Rapport de groupe interparlementaire d'amitié n° 110 de Mme Claudine LEPAGE et M. Jean-Claude CARLE , - 24 septembre 2013


Groupes interparlementaires d'amitié

France-Canada (1 ( * )) et France-Québec (2 ( * ))

Canada :
opportunités d'un marché mature et dynamique

Actes du colloque Sénat - Ubifrance du 20 juin 2013

Sous le haut patronage de
M. Jean-Pierre BEL, Président du Sénat

Palais du Luxembourg
Salle Clemenceau

OUVERTURE

Message du Président du Sénat, M. Jean-Pierre BEL, lu par Mme Claudine LEPAGE, présidente du Groupe interparlementaire d'amitié France-Canada

Mme Claudine LEPAGE. - le Président du Sénat, M. Jean-Pierre BEL, m'a chargée de vous transmettre le message suivant :

« Le Sénat se félicite d'accueillir cette rencontre économique sur le Canada, qui s'inscrit dans le cadre du partenariat fructueux que nous poursuivons depuis une quinzaine d'années avec Ubifrance mais aussi, désormais, avec la nouvelle Banque publique d'investissement (BPI), qui a permis de regrouper les expertises d'Oseo, de CDC Entreprises et du Fonds Stratégique d'Investissement (FSI).

On peut s'interroger sur la nécessité d'un colloque sur le Canada aujourd'hui, les relations économiques et commerciales entre le Canada et la France étant déjà très développées :

- la France est le 8 ème partenaire commercial du Canada et le 3 ème pays exportateur européen ;

- elle est également un investisseur important au Canada puisqu'elle occupe la 7 ème place au niveau mondial et la 5 ème au niveau européen avec plus de 450 sociétés implantées.

Bien que mature, le marché canadien offre encore aujourd'hui de nouvelles opportunités :

- il y a bien sûr le grand projet du plan « Nord pour tous » au Québec, pour lequel nos grandes entreprises peuvent offrir leur savoir-faire dans de nombreux domaines (exploitation des ressources naturelles, couverture numérique, environnement, transports,...). À cet égard, le déplacement au Canada du Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, en mars dernier, constitue un signal fort de soutien pour nos entreprises ;

- autre levier de développement de nos échanges, le plan d'action conjoint Canada-France 2012-2013, qui vise à renforcer la coopération franco-canadienne dans de nouveaux domaines.

Le développement de nos relations économiques s'enracine en effet sur un terreau fertile d'amitié qui nous a permis de nouer des partenariats scientifiques et technologiques au service du progrès technique et de l'innovation dans de nombreux domaines tels que la santé, les énergies vertes, les nanotechnologies ou encore les matériaux avancés. En échangeant ainsi nos savoirs et nos expertises et en les associant, nous oeuvrons finalement ensemble pour le bien commun de nos deux peuples.

C'est dans cet état d'esprit que je vous propose d'aborder ce colloque en remerciant nos présidents de groupes d'amitié pour leur implication au service du développement des relations franco-canadiennes. En effet, le Sénat est très attentif à tout ce qui peut asseoir et renforcer la présence française dans le monde, sur le plan culturel bien sûr, mais aussi sur le plan économique. L'organisation de ce colloque s'inscrit dans le cadre de cette ambition, au service de laquelle le dynamisme de nos deux groupes d'amitié (France-Canada et France-Québec) contribue pour une large part.

Mes remerciements vont aussi à toutes celles et ceux qui ont contribué à l'organisation de ce colloque : nos chefs de missions économiques, les représentants de la BPI et d'Ubifrance, nos partenaires.

À tous, je souhaite de fructueux et bons travaux, en souhaitant qu'ils contribuent au développement de nos exportations et de notre présence au Canada, mais aussi à une coopération économique renforcée au service de l'innovation, de la croissance et de l'emploi dans nos deux pays. »

Mme Claudine LEPAGE, Présidente du groupe interparlementaire d'amitié France-Canada

Permettez-moi d'ajouter à cette introduction quelques mots en tant que Présidente du groupe d'amitié France-Canada.

Classé au quatrième rang par l'ONU pour sa qualité de vie, le Canada est la dixième puissance économique mondiale. Il bénéficie d'immenses ressources naturelles, d'une main d'oeuvre qualifiée, d'un niveau élevé de développement technologique et d'un environnement politico-économique stable, ce qui le rend très attractif sur le plan économique.

Francophone et francophile, le Canada est également très apprécié de nos compatriotes qui sont nombreux à s'y être installés, plus de 200 000 aujourd'hui. Ils disposent sur place de plusieurs consulats, d'écoles et de lycées français de très bonne qualité pour scolariser leurs enfants.

Déjà très dynamiques, les échanges commerciaux entre la France et le Canada atteignent plus de 8 milliards de dollars canadiens et ont vocation à se développer.

À cet égard, ce colloque a lieu à un moment décisif de nos relations économiques et commerciales avec le Canada :

- Avec la signature en mars dernier d'un nouvel accord de coopération douanière entre l'Union européenne et le Canada, visant à garantir la sûreté de nos chaînes d'approvisionnement et la gestion des risques. Cet accord devrait fournir aux douanes européennes et canadiennes les moyens d'améliorer les contrôles douaniers tout en allégeant les formalités administratives pour les opérateurs fiables sur les deux territoires ;

- l'accord sur la mobilité des jeunes et la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, signé en mars dernier, lors de la visite officielle du Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, au Canada, constitue également un réel progrès. L'accord simplifie les formalités administratives pour les jeunes âgés de 18 à 35 ans en formation ou en activité, notamment en facilitant le renouvellement des titres de séjour ainsi que l'accès à l'emploi, aux soins de santé et à la protection sociale, ce qui permettra le développement des échanges culturels et linguistiques et facilitera l'implantation de nos entreprises ;

- autre avancée obtenue lors du voyage du Premier ministre, la signature d'une entente de coopération en matière d'économie sociale et solidaire, entre la France et le Québec, visant à favoriser l'échange de connaissances, d'expériences et de bonnes pratiques et à renforcer les expertises, grâce à des rencontres annuelles, des forums de discussion thématiques et des échanges réguliers en matière de coopération décentralisée entre le Québec et la France ;

- le plan « Nord pour tous » au Québec représente également une belle opportunité à saisir pour nos entreprises. Mon collègue Jean-Claude Carle vous en dira certainement quelques mots ;

- enfin, la signature très attendue de l'Accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada devrait donner un formidable élan aux échanges franco-canadiens. Il devrait en résulter une augmentation de nos flux commerciaux estimée à plus de 20 %. Le Président de la République, M. François Hollande, et le Premier ministre M. Stephan Harper, qui se sont rencontrés à Paris en fin de semaine dernière, se sont entendus pour conclure les négociations au plus vite, « vraisemblablement dans les prochains mois », sans pour autant se donner de date butoir, juste le temps de résoudre les quelques points de divergence qui subsistent. Il faudra alors se saisir de cet accord comme levier pour les échanges entre nos deux pays.

De cette rencontre, découle également un programme de coopération renforcée qui permettra à la France et au Canada de travailler encore plus étroitement en se concentrant sur trois grandes priorités : la croissance et le développement ; la défense et la sécurité internationale ; la recherche et la culture.

C'est donc sous de bons auspices que s'ouvre ce colloque. Le terreau est favorable pour le développement de nos relations économiques avec le Canada et la volonté est là, des deux côtés de l'Atlantique ; je l'ai bien perçue lors des échanges que j'ai pu avoir avec mes homologues canadiens lors de nos séances de travail.

Dans toutes vos entreprises, vous pourrez compter sur mon soutien, en tant que sénatrice représentant les Français de l'étranger, mais aussi au travers des actions que peut mener notre groupe interparlementaire France-Canada.

À tous, je souhaite des échanges enrichissants et constructifs, en espérant que ce colloque vous permettra de mieux connaître le marché canadien et de trouver des points d'entrée pour le conquérir ou vous y installer. Je vous remercie de votre attention.

M. Jean-Claude CARLE, Président du groupe interparlementaire d'amitié France-Québec

En ma qualité de Président du groupe d'amitié France-Québec, je suis particulièrement heureux de vous accueillir au Sénat et d'ouvrir ce colloque consacré au Canada. Comme le soulignait à l'instant ma collègue, il a lieu à un moment clé, avec des perspectives positives pour nos chefs d'entreprises, venus nombreux ce matin.

Nos entreprises sont déjà très présentes au Québec et c'est une bonne chose. Car elles pourront mieux saisir les opportunités qui se présentent, en particulier celles qui résulteront du Plan Nord, projet ambitieux initié par l'ancien Premier ministre, M. Jean Charest, et visant à développer l'activité économique au nord du 49 ème parallèle et du Saint-Laurent.

Le territoire concerné représente 1,2 million de km 2 , soit deux fois la France, et 72 % de la surface du Québec ! Environ 120 000 habitants y vivent, dont 33 000 issus des communautés autochtones que les Québécois appellent les « Premières Nations ».

Il s'agit de mettre en valeur l'immense potentiel économique de ce territoire, richement doté de ressources minières et énergétiques, afin de faire du Québec la première région mondiale dans le domaine des énergies propres.

La nouvelle version du plan, rebaptisé « Nord pour tous », et présentée en mai dernier par la Première ministre, Mme Pauline Marois, a une connotation plus sociale et environnementale. Le projet représente 868 millions de dollars canadiens d'investissements sur cinq ans pour développer le réseau routier et les parcs nationaux, et pour construire des logements sociaux en faveur des communautés autochtones. La Première ministre a annoncé la mise en place d'un cadre de financement des infrastructures ainsi que la création d'un secrétariat pour le développement nordique.

Vous le savez, des jalons ont été posés à l'origine par le précédent Gouvernement avec l'établissement d'un partenariat franco-québécois spécialement dédié au plan « Nord pour tous ». Les secteurs concernés sont : les ressources minières, l'énergie et les énergies renouvelables, les transports, les télécommunications, la construction, le génie civil et les grands travaux, l'ingénierie et l'agro-alimentaire, le tourisme et la formation. Trois comités de travail avaient alors été mis en place dans le domaine des mines et métaux stratégiques, de l'aménagement numérique du territoire et des énergies renouvelables avec des chefs de file (Bureau de recherches géologiques et minières, Orange et EDF-énergies nouvelles).

Cependant, pour garantir le succès des entreprises françaises qui souhaitent s'impliquer dans ce projet, plusieurs obstacles relatifs aux formalités administratives, aux permis de travail et aux visas, doivent être levés.

L'accord signé en début d'année sur la mobilité des jeunes et la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles est un bon signal, mais des progrès sont encore attendus dans ce domaine. Ce sujet est au coeur de nos échanges avec nos homologues québécois. Et nous ne manquerons pas d'en reparler à l'occasion de leur visite en France, la semaine prochaine.

Il convient de poursuivre le processus de reconnaissance mutuelle des diplômes et des qualifications afin que davantage d'activités puissent être couvertes. Il s'agit également de raccourcir les délais de demande de visas et d'autorisation de travail.

Parallèlement, il est souhaitable de faciliter la mobilité des jeunes en insertion (demandeurs d'emploi, jeunes décrocheurs, élèves en échec scolaire sortis précocement du système scolaire,...), afin qu'au travers de stages et d'expériences en entreprise ou dans les associations au Québec, ils puissent retrouver facilement les chemins de la formation et de l'emploi. Les voyages forment la jeunesse, dit-on. Dans ce domaine, l'Office franco-québécois de la Jeunesse (OFQJ), qui réalise un travail formidable, a constaté que 80 % à 90 % des jeunes retrouvaient un emploi à leur retour.

Je tiens à saluer M. Frédéric Lefret, ancien secrétaire général de l'OFQJ, ici présent, qui s'est impliqué de façon exemplaire dans ses fonctions. Je souhaite le même succès à M. Pascal Bonnetain, qui lui a succédé. En France, près de 150 000 jeunes sortent chaque année de l'école sans diplôme ni qualification. Il faut les remotiver par une approche plus concrète des activités qui leur seront confiées au sein de l'entreprise. C'est un véritable enjeu pour notre société et je suis particulièrement attentif à ce sujet auquel j'ai consacré tout récemment un ouvrage.

Par ailleurs, il faudrait faciliter le détachement de salariés. Dans le cadre du plan « Nord pour tous », les entreprises seront en effet conduites à confier à leurs salariés des missions temporaires pour participer aux chantiers. Aujourd'hui, il faut plus de deux mois pour obtenir les autorisations administratives. Or, le plus souvent, les entreprises ont besoin de pouvoir détacher des salariés dans une fenêtre calendaire de deux semaines. Le système administratif actuel empêche donc nos entreprises d'être réactives. C'est un handicap qu'il nous faut surmonter en accélérant encore davantage les procédures de délivrance des autorisations.

Bien sûr, certains obstacles seront levés avec la mise en oeuvre de l'Accord économique et commercial global tant attendu entre l'Union européenne et le Canada. Souhaitons que les derniers points de discussion soient rapidement tranchés et que la conclusion de cet accord intervienne au plus vite.

Vous le voyez, notre groupe d'amitié est mobilisé pour faire gagner nos entreprises au Québec et favoriser les partenariats dans tous les domaines. Car, à l'instar de M. Jean Charest, je crois que le Québec constitue une merveilleuse porte d'entrée pour accéder au marché nord-américain ; tout comme la France l'est pour le Canada sur le marché européen. Ce colloque, j'en suis sûr, vous donnera quelques clés pour parvenir à exporter outre-Atlantique le meilleur de vos produits et services ou pour vous implanter sur place.

M. Henri BAISSAS, directeur général adjoint d'Ubifrance

BPI France offre le carburant indispensable au développement des entreprises. Sous le label BPI France Export se trouve réuni l'ensemble des offres de financement pour le développement international : l'offre développée par Oseo (prêt pour l'export) et celle de la Coface (assurance prospection). Ce label améliore la lisibilité et l'efficacité de ces dispositifs, tandis qu'Ubifrance permet aux entreprises de s'orienter et de diminuer les incertitudes dans le cadre de leur développement commercial.

Nos partenaires se sont mobilisés pour cet événement : l'Ambassade du Canada, des cabinets d'avocats, de conseil, les agences de promotion des provinces du Canada. Je remercie Entreprise Rhône-Alpes International (ERAI), la Chambre de commerce française au Canada, la Chambre de commerce canadienne en France, le Cercle des dirigeants d'entreprise franco-québécois et Air France. Enfin, je remercie le magazine L'Express, partenaire média de cette opération, dont le nouveau numéro spécial sur le Canada vient de paraître.

Cette journée d'information fera la part belle aux présentations portant sur la pratique des affaires et les témoignages d'entrepreneurs. Le but de la journée de demain est de bâtir vos plans d'action à travers des ateliers pratiques, des rendez-vous individuels et des visio-conférences avec les équipes canadiennes et américaines d'Ubifrance. En effet, Ubifrance dispose de neuf bureaux en Amérique du Nord, dont trois au Canada (Toronto, Montréal et Vancouver), pour vous faire réussir sur ce marché.

Une enquête portant sur l'ensemble des entreprises que nous accompagnons a indiqué que huit entreprises sur dix ont identifié un ou plusieurs contacts au cours d'une opération mise en place par Ubifrance, tandis que la moitié a déclaré avoir signé un contrat ou être en cours de négociation.

TABLE RONDE 1 - ACCORD ÉCONOMIQUE ET COMMERCIAL GLOBAL : QUEL IMPACT POUR LES ÉCHANGES FRANCO-CANADIENS ?

Table ronde animée par Mme Valérie LION, rédactrice en chef adjointe, service économie du magazine L'Express

Ont participé à cette table ronde :

M. Jean-Dominique IERACI, ministre conseiller et délégué commercial principal auprès de l'Ambassade du Canada en France
M. Frédéric KAPLAN, chef du service économique près l'Ambassade de France au Canada
M. Pierre-Marc JOHNSON, ancien Premier ministre du Québec, négociateur en chef du Gouvernement du Québec de l'Accord économique et commercial global (AECG)

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Mme Valérie LION . - La sixième édition du hors-série « S'installer au Canada » est parue hier. L'Express publie depuis plus de dix ans un hors-série sur ce sujet. Le Québec constitue la porte d'entrée naturelle du Canada pour les Français, mais l'ensemble du Canada offre des opportunités aux Français.

L'un des éléments-clés de la réussite professionnelle au Canada est le « réseautage » : cet événement vous permet justement d'échanger avec des professionnels issus des deux côtés de l'Atlantique.

Le Canada est un partenaire commercial important pour la France et ambitionne de l'être encore davantage ; en témoigne ce projet d'Accord de libre-échange, en négociation depuis le mois d'octobre 2009 et dont la conclusion est attendue avec impatience. Bien que cet accord n'ait pas encore été signé, MM. Frédéric Kaplan et Jean-Dominique Ieraci ont préparé une intervention commune, attestant de la bonne entente entre Français et Canadiens.

M. Jean-Dominique IERACI . -La France et le Québec travaillent ensemble efficacement dans le cadre des dossiers économiques et de partenariats commerciaux, afin que chacun y gagne.

Le Canada est un marché en soi. Il est la dixième économie du monde, celle-ci étant aussi en croissance. Bruno Laffont, PDG de Lafarge, affirmait d'ailleurs que le Canada est le seul pays développé bénéficiant d'une croissance digne des pays émergents.

Bien que notre croissance économique soit plus modeste cette année, les fondamentaux économiques sont positifs : le taux de chômage reste relativement faible et les finances publiques sont saines, permettant de maintenir bas les taux d'imposition, notamment sur les entreprises.

Le Canada regroupe plusieurs marchés. En effet, la distance entre Montréal et Vancouver équivaut à celle séparant Paris de Moscou. Par conséquent, commercer avec Montréal n'implique pas de commercer avec la Colombie britannique. En revanche, si vous exportez vos produits à Montréal et que vous vous y implantez, le marché du nord-est américain s'en trouve ouvert. En Amérique du Nord, les marchés sont intégrés le long d'un axe nord-sud et non est-ouest. Montréal est ainsi lié à New York, Toronto à Chicago et Vancouver à Seattle.

Le Canada est ouvert aux échanges de biens et de services. Son gouvernement souhaite accueillir les investisseurs étrangers déjà nombreux. Les barrières au commerce sont relativement limitées. Les États-Unis sont le marché le plus important pour les exportations canadiennes et réciproquement : ce commerce représente un million de dollars à la minute. Le pont entre Windsor et Detroit symbolise ce dynamisme : y passent des camions transportant toutes sortes de produits et traversant une frontière qui se doit d'être fluide. La quasi-totalité des secteurs sont porteurs au Canada.

M. Frédéric KAPLAN . - Le commerce bilatéral est significatif : bien que l'Allemagne exporte deux fois plus que la France en direction du Canada, cette dernière y investit deux fois plus. Nos marges de progression sont donc importantes. Notre commerce est équilibré. En 2012, la France a davantage importé de produits canadiens, particulièrement des matières premières, dont des hydrocarbures transformés. Ce commerce couvre de nombreux secteurs : l'énergie, les produits pharmaceutiques, l'agroalimentaire, l'aéronautique et la mécanique.

