Table des matières
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Rencontres Russie 2011
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Ouverture du colloque
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Interventions
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Echanges
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Etat des relations entre la France et la
Russie
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L'économie russe : perspectives
économiques et risque pays
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L'économie russe à l'épreuve
de la diversification, de la modernisation et de l'ouverture
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Exporter et investir en Russie : approches et
perspectives
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Les grands projets de Total en Russie
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Ouverture du colloque
Rencontres Russie 2011 |
Jeudi 15 décembre 2011 - Palais du Luxembourg - Paris
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Ouverture du colloque
Patrice GELARD
Président
du Groupe interparlementaire d'amitié France-Russie du Sénat
Au nom du groupe d'amitié France-Russie du Sénat, je suis très heureux d'ouvrir ces nouvelles rencontres consacrées à la Russie, organisées comme chaque année au Sénat en partenariat avec Ubifrance et la mission économique française en Russie, que je remercie d'ailleurs pour leur fidélité à notre assemblée.
Je voudrais également remercier de leur présence aujourd'hui M. Anatoli Artamonov, Gouverneur de l'Oblast de Kalouga, qui vient d'être décoré de la légion d'honneur par le Ministre M. Thierry Mariani, grand connaisseur et ami de la Russie, ainsi que le représentant du Gouverneur de l'Oblast d'Irkoutsk.
Enfin, je tiens à vous remercier de votre présence toujours aussi nombreuse qui témoigne de l'intérêt que continue à susciter, à juste titre, la Russie pour les entreprises françaises.
Avant d'évoquer les relations politiques et économiques entre la France et la Russie, je voudrais présenter brièvement les activités du groupe d'amitié France-Russie du Sénat, que j'ai l'honneur de présider.
La place essentielle et singulière de la Russie sur la scène internationale, les liens étroits qui l'unissent à la France et le vif intérêt que lui portent les Sénateurs font du groupe d'amitié France-Russie l'un des plus prestigieux, des plus anciens et des plus importants que compte le Sénat français.
Fort d'une soixantaine de membre, issus de toutes les sensibilités, le groupe d'amitié France-Russie du Sénat répond à sa vocation première de resserrer les liens avec les parlementaires de la Douma et du Conseil de la Fédération de Russie et de contribuer ainsi au développement des relations politiques avec la Russie.
Depuis quelques années, il s'est également assigné pour mission de développer la coopération décentralisée, de favoriser les échanges culturels et de contribuer au renforcement des relations économiques entre les deux pays.
Les sénateurs, qui exercent fréquemment des responsabilités locales, jouent, en effet, un rôle précieux d'intermédiation, de relais entre les entreprises, les collectivités territoriales et les autorités des deux pays.
En tant que parlementaires nous avons naturellement une responsabilité particulière en ce qui concerne l' « environnement des affaires », c'est-à-dire la définition du cadre légal permettant de favoriser les échanges économiques et les investissements étrangers.
Après le succès de l'année croisée franco-russe en 2010, qui a été marquée par de nombreuses manifestations culturelles, mais aussi par des rencontres au plus haut niveau, on aurait pu craindre cette année un essoufflement des relations, notamment à l'approche des prochaines échéances électorales en France et en Russie en 2012.
Or, il n'en a rien été, et les relations politiques entre la France et la Russie ont toujours été aussi denses, notamment dans le cadre de la présidence française du G20.
L'année 2011 a ainsi vu la conclusion de plusieurs grands projets, comme le lancement des fusées Soyouz à partir de la base de Kourou, la vente des bâtiments de projection et de commandement, ou encore l'inauguration du gazoduc Nord Stream.
Ainsi, lors du dernier séminaire intergouvernemental franco-russe, qui s'est tenu en novembre en Russie, en présence du Premier ministre, Vladimir Poutine, de nouveaux projets de coopération ont été lancés, par exemple dans le domaine médical, de l'énergie nucléaire ou encore du tourisme et des transports.
Alors que les relations économiques entre la France et la Russie étaient en retrait il y a encore quelques années, nos échanges ont beaucoup progressé ces dernières années.
Qu'il s'agisse de l'énergie, du spatial, de l'aéronautique, de l'automobile ou encore de la télévision numérique, nous avons déjà engagé des partenariats entre les grands groupes français et russes.
Mais beaucoup reste à faire dans les autres secteurs, en termes de diversification géographique ou vis-à-vis des petites et moyennes entreprises.
La plupart de nos grandes entreprises, comme Total, la Société Générale, Auchan ou Renault, sont aujourd'hui présentes en Russie.
En revanche, nos PME sont plus faiblement représentées dans ce pays, notamment par rapport à leurs concurrentes italiennes ou allemandes, même si on constate une forte progression ces dernières années. Or, nos PME disposent de nombreux atouts, comme leur savoir-faire technologique.
En outre, actuellement l'investissement direct étranger se porte sur un nombre limité de régions, grandes métropoles et zones de production pétrolière essentiellement, et en particulier Moscou et ses environs, à l'image du projet de Skolkovo.
Or, les régions de Russie constituent des acteurs majeurs du développement économique du pays et sont très désireuses d'accueillir les capitaux étrangers, à l'image de l'oblast de Kalouga.
A cet égard, je voudrais insister sur l'importance de l'adhésion de la Russie à l'Organisation mondiale du commerce, dont les derniers obstacles ont été levés récemment.
Cette adhésion devrait en effet faciliter considérablement les échanges économiques et les investissements étrangers, en favorisant notamment la sécurité juridique.
Enfin, je voudrais évoquer quelques pistes pour renforcer encore nos relations.
La première concerne les aspects linguistiques.
L'année 2012 devrait être l'année croisée de la langue et de la littérature russes en France et du français en Russie. J'espère que cette année croisée permettra de mettre un terme au recul de l'apprentissage du russe en France et du français en Russie et de donner un nouvel élan à notre coopération linguistique. Je me félicite à cet égard de l'accord conclu récemment concernant l'extension du lycée français de Moscou et j'espère que nous aurons un jour un ou plusieurs lycées russes en France.
Le deuxième sujet concerne le dossier sensible des couples mixtes divorcés ou séparés et les problèmes douloureux de droit de garde ou de visite des enfants binationaux. Là encore, j'espère que nous parviendrons à conclure un accord bilatéral en matière familiale entre nos deux pays.
Enfin, je suis profondément convaincu qu'il serait souhaitable de lever rapidement l'obligation de visas entre l'Union européenne et la Russie. Une telle mesure aurait certainement pour effet de faciliter considérablement les échanges économiques mais aussi humains entre nos deux pays. J'espère que le Sommet Union européenne-Russie, qui se tient aujourd'hui, parviendra à des avancées dans ce domaine.
Pour conclure, je voudrais vous souhaiter d'intéressants travaux et émettre le voeu que ces rencontres puissent contribuer à renforcer encore les échanges économiques entre nos deux pays et donc les liens d'amitié et de coopération entre la France et la Russie.
