Questions d'actualité (Suite)

Retraites (III)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - Merci, mes chers collègues. Je ne suis pas sûr de mériter toutes ces louanges, mais je les accepte volontiers... (Sourires)

Le conclave ne s'est pas achevé par une fumée blanche. Je le regrette, mais, comme vous, monsieur le Premier ministre, je pense qu'il ne faut pas en rester là.

Il y a cinq mois, vous avez confié aux partenaires sociaux le soin de réviser la réforme des retraites sans tabou ni totem, pas même l'âge d'ouverture des droits, mais en respectant l'équilibre du système à l'horizon 2030.

Vous avez ainsi offert une chance inespérée au paritarisme et au dialogue social, auquel nous sommes tous attachés. Il s'agissait d'une forme de retour aux sources, les partenaires sociaux ayant, pendant longtemps, assuré seuls la gestion des retraites. Ils gèrent d'ailleurs encore l'Agirc-Arrco, qui détient 86 milliards d'euros de réserves pour 100 milliards d'euros de dépenses, un résultat exemplaire. Tous les participants au conclave sont favorables à cette gouvernance paritaire, rapprochant le régime de base des complémentaires du privé.

Des avancées ont été obtenues sur des questions essentielles : pénibilité et droits des mères de famille, notamment. Oui, une voie de passage existe. Que comptez-vous faire désormais ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe INDEP et du RDSE)

M. François Bayrou, Premier ministre .  - Je m'associe aux compliments que le Président du Sénat vous a adressés et que nous avons appuyés par nos applaudissements.

Une longue histoire nous lie, de militantisme et d'amitié. En vous voyant, je revis le moment où, jeune agrégé, je sonnai à la porte du parti politique qui est toujours le nôtre. J'avais à peine vingt ans, et celui qui m'accueillit s'appelait Jean-Marie Vanlerenberghe.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Formidable !

M. François Bayrou, Premier ministre - Parmi nos convictions communes, il y a l'attachement à l'idéal de démocratie sociale. Nous pensons que certains domaines de la vie collective relèvent non pas du politique, mais de la société civile organisée et des corps intermédiaires. C'est ainsi qu'on peut apaiser la société au lieu de la rendre sans cesse plus conflictuelle.

M. Rachid Temal.  - Comme avec le conclave...

M. François Bayrou, Premier ministre.  - Les retraites sont l'un de ces domaines. En la matière, la responsabilité des partenaires sociaux peut être bienfaisante : nous l'avons cru et le croyons toujours.

La négociation récente peut aboutir positivement ; en tout cas, elle a fait considérablement progresser les choses. Je vous confirme la détermination du Gouvernement à garantir que rien ne soit perdu du chemin accompli et à mener à son terme le travail de concertation des organisations syndicales et patronales.

Permettez-moi, pour finir, de vous adresser des remerciements affectueux. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du RDPI et du groupe INDEP)

Programmation énergétique de la France

Mme Anne Souyris .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Qui aurait pu prédire que la droite et l'extrême droite allaient s'allier pour attaquer l'écologie ? (Murmures désapprobateurs à droite)

Alors que, selon les scientifiques, l'objectif de limiter le réchauffement climatique global à 1,5 °C n'est plus atteignable, voici que, après les ZFE, le ZAN et MaPrimeRénov', Les Républicains et le Rassemblement national se sont trouvé un nouveau point commun : la décroissance des énergies renouvelables.

C'est ce qui a failli être acté hier, à l'Assemblée nationale, grâce à certains soutiens du Gouvernement. Fessenheim aurait été rouverte, grâce à une extrême droite toute-puissante. Ce que Laurent Wauquiez et l'extrême droite nous proposent, c'est le retour à la lampe à huile, le backlash écologique, le climato-négationnisme ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Les députés ont finalement rejeté la proposition de loi Gremillet et son moratoire sur les énergies renouvelables : tant mieux. Et maintenant ?