L'Union européenne (UE) négocie actuellement un accord de libre-échange avec le Canada suite à l'échec de l'OMC ; tous les blocs régionaux négocient d'ailleurs des accords bilatéraux. Cet accord concerne d'abord les tarifs douaniers, mais aussi de nombreux autres sujets : cet accord est le plus large jamais négocié par l'UE. Neuf négociations sont actuellement en cours, notamment avec l'Inde, la Malaisie, le Vietnam, le Japon et les États-Unis. L'UE ne disposant que d'une cinquantaine de négociateurs, il importe que les accords soient rapidement conclus afin de ne pas leur compliquer la tâche.

L'UE prévoit que si la totalité des accords étaient conclus, hors Japon et États-Unis, 2,2 millions d'emplois seraient créés et le PIB européen augmenterait de plus de 2 %, soit environ 280 milliards d'euros. L'accord avec le Canada concerne pour sa part la propriété intellectuelle et la concurrence, l'investissement et les mouvements de personnes. Un mécanisme de règlement des différends y a été inclus. Cet accord doit être compatible avec les accords existants, ce qui occasionne un travail juridique et commercial considérable. Au total, cet accord comportera douze chapitres, contre trois pour celui avec les États-Unis.

Mme Valérie LION . - Certaines difficultés ont été surmontées dans le cadre de ces négociations, même si l'UE regrettait cette semaine le retard pris. De plus, le contexte de crise a favorisé un regain de protectionnisme dans les pays développés. Pouvons-nous espérer que cet accord soit signé avant la fin de l'année ? Quels sont les sujets de dissension persistant ?

M. Pierre-Marc JOHNSON . - Un véritable accord global s'intéresse aux mouvements des biens, des personnes et du capital. L'objectif de base d'un accord de ce type est de favoriser ces mouvements, par la discipline que s'imposent les États. Ces derniers identifient les obstacles à la mobilité, mais négocient aussi 300 pages d'exceptions.

En termes de circulation des biens, trois dimensions comptent au-delà des procédures douanières : l'abolition ou la réduction des tarifs ; les règles d'origine, à savoir la façon de définir la provenance d'un produit ; les obstacles techniques au commerce.

Hors produits agricoles, les tarifs varient entre 3 % et 22 %, la moyenne étant située entre 5 % et 6 %. Dans certains secteurs, notamment celui des cosmétiques, ces tarifs sont considérables. La quasi-totalité de ces derniers disparaîtront grâce à cet accord : un taux de 6 % représentant habituellement la marge bénéficiaire d'une entreprise, il importe de les abolir.

Les règles d'origine posent différents défis, particulièrement concernant le sucre, tous les produits alimentaires en contenant. Le Canada ne produit pas de sucre, hormis la province de l'Alberta qui n'approvisionne cependant pas le marché domestique. Quant au sucre d'érable, il n'est pas utilisé dans tous les produits. Un produit alimentaire circulant du Canada vers l'Europe mais contenant du sucre brésilien peut être considéré comme canadien en fonction du pourcentage de sucre qu'il contient.

Les obstacles techniques ont permis aux États de mettre en place des politiques protectionnistes. Celles-ci sont également justifiées au nom de la santé et de la protection de l'environnement. Il n'est pas envisageable d'harmoniser les systèmes de ce type entre l'Amérique du Nord et l'Europe. Cependant, il est possible de s'assurer de la reconnaissance réciproque des accréditations et de la conformité des produits. En effet, des organismes scientifiques accordent une certification à un produit, l'autorisant ainsi à pénétrer un marché. Dans le futur, des organismes pourront octroyer la double accréditation, européenne et canadienne.

Le commerce de services est déjà très important. L'accord vise à proposer un encadrement juridique et à garantir l'exclusion de certains secteurs, comme l'éducation, les services sociaux et la santé. En matière d'investissement, l'accord garantira : le traitement national ; l'accès au marché ; l'absence de contrainte en termes de citoyenneté pour la formation des conseils d'administration ; et la protection contre les effets de mesure, source d'expropriation indirecte. Il proposera aussi un système de règlement des différends introduisant un haut niveau de médiation.

S'agissant de la mobilité des personnes, la définition du conjoint bénéficiant d'un visa de six mois, par exemple, est différente d'un pays à l'autre au sein de l'Europe. L'union de deux personnes de même sexe, acquise depuis longtemps au Canada, ne l'est pas toujours dans les autres pays. En outre, il convient d'assurer la fluidité des déplacements des hommes d'affaires et des personnes souhaitant investir, ainsi que des transferts intra-compagnies. Par ailleurs, l'Europe et le Canada s'inspireront de l'accord franco-québécois en matière de reconnaissance réciproque des qualifications.

Les marchés publics canadiens constituent un intérêt considérable pour les Européens. Ils représentent environ 100 milliards d'euros par an. La présence des provinces canadiennes dans la négociation est justifiée par cet enjeu : les marchés publics provinciaux seront désormais ouverts, à quelques exceptions près. Des entreprises françaises pourront soumissionner au-delà d'un certain seuil : dans le cas de la construction, ce seuil est fixé à 5 millions de dollars, sur le modèle de l'OMC, tandis qu'il s'élève à un demi-million de dollars pour les autres approvisionnements en biens et services.

Dans le domaine de la propriété intellectuelle, les négociations ont débuté par l'examen de 3 000 demandes d'indication géographique formulées par l'UE. Leur nombre a été réduit à 177. Quelques problèmes persistent quant à l'appellation de fromages et de charcuteries. La protection des droits de la propriété intellectuelle pharmaceutique constitue un objectif européen significatif, alors qu'elle pose des problèmes de coûts au Canada.

En effet, le système de médecine et d'hospitalisation canadien est largement socialisé ; certaines provinces, dont le Québec, disposent également de régimes d'assurance médicaments. Plus la durée de protection de nouvelles molécules est allongée, moins les fabricants de génériques ont accès à ce marché, plus l'État paie. Ce problème ne peut être réglé que par la mise en place d'un système de compensation par le gouvernement fédéral, ce qui fait débat.

Par ailleurs, les biens culturels ne sont pas uniquement des biens, ce que les Français comprennent très bien. Dans le cadre de ces négociations, la France trouvera une réponse favorable à ses aspirations, au-delà de ce qu'elle obtiendra probablement des Américains.

Mme Valérie LION . - La culture ne figurera pas dans l'accord qui sera négocié avec ces derniers ?

M. Pierre-Marc JOHNSON . - Dans le cadre de cet accord, nous trouverons des façons spécifiques d'exclure la culture, les produits culturels et la capacité des États à mettre en place des politiques culturelles.

Dans le domaine de l'agriculture, le forum sur les matières premières intéresse beaucoup l'UE, d'autant plus que la Chine manifeste aussi son intérêt pour les ressources naturelles du Canada. L'UE se préoccupe également de l'intégration verticale de la propriété de la ressource, de son traitement et du prix de la ressource et du produit fini. Un forum permettra d'échanger de manière permanente en termes réglementaires, d'environnement et de développement durable. Avec la prolifération des armes, l'argent sale et certaines coopérations multilatérales, l'agriculture fait partie des sujets reliés à la sécurité nationale ne relevant pas de la juridiction des provinces.

Après quatre ans de négociations, nous sommes parvenus à définir un contenu remarquable sur les plans industriel, commercial et des services. En revanche, les questions agricoles achoppent, étant d'une sensibilité politique considérable. C'est pourquoi, il pourrait être pertinent de disposer de deux régimes de négociation. Quelques enjeux liés à la propriété intellectuelle, à des questions financières et à la reconnaissance réciproque de la conformité des produits doivent encore être traités.

Il est souhaitable que cette entente soit conclue le plus rapidement possible. Le négociateur, même le moins patient, doit s'attendre à un délai minimum de trois mois. Nous avons découvert à travers cette négociation que nous avions des racines, des visions et des intérêts communs quant à différents enjeux : l'immigration, le financement des systèmes sociaux compte tenu des situations démographiques, nos systèmes de droit. Nous avons intérêt à régler ces problèmes, parce que le Canada est une économie ouverte, dont le peuple est commerçant, et que la conclusion de cette négociation serait utile à l'Europe avant d'amorcer celle avec les Américains.

Mme Valérie LION . - La prochaine séance de négociation est-elle programmée ? Par ailleurs, dans le domaine de l'agriculture, le sujet du boeuf canadien semble particulièrement sensible.

M. Pierre-Marc JOHNSON . - M. Steve Verhuel, le négociateur canadien, est toujours à Bruxelles, tandis que le négociateur européen, M. Maro Petrucciani, doit partir deux semaines pour le Japon d'ici la fin de la semaine. Par conséquent, nous nous retrouverons probablement lors de la deuxième semaine de juillet ; les questions agricoles seront à l'ordre du jour.

L'affaire du boeuf canadien est liée à celle du fromage européen : il a été proposé de laisser entrer autant de boeuf que de fromage. Néanmoins, il est plus difficile de faire un repas de fromage que d'un steak : une différence existe donc en termes de tonnages. Je souhaite que les ambitions de l'un et l'autre soient amoindries si elles devaient avoir pour conséquence de bloquer l'ensemble de l'accord. Sur ces questions, il appartient désormais aux dirigeants politiques de décider.

Mme Valérie LION . - Lorsque cet accord sera signé, les entreprises doivent être prêtes à faire preuve de mobilité rapidement.

TABLE RONDE 2 - EXPORTER, INVESTIR, S'IMPLANTER : QUELLE APPROCHE DU MARCHÉ CANADIEN ?

Table ronde animée par Mme Valérie LION, rédactrice en chef adjointe, service économie du magazine L'Express

Ont participé à cette table ronde :

M. Alexandre ZAPOLSKY, président-directeur général de la société Linagora
M. Axel BAROUX, directeur d'Ubifrance Canada
M. Normand ROYAL, associé, cabinet d'avocats Miller Thomson
M. Stefan MAZAREANU, conseiller auprès de l'Ambassade du Canada en France

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Mme Valérie LION . - M. Alexandre Zapolsky est le fondateur de Linagora, l'un des leaders de l'édition de logiciels open source créé en l'an 2000.

M. Axel Baroux est le directeur d'Ubifrance pour le Canada. Il est installé à Toronto depuis le mois de septembre 2012.

M. Normand Royal est spécialisé dans le droit des sociétés, tandis que M. Stefan Mazareanu a activement travaillé à faire connaître l'Ontario comme moteur économique du Canada. Il importe de montrer aux Français que d'autres provinces que le Québec offrent des opportunités.

Il est souhaitable d'investir au Canada afin de profiter au mieux de ce grand marché. Toutefois, cela implique de savoir identifier des partenaires, évaluer le marché et financer son développement. Ce type de démarche doit donc être préparé en amont.

La société Linagora emploie environ 130 salariés en France, en Belgique et aux Etats-Unis. M. Alexandre Zapolsky a très tôt misé sur l'international en s'appuyant sur Ubifrance. Un premier bureau a été ouvert en 2008 dans la Silicon Valley et l'ouverture à Montréal d'une filiale a été annoncée pour le mois de septembre prochain.

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Le Québec, en particulier Montréal, dispose de nombreux atouts pour réussir dans l'économie numérique : la population est jeune et très bien formée, et une créativité particulière s'y développe. Chacun connaît désormais le Cirque du soleil, dont la créativité est exportée dans le monde entier : l'ouverture d'un Cirque du soleil permanent à Moscou a récemment été annoncée et la plupart des spectacles ayant lieu à Las Vegas sont labellisés « Cirque du soleil ». De plus, le festival C2M a eu lieu récemment à Montréal. Le Québec manifeste en outre une véritable volonté publique d'accueillir des acteurs de l'innovation sur son territoire. Une démarche en faveur des jeux vidéo a été entreprise il y a plusieurs années et des dispositifs d'accompagnement en matière de recherche et développement sont toujours disponibles.

Par conséquent, le Québec constitue une place forte dans le domaine de l'innovation et de l'économie numérique sur le continent américain.

En revanche, la Silicon Valley est un territoire compliqué en termes de développement économique et d'exportation. Nous sommes présents en Belgique, mais également en Allemagne et dans le nord de l'Europe : nous exportons 20 % à 25 % de notre chiffre d'affaires. Par conséquent, je cherche des débouchés commerciaux pour mes logiciels. La Silicon Valley permet d'être intégré à l'écosystème de l'innovation mondiale, mais pas forcément de faire des affaires. C'est pourquoi, après trois ans de réflexion, j'ai choisi d'investir à Montréal.

La France n'étant pas dotée d'instruments spécifiques accompagnant les acteurs de l'innovation, il nous paraissait indispensable de réaliser la recherche et développement (R&D) à l'étranger. Par la suite, le précédent gouvernement a mis en place le crédit d'impôt recherche (CIR), vecteur d'investissement de R&D en France. Par conséquent, le Québec a perdu de son attractivité par rapport à la France.

Mme Valérie LION . - Bénéficiez-vous d'avantages fiscaux au Québec ?

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Oui. Le crédit de développement pour les affaires électroniques (CDAE) tient compte de 20 % des coûts de R&D. Cependant, le CIR est plus avantageux en France, puisqu'il couvre 30 % des coûts de R&D.

Nous avons toutefois identifié d'autres raisons de nous installer au Québec : le nouveau gouvernement québécois a, en effet, fait du logiciel libre l'un des instruments de sa politique de compétitivité, de réduction des coûts et de transformation de ses systèmes d'information.

Ces informations m'ont été transmises au cours d'échanges avec Québec Investissement. J'encourage d'ailleurs tous les entrepreneurs français à s'adresser à cette société dédiée à leur réussite. Cette dernière m'a permis de rencontrer Mme Pauline Marois, qui m'a confirmé l'intention du Parti québécois d'investir dans le domaine du logiciel libre.

Mme Valérie LION . - Votre intérêt résidait dans l'ouverture d'un nouveau marché vous offrant une opportunité de croissance.

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Exactement. À l'occasion d'une visite du Premier ministre français au Québec, j'ai rencontré plusieurs ministres ayant conforté notre projet d'implantation. Suite à une initiative gouvernementale, un pôle d'excellence dans le domaine du logiciel libre a également été créé. Mon ambition est de faire de Linagora l'équivalent d'Ubisoft dans ce domaine. Comme Ubisoft, nous commençons de façon modeste avec l'envoi d'un binôme à Montréal à partir du mois de septembre.

Mme Valérie LION . - En outre, vous avez l'ambition d'investir dix millions de dollars et de recruter plus de cinquante personnes.

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Cet investissement sera étalé sur les trois prochaines années. De plus, nous visons un effectif de 55 personnes au terme de ces trois années. Notre business plan se veut donc dynamique et agressif.

En termes d'opportunités de marché, nous ne prenons pas seulement en compte le marché gouvernemental québécois. En effet, Montréal et Québec constituent une plateforme pour nous projeter sur le continent nord-américain, plus facilement que depuis San Francisco.

M. Axel BAROUX . - Les Français sont présents sur l'ensemble du territoire canadien. La France est un investisseur de premier plan au Canada avec environ 550 entreprises et 80 000 emplois directs. 70 % de ces entreprises sont présentes au Québec et environ 200 sont implantées en Ontario. Elles sont également de plus en plus présentes dans les provinces de l'Ouest qui influencent le plus la croissance économique canadienne. La Colombie britannique compte une cinquantaine d'entreprises françaises, tandis que l'Alberta, le « Texas canadien », accueille de nombreuses entreprises du secteur énergétique. Les provinces atlantiques, comme le Nouveau-Brunswick, présentent aussi des avantages pour les entreprises françaises.

Le chiffre d'affaires des entreprises françaises au Canada représente environ 18 milliards d'euros, soit six fois le volume des exportations françaises vers le Canada. En effet, les entreprises commerçant au Canada le font par l'intermédiaire d'un agent, d'un distributeur ou d'un partenaire. Cependant, si elles souhaitent pérenniser leurs flux commerciaux, elles doivent s'implanter de façon fixe.

Cette implantation présente l'avantage d'offrir une ouverture sur l'ensemble de l'Amérique du Nord : les économies sont très intégrées et proches, et les monnaies sont à parité. La manière d'y faire des affaires est plus directe, plus informelle et moins affective qu'en France. Le Canada dispose aussi d'une excellence technologique, en termes de recherche et d'innovation notamment : le Canada est le pays comptant le plus grand nombre d'entreprises de biotechnologies par habitant au monde.

Les écueils sont peu nombreux. Les règles sont claires et stables mais divergent d'une province à l'autre, particulièrement en matière fiscale ; d'où l'intérêt de consulter un expert.

En outre, le Canada est un pays faisant plus de dix-huit fois la France en termes de taille. Le coût de prospection est élevé et constitue un réel budget d'investissement. Celui-ci en vaut toutefois la peine : je ne connais aucune entreprise qui remettrait actuellement en cause sa décision d'investissement.

M. Normand ROYAL . - La réussite réside dans la qualité de la préparation en amont. Les entrepreneurs doivent rencontrer les collaborateurs d'Ubifrance et utiliser tous les outils disponibles sur le territoire français.

Une fois arrivés sur le territoire, ils doivent consacrer du temps au réseautage afin de rencontrer de nombreuses personnes, ce qui est excessivement important.

Ils doivent aussi prendre garde au piège de la langue : nous parlons la même langue, mais nous n'avons pas la même pensée ; cette différence est visible au quotidien. Un mot n'a pas forcément le même sens, ce qui influe sur la rédaction des protocoles. Les Français prêtent une grande attention à la qualité de la langue, celle-ci étant toujours perfectible. Cette démarche doit pouvoir être décodée.

La présence sur le territoire et la préparation contribuent à décoder ces éléments non-verbaux. Par exemple, j'ai rencontré un entrepreneur français se portant acquéreur d'une société québécoise ; l'entrepreneur québécois restant en poste au cours des trois prochaines années a exprimé son souhait de percevoir 125 000 dollars par an. Mon client français a interprété cette demande comme un début de négociation, alors qu'il s'agissait d'une exigence.

La langue est la conceptualisation de la pensée ; il convient d'y prendre garde.

Mme Valérie LION . - Nous parlons la même langue, mais non le même langage, ce qui peut occasionner des difficultés, de l'incompréhension et des quiproquos. Les Français ont tendance à assimiler le Canada au Québec, province avec laquelle ils ont davantage d'affinités pour des raisons historiques.

Il suffit de visiter les autres provinces pour se rendre compte que le Canada n'est pas la France : le Canada est un pays bilingue, on y parle le français, mais aussi beaucoup l'anglais. L'identité canadienne est complexe, s'étant nourri des histoires française et britannique et de la rivalité avec les États-Unis.

M. Stefan MAZAREANU . - Il est impossible d'ignorer l'Ontario au sein du marché canadien : il représente la première économie au niveau canadien, la cinquième ou septième économie américaine, en fonction du PIB nominal ou du pouvoir d'achat ; il compte treize millions d'habitants et représente 40 % du PIB canadien. Le secteur des technologies de l'information et de la communication (TIC) est particulièrement porteur en Ontario, puisqu'il concentre 50 % des TIC canadiens.

Son économie est très industrialisée : 50 % de ce qui est produit au Canada au sein d'industries manufacturières l'est en Ontario. 2,5 millions de voitures sont produites chaque année et exportées en majorité aux États-Unis, soit davantage que la production française et que celle du Michigan, État américain produisant le plus d'automobiles.

