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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions d'actualité

Démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (I)

M. Patrick Kanner

Mme Élisabeth Borne, Première ministre

Fusillade de Villerupt

Mme Véronique Guillotin

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (II)

M. Ronan Dantec

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Violences contre les élus et leurs familles

M. Joël Guerriau

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Démission du Maire de Saint-Brevin-les-Pins (III)

Mme Catherine Belrhiti

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Statut des élus

Mme Françoise Gatel

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (IV)

Mme Cécile Cukierman

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Violence et trafic d'armes à feu aux Antilles

M. Dominique Théophile

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Annonce de nouvelles dépenses et prévisions budgétaires

M. Arnaud Bazin

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics

Violences à Marseille et réorganisation de la police judiciaire

Mme Marie-Arlette Carlotti

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Mixité sociale à l'école et laïcité

M. Max Brisson

M. Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Mineurs non accompagnés

Mme Élisabeth Doineau

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Sondage sur l'absence de liberté ressentie par les Français et arrêtés préfectoraux « abusifs »

M. Philippe Dominati

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Pause en matière de réglementation environnementale annoncée par le Président de la République

Mme Laurence Rossignol

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Réglementation européenne en matière de lutte contre les incendies et de sécurité civile

Mme Françoise Dumont

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Mise en oeuvre du diagnostic de performance énergétique

M. Olivier Henno

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Décès d'un ancien sénateur

Mises au point au sujet de votes

CMP (Nominations)

Génocide ukrainien de 1932-1933

Discussion générale

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, auteur de la proposition de résolution

M. Christian Bilhac

M. Olivier Paccaud

M. Claude Malhuret

M. Guillaume Gontard

Mme Nadège Havet

M. Patrick Kanner

M. Pierre Laurent

M. François Bonneau

M. Jean Louis Masson

M. Bruno Belin

Mme Hélène Conway-Mouret

Mme Nadia Sollogoub

M. Édouard Courtial

M. Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger

Ordre du jour du mardi 23 mai 2023




SÉANCE

du mercredi 17 mai 2023

88e séance de la session ordinaire 2022-2023

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Corinne Imbert, M. Dominique Théophile.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et du temps de parole.

Démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (I)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.) C'est un principe intangible : en aucun cas la violence ne peut être une réponse à un mécontentement social et politique. Je condamne donc l'agression dont a été victime Jean-Baptiste Trogneux, à qui j'apporte le soutien total de notre groupe.

Je manifeste le même soutien à Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, qui a subi harcèlements et agressions, alors qu'il ne faisait qu'exercer son mandat. Il mérite, lui aussi, le soutien indéfectible du Sénat ! (Applaudissements prolongés)

Oui, un vent mauvais souffle sur notre pays. Un maire de France a dû céder devant la menace, la haine l'a emporté sur la bienveillance, la force sur le droit. La multiplication des pressions et des agressions envers les élus est documentée. Or ces élus, en particulier les maires, sont les fondations de la République : la démission de l'un d'entre eux fragilise tout l'édifice.

L'audition émouvante de Yannick Morez, ce matin, par notre commission des lois s'est transformée en réquisitoire contre les services de l'État. Les graves défaillances mises au jour traduisent un échec, voire un désastre, dont il faut tirer toutes les conséquences.

Depuis plusieurs semaines, les violences d'extrême droite se déchaînent pour empêcher les maires qui le veulent d'accueillir des demandeurs d'asile. On ne peut mettre sur le même pied l'extrême droite, ennemie mortelle de notre démocratie, et d'autres formes de contestation.

Madame la Première ministre, l'État ne peut rester l'arme au pied face à ces menaces. Allez-vous engager le combat pour défendre les élus de la République ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, sur des travées du groupe CRCE et du GEST, ainsi que sur quelques travées du RDSE, du RDPI, des groupes INDEP et UC ; Mmes Laurence Garnier et Marie Mercier applaudissent également.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - Pendant des semaines, Yannick Morez a été victime d'une campagne insupportable de harcèlement liée au projet d'implantation dans sa commune d'un centre d'accueil pour demandeurs d'asile. Fin mars, son domicile a été incendié.

Oui, ces actes sont inadmissibles. À travers chaque élu agressé, c'est la République qui est visée. Je partage votre choc et votre indignation, en évitant, monsieur Kanner, toute polémique.

Yannick Morez a pris une décision difficile, en son âme et conscience. Nous ne pouvons que la regretter, mais la respectons naturellement. Je le recevrai tout à l'heure pour l'écouter et lui exprimer le soutien de mon gouvernement.

Les maires sont en première ligne : il faut les protéger, comme tous les élus. Ministre de l'intérieur, préfets et forces de l'ordre sont mobilisés. Associations d'élus et collectivités territoriales peuvent désormais se constituer partie civile, et le garde des sceaux a demandé aux procureurs des réponses fermes, rapides et visibles. Nous sommes prêts à travailler avec le Sénat et l'Assemblée nationale pour renforcer les sanctions pénales en cas de violences contre des élus.

Depuis des mois, nous préparons des mesures pour aller plus loin. Dominique Faure les présentera tout à l'heure. Il s'agit de renforcer le lien entre les maires et la justice, de mieux prévenir les violences et d'accompagner mieux encore les élus.

Il n'y a pas de démocratie sans respect des élus ni sécurité pour eux. Avec vous tous, le Gouvernement continuera à agir. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Didier Marie.  - Et l'extrême droite ?

M. Hussein Bourgi.  - Et les défaillances de vos services ?

M. Patrick Kanner.  - Les élus ne demandent pas de compassion, mais de l'action. Mme Faure annonce un centre d'analyse, mais, ce qui se passe, nous le savons depuis bien longtemps... Il faut des actes pour protéger les élus de la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Loïc Hervé, Mme Christine Herzog et M. Albéric de Montgolfier applaudissent également.)

Fusillade de Villerupt

Mme Véronique Guillotin .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Avec Jean-François Husson et Véronique Del Fabro, j'interpelle le Gouvernement sur les faits qui se sont déroulés samedi dernier à Villerupt : une fusillade a éclaté en plein centre-ville, sur fond de trafic de drogue. Bilan : cinq blessés, dont trois graves - aucun n'a plus de 30 ans. La violence des faits a bouleversé les habitants, auxquels nous devons des réponses.

Mais si tout le monde est choqué, personne ne semblait surpris. De fait, ce point de deal a pignon sur rue depuis des mois : les tarifs sont inscrits sur un mur, à côté d'une fresque d'enfant...

Voilà une nouvelle illustration du sous-effectif chronique de la circonscription de police Longwy-Villerupt : au moins quinze policiers manquent à ce jour. Le ministre de l'intérieur a annoncé l'ouverture de onze postes : l'intention est louable, mais ils ont peu de chance d'être pourvus.

Je salue l'arrivée sur place d'un escadron de gendarmerie mobile dès cet après-midi. Mais, pour le moyen terme, comptez-vous nous affecter des policiers en sortie d'école ?

Enfin, un regret : jusqu'ici, la Villeruptienne que je suis n'a pas réussi à convaincre les élus de la nécessité de se saisir de tous les outils - contrat local de santé, police municipale, vidéoprotection.

Une réunion de concertation locale est urgente : il y va de la sécurité et de la tranquillité des habitants. C'est tous ensemble, en laissant de côté les idéologies, que nous ferons reculer la délinquance - je compte sur le ministre, car, j'en suis convaincue, il en est encore temps. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur des travées des groupes INDEP et UC ; MM. Jean-François Husson et Yves Bouloux applaudissent également.)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Oui, ces événements sont très graves. Samedi dernier dans la soirée, plusieurs coups de feu ont été tirés dans le centre de Villerupt : les policiers ont découvert cinq blessés par balle, dont trois en urgence absolue. Quelques heures plus tard, l'auteur présumé des coups de feu a été interpellé. Cette tentative d'homicide serait liée à des rivalités entre bandes pour le contrôle du trafic de stupéfiants.

Je remercie tous les policiers qui ont pris part à cette action rapide et efficace.

Sur instruction de Gérald Darmanin, un escadron de soixante-dix gendarmes mobiles a été envoyé sur place, au moins jusqu'à la fin de la semaine. Le ministre de l'intérieur a également annoncé la création de onze postes pour la circonscription de Villerupt ; dans toute la Meurthe-et-Moselle, quarante-quatre nouveaux postes seront ouverts.

Le trafic de drogue touche désormais les villes moyennes. Nous devons le combattre à tous les niveaux. Dans les Yvelines, une saisie record de 2,5 tonnes de cannabis, pour une valeur de 20 millions d'euros, a été réalisée voici quelques jours.

Je connais l'engagement des sénatrices et sénateurs de Meurthe-et-Moselle. Le préfet a prévu de réunir l'ensemble des élus concernés dans les plus brefs délais. (MM. François Patriat et Alain Richard applaudissent.)

Mme Véronique Guillotin.  - Quand on entend dire dans la rue qu'un tel drame n'étonne quasiment personne, il faut en tirer les leçons : l'État doit assumer ses responsabilités sans défaillir et travailler, main dans la main avec les élus locaux, pour faire reculer la délinquance ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur des travées du groupe UC)

Démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (II)

M. Ronan Dantec .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Yannick Morez a démissionné et ne reviendra pas sur sa décision : l'ancien maire de Saint-Brevin-les-Pins est devenu le symbole des difficultés des élus locaux, à portée non plus seulement d'engueulade, mais de calomnie, d'agression, voire d'attentat.

Il a démissionné non par peur ou lassitude, mais parce que l'État ne l'a pas protégé. Depuis l'incendie de sa maison, il était devenu le visage du courage de l'élu républicain qui assume la tâche que lui a confiée l'État - en l'occurrence, le déménagement d'un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada), installé dans la commune sans problème depuis 2016.

Yannick Morez est en tribune : rendons-lui hommage, car il tenait bon face à la haine de l'extrême droite et des sbires d'Éric Zemmour ! (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent un long moment en direction de la tribune d'honneur.)

Tous ici, nous condamnons toutes les violences politiques. Nous ressentons le même dégoût devant l'ignoble passage à tabac du neveu de Brigitte Macron.

M. Philippe Pemezec.  - Vous n'y êtes pas pour rien !

M. Ronan Dantec.  - La justice doit être ferme dans un cas comme dans l'autre. (Applaudissements)

Monsieur le ministre, répondez aux interrogations de Yannick Morez ; nous le lui devons. Pourquoi n'a-t-il pas bénéficié d'une protection rapprochée de l'État après le 22 mars ? Pourquoi avoir autorisé la manifestation anti-Cada du 29 avril, désavouant le maire qui avait demandé son interdiction ? (Applaudissements à gauche et sur quelques travées du groupe UC) Avant que d'autres drames ne se produisent, allez-vous enfin interdire ces évidents appels à la haine de l'extrême droite ? (Applaudissements nourris à gauche)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - En saluant Yannick Morez, je me félicite de l'image que vient de donner le Sénat, dont aucun membre n'est resté assis au moment de lui rendre hommage. Hier, à l'Assemblée nationale, une partie de l'hémicycle ne s'est pas levée. (Protestations à gauche)

Mmes Marie-Pierre de La Gontrie, Cécile Cukierman et M. Didier Marie - L'extrême droite !