Christophe LECOURTIER
Directeur général d'Ubifrance
Je me réjouis de participer à l'ouverture de la nouvelle édition des rencontres Russie qui sont, pour ma part, les troisièmes que j'inaugure.
Dans le contexte de morosité actuelle, je soulignerai un point positif. La position économique et commerciale de la France en Russie n'a cessé de s'améliorer, au cours des dernières années, ce qui fait de nous, aujourd'hui, le 6 ème fournisseur de la Russie et le 5 ème investisseur en stock.
Nous déplorons toutefois un manque de PME françaises en Russie, même si cette tendance est en train de s'infléchir. Dès lors qu'elles savent se montrer innovantes, les PME et Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI) françaises parviennent en effet à trouver leur place sur l'immense marché russe et le nombre de success stories portées à notre connaissance est là pour le démontrer.
Dans un tel contexte, nous souhaitons faire passer à la vitesse supérieure notre coopération avec la Russie, grâce au développement de la coopération avec les régions. En tout état de cause, la Russie ne se limite pas à Moscou, comme la France ne se limite pas à Paris. A cet égard, je signalerai simplement que j'ai récemment accompagné une délégation de producteurs de vins et de spiritueux à Ekaterinbourg, ce qui m'a donné une nouvelle occasion d'apprécier la qualité de l'accueil russe et l'intérêt porté par cette population pour notre pays.
Ubifrance souhaite participer à la modernisation de l'industrie russe, dans le cadre d'une démarche gagnant-gagnant.
La Russie sera, avec le Brésil, l'un des pays qui organisera une série de grands événements sportifs dans les prochains mois. Nous jouissons pour notre part d'une grande expertise dans tous ces domaines et il est temps de mieux faire connaître l'offre française, comme nous l'avons déjà fait, d'ailleurs, pour l'organisation des JO d'hiver à Sotchi.
Nous devons par ailleurs contribuer au fait que « l'équipe de France export » joue en harmonie, pour renforcer la coopération avec la Russie. A cet égard, je suis très heureux que nous soyons parvenus à mettre au point une convention qui sera signée tout à l'heure, ici même, entre la Chambre de Commerce et d'Industrie franco-russe (CCIFR) et la Mission Économique Ubifrance à Moscou. La signature de cette convention d'amitié permettra d'entériner une complémentarité fructueuse, qui existait déjà sur le terrain mais qui n'avait pas été formalisée officiellement.
Les équipes d'Ubifrance en poste à Moscou, Ekaterinbourg et Saint-Pétersbourg, n'ont de cesse de permettre aux entreprises françaises de trouver sur le sol russe de nouvelles opportunités de développement.
Nul doute que ces rencontres arrivent une nouvelle fois à point nommé. A cet égard, je tiens à remercier une fois encore le Sénat et tous les organisateurs de cette manifestation, qui permettent aux acteurs français et russes de se rencontrer et d'échanger. Le cocktail qui se tiendra à la suite de cette matinée sera d'ailleurs l'occasion d'approfondir les contacts entre les participants à ces rencontres.
Pavel CHINSKY, Directeur de la CCIFR
Notre convention ne se réduit pas à la signature d'un document ; elle vise à permettre la mise en place d'un outil commun pour les entrepreneurs français qui se lanceront à la conquête du sol russe. A cet égard, je tiens à remercier chaleureusement Elisabeth Puissant d'avoir permis la signature de ce document.
La convention d'amitié et de coopération entre la Chambre de Commerce et d'Industrie franco-russe et la Mission Economique d'Ubifrance à Moscou est signée en séance.
Interventions
Anatoli ARTAMONOV
Gouverneur de l'Oblast de Kalouga
Je vous remercie de m'avoir donné l'opportunité d'intervenir aujourd'hui, surtout après avoir été décoré de la main de votre Ministre des insignes de la Légion d'honneur. La région de Kalouga entretient d'ores et déjà de bonnes relations avec certaines régions de France et plusieurs entreprises françaises. Elle est toutefois encore insuffisamment connue du grand public et je vais donc vous la présenter dans ses grandes lignes.
La ville de Kalouga, qui est la capitale de notre région, a été mentionnée pour la première fois au 14 ème siècle mais est probablement plus ancienne encore. Notre région a été à l'épicentre d'événements historiques d'importance capitale, au cours des siècles qui se sont écoulés.
L'année prochaine, nous allons célébrer le 200 ème anniversaire de la guerre entre la France et la Russie, à l'époque napoléonienne. Je crois d'ailleurs que c'est la seule fois où nos deux pays se sont trouvés en conflit. S'agissant de la seconde guerre mondiale, nous n'oublierons pas le courage des pilotes du régiment Normandie-Niemen, qui ont commencé leur glorieux parcours dans notre région et en l'honneur desquels un monument a récemment été inauguré. Notre région est également la patrie de Natalia Gontcharova, l'épouse de Pouchkine.
Toutes les personnes qui viennent dans notre région reconnaissent qu'il y règne une atmosphère très particulière. Pouchkine, Gogol, Tourgueniev ont tous vécu et travaillé chez nous. Outre cet héritage spirituel incontestable, Kalouga est également le berceau de l'aéronautique. Je rappelle d'ailleurs au passage que nous fêterons cette année le 50 ème anniversaire du vol de Gagarine dans l'espace.
Nous avons un des théâtres les plus anciens de la Russie ; et cette année, à l'invitation de Pierre Cardin, la troupe de ce théâtre a fait une tournée en France. Située à proximité de Moscou, notre région occupe une surface de 30 000 kilomètres carrés. Cette situation géographique est un avantage pour nous, à n'en pas douter. Notre sous-sol ne regorge pas de richesses, ce qui est plutôt une bonne chose car nous sommes de fait contraints de réfléchir et de travailler pour développer tous les potentiels de notre région, dont la richesse principale repose sur notre population.
La région de Kalouga tente de combattre les préjugés persistants sur la Russie. Dans notre région, il n'y a pas ni corruption, ni bureaucratie, ni obstacles aux investissements. Peu importe d'ailleurs le montant de ces investissements, pourvu que ceux-ci concourent au développement de Kalouga et de ses environs. Tout investisseur a d'ailleurs mon numéro de téléphone direct. L'année dernière, 8 % de la totalité des investissements qui ont été réalisés en Russie ont concerné notre région, ce qui est loin d'être négligeable. Nous prenons soin des investisseurs comme s'ils étaient nos enfants ; nous les prenons par la main et nous les accompagnons, tout au long de leur séjour chez nous. Nous les aidons à surmonter les éventuelles difficultés auxquelles ils pourraient se trouver confrontés. Nous nous situons très bien par rapport aux standards européens concernant l'accueil des investisseurs et avons reçu la note de 100, ce qui nous place à un très bon rang.
Kalouga offre ainsi l'un des meilleurs climats d'investissements de notre pays ; nous nous attachons notamment à mieux accueillir les petites et moyennes entreprises. Nous avons de plus en plus de sociétés mondialement connues qui investissent chez nous, au premier rang desquelles Samsung, Volkswagen et Nestlé.