Notre modèle économique favorise ce type de production. Nos ouvriers sont mieux rémunérés qu'en France, et les charges patronales ne s'élèvent qu'à 10 %, ce qui permet d'améliorer la rentabilité des entreprises.

Toronto est une grande métropole américaine, le quatrième ou cinquième centre urbain américain le plus riche en fonction des critères de mesure. En outre, un tiers des dépenses canadiennes en R&D est réalisé à Toronto. Celle-ci est aussi un grand centre financier : la troisième bourse d'Amérique du Nord et la première bourse mondiale pour les ressources minières. De plus, Toronto représente 3 % du PIB nord-américain, mais obtient 7 % à 8 % des investissements directs étrangers en Amérique du Nord.

Ces performances s'expliquent par la nature du modèle économique : l'Ontario a développé une économie de connaissance, plus de 64 % de sa main d'oeuvre est diplômée d'études post-secondaires, soit le pourcentage le plus élevé au sein des pays du G7 3 ( * ) . Le taux d'impôt sur les bénéfices s'élève à 25 % pour les sociétés manufacturières et à 26,5 % pour les autres sociétés.

Les États-Unis et le Canada sont les deux partenaires commerciaux les plus importants au monde. L'Ontario joue un rôle crucial dans ces échanges : 50 % d'entre eux y transitent. L'environnement y est également très favorable aux affaires : une société peut s'y installer en 24 heures.

Enfin, les expatriés français sont nombreux à Toronto : 35 000 francophones y résident et bénéficient de la présence de lycées français.

Mme Valérie LION . - Avez-vous mis Montréal en concurrence avec une autre métropole canadienne lorsque vous avez décidé d'investir au Canada ?

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Non. Je souhaite vivre le rêve de Montréal. J'aime cette ville qui déborde d'une énergie remarquable. De plus, le Québec et la France ont une histoire commune. Il est enthousiasmant de participer à cette histoire. La délégation du Québec à Paris offre un réseau d'amitié Québec-France incroyable.

Il est certain que Toronto et l'Ontario disposent de grands atouts. Néanmoins, dans le secteur du numérique, de nombreux Américains se rendent à Montréal, qui est la Nouvelle-Orléans du nord : la vie nocturne et la dynamique qui s'y développent sont particulières.

Mme Valérie LION . - Avez-vous cependant rencontré des difficultés ? Avez-vous des conseils à prodiguer aux autres entrepreneurs ?

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Les notions de réseau et de préparation sont essentielles. Il est essentiel de se rapprocher d'Ubifrance qui fournit un travail remarquable dans l'accompagnement à l'export de nos entreprises. Son réseau en Amérique du Nord est dense et certains de ses collaborateurs connaissent très bien le numérique.

J'invite aussi les PME à utiliser le dispositif du Volontariat international en entreprise (VIE), qui fonctionne très bien. Celui-ci permet de créer un lien avec les élèves des grandes écoles qui n'envisagent pas toujours d'intégrer une PME. J'ai recruté un jeune polytechnicien en VIE, qui n'aurait probablement pas candidaté à Linagora dans un autre cadre. Ce type de profil apporte des atouts à l'entreprise.

Je salue également le travail d'ERAI, particulièrement pour les entreprises Rhône-alpines. Pour ma part, j'utilise aussi la Chambre de commerce et d'industrie française à Montréal, la solution la plus pertinente d'un point de vue compétitivité-prix pour une entreprise souhaitant démarrer.

Mme Valérie LION . - Les témoignages d'utilisateurs du dispositif VIE sont enthousiastes, tant du côté des entreprises que du côté des jeunes.

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Montréal n'est pas le seul lieu d'investissement. Je me suis rendu à Toronto à deux reprises en tant qu'expert invité par l'Ambassade de France sur la question du développement des compétences dans le domaine du numérique. J'ai été agréablement surpris par Toronto : les buildings sortent de terre de façon impressionnante et la ville bénéficie d'un grand programme urbain de rénovation des bords du lac. Ce projet générera encore davantage d'attractivité. Je gage que Toronto sera demain une ville de tourisme et de loisirs.

J'élabore des logiciels pour les gouvernements. Je souhaite convaincre le Gouvernement québécois d'utiliser ces logiciels. Par conséquent, il était évident pour moi de m'installer à Montréal. Si j'avais exercé dans un autre domaine, j'aurais probablement envisagé aussi une implantation à Toronto.

Un intervenant dans la salle . - Avez-vous remarqué des spécificités sectorielles ou géographiques dans le cadre des relations que vous entretenez avec les entreprises françaises ?

M. Normand ROYAL . - Une société de Rennes s'est implantée à Vancouver dans le domaine du cinéma, ce secteur y étant porteur. Une société de champagne s'est établie dans l'Alberta. Les spécificités régionales sont attractives pour certaines sociétés françaises. Le Québec présente une économie davantage diversifiée, tandis que Toronto s'inscrit surtout dans le domaine automobile et la sous-traitance manufacturière.

M. Stefan MAZAREANU . - L'Ontario et le Québec reçoivent autant d'investissements français l'un que l'autre. Ce sont surtout les entreprises du CAC 40 qui investissent à Toronto : Thalès, Safran, Sanofi-Pasteur, Alcatel-Lucent. Les PME s'implantent davantage à Montréal.

Mme Valérie LION . - Quels sont les secteurs dans lesquels le Gouvernement ontarien favorise l'investissement des entreprises ?

M. Stefan MAZAREANU . - Nous tentons avant tout à créer un environnement favorable aux affaires. Le système canadien a pendant longtemps été considéré comme le meilleur au monde en termes de crédit d'impôt pour la R&D, un crédit d'impôt de 20 %, remboursable pour les sociétés travaillant avec des laboratoires publics, les universités par exemple.

Dans le secteur des jeux numériques, nous offrons des crédits d'impôt de 35 % et 40 %, soit les plus élevés du Canada. D'autres secteurs sont évidemment favorisés : l'automobile, les technologies de l'information et de la communication (TIC) et les services financiers. Bay Street à Toronto est l'équivalent de Wall Street à New York. 70 % des financements effectués dans le domaine des ressources minières en 2012 l'ont été à Toronto.

Mme Valérie LION . - Aiguillez-vous les entreprises vers les provinces en fonction de leur projet d'investissement, de leur profil, de leur taille et de leurs moyens ?

M. Axel BAROUX . - Nous conseillons aux entreprises de s'intéresser à un marché ou à une localisation spécifique en fonction de leur marché, de leur taille et de leurs objectifs. Notre mission première est de permettre à un maximum d'entreprises françaises de travailler et de vendre leurs produits au Canada et en Amérique du Nord.

Les quatre premiers secteurs en termes de ventes françaises au Canada sont les produits pharmaceutiques pour 360 millions d'euros par an ; le vin, pour 340 millions d'euros ; la filière aéronautique, pour 260 millions d'euros ; les produits cosmétiques.

Ces secteurs représentent un tiers des ventes françaises au Canada. Nous pouvons améliorer nos performances dans ces secteurs, mais notre mission consiste à développer les autres secteurs de façon responsable, en accueillant les entreprises et en les aiguillant.

Le Canada et les États-Unis concentrent 17 % à 18 % des importations mondiales, mais n'attirent que 6,6 % des exportations françaises. La marge de progression est donc très forte.

M. Jean-Philippe JAVEL . - Je travaille dans le secteur du numérique, dans le domaine du conseil et de la formation. Le marché du travail dans ce secteur et dans celui des technologies de l'information est très tendu au Canada et en Amérique du Nord. De nombreuses entreprises québécoises recherchent des profils spécialisés en informatique, marketing et numérique à Paris et à Bruxelles.

Quelle est votre expérience en matière de recrutement de profils qualifiés et expérimentés à Montréal et au-delà ? Comment avez-vous abordé ce défi de ressources humaines ?

M. Alexandre ZAPOLSKY . - Il est difficile pour nos entreprises de se développer dans la Silicon Valley du fait de ce problème de ressources humaines : le marché de l'emploi est extrêmement compétitif et les salaires sont très élevés. Il est cependant possible d'utiliser le dispositif VIE : actuellement, les jeunes volontaires sont plus nombreux que les offres disponibles.

Il y a quelques mois, j'ai proposé au gouvernement le programme « France Export Numérique », visant notamment à massifier l'usage des VIE en augmentant leur nombre de 7 500 VIE à près de 10 000. Tant les professionnels du numérique que les jeunes veulent expérimenter ce dispositif. L'Express contribue probablement à alimenter cette volonté via son hors-série.

Mme  Valérie LION . - Celui-ci est le hors-série de L'Express qui rencontre le plus de succès.

M. Alexandre ZAPOLSKY . - La croissance canadienne attire. Depuis que nous avons annoncé notre installation à Montréal, des candidats nous demandent de les recruter et de les former en France, puis de les envoyer au Québec.

En outre, le domaine des logiciels libres et de l' open source fonctionne de façon communautaire : lorsque les personnes s'y intéressant ont su que nous nous installions au Québec, l'attractivité de Linagora a crû. Nous avons reçu de nombreuses candidatures. Nous avons également eu la chance de passer dans l'émission « Envoyé spécial » sur ce sujet, ce qui a aussi entraîné un afflux de candidatures.

Le développement du numérique au Canada et au Québec génère un enjeu en termes de formation. Il convient d'accepter de recruter des travailleurs étrangers. Cette question pose aussi problème en France : il est difficile de recruter des jeunes originaires du Maghreb, par exemple, à moins qu'ils aient fait leurs études en France. Il est nécessaire d'ouvrir les frontières.

Une intervenante dans la salle . - Le Canada est-il la porte d'entrée vers l'Amérique du Nord pour tous les secteurs d'activité ?

M. Axel BAROUX . - Il est l'une des portes d'entrée : chaque site en Amérique du Nord est une porte d'entrée vers cette région. Le Québec est habituellement le quai de débarquement des entreprises françaises : c'est la première étape. Ensuite, le développement s'articule selon un axe Nord-Sud plutôt que Est-Ouest. Il est possible de passer de Montréal ou de l'Ontario vers la côte Est des États-Unis, ou de la région de Vancouver à la côte Ouest, avec Seattle, San Francisco et Los Angeles.

Mme Valérie LION . - Il n'est pas indispensable d'aller directement aux États-Unis, puisque le Canada offre une opportunité de marché en soi.

M. Normand ROYAL . - L'un de mes clients travaille dans le domaine du cloud computing ; il s'est installé à Montréal avant de partir pour la Silicon Valley deux ans après. Un autre de mes clients, industriel dans l'aéronautique et l'automobile, s'est installé à Montréal : il explore désormais le marché ontarien et a envoyé un commercial à Detroit. Un autre client travaillant dans le domaine des ressources a créé sa filiale dans le New Jersey après s'être implanté à Montréal.

M. Stefan MAZAREANU . - Le marché américain est deux fois plus grand que le marché canadien. Nous bénéficions d'un traité de libre-échange nous y donnant accès. Selon une étude récente de la Banque de Montréal, la zone économique comprenant l'Ontario et les sept États américains adjacents, comptant plus de 90 millions d'habitants, constitue la quatrième économie mondiale. Les supply chains de ces États américains très industrialisés et de l'Ontario sont tellement intégrés que l'établissement de l'origine des produits est problématique.

M. Axel BAROUX . - Il convient de ne pas négliger la perception selon laquelle le Québec serait une zone plus facile à appréhender du fait du partage d'une langue commune. Cette région devient un point d'ancrage pour les PME.

Un intervenant dans la salle . - Quel est le profil des entreprises s'installant au Canada : des grandes entreprises, des entreprises de taille intermédiaire (ETI) ou des petites et moyennes entreprises (PME) ?

M. Axel BAROUX . - Toutes les entreprises du CAC 40 sont présentes au Canada, hormis le secteur de la grande distribution et de la construction automobile - bien que les équipementiers soient présents. Leur présence concerne l'ensemble des provinces : l'Ontario, la Colombie britannique, le Québec et l'Alberta dans les secteurs de l'énergie, de l'environnement et des technologies vertes. Toutefois, deux tiers des entreprises françaises implantées actuellement au Canada sont des PME ou des ETI. Elles sont très représentées au Québec dans tous les secteurs d'activité : de la laine « Bergère de France » à l' open source , en passant par les serveurs internet et la santé.

TABLE RONDE 3 - LE QUÉBEC, TREMPLIN POUR LES ENTREPRISES FRANÇAISES

Table ronde animée par Mme Cécile DELETTRE, chef du service « Événements spéciaux » d'Ubifrance

Ont participé à cette table ronde :

M. Patrick SPIES, secrétaire général de la société CitoxLab
M. André PRATTE, Directeur, Développement des affaires Europe d'Investissement Québec
M. Paul LALONDE, associé, cabinet d'avocats Heenan Blaikie
M. Gaston LAFLEUR, ex président-directeur général du Conseil québécois du commerce de détail
M. Frédéric LEFRET, vice-président du Cercle des dirigeants d'entreprise franco-québécois

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Mme Cécile DELETTRE . - Le numéro spécial de L'Express regorge d'informations indispensables et d'anecdotes amusantes. Par exemple, il convient d'éviter l'arrogance au Québec. De plus, le tutoiement est obligatoire.

Par ailleurs, je regrette l'absence de femmes, chefs d'entreprise, autour de cette table, d'autant plus que le magazine inclut un bel article sur la place de la femme au Québec.

M. Patrick SPIES. - Citoxlab est une ETI spécialisée dans le développement d'études pré-cliniques dans les domaines du médicament, de la sûreté et de la sécurité des populations. 74 % du marché se trouve en Amérique du Nord. C'est pourquoi, nous souhaitions nous y implanter. Nous nous sommes retrouvés par hasard au Québec, après y avoir saisi une opportunité. En effet, nous étions n° 10 mondial et une société québécoise cotée, Lab Research, implantée à Laval près de Montréal, connaissait des difficultés financières. En revanche, celle-ci disposait d'installations parmi les plus intéressantes d'Amérique du Nord. Nous étions donc complémentaires.

Par conséquent, nous avons entrepris une opération de rachat. Nous avons procédé seuls, dans un souci de rapidité, cette société étant proche du dépôt de bilan. Nous avons aussi acquis deux filiales situées au Danemark et en Hongrie. Notre nouveau groupe est désormais n° 5 ou 6 mondial et la 1 ère société française et européenne dans ce secteur.

La société réalise 80 % de son chiffre d'affaires avec des entreprises américaines, tandis que CitoxLab France réalise 60 % de son chiffre d'affaires à l'international. À Laval et à Montréal se trouvent deux entreprises importantes intervenant dans le même secteur d'activités que le nôtre. Ceci constitue un avantage pour recruter une main d'oeuvre formée au sein de ces deux entreprises.

Mme Cécile DELETTRE . - Comment votre localisation au Canada vous a-t-elle permis de vous développer dans d'autres pays ?

M. Patrick SPIES . - Les deux filiales au Danemark et en Hongrie nous ont permis d'être présents en Europe. Nous nous sommes surtout développés aux États-Unis. En effet, lorsque nous allons aux États-Unis, nous passons la douane à l'aéroport de Montréal. Les échanges sont très rapides et les connexions aériennes sont pratiques : nous sommes au coeur de l'Amérique du Nord.

M. André PRATTE . - Je ne suis en France que depuis quelques semaines ; par conséquent, les exemples que je donnerai ne sont pas français.

La préparation est essentielle. Il convient de ne pas se fier à la langue, à l'intérêt que vous pouvez avoir pour le Québec ou aux trois semaines de vacances que vous avez pu y passer. La langue et le monde des affaires sont très différents au Québec et en Europe. Les Québécois parlent français, mais fonctionnent selon une mentalité nord-américaine : vous devez rencontrer le plus de personnes possible, impliquées dans des activités québécoises.

Investissement Québec joue ce rôle. Cette société d'État appartenant au Gouvernement du Québec offre un soutien financier pour tous les types d'activité industrielle et commerciale au Québec. Nous avons divisé la planète en onze territoires dont Paris. Nous accompagnons, conseillons et aidons de différentes manières les entreprises intéressées par le Québec.

Initialement, Investissement Québec était une banque d'affaires. Nous disposons de tous les moyens financiers imaginables, mais nous aidons les entreprises en fonction de leur impact économique pour le Québec. L'exemple le plus récent est celui de la société Ericsson en Suède : celle-ci investira 1,3 milliard de dollars canadiens à Montréal pour y construire un centre de stockage de données et un centre de recherche. En effet, de nombreuses avancées restent à développer dans le domaine du cloud computing . Investissement Québec a travaillé avec cette entreprise pour évaluer les impacts directs et indirects du projet. Celui-ci est très important, consomme beaucoup d'électricité, mais crée peu d'emplois. Or, l'impact économique est habituellement lié au nombre d'emplois créés et aux salaires versés. Par conséquent, la société a dû trouver des façons originales de démontrer aux pouvoirs publics l'intérêt pour le Québec d'accueillir et d'appuyer un tel projet.

Au mois de janvier dernier, nous avons travaillé sur le dossier d'une société anglaise, Framestore, spécialisée dans les effets spéciaux pour le cinéma. Celle-ci souhaitait profiter du crédit d'impôt offert par le Québec dans le domaine de l'informatique, mais considérait ce seul crédit d'impôt comme insuffisant. En effet, utilisant les outils élaborés par les entreprises dans le secteur du multimédia, elle estime apporter une plus-value dans ce domaine. Il a été nécessaire de documenter le projet de Framestore, afin de prouver aux autorités qu'il était rentable pour le Québec de le soutenir au-delà du crédit d'impôt. Un investissement de 50 millions de dollars canadiens sera ainsi réalisé à Montréal, et 150 emplois créés.

ESET, entreprise slovaque, est le quatrième fabricant mondial de logiciels anti-virus pour les ordinateurs personnels. Elle est une entreprise unipersonnelle. Son propriétaire s'est installé à San Diego en 2009 avec dix personnes. Il y dispose désormais d'un centre de recherche comptant deux cents personnes. Il souhaitait pénétrer le marché bilingue canadien, où la mentalité d'affaires est légèrement différente de celle du marché américain. Il a fait appel à nous pour être accompagné dans ce projet. Nous lui avons présenté des chercheurs de l'Université de Montréal et un ingénieur slovaque travaillant à Montréal. ESET s'est installé à Montréal au mois d'avril 2012 avec sept personnes. Nous pouvons espérer que cet effectif atteindra une cinquantaine de personnes d'ici quelques années. Dans ce cas, nous n'avons pas fourni d'aide financière.

Je vous recommande, d'une part, de rencontrer des personnes connaissant les deux systèmes, français et québécois ; d'autre part, d'être accompagné lors de votre premier voyage.

M. Paul LALONDE . - Je suis originaire de Montréal, mais je réside désormais à Toronto. Je suis cependant membre du barreau dans les deux juridictions.

