Renforcement des capacités des parlementaires en matière de développement durable (22 et 23 avril 2005)



Groupe 2: Changements climatiques et Énergie

Présentation des enjeux

Présentateur: Monsieur Janos PASZTOR, Directeur du Programme Développement Durable du Secrétariat de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

Janos PASZTOR

Je vous propose de démarrer cet après-midi d'échanges par un bref exposé. Les domaines de l'énergie et des changements climatiques soulèvent de véritables questions de fond, susceptibles d'intéresser les parlementaires.

Quel doit être le rôle du Parlement dans ce domaine ? Quels sont les principaux obstacles au développement durable, tant sur le plan national que sur le plan international ? Comment renforcer les capacités d'intervention des parlementaires dans ce domaine ? Quelle peut être la contribution de l'UNITAR ?

I. Les relations entre énergie, changements climatiques et développement durable

Je voudrais partager quatre idées avec vous.

- L'énergie est fondamentale pour le fonctionnement de nos sociétés, dans toutes leurs composantes.

- Une grande partie du changement climatique est provoquée par la consommation d'énergie ou par les secteurs d'activité liés à l'énergie.

- Les changements climatiques auront des conséquences importantes en matière d'accès et de disponibilité des ressources énergétiques.

- Les solutions aux problèmes énergétiques et aux changements climatiques doivent s'inscrire dans une politique globale, de développement durable.

II. Les impacts du changement climatique
1. Les impacts immédiats

Le mécanisme d'effet de serre est relativement simple : en raison de gaz à effet de serre, l'énergie solaire ne peut être rejetée entièrement hors de l'atmosphère terrestre. Or, l'accumulation de cette énergie solaire et des gaz à effet de serre a une conséquence directe : le réchauffement de la planète. Plus précisément, les concentrations de gaz à effet de serre, tout comme les températures, augmentent partout dans le monde. Certes, les variations des températures demeurent fortes, ce qui est normal. Force est de constater néanmoins qu'elles ne cessent de croître. Le niveau de la mer augmente également. Aussi nous attendons-nous à une hausse sensible de ces niveaux lors des prochaines décennies.

2. Les impacts à long terme

A plus long terme, le changement climatique aura des conséquences sur la santé et sur l'agriculture notamment. Au cours des deux prochaines décennies, il permettra une hausse de la production. Toutefois, à plus long terme, tous les pays en souffriront, ce qui devrait conduire à la baisse des niveaux de PIB.

En outre, il semble évident que les forêts et les ressources en eau en subiront les effets. Les zones côtières seront logiquement inondées en raison de la hausse du niveau de la mer. De plus, les espèces et l'habitat naturel souffriront du changement climatique.

Prenons l'exemple du Bangladesh. Une hausse du niveau de la mer de 1,5 mètre affecterait 15 % de sa population et 16 % de sa surface. Il nous faut donc agir.

III. Des outils d'envergure mondiale, des solutions locales

Le changement climatique est un sujet d'envergure mondiale. Si des accords internationaux sont nécessaires pour lutter contre ce problème, il convient également de déployer des solutions locales. D'un point de vue international, le protocole de Kyoto et la convention sur le climat des Nations Unies représentent les deux principaux textes à notre disposition. Cette dernière convention, ratifiée par la quasi-totalité des États il y a maintenant près de dix ans, se fonde sur le principe d'une responsabilité commune, mais différenciée. Le protocole de Kyoto, entré en vigueur en 2005, impose des engagements de réduction d'émissions contraignants pour les pays signataires. Je rappelle à ce titre que les pays en développement ne sont pas soumis à cette contrainte.

Par ailleurs, le protocole de Kyoto s'appuie sur des mécanismes de conformité. Si un pays ne respecte pas les engagements du protocole, il ne pourra pas participer au mécanisme de flexibilité instauré par celui-ci. La première réunion des États signataires de ce protocole se tiendra en décembre, à Montréal.

D'un point de vue pratique, le protocole préconise une réduction des émissions à la source. Il faut, pour cela, utiliser des combustibles alternatifs aux combustibles fossiles et réduire l'utilisation de ces derniers. D'autres solutions sont envisageables : une autre organisation des villes ou la lutte contre la déforestation par exemple.