Nous sommes en train mettre en place un cluster d'entreprises pharmaceutiques qui emploient plusieurs milliers de personnes. Sur le site de Kalouga, Citroën et Mitsubishi sont implantées. 1 100 personnes travaillent déjà dans ces entreprises et nous devrions en compter 3 000 d'ici la fin de l'année, pour la fabrication de 125 000 voitures. Il y a également d'autres projets français, conduits par L'Oréal ou la société Lafarge.
Nous souhaitons augmenter l'efficacité de nos services urbains et coopérons à ce titre avec la société Dalkia. Nous avons récemment signé un accord avec le syndicat gazier d'Ile-de-France, pour la sauvegarde de l'énergie dans notre région.
Nous produisons en outre beaucoup de roses très odorantes et Pierre Cardin a décidé de fabriquer du parfum, à partir de ces fleurs de très grande qualité. C'est un petit business qui marche très bien chez nous. Plus de 5 000 personnes se consacrent à la recherche scientifique dans notre région et nous allons prochainement créer un bio-parc pour les innovations dans le domaine pharmaceutique.
Sont développées dans notre ville des méthodes de recherche dans les domaines oncologique et nucléaire. Nos établissements scolaires ont des contacts avec leurs homologues de Lyon, de Limoges ou de Montpellier. Nous contribuons au développement de la recherche commune entre nos deux pays.
Malgré la diffusion importante de l'anglais, de plus en plus d'élèves choisissent d'apprendre le français dans notre région, où l'Alliance française est très présente. Nous pensons qu'il existe beaucoup de perspectives de développement entre la France et notre région et je vous invite à ce titre à venir nous rendre visite prochainement. Vous recevrez un accueil chaleureux et fiable, pour réaliser vos investissements et les faire fructifier.
Victor NETCHAIEV
Vice-Gouverneur de l'Oblast d'Irkoutsk
Notre région a une situation géopolitique très avantageuse. Située à 5 000 kilomètres de Moscou, elle est une fois et demie plus vaste que la France. Nous sommes également situés à proximité de l'Asie, qui est l'épicentre du développement économique mondial.
Nous sommes très attractifs car notre région compte beaucoup de ressources naturelles, ce qui constitue un avantage considérable - forêts, or, charbon, gaz, eau potable, etc. - que nous nous attachons à exploiter intelligemment.
Notre région compte 2,5 millions d'habitants, dont 1,7 million d'actifs. Nous accueillons beaucoup d'étudiants également - 132 000 environ, pour 200 disciplines enseignées.
Dix écoles académiques, ainsi qu'une dizaine d'écoles supérieures d'enseignements spécialisés sont implantées sur notre sol. Nous pouvons par conséquent nous prévaloir d'un potentiel éducatif important.
Tout est fait pour attirer les investisseurs étrangers dans notre région, qui présente bien des attraits, eu égard à sa superficie importante. Nous avons des réserves énormes d'énergie électrique, que nous commercialisons au meilleur prix, à l'échelle mondiale.
Nous souhaitons exploiter les ressources minières, et oeuvrer à la transformation de ces dernières sur place. Compte tenu du faible coût de l'énergie chez nous, c'est tout à fait envisageable. Nous construisons beaucoup de centres de données dans notre région et je vous invite à participer activement, à votre niveau, à la mise en place de ce type de structures.
Le secteur des nanotechnologies et des technologies de l'information est très dynamique également dans notre région, laquelle se trouve étroitement liée à la France, sur un plan tant culturel que scientifique. A cet égard, nous avons d'ailleurs accueilli des citoyens français il y a peu, dans le cadre du forum dédié au Lac Baïkal.
Echanges
De la salle
Comment les sociétés russes et l'État russe s'intéressent-ils à la France, en termes de coopération décentralisée ?
De la salle
Pouvez-vous nous informer sur les réductions d'impôts qui sont accordées aux investisseurs dans les zones économiques spéciales (ZES) ?
De la salle
Nous avons besoin d'installer une plate-forme de pièces détachées pour notre entreprise de fourniture d'équipement pour l'industrie laitière, qui collabore activement avec la région de Kalouga. L'oblast pourrait-il nous aider à installer cette nouvelle infrastructure ?
Anatoli ARTAMONOV
De fait, la Russie est devenue plus attractive et il est désormais facile d'attirer les investisseurs étrangers sur notre sol. Nous n'excluons pas, toutefois, d'investir à notre tour à l'extérieur de nos frontières.
Les avantages fiscaux donnés aux investisseurs de notre région, qui a le statut de ZES, sont nombreux. Nos services peuvent vous en donner le détail, en fonction de vos projets.
S'agissant de la plate-forme pour les pièces détachées que vous souhaitez mettre en place, je signalerai simplement que la société Gefco est d'ores et déjà en train de créer un centre logistique important dans notre région.
Victor NETCHAIEV
Toutes les informations relatives aux facilités fiscales dans l'Oblast d'Irkoutsk sont disponibles sur notre site internet. J'ajoute que nous aimerions que les touristes arrivent en masse dans notre région qui est magnifique. Nous sommes par ailleurs intimement convaincus que la construction d'un centre de données, récemment initiée sur notre sol, sera très vite rentable.
Anatoli ARTAMONOV
Il y a beaucoup de sociétés qui n'ont pas seulement des entrepôts chez nous mais qui ont même organisé leur production sur place. Je vous invite à vous renseigner directement auprès d'elles, si vous souhaitez en faire de même.
Etat des relations entre la France et la Russie
Jean de GLINASTY
Ambassadeur de France en Russie
Un séminaire intergouvernemental s'est tenu à Moscou, le 18 novembre dernier, au cours duquel nous avons tiré le bilan de deux ans et demi de coopération franco-russe. A l'automne 2009 s'était tenu un séminaire du même type à Rambouillet, au cours duquel une impulsion politique avait été donnée pour rendre aux relations franco-russes la place qui devait être la leur. La visite du Président Medvedev à Paris et du Président Sarkozy à Moscou ont ensuite fourni un cadre politique à cette coopération.
Le bilan que nous avons tiré a fait apparaître des résultats impressionnants, dans tous les domaines. Sur un plan économique, il n'y a plus un seul secteur qui échappe à la coopération franco-russe, et qui plus est avec des résultats toujours significatifs.
Alors que Renault détient d'ores et déjà 25 % du capital d'Avtovaz, sa participation devrait croître encore dans les prochains mois, d'autant que la Logan a été la première voiture du marché russe en 2010. La coopération est également de mise dans les domaines ferroviaire ou aéronautique. Auchan est le premier employeur étranger de Russie, avec une cinquantaine de magasins. Leroy-Merlin est également très présent, ainsi que l'industrie pharmaceutique, via Sanofi, ou l'agro-alimentaire, via Danone (et le russe Unimilk, avec lequel Danone a récemment fusionné). La France est parvenue à maintenir en Russie sa place de premier exportateur de vins. L'électronique est également un secteur très dynamique. La multiplication des hôtels Accor démontre enfin le dynamisme du secteur du tourisme.