Mme Laurence Rossignol.  - L'extrême droite : ce n'est pas difficile à dire !

M. Mickaël Vallet.  - Il y en a qui se sont levés en retard !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Prétendre défendre la liberté d'expression en empêchant quelqu'un de s'exprimer m'a toujours semblé bizarre... (Exclamations à gauche) Hier, oui, le Rassemblement national (exclamations à gauche) a refusé de se joindre à l'hommage : ne laissez pas penser qu'il y aurait une façon à géométrie variable de décrire les choses - ce serait un début de récupération.

Je remercie M. Dantec d'avoir, avec le sens républicain qu'on lui connaît, condamné aussi l'agression du petit-neveu du Président de la République.

M. David Assouline.  - M. Kanner l'a fait aussi !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Vous avez entendu Yannick Morez ce matin dans le cadre d'une mission plus large sur l'avenir de la commune. Après qu'un palier inacceptable dans la violence a été franchi, je me réjouis que le Sénat tente de faire la lumière sur ce qui s'est passé. Je suggère que vous demandiez aussi aux forces de l'ordre de Loire-Atlantique leur version des faits et les retours qu'ils ont eus.

D'après ce que nous savons, des patrouilles de police ont été organisées dans la foulée du 22 mars. Yannick Morez s'est vu proposer un accompagnement, et il y a eu des tentatives de prise de contact de la part de la préfecture et de la sous-préfecture.

M. le président.  - Il faut songer à conclure...

M. Christophe Béchu, ministre.  - Manifestement, sur l'absence de réunion publique ou les manifestations, des zones d'ombre doivent être éclaircies. Sur un sujet aussi sensible, sans doute devriez-vous travailler un peu plus longtemps que vous ne l'aviez imaginé. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

M. Loïc Hervé.  - Chiche !

M. Ronan Dantec.  - Il n'y aurait pas de honte à reconnaître que l'État n'a pas été à la hauteur : cela faciliterait les choses ! (Applaudissements sur les travées du GEST, des groupes SER et CRCE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe UC ; M. Stéphane Piednoir applaudit également.)

M. Jean-Michel Arnaud.  - Bravo !

Violences contre les élus et leurs familles

M. Joël Guerriau .  - En novembre dernier, sur l'initiative de Mme Delattre, le Sénat a voté une loi pour permettre aux associations d'élus de se constituer partie civile en cas d'agression d'un élu. Yannick Morez pourra ainsi être défendu par l'Association des maires de France. Je l'ai invité en tribune et me félicite de l'hommage qui vient de lui être rendu. (Applaudissements sur de nombreuses travées)

En avril dernier, j'ai animé en sa présence une réunion où de nombreux élus de Loire-Atlantique ont manifesté leur profond mal-être et leur colère : agressés, les élus portent plainte, mais, bien souvent, rien ne change ; trop de plaintes sont classées sans suite. Le maire de Saint-Père-en-Retz est agressé par le même individu depuis plus de trois ans. Hier, le petit-neveu du Président de la République a été victime d'une agression odieuse.

Ces agressions prennent des formes multiples : certains harcèlent et insultent en s'abritant derrière l'anonymat des réseaux sociaux ; d'autres se rendent coupables de violences physiques. Tous sont excités par les discours haineux de certains responsables politiques : on ne peut pas appeler à la violence et s'en laver les mains.

La justice doit passer avec fermeté. Des sanctions plus coercitives auront aussi un effet dissuasif. Comment garantir aux élus et à leurs familles que ces actes ne restent pas impunis ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Philippe Pemezec.  - Enfermez Mélenchon !

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Lorsque nous aurons fait toute la lumière sur ce qui s'est passé à Saint-Brevin-les-Pins, je n'aurai aucune difficulté à reconnaître les dysfonctionnements, s'il y en a eu.

L'exemple de M. Morez nous oblige à maints égards. Il y a les décisions des élus, mais aussi les actes qu'ils prennent dans le cadre du partage d'une responsabilité nationale. Il y a un an, j'étais maire : comme nombre d'entre vous, je connais les intimidations, les insultes sur les réseaux sociaux et les tracts anonymes.

M. David Assouline.  - Nous aussi, au moment du mariage pour tous ! (Mme Laurence Rossignol abonde.)

M. Christophe Béchu, ministre.  - L'an dernier, 2 265 atteintes à des élus ont été recensées, 32 % de plus qu'en 2021 ; 945 sanctions pénales ont été prises.

Nous devons franchir deux nouveaux paliers. D'abord, nous devons coordonner la lutte : comment la justice, la police et la gendarmerie peuvent-elles partager des informations et systématiser le suivi de la protection des élus ? Ensuite, nous devons nous demander si l'écharpe tricolore n'est pas une sorte d'uniforme républicain, justifiant une circonstance aggravante. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et sur plusieurs travées du RDSE et du groupe UC) Au-delà de la personne du maire, c'est sa fonction qui est visée et, à travers elle, la République et la démocratie ! (Applaudissements sur les travées du RDPI, sur plusieurs travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe UC)

M. Joël Guerriau.  - Dans le cas de Yannick Morez, c'est l'accumulation de faits avant qu'une réaction ne se produise qui pose problème. Il y va de la préservation de notre démocratie. Les coupables doivent avoir peur de la justice ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Emmanuel Capus.  - Très bien !

Démission du Maire de Saint-Brevin-les-Pins (III)

Mme Catherine Belrhiti .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La démission de Yannick Morez a suscité l'indignation générale et un tollé médiatique. Intimidé depuis des mois, abandonné par l'appareil étatique, il a finalement rendu son écharpe à la suite de l'incendie de son logement.

Ce drame républicain est loin d'être isolé : depuis le décès du maire de Signes, en 2019, les agressions envers les élus de la République se multiplient - 2 265 plaintes et signalements l'année dernière. Pis, selon David Lisnard, président de l'AMF, le seuil fatidique de 1 000 maires démissionnaires a été franchi : depuis les municipales de 2020, 1 293 édiles ont démissionné.

Le mois dernier, Mme Faure m'a répondu qu'un centre d'analyse et de lutte contre les atteintes aux élus serait prochainement créé. Mais nous savons tous que, sur le terrain, l'impunité règne. La loi du 24 janvier 2023 permet aux associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir au pénal un élu agressé, mais les sanctions prononcées ne sont pas à la hauteur.

Monsieur le ministre, combien de nouvelles démissions faudra-t-il avant que la répression ne s'intensifie, pour préserver notre pacte républicain ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Je le répète : ces violences sont inacceptables, et j'exprime à M. le maire toute notre solidarité, au nom de la Première ministre, de M. Darmanin et de tout le Gouvernement. (Marques d'agacement à droite)

M. Hussein Bourgi.  - Au nom du préfet de Loire-Atlantique, aussi ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Nous devons briser la spirale de la violence faite aux élus : on ne laissera rien passer. (L'agacement redouble à droite.)

Les maires sont les garants de la sécurité, de la protection de l'environnement et de l'action sociale. Ils se donnent pour l'intérêt général.

Le Gouvernement est dans l'action. La proposition de loi de Mme Delattre a fait avancer les choses, la loi Engagement et proximité renforce la protection des élus et trois circulaires ont été envoyées au parquet pour demander une réponse pénale ferme et rapide.

Mais nous devons aller plus loin. Monsieur Kanner, il n'y a pas que le centre d'analyse. (MM. Rachid Temal et Bernard Jomier ironisent.) Nous amplifierons nos actions pour protéger les élus : j'annoncerai des mesures en ce sens ce soir, après avoir rencontré Yannick Morez avec la Première ministre.

M. Hussein Bourgi.  - Changez le préfet !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Le centre de lutte est important, mais il faut aussi un choc civique et une réponse judiciaire.

Mme Catherine Belrhiti.  - Ce qu'a subi Yannick Morez n'est pas isolé. L'urgence est de réaffirmer l'autorité de l'État, car, sans les maires, la République menacerait ruine. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Loïc Hervé applaudit également.)

Statut des élus

Mme Françoise Gatel .  - (Vifs applaudissements sur les travées du groupe UC) Pour les maires, difficultés et démissions s'enchaînent, comme les questions cet après-midi. Les maires ne savaient pas que ce serait aussi ardu, voire risqué : ils se sont engagés pour servir. Hommes et femmes de devoir plus que de pouvoir, ils sont trop souvent contraints, submergés de normes et d'injonctions, mais restent responsables de tout.

Les voici aujourd'hui, eux et leurs familles, confrontés au délitement et à la violence de la société : de la mort du maire de Signes à la démission de celui de Saint-Brevin-les-Pins, que je salue avec respect, les exemples s'accumulent.

Des mesures ont été prises, il faut l'admettre. Nous connaissons les remèdes : éduquer, protéger, sanctionner et surtout prévenir. Le couple maire-préfet, tant célébré pendant la crise du covid, doit être fort et puissant dans tous les territoires, a fortiori quand l'État charge un maire d'agir en son nom.

L'écoute et l'émotion ne suffisent pas. Quand un maire doit détourner le regard devant ses agresseurs, voire quitter sa commune, il est plus que temps d'agir. Que compte faire le Gouvernement ? Nous serions heureux de connaître ses intentions avant de les découvrir à la télévision... (Applaudissements sur les travées du groupe UC, sur plusieurs travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe SER ; Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Didier Marie.  - C'est sur quelle chaîne ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Nous partageons le diagnostic. L'écoute, la protection, le respect et la solidarité sont nécessaires, mais aussi l'action.

Mme Marie-Arlette Carlotti.  - Vous l'avez déjà dit !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Le couple préfet-maire est efficace. J'écouterai M. le maire avec la Première ministre, et nous verrons les raisons qui l'amènent à penser que les services de l'État n'ont pas été à la hauteur. Grâce à son témoignage, nous allons nous améliorer.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce ne sera pas difficile !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Nous pensons avoir déjà agi, mais nous sommes à l'écoute, avec l'envie d'avancer.

Vous me demandez de dévoiler quelques actions.

Mme Françoise Gatel.  - Oui, devant le Parlement !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Il n'est pas possible de le faire en deux minutes, mais j'insisterai sur une mesure. (Exclamations sur de nombreuses travées)

M. Loïc Hervé.  - En avant-première !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Je veux parler de l'alarme élu : 3 000 policiers et gendarmes référents seront désignés dès le début de la semaine prochaine. Invitez les maires à donner leur numéro de téléphone au préfet, aux gendarmes ou à la police, pour qu'ils bénéficient d'un traitement spécifique. (Vives protestations à droite et sur certaines travées à gauche ; M. Philippe Bas s'insurge.)

