisance de la relance, retard dans la transition écologique, déficit élevé : nous sommes opposés à ce budget et nous abstiendrons sur la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Teva Rohfritsch .  - L'aube d'un nouveau quinquennat s'annonce. Le PLF pour 2022 marque positivement un cycle de cinq ans au service des Français. Les performances sont remarquables au sortir d'une crise majeure : le plus fort taux de croissance depuis cinquante ans et 8 % de chômage seulement au quatrième trimestre. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Le Gouvernement nous invite à poursuivre la relance. Baisser les impôts, réindustrialiser, accompagner treize milliards de salariés et deux milliers d'entreprises, alléger le fardeau du coût de la vie, tels en sont les objectifs.

L'État est réengagé et réarmé sur ses missions essentielles, avec plus de sécurité et plus de justice. (Marques d'ironie à droite) Le PLF prévoit 1,5 milliard d'euros supplémentaires pour l'Intérieur et 700 millions d'euros de plus pour la Justice. Ce budget est aussi tourné vers la jeunesse, avec des crédits en hausse de 1,7 milliard d'euros pour l'Éducation nationale. Le service militaire adapté poursuit son développement dynamique... Il y a tant à dire ! C'est notre rôle. Pourquoi avoir arrêté net la discussion en première lecture ? Que répondrez-vous à ceux qui prétendent que le Sénat ne sert à rien ? (MM. Vincent Segouin et Laurent Duplomb s'indignent.)

Tradition de fin de quinquennat ? Nous en avons de plus belles !

À l'heure où nous prenons la présidence du Conseil de l'Union européenne, où la Nouvelle-Calédonie a choisi la France, le Sénat prend des vacances budgétaires.

Comment expliquer à nos concitoyens que nous n'ayons pas cru bon d'examiner des mesures de cohésion sociale ou de transition écologique ?

Ce PLF est pertinent, complet, efficient. Il aurait été suicidaire de voter contre...

M. François Bonhomme.  - Encore un ravi !

M. Teva Rohfritsch.  - Votez en faveur de ce projet de loi de finances : les Français vous regardent ! (« De la dette ! De la dette ! » à droite)

Mme Vanina Paoli-Gagin .  - Sans doute, ce débat aura été assez habituel. Je salue nos collègues du groupe CRCE pour leur constance digne de Sisyphe ; leur motion en première lecture était une figure imposée.

Autre figure imposée : cette motion de la commission en nouvelle lecture. Preuve que le Sénat est une chambre d'opposition politique, pas une assemblée constructive. (Protestations à droite)

J'aurais préféré que nous prenions de la hauteur pour débattre de France 2030 ou des transitions indispensables. Pourquoi avoir renoncé volontairement au débat ? Les élus locaux attendaient que nous soyons leur porte-voix.

J'aurais aimé que nous nous assurions de la réussite de la transition énergétique sur le temps long, du fléchage des financements vers les territoires, en lien avec le tissu économique.

J'aurais aimé débattre de la mobilisation de l'épargne des Français, faire des propositions sur l'immobilier universitaire, sur l'efficacité de la justice, sur la décarbonation de l'économie, sur une meilleure sécurité pour les Français.

Je regrette que le Sénat se soit privé de l'opportunité de débattre. Je voterai contre la motion. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme le président.  - Je déclare clos le scrutin relatif à la Cour de justice de la République.

M. Jean-Baptiste Blanc .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La CMP a échoué, sans surprise.

Le Sénat avait décidé de rejeter le PLF pour alerter l'opinion sur la gravité de la situation de nos finances publiques.

La crise a nécessité l'adoption de nombreuses mesures coûteuses que nous ne contestons pas - nous en avons même soutenues. Mais la situation extrêmement dégradée des finances publiques est aussi due, pour 60 millions d'euros, aux dépenses courantes.

Depuis trois mois, le Président de la République et le Premier ministre ne cessent d'annoncer des chèques en bois qui font exploser le compteur. La plupart de ces mesures ont été intégrées au fil de la discussion budgétaire sans étude d'impact. C'est du jamais vu !

Les montants sont significatifs de ce qu'entend le Gouvernement par « la fin du quoi qu'il en coûte ». En voici quelques-uns : le 2 septembre, 500 millions d'euros ; le 3 septembre, 1 milliard d'euros ; le 6 septembre, 300 millions d'euros ; le 13 septembre, 1 milliard d'euros ; le 30 septembre, 5,9 milliards d'euros ; le 12 octobre, 34 milliards d'euros, avec l'amendement le plus cher de l'histoire, voté les yeux fermés par la majorité de l'Assemblée nationale, sans savoir qui pilotera ces fonds.

M. François Bonhomme.  - Ça donne le tournis !

M. Jean-Baptiste Blanc.  - Pardonnez cette liste fastidieuse. La vérité - désolé de vous décevoir -, c'est que le Père Noël n'existe pas. (« Non ? » amusés)

Le Président de la République voulait faire croire que c'était lui, promettant, en trois mois, 25 milliards d'euros, voire 30 milliards d'euros si le coût du bouclier tarifaire explose. Au total, près de 65 milliards d'euros affecteront le prochain quinquennat, si nous tenons compte des mesures pluriannuelles. Jamais Noël ne fut si faste.