Le lancement de Soyouz à Kourou, en Guyane, est un programme commercial qui s'étendra sur plusieurs années.
Dans un tel contexte, la France est le 5 ème investisseur en stock en Russie et occupe également une place significative en flux.
S'agissant des perspectives que nous avons abordées le 18 novembre dernier, à l'occasion de notre séminaire intergouvernemental, elles touchent notamment aux domaines spatial et nucléaire (qui représentent d'ores et déjà un milliard de dollars d'échanges entre la France et la Russie). La promotion du Grand Moscou a par ailleurs pu se faire grâce à un dialogue privilégié noué avec notre pays, et nous comptons bien continuer à jouer un rôle important en la matière, tout en contribuant à l'organisation des grands événements sportifs de ces prochaines années.
L'année croisée France-Russie de 2010 a été un grand succès puisqu'elle a renforcé la connaissance mutuelle de nos deux cultures. L'année 2012 sera l'année croisée de la langue et de la littérature russes. Elle sera ouverte solennellement à Moscou en janvier prochain et contribuera à nourrir le flux ininterrompu d'échanges culturels entre nos deux pays.
800 000 Russes apprennent le français à l'heure actuelle et nous souhaitons ouvrir encore de nombreuses antennes de l'Alliance française dans ce grand pays.
Le domaine politique est en revanche plus sensible et les résultats y sont un peu plus mitigés. Nous partageons, avec la Russie, un nombre considérable de points communs qui sont des éléments essentiels du formatage des sociétés contemporaines. J'en veux pour preuve l'action que nous menons, au sein du Conseil conjoint pour les Questions de Sécurité (CCQS), en matière de lutte contre la drogue, le terrorisme ou l'islamisme extrémiste.
L'approche du Printemps arabe par nos deux pays est un peu différente car ils n'analysent pas ces événements de la même manière : la Russie met avant tout l'accent sur la stabilité régionale de cette zone, tandis que la France salue l'éveil des peuples de ces pays à la démocratie. La Russie estime que la France a notamment joué un rôle immodéré en intervenant en Libye par voie aérienne.
Le sommet entre l'Union européenne et la Russie qui se tiendra prochainement traitera de la question des visas et de la modernisation énergétique. Nous espérons conclure un accord sur la question des visas, même si celui-ci devrait être largement en deçà des objectifs que nous nous étions assignés initialement.
En conclusion, je voudrais mettre en exergue un certain nombre de points.
Nos pays sont l'un comme l'autre en période électorale, ce qui implique une moindre disponibilité de nos autorités politiques pour donner des impulsions au développement des affaires, des contrats et des projets. Nous avons ainsi une zone sensible à traverser jusqu'à la tenue des élections présidentielles et les entreprises devront se débrouiller un peu toutes seules, dans les semaines à venir. Néanmoins, compte tenu des bases solides déjà posées, j'ai le sentiment que nous pourrons continuer à développer nos relations jusqu'à la mise en place de nos nouveaux gouvernements.
S'agissant des récentes manifestations en Russie, visant à dénoncer les fraudes électorales qui ont entaché la tenue des élections législatives du début du mois de décembre, je soulignerai simplement qu'elles attestent de l'émergence d'une société civile russe, née des dix années de prospérité qu'a connues ce pays, et que nous nous devons d'accompagner.
Patrice GELARD
Lors de la tenue de l'année croisée en 2010, nous avions appelé de nos voeux la suppression des visas touristiques entre nos deux pays. Il serait temps d'y venir, d'autant que tous les ressortissants des Balkans, notamment, peuvent aujourd'hui se rendre dans notre pays sans visas, parce qu'ils font partie de l'Union européenne. Il semblerait logique que les Russes puissent en faire de même.
L'économie russe : perspectives économiques et risque pays
Yves ZLOTOWSKI
Économiste en chef, Coface
L'environnement direct de la Russie est loin d'être favorable à l'aube de l'année 2012. En tout état de cause, ce pays - comme les autres États du globe, d'ailleurs - n'est pas immunisé contre les chocs externes. Or, la croissance mondiale devrait se ralentir en 2012, même si ce ralentissement devrait être moins important qu'en 2009. La zone euro devrait ainsi se trouver en situation de récession légère, ce qui devrait avoir un impact sur la Russie, même si celle-ci devrait plutôt bien résister. Si la récession devait être plus grave encore en zone euro, l'économie russe en pâtirait, compte tenu des liens étroits qu'elle entretient avec l'économie des pays de l'Union.
L'Allemagne, qui est le premier partenaire de la Russie, devrait être en croissance de 0,7 % seulement, contre 3 % cette année. En 2009, la récession a été colossale en Russie, de l'ordre de 8 %. Le pays était alors en surchauffe, ce qui explique l'ampleur de cette correction. Or, la situation est très différente à l'heure actuelle puisque la Russie affiche un taux de croissance de 4 % seulement.
La Russie résiste bien car la consommation des ménages représentent environ 60 % du PIB. Les Russes achètent, et en masse, ce qui tire l'activité vers le haut. Ceci est possible car les revenus des Russes ont beaucoup augmenté, au cours des dernières années. Pour autant, une étude récente a démontré que la hausse de la consommation est moins due aux hausses de revenus qu'au très faible taux de chômage enregistré dans ce pays. Les entreprises ont préféré garder leurs salariés, quitte à ne pas les payer durant les périodes difficiles, et ce durant plusieurs années. En 2009, cette tendance s'est infléchie. Des entreprises se sont en effet trouvées contraintes de procéder à des licenciements, ce qui provoqué un choc dans l'opinion, laquelle était habituée à l'emploi à vie, hérité de l'Union soviétique. Depuis lors, les Russes ont pris conscience qu'ils pouvaient se retrouver au chômage en cas de crise. Dans un tel contexte, la croissance russe est devenue plus raisonnable que par le passé et reflète dorénavant davantage la réalité.
Le crédit bancaire est reparti à la hausse, ce qu'il convient de saluer, en dépit d'un certain climat de défiance à l'encontre du secteur bancaire dans le pays. Les banques russes devraient faire montre d'une plus grande prudence, à l'avenir, et le crédit devrait un peu ralentir dans les prochaines années.
L'investissement, même s'il continue à croître fortement, reste insuffisant en Russie comparé à la croissance du PIB, d'une part, et au volume considérable des investissements sur le sol chinois, d'autre part. Le stock de crédits est très faible, par rapport à la moyenne asiatique. La réforme des banques privées est essentielle en Russie, pour booster la croissance.
Le climat des affaires continue en outre à poser problème ; investir en Russie constitue un pari sur l'avenir et on constate une certaine réticence des acteurs russes à investir, ce qui a un impact direct sur la croissance.