Nombreuses voix à droite.  - Cela existe déjà !

M. Hussein Bourgi.  - C'est le rôle du sous-préfet !

M. Philippe Bas.  - Ce n'est pas sérieux !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Je vous en dirai davantage plus tard.

Démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins (IV)

Mme Cécile Cukierman .  - Les élus sont de plus en plus confrontés à la violence, aux intimidations, aux agressions, parce qu'ils agissent dans l'intérêt de leur population et de leur territoire. Au nom de mon groupe, je leur apporte tout notre soutien. Aucune violence n'est acceptable : nous serons toujours du côté de ceux qui la condamnent.

La démission du maire de Saint-Brevin-les-Pins n'est pas un coup de tonnerre dans un ciel serein. Elle s'ajoute aux menaces répétées de l'extrême droite et aux plus de 4 000 démissions d'élus municipaux depuis 2020. La banalisation de ces violences permet à leurs auteurs d'agir sans limite. C'est notre démocratie, notre République qui sont en danger.

Il faut redonner du sens à l'engagement, le sacraliser. Les communes, rurales, urbaines ou d'outre-mer, demeurent le premier lieu de vie et de solidarité. Cellules de base de la République, elles doivent retrouver toute leur place dans notre organisation démocratique.

Comment entendez-vous redonner du sens à l'engagement de nos milliers d'élus locaux ? Comment comptez-vous empêcher de tels dysfonctionnements à l'avenir ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER ; M. Jacques Fernique applaudit également.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Au-delà de Saint-Brevin-les-Pins, c'est le sens de l'engagement de maire que nous devons évoquer. Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde.

M. Morel a été poussé à la démission par des manifestants d'extrême droite et un acte scandaleux le visant lui et sa famille.

Les 1 293 démissions de maire en trois ans ont des causes multiples : violences, parfois sans motivation politique, affaire internes aux équipes, difficultés liées au poids des normes ou à la multiplication des réunions, conflits entre maires d'une même intercommunalité. À mi-mandat, nous sommes au même nombre de démissions de maire que lors de la période 2014-2020.

Je me réjouis de l'initiative transpartisane de votre mission d'information sur l'avenir de la commune. Nous devons nous pencher notamment sur le statut de l'élu...

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Nous le disons depuis longtemps !

M. Christophe Béchu, ministre.  - ... mais aussi sur celui du secrétaire de mairie, sur lequel vous travaillez. Efforçons-nous de réduire la charge mentale qui accompagne la fonction.

Nous devons aussi, collectivement, refuser toutes les violences et toutes les excuses à ceux qui usent de moyens non démocratiques. Dès le premier signe, nous devons faire rempart pour protéger les élus. Je sais le Sénat déterminé à les préserver. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur des travées du groupe INDEP)

Violence et trafic d'armes à feu aux Antilles

M. Dominique Théophile .  - (Applaudissements sur des travées du RDPI) Je salue à mon tour la présence de Yannick Morez en tribune ; le RDPI s'associe à l'hommage qui lui vient de lui être rendu et condamne toutes les formes de violence.

Dimanche dernier, en Guadeloupe, une mère de famille est morte dans sa voiture, frappée d'une balle dans la tête. Quelques jours plus tôt, deux jeunes hommes sont morts, eux aussi par arme à feu, au Lamentin et aux Abymes. La liste de ces drames ne cesse de s'allonger : depuis le début de l'année, une quarantaine de personnes ont été blessées ou tuées par balles dans notre archipel.

La violence explose en Guadeloupe et en Martinique depuis quelques années. Elle se nourrit du trafic d'armes à feu qui déséquilibre la Caraïbe et ensanglante Haïti.

Je salue l'action exceptionnelle des forces de l'ordre et des fonctionnaires de justice. Voilà quelques mois, une vaste opération sous l'égide d'Interpol a permis la saisie d'armes et de munitions.

Pour faire cesser ces drames, quelles mesures supplémentaires le Gouvernement envisage-t-il ? Comment mieux lutter contre un trafic d'armes qui dépasse de loin nos frontières ? Nos concitoyens attendent une réponse déterminée de l'État. Les armes ne peuvent pas circuler comme n'importe quelle marchandise ! (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Rachid Temal applaudit également.)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Vous avez raison : la Guadeloupe et la Martinique subissent depuis quelques années une hausse des violences avec arme et des homicides. L'usage des armes à feu tend à se banaliser, notamment par des primo-délinquants. L'année dernière, 230 armes ont été saisies en Guadeloupe, illustrant cette banalisation.

Nous menons des actions de prévention et des campagnes de communication. Nous organisons régulièrement des concertations avec la société civile pour développer les bonnes pratiques. Nous multiplions les opérations de contrôle, et des arrêtés préfectoraux spécifiques interdisent la vente et la détention d'armes de catégorie C3 et D.

Les moyens d'enquête judiciaire sont renforcés, notamment dans le domaine cyber. En 2022, un enquêteur nouvelles technologies a permis le démantèlement d'un atelier de transformation de pistolets d'alarme en armes létales dans la commune du Robert, en Martinique.

Enfin, nous renforçons la coopération avec Sainte-Lucie et la maréchaussée de Saint-Martin.

L'engagement du ministère de l'intérieur et des outre-mer est total pour intensifier la lutte contre les trafics. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)

Annonce de nouvelles dépenses et prévisions budgétaires

M. Arnaud Bazin .  - Nous avions compris -  c'était juré !  - que, à l'été 2021, le « quoi qu'il en coûte » était fini. Pour la loi de finances pour 2023, le mantra avait changé : « chaque euro compte ».

Désormais, chaque semaine, le Président de la République et la Première ministre rivalisent d'annonces à coups de milliards d'euros (plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains : « Eh oui ! ») : 2 milliards d'euros pour le plan vélo, 2 milliards de baisses d'impôts pour le pouvoir d'achat des classes moyennes (on le confirme à droite ; M. Bruno Sido mime l'accumulation), 1 milliard d'euros pour les lycées professionnels... jusqu'à un total de 18 milliards d'euros.

Dans le même temps, les intérêts de la dette, à 12 milliards d'euros, vont devenir le premier budget de l'État. Nous avions jugé optimiste votre prévision de croissance à 1 % : elle sera effectivement plus proche des 0,60 % anticipés par le FMI.

Dans ce contexte inquiétant pour les finances publiques, quand la baisse d'impôts annoncée en faveur des classes moyennes aura-t-elle lieu ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics .  - L'annonce du Président de la République sur la baisse d'impôts des classes moyennes s'inscrit dans une politique résolue de renforcement du pouvoir d'achat pour les Français qui travaillent : suppression compensée de la taxe d'habitation, de la redevance, baisse des deux premières tranches de l'impôt sur le revenu, défiscalisation des heures supplémentaires...

Cette politique a un sens : redonner de l'oxygène aux Français qui se lèvent le matin pour aller travailler, et qui ont parfois le sentiment qu'ils financent ceux qui ne travaillent pas. (Protestations à gauche)

Elle n'est pas contradictoire avec le redressement des finances publiques. De telles mesures génèrent des recettes supplémentaires. Ainsi la baisse de 33 à 25 % du taux de l'impôt sur les sociétés a-t-elle augmenté son rendement. Les décisions qui rendent plus attractif l'emploi sont aussi bonnes pour les finances publiques.

J'ai annoncé, dans le cadre du programme de stabilité, la trajectoire pour les cinq années, avec un retour du déficit à 2,7 % pour 2027. (Marques d'ironie sur des travées du groupe Les Républicains) Il y a un an même, vous doutiez d'une croissance à 2,50 % en 2022 ; nous l'avons dépassée. Les prévisionnistes s'alignent peu à peu sur notre prévision de croissance à 1 % pour 2023 : 0,8 % pour le FMI, 0,7 % pour l'OCDE. Nos entreprises investissent : c'est bon pour l'emploi et c'est bon pour nos finances publiques. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Arnaud Bazin.  - Le Président de la République a annoncé que la baisse de fiscalité pour les classes moyennes interviendrait quand la trajectoire des finances publiques le permettrait. (Marques d'ironie à droite) J'en déduis que la situation des classes moyennes s'améliorera... lorsqu'Emmanuel Macron ne sera plus Président de la République ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Violences à Marseille et réorganisation de la police judiciaire

Mme Marie-Arlette Carlotti .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) À Marseille, la pègre tue, sur fond de vendetta entre bandes rivales autour du trafic de stupéfiants. Il y a un assassinat par semaine, avec des victimes collatérales : enfants de 15 ans, femme tuée au volant de sa voiture, homme tué à la terrasse d'un café alors qu'il jouait aux cartes.

Avec Jérôme Durain, nous sommes allés à la rencontre de la population, qui se sent impuissante, car incapable de quitter, faute de transports, sa cité HLM, et abandonnée, avec les écoles insalubres, même si le maire de Marseille a la volonté de les réhabiliter ! (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains)

La police affiche des chiffres record de saisies de drogues, mais, à l'évidence, cela ne marche pas. Les moyens ne suffisent pas. C'est donc sur la doctrine que je vous interroge : fallait-il affaiblir la police judiciaire alors que la priorité est de lutter contre les réseaux ? (Applaudissements sur plusieurs travées des groupes SER et CRCE) Nous soutenons les forces de l'ordre ; quand les choses ne fonctionnent pas, c'est au ministre de revoir sa copie. À travers Marseille, c'est pour toutes les villes de France que nous nous indignons. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Michelle Gréaume applaudit également.)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - Nous partageons ce constat inacceptable : 17 tués depuis le début de l'année dans le cadre du trafic de stupéfiants. J'ai une pensée pour leurs proches et leurs familles.

Le ministère de l'intérieur est déjà pleinement mobilisé. Entre 2021 et 2022, 300 policiers ont été dépêchés en renfort. En début d'année, dix policiers ont rejoint la police judiciaire pour créer l'office antistupéfiants. Trois compagnies de CRS ont été affectées en permanence à Marseille, plus de 30 policiers sortis d'école affectés depuis le 2 mai.

M. François Bonhomme.  - C'est efficace !

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Onze nouveaux policiers arriveront à la police judiciaire d'ici septembre pour renforcer la brigade de recherche et d'intervention ; 90 postes ont d'ores et déjà été ouverts à Marseille pour le prochain mouvement.

Grâce à la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), une nouvelle compagnie de CRS sera implantée dans la ville avant la fin de l'année.

M. François Bonhomme.  - Pour quel changement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Entre janvier et mars, 362 opérations ont visé des points de trafic et 500 kilos de drogue ont été saisis. (M. François Patriat applaudit.)

