Projet de loi de finances pour 2023 (Suite)

Discussion des articles de la seconde partie (Suite)

Sport, jeunesse et vie associative

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La mission « Sport, jeunesse et vie associative » ne comprend cette année aucune mesure nouvelle de grande ampleur, mais les dispositifs existants se voient renforcés par une hausse des crédits de 5,8 %, soit 100 millions d'euros supplémentaires.

La crise actuelle affecte durement le monde sportif et les associations. Un quart des Français auraient renoncé à pratiquer un sport pour une raison de coût. Dans le contexte d'inflation, les associations sont réticentes à augmenter les tarifs. Il faut s'interroger sur l'efficacité des dispositifs d'aide.

Le Pass'Sport est reconduit à hauteur de 100 millions d'euros, mais il pâtit d'un non-recours important : seulement 18,3 % des jeunes éligibles en bénéficient.

L'Agence nationale du sport (ANS) est mieux financée, avec 264,7 millions d'euros. Nous devons instaurer une nouvelle gouvernance du sport, qui ne doit pas être synonyme de désengagement de l'État. De fait, une gouvernance solide est essentielle alors que les Jeux olympiques et paralympiques se profilent. Compte tenu de l'inflation sur les matières premières, la société de livraison des ouvrages olympiques, Solideo, a annoncé 143 millions d'euros de surcoûts, dont les deux tiers seront pris en charge par l'État. Plus largement, les financements privés des Jeux ne sont pas pleinement assurés : quid de la garantie de l'État ? (M. Pierre Ouzoulias renchérit.)

Le compte d'engagement citoyen ne tient pas ses promesses : seuls 3 192 dossiers ont été validés sur 400 000 personnes éligibles.

Le service national universel (SNU) continue de monter en charge, à 140 millions d'euros : pour 2023, l'objectif est de 64 000 jeunes, contre 50 000 cette année. Mais la progression est plus lente que les objectifs annoncés. Les contraintes de ce dispositif ne sont pas compatibles avec une généralisation rapide, malgré l'engagement des équipes.

Quant au service civique, il bénéficie de 518,8 millions d'euros, soit 20 millions d'euros de plus qu'en 2022. Mais les financements baisseront au total avec l'arrêt des mesures du plan de relance. Au lieu de ce stop-and-go, il faudrait une montée en puissance progressive des crédits.

La commission des finances recommande l'adoption sans modification des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDSE)

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture .  - À court terme, le monde du sport semble avoir résisté à la crise sanitaire. Le PLF 2023 reconduit le Pass'Sport et le plan pour les équipements de proximité, dispositifs utiles. L'Insep gagne cinq ETP, et l'Agence contre le dopage voit ses crédits augmenter. Saluons la hausse de 3 % des crédits consacrés au sport, même si elle est inférieure à l'inflation.

À moyen terme, toutefois, les nuages s'amoncellent à l'horizon : les crédits pour l'isolation thermique des équipements sportifs ne sont pas reconduits, et la programmation 2023-2027 révèle une baisse programmée des crédits au sport après les Jeux olympiques. Le coût de ces derniers pourrait d'ailleurs croître avec l'inflation. Selon Solideo, 150 millions d'euros supplémentaires seront nécessaires, dont un tiers à la charge des collectivités territoriales. Les inquiétudes se concentrent sur le Comité d'organisation des Jeux, qui peine à boucler son budget. Ce n'est pas aux Français d'assumer ces surcoûts : la transparence doit être totale, et il faut rechercher des économies.

Au-delà du rendez-vous olympique, la question de l'avenir de notre ambition pour le sport est posée. Le financement du sport dans les années qui viennent passe par trois priorités : attribution de la totalité du produit des trois taxes affectées ; grand plan de rénovation de nos équipements ; territorialisation de la gouvernance de l'ANS.

Compte tenu de ces nombreuses interrogations, la commission de la culture a émis un avis de sagesse sur les crédits des programmes 219 et 350. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Alain Marc applaudit également.) La commission de la culture note la hausse de 65 millions d'euros des crédits de la mission, liée notamment aux 30 millions d'euros supplémentaires pour le SNU.

Ce dispositif peine pourtant à atteindre ses objectifs, malgré vos efforts, madame la ministre ; 32 000 volontaires seulement cette année, sur les 50 000 annoncés. Le recours massif aux contrats d'engagement éducatif n'est pas adapté au dispositif, et trop peu de jeunes réalisent la phase 2. Des doutes persistent et un débat s'impose.

Les crédits du service civique augmentent de 20 millions d'euros, une hausse bienvenue mais qui ne compensera pas l'arrêt des crédits ouverts au titre du plan de relance.

L'effort pour la jeunesse et l'éducation populaire n'occulte pas la situation inquiétante du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (Bafa), avec une baisse du nombre de candidats, alors que l'accueil collectif de mineurs est en difficulté.

Enfin, plus que jamais, il faut renforcer le soutien aux associations. L'activité bénévole reste trop peu valorisée et le soutien mal connu et peu visible. Je regrette donc que le montant alloué au fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) stagne et ne réponde pas aux besoins.

La commission de la culture s'abstiendra sur le programme 173. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Alain Marc .  - Le budget de la mission augmente de 5,8 %, principalement en faveur de l'engagement des jeunes, de l'équipement sportif et des Jeux de 2024.

Les crédits au sport atteignent 818 millions d'euros : je salue les 100 millions d'euros nouveaux engagés pour les équipements de proximité et la reconduction du Pass'Sport, étendu aux jeunes boursiers et bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH). Mais les crédits restent trop peu consommés : le taux de recours n'est que de 18 %, il faut donc le promouvoir.

La crise a, dès à présent, des conséquences sur le secteur. Les crédits pour la rénovation énergétique des bâtiments sportifs n'ont pas été reconduits, ce qui est regrettable.

Les crédits pour les Jeux olympiques atteignent 494 millions d'euros. Le prix des matières premières représente un risque ; nous serons attentifs aux dépassements, ainsi qu'au respect du calendrier.

Notre groupe est favorable à la prise en charge d'activités sportives par la solidarité nationale. Le programme « Maisons sport-santé », doté de 4 millions d'euros, va dans le bon sens.

Le soutien public aux associations est essentiel, je regrette la baisse de crédits alors que les petites structures sont fragilisées. Après le repli sur soi lié au covid, le monde associatif a besoin d'un nouveau souffle.

Je salue la dynamique du service civique, avec une augmentation de 20 millions d'euros, mais la baisse drastique des candidatures au Bafa nous inquiète.

Enfin, le service universel devait accueillir 400 000 jeunes en 2022. Or seules 50 000 places étaient disponibles, et toutes n'ont pas été pourvues, malgré la qualité de l'encadrement.

Il est essentiel d'assurer des retombées concrètes des Jeux olympiques sur tout le territoire. Rehaussons le niveau sportif des territoires pour faire de la France une nation sportive avant, pendant et après les Jeux.

Le groupe INDEP votera les crédits, tout en appelant à plus d'ambition.

M. Thomas Dossus .  - De toutes les missions budgétaires, celle-ci est la plus fourre-tout... Ce n'est pas l'effet du hasard, mais d'une volonté politique d'empêcher une éducation populaire tournée vers l'émancipation.

Le service national universel (SNU) l'illustre : coûteux et non évalué, il est construit sur une nostalgie surannée du service militaire, conçu pour mettre la jeunesse au garde-à-vous. (Mme la ministre le conteste.) Les scandales se multiplient : malaises de jeunes en plein soleil ou stages de menottage, par exemple.

Nous relayons les craintes de mise au pas des associations les plus militantes. Le contrat d'engagement républicain est contraire aux libertés associatives.

Le sport, lui aussi, est politique. Le Pass'Sport est bienvenu. La mobilisation du fonds vert devrait nous rassurer, mais tous les ministres entendent puiser dans ce dispositif, ce qui nous inquiète plutôt... Par ailleurs, la présentation du budget ne mentionne pas le climat : on le comprend, avec la présence de la ministre des sports à la Coupe du monde de football au Qatar, aberration et bombe climatiques.

Le changement climatique bouleversera le sport. Pourtant, il n'est pas prévu d'en débattre... Nous défendrons des amendements sur ces enjeux.

Le budget des Jeux olympiques dérape, mais c'était prévu de longue date. L'annulation des festivals à l'été 2024 insécurise les entreprises culturelles. N'opposons pas sport et culture ! Il faut mieux dimensionner le dispositif de sécurité pour une harmonie entre les festivals et les Jeux.

Le GEST s'abstiendra sur les crédits de cette mission.

M. Didier Rambaud .  - À dix mois de la Coupe du monde de rugby et à vingt mois des Jeux olympiques, l'État accentue l'effort en faveur du sport, avec 1,82 million d'euros de crédits pour la mission, en hausse de 5,1 %.

Le Pass'Sport porte ses fruits pour l'accès des jeunes à la pratique sportive : je me réjouis de son extension aux étudiants boursiers et aux jeunes bénéficiaires de l'AAH. Je salue aussi les parcours sport-santé, déployés sur les territoires, et les 200 millions d'euros sur deux ans pour les équipements sportifs de proximité. Nous visons trois millions de nouveaux pratiquants d'ici à 2024.

Les équipements doivent répondre à deux objectifs : simplicité et proximité. Madame la ministre, le zonage exclut les territoires qui ne sont situés ni en zone de revitalisation rurale (ZRR) ni dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV). Ne faudrait-il pas le revoir ?

Le Gouvernement s'engage pour la jeunesse. Le SNU mérite notre attention : pourquoi tous ces amendements pour en réduire les moyens ? Nous ne dépenserons jamais assez pour l'engagement de notre jeunesse !

Enfin, les crédits du programme dédié aux Jeux olympiques diminuent de 0,7 %, preuve que la trajectoire est maîtrisée. Le coût supplémentaire de 400 millions d'euros est lié à la crise énergétique et au renforcement de la cybersécurité et des mesures entourant la cérémonie d'ouverture, qui s'annonce historique.

L'enveloppe prévisionnelle des jeux atteint 8,7 milliards d'euros. Je rappelle que les Jeux de Londres ont coûté plus de 10 milliards d'euros, ceux de Rio plus de 13 milliards d'euros...

Le groupe RDPI votera ces crédits encourageant le sport. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Sabine Van Heghe .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Merci aux deux rapporteurs pour avis pour la qualité de leur travail.

Par rapport à 2022, la mission affiche une hausse de 5,8 % en crédits de paiement et une baisse de 10,8 % en autorisations d'engagement. Les autorisations d'engagement du programme 219 baissent de 22 %. Au total, les moyens prévus sont donc en baisse, de 200 millions d'euros.

En 2023, le développement du sport de haut niveau ne progresse que de 2 % ; c'est un mauvais signal. Le dispositif Pass'Sport, soutenu de longue date par M. Lozach et l'ensemble de notre groupe, bénéficie de 100 millions d'euros, comme en 2022. Notons la sous-consommation des crédits budgétaires, alors que l'état physique des jeunes se dégrade.

Les contrôles antidopage devraient se multiplier : je regrette la baisse de la subvention à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).

Pour 2023, le produit des trois taxes est évalué à 487 millions d'euros. Nous proposons de déplafonner ces taxes, comme M.  Lozach le réclame depuis des années.

Quelle est l'évolution globale du budget des Jeux olympiques et paralympiques, initiée au début à 6,6 milliards d'euros et avec un objectif annoncé à 8 milliards ? Les Jeux financent-ils toujours les Jeux ? Nous craignons un affaiblissement des crédits alloués au sport à l'issue des Jeux. Ils ne doivent pas être l'arbre qui cache la forêt.

Le programme « Jeunesse et vie associative » augmente de 8,4 %. Le SNU voit ses crédits augmenter de 30 millions d'euros. Les 140 millions d'euros de crédits totaux sont démesurés pour un dispositif peu attractif : faut-il le maintenir ? En 2022, 800 000 jeunes devaient effectuer un SNU, on en est loin...

En revanche, la crise sanitaire a montré l'intérêt que les jeunes portent au service civique : pourquoi ne pas le renforcer ?

Les associations ont subi une baisse drastique des contrats aidés, la suppression de la réserve parlementaire puis la crise sanitaire.

Je regrette la baisse de la dotation aux métiers de l'animation, alors que la pénurie d'animateurs est préjudiciable à la vie associative.

Les crédits de la mission enregistrent une hausse trop modique. En réalité, ils baisseront compte tenu de la non reconduction des crédits de relance. En conséquence, le groupe SER s'associe à l'avis des rapporteurs pour avis (M. Laurent Lafon rit) et s'abstiendra sur les crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Pierre Ouzoulias .  - Une grande partie de votre budget est consacrée aux Jeux olympiques et paralympiques. Pourtant, de fortes incertitudes demeurent sur leur organisation.

Je salue l'esprit de responsabilité des collectivités territoriales qui ont décidé de prendre en charge une part des surcoûts, notamment sur le transport. À 610 jours de l'ouverture des Jeux, les engagements en matière de transport ne seront pas tenus : une seule nouvelle ligne sera disponible et 1 400 bus supplémentaires seront mobilisés sur des voies spécifiques, aggravant la pollution, les embarras de la circulation et, plus largement, la vie quotidienne des Franciliens. À l'avenir, c'est l'acceptabilité de ces grandes manifestations qui est en jeu.

Les sites des jeux ont été installés à proximité des lignes que l'État s'était engagé à livrer à temps. Le 19 décembre 2018, Jean Castex avait déclaré devant une commission du Sénat : « Je suis peut-être vieux jeu, mais lorsqu'un Président de la République et un Premier ministre engagent la parole de la France à l'international, j'ai tendance à penser qu'il faut l'honorer ».

Par la loi du 21 février 2022, vous avez transféré à Île-de-France Mobilités (IDFM) la gestion des 1 400 bus. Or il manque déjà 1 800 chauffeurs... Comment IDFM financera-t-elle ce surcoût, alors qu'elle est en quasi-cessation de paiement ?

Les Jeux devaient financer les Jeux, mais ce sont les collectivités territoriales qui prennent en charge les surcoûts et pallient les défaillances. Vous avez choisi de maintenir les plafonds des taxes affectées à l'ANS.

Je regrette que ce débat budgétaire n'ait pas été l'occasion d'évaluer plus précisément le coût des errements de l'État. Nous voterons contre les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER)

M. Claude Kern .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Court terme ou long terme, performance haut niveau ou sport pour tous : quel que soit le prisme adopté, le budget général augmente de 5,8 %, un effort inédit. Nous saluons aussi le retour d'un ministère des sports de plein exercice.

Nous attendons que l'effort se poursuive après les Jeux olympiques et paralympiques, en faveur du sport comme vecteur de santé et d'insertion. Entre 2023 et 2025, les crédits baisseraient... Une grande nation sportive suppose des crédits stables. Or le budget pèche par un manque de dynamique de long terme.

Certes, l'ANS percevra 11 millions d'euros supplémentaires, mais les politiques publiques doivent être davantage transversales. Le volet territorial doit être renforcé. L'ANS recevra 170 millions d'euros de taxes affectées, mais leur rendement diminuera encore en 2023. Il faut agir sur le plafond de ces taxes. Nous regrettons votre obstination à ne pas vouloir que le sport finance le sport.

Au Sénat, nous savons que les collectivités territoriales sont les premiers financeurs du sport. Une nouvelle enveloppe de 100 millions d'euros est prévue à cet égard. Toutefois, il manque un véritable engagement de l'État : les collectivités territoriales ne peuvent pas tout.

Les crédits en faveur du sport pour tous déçoivent, alors que les associations doivent se développer. Des efforts auraient été utiles. Le maillage des maisons sport santé est-il suffisant ? La pratique du sport est un véritable enjeu de santé publique.

Le programme « Jeunesse et vie associative » voit les crédits en faveur des associations stagner. Certes, le FDVA est maintenu. Le SNU et le service civique oeuvrent-ils réellement à une meilleure situation pour nos jeunes ?

Le programme JOP nous oblige. En raison de l'inflation, évitons tout dérapage, notamment pour le Comité d'organisation des jeux. Les montants devront être actualisés, à l'évidence. L'équilibre du modèle doit être repensé et des arbitrages effectués. Cet événement, festif et qui doit faire rayonner notre pays, ne saurait se transformer en addition douloureuse pour les Français.

Le groupe UC votera pour ces crédits. Toutefois, nous devons engager une course de fond : encore un effort, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. Bernard Fialaire .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) L'activité physique est un outil indispensable contre le surpoids et pour l'insertion scolaire. Nous nous réjouissons des trente minutes quotidiennes prévues pour les écoliers, comme des deux heures hebdomadaires supplémentaires au collège.

Le sport favorise l'épanouissement et le goût de l'effort. Il apprend la persévérance, ainsi que le respect des règles et de son adversaire. C'est un excellent vecteur de fraternité, nécessaire à la cohésion sociale. Soutenons le sport scolaire et universitaire plutôt que le sport business.

Le programme « Jeunesse et vie associative » doit être abondé. Éric Gold avait déposé une proposition de loi visant à accroître le soutien financier aux associations, dans un contexte difficile pour elles.

Je prône aussi un soutien accru à la formation et à l'animation des jeunes. Le secteur fait face à des difficultés de recrutement : dans une récente question écrite, madame la ministre, j'ai proposé de réduire temporairement les contraintes pour l'accueil des jeunes.

Je salue votre plan dégageant 5 millions d'euros d'aides pour le Bafa : ce cap doit être maintenu.

Levons les cloisons entre l'école, la maison et la rue. L'école ouverte procède de cette idée, en renforçant les liens avec les associations, en intensifiant les liens avec les familles. Cette vision d'ensemble doit présider à notre action.

M. Michel Savin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le PLF pour 2023 prévoit une hausse des crédits consacrés au sport, principalement en raison des Jeux olympiques et paralympiques. Reste que le sport ne représente que 0,3 % du budget général. L'augmentation de 2,6 % des crédits est bienvenue, mais inférieure à l'inflation.

Reconnaissons des évolutions positives : stabilisation des postes de CPS, cinq postes rendus à l'Insep, ouverture des équipements de proximité à tous les territoires, au-delà des seuls ZRR et QPV.

Mais le Gouvernement ne fait que limiter la casse. Les fédérations et associations sont inquiètes, en raison de la modification des habitudes des usagers. Les collectivités territoriales s'inquiètent du coût de l'énergie. Certains de leurs équipements sont vétustes : madame la ministre, aidez les collectivités territoriales ! Je pense aux piscines publiques : il faut un plan Marshall pour les rénover. Une loi de programmation répondrait aux enjeux.

Nous avons besoin de stabilité. Les crédits de paiement ne devront pas baisser en 2024 et 2025 : quel sera l'héritage des jeux si les Français n'ont pas accès aux équipements ? Sommes-nous en train d'assister à un petit sursaut avant de tomber de haut ? Nous craignons une violente gueule de bois après les jeux.

Le Gouvernement n'a pas pris que des mauvaises mesures : il en a aussi oublié certaines. Ainsi, le sport santé est le parent pauvre de nos politiques publiques. Pourtant, Nice, Strasbourg, Ville-d'Avray ou Dunkerque ont mené des expériences intéressantes en la matière.

L'objectif des 2 millions de Pass'Sport sera-t-il tenu ? Nous sommes tout aussi sceptiques sur la concrétisation des trente minutes d'activité physique par jour à l'école. Enfin, nous sommes perplexes sur l'intérêt des conférences territoriales.

Non, le Président de la République ne peut pas déclarer le sport comme grande cause nationale en 2023 et ne lui accorder que 0,3 % du budget de l'État !

Madame la ministre, nous avons la volonté de vous soutenir si vous mettez en oeuvre les évolutions attendues par les acteurs du sport français. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Patrick Kanner applaudit également.)

M. Cédric Vial .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Madame la ministre, je vous présente mes excuses : je vous apprécie et je crois en la sincérité de votre engagement, mais je vais vous dire des choses désagréables...

Vous êtes une croyante sincère : dommage que vous ne soyez pas aussi une pratiquante.

Comme l'indique la Cour des comptes, le programme « Jeunesse et vie associative » est en trompe-l'oeil. La jeunesse, c'est notre avenir à tous. Or elle ne va pas bien : elle est exposée à la délinquance et perd ses repères. Vous vous contentez de proposer quelques dispositifs. Mais ils sont peu efficaces et ne font pas une politique.

Le compte engagement citoyen ne fonctionne pas. Le fonds pour le développement de la vie associative conduit à retirer un outil aux élus pour le confier à l'administration : drôle de conception...