Maintenez-vous l'inscription de ce texte à l'ordre du jour du Sénat le 8 juillet et publierez-vous le décret de programmation pluriannuelle de l'énergie avant cette nouvelle lecture ? Votre coalition, oublieuse des promesses d'Emmanuel Macron, fermera-t-elle le ban d'une programmation ambitieuse pour les énergies renouvelables, seules à même de protéger notre souveraineté et le climat ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie .  - Le cap de notre politique énergétique reste inchangé : sortir de la dépendance aux énergies fossiles. C'est un enjeu climatique, mais aussi de souveraineté, dans la mesure où ces énergies pèsent sur notre balance commerciale à hauteur de 70 milliards d'euros et nous mettent à la merci de pays dont certains nous sont désormais hostiles.

Ce cap, nous l'atteindrons grâce à une stratégie reposant sur deux jambes : le nucléaire et les énergies renouvelables. La proposition de loi de Daniel Gremillet, dont je salue le travail, fournissait un cadre. (M. Jean-François Husson renchérit.) Elle a été dénaturée à l'Assemblée nationale par des mesures absurdes du point de vue industriel, comme la réouverture de Fessenheim,...

M. Jacques Fernique.  - Absurde, c'est le mot !

M. Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie.  - ... et d'autres très fragiles du point de vue du respect du droit européen. Quant au moratoire sur les énergies renouvelables, il serait dévastateur pour nos filières et l'économie de nos territoires.

Ce texte a été rejeté : je pense que c'était nécessaire. Il va poursuivre son cheminement et revenir devant vous le 8 juillet. La sérénité doit reprendre ses droits dans les débats.

Le décret portant programmation pluriannuelle de l'énergie est réclamé par les filières industrielles et nécessaire pour mettre notre politique nucléaire en cohérence avec nos objectifs, mais il ne sera publié qu'une fois que la représentation nationale aura pu converger sur un texte et le voter. (M. François Patriat applaudit.)

M. Yannick Jadot.  - Franchement...

Mme Anne Souyris.  - Votre « et et » ressemble beaucoup à un « en même temps ». Mais à quoi cela aboutit-il ? Le texte voté par le Sénat était déjà profondément insatisfaisant : c'était le nucléaire et les renouvelables, mais sans les renouvelables...

Alors que la droite et l'extrême droite sont en train de saccager l'écologie et l'accord de Paris (Marques d'indignation à droite),...

M. le président. - Il faut conclure.

Mme Anne Souyris.  - ... j'espère que vous tiendrez vos engagements ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille

Mme Muriel Jourda .  - (Applaudissements nourris sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le Premier ministre, vous avez jugé utile d'inscrire à l'ordre du jour du Parlement un projet de loi modifiant le mode de scrutin municipal à Paris, Lyon et Marseille.

M. Bruno Sido.  - Une absurdité !

Mme Muriel Jourda.  - Non seulement il a été tardivement déposé, mais il traduit une certaine impréparation, comme le président du Sénat et le président Darnaud l'ont souligné. Au second, vous avez répondu : « Le Parlement sera souverain, pas le Gouvernement. » (M. Albéric de Montgolfier s'exclame.) Vous avez ajouté : « Je n'imagine pas qu'un texte soit adopté sur ce sujet sans accord entre l'Assemblée nationale et le Sénat. »

Dans ces conditions, nous ne concevons pas que vous passiez outre l'avis de la chambre des territoires. Or, constatant que ce texte avait été écrit avec une légèreté quasiment irréparable, nous l'avons rejeté à une assez forte majorité. Vous avez pourtant convoqué immédiatement une CMP, qui n'a pas été conclusive compte tenu de la faiblesse des propositions qui nous ont été faites.

Aujourd'hui, je lis dans les journaux que vous souhaiteriez poursuivre le processus législatif. Mais je ne crois pas nécessairement ce que je lis dans les journaux... Pouvons-nous connaître vos intentions ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements sur de nombreuses travées des groupes SER et CRCE-K ; MMEmmanuel Capus et Akli Mellouli applaudissent également.)

M. Patrick Mignola, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - (Vives protestations sur plusieurs travées ; quelques huées à droite)

M. Max Brisson.  - Le Premier ministre !

M. Patrick Mignola, ministre délégué.  - Ma réponse, ce sont les institutions, rien que les institutions, mais toutes les institutions. (Marques d'ironie sur de nombreuses travées)

Le Gouvernement exerce ses responsabilités sans majorité à l'Assemblée nationale et les deux chambres sont parfois en désaccord. Dans ce cas, c'est le cycle institutionnel qui permet d'aller vers un compromis. C'est dans cet esprit que le Premier ministre nous demande de travailler.