Mixité sociale à l'école et laïcité

M. Max Brisson .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre de l'éducation nationale, après un long silence, votre entrée en scène était attendue. Mais loin d'annoncer des réformes, vous avez ouvert de nouvelles polémiques sur la laïcité et la mixité sociale. J'ai trois questions.

Avec la nouvelle composition du conseil des sages de la laïcité, souhaitez-vous redéfinir ce principe fondamental de notre République ?

Alors que le Président de la République a annoncé ne pas vouloir raviver les conflits, allez-vous mettre en oeuvre votre plan pour la mixité sociale à l'école ?

Avez-vous la confiance du Président de la République ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Pap Ndiaye, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Trois questions... ou plutôt deux auxquelles je répondrai.

J'ai déjà eu l'occasion de rappeler que la laïcité devait être strictement respectée : la loi de 2004 est notre boussole. Il faut être ferme avec ceux qui y contreviennent. Depuis l'automne, des sanctions ont été prononcées.

Mais la laïcité, c'est aussi une pédagogie : elle ne doit pas être seulement crainte, mais aussi aimée - comme les Républicains le disaient de la République à la fin du XIXe siècle. Il faut aussi convaincre ! Le Conseil des sages de la laïcité oriente l'action du ministre et lui fournit des éléments de doctrine. Par ailleurs, plus de 600 personnes travaillent au sein des équipes valeurs de la République pour faire respecter la laïcité sur le terrain.

Je dévoilerai ce soir le plan sur la mixité sociale ; je vais en effet signer un accord avec le secrétaire général de l'enseignement catholique et j'ai défini une batterie de mesures pour le public. 

La mixité, c'est bon pour le climat scolaire, c'est bon pour le climat social, c'est bon pour le niveau des élèves, c'est bon aussi pour la laïcité. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Mais sans rien de contraignant !

M. Max Brisson.  - Acte I : face caméra, le Président de la République multiplie les annonces sur l'organisation scolaire et son évolution.

Acte II : seul, pour enfin exister, vous vous concentrez sur deux sujets : une laïcité à géométrie variable, avec le torpillage du conseil des sages et des chefs d'établissement désorientés ; le mythe éculé de l'enseignement privé comme source de tous les problèmes de l'école publique.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Non, mais de l'absence de mixité sociale, oui.

M. Max Brisson.  - Acte III : le Président de la République vous rappelle à l'ordre et vos plans sont rangés au placard.

À force de tirer à hue et à dia, la rue de Grenelle et l'Élysée passent à côté de l'essentiel : la réforme d'un service public à bout de souffle.

Monsieur le ministre, la France a besoin d'un élan réformateur pour son école ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Mineurs non accompagnés

Mme Élisabeth Doineau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La question des mineurs non accompagnés n'est pas nouvelle et exige une réponse interministérielle. Le ministre de l'intérieur comme le ministre du travail, entre autres, sont concernés. Le président de l'Assemblée des départements de France (ADF), François Sauvadet, lance un cri d'alarme : 5 000 mineurs non accompagnés sont arrivés sur notre territoire depuis le début de l'année, dont 2 000 dans les Alpes-Maritimes, département qui en a reçu plus de 900 entre 2021 et 2022.

Parlerons-nous dans la loi immigration de cette question ? Nous devons les accompagner avec humanité et responsabilité, dans des conditions acceptables par la population.

La loi Taquet du 7 février 2022 comportait trois articles sur le sujet, mais les mesures n'ont pas passé le Conseil d'État. Qu'allez-vous faire pour aider des conseils départementaux à bout de souffle ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées des groupes Les Républicains et INDEP)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - (On s'amuse à droite et au centre que Mme Dominique Faure réponde encore à une question.)

Une voix au centre.  - Il n'y a qu'une seule ministre au Gouvernement ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Avec le ministre de l'intérieur et de l'outre-mer, Gérald Darmanin, nous sommes pleinement mobilisés sur cette question.

Mme Laurence Rossignol.  - Et les moyens de la protection de l'enfance ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - En 2022, les mineurs non accompagnés étaient 14 782, contre 11 315 en 2021, et les remontées des départements montrent une augmentation prévisible.

Le ministre de la jeunesse est à l'écoute de ces remontées. (Mme Laurence Rossignol s'exclame ironiquement.) Je suis moi-même en contact régulier avec François Sauvadet. Une rencontre a été organisée avec le ministre et le secrétaire d'État à l'enfance et les représentants du département des Alpes-Maritimes. Nous allons apporter une réponse concrète à la situation de ce département.

Plusieurs pistes sont à l'étude pour améliorer ce dispositif, dont la suspension de la clé de répartition et un concours exceptionnel de l'État. Nous devons offrir à ces mineurs une prise en charge indispensable, tout en préservant l'équilibre et la sécurité de nos territoires. (M. François Patriat applaudit.)

Sondage sur l'absence de liberté ressentie par les Français et arrêtés préfectoraux « abusifs »

M. Philippe Dominati .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il y a quelques jours, un quotidien publiait son enquête annuelle sur les libertés individuelles : 64 % des Français constatent que les atteintes contre celles-ci se sont aggravées en dix ans ; les électeurs de gauche comme les entreprises vont dans le même sens. Les interdictions pleuvent, elles deviennent quotidiennes. Possibilité d'arroser, de chasser, de choisir son médecin, de se faire vacciner ou non... Les Français sont pourtant prodigues, puisqu'ils paient la dette, les impôts parmi les plus élevés du monde, et l'État mord la main de ceux qui le nourrissent...

Je suis républicain ; je n'aime guère les monarchies, où les contribuables financent le patrimoine de leur prince. Mais entre les millions de Britanniques présents lors du couronnement de Charles III et la solitude de notre Président de la République sur les Champs-Élysées, entouré de dix policiers pour un spectateur, je m'interroge... (Mme Marie-Noëlle Lienemann abonde.)

Quelles instructions donnez-vous à votre administration pour ne plus enquiquiner les Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains) Personne ne conteste le sérieux de l'institut IFOP, mais nous parlons de perceptions subjectives. (M. François Bonhomme ironise.)

Nous sommes dans un État de droit, où l'action du Gouvernement et des forces de l'ordre est guidée par des principes constitutionnels partagés : liberté d'expression et de manifestation, notamment.

M. Mickaël Vallet.  - Et les casseroles ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée.  - Des restrictions aux libertés individuelles sont néanmoins possibles, si elles sont strictement proportionnées à un motif d'intérêt général ou justifiées par un risque avéré de trouble à l'ordre public.

Toute interdiction de manifestation est soumise au contrôle strict du juge, qui confirme ou, parfois, infirme les décisions de l'État. Ainsi du colloque de l'Action française autorisé par le tribunal administratif alors que le préfet de police l'avait interdit, du défilé en hommage à Jeanne d'Arc... Nos institutions fonctionnent, l'État de droit est respecté.

Pause en matière de réglementation environnementale annoncée par le Président de la République

Mme Laurence Rossignol .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Je vais essayer d'offrir une pause à Mme Faure, qui en a bien besoin...

En quarante ans, un quart des oiseaux, soit 800 millions d'individus, ont disparu en Europe.

M. Jérôme Bascher.  - Des rossignols ? (Rires)

Mme Laurence Rossignol.  - Ne vous laissez pas aller à ces plaisanteries faciles...

Cette situation est due notamment aux pesticides et à l'agriculture intensive ; 300 000 personnes, dont 12 000 enfants meurent prématurément chaque année du fait de la pollution de l'air.

C'est dans ce contexte que le Président de la République annonce vouloir une pause dans la réglementation environnementale européenne : c'est consternant, alors que la directive sur les pesticides et celles sur les produits chimiques sont en cours de discussion.

Avec cette déclaration, le Président de la République ne rapprocherait-il pas la France du côté obscur de la force - de ces pays qui font le choix de l'efficacité économique immédiate, au détriment de la santé de nos concitoyens ?

Aujourd'hui, nous sommes dans une course de vitesse contre la destruction du vivant. Dans quel camp se place la France ? Faut-il croire M. Béchu, qui nous souhaitait le 1er janvier une année verte ? Ou le ministre Lescure, qui demande cinq ans de pause dans la réglementation environnementale ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du GEST ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Merci d'avoir fait écho à cette étude pointant la mortalité des oiseaux à l'échelle européenne. Dans quelques jours, un traité sur la fin de la pollution plastique sera examiné à l'Unesco.

Les propos du Président de la République ne doivent pas être mal compris. Ce dernier avait organisé une conférence de presse promouvant l'industrialisation écologique du pays. Ceux qui parlent le plus de l'écologie ne se font pas ceux qui en font le plus... (Mme Marie-Pierre de La Gontrie proteste.)

Pendant le quinquennat que vous avez soutenu, la baisse des émissions n'était que de 1 % par an - elle a doublé ! Grâce à un texte européen négocié par le Président de la République, le « net zéro », nous attribuerons des subventions aux projets d'excellence écologique, dans le cadre de la planification écologique confiée à la Première ministre.

Mme Laurence Rossignol.  - Et la pause ?

M. Christophe Béchu, ministre.  - Compte tenu du nombre de textes votés et de ceux à venir, le Président de la République a dit qu'il fallait déjà appliquer les textes existants. (M. Hussein Bourgi, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, M. David Assouline et Mme Laurence Rossignol à tour de rôle : « Et la pause ? »)

Nous planifions l'électrification des véhicules ; mais l'évolution de la norme ne doit pas concerner le moteur - c'est la pause. Il n'y a pas de contradiction. L'ambition est totale, la pause n'est pas dans l'ambition ! (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - C'est incompréhensible !

Réglementation européenne en matière de lutte contre les incendies et de sécurité civile

Mme Françoise Dumont .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) En juin 2022, la Commission européenne a proposé une proposition de règlement sur la restauration de la nature, que la commission Environnement du Parlement européen doit examiner le 15 juin.

Dans son article 10, elle prévoit que les États membres devront augmenter la quantité de bois mort debout et au sol, la connectivité forestière, les stocks de carbone organique dans les sols ainsi que la part de forêt d'âge différent, la hausse de tous ces éléments devant être mesurée tous les trois ans dans l'ensemble des États membres, à compter de 2030...

Cela contrevient à la doctrine française de lutte contre les incendies de forêt que le Sénat a renforcée il y a peu avec une proposition de loi sur le sujet, prévoyant d'agir à l'échelle du massif et de favoriser la résilience de la forêt.

Quelles sont les actions engagées pour faire reconnaître les spécificités françaises en la matière ?

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité .  - (« Ah ! » sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Le 4 avril, une proposition de loi ambitieuse a effectivement été adoptée au Sénat à l'unanimité - j'étais au banc - afin de lutter contre le risque incendie. Elle est actuellement en cours d'examen à l'Assemblée nationale de la manière la plus constructive possible.