Lors du PLF 2021, vous affichiez une grande ambition pour le service civique : passer à 245 000 jeunes. Je vous avais prévenue que ce serait très difficile, mais vous aviez répondu : j'y crois, on va y arriver. Résultat : aucun des 100 000 services civiques supplémentaires prévus n'a été réalisé.

Pourtant, plus de 201 millions d'euros du plan de relance ont été versés à l'Agence du service civique, dont la trésorerie s'élève aujourd'hui à 288 millions d'euros : c'est de l'argent qui serait mieux employé ailleurs, c'est un tour de passe-passe à la Gérard Majax -  pour reprendre une référence chère au Président de la République...

Cette année, nous devions arriver à la généralisation du SNU, mais on en est loin ! Votre objectif est de 64 000 contrats, le double des 32 000 participants de 2022 -  alors que votre objectif était de 50 000. Nouveau tour de passe-passe : sans prendre en compte le reliquat que ce faible succès a généré, vous demandez les 40 millions d'euros nécessaires au financement de ces 64 000 participants. Ce n'est plus de la prestidigitation mais de la grande illusion : ce n'est plus Gérard Majax, mais David Copperfield !

Si l'on ajoute les 2 milliards d'euros de dépenses fiscales sans aucune évaluation de leur efficience, nous sommes loin de ce que la Nation peut attendre du Gouvernement. Nous nous abstiendrons sur l'ensemble de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Patrick Kanner applaudit également.)

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques .  - Merci pour vos interventions, qui démontrent votre soutien de long terme à la cause du sport.

Que retenir de ce budget ? Un niveau inédit : le programme « Sport » confirme le soutien de l'État, avec une hausse de 3 %. Sur le moyen terme, ce programme connaît une progression à périmètre constant de 50 % depuis le début du quinquennat précédent. Les moyens consacrés aux Jeux olympiques et paralympiques sont maîtrisés et conformes à nos engagements : 295 millions d'euros de crédits engagés, dont 60 millions d'euros de prise en charge de l'inflation pour la Solideo.

Les moyens humains du ministère sont renforcés : cinq emplois à l'Insep, stabilisation des effectifs de conseillers sportifs à 1 442 ETP, 20 ETP supplémentaires dans les services déconcentrés pour lutter contre les violences sexuelles et sexistes et contre la radicalisation.

Les communes sont le socle de notre modèle sportif. Le plan 5 000 terrains de sport est doté de 100 millions d'euros ; le Pass'Sport est abondé du même montant. Nous menons, avec les collectivités, le combat pour la rénovation thermique des bâtiments à travers le fonds vert.

L'État sera au rendez-vous de l'avenir, pour que le budget des Jeux olympiques et paralympiques soit maîtrisé lors de sa révision par le Conseil d'administration du 12 décembre prochain.

Nous ancrons cet effort dans le long terme, pour développer la pratique du sport universitaire, et également dans le champ régalien. (M. Didier Rambaud applaudit.)

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale et solidaire et de la vie associative .  - Un tiers des Français sont bénévoles ; l'État se doit d'être à leur côté.

La Première ministre m'a demandé de simplifier et valoriser la vie associative. Il faut cesser de noyer les bénévoles sous la paperasse. Nous consacrons 1,3 million d'euros à l'extension du guide associatif à trois régions supplémentaires, en attendant sa généralisation en 2024. Le site Data-Asso voit ses crédits doublés, à 1,5 million d'euros.

Concernant la valorisation du monde associatif, le FDVA voit son montant maintenu à 50 millions d'euros. La baisse du compte engagement citoyen (CEC) s'explique par les non-recours. Il faut communiquer davantage pour permettre aux bénévoles de valoriser leur engagement jusqu'à 240 euros par an sur leur compte personnel de formation (CPF).

Concernant le Tour de France des bénévoles et le contrat d'engagement républicain, je répondrai aux amendements. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - Autonomie, cohésion, service civique, sport, mixité, patriotisme, cérémonies mémorielles, laïcité, valeurs de la République, éducation populaire, engagement, bénévolat : quel est le point commun de ces politiques d'engagement ? Léo Lagrange, Ligue de l'enseignement, cadets de nos gendarmeries, jeunes sapeurs-pompiers, conseils municipaux des jeunes (M. Michel Savin renchérit), associations, souvenir français, élus, services de l'État... Ce sont les acteurs et les partenaires du service national universel.

M. Patrick Kanner.  - Il y en a trop !

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État.  - J'entends les doutes. Mais j'ai vu ces jeunes, qui, loin des caricatures de M. Dossus (M. Thomas Dossus proteste), sont des graines de citoyens. Le SNU doit s'inscrire dans un temps long.

Cela commence à l'école, et pendant les cérémonies devant nos monuments aux morts. Vous appelez de vos voeux la continuité éducative. Le SNU est une opportunité : c'est là que se rencontrent les jeunes de toute la France, de Montauban à Aurillac en passant par Guéret. Il n'est évidemment pas l'alpha et l'oméga des politiques de jeunesse. Mais au moment de la montée des dangers et des fractures au sein de notre jeunesse, faisons en sorte que les jeunes, loin des caricatures, puissent se rencontrer, qu'ils soient fiers de lever un drapeau !

Le débat est indispensable. Je suis à la disposition de vos commissions pour entrer dans le détail du dispositif. Il y a une crise de l'animation et du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (Bafa), car l'éducation populaire a malheureusement vécu une crise. Renforçons le plan Mercredi et les vacances apprenantes. Nous ne déshabillons pas Pierre pour habiller Paul : tous les budgets ont augmenté, avec 30 millions d'euros pour le service civique, 20 millions d'euros pour le SNU.

Il faut revoir en profondeur ce contrat, qui n'est pas adapté. Le Président de la République m'a demandé de préparer une généralisation du SNU. Il faut une évaluation et un débat devant le Parlement.

En 2019, 2 000 jeunes ; en 2021, 15 000 : en 2022, 32 000 ; en 2023, nous visons 64 000. Nous avons revu nos ambitions à la baisse pour ne pas aller à la course à l'échalote, mais viser le qualitatif ! (M. Thomas Dossus s'exclame.)

Construisons ce parcours de continuité pédagogique avec l'école pour tracer un chemin à cette jeunesse engagée. (M. Didier Rambaud applaudit.)

Examen des crédits de la mission

Article 27 - État B

M. le président.  - Amendement n°II-261, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Créer le programme :

Fonds de soutien à l'éducation populaire

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

 (en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

140 047 188

 

140 047 188

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

Fonds de soutien à l'éducation populaire

140 047 188

 

140 047 188

 

TOTAL

140 047 188

140 047 188

140 047 188

140 047 188

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Gagnons du temps et faisons des économies : nous le savons, le SNU ne sera pas généralisé ! Finissons-en avec cette vision passéiste et autoritaire de l'engagement. La jeunesse ne vient pas au SNU, mais vous augmentez les capacités d'accueil sans avoir rempli vos objectifs !

Qu'est-ce que les jeunes pourraient en retirer, sinon une vie commune qu'ils peuvent trouver ailleurs, dans une éducation populaire qui questionne les liens de domination, crée une politique commune, où les jeunes font société en s'émancipant ? Je vous propose de transférer les crédits du SNU vers l'éducation populaire.

M. le président.  - Amendement n°II-316, présenté par M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

140 047 188

140 047 188

Jeunesse et vie associativedont titre 2

140 047 188

140 047 188

Jeux olympiques et paralympiques 2024

TOTAL

140 047 188

140 047 188

140 047 188

140 047 188

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - L'expérimentation ne fonctionne pas, arrêtons-la ! Votre enthousiasme me rappelle deux citations des Shadoks : « Plus ça rate et plus on a de chance que ça marche » et « Il vaut mieux pomper même s'il ne se passe rien que de risquer qu'il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas. »

Vous parlez de continuum pédagogique, mais ne travaillez pas avec les collectivités territoriales. Votre système centralisé du passe Culture ne prend pas assez en compte le terrain.

M. le président.  - Amendement n°II-263, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Créer le programme :

Fonds d'investissement pour la sobriété énergétique des bâtiments sportifs

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

100 000 000

 

100 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

Fonds d'investissement pour la sobriété énergétique des bâtiments sportifs

100 000 000

 

100 000 000

 

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Comme toutes les activités humaines, le sport a sa part de responsabilité dans le réchauffement climatique et en subit les conséquences. La plupart des salles de sport ont été construites vite et mal ; elles sont souvent des passoires énergétiques, et ne répondent plus aux enjeux de l'époque. Un effort massif de rénovation doit être mené. Quelques crédits de l'ANS sont fléchés pour les installations, mais nulle part ne sont évoqués les milliers de gymnases devant être rénovés. Nous proposons un fonds de 100 millions d'euros pour investir massivement. Ce montant est réclamé par l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes).

M. le président.  - Amendement n°II-344, présenté par M. Lozach.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

70 400 000

 

70 400 000

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

70 400 000

 

70 400 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

70 400 000

70 400 000

70 400 000

70 400 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Jacques Lozach.  - Cet amendement déplafonne la part affectée à l'ANS du prélèvement sur les paris sportifs en ligne. Les deux tiers des recettes des taxes affectées échappent au sport. Nous imaginons mal que le budget de la défense dépende totalement du loto ! Mais sans sport, pas de paris en ligne, et sans associations, pas de sport. Affectons donc au sport la totalité de la taxe.

M. le président.  - Amendement n°II-321, présenté par M. Lozach.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

14 400 000

 

14 400 000

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

14 400 000

 

14 400 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

14 400 000

14 400 000

14 400 000

14 400 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Jacques Lozach.  - Nous regrettons la baisse du produit de la taxe Buffet sur les droits télévisés, symbole de la solidarité entre le sport professionnel et le monde amateur, fruit de l'affaire Mediapro. Avec cet amendement d'appel, nous espérons des précisions sur l'enveloppe de compensation de 14,4 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-264, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

 (en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

2 200 000 

 

2 200 000 

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

2 200 000 

 

2 200 000 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

TOTAL

2 200 000 

2 200 000 

2 200 000 

2 200 000 

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Le sport n'est pas épargné par les violences sexistes et sexuelles. Plusieurs affaires récentes ont jeté une lumière crue sur des violences inacceptables. En Seine-Saint-Denis, quatre encadrants sur dix ont constaté des violences et s'estiment insuffisamment formés pour orienter les victimes. Le guide en ligne du Gouvernement est une réponse bien légère. Il faut un budget, de la formation et des cellules d'écoute, afin d'accompagner correctement les victimes. Les bonnes intentions ne suffisent pas !

M. le président.  - Amendement n°II-262, présenté par MM. Dossus, Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Créer le programme :

Observatoire national de l'adaptation du sport au changement climatique

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

 (en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

2 000 000

 

2 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

 

 

 

Observatoire national de l'adaptation du sport au changement climatique

2 000 000

 

2 000 000

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - En 2021, WWF, avec le soutien du ministère des sports, a publié un rapport sur les menaces que le réchauffement climatique fait peser sur le sport : 24 jours de pratique possibles en moins si la température augmente de deux degrés. Les pratiques de ski et nautiques sont menacées. On ne pratique pas un sport collectif en plein air de la même manière quand il fait 25 ou 40 degrés ! Il faut bien sûr lutter contre les causes, mais aussi affronter les effets.

Un observatoire de l'adaptation du sport au réchauffement permettrait d'anticiper.

M. le président.  - Amendement n°II-315, présenté par M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Sportdont titre 2

1 500 000

1 500 000

Jeunesse et vie associativedont titre 2

1 500 000

1 500 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - Nous proposons de doubler les crédits supplémentaires à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD). Le Sénat doit se pencher sur la culture du dopage dans le sport amateur, mal cernée, mais catastrophique en termes d'éthique et de santé. Des jeunes commencent à prendre des produits et ne peuvent plus s'en passer. Il faut des initiatives fortes.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Retrait des amendements nosII-261 et II-316 : le SNU a des défauts indéniables et il sera difficile de le généraliser, mais couper tous ses crédits semble extrême. Je mène une mission de contrôle budgétaire, pour laquelle je me suis déplacé : je n'ai pas vu la même chose que vous, monsieur Dossus. La présence de l'éducation populaire est forte, et il y a un vrai sens de l'engagement. Il est vrai que des questions se posent sur les missions d'intérêt général qui sont confiées aux jeunes.

Je partage l'objectif de rénovation des bâtiments de l'amendement n°II-263, mais cette ouverture de crédits aurait sa place dans la mission écologie. Retrait ?

Même avis sur les amendements d'appel nosII-344 et II-321 : le Sénat a déjà rejeté le déplafonnement de la taxe sur les paris sportifs et la taxe Buffet est compensée par le PLF.

Les besoins en formation pour la lutte contre les violences sexistes et sexuelles justifient les crédits prévus par l'amendement n°II-264 : Sagesse.

Retrait de l'amendement n°II-262 : je partage l'objectif de renforcer les exigences environnementales, mais cet observatoire n'est pas la bonne réponse.

Même avis sur l'amendement n°II-315 : la Coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques et paralympiques impliquent de renforcer les moyens de la lutte antidopage, mais les crédits de l'ANLD augmentent depuis 2020 et ce PLF prévoit encore une hausse. Il faudra veiller à ce que son installation à Paris Saclay se passe bien.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-261. Monsieur Dossus : quand il y a une volonté, il y a un chemin - et le chemin est en cours.

J'entends le besoin de travailler davantage avec les collectivités territoriales, monsieur Ouzoulias. C'est pourquoi nous nous appuyons sur le comité de filière animation. J'ai besoin de la participation des parlementaires au débat qui doit faire un état des lieux factuel avant le déploiement du SNU.

Avis défavorable à l'amendement n°II-316

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre.  - L'amendement n°II-263 propose un fonds d'investissement pour la sobriété des bâtiments, abondé par les crédits du SNU.

La rénovation énergétique est au coeur du plan de sobriété énergétique que j'ai présenté le 13 octobre dernier. L'ANS et la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) financent le dispositif, renforcé par le fonds vert. J'ai veillé à l'éligibilité des équipements sportifs à ce dispositif, sous la responsabilité des préfets. Avis défavorable.

Nous sommes trop attachés au SNU pour accepter le transfert de ce programme vers le programme « Sport », prévu par l'amendement n°II-344. En outre, les relèvements de plafonds d'affection de la taxe ont déjà été rejetés par le Sénat. Enfin, la promotion du sport est suffisamment dotée. Avis défavorable.

L'amendement n°II-321 transfère des budgets du SNU pour compenser la baisse du rendement de la taxe Buffet, mais celle-ci est liée à la défaillance de Mediapro, elle a déjà été compensée en gestion en 2022 et l'est dans le budget 2023 pour 14,4 millions d'euros. Je vous sais attachés, comme moi, à la solidarité entre les sports professionnel et amateur : elle est préservée. Retrait.

En cette journée de lutte contre les violences faites aux femmes, je ne puis que déplorer la persistance de ce fléau dans le monde sportif. Soyez assurés que nous agissons : la loi du 2 mars 2022 rend obligatoire un enseignement dans tous les programmes de formation, et nous ferons évoluer le cadre réglementaire de l'habilitation des organismes de formation. Les contrats de délégation aux fédérations comporteront des engagements. En outre, nous finançons des associations sous notre tutelle, et je prendrai des mesures contre les fédérations qui ne respectent pas nos principes. L'utilisation de la plateforme Signal Sports progresse. Enfin, je rappelle que 20 ETP supplémentaires seront mobilisés dans les enquêtes administratives. Avis défavorable à l'amendement n°II-264.

La transition écologique est une priorité et a fait l'objet d'une concertation approfondie à l'occasion de la présentation du plan de sobriété, auquel sont adjoints la charte des quinze engagements écoresponsables et, en lien avec Christophe Béchu, un plan d'adaptation du sport au changement climatique. L'éventuelle création d'un observatoire doit s'inscrire dans ces travaux, qui rendront leurs conclusions en mai 2023.

M. le président. - Notre temps de délibération sur cette mission étant limité, je vous serai reconnaissant d'être plus concise dans vos avis...

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-262.

Enfin, l'AFLD a vu son budget augmenter de 37 % en quatre ans, et l'effort se poursuit en 2023. (Marques d'impatience à gauche) Un effort supplémentaire en 2023 portera ses crédits à plus de 10 millions d'euros, lui permettant de procéder à 12 000 contrôles par an. En matière de prévention du dopage,...

M. le président.  - Quel est l'avis ?

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre.  - Avis défavorable sur l'amendement n°II-315.

Mme Laurence Rossignol.  - Quelle surprise !

M. Patrick Kanner.  - Sauf le respect dû aux ministres, le temps de discussion est contraint. Soyons solidaires : nous sommes ici au Sénat, et je vous remercie de respecter la sérénité de notre travail. (Applaudissements sur plusieurs travées)

M. Michel Canévet.  - Très bien !

M. Michel Savin.  - L'ANS, qui finance le sport de proximité, bénéficie de trois taxes affectées. L'une d'elles, la taxe Buffet, dont le rendement prévisionnel était de 74 millions d'euros, a vu celui-ci baisser à 59,7 millions d'euros. Le Gouvernement envisageait de relever le plafond des deux autres taxes. (M. Pierre Ouzoulias renchérit.)

C'est finalement une compensation budgétaire de 14,4 millions d'euros qui sera versée. En outre, 13 millions d'euros ont été transférés du Pass'Sport à l'ANS : ce décalage entre les missions et les moyens de cette agence fait peser un risque, dans la mesure où tout dépend du bon vouloir du Gouvernement.

Renforcer le soutien au sport et préparer l'héritage des Jeux supposeraient, comme nous l'avons déjà proposé, de relever le plafond de la taxe sur les paris sportifs, dont le rendement atteint 70 millions d'euros. Le principe est simple : le sport doit financer le sport. Nous ne voterons cependant pas l'amendement n°II-344, qui ne procède qu'à un transfert de crédits.

M. Thomas Dossus.  - Nous avions bien proposé d'augmenter ce plafond en première partie, mais cela a été rejeté par la majorité sénatoriale...

J'ai, pour ma part, apprécié l'effort d'argumentation de la ministre des sports.

La lutte contre les violences sexuelles et sexistes mérite le supplément budgétaire que je propose. Merci au rapporteur pour son avis de sagesse.

L'amendement n°II-261 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosII-316, II-263, II-344 et II-321.

L'amendement n°II-264 est adopté.

L'amendement n°II-262 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°II-315.

M. le président.  - Amendement n°II-287, présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes Férat, Ract-Madoux, Guidez et Jacquemet et M. P. Martin.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

 

100 000 000

 

100 000 000

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

 

 

 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

100 000 000

100 000 000

TOTAL

100 000 000

100 000 000

100 000 000

100 000 000

SOLDE

0

0

M. Michel Canévet.  - Ayons une organisation cohérente dans notre pays et cessons de mener des politiques identiques à tous les niveaux de compétence. Le Pass'Sport est une politique de proximité : confions-le aux départements.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Retrait. L'option est intéressante, mais l'urgence est aux liens avec les fédérations et les associations.

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre.  - Avis défavorable, car le Pass'Sport est consacré aux enfants et aux jeunes défavorisés, indépendamment de leur lieu de résidence.

M. Michel Canévet.  - Les départements ont une compétence sociale : ils sont tout indiqués pour gérer le Pass'Sport. Néanmoins, je retire l'amendement. (M. Pierre Ouzoulias le déplore.)

L'amendement n°II-287 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-282, présenté par MM. Breuiller, Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Créer le programme :

Soutien aux fédérations sportives scolaires

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

 

 

 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

23 000 000

 

23 000 000

Soutien aux fédérations sportives scolaires

23 000 000

 

 

 

TOTAL

23 000 000

23 000 000

23 000 000

23 000 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Je propose un Pass'Sport scolaire, car le sport scolaire est exclu du dispositif, alors qu'il est souvent la seule voie d'accès au sport. La cotisation de l'Union nationale du sport scolaire (UNSS) n'est que de 20 euros, mais la pratique peut être plus chère et c'est parfois trop pour certains foyers modestes.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Retrait : multiplier les dispositifs nuit à la lisibilité de l'ensemble.

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre.  - Avis défavorable, car mon ministère soutient déjà le sport scolaire, avec notamment les trente minutes quotidiennes d'activité et le soutien à l'UNSS.

M. Jean-Jacques Lozach.  - Nous voterons contre : il ne faut pas dépouiller le financement des Jeux. Celui-ci bénéficie certes de filets de sécurité, comme la réserve ou la garantie de 3 milliards d'euros, mais il ne faut pas laisser filer les budgets. Il y va de notre vision éthique du sport.

