SENAT

LOI ORGANIQUE N° 2009-969 DU 3 AOÛT 2009 RELATIVE À L'ÉVOLUTION INSTITUTIONNELLE DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE ET À LA DÉPARTEMENTALISATION DE MAYOTTE

Ce texte de 63 articles comporte des dispositions déterminantes pour l'avenir des deux collectivités visées. Comme l'a souligné le rapporteur pour la commission des lois du Sénat, M. Christian Cointat (Français établis hors de France, UMP), dans les deux cas, il s'agit, pour le Parlement et pour la République, d'assurer le respect des engagements de l'État.

- Vis-à-vis de la Nouvelle-Calédonie, régie par le titre XIII de la Constitution, il poursuit l'application de l'Accord de Nouméa du 5 mai 1998 et de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, en organisant de nouveaux transferts de compétences de l'État dont le principe a été approuvé lors de la VII e réunion en décembre 2008, à Matignon, du Comité des signataires de l'Accord de Nouméa.

- Pour Mayotte , il inscrit dans la loi le changement de statut en faveur duquel les électeurs de la collectivité se sont prononcés lors de la consultation du 29 mars 2009. En effet, Mayotte est, aux termes de la loi organique du 25 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, qui a actualisé le statut défini par la loi du 11 juillet 2001, une collectivité d'outre-mer, régie par l'article 74 de la Constitution et dénommée «collectivité départementale de Mayotte». Cette départementalisation parachève le rapprochement avec le droit commun dans lequel Mayotte s'était engagée au fil de ses statuts successifs depuis 1958.

La loi comprend ainsi trois titres distincts : le premier titre traite des compétences respectives de l'État, de la Nouvelle-Calédonie et des provinces (répartition des compétences, modalités de transfert des compétences et le haut-commissaire de la République), le deuxième concerne la modernisation du statut de la Nouvelle-Calédonie et le dernier est consacré à Mayotte.

TITRE I ER - COMPÉTENCES RESPECTIVES DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE, DES PROVINCES ET DE L'ÉTAT

Chapitre premier : répartition des compétences

S'agissant de la répartition des compétences, les principales modifications sont apportées par les articles suivants :

L'article premier a trait à l'organisation des transferts de compétences de l'État à la Nouvelle-Calédonie. Il modifie l'article 21 de la loi organique du 19 mars 1999 qui définit les compétences de l'État en Nouvelle-Calédonie, en distinguant :

- les matières dans lesquelles l'État est compétent ;

- les matières dans lesquelles l'État est compétent, sous réserve des dispositions permettant à la Nouvelle-Calédonie de s'associer à l'exercice de ces compétences (relations intérieures) ;

- les compétences que l'État exerce jusqu'à leur transfert à la Nouvelle-Calédonie, dans les conditions prévues à la loi organique.

La loi organique actualise la définition de ces compétences  notamment sur les points suivants :

- la référence à l'ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense, pour l'attribution à l'État de la compétence en matière de défense, est supprimée, car elle est apparue inutile (la défense est une compétence régalienne de l'État),

- la référence aux marchés publics et délégations de service public est remplacée par celle sur les contrats publics de l'État et de ses établissements publics, ce qui permet d'englober les partenariats public-privé,

- le recensement de la population est explicitement cité comme une compétence de l'État, de même que la police et la sécurité de la circulation aérienne extérieure.

Le Sénat a complété ces dispositions en précisant que l'État est également compétent en matière de :

- lutte contre la circulation illicite et le blanchiment des capitaux et de lutte contre le financement du terrorisme ;

- police et sécurité de la circulation maritime s'effectuant entre tous points de la Nouvelle-Calédonie, et sauvegarde de la vie en mer dans les eaux territoriales.

L'article 2 est relatif aux compétences de la Nouvelle-Calédonie relevant de l'article 22 de la loi organique susmentionnée. Il prévoit :

- d'étendre la compétence de la Nouvelle-Calédonie à la réglementation des appareils à pression, cette modification faisant suite à un avis du Conseil d'État ;

- d'élargir la compétence de la Nouvelle-Calédonie à tout type de contrat public (et non aux seuls marchés et délégations de service public), en dehors de ceux conclus par l'État et d'inclure parmi les compétences de la Nouvelle-Calédonie la détermination des normes de construction ce qui permettra d'éviter les écarts de normes d'une province à l'autre. A l'initiative de M. Simon Loueckhote (Nouvelle-Calédonie, UMP), la compétence a aussi été étendue en matière de réglementation de la distribution d'énergie électrique.