Le Père Noël Macron confond le calendrier de l'Avent avec le calendrier électoral. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il fait payer les cadeaux des parents par la tirelire de leurs enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

En fait, c'est le Père Fouettard !

M. Teva Rohfritsch.  - Il faudrait savoir !

M. Jean-Baptiste Blanc.  - Le groupe Les Républicains votera la question préalable proposée par la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Sophie Taillé-Polian .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le marathon budgétaire aura été économe en efforts. Nous n'avons pas pu examiner la totalité du budget, ce qui est dommageable pour la démocratie.

Les caractéristiques du texte étant les mêmes qu'initialement, le GEST ne peut pas le voter. La dette publique est aggravée en raison de la volonté farouche - partagée par la droite - de baisser les impôts, toujours pour les mêmes.

Le Conseil d'État, dans « l'affaire du siècle », a constaté que l'État ne pourrait pas respecter l'Accord de Paris ; il lui a demandé, dans plusieurs décisions de 2021, de réparer le préjudice écologique. Or ce budget ne répond pas aux défis écologiques. La question est passée sous silence.

Les grandes causes qui avaient été désignées comme les priorités ne sont pas financées, qu'il s'agisse de l'égalité hommes-femmes ou de la fin des violences faites aux femmes. Notre pays manque d'ambition.

Sur le handicap, on parle souvent de la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), mais on pourrait parler du manque criant d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH).

La jeunesse était censée être à l'honneur mais le Gouvernement n'est pas au rendez-vous. Le GEST votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Pascal Savoldelli .  - Ce dernier budget du quinquennat est examiné au moment d'une crise démocratique extrême.

L'inversion du calendrier électoral déresponsabilise les députés. Les citoyens se désintéressent du budget.

Certains sont rivés sur le casting présidentiel, les autres sont en grève politique. Ce débat est une mascarade, les citoyens ne s'y trompent pas.

Ce budget a fini de confirmer les tergiversations du Gouvernement, lequel a déposé un grand nombre d'amendements au dernier moment. Un Président de la République quasi-candidat fait des annonces aux quatre coins du pays et le Parlement est réduit à une chambre d'enregistrement.

Les problèmes immédiats ne sont pas réglés par ces dépenses faites à tour de bras, dans la précipitation.

Le Sénat, écourtant les débats en première lecture par posture politicienne, n'a pas été plus sincère. Il existe un pacte implicite entre Les Républicains et La République en marche.

M. Albéric de Montgolfier.  - Tiens donc !

M. Pascal Savoldelli.  - Ce pacte consiste à ne pas augmenter les recettes - populisme - surtout en direction des plus riches - c'est un choix de classe. (Marques d'approbation à gauche)

Rétablir l'impôt sur la fortune (ISF) est un tabou dans un non-débat. Il faut aller voir les articles non rattachés - ils ne le sont certes pas à la réalité !

Le CRCE proposait de bloquer temporairement les prix de l'électricité. Le Gouvernement le fait, mais annonce un rattrapage. Les Français paieront l'augmentation des prix de l'électricité... sous le prochain président. La parade hypocrite que l'on nous donne à voir est celle d'une prétendue menace constitutionnelle.

Nous entendons la lassitude des Français. Ils n'attendent plus rien de ce Gouvernement. Marcel Proust abonderait, lui qui disait : « Savoir que l'on n'a plus rien à espérer ne veut pas dire que l'on n'a plus rien à attendre ».

Ce budget, ce sont de beaux cadeaux pour quelques-uns, un infime répit pour les factures des autres. Vous accroissez les inégalités.

Avec ce budget d'obstination, vous choisissez le désordre pour mieux régner ; c'est une atteinte à la démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Jean-Michel Arnaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Une impression de « déjà vu » : une fois de plus, nous sommes appelés à voter une question préalable après un échec en CMP.

Le groupe UC aurait voulu examiner la seconde partie du PLF pour y apporter des améliorations, dans un esprit de responsabilité budgétaire. Le creusement des déficits est au coeur de ce budget. Qui paiera cette dette abyssale ? Les plus jeunes !

Le groupe UC a toujours voté les mesures nécessaires pour faire face à l'épidémie et pour soutenir les collectivités territoriales, par exemple la prolongation de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL).

Dans un esprit de sagesse, nous avions proposé des amendements améliorant les rentrées fiscales - comme la réintroduction dans l'assiette de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) du patrimoine polluant luxueux, en faisant de l'IFI un impôt sur la fortune improductive - et réduisant les dépenses.

Alors que la conjoncture économique est rassurante, les recettes supplémentaires ne serviront pas au désendettement mais à la poursuite tacite du « quoi qu'il en coûte ».

Voulons-nous léguer à nos enfants une situation marquée par la folie dépensière de la fin du quinquennat - comme lors du précedent ? Le groupe UC appelle à l'assainissement des comptes publics. C'est impérieux. Nous regrettons l'effervescence dépensière qui prévaut avant chaque élection présidentielle. Une règle d'or devrait être envisagée.