De toute façon, nous savons bien que le budget prévisionnel de 6,8 milliards d'euros finira à 8 ou 9 milliards - même si c'est peanuts comparé au coût, par exemple, des Jeux de Pékin.

M. Didier Rambaud.  - L'urgence est de restructurer les fédérations sportives scolaires. Lorsqu'on compare la situation que j'ai connue comme élève et celle que connaissent mes enfants, on voit bien que le secteur a été démantelé.

L'amendement n°II-282 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-314, présenté par M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Sportdont titre 2

17 000 000

17 000 000

Jeunesse et vie associativedont titre 2

17 000 000

17 000 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

TOTAL

17 000 000

17 000 000

17 000 000

17 000 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - La vie associative a besoin d'aide : nous proposons d'abonder le FDVA.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Retrait : le FDVA bénéficie déjà de 15 millions d'euros supplémentaires grâce au fléchage des comptes inactifs de l'État, cher à Jacques-Bernard Magner.

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Alain Marc.  - Je regrette la disparition de la réserve parlementaire. Les cinq parlementaires de l'Aveyron destinaient l'essentiel des 750 000 euros aux associations ; aujourd'hui, le FPVA ne compte plus que 300 000 euros : faites le calcul... (Marques d'approbation sur plusieurs travées)

M. Michel Savin.  - Très bien !

M. Patrick Kanner.  - M. Marc a tout à fait raison. On n'atteint que la moitié de ce qui était distribué, une véritable arnaque. La loi de moralisation de la vie publique contenait cette disposition, contre le supposé clientélisme des élus : je ne crois pas que le Gouvernement fasse mieux...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - (Amusée) ça, c'est dit !

L'amendement n°II-314 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-288, présenté par MM. Canévet et Delcros, Mmes Ract-Madoux, Guidez et Jacquemet et M. P. Martin.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

 

 

 

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

8 100 000

 

8 100 000

Jeux olympiques et paralympiques 2024

8 100 000

 

8 100 000

 

TOTAL

8 100 000

8 100 000

8 100 000

8 100 000

SOLDE

0

0

M. Michel Canévet.  - La réserve parlementaire permettait de cibler des projets au sein de chaque département. Or le FDVA sert avant tout à faire de l'épicerie fine, par centaines d'euros et au prix d'une longue instruction par les services de l'État. Confions ces fonds au département, qui agit déjà dans ce domaine depuis longtemps.

Une voix sur les travées du RDSE.  - Bravo !

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Retrait de votre amendement d'appel, car le fonds est déjà géré par un collège départemental, où siègent des élus et des parlementaires. J'en témoigne : dans la Creuse, par exemple, le travail est sérieux et pertinent. (Mme Cécile Cukierman n'est pas convaincue.)

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Le FDVA associe les parlementaires : faites-nous remonter les situations où tel ne serait pas le cas. En outre, former des bénévoles n'est pas une compétence du département.

M. Michel Canévet.  - L'instruction des subventions mobilise des moyens considérables. Retrait, compte tenu de l'intérêt du rapporteur spécial pour mes propositions.

L'amendement n°II-288 est retiré.

L'amendement n°II-324 rectifié ter n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-281 rectifié, présenté par MM. Breuiller, Dossus, Benarroche, Dantec et Gontard, Mme de Marco, MM. Fernique, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sportdont titre 2

20 000

 

20 000

 

Jeunesse et vie associativedont titre 2

 

 

 

 

Jeux olympiques et paralympiques 2024

 

20 000

 

20 000

TOTAL

20 000

20 000

20 000

20 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Selon l'Insep, 84 % des sportives disent vivre la menstruation comme une difficulté. Développons un programme de recherche pour accompagner sportives, cadres et coaches, ainsi que le recommande la boxeuse française Sarah Ourahmoune.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Je sollicite l'avis du Gouvernement.

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre.  - Avis défavorable. En effet, ce sujet capital fait déjà l'objet d'une démarche spécifique.

M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial.  - Sagesse, donc.

L'amendement n°II-281 rectifié n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », modifiés, sont adoptés.

Justice

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Le comité des États généraux de la justice le constate : le service public de la justice traverse une crise majeure. C'est un bateau naufragé qui a pris l'eau progressivement au fil d'années de restrictions budgétaires. La crise sanitaire a mis au jour ces difficultés.

Analysons le budget sous cet angle, pour toutes ses composantes. Point positif : il augmente, pour atteindre 11,6 milliards d'euros. D'ici 2027, 10 000 postes devraient être créés, dont 1 500 magistrats et 1 500 greffiers.

On ne peut plus continuer d'appliquer une multitude de rustines à une chambre à air dont on n'a pas voulu voir qu'elle était usée, selon Jean-Marc Sauvé, président du comité des États généraux. Une réforme globale s'impose.

La future loi de programmation devra consacrer cette trajectoire. Nous ne vous donnerons pas de blanc-seing, monsieur le garde des sceaux. La hausse des moyens du ministère doit s'accompagner de la diffusion d'une réelle culture de l'évaluation des dépenses réalisées.

La loi de programmation devra être l'occasion pour le ministère de s'interroger sur le sens de ses politiques, sur la qualité de son service public et sur la gestion de ses moyens, budgétaires comme humains. Il devra se doter d'indicateurs de suivi fiables. En effet, il s'est trop longtemps montré incapable d'une gestion rigoureuse. La Cour des comptes a ainsi rencontré de nombreuses difficultés pour retracer l'ensemble du plan de transformation numérique (PTN) de la justice, doté initialement de 530 millions d'euros.

L'institution judiciaire ne sortira pas de la crise majeure qu'elle traverse sans s'interroger sur ses fonctions support, qui doivent être rapprochées de tous les utilisateurs. Un deuxième PTN est en passe d'être mis en place : le premier était un plan de rattrapage, le deuxième devra moderniser les équipements et les services. La modification de certains systèmes oblige les magistrats et les greffiers à ressaisir manuellement certaines données : c'est inacceptable.

Le décloisonnement des applications devra être prévu en interne et en externe, avec le ministère de l'intérieur et les avocats.

Le pilotage des ressources humaines ne passe pas simplement par une augmentation des effectifs, mais aussi par un questionnement sur le vivier de recrutement et la revalorisation de certains métiers trop peu attractifs.

La construction de 15 000 places de détention supplémentaires est le plus grand chantier du ministère. Une politique pénitentiaire ne peut toutefois se résumer à une politique immobilière. Nous devons aussi améliorer les conditions d'exercice de tous les personnels du ministère de la justice.

La commission des finances propose, à l'unanimité, d'adopter les crédits de la mission.

M. Alain Marc, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - Pour la troisième année consécutive, les crédits alloués à l'administration pénitentiaire sont en forte hausse, de 7,5 %. Ces moyens ne sont pas superflus, compte tenu des besoins humains et immobiliers. Les efforts budgétaires réalisés n'ont toutefois pas encore d'effet sur le terrain. Le programme de construction de 15 000 nouvelles places de prison d'ici 2027 absorbe une grande partie des crédits. Le retour de la surpopulation carcérale dégrade les conditions de travail du personnel et les conditions de détention.

Le programme 15 000 est scindé en deux tranches : 7 000 places entre 2017 et 2022 et 8 000 entre 2022 et 2027. Mais seules 2 000 places seront livrées d'ici la fin de cette année. Même si une dizaine d'établissements doivent être livrés en 2023, l'achèvement du programme à l'échéance prévue est incertain, notamment en raison de la hausse des prix de l'énergie et des matières premières.

La population carcérale est repartie à la hausse : le taux d'occupation en maison d'arrêt est en moyenne de 140 %. Il atteint 200 % à la prison de Bordeaux-Gradignan. Dans ce contexte, le Gouvernement a fait adopter à l'Assemblée nationale un amendement reportant une nouvelle fois l'application du principe d'encellulement individuel.

La surpopulation carcérale dégrade les conditions de détention et le suivi des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation, ce qui réduit les chances de réinsertion. Le personnel travaille dans des conditions difficiles, subissant une importante surcharge de travail.

En dépit de ces difficultés, la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. La remise à niveau de notre service public pénitentiaire devra se poursuivre.

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - En novembre 2021, 3 000 magistrats alertaient le Gouvernement sur leur malaise dans une tribune. Un an plus tard, ils sont toujours dans la rue. Le projet de budget pour 2023 poursuit l'effort de rattrapage, pour la troisième année consécutive, avec des crédits de paiement en hausse de 8 %. Pourquoi, alors, le malaise persiste-t-il ? Pourquoi les délais de jugement s'allongent-ils encore, passant de 11,4 mois en 2019 à 13,7 mois en 2021 et à 50 mois pour les crimes ?

En 2023, 1 220 postes seront créés en vue de renforcer les juridictions. La dynamique se poursuivra dans les années à venir, avec la création de 1 500 postes de magistrats, 1 500 de greffiers et 2 000 de juristes assistants sur cinq ans. Ces moyens humains sont attendus. À Nanterre, un seul juge aux affaires familiales (JAF) traite 235 000 affaires, contre 108 000 dans les autres juridictions. Cette ambition impose de développer la formation et d'attirer de nouvelles recrues.

Pour cela, le PLF prévoit une prime de 1 000 euros bruts en moyenne pour les magistrats judiciaires. Les greffiers seront augmentés de 165 euros bruts par mois et les directeurs de greffe de 250 euros bruts. Mais cette augmentation n'améliorera pas réellement les conditions de travail tant que 7 % des postes ne seront pas pourvus et que les conditions de travail ne changeront pas. À Rouen, par exemple, les conditions de travail sont peu acceptables, avec des bureaux installés dans d'anciennes toilettes.

L'augmentation massive des effectifs doit s'accompagner d'une véritable politique de ressources humaines. Il importe de moderniser les méthodes de travail des magistrats, de revaloriser le rôle des greffiers et de donner un avenir aux contractuels. Clarifions les missions de chacun.

Monsieur le ministre, dans le long et sinueux chemin de la réforme, il convient surtout d'éclaircir la méthode.

Ce budget est un beau début : c'est pourquoi la commission des lois a émis un avis favorable.

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis de la commission des lois .  - L'informatique est un sujet majeur. Certes, les crédits augmentent, mais les évolutions concrètes sur le terrain se font attendre. Selon Le Canard enchaîné, après le naufrage de la numérisation des procédures civiles pilotée par Sopra Steria et Capgemini, le ministère a signé un nouveau marché de 45 millions d'euros avec... ces deux entreprises ! Après tout, ce sont sans doute les mieux informées de ce qu'il ne faut pas faire.

Comme Agnès Canayer, je salue l'effort de recrutement. Le rapport de Dominique Lottin sur la structuration des équipes juridictionnelles pluridisciplinaires fournit des pistes de changement concrètes.

Les crédits consacrés à l'accès au droit et à l'aide aux victimes augmentent. Les victimes de violences conjugales représentent plus de 40 % des personnes prises en charge par les associations spécialisées. Le budget 2023 financera 5 000 téléphones grave danger et 800 bracelets anti-rapprochement. Trop souvent, la victime n'est reconnue que par le milieu associatif.

M. Michel Canévet.  - Absolument !

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis.  - Il n'est pas rare que les victimes se heurtent à l'institution, policière puis judiciaire, et que leurs dossiers soient jetés à la poubelle. Trop souvent, même lorsqu'elles sont reconnues, leurs dossiers sont morcelés, entre les différents juges compétents, qui rendent parfois des décisions contradictoires.

Monsieur le ministre, je vous remercie de m'avoir confié, ainsi qu'à Émilie Chandler, une mission sur les violences intrafamiliales. Nos trois premières propositions seront : la formation, la formation et la formation ! On ne peut pas traiter correctement un dossier si l'on ne connaît pas ce que ces violences engendrent chez la victime.

Même si tout n'est pas parfait, merci de ce budget ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Maryse Carrère, rapporteure pour avis de la commission des lois .  - Le programme 182 relatif à la PJJ représente 9,4 % des crédits de la mission « Justice ». Il sera doté de 1,1 milliard d'euros en autorisations d'engagement et de 1,08 milliard d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de respectivement 11,2 et 10,4 % par rapport à la loi de finances pour 2022. L'enjeu tient non au montant, mais à l'allocation des crédits.

La PJJ fait face à plusieurs défis. Le nouveau code de la justice pénale des mineurs a bouleversé le travail des juridictions. Cette réforme a un impact sur le milieu ouvert. Elle peut le redynamiser. L'attention croissante qui y est portée est bienvenue.

Ces dernières années, nous nous sommes inquiétés de la place très importante prise par la création des centres éducatifs fermés (CEF) dans le budget de la PJJ. Axe majeur de la politique du Gouvernement, les CEF semblent en recul : la PJJ pourrait renoncer à trois ou quatre projets sur vingt.

La question du personnel est sous-jacente : le taux de vacance s'élève à 6 %, la rotation est rapide sur certains postes difficiles et le taux de contractuels dépasse les 20 %. Face à ce manque d'attractivité, la revalorisation salariale est certes nécessaire, mais insuffisante. Redonnons du sens à ces métiers.

L'application Parcours a connu des difficultés de lancement. Son appropriation s'est avérée difficile. La PJJ a donc organisé un programme de formation du personnel. De nouveaux développements ont nécessité 4 millions d'euros en 2022 et en nécessiteront autant en 2023.

La commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 182. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe UC)

M. Thomas Dossus .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le budget de la justice pour 2023 suit les États généraux de la justice, au cours desquels le dialogue a été renoué. Nous devrions nous réjouir de la hausse significative des crédits de la justice, mais la réalité est plus complexe : notre système est à bout de souffle. La France compte trois procureurs pour 100 000 habitants, contre douze en moyenne dans les pays de l'Union européenne. Nous dépensons 5 euros par habitant pour l'aide juridictionnelle, contre 6,50 euros en moyenne dans l'Union européenne.

Un exemple illustre les défaillances de notre justice : une dépêche interministérielle de mai 2021 a incité les magistrats à classer sans suite les affaires anciennes.

Les besoins humains des juridictions sont criants. Le taux de vacance des postes de greffier s'établit à 7,2 %, en hausse de 2,7 points par rapport à 2019. L'embauche de 200 magistrats et 198 greffiers ne comblera pas tous les manques.

Nous dénonçons la méthode du Gouvernement consistant à embaucher massivement des assistants de justice contractuels en situation précaire. Cette politique de recrutement à moindre coût n'est pas acceptable.

Des moyens supplémentaires seront alloués aux bracelets anti-rapprochement. Ils ont, dès leur création, connu de nombreux dysfonctionnements. En dépit de moyens supplémentaires, le pilotage fait toujours défaut.

Que dire du budget colossal accordé à la construction de nouvelles prisons ? Aucune réflexion n'est menée sur l'architecture des parcs ni sur l'entretien des établissements existants.

La promesse de 15 000 places en 2027 nous semble inappropriée. Le taux d'occupation pourrait atteindre 130 % en 2023 dans les maisons d'arrêt. Les subventions aux associations organisant les activités culturelles et sportives des détenus baissent de 25 %, alors que celles-ci favorisent la réinsertion.

Comment espérer une véritable amélioration des conditions de détention ? Des postes de surveillants sont créés, mais cette profession souffre d'une grave crise des vocations. Les conditions de travail et la rémunération ne sont pas à la hauteur des missions.

La PJJ, au gré des réformes, reste le parent pauvre de la justice. La priorité est donnée à la création de centres éducatifs fermés. Mais la culture du tout-répressif a ses limites.

Nous saluons l'augmentation du budget de la mission, mais la répartition des crédits ne répond pas aux besoins de recrutement, ne pallie pas les problèmes de la justice du quotidien et n'améliore pas les conditions de détention. Le GEST s'abstiendra.

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Fidèle à vos engagements, monsieur le garde des sceaux, vous avez obtenu une hausse de 8 % du budget de votre ministère. Vous maintenez ainsi une trajectoire ambitieuse : le budget a augmenté de 26 % depuis que vous êtes ministre, et de 40 % depuis le début du premier quinquennat du Président de la République.

Certes, ce changement de braquet n'inverse pas encore la tendance, et la France consacre toujours moins d'argent à la justice que ses voisins. La mobilisation de la profession judiciaire en témoigne.

Soyons toutefois honnêtes : ce beau budget permettra de grandes avancées. Les effectifs seront renforcés, avec 2 253 emplois créés cette année. Quelque 80 millions d'euros revaloriseront les salaires de tous les agents du ministère - les magistrats connaîtront une augmentation de 1 000 euros bruts par mois.

La surpopulation carcérale fait son retour : la création des 15 000 nouvelles places de prison devra s'accompagner d'une amplification des aménagements de peine et des alternatives à l'incarcération. Je salue la hausse des crédits consacrés à la mise en place du statut du détenu travailleur, qui aidera à prévenir la récidive.

Le renforcement de la sécurité des surveillants pénitentiaires, la montée en puissance de leur rôle, l'ouverture de nouvelles unités pour détenus violents et la généralisation des caméras-piétons sont autant de mesures contre la violence au sein des établissements pénitentiaires.

Des efforts conséquents sont déployés en faveur de la modernisation de la justice, du renforcement de l'accès au droit, du numérique ou encore de l'aide aux victimes.

Monsieur le garde des sceaux, je dois enfin vous interroger de nouveau sur la situation à Mayotte, en particulier sur la création d'une cité judiciaire, d'un deuxième centre pénitentiaire et d'un centre éducatif fermé. Ces projets prendront du temps à cause du foncier, immense problème à Mayotte. Que peut-on entreprendre immédiatement pour juguler la terrifiante flambée de la délinquance juvénile ?

Le budget est la traduction des engagements du Gouvernement : nous voterons ces crédits sans trembler. (M. Arnaud de Belenet applaudit.)

M. Jean-Pierre Sueur .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.) Les États généraux de la justice ont dressé un constat alarmant : l'institution est en état de délabrement avancé. Aussi, nous saluons l'augmentation de 7,8 % des crédits de la justice - 710 millions d'euros de plus qu'en 2022 -, après une hausse de 8 % sur deux années consécutives.

Ne méconnaissons pas le poids de l'inflation : l'augmentation de 8 % s'en trouve singulièrement réduite... (Mme Marie-Pierre de La Gontrie le confirme.) Reste que l'effort est incontestable.

Toutefois, la France reste bien en dessous de la moyenne européenne : 72,50 euros par habitant consacrés à la justice, contre 78 euros en moyenne en Europe. Nous sommes loin des objectifs préconisés par les États généraux de la justice.

Les crédits de la PJJ augmentent de 10,4 %. Vous prévoyez la construction de nouveaux centres éducatifs. (Mle garde des sceaux le confirme.) Mais rappelons les conclusions de la mission sénatoriale de Mme Harribey, qui a souligné le manque de suivi scolaire au sein de ces centres. En tiendrez-vous compte ?

Quelque 15 000 nouvelles places de prison seront construites - nous ne savons pas exactement quand. Vos prédécesseurs tenaient des propos similaires. Mais, depuis 1990, 36 000 places de prison ont été ouvertes, et la surpopulation carcérale est restée constante. La création de nouvelles places est-elle une solution ? La restauration d'établissements délabrés et décrépis, qui ont donné lieu à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, serait tout aussi pertinente.

On dénombrait, au 1er septembre, 71 669 détenus pour 60 715 places, soit 120 % d'occupation. C'est 130 % dans les maisons d'arrêt et 150 % dans 36 établissements. En d'autres termes, 2 000 êtres humains sont à trois dans des cellules de 9 m2 ! Robert Badinter disait que la condition pénitentiaire était la première cause de la récidive. Il faut y être attentif.

Les États généraux de la justice proposent un mécanisme de régulation : écoutez-les ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Cécile Cukierman .  - Le service public de la justice nécessite soutien et considération. Le Gouvernement présente une augmentation du budget de la justice de 8 %. Mais, selon de nombreux acteurs, ces efforts sont insuffisants : nous partons de trop loin. L'institution judiciaire est dégradée. Le budget français de la justice est parmi les moins élevés d'Europe.

Nous soutenons ceux qui dénoncent le rendement au mépris d'une justice humaine. Les magistrats ne peuvent plus prendre le temps de l'écoute, du fait de vingt ans d'abandon humain et budgétaire ! La justice continuera de se faire au rabais, avec 11 juges pour 100 000 habitants, deux fois moins que dans le reste de l'Europe.

Cet écart se manifeste également pour les greffiers et les assistants spécialisés. Nous le martelons depuis des années : les juridictions doivent avoir des moyens, et les réformes doivent être suspendues, sous peine d'épuisement du système.