L'article 3 dispose que les compétences attribuées à l'État par les dispositions du III de l'article 21 sont transférées à la Nouvelle-Calédonie au cours de la période correspondant aux mandats du Congrès commençant en 2004 et 2009. Les compétences transférées et l'échéancier des transferts font l'objet d'une loi du pays adoptée à la majorité des trois cinquièmes des membres du Congrès. Il prévoit également que l'État apporte à la Nouvelle-Calédonie un concours technique et une aide à la formation pour l'exercice des compétences transférées en application de l'alinéa précédent.

L'article 4 crée un Conseil consultatif de la recherche placé auprès du Congrès de Nouvelle-Calédonie (une délibération du congrès fixe les conditions d'organisation et de fonctionnement de ce conseil, dont le haut-commissaire est membre et dans lequel le gouvernement et les provinces sont représentés) et comporte plusieurs dispositions concernant l'enseignement, telles que :

- la consultation de la Nouvelle-Calédonie sur les programmes de l'enseignement du second degré ainsi que sur la création ou la suppression en Nouvelle-Calédonie de filières de formation de l'enseignement secondaire ;

- l'association du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à l'élaboration des contrats d'établissement entre l'État et les établissements universitaires intervenant en Nouvelle-Calédonie ;

- le Conseil consultatif de la recherche est consulté sur les projets de contrat entre l'État et les organismes de recherche établis en Nouvelle-Calédonie. Il peut conclure des conventions d'objectifs et d'orientation avec ces établissements ou organismes.

L'article 5 délègue aux provinces la compétence en matière de placement des demandeurs d'emploi. En effet, chacune des trois provinces de Nouvelle-Calédonie a créé une agence pour l'emploi, alors qu'un avis du Conseil d'État et un avis du tribunal de Nouméa ont reconnu la compétence de la Nouvelle-Calédonie dans ce domaine. Ces deux juridictions, saisies par le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, ont estimé qu'en application du 2° de l'article 22 de la loi organique du 19 mars 1999, confiant à la Nouvelle-Calédonie la compétence en matière de droit du travail, la Nouvelle-Calédonie est compétente pour fixer les règles générales d'organisation du placement et les règles relatives à la définition de la qualité de demandeur d'emploi. Le tribunal administratif a, par ailleurs, considéré qu' « en l'absence de texte le prévoyant expressément, il ne saurait y avoir de délégation de pouvoir ».

L'article inscrit donc dans la loi organique la possibilité, pour le congrès, de déléguer cette compétence, afin qu'elle soit exercée au plus près de la réalité des bassins d'emploi. A l'initiative de M. Simon Loueckhote, l'article donne aussi la possibilité aux provinces, avec l'accord du congrès, d'exercer par délégation des compétences en matière de transport maritime

L'article 6 prévoit la participation financière de la Nouvelle-Calédonie et des provinces à l'établissement public d'incendie et de secours. L'État y participe également jusqu'en 2014 sous forme de subventions d'investissement. Les conditions d'organisation et de fonctionnement de l'établissement prévoient une représentation de ces collectivités en rapport avec leur participation.

Chapitre II : Modalités de transfert des compétences

L'article 7 modifie les règles de calcul de la compensation financière des transferts de compétences, régie par l'article 55 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie :

- Les ressources attribuées au titre de cette compensation sont équivalentes aux dépenses consacrées, à la date du transfert, par l'État, à l'exercice des compétences transférées, diminuées des augmentations de ressources entraînées par les transferts : le droit à compensation des charges d'investissement transférées par la loi organique est égal à la moyenne des dépenses actualisées, hors taxe et fonds de concours, constatées sur une période de dix ans précédant le transfert de compétences ; le droit à compensation des charges de fonctionnement transférées par la présente loi organique est égal à la moyenne des dépenses actualisées constatées sur une période de trois ans précédant le transfert de compétences. Ces droits à compensation évoluent chaque année comme la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle de l'indice des prix à la consommation (hors tabac) de l'année de versement et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours, sous réserve que celui-ci soit positif.