De prime abord, nous pourrions estimer que les émissions des pays industrialisés ont largement baissé, à hauteur de 40 %. Dans les faits, ces mêmes pays industrialisés ont vu leurs émissions augmenter. Si les résultats ne sont pas du tout encourageants, Kyoto devrait permettre d'y remédier.

IV. Il faut s'adapter au changement climatique

Le climat a d'ores et déjà changé de manière irrémédiable. Nous devons nous adapter à cette nouvelle donne, également sur le plan politique. Par ailleurs, les impacts du changement climatique sont d'ores et déjà mesurables. Ils portent par exemple sur les zones alpines, très affectées par ce changement climatique. De plus, les coûts économiques du changement climatique sont très élevés. Si l'application du protocole de Kyoto est coûteuse, le changement climatique est, à long terme, beaucoup plus onéreux.

L'adaptation aux changements climatiques est absolument nécessaire. L'agriculture, en premier lieu, doit en tenir compte et s'y conformer. Plus généralement, il va de soi que le changement climatique rendra l'atteinte des objectifs de développement fixés plus problématique. Par ailleurs, certains pays, comme le Bangladesh par exemple, doivent agir dès à présent pour pouvoir faire face aux changements climatiques. Cette question doit être intégrée dans toutes les politiques de développement durable.

V. La problématique énergétique

L'accès à l'énergie est perçu comme une des solutions pour que les pays en développement sortent de leur situation difficile. En conséquence, ils doivent avoir accès à une énergie propre et bon marché. Pour cela, 10 trillions de dollars seront nécessaires au cours des 30 prochaines années. De toute évidence, des solutions doivent être mises en place dès aujourd'hui, ce qui constitue une première difficulté. De la même manière, où trouver les fonds auxquels je viens de faire référence ?

VI. Que faire ?

Au-delà du protocole de Kyoto, de nouveaux accords sont nécessaires. Un nouvel accord de lutte contre le changement climatique, impliquant les États-unis, devra notamment être trouvé. De la même manière, il sera nécessaire de conclure un accord avec les pays en développement qui deviennent, peu à peu, des émetteurs de gaz à effet de serre. Nous devons par ailleurs réfléchir à la mise en place de systèmes de financement et d'une ingénierie financière à même de prendre en compte la problématique environnementale et, plus précisément, la réduction des gaz à effet de serre.

Plusieurs missions se profilent devant vous.

- Vous devez vous assurer de la mise en oeuvre des traités et conventions signés par les Gouvernements.

- Vous devez encourager le développement de synergies, au niveau national.

- Vous devez encourager le développement de nouveaux instruments internationaux

- Vous devrez renforcer vos relations avec des parlementaires d'autres pays, afin de procéder à un échange de bonnes pratiques.

Discussion et débat en groupe

De la salle

Quels sont les éléments qui font obstacle à la signature du protocole de Kyoto par les États-unis ? Quel est le calendrier des travaux de la conférence qui se tiendra à la fin de l'année à Montréal ?

Un parlementaire égyptien

Nos réserves de pétrole diminuent alors que l'utilisation de gaz naturel s'accroît. Par ailleurs, nous savons tous que nous devons utiliser des formes d'énergies alternatives, comme l'énergie nucléaire notamment. Comment les pays en développement peuvent-ils accéder à cette forme d'énergie ? Comment les parlementaires que nous sommes peuvent-ils oeuvrer pour que les dispositions auxquelles vous avez fait référence soient réellement mises en oeuvre ?

Ahmed ZAROUF

Ma question porte sur les énergies renouvelables, qui présentent de nombreux atouts. Je pense tout particulièrement à l'énergie solaire, qui est non polluante et bon marché. Pourquoi ne pas mettre en place des outils et des politiques de promotion de cette forme d'énergie ?

Pour ma part, je pense que les résolutions et les protocoles demeurent des voeux pieux, qui ne sont que rarement appliqués. Pour ce qui est du mode de financement des politiques de réduction des gaz à effet de serre, je vous propose la solution suivante : réduisons les budgets militaires et taxons les contrats d'achat d'armes.

Les pays en développement sont les moins bien armés contre les changements climatiques.

- Ils subissent une fuite de leurs cerveaux.