L'administration pénitentiaire voit son budget augmenter de 268 millions d'euros, mais les moyens restent insuffisants. Les heures supplémentaires, par exemple, demeurent trop nombreuses. Or vous concentrez les moyens sur l'extension du parc carcéral, qui ne permettra pas de lutter contre la surpopulation. Les conditions de détention indignes en France sont régulièrement dénoncées. La loi du 8 avril 2021 garantit le respect de la dignité, mais ne répond pas totalement au problème.

La justice des mineurs doit avoir des moyens supérieurs : la prévention est la première solution.

Nous ne voterons pas le budget présenté, qui ne répond pas suffisamment aux enjeux humains, pour les justiciables comme pour le personnel.

M. Arnaud de Belenet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ce budget est ambitieux : les crédits de la justice judiciaire augmentent pour la troisième année consécutive. Le Gouvernement s'engage pour le monde judiciaire, mais les États généraux de la justice ont confirmé que notre justice allait mal ; elle est lente, débordée, et son personnel est démotivé.

L'augmentation de 1 000 euros des magistrats est bienvenue : il leur faut de la motivation !

Les surveillants pénitentiaires souffrent d'un déficit d'image ; les greffiers et magistrats travaillent selon des horaires difficiles - un magistrat mentionnait une audience ayant fini à 5 heures du matin lors d'un rassemblement devant le tribunal judiciaire de Paris.

La justice civile est souvent la seule à laquelle nos concitoyens sont confrontés. Ses magistrats souffrent d'une charge de travail considérable, et le processus judiciaire est trop lent. L'article 1er de la Convention européenne des droits de l'homme stipule pourtant que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable.

Lors de votre déplacement au Québec, monsieur le garde des sceaux, vous avez annoncé vouloir développer le règlement des litiges à l'amiable. Encore faut-il que les magistrats y soient formés.

La loi de programmation que nous attendons permettra, au-delà de la discussion budgétaire, d'aborder les investissements à long terme du ministère, notamment en matière immobilière. Il faut anticiper les recrutements. Nos juridictions doivent investir pour mieux accueillir les justiciables et améliorer les conditions de travail.

Nous regrettons le manque d'autonomie des tribunaux. Remplacer une ampoule, effectuer des travaux rudimentaires : les chefs de juridiction devraient pouvoir agir vite sans entrer dans un processus administratif. Je ne demanderai pas qui s'occupe des chiens présents pour les victimes au pénal. Autre exemple : parfois, nos juridictions n'ont pas de ramettes de papier...

M. Michel Canévet.  - C'est du concret !

M. Arnaud de Belenet.  - L'article 44 ter prolonge jusqu'à fin 2027 la dérogation à l'encellulement individuel. Il n'est que de 20 % seulement ; il était donc illusoire de penser atteindre l'objectif au 31 décembre 2022. Mais nous prolongeons ce moratoire depuis 2009, alors que ce droit remonte à 1875 ! Brandir cet objectif a-t-il encore un sens ? Espérons que le vote de cet énième prolongement permettra, avec la création de 15 000 places de prison, d'agir plus vite.

Le groupe UC votera ces crédits. Nous attendons la loi de programmation avec impatience et vigilance, pour rattraper le retard accumulé. Avec 72,50 euros par habitant consacrés à la justice, la France dépense deux fois moins que l'Allemagne sur ce point - elle est le seul grand pays européen à y consacrer moins de 0,3 % de son PIB. La paix sociale vaut davantage ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Esther Benbassa .  - (M. Patrick Kanner applaudit.) D'abord, évoquons la mémoire de Charlotte, jeune magistrate de 29 ans, qui s'est donné la mort à Béthune. Elle comblait les effectifs manquants des tribunaux du Nord, sous l'injonction d'aller toujours plus vite. Symbole d'une justice malade, qui préfère la vitesse à la qualité ! À la suite de son suicide, une pétition a réuni plus de 3 000 magistrats pour condamner une justice qui n'écoute pas et chronomètre tout.

Parlons de la magistrate Marie Truchet, qui s'est écroulée en pleine audience du tribunal de Nanterre pour ne plus jamais se relever. Ces vies humaines sacrifiées témoignent d'un système qui ne parvient plus à accomplir ses missions dans des conditions satisfaisantes. La grève des magistrats de cette semaine en est une illustration supplémentaire.

Le comité des États généraux de la justice a insisté sur l'importance de la réinsertion en prison. Soulignons l'augmentation de crédits de 2,8 millions d'euros pour le détenu-travailleur et de 2 millions d'euros pour la diversification des actions de réinsertion. Indignons-nous sur l'état de nos prisons autant que sur le karting à Fresnes ! Mes nombreuses visites en prison confirment que la dignité n'y est pas respectée. Nous ne soignerons pas le fléau de la surpopulation carcérale en créant de nouvelles places : il faut aménager les courtes peines.

Je salue la hausse du budget, mais 9,6 milliards suffiront-ils à faire oublier tout ce qui a trop longtemps été négligé ?

Je voterai ces crédits. (Applaudissements sur quelques travées du groupe SER)

M. Stéphane Artano .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Voilà trois ans que la justice de notre pays rattrape progressivement son retard budgétaire. Nous partions de très loin. Les bilans européens montrent une dépense inférieure à nos voisins. Il faut inverser la tendance.

Nous saluons la plupart des mesures de ce budget : revalorisations, recrutements, hausse des recettes liées aux frais de justice et à l'immobilier, peines alternatives à l'incarcération.

Pour 2023, les crédits augmentent dans la continuité des deux années précédentes. La dynamique de l'emploi doit être soulignée, car les maux de la justice se résument souvent à des questions de temps : d'un côté, le temps d'attente est trop long pour le justiciable ; de l'autre, le temps des juridictions est trop limité.

Du chemin reste à parcourir pour que nos concitoyens retrouvent confiance dans l'institution judiciaire. La PJJ est sinistrée, en raison du manque de personnel, comme Maryse Carrère l'a souligné dans son rapport. Nous manquons d'éducateurs, de psychologues. La hausse des crédits ne suffira pas à désengorger des établissements saturés.

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) ne manque pas de critiquer régulièrement la France pour ses délais d'instruction, mais ne cédons pas au désir archaïque d'une justice hasardeuse et trop rapide. La fin de la collégialité et l'exclusion du recours au juge soulèvent des inquiétudes au Sénat, notamment sur l'amende forfaitaire délictuelle - le RDSE s'était montré prudent. Nous ne devons pas renoncer à notre procédure pénale, qui est parfois complexe, mais doit répondre à l'exigence de justice.

Aux procédures simplifiées, nous préférons un renforcement des moyens humains et des formations. Magistrats et greffiers expriment régulièrement leur mal-être, évoquant leur surcharge de travail et leur épuisement, mais aucun ne souhaite renoncer aux principes fondamentaux de notre justice. Il faut des moyens. Ce budget en donne, mais l'effort n'est pas achevé. La future loi de programmation devra s'inscrire dans cette perspective.

Tout en restant vigilant, le RDSE votera ces crédits. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. François-Noël Buffet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le rapport de 2017 de la commission des lois donnait cinq ans pour sauver notre justice. Nous préconisions la remise à niveau des moyens humains, une grande concertation et une étude d'impact approfondie soumise au Parlement. Voilà qui était clair, mais votre prédécesseure, monsieur le garde des sceaux, n'en a pas tenu compte, notamment en 2018. Dommage !

En 2021, la situation s'est aggravée. L'agora de la justice, présidée par Gérard Larcher, avait formulé seize propositions pour combler les vacances de postes de greffiers, réévaluer les besoins des magistrats, améliorer le recrutement et la formation... La période du covid avait déjà révélé les carences fortes de l'institution. Pas moins de 53 % de nos concitoyens ne font pas confiance à la justice, considérée comme trop lente. Ils ne la saisissent qu'en dernier recours.

Dans ce contexte, se sont tenus les États généraux de la justice, qui ont conforté, malheureusement, notre constat de 2017. Il faut une réforme systémique de la justice. La simplification de la procédure pénale est nécessaire, elle touche aux libertés. La procédure civile, la justice du quotidien, de ceux qui doivent régler un conflit de voisinage ou une dette, est encore plus en souffrance !

Ce budget doit être salué, avec une troisième hausse consécutive de 8 %, pour atteindre 9,6 milliards d'euros. L'augmentation, depuis 2017, est de 40 % : on rattrape le retard. Néanmoins, nous nous interrogeons sur quelques points. Créer 10 000 emplois supplémentaires sur le quinquennat, c'est bien, mais il sera difficile de recruter 1 500 magistrats en cinq ans sans sacrifier la qualité du recrutement. Je m'interroge sur les capacités de l'École nationale de la magistrature (ENM). Pourra-t-on former 500 auditeurs de justice et 1 000 greffiers par an ?

Les contractuels ont été utiles, ce que confirment les magistrats : ils demandent que vous les gardiez. (M. le garde des sceaux approuve.) Peut-être aurons-nous du mal à recruter des surveillants pénitentiaires : il faut attirer et fidéliser. Quelque 117 millions d'euros seront consacrés à la revalorisation du salaire des magistrats, 50 millions d'euros pour les fonctionnaires, 10 millions pour les greffiers.

Les 15 000 places de prison ont été annoncées, mais pas réalisées. Nous y sommes particulièrement attachés, avec deux objectifs : généraliser l'encellulement individuel et mettre en place une politique pénale complète, où l'incarcération est complémentaire des peines alternatives.

Reste la numérisation, un marronnier pour certains, le coeur du réacteur selon Mme Belloubet : elle reste un point faible de la justice. Vous y avez consacré des moyens, mais le problème relève désormais davantage de la capacité à répondre rapidement aux attentes des greffiers. Nous n'étions pas à la préhistoire, mais tout de même... (Sourires) D'autres ministères régaliens ont réussi cette réforme : c'est indispensable pour une justice efficace.

Ce matin, nous avons examiné la mission « Sécurités », avec des moyens supplémentaires prévus pour la police judiciaire et la sécurité publique. Si cette démarche va à son terme, nos services de police devraient s'en trouver plus productifs : il faudra que notre justice absorbe ce supplément. Le contraire serait ubuesque. La police doit former un attelage complet avec la justice.

Enfin, les efforts budgétaires doivent être non pas conjoncturels, mais pérennes. Nous attendons les textes de simplification de la procédure pénale et d'adaptation du système judiciaire au service de nos concitoyens, pour une justice au service de tous.

Le groupe Les Républicains suivra l'avis favorable des rapporteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Alain Marc .  - Nous nous réjouissons, cette année, d'une nouvelle progression du budget de la justice de 8 % ; elle en avait bien besoin, alors qu'elle a été longtemps délaissée, au point que ses conditions d'exercice sont devenues insoutenables. Nos concitoyens ont ainsi perdu confiance en elle : 70 % des Français considèrent que la justice fonctionne mal.

Il était urgent d'inverser la tendance. Ainsi, entre 2020 et 2023, nous constatons une hausse du budget de 26 %. L'administration pénitentiaire tient une place prépondérante. Nous devons construire des places supplémentaires pour assurer le respect de notre politique pénale, éliminer la surpopulation carcérale et respecter les engagements de la France en matière de droits humains.

Les juridictions judiciaires sont débordées et manquent de magistrats, ce qui allonge les délais de jugement. Ce budget renforce les effectifs, avec 1 220 postes nets en plus dont 200 magistrats, ce que nous saluons. En outre, les magistrats judiciaires bénéficieront d'une revalorisation de 1 000 euros bruts, ce qui met fin à une inégalité injustifiée avec les magistrats administratifs et financiers.

Les greffiers sont essentiels : leurs effectifs seront augmentés, et leur rémunération revalorisée.

Ce n'est pas à vous, monsieur le garde des sceaux, que j'apprendrai que les avocats sont les auxiliaires nécessaires de la justice, en défendant nos concitoyens et le respect de nos droits et libertés, surtout pour les plus démunis. La dynamique d'augmentation de l'aide juridictionnelle est renforcée dans ce budget.

Le numérique est également un chantier important. Les augmentations budgétaires récentes doivent produire leurs effets rapidement sur les délais de jugement - un an pour une affaire civile, deux ans pour un divorce, quatre ans pour une affaire pénale ! Tant que la justice ne passe pas, le droit est comme suspendu.

La hausse du budget de la justice redonne confiance aux Français dans les institutions. Les défis à venir nécessitent de la poursuivre. Le groupe INDEP votera les crédits de cette mission.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.) Je ne vous surprendrai pas en vous annonçant que le groupe SER salue l'augmentation des crédits de la justice, même si certaines questions se posent sur sa réalité.

Le comité des États généraux de la justice a souligné le besoin de repenser l'institution judiciaire en en clarifiant les objectifs, avant de poser la question des moyens. Qu'en avez-vous fait ?

Ensuite, quelle est l'effectivité de cette augmentation, face à l'inflation ? L'excellent rapport de M. Lefèvre indique qu'elle atteint, en euros constants, 3,2 % seulement...

Comment expliquez-vous la sous-exécution du budget des investissements dans la précédente loi de finances ?

Nous avons une divergence d'appréciation quant à votre vision sécuritaire de la justice.

Malgré cela, puisque nous manquons de magistrats, je salue les créations d'emplois et les revalorisations salariales, importantes pour l'attractivité de ces professions. Nous nous félicitons aussi du budget augmenté pour les bracelets anti-rapprochement, mais est-ce le résultat d'un simple changement de prestataire ou d'une évolution du dispositif ?

Comme d'autres groupes, nous reprendrons dans un amendement la proposition du rapport Perben de revaloriser l'aide juridictionnelle à 42 euros par unité de valeur.

Nous présenterons également un amendement, en cette journée internationale de la lutte contre les violences faites aux femmes, visant à créer une juridiction exceptionnelle spécialisée dans ce domaine. Nous nous inspirons du modèle espagnol : le pays a connu 25 % de féminicides en moins depuis 2004. Un magistrat sur trois est formé à cette thématique très spécifique. Il faudra préciser vos ambitions budgétaires dans ce domaine.

Ces observations faites, notre groupe votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Le budget soumis à votre examen correspond à une hausse de plus de 8 % au profit de la justice, soit 710 millions d'euros : nous frôlerons ainsi les 10 milliards d'euros. Ce n'est, certes, jamais assez, mais c'est plus élevé que jamais.

J'insiste : tous les acteurs du ministère en bénéficieront. La hausse atteint 9 % pour les services judiciaires, à 3,3 milliards d'euros. L'administration pénitentiaire bénéficie, elle, de 7 % d'augmentation, à 3,9 milliards d'euros, la protection judiciaire de la jeunesse de 10 %, à 917 millions d'euros.

Au total, l'effort en faveur du budget de la justice se chiffre en milliards d'euros. Depuis mon arrivée à la tête du ministère, en 2020, les crédits ont augmenté de 10 % ; depuis 2017, la hausse atteint 40 %.

Cela confirme le cap que nous nous sommes fixé : rattraper trente ans d'abandon de la justice et mettre en oeuvre les recommandations des États généraux de la justice. Au-delà des moyens, nous devons simplifier la procédure civile et la procédure pénale, pour une justice plus proche, plus rapide et plus efficace. Je présenterai dans quelques jours à votre commission des lois le plan qui en est issu.

La justice tient d'abord aux hommes et aux femmes qui s'y engagent. Dix mille emplois seront pourvus d'ici à 2027, et 605 sont déjà pérennisés en 2022 au titre de la justice de proximité. Ils seront déployés année par année en réponse aux besoins exprimés par le terrain. Cela étant dit, nous avons déjà sanctuarisé 1 500 postes de magistrats et 1 500 postes de greffiers supplémentaires pour les juridictions durant l'ensemble du quinquennat.

En 2023, 2 250 personnes seront recrutées pour la justice -  trois fois plus qu'en 2022, où nous avions budgété 720 recrutements. Ils se répartissent de la manière suivante : 200 magistrats et 191 greffiers, 809 emplois pour l'administration pénitentiaire, 92 pour la protection judiciaire de la jeunesse et les 132 restants pour la coordination de la politique publique de la justice.

Il faut améliorer l'attractivité des métiers par des revalorisations. Ainsi, 60 millions d'euros seront réservés aux revalorisations des professionnels de la justice, soit un doublement de l'enveloppe. Pour les magistrats, ce sera 1 000 euros bruts par mois de plus à compter d'octobre 2023. Un jeune diplômé de l'École nationale de la magistrature commencera ainsi sa carrière à 3 000 euros nets par mois.

Nous fidélisons les compétences. Ainsi, la revalorisation indemnitaire des greffiers se poursuit, avec 50 millions d'euros - au total, ce sont 12 % de hausse entre 2021 et 2023 pour les services de greffe. En outre, nous travaillons à la réforme de leur statut.

Le personnel de la protection judiciaire de la jeunesse bénéficiera de 7 millions d'euros de revalorisations.

Pour les surveillants pénitentiaires, les revalorisations auront fait passer, en trois ans, leur salaire de 1 400 à 1 869 euros. La fusion des grades de surveillant et de brigadier simplifie et revalorise les carrières. Ce n'est qu'une première étape : nous travaillerons à une revalorisation du statut et de la rémunération avec les syndicats. En effet, le plan 15 000 suppose des recrutements et une fidélisation des agents exerçant cette mission difficile.

Enfin, 10 millions d'euros seront affectés à la revalorisation du régime indemnitaire et indiciaire des corps d'encadrement - directeurs de greffe, directeurs de service pénitentiaire, par exemple.

Le plan 15 000 portera la capacité carcérale à 75 000 places. En ce moment même, 18 chantiers sont en cours, dont 10 seront achevés en 2023, notamment à Avignon et à Meaux. Les livraisons vont s'accélérer, car tous les terrains ont désormais été identifiés.

Je vous propose de proroger le moratoire sur l'encellulement individuel jusqu'à 2027. Je donnerai un avis favorable aux deux demandes de rapport sur ce sujet qui seront présentées par le rapporteur spécial Antoine Lefèvre.

De plus, nous modernisons l'immobilier juridictionnel, indispensable pour accueillir les renforts humains, qui fait l'objet de 502 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 269 millions d'euros de crédits de paiement. Je pense notamment aux palais de justice de Lille, de la Cité à Paris et de Bayonne, sans oublier Cayenne, Nantes, Perpignan, Colmar, Saint-Brieuc et Verdun.

Enfin, l'enveloppe consacrée aux dépenses de frais de justice sera portée à 660 millions d'euros et l'investissement informatique à 195 millions d'euros, avec la poursuite du plan de transformation numérique.

Le budget de l'aide juridictionnelle continue de progresser, à 641 millions d'euros en 2023, soit une augmentation de 26 millions d'euros. L'aide aux victimes sera portée à 43 millions d'euros, dont 16,1 millions d'euros pour les violences intrafamiliales, soit un doublement depuis 2020.

Nous sommes à la croisée des chemins, après trois décennies de délaissement. La volonté du Président de la République et celle de la Première ministre, mais aussi la mienne, sont claires : considérer la justice comme ce qu'elle est, l'institution qui fonde le pacte social. Il vous appartient de poursuivre dans cette voie ou de bifurquer vers les réflexes des décennies passées : court-termisme et « aquoibonisme ».

On ne répare pas trente années d'abandon d'un claquement de doigts. Je vous sais à nos côtés pour poursuivre la restauration de la justice de qualité que nous appelons tous de nos voeux, pour ceux qui la font vivre et pour ceux qu'elle sert. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Christian Bilhac applaudit également.)

Examen des crédits de la mission et des articles rattachés

Article 27 - État B

M. le président.  - Amendement n°II-727, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

1 500 000

 

1 500 000

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 500 000

 

1 500 000

 

SOLDE

+ 1 500 000

+ 1 500 000

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Cet amendement rétablit les crédits supprimés, par un amendement adopté à l'Assemblée nationale, au sein du programme « Justice judiciaire ».

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Cet amendement a été déposé après la réunion de la commission. J'exprime donc un avis personnel. Le texte élaboré par le Gouvernement, sur lequel il engageait sa responsabilité, comportait en effet un amendement rehaussant les crédits consacrés au Téléphone grave danger, mais sans lever le gage. Dans mon rapport budgétaire, j'ai recommandé le rétablissement de ces crédits : avis favorable, donc.

L'amendement n°II-727 est adopté.

L'amendement n°II-68 rectifié ter n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°II-307, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-274 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Artano, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

40 000 000 

 

40 000 000 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

40 000 000 

 

 40 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

40 000 000 

40 000 000 

 40 000 000

40 000 000 

SOLDE

Mme Maryse Carrère.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-239, présenté par M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

1 000 000

 

1 000 000

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

0

0

M. Thomas Dossus.  - Nous proposons de revaloriser l'unité de valeur de l'aide juridictionnelle à 42 euros.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Ce sont des amendements d'appel pour attirer l'attention du Gouvernement sur la faiblesse de l'unité de valeur. Je souscris à ce constat : les avocats estiment que, dans la moitié des cas, elle ne couvre pas les frais engagés. Selon le rapport Perben, il faut porter l'unité de valeur à 40 euros.