M. Roger Karoutchi.  - Ce n'est pas ce qu'il avait dit !

M. Patrick Mignola, ministre délégué.  - Sinon, qu'arriverait-il aux textes d'origine sénatoriale et que le Gouvernement soutient : loi Duplomb, loi Gremillet, loi Trace ? Il est possible qu'il y ait des différences de vues profondes entre l'Assemblée nationale et le Sénat.

M. Jacques Grosperrin.  - Où est le Premier ministre ?

M. Patrick Mignola, ministre délégué.  - J'entends vos préventions, légitimes et que le président du Sénat a réitérées, sur l'éventualité d'un dernier mot donné à l'Assemblée nationale. Mais nous n'en sommes pas là. (Exclamations à droite et sur certaines travées à gauche)

Nos institutions prévoient que, après l'échec d'une CMP, les deux chambres soient saisies en nouvelle lecture. Le Gouvernement fera tout pour qu'un compromis soit trouvé.

Je rends hommage au travail des rapporteurs Josende et Mattei ; ils ont travaillé ensemble à des propositions conformes aux attentes du Sénat, en particulier sur les compétences des arrondissements et le rôle de leurs maires. (Mmes Marie-Claire Carrère-Gée et Catherine Dumas le contestent.) J'ai compris que ces propositions n'avaient pas été examinées très longtemps et que certains échanges avaient moins scintillé de bonne foi que nous l'aurions souhaité. (Protestations et quelques marques d'indignation à droite)

Le Gouvernement s'engage à travailler à un compromis : c'est ainsi que nous pourrons faire fonctionner nos institutions. (Nombreuses marques d'insatisfaction à droite et à gauche ; Mme Marie-Claire Carrère-Gée proteste ; M. François Patriat applaudit.)

Mme Muriel Jourda.  - Vous-même, le 3 juin, avez dit que le Gouvernement prendrait une décision en concertation avec les deux assemblées. Quand je vous entends cet après-midi, je me demande lequel de nous deux est de bonne foi... (Mmes et MM. les sénateurs du groupe Les Républicains se lèvent et applaudissent avec énergie ; applaudissements sur de nombreuses travées des groupes SER et CRCE-K ; MM. Marc Laménie et Vincent Louault applaudissent également.)

Justice fiscale

M. Thierry Cozic .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le Premier ministre, en février dernier, le Parti socialiste a pris ses responsabilités afin de doter le pays d'un budget. En échange de la non-censure, vous vous étiez engagé, par écrit, à instaurer une taxation des hauts patrimoines, censée générer 4 milliards d'euros de recettes, afin de rétablir un semblant de justice fiscale, après huit ans de macronisme.

Vous nous payez en billets de Monopoly.

Votre attelage gouvernemental n'est pourtant pas plus légitime qu'au lendemain des dernières législatives : l'alliance des perdants ne saurait imposer ses vues à ceux qui sont arrivés en tête, surtout en matière budgétaire.

Alors que vous allez vous écraser contre le mur du budget, vous discutez de sa couleur ! Vous nous conviez à l'une de ces réunions où tout est décidé à l'avance, pour mieux vous prévaloir d'une concertation factice. À part faire des économies sur les plus fragiles, rien ne trouve grâce à vos yeux.

Sur les retraites, vous n'avez pas davantage tenu vos engagements. Les socialistes ont donc logiquement déposé une motion de censure.

Comptez-vous respecter vos engagements en matière de justice fiscale ou envisagez-vous une fuite en avant, vous contraignant à un tango mortifère avec l'extrême droite ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Ian Brossat applaudit également.)

M. Éric Lombard, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique .  - Rien n'est décidé d'avance : ces sujets vont nous occuper dans les mois qui viennent. Il n'y a pas de majorité à l'Assemblée nationale, c'est donc dans la concertation que nous travaillerons. Avec la ministre des comptes publics, nous allons recevoir les présidents de groupe, de commission et les rapporteurs généraux pour écouter les propositions et élaborer un projet de loi de finances dont le Premier ministre donnera les premières lignes mi-juillet. Nous poursuivrons la concertation à la rentrée, afin de trouver l'accord le plus large possible.