- Le transfert des personnels ouvre droit à une compensation spécifique. Les fractions d'emploi ne pouvant donner lieu à transfert après détermination d'un nombre entier d'emplois à temps plein susceptibles d'être transférés donnent également lieu à compensation financière.

- Le principe est rappelé que toute charge nouvelle incombant à la Nouvelle-Calédonie du fait de la modification par l'État des règles relatives à l'exercice des compétences transférées est compensée.

L'article 8 détaille les règles de compensation des charges d'investissement liées au transfert des compétences en matière d'enseignement en prévoyant que :

- la période de référence pour le calcul de la moyenne des dépenses actualisées déterminant le droit à compensation des charges d'investissement est comprise entre 1998 et 2007. Cette période correspond à celle demandée par le Congrès et sa cristallisation vise principalement à éviter que le montant de la compensation soit réduit si l'État engageait dans les années à venir une baisse de ses dépenses d'investissement ;

- au-delà, l'État devra assurer jusqu'à leur terme le financement des opérations de réalisation des lycées qu'il a engagées avant que le transfert ne soit effectif. Cette disposition consacre un engagement de l'État validé lors de la réunion du Comité des signataires de l'Accord de Nouméa le 8 décembre 2008 ;

- enfin, le président du gouvernement transmettra jusqu'au transfert prévu à l'article 4 au haut-commissaire le programme prévisionnel d'investissement relatif aux lycées arrêté par le congrès et sur le fondement de ce programme, et le haut-commissaire arrêtera la liste des établissements pour lesquels l'État s'engage à mettre à la disposition de la Nouvelle-Calédonie les postes nécessaires.

L'article 9 complète les dispositions de mise à disposition de services auprès de la Nouvelle-Calédonie, afin d'assurer la continuité de l'exercice des compétences transférées :

- avant même que les conventions relatives à la mise en oeuvre des transferts soient signées, le président du gouvernement ou le président de l'assemblée de province pourra donner des instructions aux chefs des services de l'État en charge des compétences transférées. Les exécutifs de la Nouvelle-Calédonie ou des provinces pourront donc exercer leur autorité sur ces services dès la date de transfert de compétence ;

- afin de surmonter la règle selon laquelle ne sont transférés que les services exclusivement chargés d'une compétence transférée, l'État et la Nouvelle-Calédonie pourront organiser la mise à disposition à la Nouvelle-Calédonie des services ou parties de services de l'État chargés des compétences, telles que la police et la sécurité de la circulation aérienne intérieure, ou de la circulation maritime dans les eaux territoriales.

L'article 10 fixe le cadre des services mixtes et de la délégation par l'État de l'exercice de certaines compétences à la Nouvelle-Calédonie. L'État et la Nouvelle-Calédonie peuvent décider d'exercer leurs compétences respectives au sein d'un même service et les modalités de mise en oeuvre de cette décision font alors l'objet d'une convention passée entre le haut-commissaire et le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

Par ailleurs, pour faciliter l'exercice par la Nouvelle-Calédonie de la compétence en matière de police et de sécurité de la circulation aérienne intérieure, l'État peut lui déléguer l'exercice de la compétence qu'il détient en vertu du 14° du I de l'article 21. Les modalités de mise en oeuvre de cette délégation sont fixées par une convention, passée entre le haut-commissaire et le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, qui précise notamment l'étendue, les limites de la délégation consentie et les modalités de contrôle de l'État.

L'article 11 prévoit que le Gouvernement devrait présenter à la Commission consultative d'évaluation des charges un bilan sur l'évolution entre 2007 et 2009 des emplois de l'État visés par le transfert des compétences, notamment en matière de police ou de sécurité de la circulation aérienne intérieure et de la circulation maritime dans les eaux territoriales, d'enseignement du second degré public et privé, de santé scolaire, d'enseignement primaire privé, de droit civil, de règles concernant l'état civil, de droit commercial et de sécurité civile.