Cependant, elle a déjà été considérablement revalorisée : en 2016, le montant était de 26,5 euros, il a été porté à 36 euros dans la loi de finances pour 2022. De nouvelles pistes d'amélioration sont-elles prévues, monsieur le ministre ?

En outre, la portée concrète des amendements est limitée, puisqu'ils ne revalorisent pas directement la rémunération des avocats : retrait.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis. Le budget de l'aide juridictionnelle est de 641 millions d'euros, en hausse de 26 millions d'euros par rapport à 2022 et surtout de 157 millions d'euros par rapport à 2021. Nous ferons encore davantage dans les prochains budgets.

Depuis les États généraux de la justice, il y a davantage de recours à la médiation. C'est ce que nous souhaitons encourager ; or si le procès paie plus que la médiation, les avocats iront moins vers la seconde ! Avis défavorable.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce ne sont pas des amendements d'appel. Certes, il y a un progrès, mais il est insuffisant. Les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle n'ont pas accès au droit, et les professionnels s'en détournent, car ils ne s'y retrouvent pas.

Je vous trouve sévère avec nos anciens confrères : la rétribution de l'aide juridictionnelle n'est pas une motivation pour aller au procès... De toute façon, l'aide juridictionnelle est peu rémunératrice. Nous souhaitons tous la revalorisation. Votons les amendements.

Mme Maryse Carrère, rapporteur pour avis.  - L'aide juridictionnelle est un thème cher au RDSE. Mon amendement vise un montant de 38 euros, soit une hausse de deux euros de l'unité de valeur.

L'aide juridictionnelle fait vivre les jeunes avocats et ceux qui s'orientent vers des causes difficiles ; cet amendement ne bénéficiera pas aux grands cabinets d'affaires...

L'amendement n°II-307 est adopté et les amendements nosII-274 rectifié et II-239 n'ont plus d'objet.

(MM. Thomas Dossus et Jean-Pierre Sueur applaudissent.)

M. le président.  - Amendement n°II-306, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

50 000 000

 

50 000 000

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

50 000 000

 

50 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Pierre Sueur.  - Monsieur le président, nous vous savons très attaché à la loi du chronomètre, qui vous a conduit à m'interrompre tout à l'heure au milieu d'une phrase... Vous eussiez pu au moins me la laisser finir.

Il ne suffit pas de construire de nouvelles prisons pour régler le problème de la surpopulation pénitentiaire. Les États généraux de la justice demandent une régulation, qui doit être compatible avec les choix des magistrats. Vous n'en avez pas parlé, mais j'espère que vous y souscrirez, monsieur le garde des sceaux : limitons les courtes peines, dont les effets sont négatifs, et développons les alternatives à l'incarcération et les aménagements de peine. (M. le ministre exprime son désaccord.)

Vous n'avez pas mentionné cela dans votre propos, mais j'espère que vous y souscrirez. La France ne doit plus être jugée pour indignité. C'est le sens de cet amendement.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Retrait ? Vous voulez soutenir l'agence du travail d'intérêt général (TIG). Il m'a été confirmé que les 30 000 postes de TIG seraient atteints en 2023, mais encore faut-il qu'ils soient occupés : cela relève davantage des décisions des magistrats que de l'administration pénitentiaire.

La direction de l'administration pénitentiaire souhaite en outre multiplier les partenariats avec les régions, notamment pour la formation professionnelle, et renforcer le lien entre travail et insertion professionnelle.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Toujours pas de réponse !

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°II-306 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°70 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption   92
Contre 252

L'amendement n°II-306 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-308, présenté par Mme de La Gontrie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

40 000 000

 

40 000 000

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

40 000 000

 

40 000 000

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

40 000 000

40 000 000

40 000 000

40 000 000

SOLDE

0

0

Mme Laurence Rossignol.  - Nous proposons de créer une juridiction spécialisée contre les violences sexuelles et sexistes. Emmanuel Macron s'était engagé à le faire durant la campagne, et la ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes y est attachée. En ce 25 novembre, nous attendions une déclaration depuis Dijon, où était le Président de la République - pas seulement, nous l'espérons, pour y rencontrer son ami le maire...

Deux parlementaires, notre collègue Dominique Vérien et la députée Émilie Chandler, ont été missionnées pour travailler sur ce thème. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que l'engagement du Président se concrétisera rapidement ?

Les violences faites aux femmes se divisent en trois phases : celles qui précèdent le départ du domicile, le parcours de sortie et, enfin, la post-séparation. Cette troisième phase est le moment où l'homme a perdu la pleine propriété de sa femme, mais continue à la poursuivre de sa vindicte par l'intermédiaire des enfants.

Dans cette phase, la même affaire est traitée par deux ou trois juridictions, si la victime a porté plainte. Les femmes se retrouvent alors coincées. Ces juridictions spécialisées sont donc une nécessité.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Retrait, conformément à la position de la commission des lois. Une telle réforme ne peut être traitée par le biais d'un amendement.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - On parle de crédits !

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Il faut des travaux préparatoires pour régler les questions de répartition des compétences, de procédure et de moyens.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Madame Rossignol, le Président de la République ne s'est pas contenté de rencontrer M. Rebsamen à Dijon. Il a vérifié comment les gendarmes recueillaient les plaintes en matière de violences familiales. J'étais avec lui, c'était passionnant.

Un travail parlementaire, que vous avez mentionné, est en cours. Si le Président de la République ou moi-même s'était exprimé à ce sujet, vous nous auriez reproché de ne pas respecter le travail du Parlement.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce sont les femmes qui souffrent !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Souffrez qu'il se termine : vous aurez les réponses en temps voulu.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il ne s'agit pas que de créer une juridiction spécialisée : nous parlons du budget. Il faut que les travaux de Mmes Vérien et Chandler trouvent leur concrétisation au cours de l'année qui vient. Si vous refusez leur inscription budgétaire, cela signifie que vous refusez de concrétiser leurs recommandations éventuelles.

Mme Dominique Vérien.  - Je souscris à la nécessité d'une juridiction spécialisée. Il n'est pas souhaitable que les juges des affaires familiales prennent des décisions sans concertation avec le juge des enfants ni avec le côté pénal. La juridiction spécialisée fera travailler tout le monde de concert.

Nous mènerons notre mission jusqu'au mois de janvier, avant une remise du rapport en mars.

Nous avons deux perspectives. À court terme, il faut des actions immédiates pour mettre en oeuvre ce qui fonctionne le mieux, à budget constant. L'expérimentation en cours à Châlons-en-Champagne offre des pistes intéressantes. À plus long terme, il faudra sans doute des mesures qui demandent de la formation. Les gendarmes, les magistrats, les services sociaux ne connaissent pas assez la question.

Mme Laurence Rossignol.  - Je salue le travail de Dominique Vérien. Toutefois, c'est le coeur du débat : à moyens constants, allons-nous vers une meilleure coordination des magistrats ? Les jeunes magistrats sont supposés être formés sur cette question à la sortie de l'ENM...

Dans les faits, les protocoles sur ces affaires dépendent de l'engagement personnel des magistrats, qui sont ensuite mutés. Il faut distinguer ce qui relève de la coordination du travail de la question d'une vraie justice spécialisée. Les 80 000 violences faites aux femmes, sans oublier les enfants, sont un sujet majeur de la politique pénale.

Des juridictions spécialisées ont été mises en place en matière de terrorisme ou de pédocriminalité parce que certains délinquants nécessitent une action particulière. Je crains que nous nous en limitions à la première étape : monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Il ne le veut pas...

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Pas du tout : je suis respectueux du travail en cours.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Cela vous arrange !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Il convient d'en attendre les résultats. Vous mettez la charrue avant les boeufs !

Nous avons consacré, légitimement, des moyens importants à la lutte contre les violences faites aux femmes. Voyez ce que nous faisons, et ce que vous avez fait : nous n'avons pas de leçon à recevoir sur les violences intrafamiliales ! Ne polémiquons pas : le Sénat est un lieu d'apaisement.

M. Jean-François Husson.  - C'est vrai !

À la demande du groupe SER, l'amendement II-308 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°72 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 92
Contre 252

L'amendement n°II-308 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-285, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Créer le programme :

Création d'une politique de régulation carcérale

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

30 000 000

 

30 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

Création d'une politique de régulation carcérale

30 000 000

 

30 000 000

 

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

Mme Cécile Cukierman.  - Défendu.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Retrait. Je souscris au fond du propos : une politique pénitentiaire ne peut se résumer à l'immobilier. Toutefois, un mécanisme de régulation carcérale ne réglera pas le problème à court terme - les États généraux de la justice l'envisagent comme une politique de long terme.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

Mme Cécile Cukierman.  - La contradiction humaine est son propre dépassement : je maintiens mon amendement. Certes, ce sont des amendements d'appel, mais ils ouvrent le débat.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°II-285 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°73 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 92
Contre 252

L'amendement n°II-285 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-238, présenté par M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

I.  -  Créer le programme :

Fonds pour la création d'un programme d'accompagnement Justice-Santé mentale

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

15 000 000

 

15 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

Fonds pour la création d'un programme d'accompagnement Justice-Santé mentale

15 000 000

 

15 000 000

 

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Nous proposons de créer un programme d'accompagnement Justice-Santé mentale, inspiré d'un dispositif créé au Québec il y a vingt ans. Rappelons que les détenus sont huit fois plus touchés par des problèmes de santé mentale que la population générale.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Un fonds spécifique n'est pas le véhicule le plus adapté. Privilégions une politique transversale entre tous les services, sachant qu'il existe déjà des actions du ministère en direction des établissements pénitentiaires.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Les centres psychiatriques pour personnes détenues relèvent du ministère de la santé et de la prévention. Mais l'administration pénitentiaire se mobilise au quotidien pour améliorer la prise en charge des détenus nécessitant de tels soins. Cette action conjointe s'inscrit dans le cadre d'une feuille de route qui sera reconduite l'année prochaine. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°II-238 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-237, présenté par M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

Dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

5 000 000

5 000 000

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Cet amendement ouvre les crédits nécessaires au recrutement d'éducateurs de PJJ. Cette administration est en proie, depuis des années, à une crise matérielle et de vocations. La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a appelé à un bilan des centres éducatifs fermés actuels avant d'en construire de nouveaux. Renforçons plutôt les moyens des acteurs de l'éducation et de la prévention auprès des mineurs.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - La PJJ souffre, en effet, d'un déficit d'attractivité, mais je ne partage pas votre constat sur les moyens. Les crédits destinés à cette administration augmentent de 10,3 %, essentiellement pour financer des revalorisations salariales, liées notamment au Ségur. Des progrès sont donc déjà prévus. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis. Le personnel de la PJJ bénéficiera de 77 millions d'euros supplémentaires, soit une hausse de 14 %, et 82 nouveaux emplois seront créés.

L'amendement n°II-237 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-236, présenté par M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

 Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

4 000 000

 

4 000 000

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

4 000 000

 

4 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Il s'agit de revaloriser la rémunération des greffiers.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Je partage votre préoccupation. Un retard avait été accumulé, mais des efforts sont entrepris depuis deux ans. L'année prochaine, 191 postes seront créés, et la rémunération annuelle des greffiers augmentera de 1 500 euros.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Les greffiers jouent un rôle essentiel. C'est pourquoi nous les revalorisons : leur traitement a augmenté de 12 % en deux ans, et la hausse se poursuivra. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°II-236 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-325, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus, Breuiller, Benarroche, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

2 500 000

 

2 500 000

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

2 500 000

 

2 500 000

Conseil supérieur de la magistrature

Dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

2 500 000

2 500 000

2 500 000

2 500 000

SOLDE

0

0

M. Thomas Dossus.  - Le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan est l'un des plus vétustes de France. Le constat de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté est accablant : taux d'occupation de 199 %, et jusqu'à 235 % à la maison d'arrêt des hommes. Le juge des référés a enjoint le ministère de rénover les cellules. Il faut agir en urgence pour garantir les droits fondamentaux, d'autant que la reconstruction prévue ne se terminera qu'en 2027 et suffira à peine à absorber la surpopulation actuelle. Cette situation, hélas, n'est pas isolée. La France a été condamnée à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l'homme.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Retrait de cet amendement d'appel. Comme rapporteur spécial, je me rendrai à Bordeaux-Gradignan l'année prochaine. Le directeur de l'administration pénitentiaire m'a répondu que 142 millions d'euros étaient dévolus à la maintenance et à l'entretien des bâtiments, contre 110 millions d'euros habituellement.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Ces situations nous préoccupent vivement. J'ai déjà évoqué la situation à Gradignan avec la sénatrice Delattre. Nous prévoyons la mise en service progressive du nouveau centre, dont la première phase se terminera l'année prochaine. Ces travaux répondront aux injonctions du tribunal administratif, s'agissant notamment de la luminosité des cellules. Sont également prévues la remise en état des douches, la résorption des infiltrations et des reprises de peinture. L'enveloppe consacrée à la rénovation a doublé depuis 2018. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°II-325 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-312 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier, Roux, Bilhac et Cabanel et Mme Pantel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

Dont titre 2

1 000 000 

 

1 000 000 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

1 000 000 

 

1 000 000 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 1 000 000

 1 000 000

1 000 000 

1 000 000 

SOLDE

M. Stéphane Artano.  - Mme Delattre propose de renforcer les moyens numériques des services pénitentiaires d'insertion et de probation (Spip) pour que leurs agents assurent au mieux leurs missions à distance, en écho au rapport sénatorial « Mieux organiser la Nation en temps de crise ».

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Retrait. Le plan de transformation numérique de la justice inclut les Spip, et le ministère confirme que tous les agents pouvant exercer leurs missions à distance sont équipés.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

L'amendement n°II-312 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-341 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 1 000 000

 

1 000 000

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

 

 

 

Accès au droit et à la justice

1 000 000

 

1 000 000

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 1 000 000

1 000 000 

 1 000 000

 1 000 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Pierre Sueur.  - Mme Filleul entend favoriser l'accès à internet en prison. Dans un rapport de 2020, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a jugé cette mesure prioritaire, considérant que la privation d'internet entravait la liberté d'expression des personnes détenues et leur droit à préparer leur réinsertion. La même année, la mission d'information sénatoriale sur la lutte contre l'illectronisme a qualifié cette situation de double peine. Plusieurs pays autorisent déjà des accès contrôlés à internet, dont l'Allemagne et les États-Unis.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - L'interdiction n'est pas totale : une expérimentation est menée, avec des tablettes, pour que les détenus puissent se connecter à leur dossier.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce n'est pas de cela que nous parlons...

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Cette expérimentation se poursuivra en 2023. Retrait.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous savons bien qu'une expérimentation est en cours : nous proposons de l'accélérer.

L'amendement n°II-341 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-286, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Créer le programme :

Renforcement des moyens visant à favoriser les peines alternatives et les aménagements de peines de la protection judiciaire de la jeunesse

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

 (en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Justice judiciaire

dont titre 2

 

 

 

 

Administration pénitentiaire

dont titre 2

 

 

 

 

Protection judiciaire de la jeunesse

dont titre 2

 

600 000

 

1 900 000

Accès au droit et à la justice

 

 

 

 

Conduite et pilotage de la politique de la justice

dont titre 2

 

 

 

 

Conseil supérieur de la magistrature

dont titre 2

 

 

 

 

Renforcement des moyens visant à favoriser les peines alternatives et les aménagements de peines de la protection judiciaire de la jeunesse

600 000

 

1 900 000

 

TOTAL

600 000

600 000

1 900 000

1 900 000

SOLDE

0

0

Mme Cécile Cukierman.  - Défendu.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Retrait, car l'amendement est satisfait par les réformes en cours visant à la diversification et une meilleure adaptation des peines prononcées contre les mineurs.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Même avis.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°II-286 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°74 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption   92
Contre 252

L'amendement n°II-286 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Justice », modifiés, sont adoptés.

Les articles 44 et 44 bis sont successivement adoptés.

Article 44 ter

M. le président.  - Amendement n°II-269, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet article supprime la référence au principe de l'encellulement individuel, inscrit dans notre droit depuis 1875. En 2009, le rapporteur Jean-René Lecerf avait plaidé avec force pour le maintien de cette perspective, au nom de la dignité et de la préparation de la réinsertion. La suppression de cette référence serait un mauvais signe.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Nous ne nous satisfaisons pas de ce nouveau moratoire sur l'encellulement individuel, mais l'objectif est totalement inatteignable. Pendant la crise sanitaire, où le nombre de détenus avait baissé, le taux d'encellulement individuel n'a pas dépassé 35,2 %. Supprimer l'article ne changerait rien à la situation. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - J'aimerais, moi aussi, régler le problème. Nous sommes au pied du mur, au propre comme au figuré. Mais les prisons n'apparaissent pas par génération spontanée. Le principe de réalité s'impose donc à nous. Avis défavorable.

L'amendement n°II-269 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-15, présenté par M. Lefèvre, au nom de la commission des finances.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 8 de l'ordonnance n° 2022-478 du 30 mars 2022 portant partie législative du code pénitentiaire est ainsi modifié :

1° À la fin du premier alinéa, l'année : « 2022 » est remplacée par l'année : « 2027 » ;

2° Au second alinéa, les mots : « de l'année 2022 » sont remplacés par les mots : « des années 2025 et 2027 ».

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - L'article prolonge jusqu'à la fin 2027 le moratoire sur l'encellulement individuel. Nécessaire, cette mesure n'en est pas moins un aveu des retards accumulés par le Gouvernement en matière de politique pénitentiaire, laquelle ne consiste pas seulement à construire des places de prison supplémentaires. Je propose que le Gouvernement nous tienne informés, en 2025 puis en 2027, de l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Le Gouvernement est généralement défavorable aux rapports...

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Le Sénat aussi...

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Mais, sur ce sujet essentiel, vous aurez les rapports demandés. Avis favorable.

L'amendement n°II-15 est adopté.

L'article 44 ter, modifié, est adopté.

Après l'article 44 ter

L'amendement n°II-250 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-338 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 44 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la charge de travail des conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation et l'impact sur les finances publiques des nécessités du recrutement de nouveaux conseillers afin que ceux-ci puissent pleinement mener à bien leurs missions.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je connais, moi aussi, le discours cent fois réitéré sur les demandes de rapport. Mais il convient de prendre en compte les conditions de travail au sein des Spip.

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Le ministère prépare un rapport sur les conditions de travail des magistrats. Fera-t-il de même pour les autres professionnels de la justice, eux aussi soumis à d'importantes tensions ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Chassez le naturel, il revient au galop... Avis défavorable. Les informations demandées sont connues : le nombre moyen de dossiers suivis par chaque conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation est passé de 80 à 71, soit une baisse de 13 %.

L'amendement n°II-338 rectifié bis n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 19 h 50.

présidence de Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

La séance reprend à 21 30.

Administration générale et territoriale de l'État

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances .  - La promesse du Gouvernement de réarmer l'État territorial trouve une traduction budgétaire très limitée. Les effectifs augmenteront de 48 ETP seulement en 2023, soit une hausse de 0,16 %, avancée bien modeste au regard des enjeux.

Les préfets - en particulier les préfets de région - sont au coeur de la réforme, car ils peuvent redéployer jusqu'à 2 000 ETP entre différentes missions budgétaires. Mais la manière dont le Gouvernement a introduit cette disposition laisse à désirer quant à l'information du Parlement.

Les secrétariats généraux communs (SGC) départementaux rencontrent des difficultés, par manque d'anticipation. La Cour des comptes, dans son rapport sur les effectifs de l'administration territoriale, considère que les suppressions de postes de ces dernières années n'ont pas été réalistes dans les préfectures, qui doivent les compenser en recourant à des contrats courts, ce qui désorganise les services. Il semble que le Plan préfectures nouvelle génération ait été conçu pour adapter les missions aux effectifs, et non l'inverse.

Les effectifs ayant perdu 4 748 ETP en dix ans, il faudrait, au rythme actuel, un siècle pour rétablir la situation de 2010 !

Le document stratégique Missions prioritaires des préfectures 2022-2025 ne procède à aucune hiérarchisation. L'État doit clarifier son discours : ou bien les préfectures doivent prioriser, ou bien toutes leurs missions sont importantes - ce que je pense - et il faut beaucoup plus d'effectifs.