Sur un plan financier, la Russie reste très solide. Il faut un prix du baril à 112 dollars pour équilibrer les finances publiques russes, qui sont plus vulnérables que par le passé au cours du pétrole. Or, les dépenses publiques en Russie ont explosé, au cours des dernières années, puisqu'elles ont pris 10 points de PIB en l'espace de quatre ans seulement.
Le niveau d'endettement public des Russes est très faible, ce qui constitue un point positif. L'Etat russe a les moyens d'amortir les chocs à venir et il le fera compte tenu de la période électorale et parce qu'il ne souhaite pas se laisser à nouveau surprendre, comme cela s'est produit en 2009.
Les sorties de capitaux privés attestent du fait que les entreprises russes, qui étaient très endettées, remboursent leurs dettes. Pour autant, nous constatons un niveau record de sorties de capitaux, ce qui pose la question de la possibilité d'investir les devises acquises sur place. Il conviendrait d'infléchir cette tendance, en développant le réseau de PME, en Russie, qui reste encore insuffisamment développé, contrairement à ce que nous constatons en Europe centrale, notamment.
L'économie russe à l'épreuve de la diversification, de la modernisation et de l'ouverture
Philippe BAUDRY
Ministre Conseiller pour les affaires économiques et financières,
Chef des services économiques pour la CEI
Je souhaiterais vous donner quelques informations sur les caractéristiques structurelles de l'économie russe, en complément des éléments conjoncturels que vous a donnés Yves Zlotowski.
I. Le défi de la diversification et de la modernisation
La Russie est le premier producteur mondial de pétrole aujourd'hui, et le deuxième producteur de gaz. Elle a été récemment dépassée par les États-Unis. Un quart du PIB russe dépend directement du secteur gazier. Les hydrocarbures représentent 46 % des recettes budgétaires et 70 % des exportations de biens ; les céréales, le bois et le diamant constituent également des richesses en Russie, dont l'économie est par conséquent fortement dépendante des variations du cours des matières premières.
En dépit du poids des secteurs spatial et nucléaire, de l'armement et de la métallurgie, les exportations de matières premières représentent 80 % des exportations du pays.
Les besoins de modernisation sont importants, tant dans le secteur des transports que pour les services urbains, et le Président Medvedev a d'ailleurs indiqué que la modernisation était une question de survie pour son pays. Or, les investissements sont insuffisants et déséquilibrés, qu'il s'agisse des investissements russes ou des investissements étrangers, même si un certain nombre d'avancées ont d'ores et déjà été enregistrées sur le sol russe, grâce à l'aide de la France, notamment.
Le projet Skolkovo vise ainsi à créer une « inograd » ou ville de l'innovation, dans la banlieue de Moscou.
Le développement du projet de Moscou Place Financière Internationale s'est quant à lui déjà traduit par le renforcement des infrastructures des marchés financiers, avec la fusion des bourses de Moscou et des avancées législatives majeures. Le Fonds russe des investissements directs a en outre été créé en avril 2011.
Un ambitieux programme de privatisations a été lancé il y a un an, avec pour objectif de moderniser le pays, grâce notamment à l'amélioration de la gouvernance en entreprises.
La France accompagne la transformation de l'économie russe, via la mise en place d'un partenariat pour la modernisation, en décembre 2010. Nombre de projets sont ainsi mis en oeuvre, dans les secteurs des hydrocarbures, de l'aéronautique civile, de l'automobile, de l'efficacité énergétique, des infrastructures et de la santé.
Les avancées sont toutefois encore limitées car l'Etat actionnaire continue à jouer un rôle majeur dans les secteurs gazier et pétrolier. La politique industrielle continue ainsi à favoriser les grands groupes russes et la lutte contre la corruption n'a pas été tout à fait à la hauteur des espérances.
II. L'adhésion à l'OMC, facteur de modernisation de l'environnement des affaires et de l'industrie
Depuis l'adhésion de la Chine à l'OMC en 2011, la Russie est le dernier grand pays non membre de cette organisation. Ceci ne devrait plus durer très longtemps, toutefois, puisque la question de cette adhésion devrait être au centre des débats de l'Assemblée générale de l'OMC qui se tient aujourd'hui même à Genève.
Ce processus d'adhésion à l'OMC, suspendu en amont à une modernisation de la législation russe, faciliterait, à n'en pas douter, le règlement des litiges.
Pour l'heure, la Russie a obtenu des dérogations de trois à sept ans aux règles de l'OMC, dans le secteur de l'automobile et de l'agriculture, notamment. Néanmoins, à l'issue de cette période transitoire, les droits de douane sur les produits manufacturés devraient croître.
III. L'union douanière ou l'ouverture régionale ?
La Russie, le Kazakhstan et la Biélorussie forment une union douanière depuis 2010. Et le 18 novembre dernier, une nouvelle étape a été franchie dans cette coopération puisque ces trois partenaires ont signé un traité pour la création d'un espace économique commun d'ici au 1 er janvier 2015. Depuis lors, le Kirghizstan a manifesté son souhait de rejoindre cette union. Pour autant, la Russie a maintenu son intention de rejoindre l'OMC dans les prochains mois.
Les outils pour faire de l'économie russe une économie moderne, diversifiée et ouverte, sont de plusieurs types. Il faudrait notamment :
• améliorer le climat des affaires en favorisant la création de PME ;
• attirer d'avantage d'IDE ;
• développer encore le capital humain ;
• adhérer rapidement à l'OMC ;
• favoriser les exportations industrielles.
Sur tous ces points, la région de Kalouga a joué un rôle précurseur, comme nous allons le voir dans le cadre de la prochaine table ronde.
Exporter et investir en Russie : approches et perspectives
Participaient à cette table ronde :
Georges CHICHMANOV, Secrétaire Général, L'Oréal Russie (cosmétiques)
Vincent LAULHERE, Directeur Général, Transfaire (industrie laitière)
Nicolas RAIMBAULT, Directeur, Kuhn Vostok (machines agricoles)
Bernd SCHANTZ, Directeur Général de la Zone Russie, Ukraine et CEI, PSA (Peugeot Citroën).
Cette table ronde était animée par Philippe BAUDRY et Elisabeth
Les débats étaient animés par Elisabeth PUISSANT, Directrice de la Mission économique Ubifrance en Russie et Philippe BAUDRY,Ministre Conseiller pour les affaires économiques et financières, Chef des services économiques pour la CEi.
Elisabeth PUISSANT
Pour introduire nos débats, je partirai d'un article récemment paru dans Kommersant , qui parlait de la spécificité, voire de l'anomalie, du modèle Kalouga. Cette région, qui peut se prévaloir d'une croissance représentant 30 % du PIB par an, compte 400 Français, sur les 8 000 étrangers qu'elle accueille au total, ce qui représente la plus grosse communauté française en Russie derrière Moscou. La situation actuelle de cette région atteste en outre d'un processus de reconversion réussi, dans une zone spécialisée, au départ, dans l'aéronautique.