Premièrement, je vous recommande de choisir correctement un cabinet d'avocats compétent. Le contexte juridique du Canada et du Québec est particulier. Le Canada est un pays fédéral, dans lequel les compétences législatives sont partagées entre les provinces et le gouvernement central. Ce partage est exclusif : lorsqu'un domaine relève de la compétence provinciale, l'autorité fédérale ne peut intervenir. Évidemment, le contenu des cadres provincial et fédéral fait débat. Il est parfois nécessaire de se tourner vers l'un ou l'autre ou vers les deux. De plus, le Québec présente des particularités juridiques, comme les lois linguistiques par exemple. L'Office de la langue française existe uniquement au Québec. Le Québec possède aussi des lois spécifiques concernant la protection du consommateur.

Deuxièmement, il convient de percevoir les possibilités existant au-delà du Québec : ce dernier est un tremplin pour faire des affaires au Canada et en Amérique du Nord. Il importe de comprendre la signification de l'Accord de libre-échange nord-américain (Alena) : cet accord offre de nombreux avantages et occasions d'affaires. Les tarifs douaniers pour les produits d'origine canadienne sont le plus souvent nuls. De plus, les citoyens canadiens bénéficient d'avantages pour faire des affaires aux États-Unis. En revanche, les Français ne peuvent en profiter. Les autres avantages doivent être utilisés le plus possible.

M. Frédéric LEFRET . - Le Cercle des dirigeants d'entreprises franco-québécois (CDEFQ) a mis en place des formations de préparation au « choc culturel » : les Québécois sont nord-américains, alors que les Français sont latins. Cette différence implique la distinction entre le respect de la loi et l'esprit de la loi. Dans le cadre des affaires, la France est le seul pays à établir cette distinction qui génère d'importantes difficultés au cours des négociations. Au Québec, le respect des dates et des délais est essentiel. En France, cette discipline n'existe pas, ce qui est inacceptable au Québec et au Canada.

Par ailleurs, les entrepreneurs français manifestent habituellement une certaine suffisance vis-à-vis du Québec : ils invoquent systématiquement le fonctionnement français, ce qui peut agacer les Québécois. De plus, il est handicapant de partager la même langue. En effet, nous n'avons pas l'impression d'être à l'étranger ; de ce fait, nous ne nous efforçons pas d'adopter un autre schéma intellectuel. De nombreuses entreprises ont échoué pour cette raison. Les entrepreneurs français ne sont pas en terrain conquis ; ils ne sont pas les sauveurs économiques du Québec, la réalité actuelle étant davantage le contraire. Le Québec est un véritable partenaire.

En outre, la facilité avec laquelle il est possible d'obtenir un rendez-vous au Québec est trompeuse. En effet, en France, société conflictuelle, il est long et difficile d'obtenir un rendez-vous chez un prospect. Toutefois, lorsque celui-ci est obtenu, il témoigne de l'appétence du prospect pour votre offre. Au Québec, société consensuelle, l'obtention d'un rendez-vous ne signifie rien. Vous pourrez avoir l'impression qu'un rendez-vous s'est bien déroulé alors qu'il n'en est rien.

De plus, la rigidité québécoise peut gêner les latins que nous sommes. Quant au « réseautage », il fonctionne différemment. En France, il est opaque et sous-entendu, tandis qu'il est affiché et promu au Québec. De nombreux jeunes ont trouvé un emploi en faisant du bénévolat. Le code du travail permet de mettre en oeuvre des périodes au cours desquelles les bénévoles sont testés ; ce mode de fonctionnement n'existe pas en France.

Les entrepreneurs québécois reconnaissent la qualité de la formation française. Notre formation conceptuelle nous permet de nous adapter à toutes les situations : les jeunes Français ne savent pas toujours travailler, mais ils apprennent grâce à leur capacité d'ouverture.

Enfin, je vous recommande d'aller à l'essentiel. Les Québécois réagissent le plus souvent sur le court terme. En tant que latins, nous engageons un processus de séduction : lors d'un déjeuner d'affaires, nous n'évoquons pas les sujets importants avant le dessert. Les Québécois peuvent être gênés lorsqu'un Français louvoie. Ils souhaitent savoir ce que vous voulez et ce qu'ils peuvent y gagner.

M. Gaston LAFLEUR . - J'ai vécu des situations similaires à celles décrites par M. Frédéric Lefret. Les Français sont attirés par le Québec plus que par les autres provinces canadiennes, parce que nous sommes cousins. C'est pourquoi les Québécois apparaissent comme les premières personnes avec qui traiter. Cependant, nous sommes différents, puisque nous vivons dans un contexte nord-américain.

Je réalise actuellement une tournée des châteaux de la Loire. Nous sommes très bien accueillis dans les restaurants, dont les propriétaires se sont tous rendus au Québec. Je suis allé à Chinon pour visiter une église et j'y ai appris que notre ancien Premier ministre, M. Jean Chrétien, avait un ancêtre venu de Chinon et ayant émigré au Canada en 1643.

Des drapeaux françaises sont présents au Québec. Celui-ci est un territoire intéressant pour le développement du commerce, notamment grâce aux infrastructures routières nord-sud et est-ouest. Deux tiers des activités économiques du Canada ont lieu en Ontario et au Québec. Plusieurs entreprises de commerce de détail sont établies dans les deux provinces.

En termes de grande distribution, un détaillant est un commerce de détail en général : Walmart, par exemple, est un détaillant. Les secteurs de la quincaillerie, de la rénovation, du vêtement sont assez concentrés.

78 % des Québécois et 21 % des Canadiens ont le français pour langue maternelle.

Mme Cécile DELETTRE . - Dans le cadre du commerce, les Québécois attachent beaucoup d'importance à ce que la langue française soit respectée. Yves Rocher, par exemple, est contraint de traduire ses campagnes de marketing françaises pour le marché québécois, celles-ci ayant tendance à employer des termes anglophones.

M. Gaston LAFLEUR . - Nous sommes pointilleux sur l'usage des mots et les anglicismes sont moins tolérés qu'en France. En effet, nous nous efforçons de protéger notre langue, du fait de la situation d'enclavement dans laquelle nous vivons.

Le revenu des particuliers, converti en fonction du taux de change du 11 juin dernier, s'élève à 39 000 euros par an en moyenne au Québec, contre 46 860 euros au Canada et 35 220 euros en France. Les revenus disponibles sont donc relativement similaires.

Les centres commerciaux de plus de 20 000 m 2 sont au nombre de 123 au Québec, contre 650 au Canada et 369 en France. Ils occupent 5,5 millions de m 2 au Québec et 10,7 millions de m 2 en France. Le plus grand centre commercial au Canada, le West Edmonton Mall situé à Edmonton en Alberta, occupe un espace de 492 400 m 2 . Au Québec, le plus grand centre commercial est situé dans la ville de Québec, les Galeries de la Capitale, suivi par le Carrefour Laval, qui se trouve dans la banlieue nord de Montréal.

Le quartier DIX-30 Brossard, situé en banlieue sud de Montréal, est un concept « lifestyle » : les artères commerciales se doublent d'un développement urbain en périphérie. Néanmoins, l'accès aux installations est plus difficile en hiver. Le Centropolis Laval reprend aussi ce concept.

Le concept de « power center » consiste en l'installation de centres commerciaux sur les grands axes routiers. Les loyers, bien plus faibles qu'en centre commercial traditionnel, attirent de nombreux détaillants.

Les habitants de Montréal jouissent des galeries marchandes sous-terraines les plus développées d'Amérique du Nord ; elles pénètrent sous les artères du centre-ville. A l'air libre, l'axe Sainte-Catherine/Avenue Union se trouve en plein centre-ville de Montréal, avec notamment le magasin La Baie et le Centre Eaton.

La consommation est donc très dynamique au Québec, malgré la récession des années 2008-2009. En revanche, le taux d'endettement des ménages est très élevé au Canada, s'élevant à près de 160 % du revenu personnel disponible au début de l'année 2013. C'est pourquoi, des mesures d'austérité ont été mises en place par le Gouverneur de la Banque centrale du Canada.

Une intervenante dans la salle . - Depuis mon arrivée à Toronto au mois de janvier, j'ai pu constater les spécificités du consommateur québécois par rapport au consommateur anglophone : les études de marché montrent que le consommateur québécois est attaché à la France ; en témoignent ses choix de marques. En effet, les marques françaises disposent d'un réel avantage compétitif par rapport à d'autres concurrents.

M. Gaston LAFLEUR . - Les consommatrices sont très réceptives aux produits et aux concepts européens, particulièrement français. Par exemple, les produits d'Yves Rocher, dont le siège social est situé en banlieue sud de Montréal, sont très prisés par les consommatrices.

M. Frédéric LEFRET . - De nombreux Québécois regrettent la marque Renault. Celle-ci y était présente dans les années 1970 ; désormais, il n'y a plus aucune voiture française au Québec.

Par ailleurs, il est surprenant que certaines chaînes de magasins françaises, L'Occitane par exemple, soient considérées comme des chaînes de luxe, alors que ce n'est pas le cas en France. Les Québécois ont une réelle appétence pour les produits français, à condition que ces derniers soient performants.

En outre, les conditions de travail au Québec sont exceptionnelles, hormis les conditions climatiques auxquelles il est possible de s'habituer. En France, un cadre ne quitte pas son travail avant son patron, sous peine d'être soupçonné de n'avoir pas travaillé. Au contraire, au Québec, chacun quitte son travail à l'heure : si une personne part après l'heure habituelle, cela signifie qu'elle s'est mal organisée dans la journée. De même, au Québec, lorsqu'un délai est fixé, il convient d'être apte à le respecter.

Au Québec, les salariés ne disposent que de peu de vacances. En revanche, ils quittent rarement leur travail après 16 heures 30 ; il est également difficile de joindre une entreprise le vendredi après-midi à Montréal. Au total, les Québécois ne travaillent que 36 à 37 heures par semaine : ils profitent d'une deuxième vie après le travail.

En France, il est inhabituel que des personnes aillent boire un verre avec leurs collègues après leur travail, alors qu'elles le font fréquemment au Québec. Les différents réseaux, familial, amical et professionnel, y sont d'ailleurs très compartimentés. Alors qu'en France, il est fréquent d'inviter ses amis à dîner chez soi, il est rare d'entrer dans la cellule familiale au Québec. De plus, si quelqu'un invite des personnes à dîner dans un restaurant et qu'elles ne viennent pas sans prévenir, il est normal en France de s'en offusquer, ce qui n'est pas le cas au Québec. Les Français vivent mal le fait de ne pas être accueillis au sein de la cellule familiale québécoise : ils l'interprètent comme un refus des Québécois de les intégrer. Par conséquent, les Français ont tendance à rester entre eux, afin de reproduire les normes sociales qu'ils connaissent. Il est paradoxal de demander aux étrangers en France de s'adapter, alors que nous refusons de le faire nous-mêmes à l'étranger. Le « réseautage » étant essentiel, il importe de ne pas fréquenter uniquement des Français.

M. Paul LALONDE . - Il est encore plus difficile d'intégrer le milieu familial en Ontario qu'au Québec. Ce phénomène est nord-américain, en particulier anglo-saxon. Les Québécois sont très chaleureux par rapport aux Ontariens qui font passer les affaires avant tout.

Le Québec a pour particularité d'avoir hérité d'un droit civil européen. Néanmoins, il est fortement influencé par son contexte nord-américain. Les contrats rédigés au Québec sont extrêmement détaillés, couvrent toutes les éventualités et doivent être respectés à la lettre, sur le modèle américain.

M. Patrick SPIES . - La société canadienne qui nous a aidés à réaliser l'opération s'est rendue compte, une fois l'opération achevée, que nous n'avions pas signé le mandat. Ses représentants ont paniqué, mais, pour notre part, nous avions donné notre parole, nous avons donc respecté le contrat à la lettre et ce à leur grande surprise. Nous leur avons confié une autre mission ensuite ; ils ont alors pris garde que le contrat soit préalablement signé.

M. André PRATTE . - La situation a évolué au cours de la dernière décennie : il est désormais commun que les Français passent des vacances au Québec et vice versa ; nous nous connaissons donc de mieux en mieux. Auparavant, il était fréquent que les Québécois accueillent chez eux un étranger seul à Montréal. Ainsi, le Français accueilli interprétait cet acte comme un véritable signe d'amitié : il souhaitait alors revenir avec femme et enfants pour deux semaines. Par conséquent, les Québécois ont modifié leur fonctionnement et sont désormais plus prudents.

PRÉSENTATION DES ENTREPRISES RETENUES POUR LE PRIX DU « MEILLEUR PROJET DE PROSPECTION AU CANADA »

Mme Cécile DELETTRE, chef du service des « Événements spéciaux » d'Ubifrance . - Nous avons reçu de nombreuses candidatures. Parmi elles, nous avons sélectionné quatre entreprises, dont les représentants vont vous présenter leur projet de manière synthétique. Nous donnerons le nom du gagnant en fin d'après-midi, après la délibération du jury.

M. Gérard DI MASCIO, directeur médical, SAM Instruments . - Pensez-vous qu'on a moins mal au dos au Canada qu'en France ? Les troubles musculo-squelettiques font partie des problèmes de santé majeurs : ils constituent la première cause de consultation médicale au monde. Aux États-Unis, une personne sur quatre est concernée en permanence et les coûts directs et indirects sont estimés à cent milliards de dollars par an.

Les réponses médicales habituelles sont-elles toujours efficaces ? Les patients sont pris en charge à la fois par des médecins, des chirurgiens, des kinésithérapeutes qui n'établissent pas de diagnostic global de la posture, donc pas de diagnostic précis.

Les traitements sont coûteux, restent dépendants des opérateurs et ne fonctionnent pas sur chaque individu. Il vous a peut-être déjà été conseillé en dernier recours de pratiquer un sport.

Nous avons développé l'outil de SAM Instruments en collaboration avec l'université de Rouen. Celui-ci apporte une solution novatrice et a déjà été récompensé plusieurs fois. Il a été élaboré sur la base d'un échantillon de 6 000 patients suivis depuis sept ans. Il s'agit d'un système expert en trois dimensions, breveté et non dépendant d'un opérateur. Il analyse les contraintes biomécaniques en une minute en s'appuyant sur la base de données et sans recours aux rayons X.

La prise en charge des patients est meilleure, ce qui est profitable aux assureurs et aux systèmes de santé. Une colonne récupère les données informatiques et les envoie sur un serveur. L'abonnement coûte 600 euros par mois et par machine. L'étude de marché a montré que le potentiel français s'élève à 5 000 machines, tandis que le potentiel mondial est de 100 000. Le potentiel du produit dérivé à destination des salles de sport est estimé à 20 000 machines.

M. Patrick BARRIERE, gérant, SARL Easywood . - Ma société fabrique des maisons à ossature bois, du moyen au haut de gamme. Je suis passionné par le ski et le vélo de course ; c'est pourquoi, je me suis tourné vers Vancouver. Ses habitants y sont davantage intéressés par l'écologie et par le sport qu'en France.

Je souhaite ouvrir un second Easywood et trouver des partenaires français fabriquant des skis et des vélos haut de gamme. Ma clientèle est très exigeante tant en termes d'habitat que de loisirs. Par conséquent, je me suis entouré de PME très high tech dans leur domaine et d'architectes renommés ou novateurs, afin de vendre de l'habitat à Vancouver et de proposer des services annexes à une clientèle différente.

M. Michel GIRAUD, chargé d'affaires Construction des Iles . - Ce projet s'appuie sur une équipe d'une trentaine de personnes actives dans le domaine de la construction sur un archipel isolé. Il s'agit donc pour nous de survivre. Notre projet consiste à élargir nos horizons et à réussir grâce à notre savoir-faire acquis depuis plusieurs années au sein de notre entreprise familiale.

Nous recherchons des partenaires afin de faire connaître et développer la charpente à la française, métallique, en bois ou en métal et bois. Nous disposons de nombreux atouts, notamment une proximité géographique et culturelle avec le Canada. Nos équipes ont également l'habitude de travailler dans le milieu de la construction canadienne, puisque nous sommes implantés à Saint-Pierre-et-Miquelon. Parallèlement, nous avons mis en place un programme de formation, de manière à devenir les meilleurs dans le domaine de la conception et l'installation de charpentes.

M. Yvan NGUYEN VAN LOC, gérant de Glob'all International . - Glob'all International est un cabinet de conseil et d'accompagnement des PME dans leur développement international. Nous sommes associés avec l'entreprise française O&C, créée par M. Olivier James. Celui-ci se vouait à une carrière d'avocat. Alors en maîtrise de droit, il décida de changer d'orientation et de passer un diplôme d'État de culture physique handisport, étant lui-même handicapé moteur depuis sa naissance.

Dans le cadre de la société O&C, il conçut la première plateforme universelle de fitness pour tout public. Le produit que nous commercialisons, la Fitplak, est un concept innovant et a été avant tout développé pour les personnes handicapées, afin qu'elles puissent pratiquer le sport avec des personnes valides. Il constitue donc un outil de développement du lien social.

Nos cibles commerciales (salles de sport publiques ou privées, maisons de retraite, centres de rééducation, cabinet de kinésithérapie) sont très intéressées par le produit, qui leur offre la possibilité  de développer de nouvelles activités. Parallèlement, O&C a conçu des programmes d'entraînement et de formation dédiés aux professionnels.

Nous disposons déjà de contacts à l'étranger, dont certains au Québec et à Montréal. En effet, le Canada, à travers sa politique du sport, est devenu le chef de file de l'intégration des personnes handicapées au système sportif. Il importe aux Canadiens que les personnes handicapées puissent tirer profit au maximum de leurs capacités pour devenir des citoyens à part entière.

Nous devons désormais rencontrer nos prospects ; c'est pourquoi nous participons à ce concours.

Mme Cécile DELETTRE . - Quel que soit le résultat, toutes ces entreprises s'inscrivent dans une volonté de mieux-être chère à notre ministre du commerce extérieur, Mme Nicole Bricq, et propre au savoir-faire français.

REGARDS CROISÉS SUR LES RELATIONS BILATÉRALES FRANCE-CANADA

Présentation par M. Axel BAROUX, directeur d'Ubifrance Canada

Sont intervenus :

M. Lawrence CANNON, ambassadeur du Canada en France
M. Philippe ZELLER, ambassadeur de France au Canada

M. Axel BAROUX . - Monsieur Cannon, vous avez été ministre des affaires étrangères fédéral du Canada, après avoir été ministre des transports, des infrastructures et des collectivités et ministre responsable du Québec auprès du Gouvernement du Canada. Vous avez également été élu à plusieurs reprises : conseiller municipal, provincial et élu au niveau fédéral. Par ailleurs homme d'affaires, vous avez été membre du conseil d'administration d'Oceanic Iron et vice-président aux affaires gouvernementales de la société Unitel.

Monsieur Zeller, vous avez été successivement conseiller diplomatique au sein du cabinet du professeur Hubert Curien, ministre de la recherche, ambassadeur de France en Hongrie et en Indonésie, ambassadeur chargé de mission sur l'adoption internationale et en charge des questions environnementales. Vous avez également été préfet du département de l'Ariège.