Sur les retraites, le Premier ministre a été limpide : les partenaires sociaux étaient à quelques centimètres d'un accord (M. Rachid Temal le conteste), il nous faut trouver les voies et moyens d'y parvenir.

Les engagements en matière fiscale seront tenus - vous connaissez le Premier ministre. Le texte va se construire dans le dialogue. Nous sommes prêts à travailler avec vous pour élaborer un budget efficace et utile. (M. François Patriat applaudit.)

M. Thierry Cozic.  - En ne respectant pas vos engagements, vous vous exposez à la censure, ce qui vous met dans la main de l'extrême droite - M. Barnier peut en témoigner. Ne jouez pas le budget de la France à la roulette russe. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Statut de l'élu local

Mme Marie-Jeanne Bellamy .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Daniel Fargeot applaudit également.) Les maires de France attendent un véritable statut de l'élu local. Le Sénat a répondu à cet appel il y a plus d'un an avec une proposition de loi, adoptée à l'unanimité.

Injures et diffamations quotidiennes, menaces, agressions physiques, charge mentale croissante : las et découragés, nombre de maires renoncent à se représenter ou peinent à constituer une liste, faute de candidats, à moins de neuf mois des prochaines municipales.

Nos élus ne demandent pas le grand soir, simplement une reconnaissance de leur engagement, une meilleure protection et des conditions d'exercice compatibles avec une vie personnelle et professionnelle.

Après de nombreux reports, l'Assemblée nationale se saisit enfin du texte à partir du 7 juillet ; mais que la route est longue !

Monsieur le Premier ministre, vous qui êtes maire et attaché à ce mandat, vous engagez-vous solennellement à inscrire ce texte à l'ordre du jour du Sénat dès septembre, pour une promulgation avant la fin de l'année ? Il y a urgence, les élus ne peuvent plus attendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - Nous partageons votre analyse. Ce texte, attendu par tous les élus, sera inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le 7 juillet. Ancien maire de Dijon, j'en mesure l'importance, je sais ce qu'en attendent les élus.

La même volonté qui s'est exprimée au Sénat l'année dernière prévaudra, je l'espère, à l'Assemblée. Avec Françoise Gatel, qui a porté ce texte lorsqu'elle était sénatrice, nous tenons à ce qu'il revienne devant vous en septembre, comme vous me l'avez demandé.

Nos élus attendent de meilleures conditions d'exercice de leur mandat, une véritable protection fonctionnelle, la fin du conflit d'intérêts public-public qui les oblige à se déporter sans cesse, au point que la moindre réunion de conseil municipal devient une gymnastique mathématique. Ils souhaitent aussi renouveler les listes, en y intégrant des étudiants, par exemple, ce qui suppose de faciliter leur accès au statut d'élu.

Nous attendons tous ce texte. Je le défendrai à l'Assemblée nationale au nom du Gouvernement, et serai très heureux de revenir le défendre au Sénat en septembre. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Anne-Sophie Patru applaudit également.)

Mme Marie-Jeanne Bellamy.  - Il y a vraiment urgence, les élus attendent. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Iran (II)

Mme Olivia Richard .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Depuis 1 145 jours, Cécile Kohler et Jacques Paris sont retenus en otage par le régime iranien - sans jugement, sans contact régulier avec leurs familles ou avec le poste diplomatique, dans des conditions de détention contraires au droit international.

Les tirs visant la prison d'Evin augmentent notre inquiétude. Malgré les demandes de notre diplomatie, qu'Ayda Hadizadeh et moi-même avons relayées auprès de l'ambassadeur d'Iran à Paris, nous n'avons aucun contact avec les otages depuis les frappes israéliennes.

Le fragile cessez-le-feu annoncé par le président Trump balaie les espoirs des opposants au régime des mollahs, qui pourraient faire l'objet d'une chasse aux sorcières.

Notre ambassade est restée ouverte, nos agents sont en poste. Je veux dire notre soutien à notre chargé d'affaires, Rémy Bouallègue, et à son équipe. Je salue leur action pour accompagner nos ressortissants. Pierre Cochard, nommé ambassadeur, prendra bientôt son poste.

Nous savons l'engagement de la diplomatie française et les efforts de notre ministre des affaires étrangères pour favoriser une désescalade. La France a joué un rôle facilitateur dans la négociation du cessez-le-feu : nous restons une voix utile.