Selon le journaliste de Kommersant , le secret de Kalouga réside dans la création de clusters et dans l'affirmation d'une vocation universitaire et scientifique forte. Les responsables de cette région ont en outre su mettre en place un climat des affaires très favorable, en créant notamment une agence pour le développement qui soutient les investisseurs dans leurs démarches. Un tel climat dynamise une politique industrielle déjà active et a notamment permis l'arrivée d'un investisseur de référence dans le secteur de l'automobile.
L'oblast de Kalouga offre en outre une grande probité des relations professionnelles, ce qui contribue là encore à attirer les investisseurs étrangers. Par ailleurs, si l'endettement de la région de Kalouga est certes important, le jeu en vaut la chandelle dans la mesure où la montée en puissance du modèle économique de cette région semble profiter à l'ensemble des acteurs en présence, y compris les industries traditionnelles qui s'étaient plaintes dans un premier temps d'être un peu écartées, pour s'apercevoir ensuite qu'elles pouvaient tout à fait tirer leur épingle du jeu.
Philippe BAUDRY
Pourquoi investir en Russie ? Pourquoi s'implanter dans ce grand pays ?
Georges CHICHMANOV
L'Oréal est présent en Russie depuis 1990, sur la base d'un projet industriel qui a pris la forme de sociétés mixtes de production, disparues au bout de trois ans. Nous avons ensuite créé une filiale commerciale, en 1994, et nous employons aujourd'hui 1 200 personnes, pour un chiffre d'affaires de 800 millions d'euros. Nous enregistrons une forte croissance et nous avons donc décidé d'investir industriellement dans notre propre usine et de rechercher un emplacement logistique près de Moscou. Nous avons ainsi construit une usine à Kalouga, laquelle a été inaugurée en septembre 2010.
Vincent LAULHERE
Notre métier est de fournir des machines pour l'industrie laitière et l'élevage laitier. Nous sommes présents en Russie depuis plus de 20 ans et nous avons senti que les choses ont changé en 2011, concernant l'efficacité de nos investissements. Nous avions eu d'abord à faire face à une pénurie de machines. Nos clients pensaient ensuite qu'il suffisait d'acheter une machine occidentale pour faire des gains de productivité importants. Or, cela ne suffit guère et il est important d'améliorer sans cesse ses compétences et son savoir-faire pour progresser sur le marché.
Les Russes ont récemment réalisé que leur outil industriel était surdimensionné et très mal équipé, avec des taux de rentabilité très bas. Ils ont donc décidé de prendre en compte les aspects de formation et d'acquisition des savoir-faire, ce qui a profondément modifié la donne.
Philippe BAUDRY
Pourquoi avoir choisi la région de Kalouga ?
Vincent LAULHERE
Nous devons être au plus près de nos clients, qui sont essentiellement des exploitants agricoles, car nous devons intervenir dans les quatre heures, en cas de panne, notamment.
Nicolas RAIMBAULT
Kuhn est un constructeur de matériel agricole non motorisé. Nous avons décidé d'investir en Russie, compte tenu de la taille de ce pays et de l'importance de son secteur agricole.
Ce n'est pourtant qu'à partir de 2000 que le marché s'est ouvert pour le type de matériel que nous commercialisons, et nous nous sommes efforcés de répondre à cette demande nouvelle.
Le gouvernement russe a fait du développement du secteur agricole en Russie l'un de ses axes de développement majeurs ; nombre de subventions sont ainsi accordées pour promouvoir le développement de ce secteur. Le marché du matériel agricole est par conséquent très dynamique aujourd'hui en Russie.
En tant que constructeur de ce type de matériel, nous nous devions d'être présents en régions. Nous avons fait le choix de Kalouga car c'est proche de Moscou. Or, c'est important tant sur un plan logistique que strictement organisationnel.
Le pays est extrêmement vaste, et il n'est pas toujours aisé de choisir la région dans laquelle on investit ; l'accueil très chaleureux dont nous avons bénéficié à Kalouga nous a évidemment encouragés à concrétiser nos projets dans cette zone géographique.
Georges CHICHMANOV
Nous avons été accueillis, à Kalouga, par une administration jeune, compétente, professionnelle et efficace, ce qui a évidemment joué un rôle important dans le succès de notre coopération. Nous avons fait le choix d'implanter notre usine dans cette région en 2008 et nous avons pu l'inaugurer en septembre 2010, sans rencontrer le moindre problème administratif, ce qui prouve que nous avons fait le bon choix.
Philippe BAUDRY
Pourquoi investir et pourquoi Kalouga ?
Bernd SCHANTZ
La Russie est incontournable, c'est un must comme diraient certains, à l'instar de l'Asie et de l'Amérique Latine. La croissance de l'industrie automobile concernera en effet, à n'en pas douter, ces trois zones géographiques dans les prochaines années et nous nous devons par conséquent d'y être présents.
Le marché de l'automobile progresse de 40 % par an en Russie, ce qui est un taux tout à fait exceptionnel. De plus, ce marché est porteur non seulement à court terme, mais continuera très probablement à l'être pendant des années.
Nous avons fait le choix de Kalouga en 2007, alors qu'une vingtaine de possibilités s'offraient alors à nous, pour sa situation géographique, à 180 kilomètres de Moscou, reliée à la capitale par un réseau routier et un réseau ferroviaire important. C'est en outre un bassin d'emploi important, avec une ville de 300 000 habitants et 1,2 million d'habitants au total sur l'Oblast. La décision du gouvernement de Kalouga de nous accompagner a également pesé très lourd dans notre choix.
Enfin, le climat des affaires est très propice, dans une région qui a déclaré la guerre à la corruption.
Elisabeth PUISSANT
L'entreprise Kuhn a-t-elle intérêt à s'implanter dans la ville même de Kalouga, ou plutôt en périphérie ?
Nicolas RAIMBAULT
Nous avons entreposé notre stock à 30 kilomètres de Kalouga, dans un village. Ce choix nous a semblé pertinent car nous avons été accompagnés, dans le cadre de nos démarches, par un partenaire qui nous a suggéré cette implantation. Ce choix nous semble avec le recul très pertinent car cela nous permet de ne pas être soumis aux tensions, sur les prix notamment, que l'on constate dans les grandes villes.
Vincent LAULHERE
Pour notre part, notre bureau est situé en ville. Nos clients sont principalement des grosses fermes et nous nous sommes par conséquent installés au plus près d'eux.
Philippe BAUDRY
Comment avez-vous obtenu les autorisations administratives multiples et variées qu'il faut pour débuter tout business en Russie ? Quid des branchements en énergie ? Quid des délais de construction de vos implantations ?
Bernd SCHANTZ
Je trouve que le management de l'administration de Kalouga est de qualité. Les contacts avec cette dernière sont en effet souvent informels et la bureaucratie est quasi-inexistante, ce qui confère une grande efficacité à cette administration.
