Colloque Sénat-UbiFrance sur les Balkans- 25 novembre 2004


Perspectives économiques et financières des Balkans

Philippe CRISTELLI,
Conseiller financier pour l'Italie, la Grèce et les Balkans, Mission économique à Rome

Je tâcherai d'être synthétique, en abordant deux grands aspects : celui du lien entre stabilisation et compétitivité d'une part, et celui des réformes d'autre part.

Nous avons assisté, ces dernières années, à une stabilisation et une amélioration de la situation des pays des Balkans. Mais la situation d'autarcie en Albanie et les crises politiques ou les guerres dans les pays de l'ex-Yougoslavie, notamment, ont entraîné un retard économique d'une dizaine d'années.

Aujourd'hui, les indicateurs macroéconomiques sont relativement favorables. L'inflation est désormais très réduite, après s'être envolée à plusieurs chiffres voilà quelques années. Seule l'inflation de la Serbie-et-Monténégro est supérieure à 10 %, traduisant toutefois un véritablement assainissement au regard des années récentes. Les taux de change fluctuent par rapport à l'euro, mais dans des marges relativement étroites. Le niveau de déficit varie fortement suivant les pays. La Bosnie-Herzégovine, elle, est quasiment à l'équilibre.

Outre ces éléments favorables, il convient de rappeler que ces pays sont engagés dans une phase de rattrapage, de retour au niveau qui prévalait avant les crises. Cependant, des tensions sociales très fortes pourraient voir le jour, en raison notamment des situations de sous-emploi. Heureusement - mais faut-il s'en réjouir ? -, le niveau du chômage est en partie compensé par l'impact de l'économie informelle, qui représente 40 à 60 % du PIB selon les pays.

Ces pays étant de petites économies, se pose la question de leur compétitivité - en particulier à l'exportation. L'activité économique est peu diversifiée. Les déficits commerciaux sont très importants. En Croatie toutefois, l'apport du tourisme et le développement de l'économie de services contribuent à réduire ces déficits. Se pose en outre le problème de la disparité entre les besoins de financement et les niveaux d'épargne. Le niveau des investissements directs étrangers est limité et ne couvre pas les déficits. Ceux qui ne sont pas liés aux privatisations sont encore plus limités. Dès lors, ces pays doivent faire appel aux financements internationaux (qui représentent près de 20 milliards de dollars). A cela s'ajoute le fait que ces pays sont en développement, ce qui explique l'importance des transferts financiers dus aux émigrés.

Les niveaux de dette externe sont très variés. En Croatie, elle s'explique en partie par la dette du secteur privé bancaire. La dette publique, elle, représente en moyenne 10 % du PIB dans tous les pays.

J'en viens à mon second point, relatif aux conditions permettant à ces pays d'avoir un fonctionnement d'économie de marché. Trois critères sont indispensables. Tout d'abord, il convient que le système bancaire joue son rôle. Il importe en outre que soit mis en place un cadre juridique et légal stable. Enfin, des réformes de structures doivent être engagées dans le secteur privé productif.

Dans tous les pays, le secteur bancaire a été assaini et, le plus souvent, privatisé. Mais le rôle de l'intermédiation financière demeure encore relativement faible. Quoi qu'il en soit, le fait que le système bancaire soit en grande partie détenu par des investisseurs financiers permet des avancées notables.

Dans la plupart des pays, l'Etat est faible et difficilement reconnu. Il éprouve dès lors des difficultés à mettre en place une fiscalité, par exemple. Le cadre légal est donc en devenir, même s'il n'a cessé de s'améliorer.

Enfin, si des réformes ont déjà été engagées, certains secteurs demeurent rigides. Je pense ainsi à celui de l'énergie. Sur ce point, ces pays sont encore en phase de transition.

Pour résumer, je dresserai un bilan relativement nuancé des perspectives économiques et financières des Balkans. J'ajoute encore que la stabilisation de l'économie est fortement dépendante du contexte politique, qui est le plus souvent volatile, comme les intervenants précédents l'ont bien montré.

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