M. Lawrence CANNON . - La relation bilatérale se caractérise par la complicité que Philippe Zeller et moi-même avons développée, celui-ci s'étant montré un appui essentiel depuis ma prise de fonction un an auparavant. Cette complicité se manifeste dans plusieurs dossiers que nous avons traités ensemble. La relation entre la France et le Canada est d'ailleurs l'une des meilleures qui existent. Nous nous en réjouissons : de nombreux Français admirent le Canada pour ses grands espaces, le taux d'imposition en vigueur pour la petite entreprise, entre 15 % et 20 % et la chaleur de l'accueil. Les Français sont également étonnés par la ténacité et le dynamisme avec lesquels les Québécois défendent et promeuvent la langue française et la culture francophone. La complicité favorise l'innovation dans nos rapports et les échanges économiques.

M. Philippe ZELLER . - Nous sommes chanceux d'avoir comme ambassadeur du Canada un ancien ministre des affaires étrangères, ce qui n'est pas fréquent. Cette situation découle d'un choix personnel du Premier ministre canadien, prouvant l'importance qu'il souhaite donner à la relation franco-canadienne. Ses deux visites officielles en un an, ainsi que les contacts à l'occasion du G8, du G20, des sommets de la francophonie et de l'OTAN en témoignent également.

Depuis mon arrivée au Canada, une vingtaine de mois auparavant, trois éléments m'ont interpellé. Premièrement, la démographie : dans l'esprit de ma génération, le Canada est un immense pays abritant une faible population. Lors de sa fondation en 1867, le Canada ne comptait que 3 millions d'habitants, contre une dizaine de millions au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Actuellement, 36 millions de personnes y vivent. Au XXI ème siècle, le Canada sera aussi peuplé qu'un grand pays européen, de 50 à 60 millions d'habitants, grâce à une démographie active, particulièrement liée à l'immigration : 260 000 nouveaux immigrés y arrivent chaque année. Cela fait de la société canadienne un creuset multiculturel extrêmement riche.

Deuxièmement, la structure de l'économie canadienne change. Je percevais le Canada comme un pays traditionnellement agricole, du fait de ses grandes plaines céréalières, mais aussi comme un pays industriel. Or, il évolue vers le secteur primaire à travers la mise en valeur de toutes ses ressources naturelles : le pétrole, en particulier les sables bitumineux de l'Alberta, et le secteur minier, qui fait l'objet de grands projets. Par conséquent, l'activité se déplace vers le nord et l'ouest du pays : le nord du Québec, avec le Plan Nord ; le nord du Saskatchewan, avec l'uranium ; le nord de l'Alberta et les Territoires du Nord, les nouvelles technologies permettant de les valoriser et de permettre à l'homme d'y vivre. Le secteur tertiaire se développe également via le domaine du numérique.

Troisièmement, le Canada assure un rôle spécifique sur la scène internationale. Autrefois pays des casques bleus, il s'engage désormais directement : en Afghanistan, en Libye, au Mali... Il est également membre du G8, du G20, de l'OTAN, et de l'Organisation internationale de la francophonie. Il est actif au sein des Nations Unies, malgré quelques divergences de vues avec la France concernant le multilatéralisme onusien.

M. Lawrence CANNON . - L'intégration économique se manifeste par la présence de plus de 550 firmes françaises sur le territoire canadien, particulièrement concentrées au Québec mais dont le nombre croît en Ontario et dans l'ouest canadien. Le Gouvernement français a d'ailleurs réajusté sa présence sur le territoire canadien en installant des consulats généraux dans sa partie ouest.

Dans ce domaine, nous poursuivons le travail sur notre plan stratégique d'action triennal. Nous examinons les obstacles et les difficultés en collaboration avec les représentants des ministères de l'économie et des finances et des affaires étrangères français et canadien. Nous pourrons ainsi ajuster ce plan d'action.

L'accord de coopération concerne aussi la diplomatie culturelle, celle-ci incluant les liens entre nos universités respectives. Les échanges se multiplient et la mobilité des enseignants est encouragée. Ces derniers se familiarisent avec des projets lancés en collaboration avec le secteur privé. C'est le cas de travaux menés par Sanofi avec l'Université de Toronto. Philippe Zeller et moi-même avons pu en constater l'avancée lors de la visite du Premier ministre français au mois de mars à Toronto.

Certains ministres français, M. Manuel Valls notamment, se sont aussi rendus au Canada pour prendre connaissance des bonnes pratiques fédérales et provinciales en matière d'accueil et d'intégration des communautés culturelles. Des rapports sont également entretenus entre les « think tankers » français et canadiens. Les informations s'échangent donc à différents niveaux, contribuant à la profondeur exceptionnelle de nos relations.

Enfin, le devoir de mémoire est essentiel : les actes posés durant la Seconde Guerre mondiale et la défense de la liberté et des valeurs que nous promouvons sur la scène internationale définissent également la relation de nos deux pays.

L'agenda de coopération renforcée comprend ces éléments et permet d'évoluer progressivement grâce aux propositions concrètes de nos équipes.

M. Philippe ZELLER . - Ce programme de coopération renforcée a été élaboré conjointement par les deux ambassades, témoignant de la qualité de la relation bilatérale. En effet, il est rare qu'un plan d'action conjoint soit adopté. Celui-ci l'a été le vendredi 14 juin dernier par le Président de la République français et le Premier ministre canadien lors de sa visite officielle à Paris.

Le secteur universitaire génère la recherche scientifique, celle-ci se faisant essentiellement dans la vingtaine de grandes universités canadiennes. Par ailleurs, en tant qu'ambassadeurs, nous sommes responsables de la mise en oeuvre de ce programme sous l'angle du service public d'État. À ce titre, la vivacité entre collectivités, provinces canadiennes et régions françaises, est essentielle : un lien est entretenu entre la région Rhône-Alpes et le Québec ; la Basse-Normandie développe des relations avec le Manitoba ; Bordeaux travaille de manière étroite avec la ville de Québec ; tandis que Saint-Pierre-et-Miquelon a un rôle à jouer auprès des provinces atlantiques.

Les relations interparlementaires jouent également un rôle. L'existence d'une unique association de parlementaires canadiens et français témoigne de l'intégration particulière entre nos deux pays et enrichit le dialogue. Cette association représente un relais pour les responsables d'entreprises en termes d'accompagnement et de valorisation de leurs projets.

Enfin, le réseau d'accueil du service public français au Canada inclut Ubifrance, le service économique régional rendu par six consulats et des outils de rayonnement de la langue française (Alliances françaises, accords de coopération éducative).

La francophonie compte pour le Québec, mais se développe également dans le reste du Canada, l'Ontario par exemple, comptant 500 000 francophones. De plus, 30 000 jeunes de l'Alberta apprennent la langue française, offrant une perspective de relais culturels, voire d'influences. Des acteurs comme l'Office franco-québécois de la jeunesse (OFQJ) valorisent l'action économique : ce dernier a fait venir à Montréal une quinzaine de jeunes entrepreneurs français, afin de faciliter leur expansion internationale.

Un intervenant dans la salle . - Quel bilan tirez-vous de l'accord de reconnaissance des compétences entre la France et le Québec ?

M. Lawrence CANNON . - Cet accord a été conclu par le gouvernement du Québec avec le gouvernement français. Jusqu'à présent, près de quatre-vingt ententes ont permis la reconnaissance de compétences professionnelles. Dans le cadre de la coopération renforcée, nous souhaitons étendre à toutes les provinces qui le souhaitent cet excellent accord qui a permis d'éliminer de nombreux obstacles bureaucratiques. Le Premier ministre français s'est montré très enclin à coopérer avec le gouvernement de Mme Kathleen Wynne pour développer une entente avec l'Ontario en la matière. Pour ma part, j'ai rencontré le secrétaire d'État à l'Éducation à Calgary et ai attiré avec succès son attention sur ce dossier, puisque l'Alberta recherche de nombreux travailleurs expérimentés et bien formés.

M. Philippe ZELLER . - Cet accord intergouvernemental nécessite d'être appliqué par les professions, notamment celles régies par des ordres professionnels. Par exemple, un médecin français doit être reconnu par ses pairs pour pouvoir exercer au Québec. Cette application n'est pas problématique pour 90 % des métiers ; cependant, certains métiers médicaux ou paramédicaux, en particulier le métier d'infirmier, posent problème. Ce sujet a d'ailleurs été évoqué lors de la visite du Premier ministre français à Québec.

Depuis que l'entente a été signée, 680 Français ont bénéficié de cette reconnaissance. Parmi ceux-ci se trouvent 300 infirmières qui, pour des raisons techniques, rencontrent un problème de reconnaissance de leur niveau de formation.

Enfin, dans le cadre de l'Accord économique et commercial global (AECG) entre l'UE et le Canada, la reconnaissance mutuelle des diplômes constitue l'un des sujets négociés.

Un intervenant dans la salle . - Les visas de travail sont-ils faciles à obtenir ?

M. Philippe ZELLER . - Près de 20 000 jeunes Français obtiennent chaque année un permis de travail canadien, dont 14 000 dans le cadre de l'accord de mobilité des jeunes. Normalement, l'entreprise doit démontrer qu'aucun Canadien n'est capable d'occuper le poste concerné, mais de nombreuses exceptions existent. Un jeune Français parlant l'anglais et possédant des contacts sur place, notamment grâce à la communauté française au Canada, aura des opportunités. De plus, un étudiant français peut travailler durant ses études au Canada.

TABLE RONDE 4 - RESSOURCES HUMAINES : QUELLES SOLUTIONS POUR ASSURER SON DÉVELOPPEMENT LOCALEMENT ?

Table ronde animée par M. Axel BAROUX, directeur d'Ubifrance Canada

Ont participé à cette table ronde :

Mme Bénédicte RAYNAUD, chef de Service VIE, Ubifrance
Mme Ambre DUGAS, assistante, chef de produit, Groupe Seb Canada Inc
M. Rénald GILBERT, ministre conseiller du service de l'immigration, Ambassade du Canada en France
M. Alexandre GUILLAUME, directeur du développement international, ERAI

_____________________________

M. Axel BAROUX . - L'entreprise Rhône-Alpes International (ERAI) est un partenaire de longue date d'Ubifrance, avec lequel nous venons de signer un accord de coopération particulièrement salué.

Mme Bénédicte RAYNAUD . - Le Volontariat International en Entreprise (VIE) est le volet « ressources humaines » géré par Ubifrance. Ce dispositif existe depuis une douzaine d'années. Il permet à une entreprise de recruter un jeune âgé de 18 à 28 ans pour une mission durant de 6 à 24 mois sans engagement via un contrat de travail. En effet, l'ensemble de la gestion du dispositif est assuré par Ubifrance. Par conséquent, nous menons deux relations contractuelles parallèles : l'une avec l'entreprise ; l'autre avec le jeune.

Ce dispositif a trois avantages majeurs :

- il exonère l'entreprise de la gestion de ce personnel, les services de mobilité internationale au sein des grands groupes nécessitant des équipes conséquentes ;

- il est attractif financièrement, la rémunération versée aux VIE étant exonérée de charges et certaines mesures fiscales avantageuses existant (financement de VIE par certaines régions, assurance prospection de la Coface) ;

- il offre aux entreprises un accès à un vivier de 45 000 candidats, le Canada étant une destination très prisée. Ce vivier est permanent et se renouvelle sans cesse. En effet, la « génération Y » souhaite commencer sa carrière à l'étranger.

Au cours des derniers mois, le rang du Canada parmi les pays d'affectation a progressé : de la douzième place il y a un an, il est passé à la septième. 200 VIE sont actuellement présents au Canada dans plus d'une centaine d'entreprises.

Mme Ambre DUGAS. - Je suis en VIE à Toronto dans le domaine du marketing depuis le mois de janvier. Mon contrat a été établi pour un an, renouvelable un an. Cette expérience s'inscrit dans un réel désir de commencer une carrière à l'étranger. A ce titre, le VIE constitue une excellente solution, notamment du fait de l'encadrement offert par Ubifrance du début à la fin du contrat. Ubifrance apporte également aux VIE une valeur ajoutée en termes de réseau.

M. Axel BAROUX . - Comment êtes-vous perçue par votre hiérarchie et l'équipe canadienne en tant que jeune professionnelle française ?

Mme Ambre DUGAS . - Le statut de VIE est spécifique : je ne suis pas employée par le groupe SEB. Cependant, j'avais déjà travaillé pour cette société en France ; c'est pourquoi, j'ai d'abord été perçue comme une jeune française issue du « corporate office » .

Ce dernier, ainsi qu'Ubifrance, doivent expliquer le dispositif aux équipes. En effet, j'ai souvent été présentée comme une « étudiante VIE », alors que je suis diplômée et que le VIE se distingue du stage, ainsi que du contrat d'expatriation. Pour ma part, j'ai la chance de bénéficier de la confiance du directeur général et de la directrice marketing.

M. Rénald GILBERT . - Il importe de mener la préparation administrative adéquate et de disposer du permis de travail approprié avant l'arrivée au Canada. Les jeunes et les employeurs doivent prendre conscience que la culture organisationnelle et le droit du travail diffèrent fortement d'un pays à l'autre. De plus, les mêmes mots ne signifient pas forcément la même chose.

La préparation implique également de discuter avec des personnes ayant vécu l'expérience canadienne, de préférence dans la même entreprise ou la même ville. En effet, la durée du VIE étant courte, l'adaptation à la culture de l'entreprise doit l'être également pour bénéficier au mieux de l'expérience.

M. Axel BAROUX . - Quels sont les obstacles à l'obtention d'un permis de travail ?

M. Rénald GILBERT . - Du fait de la forte progression du nombre de VIE, une entente a été conclue au Québec afin d'exempter l'entreprise de l'obligation de prouver qu'aucun Canadien ne peut occuper le poste. Dans les autres provinces, cette exemption est possible dans le cadre de l'accord de mobilité des jeunes. Lorsque le quota de 14 000 places est atteint, les permis de travail peuvent désormais être émis pour les francophones en dehors du Québec.

L'accord de mobilité des jeunes est très populaire. Ainsi, en 2012, les 7 000 permis vacances-travail ont été attribués en seulement 48 heures. Toutefois, il est également possible de faire un stage : 4 800 jeunes stagiaires sont présents cette année au Canada. Cette culture du stage est beaucoup moins répandue au Canada. Enfin, 3 000 jeunes professionnels sont aussi concernés par cet accord.

Par ailleurs, de nombreux étudiants peuvent bénéficier d'un permis de travail ouvert, jusqu'à trois ans après la fin de leurs études.

M. Alexandre GUILLAUME . - En début de semaine, lors d'une conférence à Planète PME, la ministre du commerce extérieur a déclaré : « Exporter c'est bien, s'implanter c'est mieux !»  Depuis plus de quinze ans, la société ERAI accompagne des entreprises dans leur cheminement, en particulier l'implantation via l'outil Implantis . En effet, nous sommes convaincus que l'implantation est la condition d'une intégration durable sur un marché. Chaque année, nous hébergeons plus de 200 entreprises dans nos 27 incubateurs situés partout dans le monde. Nous enregistrons des résultats probants : en 2011, les 220 entreprises hébergées ont généré plus de 100 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Implantis est un outil permettant à l'entreprise de s'installer physiquement dans le pays à travers trois étapes :

- Implantis léger : votre entreprise peut obtenir très rapidement une adresse et un numéro de téléphone dans le centre de Québec ;

- Implantis sans coaching : sont mis à votre disposition un bureau, une infrastructure et des réseaux d'avocats et d'experts comptables développés depuis plus de vingt ans ;

- Implantis avec coaching » : lorsque vous démarrez dans un marché, il est essentiel d'être accompagné quotidiennement par une personne référente. Une charte est désormais signée entre l'entreprise française, la personne hébergée en Implantis (commercial, ingénieur-qualité, etc.) et notre directeur du bureau afin de déterminer les objectifs et le plan d'action. Un échange a lieu tous les quinze jours autour d'un compte-rendu rédigé par la personne hébergée par Implantis . Cette démarche favorise la transparence et conforte la légitimité du dispositif.

Depuis le 27 mai 2013 et la signature d'une convention entre Ubifrance et ERAI, nous mettons nos incubateurs à la disposition de toutes les entreprises françaises.

Enfin, j'ai travaillé pour un chocolatier de Saint-Etienne qui vendait ses produits aux États-Unis depuis plus de cinq ans et réalisait 100 000 euros de chiffre d'affaires par an. Suite à un changement de propriétaire, il a été décidé de créer une filiale aux États-Unis. Je me suis alors rendu au bureau d'ERAI à Atlanta. Après quatre à cinq mois de prospection dans des salons, l'activité ne s'intensifiait pas. Puis, le plus gros distributeur en food service des États-Unis m'a finalement invité à présenter mes produits à ses commerciaux. Celui-ci m'a expliqué que la vente d'un produit nécessitant des investissements, il avait préféré vendre le chocolat de mon concurrent, Valrhona, qui disposait d'une filiale sur place. J'ai alors compris combien l'implantation favorise la réussite des projets à l'international.

Je voudrais signaler aussi que les Belges et les Québécois nous envient le dispositif VIE, les formalités administratives étant intégralement prises en charge par Ubifrance à moindre coût. Autre point positif : 80 % des jeunes restent ensuite en poste au sein de l'entreprise.

M. Axel BAROUX . - Quelle est la nature de votre travail à Toronto ?

Mme Ambre DUGAS . - Je suis assistante chef de produit en marketing opérationnel. J'ai d'abord été chargée de travailler sur la marque Tefal, en particulier les produits Blockbuster, dont l'ActiFry. Il s'agit de capitaliser sur des succès internationaux et de se servir de ses bonnes pratiques pour redéployer le succès, tout en l'adaptant aux spécificités du marché. Le fait d'avoir déjà travaillé sur certains de ces produits en France était un avantage pour Seb et pour moi-même.

J'ai désormais changé d'équipe. Je travaille maintenant pour Rowenta et sur un lancement de produits prévu pour l'année 2014, mobilisant le budget le plus important en termes de campagne télévisée. Je travaille donc avec la chef de produit pour mettre tous les outils de lancement à notre disposition.

Par ailleurs, il est très aisé de faire des affaires au Canada. J'ai rencontré une personne possédant une agence de relations publiques, dont les clients les plus importants sont Lacoste et l'Occitane. Je lui ai alors proposé de présenter son agence à ma direction. Cette agence fait désormais partie de notre liste préférentielle pour les relations publiques.

M. Etienne JULIOT . - Quel est votre avis sur les VIE à temps partagé ?

Mme Bénédicte RAYNAUD . - Le temps partagé est un complément intéressant du dispositif, notamment pour des entreprises n'ayant pas besoin d'une personne à temps plein. Cependant, il n'est pas aisé de parvenir à regrouper les entreprises. Dans ce cadre, la personne en VIE ne doit pas travailler pour plus de deux à trois entreprises ; celles-ci ne doivent pas être concurrentes mais plutôt complémentaires et intéressées par un même marché et un même profil.

Un tel projet est complexe à élaborer. C'est pourquoi Ubifrance s'appuie sur des partenaires régionaux coutumiers de ce type de projet et en capacité de rassembler les entreprises.

De plus, le candidat à ce type de poste doit justifier de capacités d'autonomie et de compétences organisationnelles solides. Il importe que ce type de projet soit chapeauté par une structure unique.