Pour notre part, les choses ont remarquablement bien fonctionné et notre implantation a été mise en place dans des délais tout à fait acceptables, comparables à ceux auxquels nous nous sommes trouvés confrontés dans les autres pays dans lesquels nous nous sommes implantés.
En outre, lorsque nous nous sommes heurtés à des difficultés de fourniture d'électricité, M. Artamonov en personne n'a pas hésité à se déplacer à Moscou pour plaider notre cause.
Georges CHICHMANOV
L'efficacité de l'administration de Kalouga est effectivement bien réelle, même si celle-ci est soumise à des réglementations fédérales. Toutes les questions de connexion et de mise en route de la fourniture de gaz n'ont malgré tout jamais posé problème, ou très peu, et ceux-ci ont été réglés rapidement lorsqu'ils se sont présentés. Nous avons ainsi pu mettre en place notre usine sans difficulté majeure et démarrer la production en septembre 2010.
Elisabeth PUISSANT
Existe-t-il des particularités propres à l'implantation des PME en Russie en général, et à Kalouga en particulier ?
Vincent LAULHERE
La région de Kalouga compte beaucoup de spécialistes de notre secteur extrêmement spécialisé, ce qui constitue pour nous un avantage évident.
Nicolas RAIMBAULT
Mettre en place un stock est plus facile que construire une usine. Pour autant, nous sommes satisfaits d'être parvenus à mettre en place notre implantation dans cette région, même si nous avons dû surmonter quelques difficultés de départ, concernant notamment notre connexion internet, qui a été difficile à établir.
Le potentiel du marché russe dans le machinisme agricole est tel que l'installation d'une ligne de production dans ce pays ferait sens, à n'en pas douter. Comme je l'indiquais précédemment, le gouvernement russe souhaite développer la production agricole sur son sol, afin de réduire la dépendance du pays aux importations. 80 % de la viande et des produits laitiers sont aujourd'hui importés, en Russie, ce qui peut sembler quelque peu paradoxal, compte tenu de l'immensité et des ressources de ce pays. Un tel contexte est par conséquent tout à fait propice au renforcement de nos investissements dans ce pays.
Philippe BAUDRY
Une usine automobile a besoin, pour fonctionner, de milliers de composantes qui arrivent à une heure précise, chaque jour. Je crois savoir que vous avez affrété des trains spéciaux, entre Vesoul et Kalouga, pour atteindre cet objectif. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ?
Bernd SCHANTZ
De fait, nous avons effectivement mis en place une logistique particulière pour transporter nos composantes de Vesoul vers Kalouga. Nous acheminons ainsi 15 000 containers par an, via 300 trains. Dans le schéma de just-in-time qui est aujourd'hui le nôtre, il est essentiel que les trains arrivent à l'heure à Kalouga.
Anatoli ARTAMONOV
Lorsque j'ai pris mon poste de gouverneur, j'ai suggéré aux responsables du secteur militaire de se tourner vers d'autres secteurs d'activité. C'est ainsi qu'une usine de construction de sous-marins s'est mise à construire des turbines électriques pour une utilisation civile dans les centrales. Une usine qui fabriquait des chars a quant à elle commencé à construire des pièces de chaussures pour une entreprise allemande.
Ces entreprises étaient habituées à recevoir d'importants subsides de l'État et il a fallu leur apprendre à travailler dans les conditions de la production civile. Cela n'a pas été chose facile, mais nous y sommes parvenus et nous avons réussi à créer une économie alternative, soumise à de nouvelles conditions de concurrence. Les mentalités ont également évolué. Nous avons fait en sorte de faire la promotion de notre région, qui n'attirait pas grand monde au départ, il faut bien l'avouer.
Finalement, le bouche-à-oreille entre les acteurs économiques a produit des résultats et notre collaboration avec Volkswagen, notamment, a eu tellement d'échos positifs qu'elle a contribué à attirer de nouveaux investisseurs. En tout état de cause, il est toujours plus difficile de gérer la croissance que la stagnation et cela s'est révélé vrai pour nous également.
Durant la période des élections, les électeurs ont témoigné leur confiance dans l'administration locale puisqu'un slogan a même vu le jour, selon lequel les habitants de la région de Kalouga auraient souhaité que les élections se tiennent partout en Russie, comme elles s'étaient tenues dans leur région, c'est-à-dire dans le respect des règles démocratiques.
Le système de formation du personnel dans nos établissements n'était pas au point pour les entreprises occidentales qui souhaitaient s'implanter. Nous avons donc créé une université et une école de formation, et nous avons formé 6 000 personnes en un temps record, dont un nombre important travaille chez Volkswagen.
S'agissant de l'agro-business, toute l'agriculture russe a été revisitée et reconstruite. Nous avons décidé de créer des fermes robotisées, où les vaches arrivent toutes seules vers des robots qui opèrent la traite. De fait, nous aimerions que la Russie n'importe plus, à terme, que des bananes et des ananas et parvienne à exporter sa production vers d'autres pays. Nous espérons que notre adhésion à l'OMC va nous aider à « faire le ménage » et à construire une nouvelle économie sur les vestiges de la vieille économie actuelle, marquée par une forte dépendance aux exportations. Il est délirant de nous voir importer autant de nourriture, alors que nous disposons de surfaces cultivables immenses.
De la salle
Quid de l'appui des autorités françaises dont vous avez bénéficié dans le cadre de vos projets ?
Elisabeth PUISSANT
Ubifrance organise notamment des actions collectives et individuelles pour vous aider à découvrir le marché russe. La convention d'amitié que nous avons signée tout à l'heure avec la Chambre de commerce vient compléter ce dispositif. Dans le cadre de la charte de l'export, nous veillons en outre à favoriser la politique du guichet unique.
Nicolas RAIMBAULT
Nous travaillons souvent avec Ubifrance pour l'organisation d'expositions commerciales, notamment.
De la salle
La Chambre de commerce organisera prochainement une manifestation pour la promotion du secteur automobile, à Moscou-Kalouga et Saint-Pétersbourg.
Olivier MEHR, La Buvette
Pour donner à boire aux animaux en Russie, nous avons dû installer des équipements adaptés à la rigueur du climat et à la taille des troupeaux.
J'aimerais par ailleurs que le gouverneur fasse état des attentes des éleveurs russes vis-à-vis des entreprises occidentales. La France a signé il y a dix ans un accord sur la reconstruction du cheptel bovin, lequel est encore en vigueur, en dépit de quelques difficultés d'application et de quelques contretemps. Il est ainsi dorénavant possible d'importer des animaux français en Russie.
Comment pouvons-nous faire pour améliorer encore notre partenariat avec votre grand pays ?
Anatoli ARTAMONOV
En ce qui concerne les besoins de l'élevage russe, ils vont croître très probablement et nous envisageons d'accroître nos investissements dans le secteur agricole de près d'un milliard d'euros.