L'article 12 organise le transfert des personnels de l'enseignement. Le nombre d'élèves concernés par le futur transfert de compétences dans le domaine de l'enseignement étant élevé, cet article prévoit donc des modalités particulières pour qu'un nombre important d'agents de l'État enseignant actuellement en Nouvelle-Calédonie puisse y demeurer, permettant de maintenir pour tous dans cette collectivité territoriale des prestations éducatives de qualité. Il insère au sein du statut de la Nouvelle-Calédonie deux dispositions qui précisent les conditions statutaires d'emploi des personnels de l'État affectés aux établissements d'enseignement primaire et secondaire, après que cette compétence ait été transférée à la collectivité.

L'article 13 vise le programme prévisionnel d'investissement relatif aux collèges arrêté par chaque assemblée de province afin qu'il soit transmis non seulement au représentant de l'État, comme c'est actuellement le cas, mais aussi au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, ce qui est effectivement plus logique. Dans un second temps, une fois que la mise à disposition globale des personnels de l'enseignement auprès de la Nouvelle-Calédonie aura pris fin, le programme prévisionnel ne sera plus transmis qu'à l'exécutif néo-calédonien.

L'article 14 , issu d'un amendement de M Simon Loueckhote, permet à l'État et à la Nouvelle-Calédonie de conclure, après le transfert des compétences des conventions visant à définir leurs attributions respectives avec un double objet :

- préciser le périmètre des compétences transférées, puisque certains des domaines visés, comme le droit civil, peuvent comporter des éléments relevant de la compétence régalienne de l'État. Ce serait le cas pour ce qui concerne les matières se rattachant à la nationalité et aux libertés publiques (mariage, filiation) ;

- préciser les attributions que l'État doit conserver, par cohérence, après le transfert. Tel serait le cas par exemple en matière d'enseignement, puisque l'État devrait conserver sa compétence en matière de définition des programmes, étant donné qu'il assurera la collation et la délivrance des diplômes.

Chapitre III : Haut-commissaire de la République et action de l'État

Le haut-commissaire de la République et l'action de l'État font l'objet de trois articles qui précisent que :

- à compter du transfert de la compétence en matière de sécurité civile, le haut-commissaire peut prendre, dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités de la Nouvelle-Calédonie, toutes mesures nécessaires visant à assurer la sécurité civile. Ce pouvoir ne peut être exercé par le haut-commissaire qu'après mise en demeure adressée aux autorités de la Nouvelle-Calédonie restée sans résultat ( article 15 ) ;

- à défaut de publication dans un délai de quinze jours des actes ressortissant à la compétence de la Nouvelle-Calédonie et des provinces, le haut-commissaire en assure sans délai la publication au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie ( article 16 ) ;

- une convention entre l'État et la Nouvelle-Calédonie fixe les modalités du concours des administrations centrales de l'État à la Nouvelle-Calédonie pour l'élaboration des règles dont elle a la charge à l'occasion des transferts de compétences prévus par la loi ( article 17).

TITRE II - MODERNISATION DU STATUT DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

Chapitre premier : Applicabilité des lois et règlements en Nouvelle-Calédonie

L'article 18 précise les conditions d'application des lois et règlements en Nouvelle-Calédonie.

En effet, si la Nouvelle-Calédonie, collectivité régie par le titre XIII de la Constitution, dispose de compétences normatives propres, les lois et règlements y sont applicables dans les domaines relevant de la compétence de l'État, sous réserve d'une mention expresse. Ce régime de spécialité législative est clarifié, sur le modèle du dispositif existant pour la Polynésie française.

Chapitre II : Consultation du Congrès de la Nouvelle-Calédonie

L'article 19 réécrit l'ensemble de l'article 90 du statut de la Nouvelle-Calédonie, afin de rénover les procédures par lesquelles son assemblée délibérante doit être consultée sur certains textes et décisions des pouvoirs publics intéressant la Nouvelle-Calédonie. Il rapproche ce régime de consultation de celui défini, de façon harmonisée, dans les statuts des COM fixés au cours des cinq dernières années.