Ma question n'est pas simple : quelle est aujourd'hui la position de la France face au régime iranien ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Thomas Dossus et Mme Mathilde Ollivier applaudissent également.)

M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l'Europe .  - Sur ce sujet si grave, la position de la France a toujours été claire et constante. (M. Roger Karoutchi ironise.) Le régime iranien ne peut pas, ne doit pas se doter de l'arme nucléaire. L'AIEA a révélé que l'Iran violait le traité de non-prolifération. L'Iran développe des missiles balistiques qui pourraient frapper Israël, dont il dit vouloir la destruction, mais aussi l'Europe. L'Iran soutient le terrorisme - le Hamas, le Hezbollah, les Houthis. Missiles et drones iraniens sont utilisés quotidiennement par la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine. L'Iran retient Cécile Kohler et Jacques Paris, de façon indigne et inacceptable, depuis trois ans.

La France s'attache à protéger nos ressortissants - merci d'avoir salué la mobilisation du personnel diplomatique. Le centre de crise fonctionne jour et nuit. Plus de mille ressortissants français ont été rapatriés d'Israël grâce aux A400M ; nous continuons à nous mobiliser.

La France appelle partout à la diplomatie, au respect du droit international et au multilatéralisme. Il n'y a pas de solution durable au problème nucléaire iranien par la voie militaire. En témoigne le JCPoA (Joint Comprehensive Plan of Action) conclu en 2015. Alors que le fragile cessez-le-feu commence à prendre effet, nous appelons toutes les parties à se remettre autour de la table. (Murmures peu convaincus sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - On abandonne les Iraniens !

Modélisations budgétaires et évolution de la Corse

M. Jean-Jacques Panunzi .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'engagement en faveur de la dévolution d'un pouvoir législatif à la Collectivité de Corse devrait se traduire par le dépôt d'un projet de loi constitutionnel, puis d'une loi organique qui détaillera les compétences transférées.

Comme l'indique la déclaration de février 2024, une majorité d'élus de la Collectivité souhaite que celle-ci dispose de l'ensemble des compétences non régaliennes : fiscalité, santé, formation, éducation.

Depuis le début du processus de Beauvau, nous demandons à connaître les grandes masses budgétaires : combien la Corse génère de recettes fiscales, combien elle reçoit de la solidarité nationale.

Nous avons besoin de données sur la situation budgétaire et économique. Le récent rapport de la chambre régionale des comptes, qui révèle une situation très dégradée, va dans le sens des données rapportées dans la mission sénatoriale sur l'avenir statutaire de la Corse.

Le Gouvernement doit éclairer la représentation nationale, sans quoi elle ne pourra délibérer en conscience sur l'autonomie de la Corse. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - La Corse mérite une attention toute particulière. Elle fait face à d'importants défis, en termes d'aménagement, de pouvoir d'achat, d'accompagnement des jeunes actifs, de foncier, de logement, de continuité territoriale.

Je réunirai prochainement un comité de suivi technique interministériel pour garantir le meilleur soutien de l'État.

L'État accompagne la Corse dans son développement avec le plan de transformation et d'investissement doté de 500 millions d'euros, qui succède à un autre plan d'investissement exceptionnel. Cet effort a un effet multiplicateur et consolide le potentiel de croissance de l'île.

Le processus institutionnel qui devrait conduire à l'autonomie est-il de nature à modifier cette dynamique au bénéfice de l'économie corse ? Difficile de répondre. Un inventaire comptable est-il pertinent ? Faut-il comptabiliser les politiques sectorielles nationales ? Interroger les caisses de retraite ? C'est un travail complexe. Il me semble toutefois que la Corse est bénéficiaire nette ; j'espère très prochainement vous le prouver par des chiffres. (M. François Patriat applaudit.)