Nous avons effectivement subi une perte importante de nos vaches laitières et nous nous trouvons ainsi contraints d'acheter des bêtes, pour reconstituer notre cheptel. A cet égard, je vous invite à envoyer chez nous vos meilleurs spécialistes, afin que nous puissions atteindre cet objectif dans les meilleurs délais.
Philippe BAUDRY
Je n'ai qu'une seule crainte, c'est que le gouverneur Artamonov rende ses collègues jaloux et je voudrais souligner que l'oblast de Kalouga a au moins mérité son double AA, correspondant aux initiales de M. Artamanov.
Les grands projets de Total en Russie
Pierre NERGUARARIAN
Directeur Général, Total Exploration & Production Russie, Représentant de Total en Russie, CCEF
Je vais vous faire grâce des transparents que j'avais préparés, compte tenu de l'heure tardive, et je vais simplement développer deux ou trois idées clés.
Quand un groupe tel que Total décide de s'installer dans un pays comme la Russie, il sait qu'il n'y va pas pour « faire un coup » mais qu'il vient pour longtemps. C'est ainsi que nous sommes présents, pour notre part, dans cet immense pays depuis 20 ans, maintenant. 20 années durant lesquelles nous nous sommes efforcés de susciter la confiance de nos partenaires, qu'il s'agisse de ceux de Kharyaga ou du projet Shtokman, notamment, pour ne citer qu'eux.
A l'horizon 2020, le groupe Total produira ainsi 400 000 barils-jour en Russie, ce qui est évidemment colossal et atteste, s'il en était encore besoin, de l'importance de ce pays pour notre entreprise.
Un bref film est diffusé, retraçant les grandes étapes du développement du Groupe Total en Russie, au cours des 20 dernières années.
Elisabeth PUISSANT
Pour conclure, je soulignerai simplement l'importance de la confiance, de la transparence et de la volonté de travailler ensemble, comme le disait Pierre Nerguararian dans le film qui vient d'être diffusé. Je vous remercie tous pour votre participation et pour la qualité de nos échanges.
Intervention de
Thierry MARIANI, Ministre chargé des Transports,
Monsieur le Président,
Monsieur l'Ambassadeur,
Messieurs les Gouverneurs,
Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement heureux d'être parmi vous aujourd'hui à l'occasion de cette 11 ème édition des Rencontres Russie organisées par le Sénat et Ubifrance.
Je me réjouis de voir la Russie une nouvelle fois au coeur de l'actualité à Paris, quelques jours après la tenue du Séminaire intergouvernemental franco-russe à Moscou et la conférence du Dialogue Franco-Russe à Paris.
Je regrette de n'avoir pu assister à tous les échanges de ce matin, retenu par des obligations à l'Assemblée nationale, mais tenais néanmoins à venir vous saluer personnellement.
Cette journée illustre, une fois de plus, la densité et la grande qualité des relations qu'entretiennent nos deux pays depuis de nombreuses années, qu'il s'agisse des domaines politiques, culturels et économiques, ou de secteurs plus techniques, comme celui des transports et des services urbains.
Certains d'entre vous participaient, il y a quelques jours, à la session du Dialogue franco-russe consacrée à la thématique des transports, sous l'égide du vice-premier ministre, M. IVANOV. Je dois avouer que nos perspectives d'échanges en la matière sont particulièrement prometteuses. Par ailleurs, j'ai assisté au lancement, il y a deux jours, de la liaison ferroviaire directe Moscou-Berlin-Paris. Elle illustre les excellentes relations nouées entre la SNCF et les Chemins de fer russes, RJD.
Mais les relations franco-russes ne concernent pas seulement les échelons centraux.
Et je me réjouis de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de saluer la présence d'un Gouverneur et d'un Vice-gouverneur de la Fédération de Russie, des régions de Kalouga et d'Irkoutsk. Les relations que nous entretenons avec ces deux régions sont en effet particulièrement exemplaires. Je salue à nouveau M. Artamonov, à qui j'ai eu l'honneur de remettre ce matin notre plus haute distinction, la Légion d'Honneur, pour son rôle actif et prépondérant dans la coopération franco-russe.
Monsieur Artamonov, la stratégie de développement claire et moderne que vous avez entreprise depuis plusieurs années, a en effet grandement facilité l'implantation des investisseurs français dans votre région. Je pense notamment aux usines Peugeot et l'Oréal. Le groupe Lafarge y disposera également bientôt d'une usine de ciment au fonctionnement novateur. Je citerai aussi la liaison ferroviaire directe qui a été mise en place l'année dernière afin de faciliter les échanges entre les usines Peugeot de Vesoul et de Kalouga. Ce projet de transport multimodal est l'un des plus ambitieux d'Europe en termes de volumes transportés et s'inscrit parfaitement dans la politique que nous conduisons en matière de développement durable.
Je tenais également à vous remercier d'avoir accueilli, au printemps dernier, le groupe de travail, animé par mon ministère, consacré aux services urbains et à la construction. J'espère que Dalkia, leader des services énergétiques, qui en a manifesté l'intérêt, pourra apporter ses compétences pour la rénovation du réseau de chaleur de la ville de Kalouga dans le cadre d'un partenariat public-privé innovant. Dans cette ville, berceau de l'exploration spatiale en Russie, je ne peux que souhaiter un bon envol à toutes nos coopérations.
Soyez assuré, M. Artamonov, de mon entier soutien pour favoriser, à vos côtés, l'implantation et les actions des entreprises françaises dans votre région.
Je voudrais également saluer les relations denses qui existent avec la région d'Irkoutsk.
Irkoutsk, ce n'est pas seulement l'un des ancrages du transsibérien sur les rives du lac Baïkal. C'est aussi une ville moderne en plein essor. C'est pourquoi je me réjouis que la France soit aussi présente à l'est de la Fédération de Russie, dans le cadre de coopérations dans des domaines aussi divers que l'aéronautique, l'hôtellerie, les télécommunications, la logistique, la construction ou encore la santé. Je suis sûr, Monsieur Netchaiev, qu'avec votre appui, nous pouvons encore développer nos partenariats bilatéraux.
La Fédération de Russie est un territoire immense, aux multiples potentiels, où la France peut encore renforcer sa présence. Je tiens donc à saluer les chefs d'entreprises ici présents. Vous êtes les ambassadeurs de nos savoir-faire. Et je ne doute pas que vous pourrez faire encore bénéficier les autorités russes de vos expériences et de vos technologies innovantes.
Je sais qu'Ubifrance et le MEDEF organisent dans plusieurs grandes villes de Russie des séminaires présentant l'expertise des entreprises française dans de nombreux domaines. Mon ministère soutient tout particulièrement ces actions qui viennent conforter les ambitions de la France pour le renforcement de nos coopérations avec la Fédération de Russie. Aussi je vous invite à y participer afin de faire connaître la qualité de votre production.
Je formule le voeu que cette journée d'échanges contribue à renforcer encore davantage nos partenariats grâce à la mise en commun de nos expériences réciproques.
Je vous remercie de votre attention.