Chapitre III : Conditions d'intervention de la Nouvelle-Calédonie et des provinces en matière économique

L'article 20 vise non seulement à autoriser les établissements publics de la Nouvelle-Calédonie et des provinces à participer au capital des sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général, mais également à l'nitiative de la commission des lois du Sénat a introduit une disposition supplémentaire visant à permettre aux provinces de créer des sociétés d'économie mixte (SEM) dans le but de mettre en oeuvre des opérations concourant au développement économique. Elle étend les possibilités de création à la mise en oeuvre d'opérations concourant au développement économique. Ceci permet de contourner le critère de carence de l'initiative privée qui doit être rempli pour que la création d'une SEM soit possible, en l'état actuel du droit. Afin d'encadrer cette dérogation, deux limites sont fixées : les compétences de la province et le principe de liberté du commerce et de l'industrie doivent être respectés. Cette nouvelle disposition donnera ainsi aux provinces davantage de possibilités juridiques afin de développer leur potentiel économique, actuellement fort inégal.

D'autres assouplissements sont introduits :

- L'article 21 encourage le développement de l'intercommunalité en Nouvelle-Calédonie en permettant aux établissements publics de coopération intercommunale de participer à des syndicats mixtes.

- L'article 22 insère dans le statut de la Nouvelle-Calédonie la notion de groupement d'intérêt public (GIP), en créant un article qui lui est consacré qui en décrit les membres ainsi que les objets possibles, ainsi que leurs conditions de création.

- L'article 23 étend les possibilités de délégation de services publics, « loi Sapin », à de nouvelles personnes publiques et exclut du champ d'application des règles de mise en concurrence les prestations in house .

- L'article 24 donne la possibilité pour les provinces d'accorder des subventions et des aides économiques à des entreprises sans l'intermédiation d'un établissement bancaire ou financier. Un état récapitulatif des aides financières accordées doit être désormais annexé au compte administratif.

Chapitre IV : Dispositions financières et comptables

Ce chapitre comporte 5 articles, qui règlent les dispositions financières et comptables applicables.

- Des dispositions nouvelles pour renforcer la transparence et l'efficacité de la procédure budgétaire ( article 25). Le Sénat a souhaité conforter le rôle de contrôle du Congrès. Elle a donc adopté un amendement du rapporteur prévoyant que le Congrès devra « [ définir], par une délibération distincte du vote du budget, les conditions et critères d'attribution des aides financières et d'octroi des garanties d'emprunt aux personnes morales. » Ce contrôle de l'assemblée délibérante sur l'intervention économique de la Nouvelle-Calédonie est la contrepartie des larges compétences de cette dernière en la matière.

- Sur les modalités de vote et d'approbation des comptes des provinces, l'article 26 indique que le haut commissaire n'est pas autorisé à établir, après avis de la chambre territoriale des comptes, le budget pour l'année en cours s'il n'a pas été voté par l'assemblée de province avant le 31 mars, quand le défaut d'adoption résulte de l'absence de communication avant le 15 mars, à l'assemblée de province, d'informations indispensables à l'établissement de son budget.

- Les règles budgétaires et comptables pour l'adoption et l'exécution des budgets de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et de leurs établissements publics qui figurent actuellement dans le code des juridictions financières sont introduites dans la loi organique pour plus de sécurité juridique (article 27).

- Sont inscrites dans le statut de la Nouvelle-Calédonie des règles budgétaires et comptables qui figurent actuellement au titre II de la loi n° 90-1247 du 29 décembre 1990 portant suppression de la tutelle administrative et financière sur les communes de Nouvelle-Calédonie et dispositions diverses relatives à ce territoire (article 28).

- Les pouvoirs de la chambre territoriale des comptes sont accrus ( article 29) notamment pour pouvoir se voir communiquer des documents.

- L'article 30 transfère dans la loi organique, par souci de clarté du droit, les dispositions relatives au fonds intercommunal de péréquation des communes qui figuraient auparavant dans la loi n° 69-5 du 3 janvier 1969 relative à la création et à l'organisation des communes dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendance .

- La création d'une fiscalité intercommunale en Nouvelle-Calédonie est rendue possible ( article 31 ) ; cet article introduit donc les EPCI dans la liste des organismes habilités à bénéficier d'« impôts, taxes et centimes additionnels ». A l'image de ceux que perçoivent les provinces et les communes, leur taux sera fixé par l'organe délibérant de l'EPCI, dans les limites fixées par le Congrès, ce qui ne remet donc pas en cause l'équilibre financier entre la Nouvelle-Calédonie et ses subdivisions territoriales.