Depuis plusieurs mois, les délais d'obtention d'une carte nationale d'identité (CNI) et d'un passeport atteignent des délais inacceptables ; fin mai, on ne pouvait espérer obtenir un passeport avant mi-septembre ! L'augmentation du nombre de dispositifs de recueil n'est pas en phase avec les besoins.

Des renforts en contractuels sont prévus pour l'accueil des étrangers. Il faudrait mieux fidéliser les compétences, mais le Gouvernement fait le choix regrettable de recourir à des vacataires.

Les intervenants sociaux en commissariat et en brigade de gendarmerie (ISCG) jouent un rôle essentiel pour l'accueil des femmes victimes de violence ou les personnes en situation de handicap, notamment. L'État devrait au minimum suivre la recommandation de l'inspection générale de l'administration (IGA) de prise en charge d'au moins 33 % de ce service, à financer via le fonds interministériel de la prévention de la délinquance et de la radicalisation (FIPDR).

La commission des finances a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission.

Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis de la commission des lois .  - Le programme 232 « Vie politique » n'appelle que peu de remarques, étant donné le calendrier électoral.

L'augmentation des crédits du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » sert à financer la stratégie immobilière du ministère et le renforcement des moyens du FIPDR.

L'enjeu essentiel est donc bien le programme 354 « Administration territoriale de l'État ». Le projet annuel de performance prévoit un « réarmement de l'État territorial » : je salue la prise de conscience du Gouvernement, qui comprend enfin que l'État ne peut pas continuer à diminuer sa présence dans les territoires sans prendre le risque d'amplifier le sentiment d'abandon.

Mais cette annonce arrive après des coupes drastiques : entre 2012 et 2020, les effectifs ont fondu de 14 %.

Les SGC départementaux ont été créés en 2021 pour mutualiser et faire des économies. Nous n'avons pas eu le temps de les évaluer, mais le Gouvernement prévoit déjà un nouveau plan pour 2025.

Sur les six nouvelles sous-préfectures, cinq sont en fait des dé-jumelages de sous-préfectures fermées ; c'est dérisoire ! Les 48 ETP supplémentaires en 2023 ne représentent qu'une hausse de 0,16 %. L'impact financier réel de la hausse des crédits est à replacer dans le contexte de la revalorisation du point d'indice.

Ce réarmement est en fait une opération de communication : la commission des lois a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits.

M. Dominique Théophile .  - Les crédits de la mission augmentent de 18,32 % en autorisations d'engagement et de 4,14 % en crédits de paiement. Le programme 354, qui représente 60 % de la mission, connaît une hausse de 13,3 % en crédits de paiement, pour renforcer de manière inédite les missions de l'État dans les territoires.

Je salue la création de 210 ETP en trois ans, dont 48 en 2023, ce qui met fin à vingt années de réduction des effectifs ayant participé à l'érosion des liens entre l'État et les citoyens.

Les territoires les plus exposés vont aussi profiter de redéploiement, notamment Mayotte.

Le réseau des apprentis dans la fonction publique territoriale va aussi s'étoffer : il y avait 622 apprentis en 2021, soit le double par rapport à l'année précédente.

L'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) verra aussi ses effectifs augmenter.

Le programme 232, sans surprise, enregistre une baisse importante de crédits, étant donné l'absence d'élections au suffrage direct l'année prochaine. Les 37 millions d'euros qui y sont inscrits seront dévolus aux élections territoriales en Polynésie française et aux élections sénatoriales.

Le programme 216 bénéficie de la plus forte augmentation de crédits, avec 1,96 million d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement... Le FIPDR est doté de 84 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Ne boudons pas notre plaisir de voir ce réarmement de l'État territorial et adoptons ces crédits.

Mme Florence Blatrix Contat .  - Le programme 354 fait l'objet d'un constat unanime : le retrait de l'État territorial, qui est bien dans une phase de recul, comme le montrent le rapport de Mme Canayer et de M. Kerrouche et celui de la Cour des comptes. L'État a perdu 14 % de ses effectifs en 20 ans, et les services départementaux sont bien plus touchés que les services nationaux.

La Cour des comptes juge irréaliste les schémas d'emploi qui mettent à mal les missions des préfectures, non hiérarchisées.

Le rapport de nos collègues le montre : la baisse drastique des effectifs - moins 36 % en dix ans dans les directions départementales interministérielles, moins 10 % en préfecture - est compensée par des personnels précaires, ce qui occasionne une perte de compétence et complexifie la gestion des services.

Le Gouvernement partage lui-même ce constat. Le projet annuel de performance évoque un budget renforçant la capacité d'action de l'État sur le terrain et mettant fin à vingt ans de baisse systématique des effectifs départementaux. Mais les moyens sont-ils en adéquation avec cette ambition ? Quelle est la doctrine territoriale de l'État ?

Le réarmement n'est pas au rendez-vous. La hausse des effectifs et des crédits est en trompe-l'oeil, avec la hausse du point d'indice. Les redéploiements ne sont pas présentés, et on constate le vieillissement des agents territoriaux. Les moyens alloués peinent à convaincre.

La délivrance des titres nationaux et des titres de séjour prend de plus en plus de temps. Selon la Cour des comptes, la qualité de contrôle se dégrade, ses recommandations de 2016 n'ayant pas été suivies.

Quelle est donc la doctrine territoriale de l'État ? Soit il faut sélectionner les missions en hiérarchisant, soit il faut donner à l'État territorial les moyens d'assumer toutes ses missions.

Peu de domaines de l'action publique ont connu tant de réformes, sans évaluation ; l'État doit oeuvrer pour une action lisible et garantir des services publics de qualité.

Les investissements dans le numérique et l'immobilier du programme 216 sont un bon signe. Mais il faudra évaluer les effets du déploiement des systèmes numériques sur le long terme, car le numérique reste limité pour porter l'action territoriale de l'État.

Nous voterons contre ces crédits.

Mme Éliane Assassi .  - Rapporteure pour avis des crédits de cette mission l'année dernière, j'avais déjà déploré la stagnation de ses moyens. Il y a cette année une hausse, mais très légère. Les territoires doivent être réaffirmés, comme le dit Jean Castex.

La crise des gilets jaunes et la crise sanitaire ont montré les limites du désengagement de l'État territorial. Où est l'égalité républicaine tant promise ? Les files d'attente devant les préfectures, pour obtenir un titre de séjour ou faire une demande de naturalisation, montrent qu'il n'y a plus assez d'agents pour accueillir et accompagner. La réforme est imposée d'en haut.

Les réformes administratives n'ont fait qu'alimenter la défiance, non seulement chez les citoyens, mais aussi au sein même de l'administration.

Avec la dématérialisation, la rationalisation prime sur l'humain. Les maisons France Services montrent des limites : les agents n'ont pas la formation adéquate. Des milliers de personnes ne peuvent accéder aux services publics. La Défenseure des droits alerte sur cette situation, qui remet en cause l'État de droit.

Les délais d'attente pour les cartes nationales d'identité et les passeports traduisent les insuffisances quotidiennes des préfectures. Les élus locaux ne veulent qu'une chose : travailler en intelligence avec les préfectures. Le couple maire-préfet fut tant applaudi pendant la crise sanitaire, mais le mariage n'est pas pour demain ! Les décisions prises d'en haut ne fonctionnent pas. Ce n'est qu'avec plus de moyens humains et financiers que nous pourrons réarmer les territoires.

Nous ne voterons pas les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

Mme Nathalie Goulet .  - La fraude documentaire, dont certains évitent de parler par pudeur ou dogmatisme, fait partie des sujets très importants qui concernent cette mission.

Je souhaite vous raconter une histoire. Un individu fiché S, chef d'un réseau de faussaires, a pu, grâce à 73 fausses identités, détourner 193 véhicules, tout cela dans une affaire de financement du terrorisme, alors qu'il était mis en examen depuis 2010.

Un commissariat de l'Orne a saisi l'association des maires du département : lors de la demande de CNI en mairie, les usagers présentent un certificat de naissance. Mais les mairies ne peuvent vérifier son authenticité que via le fichier Comedec : son accès ne devrait-il pas être gratuit ?

Lorsque nous voulons améliorer un logiciel, nos amendements sont déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution : c'est absurde ! Les voyous se présentent avec de faux certificats de naissance ; sans pouvoir vérifier, l'agent délivre une vraie carte d'identité, mais avec une identité frauduleuse. On pourrait facilement y remédier.

Il n'existe toujours pas de Cerfa pour les actes de naissance : chaque mairie utilise son propre papier à en-tête, ce qui facilite les fraudes. Le Gouvernement ne pourrait-il pas utiliser le Fonds européen pour la sécurité intérieure afin de financer ces propositions ? L'objet de ce fonds de 98 millions d'euros est de lutter contre la fraude documentaire et d'aider à l'interopérabilité des systèmes d'information.

Madame la ministre, il semblerait que le fichier Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) soit en cours d'extinction... Qu'en est-il ?

Je souhaite enfin, comme chaque année, exprimer mes doutes sur le comité interministériel de prévention de la radicalisation (CIPDR), qui distribue des fonds sans évaluation. Des évaluations poussées sont nécessaires. Un comité scientifique pour la lutte contre la radicalisation s'est réuni trois fois en 2017, trois fois en 2018 et six fois en 2019... Et en 2021 et 2022 ?

Mme Maryse Carrère .  - (M. Bernard Fialaire applaudit.) Les montants annoncés semblent satisfaisants de prime abord, en hausse tant pour les autorisations d'engagement que les crédits de paiement. Des progrès sont à noter dans le domaine du numérique - je pense notamment au réseau radio du futur (RRF). Une rationalisation des effectifs devra répondre aux besoins réels des territoires.

Comment faire pour ne plus avoir à déplorer le recul de l'État dans les territoires, le recul de l'accueil in situ au profit de la dématérialisation ? Le tout-numérique exclut de fait une partie de nos concitoyens. Nous nous battons pour la décentralisation, mais cela implique la déconcentration.

J'entends aussi les critiques des rapporteures ; c'est que nous sortons de dix ans de disette. Cette année en marque la fin, avec une stabilisation des emplois, qui devra s'inscrire dans la durée. Il faudra mettre fin aux contrats courts et précaires.

La multiplication des agences, éloignées des usagers, pose problème. L'ANTS a montré son échec avec la durée d'obtention des cartes d'identité et passeports. Cela touche le quotidien et renforce les clichés sur l'administration : lenteur, mille-feuille, paperasse...

J'ai contacté un avocat spécialisé dans les recours en cas de carence de l'ANTS. Des juges administratifs ont soumis l'ANTS à des astreintes pour des retards de délivrance de permis de conduire. Le RDSE s'abstiendra sur cette mission. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

Mme Agnès Canayer .  - C'est le même marteau qui frappe, mais on a raccourci le manche... La métaphore est toujours valable : le préfet incarne l'État au plus près des administrés.

Depuis 1980, au fur et à mesure du mouvement de décentralisation, l'administration territoriale de la République a évolué.

La bonne santé du partenariat entre les collectivités et l'État conditionne la qualité des services publics et la bonne gestion des ressources publiques.

L'administration générale et territoriale de l'État est composée de trois programmes. Elle est en hausse globale, mais inégalement. Elle n'est pas à la hauteur des exigences, comme l'a souligné Cécile Cukierman au nom de la commission des lois.

Les moyens alloués n'effacent pas une décennie de retard : un quart des effectifs physiques ont été perdus par les sous-préfectures entre 2012 et 2019. La réflexion doit porter sur le rôle même de l'État territorial. Comment rétablir la confiance et mieux associer les élus de terrain, pour plus de visibilité ? Comment donner une cohérence aux réformes successives ?

Avec Éric Kerrouche, nous avons rendu au nom de la délégation aux collectivités territoriales un rapport intitulé « À la recherche de l'État dans les territoires ».

Nous déplorons une succession de réformes depuis quinze ans. Parmi ceux que nous avons interrogés, quatre élus sur cinq estiment ne pas avoir été suffisamment associés aux réformes territoriales de l'État ; 43 préfets et sous-préfets pensent de même. La moitié des maires de villes de moins de 2 000 habitants estiment les services publics défaillants dans leur territoire. La plupart se tournent vers l'ingénierie privée.

Il faut que le préfet ait plus de poids. La crise sanitaire a montré l'importance du couple maire-préfet. Le préfet doit rester plusieurs années sur le territoire et être le délégué de toutes les agences de l'État. Il faut garantir les moyens, sortir de la logique systématique des appels à projets et développer les moyens du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). L'accueil physique dans les préfectures doit être garanti. Il faut une véritable déconcentration de l'État dans les territoires, ce qui n'est pas encore le cas.

Le groupe Les Républicains ne votera pas ces crédits.

M. Alain Marc .  - Les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » soutiennent le coeur de nos institutions républicaines. Ils augmentent de 10,32 % en autorisations d'engagement et 4,14 % en crédits de paiement. Mais c'est insuffisant au regard des enjeux de la mission. Le réseau préfectoral est affaibli par les réformes successives.

Le plan préfectures nouvelle génération (PPNG) était orienté sur la dématérialisation des formalités administratives. De nombreux points de contacts ont été supprimés. Si l'entrée dans le numérique est nécessaire, elle ne doit pas aggraver la fracture numérique. Cela a créé un sentiment d'abandon des habitants des territoires ruraux, malgré l'implantation des maisons France Services.

Nous connaissons tous ces délais pour le renouvellement d'une carte d'identité ou d'un passeport : quatre à cinq mois d'attente ! Les moyens humains restent indispensables.

La réduction de la qualité de l'ingénierie territoriale est flagrante. Les départements doivent souvent pallier l'insuffisance de l'État. Aveyron Ingénierie apporte ainsi soutien et conseil aux communes. La charge incombe désormais au département et non à l'État.

La présence de l'État au coeur des territoires est plus que jamais nécessaire, mais ce budget ne semble pas à la hauteur des enjeux malgré la prise de conscience.

La majorité des membres du groupe Les Indépendants s'abstiendra.

M. Daniel Breuiller .  - L'ancien maire d'Arcueil souffre pour ses sous-préfets aux moyens rabougris. C'est peut-être le cas aussi à Beauvais ? (Mme la ministre se récrie.)

L'administration territoriale a perdu 11 763 ETP et les préfectures 4 748, soit 14 % du total - la baisse atteint même 24 % pour les seules sous-préfectures. Le budget 2023 est insuffisant pour combler ce retard.

La création des SGC, déconcentrés et interministériels, sous l'autorité des préfets, nous interroge. Les premiers retours font état de gains incertains.

La commission des lois a rappelé que les élus locaux ne peuvent compter que sur la bonne volonté des sous-préfets, qui ont une connaissance de moins en moins fine du terrain.

Nous espérons que le plan préfectures nouvelle génération 2022-2025 marque un réel progrès.

Le GEST a alerté contre une dématérialisation massive. L'illectronisme touche 13 millions de Français. Chacun connaît des situations délicates, voire ubuesque dues à la fin des accueils aux guichets. Nous saluons donc le début de l'augmentation attendue d'effectifs d'agents titulaires consacrés aux missions d'accueil et espérons que cela touchera aussi la gestion des titres de séjour. À la veille de l'examen d'une loi sur l'immigration, les délais en préfecture ne sauraient justifier une aggravation de la situation des étrangers.

Nous regrettons l'absence de la démocratie locale et participative dans les crédits.

Des moyens inadaptés, un accueil insuffisant, un recours trop important aux contractuels : le GEST ne votera pas les crédits de cette mission.

M. François Bonhomme .  - Cette mission se concentre sur le réseau préfectoral et, en premier lieu, les sous-préfectures.

Maintes fois, vous avez affirmé votre intention de réarmer l'État territorial. Beaucoup ont regretté la perte de la présence de l'État territorial au fil des réformes. La création des SGC départementaux est trop récente pour en évaluer l'effet en termes d'économies et de mutualisations. Même chose pour la mutualisation au sein des directions départementales interministérielles.

La succession des plans d'actions n'a pas amélioré les choses - s'agirait-il d'une stratégie de communication ? Nous sommes à la croisée des chemins. Depuis dix ans, il y a eu une perte inégalée d'effectifs. Ce n'est que cette année que cette trajectoire est interrompue. Le sentiment d'abandon domine. Nous avons tous connaissance de services fonctionnant mal, en raison de contrats courts et de suppressions sans discernement entraînant la désorganisation des services.

Nous avons regretté la fusion des services déconcentrés - notamment relevant de l'écologie, et du social - au sein des directions départementales interministérielles et les suppressions portant sur l'échelon départemental tandis que les services régionaux étaient épargnés.

Certaines fonctions ou territoires manquent d'attractivité. Il n'y a rien dans ce budget pour améliorer la situation.

La Cour des comptes a formulé des propositions, recommandant un guide méthodologique pertinent que le ministère de l'intérieur doit appliquer en tant que chef de file de l'administration générale et territoriale de l'État. Nous attendons un redéploiement en fonction des besoins de chaque région.

Il semble que vous envisagiez de créer un observatoire. Qu'en est-il vraiment ? Tout doit se faire à l'aune du lien de proximité en donnant aux services les moyens de fonctionner, en les rendant plus accessibles et avec un haut niveau de qualité. (Mme Agnès Canayer applaudit.)

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Gérald Darmanin, actuellement à Bruxelles pour le conseil Justice et affaires intérieures.

La mission « Administration générale et territoriale de l'État » permet au ministère de l'intérieur de développer ses fonctions essentielles: scrutins électoraux, présence de l'État sur le territoire, déclinaison locale des politiques nationales.

Elle porte aussi la marque des chantiers d'envergure de la Lopmi 2023-2027 pour le réarmement de l'État dans les territoires et le pilotage stratégique des politiques.

Dans le cadre de la hausse globale de 1,25 milliard d'euros du ministère de l'intérieur, la mission « Administration générale et territoriale de l'État » voit une augmentation de 10,32 % des autorisations d'engagement et de 4,14 % des crédits de paiement. Cela témoigne d'une volonté ambitieuse.

Plus de la moitié des crédits sont fléchés vers le programme 354.

Le Président de la République a lancé cette dynamique : le 10 octobre, il a annoncé la création de cinq sous-préfectures en métropole et une en Guyane. Cela suppose des effectifs nouveaux. Nous réarmons les territoires. Nous voulons créer 210 ETP en trois ans, dont 50 en 2023. Ils appuieront les missions clefs : délivrance de titres sécurisés, accueil des étrangers, lutte contre la radicalisation et le terrorisme.

Cette consolidation bénéficiera à tous nos concitoyens et aux élus locaux, et in fine à l'ensemble du pays.

Nous n'abandonnons ni les efforts de rationalisation ni ceux de mutualisation.

Année charnière, 2021 a vu la mise en oeuvre des SGC départementaux, qui rendent plus efficaces la gestion budgétaire, les achats publics, la gestion des ressources humaines et des systèmes d'information.

Nous voulons maîtriser les coûts, tant en administration centrale que dans les territoires, tout en améliorant les fonctions supports. Le numérique est une priorité. La direction interministérielle du numérique (Dinum) se voit attribuer des moyens nécessaires comme le cloud de seconde génération et le réseau radio du futur : 498 millions d'euros.

Nous allons aussi optimiser le réseau immobilier. Deux projets sont emblématiques de ces synergies : la création d'un centre unique du renseignement intérieur, qui engage 43 millions d'euros en 2023. Nous créons aussi un pôle transversal des directions support du ministère.

Le ministère veut de nouveaux hôtels de police et commissariats. Pas moins de 384 millions d'euros sont consacrés à la maintenance lourde du bâti et 6 millions d'euros spécifiquement à la rénovation énergétique des bâtiments préfectoraux.

Enfin, 84 millions d'euros sont consacrés au financement de la prévention de la délinquance et de la radicalisation, une hausse de 21 %.

Le programme 232 « Vie politique » est le seul en baisse, en raison d'un calendrier électoral moins chargé - hormis les élections territoriales en Polynésie française et les sénatoriales.

M. François Bonhomme.  - C'est déjà bien ! (M. Jérôme Bascher rit.)

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - Cette mission renforcera l'efficacité de l'État dans tous les territoires. Il ne s'agit pas d'une hausse de toutes les dépenses, mais d'engagements ciblés, gages d'efficacité.

J'ai bien entendu vos critiques, mais j'attire votre attention sur cet effort historique : jamais le ministère de l'intérieur n'a obtenu un tel budget, mais il est difficile de rattraper vingt ans de baisse. J'espère qu'un consensus sortira de la chambre des territoires.