- Dans la mesure où ils exportent nombre de leurs productions vivrières, ils exportent une ressource essentielle : l'eau. Or, ils sont les premiers à subir les impacts du changement climatique sur l'eau.

Surangel WHIPPS

Mon pays pâtit dès à présent des effets du changement climatique sur l'environnement. Ainsi, les récifs coralliens sont en train de mourir. En outre, vous n'avez pas évoqué l'hypothèse d'une alternative au transport aérien, fort consommateur d'énergies fossiles non renouvelables. Des alternatives existent-elles en la matière ?

De la salle

Les infrastructures énergétiques connaissent actuellement un profond renouvellement : nous devons saisir cette chance unique pour lutter contre les changements climatiques.

Abdelkrim SIDI MOUSSA

En Algérie, toutes les rivières et tous les cours d'eau s'assèchent. J'appartiens à une génération qui a connu des cours d'eau abondants. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. En effet, nous sommes les victimes des pays industrialisés qui émettent des gaz à effet de serre. Dans le même temps, il nous est paradoxalement demandé de contribuer à l'élimination de ces derniers. Or, nous n'en avons pas les moyens, et ce d'autant plus que nous aspirons à un développement qui, de toute évidence, nécessitera le recours partiel à des énergies fossiles, donc polluantes. Comment concilier ces deux dimensions ? Par ailleurs, comment ramener à la raison les pays gigantesques qui polluent notre planète ?

Jean Blaise DOUGANDAGA PAMBOU

Le Parlement ne semble avoir pour autre rôle que de juger l'action du Gouvernement. Ne devrait-il pas, au contraire, participer plus directement à la lutte contre les gaz à effet de serre et les changements climatiques afférents ?

Un parlementaire de Papouasie Nouvelle-Guinée

Les pays développés sont responsables des émissions de gaz à effet de serre. Ils sont donc responsables des changements climatiques. Comment peuvent-ils aider les pays en voie de développement dans l'établissement de procédures parlementaires ? Je pense notamment à la création de Commissions parlementaires dédiées au défi du changement climatique.

Mohamed Chafeddine GUELLOUZ

Ma question concerne l'énergie nucléaire. Comment répondre au défi du nucléaire ? Comment faire en sorte que cette énergie devienne moins polluante ? Comment éviter que les savoir-faire et les technologies en la matière soient utilisés à des fins militaires ?

Janos PASZTOR

Pour expliquer sa position face au protocole de Kyoto, les États-unis avancent souvent les arguments suivants :

- sa mise en place coûte trop cher ;
- il ne concerne pas les trois plus grands pays du monde ;
- les États-unis n'aiment pas se voir opposer des objectifs chiffrés.

En ce qui concerne la conférence de Montréal, elle donnera lieu à deux séances parallèles : la première réunira les États associés à la convention, la seconde les États associés au protocole.

Pour ce qui est des investissements dans le secteur énergétique, il faut rappeler que les installations, dans les pays développés, connaissent actuellement un renouvellement de fond en comble. Il faut saisir cette chance unique.

S'agissant de l'énergie nucléaire, il est vrai qu'elle constitue une source d'énergie alternative. Dans certains pays, le nucléaire sera peut-être la seule solution.

Par ailleurs, les parlementaires des pays en voie de développement ne sont pas forcément passifs face à la problématique du changement climatique. L'exemple du Brésil le montre d'ailleurs parfaitement. En outre, nombre d'initiatives lancées dans les pays en voie de développement pourraient être partagées.

John SPENCER

Je souhaite revenir sur la position des États-unis face au protocole de Kyoto. Tout d'abord, nous devrons mettre de côté la politique américaine qui, de toute évidence, changera un jour. Nombre de parlementaires américains, comme John Kerry par exemple, sont intimement persuadés que les États-unis doivent adhérer au protocole de Kyoto. En outre, les Sénateurs américains n'y sont pas tous opposés, bien au contraire.

J'avoue ne pas adhérer à la dichotomie affichée entre pays développés et pays en voie de développement, dans la mesure où certains de ces derniers disposent d'une réelle influence sur la question énergétique. Le Gabon et l'Algérie notamment en font partie.

Par ailleurs, le programme « contraction et convergence » propose de plafonner les émissions et soumet le principe d'une réduction plus rapide des émissions des pays développés. Les pays en voie de développement auraient le droit, dans un premier temps, d'augmenter légèrement leurs émissions, avant d'être ensuite contraints de les réduire. Je pense que ce modèle est très pertinent.