- Enfin, l'article 32 , fortement remanié par le Sénat, permet à la Nouvelle-Calédonie, à ses établissements publics, aux provinces et à leurs établissements publics de déroger à l'obligation de dépôt de leurs fonds auprès de l'État.

Chapitre VI : Organisation et fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie

Section 1 - Fonctionnement des institutions

Sont rappelés sous cette section les principes de ce fonctionnement : la subsidiarité, le droit de participation de la Nouvelle-Calédonie aux négociations avec l'Union européenne...

Sur le volet fonctionnement et compétences du Congrès, dont le contour a été considérablement enrichi, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois, M. Christian Cointat, un grand nombre d'articles du statut de la Nouvelle-Calédonie ont été modifiés pour améliorer les modalités d'information du Congrès et des citoyens, conforter sa gestion et ses pouvoirs de contrôle, ainsi que pour étendre le champ des lois du pays aux garanties accordées aux fonctionnaires de la Nouvelle-Calédonie et des communes, préciser les compétences de la commission permanente, créer un rapport sur la situation de la Nouvelle-Calédonie et des provinces en matière de développement durable, fixer les règles d'entrée en fonction des membres du gouvernement et élection du vice-président ou encore mieux assurer la continuité institutionnelle au sein du gouvernement et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie.

On notera que concernant le sénat coutumier, l' article 40, inséré par le Sénat à l'initiative de sa commission des lois, vise à préciser certaines modalités de fonctionnement du sénat coutumier et à valoriser ses avis auprès du Congrès de la Nouvelle-Calédonie.

En application de l'article 137 du statut de la Nouvelle-Calédonie, le sénat coutumier est composé de 16 membres désignés dans les aires coutumières, selon des usages résultant de la coutume ou de lois du pays.

L'article 142 du statut lui confie, à l'égard du Congrès, les attributions habituelles d'une seconde chambre (qui ne dispose pas du dernier mot au terme des navettes) pour les lois du pays relatives à sa propre composition et à celle des conseils coutumiers, aux « signes identitaires », au statut civil coutumier, au régime des terres coutumières ou encore aux limites des aires coutumières. Enfin, en vertu de l'article 143 du statut, la consultation du sénat coutumier est obligatoire pour les textes « intéressant l'identité kanak », et facultative dans les autres matières.

A l'initiative de sa commission des lois, le Sénat a décidé que :

- le sénat coutumier devait pouvoir charger l'un de ses membres de présenter son avis devant le Congrès de la Nouvelle-Calédonie ou l'assemblée de province dont émane le projet de délibération.

- Le Sénat a complété l'article 145 du statut de la Nouvelle-Calédonie pour contraindre le gouvernement, le Congrès ou l'assemblée de province saisie d'une proposition du sénat coutumier relative à l'identité kanak d'y répondre dans les trois mois.

- Le Sénat a précisé les pouvoirs dont dispose le président du sénat coutumier à l'égard des services de cette assemblée, ainsi qu'en cas de litige auquel elle prendrait part, ce qui permettrait de renforcer les fondements légaux des pratiques déjà en vigueur et ainsi, de prévenir les contentieux dans ce domaine.

Section 2 - Statut des élus

Six articles détaillent et renforcent le statut des élus :

- L'article 41 insère au sein du statut de la Nouvelle-Calédonie un nouvel article 193-1, précisant les conditions de remplacement du membre du Congrès ou d'une assemblée de province présumé absent. Il s'agit ainsi d'éviter que la disparition d'un élu, comme cela a pu survenir au début de cette décennie en Polynésie française, ne perturbe le fonctionnement normal de ces assemblées en y modifiant, le cas échéant, les équilibres politiques.

- L'article 42 relatif au régime indemnitaire des collaborateurs du Congrès et certains élus porte le plafond des indemnités susceptibles d'être versées aux collaborateurs du congrès à un tiers de celui des indemnités susceptibles d'être versées aux élus et met en place des indemnités forfaitaires de représentation pour les présidents du sénat coutumier, du conseil coutumier et du conseil économique et social.