Actuellement, sur les 7 600 VIE en cours, une trentaine est à temps partagé. Ce type de projet est actuellement en cours d'élaboration dans le domaine de l'agroalimentaire en Asie.

M. Guillaume BOURDON . - Combien coûte le dispositif VIE ?

Mme Bénédicte RAYNAUD . - Le coût comprend le salaire, qui est fixé dans le contrat conclu avec Ubifrance et varie en fonction de la localisation de l'activité entre 30 000 et 33 000 euros environ. Plus l'entreprise est de petite taille, moins le VIE lui coûte cher, les frais de gestion étant modulés en fonction de la taille de l'entreprise. Le budget global inclut également les dépenses liées aux locaux, à l'encadrement, aux frais de déplacement, etc.

M. Alexandre GUILLAUME . - Une formule « Implantis sans coaching » coûte 900 euros par mois, tandis que la formule avec coaching revient à 1 200 euros par mois. En effet, le coaching implique la présence d'une personne dédiée. Les frais de déplacement et de prospection doivent aussi être pris en compte.

M. Axel BAROUX . - Ce dispositif est-il éligible à la Coface ?

M. Alexandre GUILLAUME . - Oui.

Mme Bénédicte RAYNAUD . - Une ingénierie financière peut également être mobilisée en fonction de la localisation de votre entreprise, ainsi que des mesures fiscales, comme le crédit d'impôt export.

Un intervenant dans la salle . - Comment le salaire du jeune en VIE est-il déterminé ?

Mme Ambre DUGAS . - Le salaire est similaire à celui d'un premier emploi. Il est très compétitif, mais dépend de la localisation géographique et non de l'entreprise. Les barèmes de salaire sont accessibles sur le site Internet d'Ubifrance.

M. Axel BAROUX . - Le salaire d'un VIE travaillant au Canada anglophone s'élève à 2 365 euros par mois, tandis qu'il est de 2 150 euros au Québec. Ces salaires évoluent marginalement tous les trois mois.

Mme Bénédicte RAYNAUD . - Ce salaire représente le coût exact pour l'entreprise qui ne paie aucune charge sur ce montant.

Une intervenante dans la salle . - Je suis étudiante en Master 2 d'affaires internationales. Je cherche un contrat en VIE, mais il existe peu d'offres pour un grand nombre de candidats : comment me faire connaître et trouver l'entreprise recherchant mon profil ?

Mme Bénédicte RAYNAUD . - Il convient de s'acharner, puisque vous êtes effectivement très nombreux à candidater. Cette démarche s'apparente à une première recherche d'emploi. Ainsi, les moyens classiques de recherche d'emploi fonctionnent dans le cadre du VIE.

Nous diffusons sur le site civiweb.com toutes les annonces des entreprises. Toutefois, certains grands groupes choisissent de ne pas publier leurs annonces sur ce site. Par conséquent, il est nécessaire de visiter leur propre site internet.

Dans le cadre d'une offre concernant une destination attractive, nous recevons de 200 à 300 réponses. Nous vous conseillons donc de créer votre propre poste : quotidiennement, de petites entreprises nous contactent suite à la candidature d'un jeune évoquant un contrat VIE.

Mon équipe promeut ce dispositif, mais vous pouvez également contribuer concrètement à cette promotion lorsque vous approchez une entreprise.

Vous pouvez démarcher les filiales localement, dans les pays qui vous intéressent. De même, en France, lorsqu'une entreprise intègre un marché, il peut être pertinent de lui proposer ce dispositif.

Vous n'êtes pas alors confrontés à la même concurrence. Les 45 000 candidats représentent plus d'ambassadeurs de ce dispositif que notre équipe d'Ubifrance n'en comptera jamais.

TABLE RONDE 5 - INNOVATIONS, INDUSTRIES, SERVICES : COMMENT LE SAVOIR-FAIRE FRANÇAIS EN MATIÈRE DE NOUVELLES TECHNOLOGIES PEUT-IL ÊTRE VALORISÉ SUR LE MARCHÉ CANADIEN ?

Table ronde animée par M. Axel BAROUX, directeur d'Ubifrance Canada

Ont participé à cette table ronde :

M. Etienne JULIOT, directeur commercial, société Obeo
M. Pierre-Emmanuel AUGUSTIN, responsable du développement international des activités de soins à domicile, Air liquide
M. Pierric BONNARD, chef du pôle régional infrastructures, transport, industries pour l'Amérique du Nord, Ubifrance
M. Etienne DUBREUIL, avocat, cabinet DS Welch Bussières
M. Frédéric BOVE, responsable développement et financement, Mosaic, HEC Montréal

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M. Etienne JULIOT . - Il y a sept ans, j'ai créé une start-up dans le domaine de l'informatique, financée sur fonds propres. Notre société croît désormais de plus de 30 % chaque année et emploie plus de cinquante personnes. Je dirige également une fondation représentant 15 millions d'utilisateurs d'outils informatiques.

Nous élaborons des outils de conception, à savoir de la schématisation d'informations trop complexes pour être intégrées à des cahiers des charges. La visualisation de ces informations les rend plus exploitables. Ces outils sont utilisés par les grandes entreprises disposant d'importants systèmes d'information, les banques, par exemple, très présentes à Toronto, et l'industrie aérospatiale. Le plus grand pôle mondial dans le domaine de l'aérospatial se trouve à Toulouse, mais le deuxième se situe à Montréal.

En 2009, nous souhaitions nous implanter à l'international, d'autant plus que plus des trois quarts de nos utilisateurs n'étaient pas français ; mais nous ne l'avons pas fait. Il importe que les fondateurs et le patron de l'entreprise s'impliquent dans un premier développement à l'international : il convient de déléguer seulement dans un second temps, les partenaires souhaitant rencontrer les personnes à la tête de la société.

Je me suis impliqué dans ce développement au sein d'une délégation d'Ubifrance, sans avoir de stratégie claire. Néanmoins, le fait d'intégrer la mission d'Ubifrance m'a encouragé à m'élever par rapport à mon quotidien et à m'interroger de façon plus pertinente.

Nous nous sommes finalement lancés à la fin de l'année 2012. Le fait de prendre le temps de la réflexion nous a permis, lors de notre rencontre avec Bombardier, de mettre en avant l'usage de notre technologie de modélisation par Thalès, Airbus et Alstom, ce qui nous a rendus crédibles. En effet, il importe que les sociétés françaises exerçant dans votre secteur d'activité soient convaincues par votre entreprise avant de l'implanter à l'étranger.

Mon premier rendez-vous commercial au Canada a eu lieu avec un grand groupe employant plus de 100 000 personnes. J'ai été reçu par le numéro deux du groupe, qui m'a accueilli et salué de façon familière, se distinguant des pratiques françaises. Toutefois, le tutoiement et l'amicalité peuvent prêter à confusion : vous n'avez que peu de temps pour convaincre votre interlocuteur et poursuivre l'entrevue.

En outre, vos interlocuteurs canadiens ne s'intéressent pas à l'historique et aux chiffres de votre entreprise : ils souhaitent d'abord savoir combien d'avions supplémentaires seront vendus grâce à votre entreprise. Les présentations Powerpoint ne sont pas les bienvenues, puisqu'il convient d'aller directement dans le vif du sujet.

Suite à la mission Ubifrance, nous avons multiplié nos contacts au Canada. En un an, la part de notre chiffre d'affaires réalisé à l'étranger est passée de 2 à 20 % grâce au Québec. Nous avons conclu des contrats avec Ericsson et CMC, une société travaillant sur l'électronique du cockpit avant des avions. Nous avons également participé à une délégation ministérielle au mois de mars, ce qui était intéressant en termes de crédibilité. À cette occasion, j'ai rencontré le PDG d'Air Liquide.

M. Pierre-Emmanuel AUGUSTIN . - Air Liquide est un grand groupe présent au Canada depuis 1937 où il exerce des activités très variées. Je suis chargé du développement international de l'activité « soins à domicile », comprenant le traitement de patients atteints de pathologies chroniques.

Chaque pays étant différent, il convient de mener une nouvelle étude pour chacun d'entre eux. Le Canada présente la particularité de comprendre plusieurs « pays ». Cette complexité doit être prise en compte. Elle implique de trouver des structures capables de mener des études de marché dans chacune des provinces. Par conséquent, le coût d'implantation s'en trouve multiplié.

Une fois le lancement effectué, la difficulté réside dans la gestion quotidienne des activités, les différentes entités pouvant fonctionner selon des modèles d'affaires variés. Vos ressources humaines doivent être capables de comprendre l'ensemble des spécificités. Il est également difficile de développer la R&D : ce qui est applicable dans une province peut ne pas l'être dans une autre.

L'activité soins à domicile présente la particularité de bénéficier de financements publics, puisqu'elle concerne le secteur de la santé. Par ailleurs, il importe de s'implanter localement : cela contribue à convaincre vos clients de votre sérieux et vous aide à mieux comprendre le marché et à vous y investir.

M. Axel BAROUX . - La variété des marchés a une incidence concrète sur l'organisation de l'entreprise.

M. Pierre-Emmanuel AUGUSTIN . - Je suis attaché au Canada pour des raisons personnelles. En outre, ce pays est très accueillant pour faire des affaires et offre une rare qualité de vie. Cependant, en fonction du secteur de votre entreprise, il peut se révéler complexe. L'importance des distances géographiques doit aussi être prise en compte. À ce titre, l'élaboration du business plan est essentielle.

M. Pierric BONNARD . - Je suis basé à Chicago, mais les équipes d'Ubifrance se répartissent sur l'ensemble du territoire américain et canadien. Je pilote donc une équipe travaillant de part et d'autre de la frontière. Cependant, les entreprises prises en charge sur le marché canadien le sont par des personnes basées au Canada.

La question de l'innovation est centrale dans le vaste marché nord-américain : l'économie y est ouverte et très compétitive. De plus, il est probable que vos concurrents y soient déjà implantés. Vous ne réussirez dans ce marché que si vous y apportez quelque chose de nouveau, ce marché étant rétif à l'intégration de produits déjà présents et dont les canaux de distribution sont solidement installés.

Les secteurs porteurs sont nombreux au Canada, ce qui est positif pour les entreprises françaises, compétentes dans de nombreux domaines. Cependant, l'industrie, l'aéronautique et l'automobile sont des secteurs clés de l'économie canadienne et présentent des opportunités considérables pour les entreprises françaises. Le Canada se positionne comme l'un des premiers pays au monde en matière d'aéronautique, Montréal concentrant 60 % de cette activité au niveau canadien.

Dans le secteur automobile, aucun constructeur français n'est présent au Canada. Les producteurs américains produisent davantage de voitures en Ontario que dans leur fief du Michigan. Les équipementiers et toute entreprise porteuse d'innovations, en termes de motorisation par exemple, ont des chances de réussite sur ce marché. Actuellement, une délégation d'Ubifrance de treize entreprises se trouve à Windsor sur le thème de l'allègement des véhicules, sujet central pour la mise en oeuvre des nouvelles réglementations en matière de réduction de la consommation et de l'émission des véhicules.

Le secteur énergétique balaie toutes les composantes du mix énergétique. Le Canada dispose de la troisième réserve mondiale de pétrole. Il est d'ailleurs fortement dépendant de ses exportations vers les États-Unis : 98 % du pétrole canadien exporté l'est à destination des États-Unis. Or, le Président Obama s'est fixé pour objectif de supprimer la dépendance énergétique des États-Unis vis-à-vis de l'étranger. Par conséquent, la question de l'avenir des exportations d'hydrocarbures canadiennes se pose. Il est envisagé d'exporter de façon offshore , d'où l'émergence de projets d'infrastructures ( pipelines , etc.). Ces projets constituent une opportunité pour les entreprises françaises, disposant d'un réel savoir-faire en la matière.

Par ailleurs, la taille du territoire, l'étalement urbain, l'isolement de certaines zones et l'expansionnisme vers le nord créent une appétence pour les énergies renouvelables. Un potentiel existe dans les domaines de l'éolien, du solaire, et particulièrement de l'hydroélectrique.

De plus, les Canadiens sont sensibles aux questions environnementales, leur sensibilité variant de l'est à l'ouest du pays. Celle-ci a vocation à croître, comme dans les autres économies développées. C'est pourquoi, des opportunités existent dans les domaines du tri des déchets, de l'efficacité énergétique et des matériaux renouvelables pour le secteur de la construction.

Enfin, les opportunités concernent aussi les infrastructures de transport : le Canada est un vaste pays, dans lequel le commerce est très établi, florissant et où le trafic transfrontalier est dense. Plusieurs projets de lignes de train à grande vitesse s'affrontent. Il est d'ailleurs surprenant que le Canada ne soit pas déjà équipé en la matière. Ce sujet génère des débats politiques : il paraît évident en termes de trafic et d'aménagement du territoire de relier Québec, Montréal, Ottawa, Toronto et Windsor, situé à la frontière américaine, alors que certains Québécois souhaitent davantage privilégier l'axe Montréal-Boston-New-York. Ces deux projets devraient finalement être mis en oeuvre et créeront donc des opportunités pour les entreprises françaises. En matière de transport urbain, les entreprises françaises ont récemment enregistré de beaux succès : le duo Alstom-Véolia a remporté le marché de la construction du tram-train d'Ottawa, tandis que le renouvellement de la flotte de métros de Montréal sera effectué dans le cadre d'un accord conjoint entre Alstom et Bombardier.

M. Etienne DUBREUIL . - Un restaurateur français à Montréal a été surpris d'entendre trois de ses clients qualifier sa nourriture d'« écoeurante ». Or, pour un Québécois, « écoeurant » signifie « merveilleux ». La question du langage est donc essentielle.

Par ailleurs, le Canada est perçu comme le petit cousin des États-Unis, ces derniers l'ayant traité comme tel. Cependant, le Canada est capable d'exporter son pétrole vers la Chine via les pipelines de l'ouest. En effet, la Chine s'intéresse au pétrole autant que les États-Unis. C'est pourquoi ce secteur présente de nombreuses opportunités.

Il convient de distinguer les Américains des Canadiens. L'« action de grâce » au Canada, et au Québec en particulier, est un congé statutaire ; aux États-Unis c'est une opportunité d'affaires. Noël est une grande fête religieuse au Canada, même pour les personnes non catholiques ; pour les Américains, c'est une opportunité pour faire des affaires. Enfin, le domaine de l'édition au Canada relève de la culture, celle-ci devant être protégée ; pour les Américains, c'est également une opportunité commerciale.

Pour réussir au Canada, les Français doivent compter sur l'habileté de la Délégation du Québec présente à Paris. Je salue d'ailleurs nos fonctionnaires, tant à l'étranger qu'au Canada, qui sont bien formés, compétents et motivés. Ils feront le nécessaire pour vous donner les informations pertinentes, vous orienter et vous aider à procéder au décantage préalable à toute arrivée dans un endroit inconnu.

L'arrivée des Français au Québec se déroule rarement comme ils l'avaient prévue. Ils doivent être conscients qu'ils devront s'adapter aux standards nord-américains des technologies de l'information et de la communication et des systèmes informatiques. Cette réalité les décourage habituellement alors qu'elle constitue une extraordinaire opportunité.

Je recommande d'abord aux Français de s'allier avec un groupe québécois ou canadien et de faire de la recherche de façon intelligente. J'admire les réseaux universitaires, mais ils sont peuplés de professeurs souhaitant uniquement publier. Or, tant qu'aucun brevet n'a été déposé, le client ne souhaite pas la publication des études.

Depuis plusieurs années, j'encourage les entreprises exerçant dans le domaine du savoir et de la propriété intellectuelle à passer par les collèges d'enseignement général et professionnel (CEGEP). Les 48 collèges d'enseignement général sont situés stratégiquement au Québec et ont chacun une vocation spécialisée. Ils disposent de centres de transfert de technologie non intéressés à la propriété intellectuelle de la personne avec laquelle ils mènent la recherche. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de négocier des licences avec leurs équipes hautement qualifiées. L'enjeu pour ces dernières réside dans l'obtention de contrats de recherche afin de confier du travail à leurs étudiants.

Enfin, la population du Canada est très disparate. Les Canadiens sont de cultures différentes. Le Canada inclut également les peuples autochtones. Les axes de développement que le Canada et le Québec présentent actuellement comme des priorités se situent au nord de la chaîne des grandes villes : au-dessus du 49 ème parallèle pour le Québec, avec le plan « Nord pour tous ». Toutes les infrastructures doivent y être construites : le Gouvernement du Québec ne semble pas lui-même réaliser que les projets présentés ne pourront pas être menés à bien sans infrastructures.

Parmi mes clients se trouvent, par exemple, des sociétés minières ; ce secteur nécessite des transports ferroviaires. Ce type d'infrastructures doit être conçu sur une superficie considérable de territoires non développés. Ces derniers font cependant l'objet de revendications territoriales de certains peuples autochtones. Lorsqu'une entreprise passe sur le territoire de l'une des sept tribus d'Inuits, il lui est demandé de faire des concessions. Sodexo, grande société française qui s'est notamment spécialisée dans le management et la nourriture des camps miniers, a été contrainte d'employer un pourcentage déterminé de ces populations afin d'obtenir les contrats.

M. Axel BAROUX . - Est-ce pour cette raison que Sodexo est le premier employeur français au Canada ?

M. Etienne DUBREUIL . - Probablement. Le succès de Sodexo s'explique par la compréhension de trois éléments concernant le domaine minier : ses ressources humaines doivent comprendre des Canadiens connaissant le territoire ; le domaine de la gestion doit inclure des femmes, la parité étant importante au Canada ; les autochtones doivent être respectés. J'admire d'ailleurs les tentatives de conservation des cultures autochtones.

Le savoir-faire français ne doit pas être importé tel quel au Québec, mais faire l'objet de nombreux aménagements afin que les entreprises françaises puissent s'intégrer beaucoup plus facilement au tissu social canadien. Une fois passé le purgatoire canadien, il est possible de rejoindre l'enfer américain.

M. Axel BAROUX . - Lors de la présentation d'une innovation au Canada, à quels éléments faut-il particulièrement prêter attention ?

M. Etienne DUBREUIL . - La propriété intellectuelle est protégée. Il arrive régulièrement qu'un fabricant français vienne au Canada avec une marque de commerce française non protégée au Canada. Le problème se pose aussi pour les sites Internet, ce qui occasionne une perte de temps et d'argent, et des frais d'avocat. C'est pourquoi, nous nous assurons que nos clients ont bien protégé leur marque avant même de commencer leur projet au Canada.

En outre, la gestion des ressources humaines doit être pensée, celle-ci étant sensiblement différente au Canada, aux États-Unis, en Colombie britannique ou au Québec. La familiarité des Canadiens ne témoigne ni d'un manque de respect, ni d'une réelle amitié ; elle est uniquement une façon de s'exprimer.

Les entrepreneurs français ne se posent pas assez la question de savoir ce qu'ils ont à commercialiser. De nombreux entrepreneurs du secteur du business to consumer (B2C) pensent à tort que l'américanisation du script de leur produit constitue un gage de succès. Au Québec, il importe que vous apportiez à la fois une innovation, un produit différent des autres et une opportunité d'affaires pour les Canadiens. De plus, les Québécois souhaitent conserver la dimension francophone du produit comme un signe distinctif : il n'est pas nécessaire de donner un nom anglophone à votre produit.