Janos PASZTOR

Les parlementaires doivent se saisir de la problématique du changement climatique, se servir des expériences qui sont portées à leur connaissance (dans le cadre de colloques, par exemple) et les transmettre à leurs collègues.

Une question portait sur une éventuelle alternative aux voyages en avion. Pour les voyages de longue durée, je pense que l'avion a de beaux jours devant lui. En revanche, pour les voyages plus courts, le train est un bon recours. Malheureusement, le train est parfois plus cher que l'avion, ce qui est, à mes yeux, totalement ubuesque. Par conséquent, comment réduire le prix des voyages en train ?

Je vous propose maintenant d'étudier la façon dont les parlementaires peuvent renforcer leur capacité de lutte contre le changement climatique.

Un parlementaire de l'Inde

Avant d'aborder ce sujet, je souhaite faire une rapide intervention. Au cours des dernières décennies, la question du développement durable est devenue essentielle et inséparable de la problématique plus large du développement. Les aspirations des pays en voie de développement doivent être prises en compte dans toutes les instances. Aussi le concept de développement durable doit-il être abordé dans tous ses aspects.

Toutes les questions évoquées depuis ce matin sont essentielles. Toutes les initiatives d'ores et déjà prises montrent notre volonté d'agir. Toutefois, il nous faut encore agir plus largement pour accroître l'accès de toutes les couches de la population aux ressources. Dans le même temps, nous devons protéger les ressources énergétiques : les Parlements auxquels nous appartenons doivent y contribuer.

Par ailleurs, les technologies respectueuses de l'environnement doivent être transférées des pays développés vers les pays en voie de développement. Les systèmes de production et de transmission d'énergie doivent être optimisés et l'utilisation des énergies propres accrue.

Enfin, par le biais de nouvelles lois, nous pouvons mieux contribuer au respect de l'environnement et lutter davantage contre le changement climatique.

Un parlementaire du Royaume de Bahreïn

Je suis issu d'un tout petit pays, le Royaume de Bahreïn, dont la population ne s'élève qu'à 700 000 habitants. Notre industrie connaît actuellement un certain développement.

Au cours des dernières années, le parlement a pris l'initiative de travailler avec le Gouvernement et le monde industriel. En effet, même si notre contribution à la pollution mondiale est infime, nous avons adopté des lois pour qu'elle soit la plus réduite possible. Nous avons ainsi pu forcer le Gouvernement à adopter une stratégie de réduction de la pollution. De cette manière, nous avons limité l'impact du changement climatique. En effet, les programmes mis en place dans ce cadre sont particulièrement remarquables.

Ainsi, nous avons mis en place des normes de qualité environnementale très strictes. Nous nous sommes appuyés sur les normes européennes et américaines, que nous avons décidé de respecter. En outre, nous avons décidé d'inclure la problématique environnementale dans les programmes scolaires. Notre arsenal législatif porte également sur des « bonnes pratiques » en matière de tourisme, d'industrie et d'agriculture, devant être respectées. De même, notre Constitution comprend désormais un chapitre exclusivement consacré à la problématique environnementale.

Ainsi, la taille des pays importe peu. Chacun, à son niveau, peut se battre pour faire respecter l'environnement, mettre en place des bonnes pratiques et les faire partager. Je tiens également à signaler que les entreprises industrielles de Bahreïn ont adhéré à notre projet : elles ont mis en place des systèmes leur permettant d'atteindre les niveaux d'exigence que nous avons fixés par voie législative.

Janos PASZTOR

Je vous remercie pour cet exposé, auquel j'adhère totalement. Quelle que soit leur taille, tous les pays se doivent d'agir pour lutter contre les changements climatiques.

Liuvu Doru BINDEA

Le droit à un environnement sain et équilibré est, en Roumanie, reconnu constitutionnellement depuis quelques années. En matière de changement climatique, nos objectifs prioritaires sont les suivants :

- mettre en place une stratégie et un plan d'action ;
- réviser, actualiser et compléter notre législation pour assurer la mise en pratique de la stratégie nationale et du plan d'action ;
- assurer la coordination des acteurs concernés ;
- mettre en place des mesures pour évaluer l'impact subi par l'environnement, en raison des changements climatiques ;
- favoriser la dissémination des connaissances et des informations dans la population.