L'État peut s'endetter, mais seulement pour la relance. Chacun devra payer la note de cette faute.

Monsieur le ministre, j'exprime néanmoins une satisfaction personnelle : merci pour votre présence et vos réponses précises. On ne peut pas en dire autant de M. Le Maire, qui a surtout brillé par son absence.

M. Jean-François Husson, rapporteur général.  - C'est un écrivain...

M. François Bonhomme.  - ... porté disparu !

M. Jean-Michel Arnaud.  - Si nous avons regretté la fin prématurée de l'examen du PLF en première lecture, nous voterons pour la question préalable. Le vrai débat budgétaire aura lieu au printemps, lors de l'élection présidentielle. C'est alors qu'un budget de vérité sera présenté aux Français. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. le rapporteur général, Mme Chantal Deseyne et M. Albéric de Montgolfier applaudissent également.)

M. Christian Bilhac .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Au nom du RDSE, le président Jean-Claude Requier a exprimé son désaccord avec le rejet de la première partie en première lecture. Le RDSE aurait voulu poursuivre la discussion budgétaire. Ce genre de pratiques ébranle la confiance de nos électeurs - celle-ci étant pourtant essentielle.

Le bicamérisme ne s'use que si l'on ne s'en sert pas.

L'interruption de la discussion budgétaire a réduit à néant notre espoir d'améliorer le budget, grâce à des mesures résolues : franchise de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour les collectivités territoriales ; offre globale pour les services de téléassistance ; ou augmentation de la dotation d'élu local.

Le budget 2022 nous revient alourdi par les amendements gouvernementaux. Le déficit de la France est abyssal.

Monsieur le ministre, vous revendiquez le remplacement du « quoi qu'il en coûte » par le « quoi qu'il arrive ». Mais l'endettement se maintiendra bien au-delà des 110 % du PIB.

Le RDSE votera contre la question préalable. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; M. Michel Canévet applaudit également.)

Question préalable

Mme le président.  - Motion n°I-1, présentée par M. Husson, au nom de la commission.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement du Sénat ;

Considérant qu'en première lecture, le Sénat a rejeté l'ensemble du projet de loi de finances pour 2022 en n'adoptant pas la première partie du projet de loi ;

Considérant que, par ce rejet, le Sénat a choisi de marquer son opposition à un budget qui ne résulte pas exclusivement de la très grave crise sanitaire et économique que la France traverse mais traduit aussi des choix budgétaires et fiscaux fortement contestables du Gouvernement ;

Considérant qu'ainsi en est-il des nombreuses dépenses nouvelles inscrites dans le texte voté par l'Assemblée nationale en première lecture, poursuivant la politique du « quoi qu'il en coûte », indépendamment même des conséquences de l'épidémie de Covid-19 et conduisant à un niveau de dépenses élevé qui hypothèque sérieusement l'avenir et obère les marges de manoeuvre de la prochaine majorité gouvernementale ;

Considérant qu'il en est de même du choix du Gouvernement de ne pas flécher une partie des recettes supplémentaires attendues de l'embellie économique vers le désendettement, qui atteint pourtant son plus haut niveau historique ;

Considérant par ailleurs que les dépenses primaires des administrations publiques, et plus particulièrement les dépenses pilotables de l'État, hors mesures d'urgence et de relance, ne sont pas maîtrisées ;

Considérant que, si la nouvelle lecture réalisée par l'Assemblée nationale a permis de remédier à certaines insuffisances ou incohérences de mesures adoptées en première lecture, elle ne revient pas sur l'essentiel des mesures et dépenses auxquelles le Sénat s'oppose ;

Considérant que cette nouvelle lecture n'a pas modifié les grands équilibres et les orientations du budget pour 2022 ;

Le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2022, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture n° 290 (2021-2022).

M. Jean-François Husson, rapporteur général .  - Les arguments ont été présentés et toutes les sensibilités ont pu s'exprimer ; je considère cette motion comme défendue.

Monsieur le ministre, je salue la constance de votre présence et votre préoccupation au cours de toutes les discussions budgétaires : précision et écoute, tout le Sénat loue vos qualités.

Nos discussions ont été de grande qualité. Vous nous avez apporté tous les chiffres, et nous avons pu entendre tous les points de vue, étayés par notre expérience du terrain. Nous vous remercions, car c'est l'honneur de la démocratie de confronter ainsi les idées sur le fondement de données précises.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.  - Le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat, pour ne pas subir une énième défaite à l'occasion de ce dernier débat budgétaire. (Sourires)

MM. Roger Karoutchi et Albéric de Montgolfier.  - Très bien !

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.  - Je vous remercie pour nos échanges. Il m'est toujours utile et agréable d'être avec vous. J'aurais souhaité que cette histoire d'amour se termine moins mal, mais ainsi va la démocratie ! (Sourires et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE, ainsi que sur plusieurs travées des groupeUC et Les Républicains)

L'amendement n°I-1 est mis aux voix par scrutin public de droit.

Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°66 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 276
Pour l'adoption 197
Contre   79

La motion n°1 est adoptée.

En conséquence, le projet de loi n'est pas adopté.

La séance est suspendue quelques instants.