Les incendies de l'été dernier rappellent l'urgence d'agir. Je rappelle l'engagement de nos sapeurs-pompiers et leur apporte tout notre soutien.

Concernant le bois mort, aucune directive ne s'oppose à son enlèvement dans une optique de lutte contre l'incendie. (M. Philippe Pemezec ironise.) La réglementation Habitat, à travers l'article L. 401-1 du code de l'environnement, empêche la destruction d'une espèce protégée mais n'interdit pas l'enlèvement du bois mort.

Le double enjeu de prévention des habitats et de la diversité d'une part, de prévention contre les incendies d'autre part nous semble satisfait par la réglementation.

Mme Françoise Dumont.  - Je vous parlais d'un texte à l'étude dans la commission Environnement du Parlement européen qui aurait des conséquences très graves pour nos massifs forestiers et sur la mission de nos soldats du feu. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC).

Mise en oeuvre du diagnostic de performance énergétique

M. Olivier Henno .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) J'associe à ma question Jean-Michel Arnaud.

Monsieur le ministre, je ne remets pas en cause l'intention d'origine du diagnostic de performance énergétique (DPE), mais, depuis Bernard de Clairvaux, nous savons que l'enfer est pavé de bonnes intentions...

Les délais contraints pour la réalisation des travaux, le deux poids deux mesures entre petites surfaces et grands logements, le caractère uniforme, jacobin et descendant du DPE qui n'intègre pas les variations climatiques, l'effet sur l'offre de logement : le DPE contient des germes de fracture sociale et territoriale.

Quel est le calendrier de sa mise en oeuvre ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Jean-Michel Arnaud.  - Très bien !

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Le DPE est utile. Il a été réformé pour être plus en phase avec la qualité du logement, et la crise ne doit pas nous conduire à laisser vivre nos concitoyens dans des passoires thermiques. À partir de l'étiquette G, un logement ne pourra plus être loué à compter de 2025. Pour l'étiquette F, ce sera en 2028. On ne peut pas laisser des gens vivre avec leurs enfants dans des passoires thermiques. (M. Jean-Michel Arnaud proteste.)

Le Gouvernement a mis en place France Rénov', les accompagnateurs Rénov'. MaPrimeRénov' sérénité a été créée pour les plus fragiles. Toutes ces mesures nous permettront de tenir le calendrier, qui est dans l'intérêt des plus fragiles d'entre nous.

Je ne nie pas les particularités de certains territoires, notamment en montagne, et celles de l'habitat collectif, qui devra être mieux accompagné.

M. Philippe Pemezec.  - Nous mourrons de toutes vos normes !

M. Olivier Henno.  - Nous sommes perplexes devant cette nouvelle version du : « Je norme, donc je suis ». C'est la même chose, pour le DPE comme pour le zéro artificialisation nette (ZAN) : enthousiasme initial, perplexité devant la mise en oeuvre et abandon en rase campagne face au mur de la réalité. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Philippe Pemezec.  - Bravo !

La séance est suspendue à 16 h 20.

Présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

La séance reprend à 16 h 30.

Décès d'un ancien sénateur

M. le président.  - J'ai le regret de vous faire part du décès de Jean Dorian, sénateur des Côtes-d'Armor de 1997 à 1998.

Mises au point au sujet de votes

Mme Nadia Sollogoub.  - Lors des scrutins publics nos284, 285, 287 et 288 sur la proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, Bernard Delcros souhaitait voter contre.

Mme Nadège Havet.  - Lors du scrutin n°284 à l'occasion de l'examen du même texte, Julien Bargeton souhaitait voter contre. Moi-même, je souhaitais m'abstenir.

M. Christian Bilhac.  - Lors des scrutins nos284, 285, 286, 287 et 288, Stéphane Artano souhaitait voter pour.

Mme Samantha Cazebonne.  - Lors du scrutin n°284 sur l'article 8, je souhaitais voter contre.

M. le président.  - Acte vous est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l'analyse politique des scrutins.

CMP (Nominations)

M. le président.  - Des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Génocide ukrainien de 1932-1933

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de résolution relative à la reconnaissance du génocide ukrainien de 1932-1933, présentée, en application de l'article 34-1 de la Constitution, par Mme Joëlle Garriaud-Maylam et plusieurs de ses collègues.

Discussion générale

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, auteur de la proposition de résolution .  - Je salue la présence en tribune de M. Vadim Omelchenko, ambassadeur d'Ukraine en France, et de son conseiller Oleksander Shuitsy. (M. Claude Malhuret applaudit.) Je les remercie pour leur engagement au service de leur pays et de ses relations avec le nôtre. Je salue, à travers eux, le peuple ukrainien si vaillant, qui nous donne une leçon pour la défense de nos valeurs de démocratie et de souveraineté. Je salue également notre ambassadeur, ainsi que les Français qui ont choisi de rester en Ukraine malgré le danger, pour aider ce pays ami.

Nous sommes réunis pour débattre d'une proposition de résolution sur l'Holodomor, déposée dès le 9 décembre dernier et cosignée par nombre de nos collègues, dont Nadia Sollogoub, présidente du groupe d'amitié France-Ukraine.

Il nous aura fallu du temps : nous espérions que la France soit le premier pays à adopter une résolution condamnant le génocide perpétré contre le peuple ukrainien en 1932-1933. L'Assemblée nationale nous a devancés, en mars dernier, quoique son texte ait été déposé après le nôtre. Qu'importe, l'essentiel est d'avancer.

Cette résolution est très attendue par nos amis ukrainiens. À cette même tribune, le président de la Rada, Ruslan Stefanchuk, avait insisté sur l'importance de la voter. Après le Parlement européen, l'Assemblée nationale et les parlements irlandais, belge, allemand, polonais ou islandais, c'est au tour du Sénat d'en débattre.

L'Histoire nous éclaire toujours sur le présent, et des parallèles peuvent être faits avec la situation actuelle en Ukraine.

« Holodomor » signifie extermination par la faim. Avec méthode et cynisme, le pouvoir stalinien a organisé la famine, en 1932-1933, en rétorsion contre la résistance des Ukrainiens face à la dictature du prolétariat voulue par la Russie bolchévique. C'est le peuple ukrainien, sa culture, sa langue, que l'on a cherché à détruire, pour marquer la victoire du totalitarisme soviétique.

Les millions d'hommes, de femmes, d'enfants immolés au nom d'une idéologie mortifère - certains historiens évoquent neuf millions de victimes - témoignent de l'horreur qui peut être déchaînée par un pouvoir sanguinaire convaincu de son impunité.

« Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde », disait Camus. Outre la famine organisée dans les campagnes, les exécutions systématiques, la déportation de centaines de milliers d'enfants vers la Russie est clairement constitutive de génocide.

Raphael Lemkin, le juriste qui a défini le terme de génocide, qualifiait l'Holodomor d' « exemple classique de génocide soviétique ». Évidemment, la Russie refuse une telle qualification.

Cette résolution ne changera rien aux malheurs des Ukrainiens, mais elle les assurera de notre indéfectible soutien, et montrera à la Russie que nous ne sommes ni naïfs, ni ignorants.

Commémorant les 90 ans de l'Holomodor, le président Zelensky, déclarait, le 26 novembre 2022 : « Autrefois ils voulaient nous détruire par la faim, aujourd'hui par l'obscurité et le froid », et incitait les nations à reconnaître ce génocide.

Nous ne saurions tolérer l'impunité : je me réjouis du soutien de la France à la mise en place d'un tribunal ad hoc pour poursuivre les auteurs des crimes d'agression en Ukraine, comme l'assemblée parlementaire de l'Otan le demandait dès mai 2022. Les auteurs de ces crimes ignobles, terroristes, devront répondre de leurs actes, comme ceux que nous assignons aujourd'hui devant l'Histoire.

Au-delà des partis et des différences, j'en appelle à votre sens de la responsabilité : soutenons unanimement cette résolution, pour s'opposer aux forces du déni, de l'indifférence et de l'injustice, en une déclaration de solidarité avec le peuple ukrainien, qui mérite toute notre reconnaissance pour sa résilience face à tant de tragédies.

Les décideurs terrés dans les alcôves du Kremlin organisent l'agression de tout un peuple : tortures, viols, actes de cruauté commis par les troupes russes ou les mercenaires de Wagner nous rappellent les méthodes barbares des Soviétiques.

Il faut faire face à la vérité et qualifier les faits aussi précisément que possible. L'Holodomor est un génocide, et présente toutes les caractéristiques détaillées à l'article 2 de la Convention de 1948.

Le 17 avril dernier, nous votions à l'unanimité la résolution déposée par André Gattolin pour condamner les transferts forcés d'enfants ukrainiens. Avec une même unanimité, rappelons avec force que jamais, hier comme aujourd'hui, nous n'accepterons l'intolérable et que la France, patrie des droits de l'homme, défendra toujours la liberté et les valeurs démocratiques partout dans le monde.

Sur une affiche ukrainienne de 1918, une jeune paysanne ukrainienne protégeant son bébé d'un vautour dit : « Je ne veux pas de ce qui ne m'appartient pas, mais je ne vous laisserai jamais me voler ce qui est à moi ».

Par respect pour le peuple ukrainien, nous avons le devoir moral de voter cette résolution pour l'Ukraine et pour nos valeurs. Il y va de notre honneur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI, SER et INDEP)

M. Christian Bilhac .  - Alors que la guerre fait rage en Ukraine, la résolution de Mme Garriaud-Maylam propose de reconnaître comme génocide l'Holodomor, l'extermination par la famine conduite par Staline qui a fait plus de quatre millions de morts en Ukraine entre l'été 1932 et l'hiver 1933.

La méthode employée fut la terreur : collectivisation forcée, réquisition des récoltes, russification, enfants déplacés - déjà !, déportations, exécutions sommaires. Il s'agissait pour le régime d'accaparer les richesses agricoles ukrainiennes pour financer l'industrialisation rapide, tout en anéantissant toute velléité d'indépendance de l'Ukraine, en brisant les paysans réfractaires. La population affamée fut poussée jusqu'au cannibalisme ; dans le même temps, le régime exportait des tonnes de céréales ukrainiennes.

Ces crimes additionnés constituent un génocide selon le droit international. Le génocide est un processus graduel, la déshumanisation et la violation récurrente des droits étant précurseurs d'atrocités de masse, rappelle le président de l'Assemblée générale des Nations unies.

Staline a organisé l'extermination de la population ukrainienne, entretenant méthodiquement la terreur, comme d'autres l'ont fait contre les Arméniens, contre les juifs, ou encore contre les Tutsis.