M. Bruno Sido.  - Pas d'autonomie...

M. Jean-Jacques Panunzi.  - Gérald Darmanin, qui a piloté le processus de Beauvau, déclarait en février 2023 : « Ceux qui la réclament auront l'autonomie pour leur territoire, mais ils l'obtiendront avec les recettes et les richesses produites localement, pas avec des subventions. » Vouloir apporter une réponse institutionnelle à un problème économique et social est une grosse erreur. Vous rencontrerez les mêmes problèmes qu'en Nouvelle-Calédonie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Financement des associations

Mme Marie-Arlette Carlotti .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Marc Laménie applaudit également.) Je veux vous parler de 3 millions de salariés, de 20 millions de bénévoles, de ces femmes et hommes qui font vivre le tissu associatif, qui s'effondre. Un tiers des associations n'ont que trois mois de trésorerie, 32 % envisagent de réduire leurs effectifs, 62 % n'ont pas les moyens d'assurer leurs missions sociales. Pourtant, les associations emploient 11 % des salariés et contribuent à 3 % du PIB.

Le désengagement de l'État se cumule avec celui des collectivités territoriales. Le Secours catholique perd 40 % de ses ressources dans le Val-de-Marne ; le Secours populaire 70 %. Pour l'Association des paralysés de France, c'est moins 37 millions d'euros. De nombreux centres du Planning familial sont menacés de fermeture. Vous mettez fin à l'éducation populaire.

Vous acceptez que ceux qui aident nos concitoyens les plus vulnérables soient abandonnés. Que comptez-vous faire pour arrêter l'hémorragie et sauver notre tissu associatif ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du GEST ; M. Christian Bilhac applaudit également.)

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative .  - Nos associations sont essentielles à la solidarité et à la cohésion sociale.

Mme Laurence Rossignol.  - Prouvez-le !

M. Rachid Temal.  - C'est comme pour le sport !

Mme Marie Barsacq, ministre.  - Leur situation financière est fragile, d'autant que celle des collectivités territoriales l'est aussi.

M. Jean-François Husson.  - La faute à qui ?

Mme Marie Barsacq, ministre.  - Je suis mobilisée pour préserver des moyens. Sur plusieurs sujets importants, les crédits ont été stabilisés entre 2024 et 2025. Je pense au fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) et à l'éducation populaire, avec notamment les colonies apprenantes. Nous avons aussi maintenu les conventions de financement pluriannuelles pour donner de la visibilité aux plus grandes associations.

La diminution du nombre de services civiques a été un choix difficile, mais j'ai eu une attention particulière pour les associations, puisque 75 % de l'effort est porté par les acteurs publics.

Le Guid'Asso se déploie, pour atteindre un Guid'Asso par EPCI en 2027.

Je suis déjà mobilisée sur le budget 2026. J'y travaille avec Amélie de Montchalin et j'ai déjà rencontré plusieurs acteurs du mouvement associatif. C'est un enjeu crucial pour notre pays.

Mme Marie-Arlette Carlotti.  - Les crédits votés sont gelés. (M. Jean-François Husson le confirme.) Les associations s'épuisent, le tissu associatif s'effiloche, les dirigeants d'associations sont noyés dans la paperasse. Vous organisez un véritable démantèlement ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Crise du logement et DPE

Mme Laurence Muller-Bronn .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Vous connaissez le diagnostic de performance énergétique, le fameux DPE dont tout le monde parle. Et pourquoi ? Parce que c'est l'un des facteurs de la crise du logement ! En 2022, il est devenu obligatoire et opposable, sans étude d'impact. Pourtant, ses conséquences sont graves.

Sur le marché de la location, il n'y a plus rien à louer dans les grandes villes. À la vente, les transactions sont bloquées, car le coût des travaux augmente le prix des biens. Les résultats ne sont pas fiables, car les fraudes sont nombreuses. Les recettes des communes, des départements et de l'État sont en baisse. Nous sommes tous perdants !

Avez-vous des solutions ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation .  - (Marques d'amusement à droite, l'orateur peinant à entamer son propos) Ne vous en faites pas, c'est l'embrayage, ça va venir ! (Sourires)

En matière de production de logements, la situation est très difficile - nul ne peut le nier.

La ministre du logement a signé une feuille de route avec l'ensemble des bailleurs sociaux, appuyée sur la baisse de la réduction de loyer de solidarité (RLS) et sur celle du taux du livret A, afin de produire plus de 110 000 logements sociaux.

Il faut aussi relancer la production de logements locatifs privés de qualité, grâce notamment à l'exonération temporaire de droits de succession en cas de donation pour l'achat d'un logement neuf.