Examen des crédits de la mission et de l'article rattaché

Article 27 - État B

Mme la présidente.  - Amendement n°II-241, présenté par M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État dont titre 2

15 000 000

 

15 000 000

 

15 000 000

 

15 000 000

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiquesde l'intérieur dont titre 2

 

15 000 000

 

15 000 000

 

15 000 000

 

15 000 000

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

M. Daniel Breuiller.  - Nous voulons augmenter de 15 millions d'euros les dépenses de personnel prévues à l'action 2. Les centres d'expertise et de ressources des titres (Cert) ne disposent pas des ressources humaines nécessaires pour assurer leurs missions. Une hausse ponctuelle permettrait de rattraper au moins en partie le retard.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale.  - Le Gouvernement augmente sensiblement le nombre de contractuels des Cert. Les demandes de cartes d'identité et de passeports sont traitées par 161 contractuels en 2022, contre seulement 35 en 2021.

L'ANTS m'a indiqué que la hausse des demandes de titres était durable : la priorité est donc le recours à des fonctionnaires titulaires. La Cour des comptes dénonce les contrats courts. Cela étant, votre proposition n'est pas pérenne. Retrait.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - L'accueil reste une priorité et les Cert bénéficieront d'une partie des 350 emplois créés entre 2023 et 2027. L'État renforce en outre, avec 21 millions d'euros, l'aide aux communes pour accroître le nombre de rendez-vous de délivrance des titres sécurisés. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°II-241 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-240, présenté par M. Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État dont titre 2

7 000 000

 

7 000 000

 

7 000 000

 

7 000 000

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiquesde l'intérieur dont titre 2

 

7 000 000

 

7 000 000

 

7 000 000

 

7 000 000

TOTAL

7 000 000

7 000 000

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

0

M. Daniel Breuiller.  - Le plan préfectures nouvelle génération 2022-2025 prévoit un recours massif à la dématérialisation, la fin de l'accueil physique des usagers et la mutualisation de fonctions supports. Les conséquences sont désastreuses : les étrangers ne peuvent plus obtenir de rendez-vous au guichet, alors qu'il est presque impossible de prendre rendez-vous en ligne. Chaque jour, des personnes sont incapables de régulariser leur situation, à cause du manquement des services publics.

Les juridictions font face à une hausse des référés « mesures utiles » pour obtenir un rendez-vous en préfecture. La Cimade constate que des ruptures de droit au séjour sont dramatiques - je l'ai constaté moi-même - occasionnant interpellations policières et difficultés d'accès à l'emploi, à la formation et aux droits sociaux.

Le Conseil d'État, le 27 novembre 2019, enjoint à l'État de proposer une alternative à la saisine électronique. La hausse de l'accueil pour 2023 reste trop modeste, d'où cet amendement.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale.  - Retrait. Le ministre de l'intérieur a, en partie, pris la mesure des difficultés en déployant 190 ETP de plus par an jusqu'en 2024, en parallèle de la montée en puissance de l'administration numérique pour les étrangers en France (Anef). Comme pour les Cert, c'est la pérennité des postes qui est la clé. Des renforts ponctuels ne sont pas satisfaisants.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - Entre 2010 et 2020, les préfectures ont perdu 4 700 emplois. Le Gouvernement stabilise la situation. Une partie des 350 nouveaux emplois renforcera l'accueil, qui reste une priorité ministérielle. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°II-240 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-112 rectifié, présenté par MM. Decool, Wattebled, A. Marc, Guerriau et Grand, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Levi et Calvet, Mme Guidez, M. Belin, Mme Férat et MM. Moga et Lafon.

I.  -  Créer le programme :

Automatisation du répertoire électoral unique

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territorialede l'État dont titre 2

 

 

 

 

Vie politique

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

 

 

 

Automatisation du répertoire électoral unique

1 000 000

 

1 000 000

 

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

M. Alain Marc.  - Le droit de vote est le résultat de combats acharnés. Or le taux de participation aux dernières élections départementales et régionales est tombé comme un couperet : l'abstention a atteint 65,31 % au second tour - pas moins de 82 % chez les jeunes. La proposition de loi de MM. Decool et Wattebled propose d'automatiser la mise à jour du répertoire électoral unique. Cet amendement prévoit un programme « Automatisation du répertoire électoral unique » en ce sens, doté d'un million d'euros.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale.  - Je partage votre constat. Cependant, votre amendement semble poser problème au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD). De plus, une automatisation fiable est complexe à mettre en oeuvre - peut-être la ministre pourra-t-elle apporter des précisions. Il existe d'autres moyens d'inciter les électeurs à voter. Retrait ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - Votre proposition n'apporte qu'une réponse partielle. Le citoyen est libre de s'inscrire où il le souhaite, ce que l'amendement remet en cause. De plus, le ministre de l'intérieur et des outre-mer expertise la fluidification de la procédure de réinscription. Avis défavorable.

L'amendement n°II-112 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-339 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État dont titre 2

 

 

Vie politique

dont titre 2

 

1 000 000

 

1 000 000

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

1 000 000

1 000 000

TOTAL

 1 000 000

  1 000 000

  1 000 000

  1 000 000

SOLDE

 0

 0

Mme Florence Blatrix Contat.  - Nous voulons développer les travaux d'intérêt général (TIG) à l'échelon local. Une dotation fléchée au FIPDR aiderait les communes. Les travaux d'intérêt général sont une bonne alternative à l'incarcération de courte durée, mais il reste des freins. Les référents locaux TIG les lèveraient.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale.  - Ne changeons pas la logique du FIPDR, qui n'est pas tourné vers la sanction ni vers la réparation. Retrait.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - En 2023, le FIPDR est renforcé de 4,84 millions d'euros, afin de financer la stratégie nationale de prévention de la délinquance. Votre amendement est donc satisfait. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°II-339 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-294 rectifié, présenté par Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisationsd'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administrationterritoriale de l'État dont titre 2

1

 

1

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

1

 

1

TOTAL

1

1

1

1

SOLDE

0

0

Mme Florence Blatrix Contat.  - Les demandes d'installation de production électrique renouvelable engorgent les préfectures, car le processus d'examen préalable est long et implique plusieurs directions, en plus des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal).

Le Sénat, dans le cadre de l'examen du projet de loi sur les énergies renouvelables, a voté pour la création d'un référent départemental unique. Toutefois, les services administratifs restent sous-dimensionnés.

Cet amendement d'appel est l'occasion d'interroger le Gouvernement sur la teneur de son engagement en faveur des services de l'État.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale.  - Retrait. Il est, en effet, indispensable de mieux coordonner les services pour ne pas faire obstacle aux implantations. Madame la ministre, nous ne pouvons accepter que des blocages freinent les projets.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - Les préfectures ont bien pour priorité l'amélioration de la coordination des expertises. L'administration territoriale bénéficie d'emplois stabilisés, après dix années de baisse continue des moyens humains des préfectures, avec 350 emplois créés entre 2023 et 2027. Avis défavorable.

Mme Florence Blatrix Contat.  - La France est le seul État membre de l'Union européenne à avoir manqué sa cible en matière de développement des énergies renouvelables ; elle doit s'acquitter d'une amende de 500 millions d'euros. Nous ne pouvons plus échouer.

L'amendement n°II-294 rectifié est retiré.

Les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » ne sont pas adoptés.

Article 41 B

M. le président.  - Amendement n°II-3, présenté par Mme Briquet, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale.  - Nous supprimons une demande de rapport sur les évolutions de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Si elle doit évoluer, une telle demande ne relève pas d'une loi de finances.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-3 est adopté et l'article 41 B est supprimé.

Engagements financiers de l'État

Remboursements et dégrèvements

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les conditions de ce débat ne sont pas satisfaisantes, alors que cette mission est la plus importante du budget de l'État.

Comme le disait une ancienne réclame, cette mission, c'est de la dynamite. En effet, elle explose, de PLF en PLF... Les charges d'intérêts grèvent notre marge de manoeuvre, et le déficit primaire ne se résorbe pas.

En 2022, il y a eu la mauvaise surprise de l'inflation. En 2023, celle-ci continue, et s'y ajoute une hausse des taux d'intérêt, qui se poursuivra, selon Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE).

En 2023, nous paierons encore plus. (Mme Nathalie Goulet acquiesce.) Et encore, le Gouvernement est optimiste. Cette dette a un fort effet volume, et vous n'arrivez pas à en inverser la courbe, monsieur le ministre. Vous faites d'ailleurs bien de ne pas le promettre - avec de telles promesses, certains se sont pris les pieds dans le tapis. C'est pourtant nécessaire : le FMI a rappelé la France à l'ordre lundi.

Le 2 décembre - Austerlitz, ou Waterloo ? -, les agences de notation évalueront la dette française.

Il nous reste une chance : le 49.3 ; sans lui, sans doute la dette française serait-elle attaquée par les marchés financiers. Ce dispositif est l'assurance d'exécuter un budget. (M. le ministre approuve.) Mais c'est mince, et cela ne fait pas une politique.

Nous proposerons, modestement, de réduire le déficit : nous l'avions fait à l'occasion de la loi de programmation des finances publiques (LPFP), avec une nouvelle trajectoire. Mais je crains que nous n'atteignions pas les 3 % de déficit en 2025. Peut-être y a-t-il une incohérence entre vos prévisions et les crédits de la mission : nous en reparlerons.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances, en remplacement de M. Victorin Lurel, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Depuis 2020, le compte « Participations financières de l'État » est lourdement affecté par les conséquences économiques de la crise sanitaire et, désormais, du contexte international, en dépenses comme en recettes. Il a fallu plusieurs versements du budget général, et 2023 ne fera pas exception : ils représenteront les trois quarts des recettes du compte, et même 95 % une fois les recettes exceptionnelles retranchées.

Pour l'an prochain, seule une fraction des 10 milliards d'euros d'investissements en capital prévus est déjà connue. Mais pour 80 % des crédits, le caractère des opérations reste confidentiel, afin de ne pas porter préjudice aux intérêts patrimoniaux de l'État. La capacité d'appréciation du Parlement pour l'année à venir en est fortement limitée.

L'inscription de 6,6 milliards d'euros au titre de la contribution au désendettement de l'État est, en outre, un bonneteau budgétaire : elle nourrit en réalité d'autant le déficit pour 2023. La commission a adopté un amendement pour supprimer les crédits en question, qui ne sont qu'un trompe-l'oeil.

Un point positif, toutefois : le versement de la dotation numéraire du fonds pour l'investissement dans l'industrie (FII). Le Gouvernement fait enfin le choix du bon sens en mettant fin à cette dotation et en la remplaçant par des crédits budgétaires.

Le portefeuille de l'État actionnaire a retrouvé une valorisation légèrement supérieure à son niveau d'avant-crise. Cette valorisation est toutefois dopée par l'offre publique d'achat des actions d'EDF...

Mme Nathalie Goulet.  - Tiens donc !

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Si l'on isole la valorisation d'EDF, la performance du portefeuille de l'Agence des participations de l'État (APE) est très inférieure à celle des grandes entreprises françaises, et ce malgré les recapitalisations.

La nationalisation d'EDF va dans le bon sens, mais sa situation financière reste problématique. Sa dette atteindra 60 milliards d'euros à la fin de l'année, alors que les besoins d'investissement sont évalués entre 17 et 20 milliards d'euros par an... Son nouveau PDG, Luc Rémont, devra rassurer et viabiliser l'entreprise.

La nouvelle doctrine de l'APE n'est pas définie. Elle devra soutenir les entreprises touchées par la crise, préserver notre souveraineté économique, accompagner la transition environnementale et les ruptures technologiques et numériques. J'y vois le choix d'un retour des participations financières comme outil économique à part entière.

La commission est favorable à ces crédits tels qu'elle les a amendés.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances, en remplacement de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances .  - La mission « Remboursements et dégrèvements » est la première en termes de volume de crédits, tous budgets confondus. Le caractère mécanique de ces dépenses implique que ces crédits soient évaluatifs.

Elle se compose de deux programmes, l'un consacré aux remboursements et dégrèvements des impôts d'État, l'autre aux mêmes opérations portant sur les impôts directs locaux.

Concernant les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, la quasi-stabilité, à 123,7 milliards d'euros, résulte de tendances contraires. On compte 6,6 milliards d'euros supplémentaires de restitutions liées à la mécanique de l'impôt, avec des restitutions de TVA atteignant 67,2 milliards d'euros en raison de l'inflation et du souhait des entreprises de rembourser rapidement.

Ce niveau historique justifierait un renforcement de la lutte contre la fraude à la TVA. D'autant plus que les collectivités locales bénéficient d'une fraction de TVA, pour environ 38 milliards d'euros. La collecte doit être optimisée.

En 2023, le niveau de remboursement d'impôt sur les sociétés (IS) est évalué à 14,2 milliards d'euros.

À l'inverse, les remboursements liés à des politiques publiques baissent de 5 milliards d'euros, en raison de la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (Cice) et de la contribution à l'audiovisuel public.

Le crédit d'impôt recherche (CIR) reste stable, à 7 milliards d'euros. Je demeure sceptique sur son efficacité en matière de création d'emplois et de brevets déposés. Comment se satisfaire de l'ambition très mesurée du Gouvernement, avec une cible fixée à un euro investi pour un euro remboursé ? Enfin, il est complexe à contrôler, et son manque de conditionnalité interroge. Une réforme s'impose.

Les remboursements liés aux contentieux baissent, grâce à un meilleur suivi.

Concernant les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, les crédits s'élèvent à 4,6 milliards d'euros, en baisse de 30,8 %. Les diminutions précédentes étaient liées, pour l'essentiel, à la réforme de la taxe d'habitation sur les résidences principales.

Il ne faudrait pas rendre encore plus illisible le financement des collectivités territoriales. Les mesures de compensation des réformes de la fiscalité locale réduisent l'autonomie des collectivités. Leurs ressources seront tributaires d'un impôt national, sur lequel elles n'ont aucun pouvoir de taux et dont les évolutions futures restent particulièrement incertaines.

Mme Micheline Jacques, en remplacement de Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques .  - La commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption de ces crédits. Nous contestons les faiblesses du Gouvernement pour l'État actionnaire. Le Gouvernement n'a pas encore fait le choix d'un État stratège, qui soutienne la souveraineté économique de la France. La nationalisation d'EDF n'est que l'arbre qui cache la forêt des atermoiements et des renoncements.

La doctrine d'investissement de 2017 est trop floue et ne garantit pas, en l'état, la sauvegarde de la souveraineté économique française.

L'an dernier, nous avons accueilli avec satisfaction les propos du ministre, qui voulait que l'État actionnaire prenne davantage en compte la sauvegarde de notre souveraineté. Mais nous en attendons toujours la traduction concrète.

La nationalisation d'EDF ne répond pas à toutes les questions. Comment régler la dette de 43 milliards d'euros d'EDF ? Comment relancer le nucléaire ? Comment renouveler les concessions hydrauliques ?

Nous regrettons aussi la méthode : le Gouvernement envisage de se désendetter de 7 milliards d'euros sans prévoir de recettes, avec un tour de passe-passe vertigineux depuis le budget général ; aucun effort structurel n'est réalisé. Ce n'est que de l'affichage. On s'endette pour se désendetter...

M. Christian Bilhac .  - L'objet de la mission est aride, mais crucial : les engagements financiers de l'État représentent plus de 50 milliards d'euros et les remboursements et dégrèvements, plus de 120 milliards d'euros. Le budget de la mission « Engagements financiers de l'État » augmente de plus de 35 % en crédits de paiement en 2023. Le montant total représenterait plus de 10 % des dépenses de l'État.

La charge de la dette a fortement augmenté. La remontée des taux d'intérêt, depuis le début de l'année, a eu un effet quasi immédiat sur le coût de notre endettement public, qui était resté somme toute limité ces dernières années, malgré un encours total qui a littéralement explosé, notamment en 2020-2021 avec les mesures liées à la crise sanitaire.

L'État vit à crédit, se reposant sur la qualité de sa signature. Mais la remontée des taux est spectaculaire : près de 12 milliards d'euros supplémentaires pour le seul paiement des intérêts par rapport à la loi de finances initiale pour cette année.

En 2023, le service de la dette dépassera de nouveau le budget de la défense -  quelle ironie, à l'heure où nous renforçons notre effort militaire. (M. Jérôme Bascher renchérit.)

L'Agence France Trésor devrait rechercher les faveurs d'investisseurs français, pour plus de souveraineté. Le Japon connaît l'endettement public le plus élevé au monde, mais sa dette est détenue par des résidents... Il est vrai que cela ne conviendrait pas aux conceptions ordo-libérales de la zone euro.

Les montants énormes de la mission « Remboursements et dégrèvements » concernent des restitutions d'impôts, mais le montant interroge néanmoins sur l'ampleur des irrégularités.

Malgré ces réserves, le groupe RDSE approuve les crédits de cette mission.

M. Alain Marc .  - Au tournant du siècle, la France s'est laissé bercer par la douce musique de la mondialisation heureuse. Mais elle nous a fait oublier l'importance de l'État stratège. Les crises nous ont cruellement rappelé sa nécessité.

L'État stratège doit bâtir une stratégie économique pour défendre sa souveraineté. Il doit garantir l'intérêt général sur le long terme.

Cette vision doit nous réunir au-delà des clivages politiques. Le compte spécial « Participations financières de l'État » verra, en 2023, ses crédits dépasser 17 milliards d'euros, essentiellement en provenance du budget général.

La succession des crises a eu un double effet positif : d'une part, elle a permis l'abondement massif de ce compte pour financer une stratégie ambitieuse ; d'autre part, elle a encouragé l'APE à se concentrer sur les secteurs les plus stratégiques. C'est le cas avec la nationalisation d'EDF, qui prépare le renouvellement de notre parc nucléaire.

L'avenir d'EDF, ce ne sont pas seulement ces nouveaux chantiers. EDF devra renouveler le parc existant, développer les produits d'export tels que les SMR (small modular reactors) et poursuivre le développement des énergies renouvelables.

Monsieur le ministre, le renouvellement des concessions électriques en Aveyron est en cours depuis dix ans, dans l'attente d'une décision de la Commission européenne.

Monsieur le ministre, soyez vigilant. Nous souhaitons qu'EDF continue de les détenir, car l'entreprise veut investir dans ce domaine. L'Aveyron représentant 10 % de la production hydroélectrique nationale, c'est un apport non négligeable dans le contexte actuel. Le dossier doit avancer.

Je partage l'analyse de Mme Berthet sur les enjeux de la nationalisation, comme ses réserves sur la lisibilité du compte. La nouvelle doctrine de l'Agence des participations de l'État doit permettre la cession d'actifs non stratégiques pour poursuivre la stratégie de désendettement de l'État.

Le groupe INDEP votera ces crédits.

M. Daniel Breuiller .  - Arrêtons de confier cette mission à M. Bascher : chaque fois qu'il la présente, la dette augmente... (Sourires)

La dette covid est la conséquence du « quoi qu'il en coûte » : l'État, au nom de la dette, veut imposer des restrictions budgétaires aux collectivités territoriales ; mais les prêteurs, eux, voient leurs profits augmenter grâce à l'inflation.

Nous devons nous interroger sur notre manière de gérer la dette. Le rapporteur spécial a raison : il n'y a aucun argument économique pour justifier l'isolement de la dette covid. En revanche, il en existe pour isoler la dette liée aux mesures environnementales. Sinon, elles seront traitées comme une variable d'ajustement : d'abord on maîtrise la dette, dit l'État, et ensuite nous prendrons des mesures radicales...

Stoppons le désarmement fiscal de l'État et limitons l'effet volume, avec des mesures nouvelles. J'espère que vous avez pris connaissance de notre proposition d'un ISF climatique, présentée lors de l'examen de la première partie.

La mission « Remboursements et dégrèvements » est purement évaluative. Le niveau des remboursements d'impôt sur les sociétés a augmenté d'environ 13,8 %. Cette augmentation est liée à la baisse du bénéfice fiscal des entreprises à la suite de la crise inflationniste. Monsieur le ministre, il est difficile de rapprocher cette information de votre déclaration du 21 novembre : plus le gâteau grandit, disiez-vous, plus les recettes augmentent. Vous souligniez que l'État perçoit davantage d'impôts sur les sociétés depuis que le taux a été abaissé à 25 %...

Enfin, une vigilance accrue s'impose contre la fraude à la TVA : en la matière, les recettes gagnées sont bien supérieures au coût des postes supplémentaires.

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Avec le plan de relance, France 2030 et le bouclier tarifaire, le Gouvernement a fait le choix volontariste de soutenir notre économie coûte que coûte. Cela a eu un impact sur nos comptes publics, mais les 200 milliards d'euros relèvent d'une stratégie assumée. Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » augmentent ainsi de 15,9 milliards d'euros, notamment pour financer la charge de la dette dans le contexte inflationniste. La maîtrise de l'inflation modère cependant cette croissance.