Cette page sombre de l'histoire ukrainienne résonne de manière glaçante depuis l'invasion russe, le 24 février 2022. La guerre se joue aussi sur le terrain de l'information, et de la désinformation. Le régime russe n'a de cesse de réviser l'histoire, qualifiant les dirigeants ukrainiens de nazis. C'est aussi sur le terrain symbolique que les batailles se mènent. En témoignent les attaques émanant de hackers russes subies par le site internet de l'Assemblée nationale à la veille du débat sur la reconnaissance de l'Holodomor, ou celles subies par le site du Sénat la semaine dernière.

Aucune forme de révisionnisme ne doit effacer l'histoire des crimes staliniens. Reconnaître les crimes du passé contribue à ce qu'ils ne se répètent pas. André Guiol le disait lors du vote de la proposition de résolution sur les transferts d'enfants : dans la guerre informationnelle qui se joue, il est impératif de qualifier avec justesse les crimes commis.

Suivons l'exemple du Bundestag, du Parlement européen, de nos collègues belges, et d'autres : votons cette résolution visant à qualifier les crimes barbares de l'Holodomor de génocide. Il y va de notre devoir d'humanité. (Applaudissements sur les travées du RDSE, des groupes INDEP, Les Républicains et UC)

M. Olivier Paccaud .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Il est un abîme infernal, une question diabolique que l'humanité aurait souhaité ne jamais se poser : jusqu'où l'homme peut-il perdre son âme ? Le XXe siècle fut une sorte d'apothéose du mal : massacres de masse, martyr arménien, folie des Khmers rouges, génocide des Tutsis, Shoah. Sans oublier l'Holodomor.

Auparavant, nous avions certes connu la Saint-Barthélemy, la terreur révolutionnaire et les colonnes infernales de Turreau. Mais la spécificité du XXe siècle, c'est l'organisation, l'horlogerie du crime, jusque dans la mise en scène de sa négation.

Levons le voile obscène qui recouvre cette page du passé de l'Ukraine. Alors que certains refusent de reconnaître l'intentionnalité de ces atrocités, rétablissons cette vérité glaçante : en 1932 et 1933, des millions de paysans ukrainiens ont été condamnés à la mort par la faim. Si l'oubli est une seconde mort, le déni est un second crime. Oui, Staline savait ; oui, il voulait éradiquer ces paysans. Il a eu beau nier, ciseler une contre-propagande grossière avec des tournées où un Édouard Herriot constatait que tout allait bien - la guillotine sèche, celle du bourreau tartuffe qui ne veut pas de sang sur ses mains, tombait sur l'Ukraine.

Aucune ambiguïté : la loi des épis du 7 août 1932, qui punit de déportation ou de mort tout vol ou dilapidation de la propriété socialiste, ne serait-ce que le vol de quelques épis de blé, conduit à condamner 125 000 malheureux, dont 5 400 à la peine capitale. Les circulaires du 27 décembre 1932 et du 22 janvier 1933 assignent les paysans ukrainiens à résidence, les empêchant de fuir la famine. Pendant ce temps, l'URSS exportait des millions de tonnes de céréales ukrainiennes pour financer son industrialisation à marche forcée.

Les négationnistes, parmi lesquels de prétendus historiens idéologiquement marqués, parlent d'une famine générale. Mais la volonté délibérée d'extermination, de dékoulakisation de l'Ukraine apparaît clairement à travers le témoignage du journaliste gallois Gareth Jones, ressuscité par le film L'Ombre de Staline, et les photographies d'Alexander Wienerberger.

L'Holodomor, comme la Shoah, c'est le mal absolu, le refus même de la civilisation. Souvenons-nous du cinquième commandement du Décalogue : « Tu ne tueras point ». Et du huitième : « Tu ne témoigneras pas faussement contre ton prochain ».

« Quand la nuit essaie de revenir, il faut allumer les flambeaux » écrit Victor Hugo. À nous de servir, non pas le devoir mais l'impératif de mémoire et de vérité. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, SER et INDEP)

M. Claude Malhuret .  - Nous ne savions pas. Combien de fois cette excuse a-t-elle servi pour ceux qui ont choisi de fermer les yeux ? La Shoah, dans le secret des camps. Le génocide khmer, dans un pays cadenassé, l'Holodomor dans l'Ukraine impénétrable, le goulag dans l'inaccessible Kolyma, le laogai au fin fond de la Chine interdite. Cette excuse, je n'y crois pas. La vérité ne se dérobe qu'à ceux qui ne veulent pas voir.

Ces crimes ont leurs bourreaux, bien connus, mais aussi leurs complices. Les complices actifs, d'abord : les fascistes français et les collabos, les partis communistes occidentaux et leurs compagnons de route, les sectes maoïstes qui accueillaient la fine fleur de l'intelligentsia.

Les idiots utiles aussi, comme Édouard Herriot, qui revient de l'Ukraine à l'été 1933 en décrivant un jardin aux récoltes admirables. Romain Rolland, Langevin, Malraux ont fait autant de visites Potemkine, alors que derrière les décors, des parents mangeaient leurs enfants morts, que la loi des épis condamnait à dix ans de camp, ou à mort, ceux qui avaient glané quelques épis pour se nourrir.

Les bourreaux qui ont perdu ont été condamnés : les nazis à Nuremberg, les Khmers rouges à Phnom Penh, les génocidaires hutus à La Haye. Mais pas de Nuremberg pour ceux qui n'ont pas perdu la guerre : Staline et Mao sont morts dans leur lit. Difficile de juger leurs crimes quand les preuves ont été effacées.

Combien d'années pour attribuer à Staline l'Holodomor, Katyn, le goulag, ou pour connaître le bilan du grand bond en avant en Chine ? Nous devons condamner ces forfaits pour la mémoire des victimes, mais aussi pour tenter d'éviter de nouvelles atrocités, car l'histoire se répète, et l'Ukraine perd des centaines de milliers de ses enfants par le crime d'un colonel du KGB devenu maître du Kremlin. Avec toujours les mêmes complices, les mêmes idiots utiles.

J'en parle, car je les connais. En 1980, lorsque Médecins sans frontières a dénoncé la famine organisée par les Vietnamiens au Cambodge, nous avons été accusés d'être des agents de la CIA. En 1984, lorsque nous avons dénoncé les déportations de masse en Éthiopie, nous avons été traités de menteurs par des ONG, par l'ONU et même par le misérable ambassadeur de France. Des années plus tard, une fois renversé, Mengistu sera condamné pour crimes de guerre. Abrité par son ami Mugabe, il coule des jours paisibles au Zimbabwe.

Les Ouïghours, les Rohingyas, les massacres menés au Congo ou en République centrafricaine avec l'aide de Wagner, se heurtent encore au négationnisme des complices et des idiots utiles.

Aujourd'hui, l'Ukraine est victime de nouveaux crimes contre l'humanité, mais aucune des résolutions prises à l'Assemblée, au Sénat ou au Parlement européen pour condamner la guerre de Poutine n'a été votée ni par le Rassemblement national, ni par les Insoumis, ni par le Parti communiste.

Le 28 mars, l'Assemblée nationale a voté comme nous une résolution sur l'Holodomor. LFI a refusé de participer au vote, le Parti communiste a voté contre. C'est une insulte à la mémoire des victimes de Staline, mais aussi de Poutine. Demain, après la victoire de l'Ukraine, il faudra que se tienne le Nuremberg du poutinisme et de ses complices. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. Guillaume Gontard .  - (M. Patrick Kanner applaudit.) Le 26 novembre dernier, l'Ukraine commémorait le 90e anniversaire de la grande famine, qui a entraîné la mort de plusieurs millions de personnes en 1932-1933. En 1920, Staline décide la collectivisation forcée des terres. Les fermes sont réquisitionnées, les prélèvements sur récolte explosent ; des famines éclatent dans plusieurs pays, comme au Kazakhstan.

Pour briser la résistance des paysans ukrainiens, Staline durcit les mesures. Les villages sont affamés et les paysans interdits de gagner les villes. Entre 3,5 et 5,5 millions de personnes mourront dans des conditions atroces. Cet épisode porte un nom : l'Holodomor, l'extermination par la faim.

Aujourd'hui, la Rada nous demande de reconnaître la grande famine comme un génocide du peuple ukrainien. Cet épisode de son histoire fait partie intégrante de l'identité ukrainienne. C'est en 2004, après l'élection de Viktor Iouchtchenko, que l'Ukraine dénonce les atrocités de Staline et élève l'Holodomor au rang de tragédie nationale. De nombreux États ont depuis reconnu ce génocide, l'Allemagne dernièrement ; le Parlement européen également, en décembre.

Les Ukrainiens, eux, n'ont pas eu le loisir de commémorer ce 90e anniversaire, car depuis février 2022, ils sont de nouveau attaqués. Si le régime a changé, l'agresseur est le même. Les velléités impérialistes de Poutine l'ont conduit à bombarder des civils, des hôpitaux, à déporter des milliers d'enfants dans des camps de rééducation afin de les endoctriner puis les faire adopter par des familles russes. Boutcha porte encore les stigmates de ces atrocités. Mais Poutine commet, comme Staline avant lui, une erreur fondamentale : nier la construction nationale ukrainienne qui s'est affirmée depuis deux siècles. En la menaçant, Poutine ne fait que renforcer cette identité et, plus que jamais, pousse l'Ukraine vers l'ouest du continent.

Il est de notre devoir d'accompagner le droit du peuple ukrainien à décider de son destin. La reconnaissance du génocide ukrainien revêt une importance symbolique qu'il ne faut pas négliger. Renouvelons notre solidarité sans faille envers le peuple ukrainien en votant cette résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, UC et Les Républicains)

Mme Nadège Havet .  - « Reconnaissance envers l'Assemblée nationale pour cette décision historique » : c'est ainsi que Volodymyr Zelensky remerciait les députés après le vote, le 28 mars, de la résolution reconnaissant le caractère génocidaire des crimes de masses commis à l'encontre du peuple ukrainien il y a 90 ans.

À l'initiative de notre collègue Garriaud-Maylam, notre Haute Assemblée s'apprête à faire de même.

Le groupe RDPI votera ce texte, qui fait suite à deux autres textes : celui de Claude Malhuret affirmant notre soutien à l'Ukraine et condamnant l'agression russe et celui d'André Gattolin condamnant la déportation d'enfants ukrainiens vers la Russie.

Les souffrances d'hier font écho à celles d'aujourd'hui. Cette résolution répond à l'appel fait par le ministre des affaires étrangères Dmytro Kuleba aux Parlements du monde entier.

L'Holodomor, extermination par la faim, a été orchestrée par Staline entre 1932 et 1933, dans plusieurs régions de l'URSS, en particulier en Ukraine. Dès 1929 a commencé la collectivisation forcée des terres, accompagnée de déportations et d'exécutions massives des koulaks. La répression brutale contre les velléités de résistance de la paysannerie ukrainienne et la confiscation des récoltes a provoqué un exode rural de masse. En réaction, un blocus interdisant l'entrée dans les villes, et de nouvelles mesures confiscatoires.