Un parlementaire du Cameroun

Le niveau des eaux baisse au Cameroun. Nous avons d'ailleurs senti, cette année, les effets de la sécheresse avec une plus grande acuité. Les pouvoirs publics se sont donc saisis de la question, en créant un Ministère dédié aux seules questions environnementales.

En tant que représentant de la nation camerounaise, je souhaite vous faire part du message suivant : dans le cadre du développement de l'agriculture, existe-t-il une alternative à la destruction des forêts ? Nous avons décidé de diviser l'espace forestier en unités d'aménagement, obligeant les forestiers à exploiter la forêt pendant 30 ans. Ils doivent verser une quote-part que nous utilisons par la suite pour améliorer l'environnement. Ce processus permet ainsi de sensibiliser la population à la nécessité de respecter les espaces forestiers, dans une optique de développement durable.

De la salle

Comment renforcer le développement durable et comment le mettre en oeuvre ? Comment forcer le secteur privé à tenir compte de cette problématique ? J'appelle de mes voeux la création d'une organisation internationale du développement durable, qui traitera de toutes les problématiques relatives à cette question.

De la salle

Dans la mesure où l'appareil énergétique des pays en voie de développement est encore à construire, nous devons mettre l'accent sur la part laissée aux énergies renouvelables. Pourquoi ne pas créer une infrastructure basée sur les énergies renouvelables ? Je pense que vous, parlementaires, devez vous saisir de cette question, tout particulièrement vis-à-vis de vos Gouvernements respectifs.

Oras TYNKKYNEN

Tous les Parlements rencontrent des obstacles. En effet, si les populations se focalisent sur une optique de court terme, les parlementaires doivent travailler dans une optique de long terme.

Par ailleurs, nous ne sommes pas encore réellement capables de mesurer, financièrement parlant, les impacts du changement climatique. Aussi les outils de mesure idoines doivent-ils être développés.

Enfin, je suis très favorable au renforcement des échanges de bonnes pratiques entre parlementaires.

Un parlementaire slovène

L'UIP est un groupe d'amitié visant à favoriser les contacts et les échanges avec des parlementaires d'autres pays. Malheureusement, certains de mes collègues ne comprennent pas l'intérêt de ces échanges. Pour les sensibiliser davantage, peut-être devrions-nous définir d'autres thèmes de travail.

De la salle

Nos échanges n'ont pas encore permis d'évoquer la problématique de l'appauvrissement des sols. Je pense que cette question, essentielle, ne doit pas être occultée.

Gabor SZALAY

En ce qui concerne le rôle des Parlements dans la problématique du développement durable, je dois dire que nous avons constaté, en Hongrie, de grandes divergences entre la Commission économique d'une part, et la Commission chargée de la protection de l'environnement d'autre part. Ces deux Commissions ne communiquent pas du tout et ne traitent que les problématiques dont elles ont la charge. Je ne pense malheureusement pas que ce travers se rencontre uniquement en Hongrie. Ainsi, avant d'échanger avec des parlementaires d'autres pays, peut-être devrions-nous veiller à ce que, à l'intérieur de nos Parlements nationaux, les différentes Commissions intéressées par la problématique du développement durable travaillent davantage de concert.

Par ailleurs, l'accès aux énergies renouvelables ou propres est très inégal d'un pays à l'autre. Par exemple, le potentiel de production d'énergie éolienne est beaucoup plus important dans les pays disposant d'une surface littorale. En Hongrie, nous n'avons pas de littoral : les vents sont donc faibles. De la même manière, la Hongrie est un pays plat : nous ne pouvons donc pas accéder à l'énergie hydroélectrique.

Enfin, pour ce qui est de l'énergie solaire, notre potentiel de développement est évidemment moins fort que celui des pays du Sud de l'Europe. Le développement des énergies propres n'est donc pas une seule question de coût, mais également une question de capacité et de potentiel.

Un parlementaire kenyan

Mon commentaire portera sur les énergies renouvelables. Notre environnement, au cours des dernières années, a subi de fortes dégradations. Nous n'aurons d'autre choix que d'investir dans les énergies renouvelables. Nombre de pays de la planète sont très ensoleillés. Or, le recours à l'énergie solaire semble être naturel. Évidemment, cette solution nécessite de larges investissements.