Vous devez également réfléchir au fait que le Québec est une province concentrant de nombreuses compétences. Le niveau de scolarité y est élevé. Il convient de vous faire aider localement afin d'identifier les ressources locales pouvant vous accompagner sur le terrain. La réussite de votre produit en France ne constitue pas un gage de succès au Québec.

La semaine dernière, je me suis rendu au Labrador et à Terre-Neuve où des mines sont en cours de développement. Ces territoires miniers sont situés entre le Québec et Terre-Neuve : pour y développer un projet, il est nécessaire de réussir à convaincre les représentants de ces provinces. Pour cela, il convient d'utiliser les ressources publiques disponibles au Québec. Par exemple, la mission d'Investissement Québec, bientôt renommé Banque de développement économique du Québec, sera prochainement encore plus articulée et flexible : cette entité est l'allié de toutes celles et ceux qui souhaitent implanter une entreprise au Québec. Il en existe le pendant au niveau fédéral et dans chacune des provinces.

Enfin, il convient de disposer d'un bon produit ou d'une bonne idée.

M. Etienne JULIOT . - En France, nous bénéficions d'une culture d'ingénierie plus forte que dans n'importe quel autre pays au monde. Dans le domaine culturel, il existe la « french touch » : le regard nouveau que des artistes comme les Daft Punk apportent à un domaine existant. L'ingénierie est également l'objet d'une « french touch » très recherchée. Cette caractéristique permet d'offrir un produit innovant répondant aux besoins, mais il convient de prendre garde à la façon de la présenter.

M. Etienne DUBREUIL . - Si vous avez ce type de projet, il vous faut contacter des personnes travaillant à Polytechnique à Montréal. Cette dernière est la première institution québécoise à avoir créé un centre de transfert de technologies dans lequel on parle le même langage que vous.

M. Etienne JULIOT . - Si je vends mes outils de modélisation à Alstom, celui-ci achète également un ou deux mois d'adaptation de l'outil au secteur ferroviaire. En revanche, Bombardier souhaite que le produit lui soit vendu déjà prêt et adapté à son secteur : il nous faut alors prendre le risque d'adapter le produit sans garantie d'achat. Ce que nous considérons comme une prestation en France est perçue au Canada comme de la recherche.

M. Pierre-Emmanuel AUGUSTIN . - Le Québec est souvent considéré comme la solution évidente pour pénétrer le marché canadien, alors qu'elle peut être risquée. Les entreprises font en effet trop souvent des raccourcis dangereux. De plus, une fois le marché canadien intégré, les États-Unis sont perçus comme une cible facile à atteindre. Au contraire, sur une carte américaine, l'absence de représentation du Canada au nord de la frontière américaine témoigne du manque de considération des Américains pour les Canadiens. Les Canadiens ne souhaitent d'ailleurs pas être assimilés à des Américains.

M. Frédéric BOVE . - Je travaille pour un pôle de recherche à HEC Montréal, MOSAIC, travaillant sur le management de la créativité. Ce domaine inclut les entreprises culturelles et créatives, mais pas seulement. En effet, HEC Montréal est une grande école de commerce nord-américaine : nous travaillons également sur la gestion, en particulier de l'entreprise.

Au sein de HEC, il existe des programmes en silos, par compétence, et des pôles de recherche transversaux et multidisciplinaires. Mon domaine relève ainsi de la gestion, de l'économie, du marketing, de la communication, de l'urbanisme, etc. Ce pôle a été créé compte tenu du développement rapide des technologies de l'information, de la globalisation, de l'évolution des usages et des besoins en termes de consommation et environnementaux et de la succession rapide des crises économiques. Ces éléments générant un climat d'incertitude et d'instabilité, une adaptation stratégique des organisations est nécessaire.

Après la crise économique de 2008, nous nous sommes rendu compte que les organisations qui y avaient le mieux résisté à Montréal étaient les industries créatives. Ces dernières connaissaient même une forte croissance. Le magazine Forbes a mené une enquête montrant qu'au moins 70 % des bénéfices des entreprises proviennent de produits qui n'existaient pas cinq ans auparavant. Ces produits créent une rupture de consommation et d'usage.

Un exemple très connu de rupture est celui d'Apple : personne n'avait prévu qu'un fabricant d'ordinateur ruinerait l'industrie du disque et de la musique. Celui-ci a créé une plateforme virtuelle de vente qui a soudainement bouleversé le business model de cette industrie. Comment anticiper ce type d'évolution et s'y adapter ? C'est dans ce contexte que l'économie créative a émergé dans le domaine du management.

Le management créatif consiste à donner à l'entreprise la maîtrise stratégique de l'adaptation au changement. Il implique un équilibre entre l'analytique et l'intuitif. Le Cirque du soleil, par exemple, génère beaucoup d'argent, tandis qu'Ubisoft a vendu des millions d'exemplaires des jeux Assassin's Creed et Far Cry , produits grâce à des budgets colossaux. Ubisoft manifeste une rigueur exemplaire dans la gestion de cette production et de ses investissements.

Il convient de laisser cette créativité s'exprimer. Nous travaillons beaucoup sur l'origine de l'idée, la façon dont elle est créée, captée et conservée. Lorsqu'une entreprise travaille sur un projet et qu'elle a plusieurs idées, elle en garde certaines : que faire alors des autres ? Une idée peut ne pas être pertinente en l'absence de la technologie adéquate pour la réaliser, mais le deviendra dans dix ans.

Au niveau universitaire, néanmoins proche de l'entreprise, nous mettons en place des outils, de la recherche-action, des formations et des séminaires pour favoriser ce changement et le faire comprendre à l'entreprise qui le souhaite. Cette dernière peut alors s'adapter en interne et en externe.

Par ailleurs, l'écosystème montréalais est très intéressant. En effet, ce territoire est historiquement un territoire d'immigration, industriel et d'innovation. Ses habitants ne craignent pas les interactions culturelles et savent les appréhender. Les ingénieurs savent communiquer entre eux. En revanche, un ingénieur, un designer et un peintre ne le savent pas forcément. Or, les grandes innovations de demain seront issues de l'intermédiation entre des personnes différentes.

Enfin, le pôle de recherche a formé plus de trois cents gestionnaires d'Ubisoft. Ces derniers sont désormais conscients de la manière dont ils doivent investir. Cette entreprise est consciente que la créativité d'aujourd'hui ne sera pas celle de demain et qu'elle doit se remettre en cause. Le Cirque du soleil souffre d'ailleurs d'une crise créative. En outre, l'hôpital pour enfants Sainte-Justine de Montréal est actif dans le domaine de la recherche. Il travaille actuellement avec le secteur des effets spéciaux afin d'appliquer la « technologie de l'avatar » à des enfants souffrant de pathologies psychiatriques et ne pouvant communiquer avec autrui. Il travaille aussi sur la modélisation d'une chambre idéale pour les enfants.

Notre métier consiste donc en la création d'un écosystème d'échanges, de partage, de rencontre, de formation et de transfert de connaissances.

M. Axel BAROUX . - Vous travaillez actuellement avec Sanofi-Pasteur et Ubisoft. Les outils mis en place sont-ils évolutifs ?

M. Frédéric BOVE . - Sanofi-Pasteur est un cas de recherche-action. Cette entreprise nous a demandé de travailler avec des étudiants de HEC pour lui remettre des solutions sur différents points. Elle sélectionnera et appliquera ensuite ce qui l'intéresse. De même, nous sommes en discussion avec Chanel pour travailler sur des processus d'innovation. En outre, Bombardier nous a demandé de l'aider sur sa gestion de la connaissance, notamment le transfert et la conservation.

Dernièrement, nous avons également mis en place des dispositifs de partenariats et de conférences et une école d'été Montréal-Barcelone de plus en plus sollicitée par des entreprises, notamment françaises. Cette école d'été accueille 90 personnes : un tiers d'étudiants, un tiers d'universitaires et un tiers de professionnels internationaux. Elle comprend un travail de formation sur le management de la créativité en gestion.

Des entreprises présentent aussi leur processus de création : Bombardier, Ubisoft, les Caisses Desjardins, etc. Cette démarche est répétée à Barcelone la semaine suivante. Des personnes ne se rencontrant pas habituellement sont réunies autour de thématiques. Les processus de gestion sont examinés ; une banque peut s'intéresser à un processus mis en oeuvre par Ubisoft et dont un élément renvoie à un problème auquel elle est confrontée.

Par conséquent, nous créons un écosystème dans lequel nous voyons des échanges s'installer et des problématiques apparaître.

M. Axel BAROUX . - Je suppose que ce dispositif a un coût.

M. Frédéric BOVE . - Oui, mais il importe d'examiner aussi ce qu'il rapporte. Je ne peux pas préciser ce coût, mais un étudiant travaillant en recherche-action coûte de 15 000 à 20 000 dollars, 30 000 dollars s'il fait une thèse.

Nous répondons aussi à des demandes ponctuelles : Ubisoft nous a demandé d'élaborer un programme de formation particulière. Nous avons formé les équipes de Montréal et de Québec et nous formerons l'équipe de Toronto. Thalès nous a rendu visite l'année dernière dans le cadre d'une semaine de travail, de formation et de visites d'entreprises créatives. L'École des mines a également travaillé avec nous deux mois auparavant. Trois personnes en post-doctorat de l'École des mines ont d'ailleurs candidaté chez Ubisoft. Ce type de passerelle est intéressant.

M. Etienne JULIOT . - En France, nous avons réussi à établir des passerelles entre des compétences régionales via les pôles de compétitivité, qui permettent de structurer des entités ayant des compétences communes. Chaque pays européen disposant de ce type de pôles, ces derniers ont été mis en relation à travers l'organisme ITD Labs : chaque pays identifie une dizaine d'entreprises par an qu'il souhaite promouvoir dans d'autres pays, ceux-ci les accueillant et les présentant à d'autres entreprises. Cette démarche d'essaimage est appelée la « cross fertilisation » . Or, celle-ci n'existe pas entre le Canada et la France.

Un intervenant dans la salle . - Afin de créer des passerelles entre les créneaux d'excellence et les pôles de compétitivité, nous avons organisé deux symposiums franco-québécois : au Québec en 2008 et en France en 2010. De nombreux échanges ont lieu entre ces deux types de structures.

M. Etienne JULIOT . - L'ensemble des pôles de compétitivité ne connaît pas ce dispositif.

M. Axel BAROUX . - Il existe également les créneaux d'excellence au Québec.

Un intervenant dans la salle . - De nombreux partenariats ont cours entre la France et le Québec. Par exemple, le Fonds franco-québécois de coopération décentralisée incite les pôles de compétitivité et les créneaux d'excellence à travailler sur des projets financés pour moitié par la France et pour moitié par le Québec.

M. Pierric BONNARD . - À titre d'exemple, hier, au Salon du Bourget, Aéro Québec a signé un accord de partenariat avec le cluster « Aerospace Rhône-Alpes ».

Un intervenant dans la salle . - Je représente le pôle de compétitivité CD2E situé dans le Nord-Pas-de-Calais. Celui-ci a un accord avec le Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTEI) de Sorel-Tracy au Québec.

M. Axel BAROUX . - Un VIE, ici présent, va se rendre au Québec pour le compte de votre pôle.

Un intervenant dans la salle . - Je travaille pour le conseil régional du Nord-Pas-de-Calais, dans le cadre d'un volontariat international en administration (VIA), puisque le contrat a été signé par Ubifrance et le conseil régional.

Un autre intervenant dans la salle . - Le pôle d'excellence Transports terrestres situé à Drumondville, fédérant l'industrie des véhicules industriels et du transport sur rails et sur routes, a établi plusieurs collaborations avec différents pôles de compétitivité en France. Un accord a par exemple été signé quelques mois auparavant avec la région Bourgogne Franche-Comté, tandis qu'une collaboration existe depuis plusieurs années avec Lyon Urban Truck & Bus, celui-ci travaillant sur le véhicule de transport public.

Ces collaborations portent sur le volet recherche et développement et permettent des déplacements d'entreprises à l'occasion d'événements organisés par ces pôles. Par exemple, le pôle d'excellence « Transports terrestres » organise différents événements pour lesquels il fait appel à des conférenciers.

M. Etienne JULIOT . - Les patrons de PME ont besoin de rapidité ; c'est pourquoi, le principe du guichet unique mis en place au niveau européen est essentiel. Dans le cadre du Québec, j'ignore à quel interlocuteur unique m'adresser afin de connaître les partenariats en cours entre clusters. Ce rôle peut probablement être assumé par BPI France.

M. Frédéric BOVE . - Une expérimentation est en cours à Montréal sous la forme d'un « Quartier de l'innovation » : l'entreprise est invitée dans un lieu proche de l'université. Cette initiative a été lancée par l'École de technologie supérieure (ETS), grande école d'ingénieurs québécoise, et l'Université McGill, très grande université nord-américaine et mondiale, puisqu'elle se trouve parmi les vingt premières universités dans le classement de Shanghai. Au sein de ce quartier situé dans le centre-ville de Montréal, le processus entrepreneurial est pris en charge, de la gestion de l'idée à l'incubateur, en passant par la start-up .

Auparavant, le chercheur se rendait dans l'entreprise ; l'inverse est désormais possible. Le dialogue entre l'université et l'entreprise est ainsi encouragé et perfectionné, du travail est créé pour les étudiants s'exerçant sur des cas pratiques prototypés et testés sur place.

Cette démarche témoigne d'un changement intéressant des pratiques et des mentalités. En outre, MOSAIC vient de signer un protocole avec le gouvernement wallon afin d'accompagner la Wallonie, reconnue comme territoire créatif par l'Union européenne. Cette reconnaissance concerne les processus d'innovation et de créativité : incubation, start-up , formation.

TABLE RONDE 6 - FINANCER SON DÉVELOPPEMENT À L'INTERNATIONAL, OUTILS DE FINANCEMENT EXISTANTS ET ACCORDS BILATÉRAUX EN VIGUEUR

Table ronde animée par M. Axel BAROUX, directeur d'Ubifrance Canada

Ont participé à cette table ronde :

M. Éric TAINSH, direction de l'international, BPI France
Mme Lucia BALDINO, directrice du bureau de représentation européen, Mouvement des caisses Desjardins
M. Jean-Marc ROQUELAURE, président du Groupe Réactis
M. Dominique TRAN, associé, Demers Beaulne LLP

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M. Axel BAROUX . - Les Caisses Desjardins représentent la principale banque coopérative du Québec.

BPI France, nouvelle banque publique d'investissement, a été créée par décret le 31 décembre 2012 et mise en place le 22 mai dernier. Depuis le début du mois de juin, la BPI dispose d'antennes en région fonctionnant grâce à des chargés d'affaires internationaux d'Ubifrance.

M. Éric TAINSH . - L'inauguration du siège de BPI France a eu lieu le 19 juin dernier en présence de plusieurs ministres. Les antennes d'Alsace, Nancy, Rouen, Montpellier et Lyon ont également été ouvertes. Nous nous déployons très rapidement ; par conséquent, nous travaillons dur au service de ce projet exaltant.

Nous ambitionnons d'accélérer la croissance des entreprises, transformer le maximum de TPE en PME, le maximum de PME en ETI et le maximum d'ETI en grandes entreprises. À cette fin, nous disposons de moyens extraordinaires : l'aide à l'innovation, financée par un nombre limité de structures ; la garantie, par l'intermédiaire de laquelle nous accompagnons les banques dans le cadre de financements risqués ; le financement : les banques restant chargées des investissements concrets, nous nous concentrons sur les investissements immatériels ; des capacités d'investissement en fonds propres considérables : 12 milliards d'euros sur les cinq prochaines années ; toute la palette d'accompagnement et de services financiers publics à l'international sous le label BPI France Export.

M. Axel BAROUX . - Quelles conditions de prêt une PME souhaitant s'implanter au Canada peut-elle espérer obtenir ?

M. Eric TAINSH . - Au sein de BPI France, nous tenons à aider les entreprises en termes de trésorerie. En effet, Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, a affirmé que 70 % des entreprises s'implantant à l'international ne poursuivent pas leur implantation l'année suivante, le plus souvent par manque de trésorerie. Par conséquent, nous leur recommandons d'anticiper en contactant leur banque et en prenant les mesures conservatoires nécessaires : cession de bail sur l'immobilier, crédit d'impôt recherche, crédit d'impôt compétitivité-emploi, mobilisation de créances sur le secteur public ou sur des grands comptes. Notre fonds de garantie permet également aux entreprises d'avoir recours au découvert bancaire. Nous pouvons aider les entreprises à faire transformer par leur banquier ce découvert bancaire en financement sur deux ans en offrant une garantie bancaire de 70 %.

Ainsi, si une entreprise a un découvert bancaire de 100 000 euros, il est possible de le transformer en financement à moyen terme, sur deux ans. Le banquier ne prend alors en charge que 50 000 euros de risque. Une fois sa trésorerie saine, une entreprise jugeant que le Canada est un pays intéressant peut profiter de nos capacités d'intervention. En effet, nous disposons d'une gamme complète d'accompagnement à l'international et de produits financiers spécifiques. En termes de prospection, quarante personnes d'Ubifrance ont rejoint notre réseau. Ces dernières sont capables d'accompagner les entreprises pour bâtir des business plans. De plus, l'ensemble du réseau BPI France s'est équipé en outils de visioconférence, permettant à un entrepreneur, quelle que soit sa localisation, d'être mis en contact avec les collaborateurs d'Ubifrance partout dans le monde. Les circuits de communication sont de fait considérablement réduits.

Également disponible en matière de prospection, l'assurance Coface permet à une entreprise de faire prendre en charge le risque financier relatif à la prospection : en cas de succès, l'entreprise rembourse l'indemnité dans sa totalité ; en cas de succès réduit, l'indemnité est remboursée partiellement ; en cas d'échec, l'entreprise n'est pas contrainte de la restituer.

Nous aidons aussi les entreprises à financer leur développement international. Nous sommes particulièrement à la recherche de « champions » de l'export. Notre directeur général, M. Nicolas Dufourcq, nous rappelle régulièrement que des entreprises comme LVMH étaient très talentueuses dans les années 1980 et ont atteint un niveau de réussite exceptionnel. Pour réussir et installer une marque sur le marché nord-américain, en Chine, dans l'ASEAN ou en Amérique latine, quatre à cinq ans sont parfois nécessaires. Par conséquent, ce développement est coûteux.

Nous contribuons donc au capital des entreprises selon quatre principes : nous sommes toujours minoritaires ;  nous finançons l'innovation : nous prêtons attention à l'avenir d'un projet précis plutôt qu'aux performances financières de l'entreprise ;  nous sommes patients : nous ambitionnons d'être une grande banque publique d'investissement et de fournir des ressources aux entreprises ; les taux de rentabilité ne sont pas excessivement exigeants.

Cependant, certains entrepreneurs souhaitent éviter de vendre une partie de leur entreprise. C'est pourquoi, nous avons développé une alternative très attractive : nous accordons des prêts sur sept ans avec un différé d'amortissement, remboursable à partir de la troisième année. Ce prêt offre les mêmes avantages que l'entrée de la BPI au capital de l'entreprise et laisse le temps à l'entreprise d'obtenir de premiers résultats avant de devoir le rembourser.