La loi des épis rendait le vol du moindre épi de blé passible de la peine de mort. Dans le même temps, plusieurs millions de tonnes de céréales ukrainiennes étaient exportées.

Ces atrocités, révélées depuis la chute de l'URSS, sont pourtant toujours niées par Vladimir Poutine.

Le 15 décembre dernier, le Parlement européen a reconnu le caractère génocidaire de l'Holodomor. Nous soutenons cette initiative. Il s'agit pour nous de proclamer l'indéfectible attachement de la France au respect de la dignité humaine et d'exprimer notre soutien à ce peuple.

Voter cette résolution, c'est aussi confirmer au monde que, lorsque les valeurs universelles sont en jeu, il n'y a ni droite ni gauche, mais une représentation nationale qui vote en conscience. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, du RDSE et du groupe Les Républicains)

M. Patrick Kanner .  - La famine organisée par le régime stalinien entre 1932 et 1933 est une abomination qui a fait plusieurs millions de morts. Le chiffre exact a été soigneusement dissimulé, mais, selon les estimations, 5 à 7 millions de paysans, Ukrainiens pour la plupart, auraient péri. Le grenier à blé de l'URSS était devenu sa fosse commune. Le pouvoir avait réquisitionné les récoltes, et jusqu'aux moyens de production afin de créer une famine artificielle.

En ciblant les paysans ukrainiens, Staline voulait éradiquer l'identité ukrainienne et contenir toute velléité de contestation du joug soviétique. Certes l'Histoire ne se répète pas, mais elle éclaire le présent.

L'Ukraine s'est émancipée de la sphère culturelle des Slaves de l'est dans lequel Moscou voulait la contenir. Victime de l'oppresseur soviétique, le peuple ukrainien s'affirmait comme intrinsèquement autre.

La Russie, elle, reste assise sur une identité empreinte des prouesses passées, dont l'industrialisation à marche forcée des années 1930 qui permit sa victoire contre l'Allemagne nazie. Elle ne peut donc accepter le terme de génocide, qui dresse un parallèle avec Hitler.

L'Holodomor doit être dénoncé comme l'un des pires crimes staliniens. La résonnance avec la guerre qui sévit en Ukraine est saisissante.

La montée du nationalisme en France, ainsi que des violences et de la vision suprémaciste qui l'accompagnent, est pour nous une source de vive inquiétude. Le danger n'a jamais aussi été prégnant. Le déferlement de violence de l'extrême droite témoigne de sa totale désinhibition. Soyons vigilants à ce que le nationalisme ne gagne plus notre continent.

L'Holodomor doit être reconnue comme l'un des trois pires génocides du XXe siècle avec le génocide arménien et l'Holocauste. La proposition de résolution fait appel à notre devoir de mémoire. Ce devoir doit se muer en devoir de vigilance, car les heures sombres ne sont jamais loin lorsque le nationalisme exacerbé et le populisme s'entremêlent.

Ce rappel d'un douloureux passé doit nous inciter à ouvrir dès que possible les portes de l'Europe au peuple ukrainien. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. Pierre Laurent .  - À la fin des années 1920, Staline rompt avec la Nouvelle politique économique. Il engage une collectivisation forcée des terres agricoles, d'une brutalité inouïe. Le coût humain fut terrible, en particulier en 1932-1933, après deux terribles récoltes, engendrant des famines historiques.

Le pouvoir soviétique alla jusqu'à mettre en place des blocus, pour éviter que les paysans ne désertent les fermes. Cette politique fit des millions de morts, ukrainiens mais aussi kazakhs et russes. L'historien Stanislas Kul'chitskii estime entre 3 et 3,5 millions le nombre de victimes en Ukraine - plus que pendant la grande famine russe de 1891-1892 et que celles de 1918 à 1922.

Avec l'ouverture des archives de l'URSS, les travaux de plusieurs chercheurs, dont Hiroki Kuriyama et Roland Davies, ont rouvert le débat sur la théorie intentionnaliste, selon laquelle Staline aurait volontairement tué par la faim les paysans ukrainiens parce qu'ukrainiens.

En 2022, le Parlement belge a sollicité l'avis de trois historiens, qui ont jugé le terme de génocide inapproprié. L'historien Nicolas Werth, qui, lui, assume ce terme, a exposé dans une tribune récente les enjeux de ce débat terminologique. Cela n'atténue en rien les crimes staliniens, dont furent d'ailleurs victimes des opposants communistes.

Les sénateurs communistes tiennent à interroger les motivations politiques de cette résolution. Nous avons voté la proposition de résolution sur les déportations d'enfants, preuve que nous n'avons pas la main qui tremble.

La guerre des récits nationaux est depuis dix ans au coeur du conflit russo-ukrainien. Poutine ne cesse de réécrire l'Histoire pour justifier sa croisade au nom de la dénazification, tandis que les nationalistes ukrainiens réhabilitent Stepan Bandera. Trente ans après la chute de l'URSS, les frontières sont physiques mais aussi mémorielles. L'Ukraine devra les dépasser pour faire vivre ensemble sa population. Est-ce de notre responsabilité que d'alimenter ces conflits mémoriels ?

Cette résolution nous semble surtout servir à justifier l'amplification de l'effort de guerre réclamée par les dirigeants ukrainiens, au détriment de la recherche de la paix.

Pour toutes ces raisons, et aussi pour exprimer notre malaise face à l'inflation du qualificatif de génocide, par définition exceptionnel, dans les résolutions parlementaires, le groupe CRCE votera contre cette résolution. (Mme Éliane Assassi applaudit.)

M. Claude Malhuret.  - Une fois de plus ! C'est honteux.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Décevant...

Mme Éliane Assassi.  - Laissons l'histoire aux historiens !

M. Olivier Paccaud.  - Le déni est un second crime !

M. Claude Malhuret.  - Vous êtes complices !

M. François Bonneau .  - La famine orchestrée par l'URSS en 1932-1933 nous rappelle la difficile construction de l'identité ukrainienne, aujourd'hui menacée par la Russie.

Le plan de collecte des récoltes élaboré par Staline s'est fait au détriment de la population : les réquisitions atteignaient 55 % en 1932. Le pouvoir a utilisé l'arme de la faim pour briser le mouvement paysan. Ce châtiment par la faim visait en réalité à éteindre l'identité nationale des Ukrainiens, qui revendiquaient déjà leur indépendance en 1919.

Des preuves d'intentionnalité de la famine ont été découvertes à la chute de l'URSS. Les réserves de nourriture des paysans ont été confisquées et ils ont été exécutés ou déportés. Le régime stalinien a tenté d'empêcher l'exode de ceux qui tentaient de fuir. Ces preuves plaident pour le qualificatif de génocide, au sens de la Convention de 1948. Ce grenier à blé est devenu un charnier.

L'Holodomor est un des socles de la reconstruction étatique, nationale et identitaire de l'Ukraine post-soviétique. Les crimes de Staline ont été retracés dans l'ouvrage Sanglantes Moissons de Robert Conquest, qui a ancré ce drame occulté dans la mémoire collective.

En novembre 2006, le Parlement ukrainien a reconnu la famine comme un génocide. À ce jour, 31 pays reconnaissent l'Holodomor comme tel. Le Parlement européen et l'Assemblée nationale ont suivi.

Nous ne pouvons rester insensibles. La reconnaissance de ce génocide par la France s'impose afin de mettre en lumière la politique d'assimilation et de destruction menée contre des populations civiles.

« L'humanité ne peut pas vivre éternellement avec, dans sa cave, le cadavre d'un peuple assassiné », disait Jean Jaurès. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et SER)

M. Jean Louis Masson .  - Je ne voterai pas cette proposition. D'abord, les faits ne correspondent pas à la définition juridique d'un génocide. Ensuite, cette proposition de résolution a surtout pour but de nuire à la Russie.

Les vrais responsables sont les dirigeants communistes, aussi bien ukrainiens que russes ou autres. Staline était géorgien, Khrouchtchev ukrainien. D'ailleurs, au prorata de la population, Staline a fait plus de morts au Kazakhstan qu'en Ukraine. Il faut une certaine mauvaise foi pour reporter les accusations sur la Russie d'aujourd'hui. Comme pour désigner Guillaume II seul responsable de la Première Guerre mondiale, en occultant la responsabilité des pays qui soutenaient les terroristes serbes et bosniaques qui assassinèrent l'archiduc !

De même pour le conflit russo-ukrainien, dont le vrai responsable est le trio des provocateurs : Otan, États-Unis, Union européenne.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - N'importe quoi !

M. Jean Louis Masson.  - La disparition du pacte de Varsovie aurait dû avoir pour corollaire la dissolution de l'Otan. Or, en violation des engagements pris, celle-ci s'est étendue vers l'est, sur des territoires appartenant à la Russie historique. Celle-ci, à juste titre, s'est sentie encerclée. Quand l'URSS a voulu installer quelques fusées à Cuba, les États-Unis étaient prêts à engager une guerre nucléaire. L'encerclement de la Russie par le trio des provocateurs est bien pire ! C'est pourquoi je suis hostile à l'adhésion de pays de l'ex-URSS à l'Otan et à l'Union européenne, qui est son cheval de Troie.

Si la guerre reste conventionnelle, la Russie finira par s'effondrer face aux énormes moyens mis en oeuvre par les pays de l'Otan. Le président Poutine acceptera-t-il une humiliation et un asservissement par l'Otan ? Son seul choix serait entre se laisser écraser et l'escalade nucléaire. (Mme Joëlle Garriaud-Maylam proteste.)

Les États-Unis ont utilisé la bombe atomique alors qu'ils gagnaient la guerre. La Russie, acculée, pourrait utiliser tous les moyens à sa disposition pour se défendre. Les États-Unis seraient alors mal placés pour lui donner des leçons.

M. Bruno Belin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du RDPI) Je salue l'auteur de cette résolution, Joëlle Garriaud-Maylam, et manifeste ma gratitude à la présidente du groupe d'amitié France-Ukraine, Nadia Sollogoub, dont l'action honore le Sénat. Je salue aussi l'ambassadeur d'Ukraine, présent dans la tribune d'honneur, et lui exprime notre solidarité.

Nous ne devons pas nous placer sur le terrain de l'affect, mais nous fonder sur le droit international, qui, depuis 1948, définit le génocide par l'intention, la tentative de destruction et la notion de groupe national, religieux, ethnique ou racial.

Bien sûr, il y a eu intention de détruire. L'Holodomor fut une barbarie organisée par le leader de l'Union soviétique, consistant à user de l'arme de la faim contre le peuple ukrainien.

Si Mme Assassi était restée, je l'aurais mise au défi de voir deux fois de suite le film L'Ombre de Staline. Pour ma part, je n'y suis pas parvenu. Le régime avait dû inscrire sur des affiches : « Manger son enfant est un acte barbare ».