Toutefois, je suis convaincu que le recours massif à l'énergie solaire réglerait nombre de problèmes dans les pays en voie de développement. Cela me semble donc être une solution inévitable.

Abdelkrim SIDI MOUSSA

Nous devons maintenant débattre du renforcement du rôle législatif des Parlements dans le domaine du développement durable et des changements climatiques. En Algérie, nous disposons des instruments classiques de la démocratie parlementaire : proposer, légiférer, interroger les gouvernements, organiser des Commissions d'enquête...

Pour autant, ces outils classiques sont-ils suffisants ? Notre démocratie est jeune et accomplit jour après jour de grands progrès. Cela dit, cette démocratie demeure, dans certaines de ses dimensions, fragile. Ainsi, nous avons souvent envie que notre Parlement dispose de davantage de pouvoirs.

De plus, la diplomatie parlementaire est maintenant une réalité. Elle doit se renforcer. Par ailleurs, chaque institution ou organisme international doit être doublé, systématiquement, d'une structure d'essence parlementaire. Plusieurs structures sont disponibles : l'UIP et l'UPA en font partie au premier chef. A travers ces institutions parlementaires, je suis persuadé que nous pouvons agir de manière beaucoup plus efficace, en influant sur les organismes étatiques.

En ce qui concerne la non ratification du protocole de Kyoto par certains pays, des réponses doivent être apportées. Par exemple, pourquoi ne pas multiplier les relations parlementaires avec le Parlement américain, le Parlement indien et le Parlement chinois ?

En Algérie, le désert avance inexorablement. Alors qu'il se situait, il y a peu, à 300 kilomètres d'Alger, il n'en est plus qu'à 150 kilomètres. Nous avons essayé de planter des rubans de forêt, sans succès. Actuellement, l'Algérie connaît une certaine période de prospérité, la conduisant à faire des investissements très importants dans les énergies renouvelables.

Nous savons que cette aisance financière actuelle vient des énergies fossiles qui sont à notre disposition. Toutefois, elles sont condamnées à disparaître. C'est pourquoi nous agissons dès maintenant.

Un parlementaire de la Guinée

Mon pays est communément appelé « le château d'eau de l'Afrique de l'Ouest ». Nous avons pris conscience du danger écologique qui nous menace, dans la mesure où notre réseau hydrographique a subi d'importants dommages et a perdu en densité. Nous avons donc décidé de créer un Ministère de l'environnement ainsi qu'un réseau parlementaire pour l'environnement. Ce dernier envisage de se structurer pour assurer le suivi de l'environnement dans le pays tout entier.

En Guinée, nous connaissons un réel problème d'accès à l'énergie. Si notre potentiel de développement hydroélectrique est important, il est peu exploité. En outre, les agriculteurs produisent de plus en plus de charbon, destiné à une utilisation domestique dans les centres urbains. Cette production de charbon est beaucoup plus rentable que la production de cultures vivrières. Elle est donc choisie par de très nombreux paysans. Nous devons trouver des alternatives à cette logique, afin de réduire cette production. Malheureusement, la question des ressources financières se pose. Or, nous n'avons pas les capacités d'investissement suffisantes.

En Guinée également, la productivité de l'agriculture est particulièrement faible, conduisant les paysans à adopter une forme d'agriculture itinérante. Il convient d'en limiter l'existence, car cette forme d'exploitation aboutit, dans certains cas, à la destruction totale de certaines espèces. Plus généralement, il est évident que la position de la Guinée fait de celle-ci un pays très important pour toute la région.

Alio HAMIDIL

Je suis membre du Parlement du Niger. A ce titre, je tiens à rappeler que le fleuve Niger et le lac Tchad s'assèchent. L'assèchement et l'ensablement du Fleuve Niger sont tels, à Niamey, qu'il est possible de le traverser à pied, alors que nous ne sommes qu'au mois d'avril ! Comme en Algérie, le désert avance au Niger. Toutefois, nous ne disposons d'aucuns moyens financiers pour contrecarrer cette évolution. Cela dit, je tiens à indiquer que notre Gouvernement soutient les populations qui contribuent à lutter contre l'ensablement du fleuve Niger. Plus généralement, il fait tout pour soutenir les initiatives visant à protéger le fleuve Niger.