- L'article 43 prévoit que l'assemblée de province détermine, dans les limites fixées par le code général des collectivités territoriales, les garanties accordées à ses membres en ce qui concerne les autorisations d'absence ou le crédit d'heures, les garanties accordées dans l'exercice d'une activité professionnelle, les garanties accordées à l'issue du mandat et le droit à la formation, les indemnités de déplacement et frais de séjour engagés pour prendre part aux réunions de l'assemblée et les dépenses résultant de l'exercice d'un mandat spécial, ainsi que le régime de sécurité sociale et de retraite. Elle fixe aussi le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de représentation éventuellement allouée à son président.

Par ailleurs, le Congrès détermine, dans les limites fixées par le code général des collectivités territoriales pour les membres des assemblées délibérantes des départements et des régions, les garanties accordées aux membres du Congrès en ce qui concerne les autorisations d'absence ou le crédit d'heures, les garanties accordées dans l'exercice d'une activité professionnelle, les garanties accordées à l'issue du mandat et le droit à la formation, les indemnités de déplacement et frais de séjour engagés pour prendre part aux réunions du Congrès et les dépenses résultant de l'exercice d'un mandat spécial, ainsi que le régime de sécurité sociale et de retraite.

- L'article 44 actualise le niveau de rémunération des membres du gouvernement et des assemblées de province.

- L'article 45 instaure un véritable régime de protection des élus. Celui-ci prévoit que les membres du gouvernement, le président du gouvernement, le président du Congrès, le président de l'assemblée de province ou un élu suppléant l'un d'entre eux ou ayant reçu une délégation bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la Nouvelle-Calédonie ou les provinces conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales.

La Nouvelle-Calédonie ou les provinces sont tenues de protéger les membres du gouvernement, le président du gouvernement, le président du Congrès, le président de l'assemblée de province ou un élu suppléant l'un d'entre eux ou ayant reçu une délégation contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté.

- Enfin, l'article 46 étend et actualise les dispositions relatives aux inéligibilités et aux incompatibilités. Ainsi, il met en place un régime d'inéligibilité et d'incompatibilité pour les sénateurs coutumiers, et un régime d'incompatibilité interdisant aux membres du gouvernement, du Congrès et des assemblées de province d'être titulaires, simultanément à leur mandat, de fonctions dirigeantes notamment dans les entreprises ayant des liens étroits avec les collectivités publiques de la Nouvelle-Calédonie.

Section 3 - Exercice des recours juridictionnels

Les procédures applicables sont désormais strictement encadrées.

L'article 47 complète la saisine du Conseil d'État par voie d'exception et devrait favoriser un meilleur respect de la hiérarchie des normes dans le cadre du statut de la Nouvelle-Calédonie. Il précise que le Conseil d'État peut également être saisi par le président du Congrès, par le président du gouvernement, par le président d'une assemblée de province ou par le haut-commissaire, aux fins de constater qu'une disposition d'une loi du pays est intervenue en dehors du domaine défini à l'article 99. L'autorité qui saisit le Conseil d'État en informe immédiatement les autres autorités mentionnées à l'alinéa précédent. Celles-ci peuvent présenter leurs observations dans un délai de quinze jours. Le Conseil d'État se prononce dans les trois mois de la saisine prévue aux deux alinéas précédents.

L'article 48 modernise certains aspects de la procédure de contrôle de légalité des actes des diverses institutions néo-calédoniennes (gouvernement et Congrès de la Nouvelle-Calédonie, assemblées de provinces et sénat coutumier) en tenant compte notamment des possibilités offertes par les technologies informatiques modernes. Il autorise, à l'instar des procédures de droit commun, une transmission de ces actes par voie électronique au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, celle-ci devant nécessairement intervenir, pour les décisions individuelles, dans les quinze jours de leur signature.

L'article 49 précise aussi qu'un membre du Congrès ne peut prendre part à l'adoption d'une loi du pays s'il est directement intéressé à l'affaire qui en fait l'objet soit en son nom personnel, soit comme mandataire.

L'article 50 étend aux actes des établissements publics et groupements d'intérêt public de la Nouvelle-Calédonie et des provinces les règles de publicité, de transmission et de contrôle de légalité qui ne sont actuellement applicables qu'aux actes directement pris par ces institutions.