Toutes les victimes n'étaient pas ukrainiennes, mais il y a eu volonté d'anéantir la résistance des paysans ukrainiens, dont 6 à 7 millions ont péri.

Trente et un pays reconnaissent déjà ce génocide. Nier, c'est tuer une seconde fois. Ce sera l'honneur du Sénat de voter cette résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et du RDPI ; Mme Hélène Conway-Mouret applaudit également.)

Mme Hélène Conway-Mouret .  - (Applaudissements sur de nombreuses travées) La mémoire d'une douleur est toujours intime. Pour avoir vécu trente ans en Irlande, j'ai le souvenir d'une vallée rousse et vide où le regard ne s'accroche qu'à la croix de granit commémorant la tragédie de Doolough. On peut y lire : Erected to the memory of those who died in the famine of 1845-1849.

Celui qui s'y recueille songe à ce poème de Desmond Egan : In Ireland also / there are places where no birds sing / where the past overgrows the present / where centuries quiver in a leaf / who had our own holocaust in medieval 1847.

Un jour de mars 1849, plus de 400 personnes sont mortes de faim dans ce comté de Mayo, lors d'une dernière marche imposée par l'administration coloniale. Au total, la Grande famine fit un million de morts.

Il ne s'agit pas de relativiser la dimension exceptionnelle de la famine qui entraîna la mort de 3,5 millions d'Ukrainiens. Nous pourrions débattre de la qualification de génocide inscrite dans ce texte - que nous voterons. Mais il ne nous revient pas de qualifier des faits, alors que les Nations unies s'y sont refusées et que le débat entre historiens n'est pas clos. La question n'est pas là.

Une famine provoquée et le refus de tout secours aux populations abandonnées conduisent à la mort d'une multitude de personnes et à l'effondrement durable de la natalité. Je ne sais si l'Holodomor a été un génocide. Mais cette extermination par la faim est, dans tous les cas, un événement tragique de l'histoire universelle.

Je pense à la plage lettone de Liepaja, où furent massacrés 10 000 juifs du ghetto de Riga, au collège de Tuol Sleng à Bangkok, au musée de la mémoire et des droits humains à Santiago du Chili. Je pense aussi au génocide arménien de 1915, dont l'Europe s'est détournée.

Un massacre de masse vise à faire disparaître une population non seulement de sa terre, mais de la Terre, comme le dit Hannah Arendt. La discrimination et la persécution d'une communauté sont des phénomènes communs à tous ces événements. Soyons-y attentifs, car ce processus n'a pas disparu.

C'est pourquoi la mémoire de l'Holodomor doit être rappelée, et c'est pourquoi le vote de cette résolution s'impose. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du RDPI ; Mme Joëlle Garriaud-Maylam applaudit également.)

Mme Nadia Sollogoub .  - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains) Dans les années trente, une épouvantable famine a fait sept millions de victimes. Elle était organisée par l'homme. Les victimes étaient surtout ukrainiennes, mais aussi kazakhes et russes.

Comment qualifier ce drame ? C'est la question que nous nous posons. Avons-nous le droit, par respect pour les générations passées, par souci des générations futures, de fermer encore les yeux ? Ce que l'on a appelé l'Holodomor a laissé peu de traces dans nos mémoires : le pouvoir soviétique a réussi à camoufler l'horreur.

En 1932, la loi des épis punissait de mort qui cachait les semences. La population, affamée, commença par manger les animaux d'élevage, puis les animaux domestiques, les rats, jusqu'à l'anthropophagie dans certains cas. Lénine avait été prophétique : « Pour soumettre un peuple, il suffit de l'affamer ».

Aujourd'hui, nous sortons d'un hiver glacial qui fait écho à cette époque : confiscations, victimes civiles, déportations d'enfants. Notre collègue Garriaud-Maylam nous propose une excellente résolution, appelant le Gouvernement français à reconnaître l'Holodomor comme un génocide.

Nous avons reçu Oleksandra Matviichuk, avocate ukrainienne, prix Nobel de la paix 2022. Elle a recensé les témoignages qui documentent les crimes de guerre actuellement perpétrés sur le sol ukrainien. Au sujet de l'Holodomor, elle dit : « Ceux qui ne connaissent pas leur histoire sont obligés de la répéter ».

Cette femme tient, comme tout le peuple ukrainien, grâce à un immense courage, mais aussi la certitude que la paix ne viendra pas sans la justice. Elle nous a fait comprendre combien il est important pour le peuple ukrainien d'obtenir l'assurance qu'aucun crime ne restera impuni.

L'Holodomor était bien une intention délibérée de détruire un groupe de personne. Nier son caractère génocidaire, c'est grimer la mémoire des peuples.

Le 26 novembre 2022, Oleksandra Matviichuk écrivait : « La Russie démolit le mémorial aux victimes dans Marioupol occupé, mais la mémoire survit. » Son propos fait écho au grand poète ukrainien Taras Chevtchenko : « Notre âme ne peut pas mourir. » Faisons en sorte que notre humanité ne puisse pas non plus mourir. (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Bravo !

M. Édouard Courtial .  - « Le droit est l'espoir de l'humanité, pas la guerre ». Ainsi parlait le dernier procureur survivant des tribunaux de Nuremberg, Benjamin Berell Ferencz, qui nous a quittés le 7 avril.

Depuis 1948, les États se sont engagés à prévenir et punir le crime des crimes : le génocide, défini comme la volonté de faire disparaître de la surface de la Terre un groupe national, ethnique, racial ou religieux.

Cette définition est due à Raphael Lemkin, choqué par l'impunité accordée aux crimes ottomans contre les Arméniens. Vingt ans après l'Holodomor, ce juriste polonais avait lui-même parlé de génocide soviétique et de tentative de destruction de la nation ukrainienne. Cette famine organisée a entraîné la mort de 4,5 à 9 millions de personnes en Ukraine. Après la collectivisation forcée à partir de 1932, la réquisition d'un tiers des récoltes créa une famine ; malgré les alertes, les directives du pouvoir central n'ont fait que se durcir, s'apparentant à une soumission intentionnelle du groupe dans des conditions pouvant mener à son anéantissement. Cela répond à la définition du génocide.

Le Parlement ukrainien en 2006, celui du Brésil en 2007, les parlements européen et allemand en 2022 ont reconnu l'Holodomor comme génocide. Certaines critiques pourraient parler aujourd'hui d'une reconnaissance de circonstance ; je préfère dire qu'elle est nécessaire au vu de la situation actuelle de l'Ukraine. Ce serait un signal fort de solidarité contre l'impunité des criminels internationaux.

Comme le génocide arménien est nié par la Turquie, l'Holodomor reste nié par la Russie. Face au silence et au révisionnisme, cette résolution nous invite à un travail mémoriel indispensable.

Je salue donc l'initiative de Joëlle Garriaud-Maylam, que je voterai. Qualifier l'Holodomor de génocide, c'est reconnaître une réalité immuable. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

M. Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger .  - Cette résolution revêt une importance particulière, non seulement parce que la mémoire de l'Holodomor est devenue un élément central de l'identité ukrainienne, mais aussi en raison de l'écho entre les souffrances du peuple ukrainien d'hier et d'aujourd'hui - alors que Kiev était visée hier par les missiles hypersoniques russes.

Les autorités soviétiques ont longtemps dissimulé les preuves de leur implication ; il a fallu attendre Gorbatchev pour que les historiens mettent en lumière, grâce aux archives, la réalité du projet soviétique. Face à un ennemi intérieur fantasmé, le koulak, paysan possédant incarnant le nationalisme ukrainien, le régime eut recours aux confiscations, au blocus, aux déportations collectives - qui firent plusieurs millions de morts.

Votre résolution est en résonance évidente avec l'actualité. La Russie cherche à nourrir un récit national justifiant son agression impérialiste, allant jusqu'à nier la réalité de l'Ukraine comme peuple et comme nation.

La France poursuit son soutien au travail indispensable des historiens, avec des unités mixtes de recherche franco-ukrainiennes en histoire et en sciences sociales. L'attachement à la vérité historique est la marque des sociétés démocratiques.

Le 26 novembre, la dernière commémoration de l'Holodomor nous rappelait combien la Russie aggrave, par son invasion, l'insécurité alimentaire mondiale. Une fois encore, la France a mené une action résolue. Le Président de la République annonçait alors le soutien français à l'initiative Grain for Ukraine, avec six millions d'euros apportés au programme de distribution au Yémen et au Soudan par le programme alimentaire mondial (PAM).

Comme l'Assemblée nationale il y a peu et d'autres parlements dans le monde, vous vous inscrivez dans ce travail de reconnaissance. Il n'est pas dans les habitudes du Gouvernement de reconnaître comme génocide des faits qui n'ont pas été reconnus comme tels, au préalable, par une juridiction française ou internationale. Mais la réalité des crimes commis ne fait pas de doute ; c'est pourquoi le Gouvernement soutient ce texte.

Je tiens à réaffirmer (M. le ministre lève son regard vers la tribune), monsieur l'ambassadeur d'Ukraine, notre soutien ferme à votre pays.

M. Bruno Belin.  - Très bien !

M. Olivier Becht, ministre délégué.  - Le Président de la République l'a rappelé ce week-end au président Zelensky.

Aide économique et financière, aide humanitaire et matérielle, lutte contre l'impunité : le soutien de l'Union européenne dépasse les 67 milliards d'euros. La France et l'Union européenne défendent à travers ce soutien un ordre international basé sur le droit et les règles, face à un président russe visé par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI).

Aider l'Ukraine à reprendre l'ascendant est la meilleure manière de mettre un terme au conflit. La France ne tolère par l'impunité des criminels soutenus par la Russie sur le sol ukrainien.

Notre appui est continu aux autorités ukrainiennes. Le 9 mai, nous leur avons remis un deuxième laboratoire d'analyses ADN pour documenter les crimes connus. Nous continuerons à agir en ce sens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du RDPI, du RDSE, des groupes INDEP, UC et Les Républicains)

À la demande du groupe Les Républicains, la proposition de résolution est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°290 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 327
Contre   16

La proposition de résolution est adoptée.

(Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

Prochaine séance, mardi 23 mai 2023, à 14 h 30.

La séance est levée à 18 heures.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mardi 23 mai 2023

Séance publique

À 14 h 30 et le soir

Présidence : Mme Nathalie Delattre, vice-présidente, Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

Secrétaires :M. Dominique Théophile - Mme Corinne Imbert

1. Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur la proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, présentée par MM. Laurent Duplomb, Pierre Louault, Serge Mérillou et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission, n°590, 2022-2023)

2. Projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 (procédure accélérée) (texte de la commission, n°612, 2022-2023)

3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne (texte de la commission, n°588, 2022-2023)