Un parlementaire sénégalais

Que doivent faire les parlementaires ? Dans tous les Parlements, il existe des Commissions techniques susceptibles de se saisir de toute question relative à l'environnement. Au-delà, des réseaux parlementaires sensibilisés à l'environnement et à la nature existent dans certains États. Regroupant tous les parlementaires intéressés par ces questions, ils deviennent de véritables groupes de pression, agissant au niveau des pouvoirs publics. Je pense donc que tous les parlementaires doivent davantage s'affirmer dans le cadre de groupes de pression. Cela leur permet de créer des liens beaucoup plus forts avec la société civile.

Le Sénégal a suivi cette logique. Je pense que ces groupes de pression doivent inscrire le développement durable au coeur de leurs priorités. Enfin, un tel groupe de pression, composé de parlementaires, devrait exister au niveau mondial.

Janos PASZTOR

Vous avez raison, il faut mettre en place des réseaux susceptibles de constituer, ensuite, des groupes de pression.

Berndt EKHOLM

En Suède, nous insistons beaucoup sur la nécessité de disposer de stratégies nationales concrètes. Peu importe, au fond, la complexité de ces stratégies ou de ces plans. En effet, s'ils existent, il est possible de les suivre et donc de vérifier l'atteinte des objectifs.

Je souhaite en outre porter à la connaissance des participants l'organisme Globe, regroupant, à une échelle mondiale, des parlementaires s'intéressant à la question du développement durable.

En ce qui concerne la coopération avec la société civile, qui vient d'être évoquée, je pense qu'elle est en effet essentielle. Pour notre part, nous sommes entrés dans une telle logique. Nous nous en satisfaisons totalement.

Un parlementaire irlandais

Nous devons encourager la communauté scientifique à présenter aux populations des exemples concrets, des « histoires humaines » susceptibles de les sensibiliser. Au vu de la gravité de la situation, nous ne devons pas hésiter à émouvoir la société civile et ne pas nous cantonner à des explications trop érudites.

Un parlementaire de Bahreïn

Notre stratégie nationale en matière d'environnement a fait l'objet d'un document : ce document, dont la production a été financée par une entreprise privée, a été envoyé à tous les foyers de Bahreïn. C'est bien par la succession de petites actions de ce type que nous parviendrons à sensibiliser les populations.

Le Président du Parlement de Palau

A Palau, nous avons décidé d'adopter des exigences particulièrement strictes en matière environnementale, directement inspirées des dispositifs occidentaux. Comme je l'ai déjà rappelé tout à l'heure, l'impact du changement climatique sur une île aussi petite que la nôtre est particulièrement visible. Notre île, de très faible altitude, a vu le niveau de la mer monter.

Cela emporte évidemment des conséquences sur le tourisme, la densité des zones littorales, le marché immobilier... En Europe, vous ne constatez pas encore de tels phénomènes, qui touchent essentiellement les petites îles du Pacifique Sud. Nous devons demander aux États-unis d'agir pour que nous ne perdions pas nos terres.

Janos PASZTOR

Vous avez raison, ce sont les petites îles comme la vôtre qui pâtissent le plus du changement climatique.

Le rapporteur

Je souhaite, à l'issue de cette table ronde, vous présenter un rapide résumé des opinions qui ont été émises.

- Il est nécessaire de créer des groupes régionaux de parlementaires.

- Il faut mettre un terme à l'écart existant entre questions environnementales et problématique économique.

John SPENCER

Cette séance a renforcé ma conviction qu'il faut donner un rôle plus important aux parlementaires, et mettre fin aux obstacles qui se dressent devant eux. Malheureusement, les Gouvernements et les pouvoirs publics ont parfois peur des parlementaires, de leurs opinions, ce qui est regrettable. Je pense que nous avons deux alliés dans ce cadre : nos enfants, d'une part, nos grands-parents, d'autre part. En effet, ce sont nos enfants qui nous incitent à faire plus pour l'environnement. C'est pour eux que nous nous battons. Enfin, ce sont nos grands-parents qui sont la mémoire de notre environnement. Ils doivent donc être mis à contribution.