L'article 51 étend les possibilités de saisine du Conseil d'État par le tribunal administratif en matière de répartition des compétences dans le cadre des recours en appréciation de légalité.

L'article 52 permet explicitement au représentant de l'État dans cette collectivité territoriale de saisir d'une demande d'avis le tribunal administratif. Ce dernier doit à son tour se tourner aussitôt vers le Conseil d'État si la demande concerne la répartition des compétences entre les institutions néo-calédoniennes ou entre celles-ci et l'État, par analogie avec la procédure applicable en matière de recours pour excès de pouvoir.

L'article 53 a pour objet de permettre à un contribuable ou à un électeur d'exercer des actions en justice appartenant à la Nouvelle-Calédonie ou à la province dont il relève. Cette faculté est exercée par la personne à ses propres frais et risques, et sous réserve qu'elle réunisse les deux conditions suivantes :

- l'institution en remplacement de laquelle l'action en justice est menée, en demande ou en défense, doit d'abord avoir été sollicitée par le contribuable ou l'électeur et refusé ou négligé d'exercer elle-même l'action suggérée ;

- le tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie doit avoir donné son autorisation préalable à l'électeur ou au contribuable.

Enfin, le texte comporte une série de dispositions extrêmement diverses concernant :

- l'orthographe des noms par lesquels sont officiellement désignées les huit aires coutumières ;

- les modalités et conséquences du changement de statut civil pour une personne mineure ou majeure, notamment dans son acte de naissance ;

- la détermination du domaine de la Nouvelle-Calédonie en matière aquatique (ce domaine inclut aussi les eaux souterraines et de surface) ;

- l'applicabilité des nouvelles dispositions budgétaires et comptables est fixée à partir de l'exercice 2011.

Sur cette partie, on notera qu'a été déclarée non conforme à la Constitution l'extension des mesures de promotion de l'emploi aux conjoints, de leurs partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou de leurs concubins, ainsi que des personnes qui justifient d'une durée suffisante de résidence et de leurs conjoints, de leurs partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou de leurs concubins.

TITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES À MAYOTTE

Concernant Mayotte, un article unique fixe le cadre applicable à cette collectivité et les délais à respecter, prenant acte de cette étape historique pour le développement économique et social comme pour la modernisation du droit applicable à Mayotte, approuvée à plus de 95 % lors du référendum local du 29 mars dernier.

L'article 63 prévoit une véritable départementalisation du statut de cette collectivité territoriale. A compter de la première réunion suivant le renouvellement de son assemblée délibérante en 2011, la collectivité départementale de Mayotte est ainsi érigée en une collectivité régie par l'article 73 de la Constitution, qui prend le nom de « Département de Mayotte » et exerce les compétences dévolues aux départements d'outre-mer et aux régions d'outre-mer.

La collectivité départementale de Mayotte, qui avait un statut de collectivité d'outre-mer (COM) régie par l'article 74 de la Constitution, rejoint la catégorie des départements et régions d'outre-mer (DOM-ROM), régie par l'article 73 de la Constitution. Ce changement entraîne l'application dans cette île du principe dit d'assimilation législative, en vertu duquel les dispositions législatives et réglementaires sont localement applicables, à moins qu'elles n'en disposent autrement de manière expresse.

Dans les domaines pour lesquels les conditions ne sont pas encore réunies pour une application du droit commun à Mayotte, tels que le droit de la protection sociale ou celui des étrangers, le législateur devra prévoir le maintien de dispositions spécifiques, aussi longtemps que la situation économique et sociale et les problèmes migratoires l'exigeront.

Cette transformation statutaire devant prendre effet à compter du prochain renouvellement du conseil général de Mayotte, au mois de mars 2011, cet effort d'adaptation de la législation aux « caractéristiques et contraintes particulières » de Mayotte - conformément aux termes mêmes de l'article 73 de la Constitution - devra être engagé au cours des deux prochaines années.

*

Il s'agit donc d'un texte particulièrement dense et précis, et dont la portée a encore été complétée par le texte adopté conjointement, à savoir la loi n° 2009-970 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et portant ratification d'ordonnances (parue au JO n° 180 du 6 août 2009).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page