En outre, dans toutes les directions régionales de BPI France, sont désormais disponibles tous les dispositifs aidant les entreprises à obtenir des contrats. En effet, lorsqu'une entreprise soumissionne, il lui faut donner des garanties. Lorsqu'elle gagne un contrat, elle souhaite obtenir des acomptes : elle doit alors fournir une garantie de restitution d'acomptes, mais également des garanties de performance et de bonne fin. Pour cela, l'entreprise peut bénéficier des garanties de caution export de la Coface. De plus, l'assurance-crédit de la Coface lui permet de se protéger contre le risque d'interruption du contrat. Si elle doit consentir un crédit à un acheteur pour conclure l'affaire, nous pouvons garantir ce crédit grâce aux garanties de caution. Enfin, si l'entreprise doit convaincre un banquier d'accorder un crédit à son acheteur, nous pouvons aussi intervenir.

Par ailleurs, nous sommes convaincus de l'intérêt pour une entreprise de s'implanter à l'étranger. Cela permet de maîtriser des droits de douane souvent élevés, les contraintes normatives, qui sont souvent des droits de douane déguisés. Toutefois, s'implanter à l'international est risqué, même dans un pays stable comme le Canada. Il nous est possible de garantir les fonds consacrés à cet investissement. Par exemple, dans le cadre d'un achat d'une entreprise au Canada pour un million de dollars, cette somme peut être remboursée à hauteur de 50 % en cas d'échec.

Enfin, nouer des partenariats technologiques constitue une manière pertinente d'intégrer un marché. BPI France bénéficie d'ailleurs d'un accord conclu avec son homologue canadien, le Conseil national de recherches Canada (CNRC), permettant à une entreprise de technologie en France passant un accord de partenariat technologique avec une entreprise canadienne de voir sa quote-part financée sous forme d'avance remboursable par BPI France tandis que l'entreprise canadienne est financée par le CNRC.

M. Axel BAROUX . - Vous avez utilisé les services d'Oseo en tant qu'entrepreneur, qu'en pensez-vous ?

M. Jean-Marc ROQUELAURE . - Oseo m'a accompagné à deux reprises avec succès en garantissant des prêts que j'ai contractés. Ses collaborateurs ont fait preuve de réactivité en termes de délai et d'acceptation de mon dossier. Cette contribution a facilité la prise de risque, le financement de l'immatériel étant souvent peu aisé.

M. Axel BAROUX . - Le Mouvement des caisses Desjardins est le plus grand groupe bancaire au Canada, avec un actif global de près de 200 milliards de dollars.

Mme Lucia BALDINO . - Les institutions financières canadiennes ont longtemps été critiquées pour leur prudence excessive, notamment au cours de l'euphorie financière du début des années 2000.

Désormais, elles sont davantage présentées comme des exemples à suivre, ayant réussi à traverser la crise de façon exemplaire. Ainsi, leur attitude conservatrice leur a permis de rester solides financièrement et de poursuivre le financement des entreprises au Canada malgré les crises économiques. Cela n'a pas été le cas de plusieurs institutions financières européennes et américaines. Cette différence entre le système bancaire canadien et le système bancaire européen est flagrante.

De plus, le Mouvement Desjardins se différencie par sa dimension coopérative. Ce Mouvement, créé par Alphonse Desjardins 113 ans auparavant, s'est fortement inspiré du modèle européen. Une étude récemment publiée par les Nations unies a mis en évidence le fait que les coopératives financières ont enregistré de meilleures performances que les banques privées pendant la crise. Par conséquent le choix d'un banquier est essentiel lorsqu'une entreprise s'installe au Canada.

En outre, les pratiques françaises et canadiennes sont très différentes. Les entreprises françaises ont l'habitude d'avoir plusieurs banquiers. Il en va différemment pour les entreprises canadiennes, en particulier de petite ou moyenne taille. Les clients sont généralement fidèles à leur banquier. Le choix de sa banque impacte l'ensemble des activités de l'entreprise et les montages financiers dont elle bénéficiera.

Il importe de bien se préparer avant de rencontrer son banquier. En effet, un banquier reçoit facilement un entrepreneur. En revanche, ce dernier dispose d'à peine dix minutes pour le convaincre de soutenir son projet. Être entouré d'un expert fiscaliste, d'un comptable et d'un avocat compétents est essentiel à une entreprise pour bâtir un plan d'affaires aux normes nord-américaines.

Il est relativement simple d'ouvrir un compte au Canada. Cependant, l'historique de crédit compte au Québec : une société non connue rencontrera davantage de difficultés pour obtenir un financement. Il est donc essentiel de fournir des garanties. Le Mouvement Desjardins travaille énormément avec ses partenaires, les comptes financiers complémentaires en France et au Canada, notamment Investissement Québec qui offre plusieurs garanties aux institutions financières. Ces sources financières complémentaires donnent accès à de nombreux crédits d'impôt et dispositifs de financement. Ces outils sont très transparents ; par conséquent, j'incite les entreprises à y recourir afin de compléter leur financement.

Afin de faciliter ce financement, le Mouvement Desjardins dispose de plusieurs partenaires en Europe, en particulier le Crédit mutuel CIC depuis un an. Ce partenariat nous a permis de mettre en place différentes pratiques d'accompagnement des clients du Crédit Mutuel CIC souhaitant s'implanter au Canada ou aux États-Unis et à l'inverse, de nos clients canadiens souhaitant s'implanter en Europe.

Certaines facilités ont été mises en place en termes d'ouverture de compte et de trésorerie, ainsi que des grilles de tarification privilégiées. Les mouvements de fonds entre la maison-mère et sa filiale sont ainsi simplifiés.

M. Axel BAROUX . - Le Mouvement Desjardins travaille depuis longtemps avec des partenaires français, mais est présent en France uniquement depuis le mois de septembre 2011. Cette présence physique en France a-t-elle eu un impact significatif sur l'accompagnement des entreprises françaises ?

Mme Lucia BALDINO . - Le Mouvement Desjardins, comme les autres institutions financières canadiennes présentes en France, ne manque pas de travail. En effet, l'économie canadienne attire les entreprises et les entrepreneurs. Depuis l'inauguration d'un bureau à Paris, notre niveau d'activité est considérable. De nombreuses entreprises nous ont contactés dès les premiers mois d'activité et sont encore plus nombreuses à le faire actuellement. Nous envisageons d'ailleurs d'agrandir notre bureau parisien. Ce succès témoigne de l'intérêt grandissant des Français pour le Canada et de bénéficier de services bancaires et financiers.

Nous avons accompagné plusieurs entreprises présentes aujourd'hui au cours des derniers mois, soit en leur fournissant des informations pertinentes, soit en les mettant en relation avec nos partenaires français ou canadiens. Cet accompagnement concerne tant les ouvertures de compte que la recherche de financement et des services connexes.

Notre présence en France nous permet d'offrir un service de proximité aux entreprises, au moment où elles en ont besoin.

M. Jean-Marc ROQUELAURE . - Réactis est une société de services travaillant essentiellement dans l'univers de l'aéronautique. A l'occasion d'Aéro Montréal au mois de décembre 2011, nous avons rencontré de nombreuses sociétés canadiennes qui nous semblaient être des clients potentiels. Cependant, nous n'y avons alors pas conclu d'affaires.

Avec l'aide d'Ubifrance, nous sommes retournés au Canada au mois d'octobre 2012 afin d'être mis en relation avec des sociétés canadiennes pouvant nous accompagner dans nos prospections. Dans ce cadre, nous nous sommes rapprochés de la société Aircraft Maintenance Systems, avec laquelle nous avons conclu une transaction le 31 mai 2013.

M. Axel BAROUX . - Vous y avez été aidé par Oseo BPI.

M. Jean-Marc ROQUELAURE . - J'ai été aidé par MM. Dominique Tran et Normand Royal, qui ont contribué à rapprocher des personnes parlant français mais n'ayant pas la même culture et ne se comprenant donc pas forcément. D'autant plus que la culture bancaire canadienne est très différente de la culture bancaire française. Le vendeur canadien ne comprend pas pourquoi l'acheteur français met tant de temps à obtenir des fonds. L'entremise de M. Normand Royal nous a permis d'expliquer cette situation à notre vendeur.

Des avocats internationaux français ne nous auraient peut-être pas permis de réussir cette opération.

M. Axel BAROUX . - Quelles ont été les clés de la réussite de l'acquisition réalisée par Réactis ?

M. Dominique TRAN . - L'équipe de direction était bien préparée à cette opération et a respecté les règles de l'art d'une transaction d'acquisition ; le financement a notamment été présenté au banquier français. Par conséquent, elle disposait de tous les repères nécessaires pour négocier avec l'entreprise canadienne cible. De plus, le fait de travailler avec des spécialistes canadiens a contribué à cette réussite.

M. Jean-Marc ROQUELAURE . - Nous avions vécu une expérience similaire en Allemagne et en Italie, où nous nous étions adressés à des partenaires locaux. Je crois davantage en l'efficacité de la proximité qu'aux relations transnationales. En effet, les différences culturelles compliquent la compréhension mutuelle.

M. Axel BAROUX . - Qu'est-ce qu'un bon plan d'affaires ?

M. Dominique TRAN . - Un bon plan d'affaires canadien consiste en la description précise des opérations et en la réalisation d'une étude de marché intégrant l'ensemble des éléments dont le banquier a besoin. Il convient aussi de définir comment l'entreprise compte approcher le marché canadien. Il comprend des bilans et des prévisions financières sur trois ans, dont deux ans détaillés de façon mensuelle. En effet, le banquier prend sa décision en fonction de l'étude de marché et de l'analyse des produits.

Mme Lucia BALDINO . - Le plan d'affaires doit aussi être succinct et aller à l'essentiel.

M. Eric TAINSH . - Un bon plan d'affaires doit avoir pour effet une augmentation du rythme cardiaque du banquier lorsqu'il le lit. La raison d'être de BPI France est de prendre des risques. En matière de business plan export, la visioconférence permettra de tester les hypothèses formulées par un entrepreneur auprès d'un collaborateur d'Ubifrance, mais aussi auprès d'acheteurs et d'experts partout dans le monde.

Mme Lucia BALDINO . - Le Mouvement Desjardins est aussi reconnu pour entreprendre des projets dans lesquels d'autres institutions financières ne se risqueraient pas. En 1984, M. Guy Laliberté s'est adressé aux banquiers pour réinventer l'histoire du cirque dans le monde ; alors que les autres institutions financières n'étaient pas enclines à supporter ce projet, nous avons pris le risque de soutenir ce qui allait devenir le Cirque du soleil. Si nous ne l'avions pas fait, nos PME n'auraient pas atteint un tel niveau mondial.

Le Mouvement Desjardins dispose également d'un département dédié au développement de capital risque, ce qui est unique parmi les institutions financières canadiennes.

Mme Dominique TRAN . - Dans le cadre d'un business plan canadien, certaines règles doivent être respectées en termes de ratios financiers. Si vous présentez un plan risqué à un banquier de Montréal, celui-ci sera rapidement connu de tous les banquiers de la ville. Le plan doit être élaboré et validé de manière pertinente.

M. Axel BAROUX . - Avec de tels appuis, vous êtes condamné au succès.

M. Jean-Marc ROQUELAURE . - Oui. Cependant, je n'ai pas encore emprunté d'argent aux banquiers canadiens. J'ai présenté quatre dossiers à des banquiers français, qui ont tous été acceptés.

Un intervenant dans la salle . - Le problème des start-up réside dans le refus des banques de financer le capital développement, celui-ci étant un investissement immatériel. Quelle est la position de la BPI à l'égard du financement des forces de vente, de recherche, etc. ?

M. Eric TAINSH . - L'aide à l'innovation de BPI France sert à financer la recherche. Afin de financer la R&D et le lancement industriel et commercial, une entreprise doit ouvrir son capital, même si un entrepreneur rechigne souvent à le faire trop tôt. BPI France disposera de 500 millions d'euros sur les cinq prochaines années dédiés au capital-risque.

Un intervenant dans la salle . - En France, comme dans la plupart des pays européens, nous utilisons le réseau Swift pour faciliter les paiements de nos clients à l'étranger. En revanche, les banques américaines ne l'utilisent généralement pas. Qu'en est-il des banques canadiennes ?

Mme Lucia BALDINO . - Le Mouvement Desjardins est membre du réseau Swift , comme le sont probablement les autres institutions financières canadiennes. Nous procédons régulièrement à des virements, des bilans comptables, etc.

Un intervenant dans la salle . - Le prêt à l'innovation mis en place dernièrement est-il adapté à une PME ?

M. Eric TAINSH . - Ce prêt a été conçu pour les PME.

Un intervenant dans la salle . - Mais j'ai contacté Oseo dans ma région et je n'ai pas reçu de réponse claire concernant ce prêt.

M. Eric TAINSH . - Le prêt pour l'innovation est conclu pour sept ans, dont deux ans de franchise, pour financer le lancement industriel et commercial d'une innovation.

Un intervenant dans la salle . - Le taux étant d'environ 8 %, mon interlocuteur d'Oseo m'a demandé si ce taux était soutenable pour une PME. Qu'en pensez-vous ?

M. Eric TAINSH . - Ce financement est long et sans garantie ; le risque est par conséquent très élevé. Il est logique que le taux ne soit pas particulièrement avantageux. Néanmoins, il n'existe aucune alternative sur le marché. Par rapport à un découvert bancaire, ce prêt offre des conditions intéressantes. Évidemment, un prêt doit être remboursé ; c'est pourquoi, une certaine rentabilité est indispensable.

CLÔTURE

Mme Cécile DELETTRE . - En conclusion, nos cousins québécois nous ressemblent beaucoup mais ne fonctionnent pas selon les mêmes cadres de références. Il convient donc d'essayer de se comprendre et de se préparer. De nombreux intervenants sont membres de cabinets d'avocats, ce qui témoigne de l'importance du rôle de l'avocat sur ce marché. Le nombre d'avocats est d'ailleurs, me semble-t-il, équivalent au nombre total d'avocats en France, soit 40 000. Leur rôle y est différent et bien plus large qu'en France. Ils aident les entreprises à concrétiser leur projet.

Le jury a peiné à sélectionner le gagnant du prix du « Meilleur projet de prospection au Canada », l'ensemble des projets présentés étant très intéressants. Leur choix s'est finalement porté vers une structure que nous suivrons et accompagnerons, et qui nous donnera des résultats d'ici un an. Le gagnant est Gérard Di Mascio de SAM Instruments.

M. Gérard DI MASCIO . - Je remercie l'ensemble des intervenants qui m'ont beaucoup appris. Ces interventions m'aideront à mener une prospection à Montréal, plus accessible grâce à la langue française. Néanmoins, Toronto me semble aussi un lieu incontournable. Je découvrirai progressivement les autres provinces. Par ailleurs, je fais partie d'une société savante, dont la prochaine réunion annuelle aura lieu à Vancouver. J'y présenterai des travaux scientifiques.

Mme Cécile DELETTRE . - A l'heure de conclure, nous remercions tous les participants pour ces passionnants échanges autour du thème du développement des des relations économiques entre la France et la Canada ainsi que tous les parlementaires qui nous ont honoré de leur présence.


* (1) Membres du groupe d'amitié France-Canada

Mme Claudine LEPAGE, Présidente ; Mme Leila AÏCHI, Mme Aline ARCHIMBAUD, M. Bertrand AUBAN, M. Claude BELOT, M. Joël BILLARD,  M. Michel BILLOUT,  M. Yannick BOTREL, M. Joël BOURDIN , Mme Marie-Thérèse BRUGUIÈRE , M. Jean-Pierre CHAUVEAU , Mme Karine CLAIREAUX, M. Christian COINTAT , M. Pierre-Yves COLLOMBAT, M. Jacques CORNANO , M. Jean-Pierre DEMERLIAT, Mme Catherine DEROCHE , M. DUPONT Jean-Léonce , M. Louis DUVERNOIS , M. André FERRAND , M. Louis-Constant FLEMING, M. Alain FOUCHÉ , M. Jean-Claude FRÉCON , M. André GATTOLIN , M. Jean-Claude GAUDIN , M. Gaëtan GORCE , Mme Sylvie GOY-CHAVENT, M. Jean-François HUSSON , Mme Sophie JOISSAINS , Mme Christiane KAMMERMANN, M. Robert LAUFOAULU , M. Jean-Claude LENOIR ,  M.  Alain LE VERN , M. Michel MAGRAS , M. Pierre MARTIN , M.  Hervé MAUREY ,  Mme Catherine MORIN-DESAILLY , M. Jean-Marc PASTOR, M. Jackie PIERRE , M.  Jean-Pierre PLANCADE , M. Rémy POINTEREAU , Mme Catherine PROCACCIA ,  M. Charles REVET, M. Gilbert ROGER, M. Bernard SAUGEY, M. Henri TANDONNET, M. Jean-Marc TODESCHINI, M. Jean-Marie VANLERENBERGHE.

* (2) Membres du groupe d'amitié France-Québec

M. Jean-Claude CARLE, Président ; Mme Michèle ANDRÉ, M. Bertrand AUBAN, M. Christophe BÉCHU, M. Claude BÉLOT, M. Jean BESSON, Mme Maryvonne BLONDIN, M. Joël BOURDIN, M. Martial BOURQUIN, M. Alain CHATILLON, M. Jean-Pierre CHAUVEAU, Mme Karine CLAIREAUX, M. Christian COINTAT, M. Yvon COLLIN, M. Pierre-Yves COLLOMBAT, M. Jacques CORNANO, M. Philippe DALLIER, M. Ronan DANTEC, Mme Évelyne DIDIER, M. Claude DILAIN, Mme Muguette DINI, M. Éric DOLIGÉ, M. Jean-Léonce DUPONT, Mme Josette DURRIEU, M. Louis DUVERNOIS, M. Christian FAVIER, M. André FERRAND, M. Louis-Constant FLEMING, M. Bernard FOURNIER, M. Jean-Paul FOURNIER, M. Jean-Claude FRÉCON, M. André GATTOLIN, M. Alain GOURNAC, M. Pierre HÉRISSON, M. Jean-François HUMBERT, M. Claude JEANNEROT, Mme Christiane KAMMERMANN, M. Roger KAROUTCHI, M. Serge LARCHER, M. Robert LAUFOAULU, M. Jacques LEGENDRE, M. Jean-Claude RENOIR, M. Jeanny LORGEOUX, M. Michel MAGRAS, M. Philippe MARINI, M. Pierre MARTIN, M. Jean-Claude MERCERON, Mme Michelle MEUNIER, M. Jean-Marc PASTOR, M. Jean-Claude PEYRONNET, M. Jean-Vincent PLACÉ, M. Rémy POINTEREAU, M. Jean-Pierre RAFFARIN, M. Charles REVET, M. Jean-Marc TODESCHINI, M. René VANDIERENDONCK.

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N° GA 110 - JUILLET 2013

* 3 Réunion informelle des chefs d'État de sept pays : l'Allemagne, le Canada, les États-Unis, la France, l'Italie, le Japon et le Royaume-Uni.

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