En parallèle, les banques centrales ont remonté leurs taux d'intérêt : en 2023, ils seront de 2,6 % pour les obligations assimilables au Trésor (OAT) à dix ans. C'est la fin de l'argent magique, lié à la politique d'assouplissement quantitatif menée par la BCE dans les années 2010. Notre Gouvernement ne se voile pas la face : le « quoi qu'il en coûte » se mue en « combien ça coûte ». Ainsi, des réformes comme celle des retraites sont absolument nécessaires.

Le Prêt garanti par l'État (PGE) avait connu un grand succès : 800 000 entreprises en ont bénéficié, pour 148,7 milliards d'euros. Or, d'après le dernier baromètre Bpifrance, 9 % des PME et TPE redoutent de ne pas pouvoir le rembourser, soit deux points de plus que lors du précédent sondage. La grande majorité d'entre elles honoreront toutefois leurs échéances.

La nationalisation d'EDF est indispensable pour crédibiliser l'entreprise sur les marchés internationaux, mettre en oeuvre le programme de construction de six EPR2 et le programme de grand carénage et développer les énergies renouvelables.

Dans la mission « Remboursements et dégrèvements », les remboursements d'impôts d'État liés aux contentieux baissent de 2,7 milliards d'euros à 1,1 milliard d'euros grâce à l'effort de suivi des gros contentieux. Saluons le travail de notre administration fiscale.

Notre chemin est étroit, entre rétablissement des comptes publics et soutien à notre économie, mais c'est celui qu'il faut emprunter.

Mme Isabelle Briquet .  - La mission « Engagements financiers de l'État » contient des zones d'ombre qui appellent notre vigilance. La charge de la dette a explosé entre 2020 et 2023. Les crédits de la mission sont parmi ceux qui augmentent le plus, avec l'inflation constante et le relèvement des taux d'intérêt. On peut s'interroger sur vos prévisions de stabilité à l'horizon 2023.

Les PGE risquent d'être une bombe à retardement. La trésorerie des entreprises est très affectée par le contexte actuel, d'où un double risque : accélération des faillites ou baisse des dépenses d'investissement. C'est l'étranglement par la dette.

Seules 11 % des 800 000 entreprises ayant contracté un PGE - l'encours est de 148 milliards d'euros - se sont acquittées de leur dette. Les défauts de paiement auront atteint le chiffre de 37 000 à la fin 2022, ce qui nourrit l'inquiétude. Le PLFR prévoit une baisse de 2 milliards d'euros des provisions pour les PGE. Je m'interroge sur une telle prévision.

Que penser de l'absence de prise en compte budgétaire de la reprise de la dette de la SNCF et de la dette covid ?

L'amortissement de la dette doit-il se faire sur le dos des Français ? Nous avons formulé des propositions, mais les débats sur la première partie n'indiquent aucune remise en question de vos choix fiscaux en faveur des plus riches. Or ces choix fragilisent la situation financière de notre pays, ainsi que le sentiment d'injustice et d'abandon.

La dématérialisation est une facilité qui isole ; elle ne peut pas se substituer à l'accueil du public.

Pour le programme « Remboursements et dégrèvements des impôts locaux », la baisse en volume est de 31 %. Ce n'est pas une simple ligne comptable : cela témoigne d'une insidieuse atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités locales.

Votre dogme de la baisse d'impôts conduit à une injustice grandissante. Bientôt, il n'y aura plus lieu d'examiner ce programme, qui n'existera plus : sans impôts locaux, point de remboursements ni de dégrèvements...

L'enjeu de ce programme, ce sont l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et le lien entre l'impôt local et les habitants, donc la démocratie locale. Disparaîtrait avec lui une certaine idée de la décentralisation.

Mme Cécile Cukierman .  - Le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » retrace la politique de l'État actionnaire. Je centrerai mon propos sur l'avenir du groupe EDF.

Après une augmentation de 2,6 milliards d'euros en avril 2022, en raison de la situation difficile de l'entreprise - qui s'est vu imposer un blocage des prix -, les crédits doivent être employés pour augmenter la part de l'État dans le capital. Cela coûtera 9,7 milliards d'euros. Mais le Parlement n'a aucune information sur les raisons de cette opération ni sur la stratégie de l'État. La documentation budgétaire est soit inexistante, soit incomplète. Pourquoi ?

Hormis la volonté affichée de gérer les concessions hydroélectriques en quasi-régie, avez-vous renoncé au projet Hercule consistant à démanteler EDF pour privatiser ses actifs les plus rentables ?

Pourquoi les notes préparatoires à la montée au capital ne sont-elles pas encore accessibles aux parlementaires ? Allez-vous céder Dalkia ou ouvrir le capital d'Enedis ? Que va devenir l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh), comment le nouveau nucléaire sera-t-il financé ?

Le Gouvernement ne peut faire l'économie d'une explication devant le Parlement. L'absence de recours à une loi de nationalisation nous prive du débat nécessaire sur l'avenir de l'entreprise.

EDF est une entreprise stratégique, avec une mission d'intérêt général. Sa disparition sous sa forme intégrée porte en germes de grands risques. Nous voulons un service public de l'énergie regroupant EDF, Engie et pourquoi pas Total, à l'abri de l'idéologie libérale de l'Union Européenne.

Le CRCE rejettera les crédits de ce compte. Le Parlement doit participer au débat sur la stratégie, en associant aussi les usagers, les salariés et les syndicats. (M. François-Noël Buffet approuve.)

Mme Nathalie Goulet .  - Avec le député Laurent Saint-Martin, nous avions envisagé la tenue d'un débat sur la dette comme préalable à l'examen du projet de loi de finances. En effet, le déficit et la dette annihilent quelque peu notre liberté de parlementaires.

Auparavant rapporteur de cette mission à la commission des finances, je connais bien les effets anesthésiants des taux d'intérêt négatifs : nous annoncions régulièrement le réveil de la belle au bois dormant, mais, comme soeur Anne, personne ne voyait rien venir, et les taux n'augmentaient pas... Nous y sommes, désormais. Je félicite le rapporteur pour son travail sur cette mission.

Nous avions notamment demandé une simulation des conséquences de l'augmentation des taux ; chaque interlocuteur de la commission des finances se renvoyait la patate chaude... Maintenant que nous raisonnons dans le réel, il faudrait évaluer ces conséquences.

Je salue le travail des agents de France Trésor, qui font un travail remarquable. Serait-il possible d'obtenir la liste des possesseurs de notre detteet de savoir comment elle est répartie ?

Les engagements hors bilan s'élèvent à 4 615 milliards d'euros, ce qui suscite des interrogations. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Pour être populaire ici, il faut parler trois minutes au lieu des six prévues. (Marques d'amusement)

Mme Cécile Cukierman.  - Dans votre département aussi !

Mme Nathalie Goulet.  - J'en reviens, justement... Monsieur le président de la commission des finances, il faudrait que le débat figure plus tôt en journée, car chaque année il est sacrifié. Or il est essentiel pour la compréhension du débat budgétaire, tout comme le dossier des dégrèvements, éminemment politique.

L'année prochaine, il faudrait donc un débat exclusivement consacré aux engagements financiers, donc à la dette, qui nous éclairera sur les disponibilités financières pour les politiques à venir. (Mme Cécile Cukierman approuve.)

M. Gabriel Attal, ministre délégué, chargé des comptes publics .  - Je remercie les sénateurs pour la qualité de leurs interventions.

Nous partageons la préoccupation du rapporteur spécial Bascher sur l'évolution des taux d'intérêt. La programmation du Gouvernement intègre une augmentation de ces taux. Notre scénario est celui d'une remontée des taux longs, avec un taux à 10 ans à 2,5 % fin 2022, et 2,6 % fin 2023.

Madame Briquet, l'OAT à 10 ans est aujourd'hui à 2,43 % : la prévision des marchés pour la fin 2022 est inférieure ou égale à 2,5 %. Nos prévisions se basent sur des hypothèses structurelles, et non sur les dernières données du marché.

Monsieur Bilhac, la diversité des investisseurs internationaux est un atout et non une menace, car elle nous permet d'obtenir des taux inférieurs. Détenir une OAT n'ouvre qu'un seul droit, celui d'être remboursé.

Un choc de taux d'un point, dans le scénario de référence à 2,6 %, engendre un coût de plus de 5 milliards d'euros la première année, 6 milliards d'euros la deuxième année et 16 milliards d'euros en 2027. L'enjeu est donc majeur.

Le scénario de hausse progressive des taux d'intérêt est cohérent avec les scénarios macroéconomiques et la cible de long terme de la BCE, soit une inflation proche de 2 %.

Madame Briquet, le calibrage du montant retenu pour les appels en garantie des PGE prend appui sur les simulations de la Banque de France, actualisées par France Trésor. Il tient compte des prix des intrants, des coûts de production, et de la santé financière des entreprises. Rien ne laisse présager d'un montant final d'avances sur indemnisation pour l'année 2023.

L'isolement budgétaire de la dette covid a pour objectif de tracer le montant de la dette d'État résultant de la crise sanitaire et de permettre son remboursement jusqu'à 2042. Cela a une vertu pédagogique.

Sur les participations financières de l'État, les gouvernements successifs ont retenu un montant notionnel de prévisions de recettes et de dépenses, pour ne pas donner de signal au marché. Certes, le Gouvernement doit être transparent vis-à-vis du Parlement. Il doit aussi défendre les intérêts du contribuable, et pour cela ne pas révéler ses intentions, et enfin protéger la réputation des entreprises au capital desquelles il participe.

Nous avons néanmoins fait un effort important de transparence : nous mettons en annexe du projet de loi de finances le projet annuel de performance (PAP), le CAS et le rapport d'activité de l'Agence des participations de l'État (APE).

Madame Jacques, la vision stratégique de l'État repose sur trois outils.

La Caisse des dépôts et consignations investit sans horizon de temps dans certains secteurs prioritaires, comme la transition écologique, l'habitat, la cohésion sociale, mais reste attachée à des niveaux de rentabilité minimaux.

Bpifrance assure un actionnariat minoritaire au sein d'entreprises françaises ; son horizon d'investissement est celui des fonds d'investissement.

L'APE est l'actionnaire stratégique sur les sujets les plus critiques, avec 44 entreprises où l'État est majoritaire sur 83. Elle privilégie les logiques industrielles par rapport à la rentabilité. Ce portefeuille est concentré sur un petit nombre de secteurs, comme l'énergie. Au 18 novembre 2022, la valeur dans EDF et Engie représente 56 % du portefeuille coté.

L'inscription de 6,6 milliards d'euros au titre du désendettement correspond à un amortissement de la dette covid par une dotation à la Caisse de la dette publique. Nous avons défini une trajectoire d'apurement sur vingt ans. Chaque échéance nécessite un abondement préalable au CAS « Participations financières de l'État » à partir du programme 369. Conserver le programme 132 permet un suivi des opérations dans le temps.

Concernant la mission « Remboursements et dégrèvements », la hausse constatée sur le remboursement de la TVA montre la préférence des entreprises pour le présent dans ce contexte d'incertitude. Le choix du remboursement plutôt que de l'imputation participe du soutien à l'économie. Cet outil a été décisif durant la crise sanitaire. La TVA est censée rester neutre tout au long de la chaîne de valeur. Dans certains secteurs, c'est une charge réelle pour les entreprises. Le dispositif de remboursement de la TVA représente 54 % des crédits de la mission.

La lutte contre la fraude à la TVA - je me tourne vers Mme Goulet en commençant cette phrase (Mme Nathalie Goulet apprécie) - est l'un des objectifs prioritaires du Gouvernement. Le manque à gagner est désormais mieux évalué par l'Insee : il serait compris entre 20 à 25 milliards d'euros par an. C'est vertigineux ! (Mme Nathalie Goulet le confirme.)

La DGFiP a lancé 500 contrôles aléatoires, dont je vous transmettrai les résultats. Pour la récupérer, il faut notamment faciliter l'accès croisé aux applications des différents services de l'État. À titre de sanction, nous pouvons notamment suspendre les numéros de TVA intracommunautaires. Nous allons agir dans des domaines sensibles, notamment les véhicules d'occasion et les carrousels, avec une judiciarisation précoce.

Les travaux sont engagés pour une transparence des transactions, grâce à une maîtrise de la donnée. La facturation électronique sera déployée à partir du 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises assujetties à la TVA.

La performance du contrôle fiscal poursuit son amélioration : 13,4 milliards d'euros de droits rappelés en 2022, soit 1,7 milliard d'euros de plus qu'en 2020. Le ciblage s'améliore grâce au data mining.

Quant aux remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques, je mentionnerai d'abord la suppression de la contribution à l'audiovisuel public, impôt injuste car forfaitaire, attendue par de nombreux ménages.

Le crédit d'impôt recherche stimule les acteurs privés. C'est une dépense fiscale importante pour le budget de l'État, mais aussi un élément d'attractivité.

Enfin, nous voulons supprimer la CVAE, impôt de production qui génère le plus d'effets économiques néfastes. Le Gouvernement regrette la suppression par le Sénat de l'article 5 du PLF 2023 qui opérait cette suppression. Il y va de notre souveraineté industrielle.

Examen des crédits des missions, des amendements portant articles additionnels et des comptes spéciaux

Article 27 (Engagements financiers de l'État) - État B

Mme la présidente.  - Amendement n°II-443, présenté par M. Bascher, au nom de la commission.

I. - Supprimer le programme :

Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19

II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits de programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Épargne

 

 

 

 

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

 

 

 

 

Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

 

 

 

 

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

 

 

 

Amortissement de la dette de l'État liée à la Covid-19

 

 

 

6 586 486 312

TOTAL

 

 

 

6 586 486 312

SOLDE

 

- 6 586 486 312

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial.  - Nous voulons décantonner la dette covid, donc supprimer le programme 369. Capital et charge de l'intérêt ne sont pas distingués : cessons de mélanger choux et carottes, alors que le budget prend le bouillon ! (Sourires) Vous mettez en avant la pédagogie, mais ce n'est pas le budget de l'éducation nationale...

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous voulons retracer et suivre l'amortissement de la dette covid. C'est par la croissance que nous rembourserons cette dette. Fin 2021, la hausse de la dette estimée était de 165 milliards d'euros. C'est un enjeu de lisibilité et de transparence.

L'amendement n°II-443 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-442, présenté par M. Bascher, au nom de la commission.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs)

 

700 000 000

 

700 000 000

Épargne

 

 

 

 

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

 

 

 

 

Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

 

 

 

 

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

 

 

 

Amortissement de la dette de l'État liée à la Covid-19

 

 

 

 

TOTAL

 

700 000 000

 

700 000 000

SOLDE

- 700 000 000

- 700 000 000

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial.  - Nous voulons remettre de la sincérité et de la cohérence dans les propositions du Gouvernement. Nous avons supprimé 2 milliards d'euros de crédits en loi de finances rectificative pour les PGE. Je propose 700 millions d'euros de moins que la prévision du Gouvernement.

Soit toutes les entreprises vont prendre le bouillon en raison de la crise de l'énergie - non seulement à cause des PGE, mais aussi des Urssaf... - et ce sera bien pire, soit tout ira bien et votre prévision est fausse...

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Avis défavorable. Nous avons besoin de ces crédits pour rembourser les entreprises. Nous avons tenu compte de leur sinistralité : nous faisons face à des aléas bien plus graves en 2023.

Je ne voudrais pas que la majorité sénatoriale y trouve un moyen simple de faire des économies dans le PLF.

À l'issue de l'examen de la première partie, vous vous êtes engagés sur un solde de 4,6 milliards d'euros, ce qui représente 10 milliards d'euros d'économies. Hier, vous avez annulé 1 milliard d'euros sur la dotation pour imprévisibilité et accidents. Avec ces 700 millions d'euros, cela laisse environ 8 milliards d'euros à trouver : cherchez plutôt cette somme dans le structurel.

Mme Nathalie Goulet.  - Monsieur le rapporteur spécial, je ne puis pas voter cet amendement alors que le risque court toujours. C'est le principe de cette ligne budgétaire.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement II-442 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°75 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 225
Pour l'adoption 200
Contre   25

L'amendement n°II-442 est adopté.

À la demande du groupe Les Républicains, les crédits de la mission sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°76 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 280
Pour l'adoption 229
Contre   51

Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », modifiés, sont adoptés.

Article 29 (Participations financières de l'État) - État D

Mme la présidente.  - Amendement n°II-441, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État

 

 

 

 

Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État

 

6 586 486 312

 

6 586 486 312

TOTAL

 

6 586 486 312

 

6 586 486 312

SOLDE

- 6 586 486 312

- 6 586 486 312

M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial.  - Nous tirons les conséquences pour le CAS « Participations financières de l'État » de la suppression du cantonnement de la dette covid.

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Avis défavorable, par cohérence.

L'amendement n°II-441 est adopté.

Les crédits du compte spécial « Participations financières de l'État », modifiés, sont adoptés.

Après l'article 49

Mme la présidente.  - Amendement n°II-105, présenté par MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.

I.  -  Après l'article 49

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d'information sur l'évaluation de la mise en oeuvre de l'article 66 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 sur l'éco-conditionnalité des prises de participation de l'État via l'agence des participations de l'État dans le cadre du plan de relance. Ce rapport d'information fait état des perspectives de pérennisation de la mesure au-delà du plan de relance, d'élargissement à d'autres types d'aides publiques, en particulier aux prises de participation de BPI France, et de renforcement des engagements des entreprises.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle ainsi rédigée :

Participations financières de l'État

M. Daniel Breuiller.  - La prise de participations de l'État dans une grande entreprise est conditionnée à un engagement de celle-ci en matière de réduction des gaz à effet de serre. Nous demandons au Gouvernement un rapport d'évaluation sur cette disposition qui n'a eu à s'appliquer que pour deux entreprises. Ne faudrait-il pas pérenniser la mesure et prévoir des sanctions ?

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-195 rectifié, présenté par Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Florence Blatrix Contat.  - L'amendement a été fort bien défendu.

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Retrait. Le dispositif se réfère aux crédits du plan de relance, mais aucun n'a été voté au bénéfice du CAS. En outre, un rapport sur des éléments déjà publiés par les entreprises n'est pas utile...

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Retrait : le rapport sur l'écoconditionnalité est disponible sur le site de l'Agence des participations de l'État (APE), et les déclarations extrafinancières des entreprises comportent les éléments demandés.

Les amendements identiques nosII-105 et II-195 rectifié sont retirés.

Article 29 (Accords monétaires internationaux) - État D

Les crédits du compte spécial « Accords monétaires internationaux » sont adoptés.

Article 29 (Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics) - État D

Les crédits du compte spécial « Prêts et avances divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » sont adoptés.

Article 27 (Remboursements et dégrèvements) - État B

Mme la présidente.  - Amendement n°II-747 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs)

3 299 904 341

 

3 299 904 341

 

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs)

2 312 828 557 

 2 312 828 557

TOTAL

5 612 732 898 

5 612 732 898 

SOLDE

+ 5 612 732 898 

+ 5 612 732 898 

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous ouvrons 2,3 milliards d'euros de crédits pour tirer les conséquences de la suppression, que je regrette, de l'article supprimant la CVAE. En effet, certaines entreprises bénéficient d'un dégrèvement, que nous devons donc financer.

Je signale que mes services et ceux de la commission des finances ont repéré une erreur à l'article d'équilibre de la première partie, touchant à ces mêmes dégrèvements ; nous la corrigerons à la fin de la seconde partie.

M. Claude Raynal, président de la commission.  - Y a-t-il des conséquences sur l'article liminaire ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - L'erreur n'a d'incidence que sur le solde, pas sur la comptabilité nationale.

M. Claude Raynal, président de la commission.  - À titre personnel, avis de sagesse.

L'amendement n°II-747 rectifié est adopté.

Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », modifiés, sont adoptés.

Prochaine séance, lundi 28 novembre 2022, à 10 heures.

La séance est levée à minuit dix.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du lundi 28 novembre 2022

Séance publique

À 10 heures, 14 h 30 et le soir

Présidence : M. Alain Richard, vice-président, Mme Laurence Rossignol, vice-présidente.

Secrétaires : Mme Esther Benbassa - M. Daniel Gremillet

- Projet de loi de finances pour 2023 (n°114, 2022-2023)

=> Travail et emploi (+ articles 47, 48 et 49)

=> Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ articles 41 et 41 bis)

=> Culture (+ articles 41 quater et 41 quinquies)

=> Médias, livre et industries culturelles

. Compte spécial : avances à l'audiovisuel public

=> Recherche et enseignement supérieur