C. UN PAYS DÉMANTELÉ TERRITORIALEMENT

La première atteinte portée à l'intégrité territoriale du Tibet fut le fait des colonisateurs britanniques. Ceux-ci annexèrent à l'empire des Indes toute une frange méridionale de territoires himalayens qui relevaient antérieurement peu ou prou de l'autorité de Lhassa. C'est ainsi que l'Inde intègre aujourd'hui de nombreuses régions de culture tibétaine : Ladakh, Zanskar, Spiti, Lahul, Sikkim, nord de l'Arunachal Pradesh.

Les Britanniques veillèrent à faire reconnaître par les autorités tibétaines, dans une convention de 1914, la ligne de démarcation entre le Tibet et leurs possessions indiennes, connue depuis comme « ligne MacMahon », du nom de leur négociateur plénipotentiaire. Mais les Chinois, après qu'ils eurent annexé le Tibet en 1950, ne s'estimèrent pas liés par cette convention. Et c'est sur la base de revendications territoriales outrepassant la « ligne MacMahon » qu'ils déclenchèrent en 1962 une guerre contre l'Inde, à la suite de laquelle ils occupent encore aujourd'hui l'est du Ladakh.

Le territoire revendiqué par le gouvernement tibétain en exil depuis 1959 correspond au Pö Chölka Sum , c'est-à-dire au « Tibet des trois provinces » : U-Tsang, Kham et Amdo. Ce Grand Tibet a une superficie d'environ 3,8 millions de km 2 , soit sept fois la France. Il représente donc près de 40 % de la superficie de la Chine dans ses frontières actuelles (9,6 millions de km 2 ) mais, comme on l'a vu, seulement 0,43 % de sa population. La particularité de la question tibétaine tient dans le rapprochement vertigineux de ces deux chiffres si dissemblables.

La Région autonome du Tibet (RAT) a été définie en 1965 par le gouvernement chinois, près de 15 ans après l'annexion. Elle a une superficie de 1,2 millions de km 2 seulement et correspond pour l'essentiel au Tibet central, c'est-à-dire aux provinces de U, du Tsang et du Ngari. Elle comporte également la partie occidentale du Kham. Au sud-est, le reste du Kham est réparti entre le Sichuan et le Yunnan, tandis qu'au nord-est, la province de l'Amdo est éclatée entre le Qinghai, le Gansu et le Sichuan.

Ce redécoupage correspond à la distinction plus ancienne entre le « Tibet extérieur » et le « Tibet intérieur ». Le gouvernement de Pékin a prétendu intégrer ce dernier dès le XVIII ème siècle, sans réussir toutefois à y établir de manière durable son pouvoir. En fait, le gouvernement de Lhassa avait lui-même du mal à asseoir son autorité sur ces provinces périphériques, peuplées de populations nomades et belliqueuses. En 1918 encore, l'armée tibétaine libérait le Kham de la présence militaire chinoise, qui s'y était imposée quatre années auparavant sous le commandement du général Chao Erfeng. La frontière entre le Tibet et la Chine fut alors fixée sur le Yangtsé.

CARTE DU TIBET

CARTE DE CHINE

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