Nous soutenons aussi l'accession à la propriété, grâce à l'extension du PTZ à tout le territoire : au 1er avril, plus de 10 000 prêts avaient déjà été souscrits.

À la fin du mois d'avril, les permis de construire sont en hausse de 11 % par rapport aux trois mois précédents.

Nous devons adapter le calendrier de la décence énergétique, pour continuer à rénover les logements tout en permettant leur location : c'est l'objet de la proposition de loi de Mme Gacquerre. Il nous faut trouver un consensus rapide sur le sujet. Nous y sommes prêts.

Enfin, pour les plus fragiles, le plan Logement d'abord permettra d'offrir un logement décent à plus de 80 000 personnes.

Mme Laurence Muller-Bronn.  - Un embrayage, ça se change... (Sourires)

Les Français sont en colère, car le DPE les empêche de se loger.

J'ai des témoignages d'entreprises qui ne réussissent pas à recruter, car leurs salariés ne trouvent pas de logement. Du côté des banques, on refuse le crédit si le DPE est mauvais. Résultat : on appauvrit la classe moyenne et on pénalise les plus modestes. Le bâti ancien ne trouve plus preneur.

Pourtant, les Français sont volontaires pour rénover : le succès de MaPrimeRénov' en témoigne.

Vous avez une solution à portée de main : supprimer le DPE obligatoire et opposable, pour revenir à un DPE informatif et incitatif. Sinon, les algorithmes nous mèneront au chaos, les propriétaires seront prisonniers de leur bien et les locataires à la rue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Chasse au gibier d'eau

M. Pierre Cuypers .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) C'est avec incompréhension que les chasseurs de gibier d'eau ont appris l'inscription, sans concertation, à l'ordre du jour du prochain Conseil national de la chasse et de la faune sauvage d'une limitation des prélèvements de certaines espèces comme le fuligule milouin, le canard pilet, le canard siffleur, le canard souchet ou la sarcelle d'hiver. (On apprécie sur plusieurs travées.) Sans parler de la caille des blés et de la grive.

Pourtant, le 22 mai dernier, vous répondiez à Fabien Genet que les bilans de comptage étaient encourageants et que certaines espèces étaient en progression. Pourquoi avoir changé de position ? Êtes-vous prête à retirer ces mesures de l'ordre du jour de la réunion de demain ? Les chasseurs craignent de ne pouvoir poursuivre leur activité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Jean Rochette applaudit également.)

M. Pierre Jean Rochette.  - Excellent !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche .  - Depuis mon arrivée au ministère, je n'ai pas ménagé mes efforts pour nos chasseurs. (M. Laurent Burgoa ironise.) J'ai ainsi défendu la chasse à la palombe, car l'espèce est abondante, la technique sélective, et elle fait partie de notre culture.

Notre seule boussole est l'état de conservation des espèces. Nous nous appuyons sur l'expertise française et européenne. Les scientifiques mandatés par l'Union européenne ont relevé le déclin de neuf espèces de gibier d'eau. Les recommandations de la Commission européenne sont connues depuis 2024 : moratoire ou diminution des prélèvements de 50 %. J'ai eu confirmation ce matin que ces demandes s'appliquent dès 2025. Ce n'est pas une lubie de la France, c'est un processus.

Notre ligne est simple : réduire les prélèvements sur les espèces en déclin ; les augmenter là où elles progressent ; réserver les moratoires aux espèces les plus menacées.

Nous avons donc soumis à la discussion plusieurs projets d'arrêtés et j'ai échangé avec Willy Schraen pour trouver ensemble une solution.

J'ai une obligation de résultat et non de moyens. Si d'autres propositions permettent d'atteindre l'objectif, ma porte est ouverte. Mais les faits sont têtus : nous avons besoin d'arrêtés qui tiennent la route.

M. Pierre Cuypers.  - Les chasseurs aussi sont têtus. Ne sous-estimez pas la colère des chasseurs de gibier d'eau, qui ne comprennent pas votre revirement ni votre précipitation. Retirez ce projet de texte et refusez toute surtransposition ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC ; M. Pierre Jean Rochette applaudit également.)

La séance est suspendue à 16 h 20.

Présidence de M. Didier Mandelli, vice-président

La séance reprend à 16 h 30.